Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Lettre A

Henri Plon (p. 1-69).
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A

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Aaron, magicien du Bas-Empire, qui vivait du temps de l’empereur Manuel Comnène. On conte qu’il possédait les Clavicules de Salomon, qu’au moyen de ce livre il avait à ses ordres des légions de démons et se mêlait de nécromancie. On lui fit crever les yeux ; après quoi on lui coupa la langue, et ce ne fut pas là une victime de quelque fanatisme ; on le condamna comme bandit : on avait trouvé chez lui, entre autres abominations, un cadavre qui avait les pieds enchaînés et le cœur percé d’un clou. (Nicétas, Annales, liv. IV.)

Abaddon, le destructeur ; chef des démons de la septième hiérarchie. C’est quelquefois le nom de l’ange exterminateur dans l’Apocalypse.

Abadie (Jeannette d’), jeune fille du village de Siboure ou Siboro, en Gascogne. Delancre, dans son Tableau de l’inconstance des démons, raconte que Jeannette d’Abadie, dormant, un dimanche (le 13 septembre 1609), pendant la sainte messe, un démon profita du moment et l’emporta au sabbat (quoiqu’on ne fît le sabbat ni le dimanche ni aux heures des saints offices, temps où les démons ont peu de joie). Elle trouva au sabbat grande compagnie, vit que celui qui présidait avait à la tête deux visages, comme Janus, remarqua des crapauds royalement vêtus et très-honorés, et fut scandalisée des débauches auxquelles se livraient les sorcières. Du reste, elle ne fit rien de criminel et fut remise à son logis par le même moyen de transport qui l’avait emmenée. Elle se réveilla alors et ramassa une petite relique que le diable avait eu la précaution d’ôter de son cou avant de l’emporter. Il paraît que le bon curé à qui elle confessa son aventure lui fit comprendre en vain les dangers qu’elle avait courus ; elle retourna au sabbat et y fit sans scrupule tout ce que Satan ou ses représentants lui conseillaient de faire, se disant à elle-même qu’en faisant le mal prescrit elle n’en était pas responsable. Voy. Sabbat, Balcoin, Loups-garous, etc.

Abalam, prince de l’enfer, très-peu connu. Il est de la suite de Paymon. Voy. ce mot.

Abano. Voy. Pierre d’Apone.

Abaris, grand prêtre d’Apollon, qui lui donna une flèche d’or sur laquelle il chevauchait par les airs avec la rapidité d’un oiseau ; ce qui a fait que les Grecs l’ont appelé l’Aérobate. Il fut, dit-on, maître de Pythagore, qui lui vola sa flèche, dans laquelle on doit voir quelque allégorie. On ajoute qu’Abaris prédisait l’avenir, qu’il apaisait les orages, qu’il chassait la peste ; on conte même que, par ses sciences magiques, il avait trouvé l’art de vivre sans boire ni manger. Avec les os de Pélops, il fabriqua une figure de Minerve, qu’il vendit aux Troyens comme un talisman descendu du ciel : c’est le Palladium qui avait la réputation de rendre imprenable la ville où il se trouvait.

Abdeel (Abraham), appelé communément Schoenewald (Beauchamp), prédicateur à Custrin, dans la Marche de Brandebourg, fit imprimer à Than, en 1572, le Livre de la parole cachetée, dans lequel il a fait des calculs pour trouver qui est l’Antechrist et à quelle époque il doit paraître. Cette méthode consiste à prendre au hasard un passage du prophète Daniel ou de l’Apocalypse, et à donner à chaque lettre, depuis a jusqu’à z, sa valeur numérique. A vaut 1, b vaut 2, c vaut 3, et ainsi de suite. Abdeel déclare que l’Antéchrist est le pape Léon X. Il trouve de la même manière les noms des trois anges par lesquels l’Antéchrist doit être découvert. Ces trois anges sont Huss, Luther et un certain Noé qui nous est inconnu.

Abd-el-Azys, astrologue arabe du dixième siècle, plus connu en Europe sous le nom d’Alchabitius. Son Traité d’astrologie judiciaire a été traduit en latin par Jean de Séville (Hispalensis). L’édition la plus recherchée de ce livre : Alchabitius, cum commento, est celle de Venise, 1503, in-4o  de 140 pages.

Abdias de Babylone. On attribue à un écrivain de ce nom l’histoire du combat merveilleux que livra saint Pierre à Simon le Magicien. Le livre d’Abdias a été traduit par Julius Africanus, sous ce titre : Historia certaminis apostolici, 1566, in-8o .

Abeilard. Il est plus célèbre aujourd’hui par ses tragiques désordres que par ses ouvrages théologiques, dont les dangereuses erreurs lui attirèrent justement les censures de saint Bernard. Il mourut en 1142. Vingt ans après, Héloïse ayant été ensevelie dans la même tombe, on conte (mais c’est un pur conte) qu’à son approche la cendre froide d’Abeilard se réchauffa tout à coup, et qu’il étendit les bras pour recevoir celle qui avait été sa femme. Leurs restes étaient au Paraclet, dans une précieuse tombe gothique que l’on a transportée à Paris en 1799, et qui est présentement au cimetière du Père-Lachaise.

Abeilles. C’était l’opinion de quelques démonographes que si une sorcière, avant d’être prise, avait mangé la reine d’un essaim d’abeilles, ce cordial lui donnait la force de supporter la torture sans confesser[1] ; mais cette découverte n’a pas fait principe.

Dans certains cantons de la Bretagne, on prétend que les abeilles sont sensibles aux plaisirs comme aux peines de leurs maîtres, et qu’elles ne réussissent point, si on néglige de leur faire part des événements qui intéressent la maison. Ceux qui ont cette croyance ne manquent pas d’attacher à leurs ruches un morceau d’étoffe noire lorsqu’il y a une mort chez eux, et un morceau d’étoffe rouge lorsqu’il y a un mariage ou toute autre fête[2].

Les Circassiens, dans leur religion mêlée de christianisme, de mahométisme et d’idolâtrie, honorent la Mère de Dieu sous le nom de Mérième ou de Melissa. Ils la regardent comme la patronne des abeilles, dont elle sauva la race en conservant dans sa manche une de leurs reines, un jour que le tonnerre menaçait d’exterminer tous les insectes. Les revenus que les Circassiens tirent de leurs ruches expliquent leur reconnaissance pour le bienfait qui les leur a préservées.

Solin a écrit que les abeilles ne peuvent pas vivre en Irlande ; que celles qu’on y amène y meurent tout à coup ; et que si l’on porte de la terre de cette île dans un autre pays et qu’on la répande autour des ruches, les abeilles sont forcées d’abandonner la place, parce que cette terre leur est mortelle. On lit la même chose dans les Origines d’Isidore. « Faut-il examiner, ajoute le père Lebrun dans son Histoire critique des superstitions, d’où peut venir cette malignité de la terre d’Irlande ? Non, car il suffit de dire que c’est une bourde, et qu’on trouve en Irlande beaucoup d’abeilles. »

Abel, fils d’Adam. Des docteurs musulmans disent qu’il avait quarante-huit pieds de haut. Il se peut qu’ils aient raisonné d’après un tertre long de cinquante-cinq pieds, que l’on montre auprès de Damas, et qu’on nomme la tombe d’Abel.

Les rabbins ont écrit beaucoup sur Abel. Ils lui attribuent un livre d’astrologie judiciaire qui lui aurait été révélé et qu’il aurait renfermé dans une pierre. Après le déluge, Hermès-Trismégiste le trouva : il y apprit l’art de faire des talismans sous l’influence des constellations. Ce livre est intitulé Liber de virtutibus planetarum et de omnibus rerum mundanarum virtutibus. Voy. le traité De essentiis essentiarum, qu’on décore faussement du nom de saint Thomas d’Aquin, pars IV, cap. ii. Voy. les Légendes de l’Ancien Testament.

Abel de la Rue, dit le Casseur, savetier et mauvais coquin qui fut arrêté, en 1582, à Coulommiers, et brûlé comme sorcier, magicien, noueur d’aiguillettes, et principalement comme voleur et meurtrier. Voy. Ligatures.

Aben-Ezra. Voy. Macha-Halla.

Aben-Ragel, astrologue arabe, né à Cordoue au commencement du cinquième siècle. Il a laissé un livre d’horoscopes, d’après l’inspection des étoiles, traduit en latin sous le titre De judiciis seu fatis stellarum, Venise, 1485 ; rare. On dit que ses prédictions, quand il en faisait, se distinguaient par une certitude très-estimable.

Abigor, démon d’un ordre supérieur, grand-duc dans la monarchie infernale. Soixante légions marchent sous ses ordres[3]. Il se montre sous la figure d’un beau cavalier portant la lance,

 
Abigor
Abigor
 
l’étendard ou le sceptre ; il répond habilement sur tout ce qui concerne les secrets de la guerre, sait l’avenir, et enseigne aux chefs les moyens de se faire aimer des soldats.

Abîme, et plus correctement abysme. C’est le nom qui est donné, dans l’Écriture sainte, 1o à l’enfer, 2o au chaos ténébreux qui précéda la création.

Abominations. Voy. Sabbat.

Abou-Ryhan, autrement appelé Mohammed-ben-Ahmed, astrologue arabe, mort en 330. Il passe pour avoir possédé à un haut degré le don de prédire les choses futures. On lui doit une introduction à l’astrologie judiciaire.

Aboyeurs. Il y a en Bretagne et dans quelques autres contrées des hommes et des femmes affectés d’un certain délire inexpliqué, pendant lequel ils aboient absolument comme des chiens. Quelques-uns parlent à travers leurs aboiements, d’autres aboient et ne parlent plus. Le docteur Champouillon a essayé d’expliquer ce terrible phénomène, en l’attribuant aux suites d’une frayeur violente. Il cite un jeune conscrit de la classe de 1853 qui, appelé devant le conseil de révision, réclama son exemption pour cause d’aboiement ; il racontait qu’étant mousse à bord d’un caboteur, il avait été précipité à la mer par un coup de vent ; l’épouvante l’avait frappé d’un tel anéantissement, qu’il n’en était sorti que pour subir des suffocations qui l’empêchèrent de parler pendant une semaine. Lorsque la parole lui revint, elle s’entrecoupa à chaque phrase de cris véhéments, remplacés bientôt par des aboiements saccadés qui duraient quelques secondes. Ces spasmes furent reconnus bien réels, et le conscrit fut réformé.

Mais il y a en Bretagne des aboyeuses qui apportent en naissant cette affreuse infirmité implantée dans quelques familles. Les bonnes gens voient là un maléfice, et nous ne savons comment expliquer une si triste misère.

Nous pourrions citer un homme qui, dans l’agonie qui précéda sa mort, agonie qui dura trois jours, ne s’exprima que par des aboiements et ne put retrouver d’autre langage. Mais celui-là, dans la profanation des églises, en 1793, avait enfermé son chien dans un tabernacle.

Nous connaissons aussi une famille où le père et la mère devenus muets, nous ne savons par quelle cause ni pour quelle cause, n’ont que des enfants muets. Ainsi les frères et les sœurs ne poussent que des cris inarticulés et ne s’entendent pas autrement pour les plus urgents besoins de la vie.

Abracadabra. Avec ce mot d’enchantement, qui est très-célèbre, on faisait, surtout en Perse et en Syrie, une figure magique à laquelle on attribuait le don de charmer diverses maladies et de guérir particulièrement la fièvre. Il ne fallait que porter autour du cou cette sorte de philactère, écrit dans la disposition triangulaire que voici :

ABRACADABRA
ABRACADABR
ABRACADAB
ABRACADA
ABRACAD
ABRACA
ABRAC
ABRA
ABR
AB
A

Abracax ou Abraxas, l’un des dieux de quelques théogonies asiatiques, du nom duquel on a tiré le philactère abracadabra. Abracax est représenté sur des amulettes avec une tête de coq, des pieds de dragon et un fouet à la main. Les démonographes ont fait de lui un démon, qui a la tête d’un roi et pour pieds des serpents. Les basilidiens, hérétiques du deuxième siècle, voyaient en lui leur dieu suprême. Comme ils trouvaient que les sept lettres grecques dont ils formaient son nom faisaient en grec le nombre 365, qui est celui des jours de l’année, ils plaçaient sous ses ordres plusieurs génies qui présidaient aux trois cent soixante-cinq cieux, et auxquels ils attribuaient trois cent soixante-cinq vertus, une pour chaque jour. Les basilidiens disaient encore que Jésus-Christ, Notre-Seigneur,

 
Abracax ou Abraxas
Abracax ou Abraxas
 
n’était qu’un fantôme bienveillant envoyé sur la terre par Abracax. Ils s’écartaient de la doctrine de leur chef.

Abraham. Tout le monde connaît l’histoire de ce saint patriarche, écrite dans les livres sacrés. Les rabbins et les musulmans l’ont chargée de beaucoup de traditions curieuses, que le lecteur peut trouver dans les Légendes de l’Ancien Testament.

Les Orientaux voient dans Abraham un savant astrologue et un homme puissant en prodiges. Suidas et Isidore lui attribuent l’invention de l’alphabet, qui est dû à Adam. Voy. Cadmus.

Les rabbins font Abraham auteur d’un livre De l’explication des songes, livre que Joseph, disent-ils, avait étudié avant d’être vendu par ses frères. On met aussi sur son compte un ouvrage intitulé Jetzirah, ou la Création, que plusieurs disent écrit par le rabbin Akiba. Voy. ce nom. Les Arabes possèdent ce livre cabalistique, qui traite de l’origine du monde : ils l’appellent le Sepher. On dit que Vossius, qui raisonnait tout de travers là-dessus, s’étonnait de ne pas le voir dans les livres canoniques. Postel l’a traduit en latin : on l’a imprimé à Paris en 1552 ; à Mantoue en 1562, avec cinq commentaires ; à Amsterdam en 1642. On y trouve de la magie et de l’astrologie. — « C’est un ouvrage cabalistique très-ancien et très-célèbre, dit le docteur Rossi. Quelques-uns le croient composé par un écrivain antérieur au Talmud, dans lequel il en est fait mention. » — Le titre de l’ouvrage porte le nom d’Abraham ; mais ajoutons qu’il y a aussi des opinions qui le croient écrit par Adam lui-même.

Abrahel, démon succube, connu par une aventure que raconte Nicolas Remy dans sa Démonolâtrie, et que voici ; — En l’année 1581, dans le village de Dalhem, au pays de Limbourg, un méchant pâtre, nommé Pierron, conçut un amour violent pour une jeune fille de son voisinage. Or cet homme mauvais était marié ; il avait même de sa femme un petit garçon. Un jour qu’il était occupé de la criminelle pensée de son amour, la jeune fille qu’il convoitait lui apparut dans la campagne:c’était un démon sous sa figure. Pierron lui découvrit sa passion ; la prétendue jeune fille promit d’y répondre, s’il se livrait à elle et s’il jurait de lui obéir en toutes choses. Le pâtre ne refusa rien, et son abominable amour fut accueilli. — Peu de temps après, la jeune fille, ou le démon qui se faisait appeler Abrahel par son adorateur, lui demanda, comme gage d’attachement, qu’il lui sacrifiât son fils. Le pâtre reçut une pomme qu’il devait faire manger à l’enfant;

 
Abrahel
Abrahel
 
l’enfant, ayant mordu dans la pomme, tomba mort aussitôt. Le désespoir de la mère fit tant d’effet sur Pierron, qu’il courut à la recherche d’Abrahel pour en obtenir réconfort. Le démon promit de rendre la vie à l’enfant, si le père voulait lui demander cette grâce a genoux, en lui rendant le culte d’adoration qui n’est dû qu’à Dieu. Le pâtre se mit à genoux, adora, et aussitôt l’enfant rouvrit les yeux. On le frictionna, on le réchauffa ; il recommença à marcher et à parler. Il était le-même qu’auparavant, mais plus maigre, plus hâve, plus défait, les yeux battus et enfoncés, les mouvements plus pesants. Au bout d’un an, le démon qui l’animait l’abandonna avec un grand bruit, et l’enfant tomba à la renverse…

Cette histoire décousue et Incomplète se termine par ces mots, dans la narration de Nicolas Remy : « Le corps de l’enfant, d’une puanteur insupportable, fut tiré avec un croc hors de la maison de son père et enterré dans un champ. » — Il n’est plus question du démon succube ni du pâtre.

Absalon. On a écrit bien des choses supposées à propos de sa chevelure. Lepelletier, dans sa dissertation sur la grandeur de l’arche de Noé, dit que toutes les fois qu’on coupait les cheveux d’Absalon, on lui en ôtait trente onces…

Abstinence. On prétend, comme nous l’avons dit, qu’Abaris ne mangeait pas et que les magiciens habiles peuvent s’abstenir de manger et de boire.

Sans parler des jeûnes merveilleux dont il est fait mention dans la vie de quelques saints, Marie Pelet de Laval, femme du Hainaut, vécut trente-deux mois (du 6 novembre 1754 au 25 juin 1757) sans recevoir aucune nourriture, ni solide ni liquide. Anne Harley, d’Orival, près de Rouen, se soutint vingt-six ans en buvant seulement un peu de lait qu’elle vomissait quelques moments après l’avoir avalé. On citerait d’autres exemples.

Dans les idées des Orientaux, les génies ne se nourrissent que de fumées odorantes qui ne produisent point de déjections.

Abundia, fée bienfaisante honorée en Thuringe comme protectrice. Elle visite les maisons, où elle mange et boit avec ses compagnes ce qu’on leur a préparé, mais sans que rien des mets soit diminué par elles. Elles soignent les étables ; et on a des marques de leur passage par des gouttes de leurs cierges de cire jaune, qu’on remarque sur la peau des animaux domestiques.

Acatriel, l’un des trois princes des bons démons, dans la cabale juive, qui admet des démons de deux natures.

Acca-Laurentia, appelée aussi Lupa : la Louve, à cause de ses mœurs débordées, était mise au rang des divinités dans l’ancienne Rome, pour avoir adopté et nourri Romulus.

Accidents. Beaucoup d’accidents peu ordinaires, mais naturels, auraient passé autrefois pour des sortilèges. Voici ce qu’on lisait dans un journal de 1841 : — « Mademoiselle Adèle Mercier (des environs de Saint-Gilles), occupée il y a peu de jours à arracher dans un champ des feuilles de mûrier, fut piquée au bas du cou par une grosse mouche qui, selon toute probabilité, venait de sucer le cadavre putréfié de quelque animal, et qui déposa dans l’incision faite par son dard une ou quelques gouttelettes du suc morbifique dont elle s’était repue. La douleur, d’abord extrêmement vive, devint insupportable. Il fallut que mademoiselle Mercier fut reconduite chez elle et qu’elle se mît au lit. La partie piquée s’enfla prodigieusement en peu de temps : l’enflure gagna. Atteinte d’une fièvre algide qui acquit le caractère le plus violent, malgré tous les soins qui lui furent prodigués, et quoique sa piqûre eût été cautérisée et alcalisée, mademoiselle Mercier mourut le lendemain, dans les souffrances les plus atroces. »

Le Journal du Rhône racontait ce qui suit en juin 1841 : — « Un jeune paysan des environs de Bourgoin, qui voulait prendre un repas de cerises, commit l’imprudence, lundi dernier, de monter sur un cerisier que les chenilles avaient quitté après en avoir dévoré toutes les feuilles. Il y avait vingt minutes qu’il satisfaisait son caprice ou son appétit, lorsque presque instantanément il se sentit atteint d’une violente inflammation à la gorge. Le malheureux descendit en poussant péniblement ce cri : J’étouffe ! J’étouffe ! Une demi-heure après il était mort. On suppose que les chenilles déposent dans cette saison sur les cerises qu’elles touchent une substance que l’œil distingué à peine ; mais qui n’en est pas moins un poison. C’est donc s’exposer que de manger ces fruits sans avoir pris la sage précaution de les laver. »

Accouchements. Chez les Grecs, les charmeuses retardaient un accouchement, un jour, une semaine et davantage ; en se tenant les jambes croisées et les doigts entrelacés à la porte de la pauvre femme prise des douleurs de l’enfantement. Voy. Aétite.

Accouchements prodigieux. Torquemada, dans son Examéron, cité une femme qui mit au monde sept enfants à la fois, à Médina del Campo ; une autre femme de Salamanque qui en eut neuf d’une seule couche. Jean Pic de la Mirandole assure qu’une femme de son pays eut vingt enfants en deux grossesses, neuf dans l’une et onze dans l’autre. Voy. Irmentrude, Trazégnies, Imagination. Torquemada parle aussi d’une Italienne qui mit au monde soixante-dix enfants à la fois ; puis il rapporte, comme à l’abri du doute, ce que conte Albert le Grand, qu’une Allemande enfanta, d’une seule couche, cent cinquante enfants, tous enveloppés dans une pellicule, grands comme le petit doigt et très-bien formés[4].

Acham, démon que l’on conjure le jeudi. Voy. Conjuration.

Achamoth, esprit, ange ou éon du sexe féminin, mère de Jéhovah, dans les stupides doctrines des valentiniens.

Acharai-Rioho, chef des enfers chez les Yakouts. Voy. Mang-taar.

Achéron, fleuve de douleur dont les eaux sont amères ; l’un des fleuves de l’enfer des païens. Dans des relations du moyen âge, l’Achéron est un monstre ; dans la mythologie grecque, Achéron était un homme qui donna à boire aux Titans altérés ; Jupiter l’en châtia en le changeant en fleuve et le jetant dans les enfers.

Achérusie, marais d’Égypte près d’Héliopolis. Les morts le traversaient dans une barque, lorsqu’ils avaient été jugés dignes des honneurs de la sépulture. Les ombres des morts enterrés dans le cimetière voisin erraient, disait-on, sur les bords de ce marais, que quelques géographes appellent un lac.

Achguaya-Xerac. Voy. Guayotta.

Achmet, devin arabe du neuvième siècle, auteur d’un livre De l’interprétation des songes, suivant les doctrines de l’Orient. Le texte original de ce livre est perdu ; mais Rigault en a fait imprimer la traduction grecque et latine à la suite de l’Onéirocritique d’Artémidore ; Paris, 1603, in-4o.

Aconce (Jacques), curé apostat du diocèse de Trente, qui, poussé par la débauche, embrassa le protestantisme en 1557, et passa en Angles-terre. La reine Élisabeth lui fit une pension. Aussi il ne manqua pas de rappeler diva Elisabetha, en lui dédiant son livre Des stratagèmes de Satan[5]. Mais nous ne mentionnons ce livre ici qu’à cause de son titre ; ce n’est pas un ouvrage de démonomanie, c’est une vile et détestable diatribe contre le Catholicisme.

Adalbert, hérétique qui fit du bruit dans les Gaules au huitième siècle ; il est regardé par les uns comme un habile faiseur de miracles et par les autres comme un grand cabaliste. Il distribuait les rognures de ses ongles et de ses cheveux, disant que c’étaient de puissants préservatifs ; il contait qu’un ange, venu des extrémités du monde, lui avait apporté des reliques et des amulettes d’une sainteté prodigieuse. On dit même qu’il se consacra des autels à lui-même et qu’il se fit adorer. Il prétendait savoir l’avenir, lire dans la pensée et connaître la confession des pécheurs rien qu’en les regardant. Il montrait impudemment une lettre de Notre-Seigneur Jésus-Christ, disant qu’elle lui avait été apportée par saint Michel. Baluze, dans son appendice aux Capitulaires des rois francs, a publié cette lettre, dont voici le litre : — « Au nom de Dieu : Ici commence la lettre de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui est tombée à Jérusalem, et qui a été trouvée par l’archange saint Michel, lue et copiée par la main : d’un prêtre nommé Jean, qui l’a envoyée à la ville de Jérémie à un autre prêtre, nommé Talasius ; et Talasius l’a envoyée en Arabie à un autre prêtre, nommé Léoban ; et Léoban l’a envoyée à la ville de Betsamie, où elle a été reçue par le prêtre Macarius, qui l’a renvoyée à la montagne du saint archange Michel ; et par le moyen d’un ange, la lettre est arrivée à la ville de Rome, au sépulcre de saint Pierre, où sont les clefs du royaume des deux ; et les douze prêtres qui sont à Rome ont fait des veilles de trois jours, avec des jeûnes et des prières, jour et nuit, » etc. El Adalbert enseignait à ses disciples une prière qui débutait ainsi :

« Seigneur, Dieu tout-puissant, père de Notre-Seigneur Jésus-Christ, Alpha et Oméga, qui êtes sur le trône souverain, sur les Chérubins et les Séraphins, sur l’ange Uriel, l’ange Raguel, l’ange Cabuel, l’ange Michel, sur l’ange Inias, l’ange Tabuas, l’ange Simiel et l’ange Sabaoth, je vous prie de m’accorder ce que je vais vous dire. »

C’était, comme on voit, très-ingénieux. Dans un fragment conservé des mémoires qu’il avait écrits sur sa vie, il raconte que sa mère, étant enceinte de lui, crut voir sortir de son côté droit un veau ; ce qui était, dit-il, le pronostic des grâces dont il fut comblé en naissant par le ministère d’un ange. On arrêta le cours des extravagances de cet insensé en l’enfermant dans une prison, où il mourut.

Adam, le premier homme. Sa chute devant les suggestions de Satan est un dogme de la religion chrétienne.

Les Orientaux font d’Adam un géant démesuré, haut d’une lieue ; ils en font aussi un magicien, un cabaliste ; les rabbins en font de plus un alchimiste et un écrivain. On a supposé un testament de lui ; et enfin les musulmans regrettent toujours dix traités merveilleux que Dieu lui avait dictés[6].

Adam (l’abbé). Il y eut un temps où l’on voyait le diable en toutes choses et partout, et peut-être n’avait-on pas tort. Mais il nous semble qu’on le voyait trop matériellement. Le bon et naïf Césaire d’Heisterbach a fait un livre d’histoires prodigieuses où le diable est la machine universelle ; il se montre sans cesse et sous diverses figurés palpables. C’était surtout à l’époque où l’on s’occupait en France de l’extinction des templiers. Alors un certain abbé Adam, qui

 
Adam (l’abbé)
Adam (l’abbé)
 
gouvernait l’abbaye des Vaux-de-Gernay, au diocèse de Paris, avait l’esprit tellement frappé de l’idée que le diable le guettait, qu’il croyait le reconnaître à chaque pas sous des formes que sans doute le diable n’a pas souvent imaginé de prendre. — Un jour qu’il revenait de visiter une de ses petites métairies, accompagné d’un serviteur aussi crédule que lui, l’abbé Adam racontait comment le diable l’avait harcelé dans son voyage. L’esprit malin s’était montré sous la figure d’un arbre blanc de frimas, qui semblait venir à lui. — C’est singulier, dit un de ses amis ; n’étiez-vous pas la proie de quelque illusion causée par la course de votre cheval ? — Non, c’était Satan. Mon cheval s’en effraya ; l’arbre pourtant passa au galop et disparut derrière nous, il laissait une certaine odeur qui pouvait bien être du soufre. — Odeur de brouillard, marmotta l’autre. — Le diable reparut, et cette fois c’était un chevalier noir qui s’avançait vers nous pareillement. — Éloigne-toi, lui criai-je d’une voix étouffée. Pourquoi m’attaques-tu ? Il passa encore, sans avoir l’air de s’occuper de nous. Mais il revint une troisième fois, ayant la forme d’un homme grandit pauvre, avec un cou long et maigre. Je fermai les yeux et ne le revis que quelques instants plus tard sous le capuchon d’un petit moine. Je crois qu’il avait sous son froc une rondache dont il me menaçait. — Mais, interrompit l’autre, ces apparitions ne pouvaient-elles pas être des voyageurs naturels ? — Comme si on ne savait pas s’y reconnaître ! comme si nous ne l’avions pas vu derechef sous la figure d’un pourceau, puis sous celle d’un âne, puis sous celle d’un tonneau qui roulait dans la campagne, puis enfin sous la forme d’une roue de charrette qui, si je ne me trompe, me renversa, sans toutefois me faire aucun mal ! — Après tant d’assauts, la route s’était achevée sans autres mal-encontres[7]. Voy. Hallucinations.

Adamantius, médecin juif, qui se fit chrétien à Constantinople, sous le règne de Constance, à qui il dédia ses deux livres sur la Physiognomonie ou l’art de juger les hommes par leur figure. Cet ouvrage, plein de contradictions et de rêveries, a été imprimé dans quelques collections, notamment dans les Scriptores physiognomoniæ veteres, grec et latin, cura J.-G.-F. Franzii ; Altembourg, 1780, in-8o.

Adamiens ou Adamites. Hérétiques du second siècle, dans l’espèce des basilidiens. Ils se mettaient nus et proclamaient la promiscuité des femmes. Clément d’Alexandrie dit qu’ils se vantaient d’avoir des livres secrets de Zoroastre, ce qui a fait conjecturer à plusieurs qu’ils étaient livrés à la magie.

Adelgreiff (Jean-Albert), fils naturel d’un pasteur aller mand, qui lui apprit le latin, le grec, l’hébreu et’plusieurs langues modernes. Il de-, vint fou et crut avoir des visions. Il disait que sept anges l’avaient chargé de représenter Dieu sur la terre et de châtier les souverains avec des verges de fer. Il signait ses décrets : « Jean Albrecht Àdelgreiff, Kihi Schmalk hitmandis, archi-souverain pontife, roiduroyau-me des ci eux, juge des vivants et des morts, Dieu et père, dans la gloire duquel le Christ viendra, au dernier jour, Seigneur de tous les seigneurs et Roi de tous les rois. » Il causa beaucoup de troubles par ses extravagances, qui trouvèrent, comme toujours, des partisans. On lui attribua des prodiges, et il fut brûle à Kœnigsberg comme magicien, hérétique et perturbateur, le 11 octobre 1636. Il avait prédit avec assurance qu’il ressusciterait le troisième jour, ce qui ne s’est pas vérifié.

Adeline, ou plutôt Edeline. Voy. ce mot.

Adelites, devins espagnols qui se vantaient de prédire par le vol ou le chant des oiseaux ce qui devait arriver en bien ou en mal.

 
Adelites
Adelites
Adelites.
 

Adelung (Jean-Christophe), littérateur allemand, mort à Dresde en 1806. Il a laissé un ouvrage intitulé Histoire des folies humaines, ou Biographie des plus célèbres nécromanciens, alchimistes, devins, etc. ; sept parties ; Leipzig. 1785-1789.

Adeptes, nom que prennent les alchimistes qui prétendent avoir trouvé la pierre, philosophale et l’élixir de vie. Ils disent qu’il y a toujours onze adeptes dans ce monde ; et, comme l’élixir les rend immortels, lorsqu’un nouvel alchimiste a découvert le secret du grand œuvre, il faut qu’un des onze anciens lui fasse place et se retire dans un autre des mondes élémentaires.

Adès, ou Hadès, roi de l’enfer. Ce mot est pris, souvent, chez quelques poètes anciens, pour l’enfer même.

Adhab-Algab, purgatoire des musulmans, où les méchants sont tourmentés par les anges noirs Munkir et Nékir.

Adjuration, formule d’exorcisme par laquelle on commande, au nom de Dieu, à l’esprit malin de dire ou de faire ce qu’on exige de lui.

Adonis, démon brûlé. Selon les démonologues, il remplit quelques fonctions dans les incendies[8]. Des savants croient que c’est le même que le démon Thamuz des Hébreux.

Adoration du crapaud. Les sorciers n’adorent pas seulement le diable dans leurs hideuses assemblées. Tout aspirant qui est reçu là sorcier après certaines épreuves reçoit un crapaud, avec l’ordre de l’adorer ; ce qu’il fait en lui don-liant un baiser en signe de révérence. Voy. Sabbat.

Adramelech, grand chancelier des enfers, intendant de la garde-robe du souverain des démons,

 
Adramelech
Adramelech
 
président du haut conseil des diables. Il était adoré à Sépharvaïm, ville des Assyriens, qui brûlaient des enfants sur ses autels. Les rabbins disent qu’il se montre sous la figure d’un mulet, et quelquefois sous celle d’un paon.

Adranos, idole sicilienne, qui a donné son nom à la ville d’Adranum, aujourd’hui Aderno. On élevait dans son temple mille chiens, dits sacrés, qui avaient pour mission principale de reconduire chez eux les hommes ivres.

Adrien. Se trouvant en-Mésie, à la tête d’une légion auxiliaire, vers la fin du règne de Domitien, Adrien consulta un devin (car il croyait aux devins et à l’astrologie judiciaire), lequel lui prédit qu’il parviendrait un jour à l’empire. Ce n’était pas, dit-on, la première fois qu’on lui faisait cette promesse. Trajan, qui était son tuteur, l’adopta, et il régna en effet.

On lui attribue en Écosse la construction de la muraille du Diable.

Fulgose, qui croyait beaucoup à l’astrologie, rapporte, comme une preuve de la solidité de cette science, que l’empereur Adrien, très-habile astrologue, écrivait tous les ans, le premier jour du premier mois, ce qui lui devait arriver pendant l’année, et que, l’an qu’il mourut, il n’écrivit que jusqu’au mois de sa mort, donnant à connaître par son silence qu’il prévoyait son trépas. Mais ce livre de l’empereur Adrien, qu’on ne montra qu’après sa mort, n’était qu’un journal.

Aéromancie, art de prédire les choses futures par l’examen des variations et des phénomènes de l’air. C’est en vertu de cette divination qu’une comète annonce la mort d’un grand homme. Cependant ces présages extraordinaires :peuvent rentrer dans la tératoscopie.

François de la Torre-Blanca dit que l’aéromancie est l’art de dire la bonne aventure en faisant apparaître des spectres dans les airs, ou en représentant, avec l’aide des démons, les événements futurs dans un nuage, comme dans une lanterne magique. « Quant aux éclairs et au tonnerre, ajoute-t-il, ceci regarde les augures ; et les aspects du ciel et des planètes appartiennent à l’astrologie. »

Aétite, espèce de pierre qu’on nomme aussi pierre d’aigle, selon la signification de ce mot grec, parce qu’on prétend qu’elle se trouve dans les nids des aigles. Matthiole dit que les aigles vont chercher, cette pierre jusqu’aux Indes, pour faire éclore plus facilement leurs petits. De là vient qu’on attribue à l’aétite la propriété de faciliter l’accouchement lorsqu’elle est attachée au-dessus du genou d’une femme, ou de le retarder si on la lui met à la poitrine. — Dioscoride dit qu’on s’en servait autrefois pour découvrir les voleurs. Après qu’on l’avait broyée, on en mêlait la cendre dans du pain fait exprès ; on en faisait manger à tous ceux qui étaient soupçonnés. On croyait que, si peu d’aétite qu’il y eût dans ce pain, le voleur ne pouvait avaler le morceau. Les Grecs modernes emploient encore cette vieille superstition, qu’ils rehaussent de quelques paroles mystérieuses. Voy. Alphitomancie.

Ævoli (César), auteur ou collecteur d’un livre peu remarquable, intitulé Opuscules sur les attributs divins et sur le pouvoir qui a été donné aux démons de connaître les choses secrètes et de tenter les hommes. Opuscula de divinis attributis et de modo et potestate quam dæmones habent intelligendi et passiones animi excitandi, in-4o ; Venise, 1589.

Agaberte. « Aucuns parlent, dit Torquemada, d’une certaine femme nommée Agaberte, fille d’un géant qui s’appelait Vagnoste, demeurant aux pays septentrionaux, laquelle était grande enchanteresse ; et la force de ses enchantements était si variée qu’on ne la voyait presque jamais en sa propre figure. Quelquefois c’était une petite vieille fort ridée, qui semblait ne se pouvoir remuer, ou bien une pauvre femme malade et sans forces ; d’autres fois elle était si haute qu’elle paraissait toucher les nues avec sa tête. Ainsi elle prenait telle forme qu’elle voulait aussi aisément que les auteurs écrivent d’Urgande la Méconnue. Et, d’après ce qu’elle faisait, le monde avait opinion qu’en un instant elle pouvait obscurcir le soleil, la lune et les étoiles, aplanir les monts, renverser les montagnes, arracher les arbres, dessécher les rivières, et faire autres choses pareilles, si aisément qu’elle semblait tenir tous les diables attachés et sujets a ses volontés[9]. »

Agarès, démon, Voy. Aguarès.

Agate, pierre précieuse à laquelle les anciens attribuaient des qualités qu’elle n’a pas, comme de fortifier le cœur, de préserver de la peste et de guérir les morsures du scorpion et de la vipère.

Agathion, démon familier qui ne se montre qu’à midi. Il paraît en forme d’homme ou de bête ; quelquefois il se laisse enfermer dans un talisman, dans une bouteille pu dans un anneau magique[10].

Agathodémon, ou bon démon, adoré des Égyptiens sous la figure d’un serpent à tête humaine. Les Grecs de l’Arcadie donnaient ce nom à Jupiter. Les dragons ou serpents ailés, que les anciens révéraient, s’appelaient agalhodæmones, ou bons génies.

Agla, sigle ou mot cabalistique auquel les rabbins attribuent le pouvoir de chasser l’esprit malin. Ce mot se compose des premières lettres de ces quatre mots hébreux : Athah gabor leolam, Adonaï : « Vous êtes puissant et éternel, Seigneur. » Ce charme n’était pas seulement employé par les Juifs et les cabalistes, quelques chrétiens hérétiques s’en sont armés souvent pour combattre les démons. L’usage en était fréquent au seizième siècle[11], et plusieurs livres magiques en sont pleins, principalement l’Enchridion attribué ridiculement au pape Léon III. Voy. Cabale.

Aglaophotis, sorte d’herbe qui croît dans les marbrières de l’Arabie, et dont les magiciens se servaient pour évoquer les démons. Ils employaient ensuite l’anancitide et la syrrochite, autres ingrédients qui retenaient les démons évoqués aussi longtemps qu’on le voulait. Voy. Baaras.

Agnan, ou Agnian, démon qui tourmente les Américains par des apparitions et des méchancetés. Il se montre surtout au Brésil et chez les

 
Agnan
Agnan
 
Topinamboux. Il paraît sous toutes sortes de formes, de façon que ceux qui veulent le voir peuvent le rencontrer partout.

Agobard, archevêque de Lyon au neuvième siècle. Il a écrit contre les épreuves judiciaires et contre plusieurs superstitions de son époque. On croyait de son temps que les sorciers faisaient les tempêtes, qu’ils étaient maîtres de la grêle et des intempéries. Ainsi, dit le saint évêque, on ôte à Dieu son pouvoir tout-puissant pour le donner à des hommes. Il éclaira donc son diocèse, et il est bon de remarquer ici que c’est toujours l’Église qui a le plus constamment combattu les superstitions. Cependant elle a cru avec raison aux magiciens et aux maléfices, mais jamais à leur omnipotence.

Agraféna-Shiganskaia. L’une des maladies les plus générales sur les côtes nord-est de la Sibérie, surtout parmi les femmes : c’est une extrême délicatesse des nerfs. Cette maladie, appelée mirak dans ce pays, peut être causée par le défaut absolu de toute nourriture végétale ; mais la superstition l’attribue à l’influence d’une magicienne nommée Agraféna-Shiganskaia, qui, bien que morte depuis plusieurs siècles, continue, comme les vampires, à répandre l’effroi parmi les habitants et passe pour s’emparer des malades, — M. de Wrangel, qui rapporte ce fait dans le récit de son expédition au nord-est de la Sibérie, ajoute que parfois on trouve aussi des hommes, qui souffrent du mirak ; mais ce sont des exceptions.

Agrippa (Henri-Corneille), médecin et philosophe, contemporain d’Érasme, l’un des savants hommes de son temps, dont on l’a appelé le Trismégiste ; né à Cologne en 1486, mort en 1535, après une carrière orageuse, chez le receveur général de Grenoble, et non à Lyon ni dans un hôpital, comme quelques-uns l’ont écrit, il avait été lié avec tous les grands personnages et recherché de tous les princes de son époque. Chargé souvent de négociations politiques, il fit de nombreux voyages, que Thevet, dans ses Vies des hommes illustres, attribue à la manie « de faire partout des tours de son métier de magicien ; ce qui le faisait reconnaître et chasser incontinent ».

 
Agrippa.
Agrippa.
Agrippa.
 

Entraîné par ses études philosophiques dans des excentricités où la magie intervenait, comme de nos jours le magnétisme et le spiritisme, il s’est égaré dans la théurgie des néo-platoniciens et s’est posé « héritier de l’école d’Alexandrie[12]. » Il a donc fait réellement de la magie, comme l’en accusent les démonologues, ou du moins il l’a tenté. Il s’est occupé aussi de l’alchimie, sans grand succès probablement, puisqu’il mourut pauvre. Il avait des prétentions à pénétrer l’avenir, et on raconte qu’il promit au connétable de Bourbon des succès contre François Ier, ce qui était peu loyal, car il était alors le médecin de Louise de Savoie. On croit pouvoir établir aussi qu’il avait étudié les arts extranaturels dans ces universités occultes qui existaient au moyen âge.

Sa Philosophie occulte lui attira des persécutions. On y voit, malgré d’habiles détours, les traces évidentes de la théurgie. Aussi il a laissé une certaine réputation parmi les pauvres êtres qui s’occupent, de sciences sécrètes, et on a mis sous son nom de stupides opuscules magiques. On croyait encore sous Louis XIV qu’il n’était pas mort. Voyez sa légende, où il est peut-être trop ménagé, dans les Légendes infernales.

Aguapa, arbré des Indes orientales dont on prétend que l’ombre est-venimeuse. Un homme vêtu qui s’endort sous cet arbre se relève tout enflé, et l’on assure qu’un homme nu crève sans ressource. Les habitants attribuent à la méchanceté du diable ces cruels effets. Voy. Bohon-Hupas.

Aguarès, grand-duc de la partie orientale des enfers. Il se montre sous les traits d’un seigneur à cheval sur un crocodile, l’épervier au poing.

 
Aguarès
Aguarès
 

Aguerre (Pierre d’). Sous Henri IV, dans cette partie des Basses-Pyrénées qu’on appelait le pays de Labour[13], on fit le procès en sorcellerie à un vieux coquin de soixante-treize ans, qui se nommait Pierre d’Aguerrè, et qui causait beaucoup de maux par empoisonnements, dits sortilèges. On avait arrêté, en même temps que lui, Marie d’Aguerre et Jeanne d’Aguerre, ses petites-filles ou ses petites-nièces, avec d’autres jeunes filles et les sorcières qui les avaient menées au sabbat. Jeanne d’Aguerre exposa les turpitudes qui se commettaient dans les grossières orgies où on l’avait conduite ; elle y avait vu le diable en forme de bouc. Marie d’Aguerre déposa que le démon adoré au sabbat s’appelait Léonard, qu’elle l’avait vu en sa forme de bouc sortir du fond d’une grande cruche placée au milieu de l’assemblée, qu’il lui avait paru prodigieusement haut, et qu’à la fin du sabbat il était rentré dans sa cruche.

Deux témoins ayant affirmé qu’ils avaient vu Pierre d’Aguerre remplir au sabbat le personnage de maître des cérémonies, qu’ils avaient vu le diable lui donner un bâton doré avec lequel il rangeait, comme un maître de camp, les personnes et les choses, et qu’ils l’avaient vu à la fin de l’assemblée rendre au diable son bâton de commandement[14], le vieux coquin, qui avait bien d’autres méfaits, fut condamné à mort comme sorcier avéré. Voy. Bouc et Sabbat.

Aigle. L’aigle a toujours été un oiseau de présage chez les anciens. Valère-Maxime rapporte que la vue d’un aigle sauva la vie au roi Déjotarus, qui ne faisait rien sans consulter les oiseaux ; comme il s’y connaissait, il comprit que l’aigle qu’il voyait le détournait d’aller loger dans la maison qu’on lui avait préparée, et qui s’écroula la nuit suivante.

De profonds savants ont dit que l’aigle a des propriétés surprenantes y entre autres celle-ci, que sa cervelle desséchée, mise en poudre, imprégnée de suc de ciguë et, mangée en ragoût, rend si furieux ceux qui se sont permis ce régal, qu’ils s’arrachent les cheveux, et se déchirent jusqu’à ce qu’ils aient complètement achevé leur digestion. Le livre qui contient cette singulière recette[15] donne pour raison de ses effets que « la grande chaleur de la cervelle de l’aigle forme des illusions fantastiques en bouchant les conduits des vapeurs et en remplissant la tête de fumée ». C’est ingénieux et clair.

On donne en alchimie le nom d’aigle à différentes combinaisons savantes. L’aigle céleste est une composition de mercure réduit en essence, qui passe pour un remède universel ; l’aigle de Vénus est une composition de vert-de-gris et de sel ammoniac, qui forment un safran ; l’aigle noir est une composition de cette cadmie vénéneuse qui se nomme cobalt, et que quelques alchimistes regardent comme la matière du mercure philosophique.

Aiguilles. On pratique ainsi, dans quelques localités, une divination par les aiguilles. — On prend vingt-cinq aiguilles neuves ; on les met dans une assiette sur laquelle on verse de l’eau. Celles qui s’affourchent les unes sur les autres annoncent autant d’ennemis.

On conte qu’il est aisé, de faire merveille avec de simples aiguilles à coudre, en leur communiquant une vertu qui enchante. Kornmann écrit ceci[16] : « Quant à ce que les magiciens, et les enchanteurs font avec l’aiguille dont on a cousu le suaire d’un cadavre, aiguille au moyen de laquelle ils peuvent lier les nouveaux mariés, cela ne doit pas s’écrire, de crainte de faire naître la pensée d’un pareil expédient… »

Aiguillette. On appelle nouement de l’aiguillette un charme qui frappe tellement l’imagination de deux époux ignorants ou superstitieux, qu’il s’élève entre eux une sorte d’antipathie dont les accidents sont très-divers. Ce charme est jeté par des malveillants qui passent pour sorciers ou qui le sont. Voy. Ligatures.

Aimant (Magnes), principal producteur de la vertu magnétique ou attractive. — Il y a sur l’aimant quelques erreurs populaires qu’il est bon de passer en revue. On rapporte des choses admirables, dit le docteur Brown[17], d’un certain aimant qui n’attire pas seulement le fer, mais la chair aussi. C’est un aimant très-faible, composé surtout de terre glaise semée d’un petit nombre de lignes magnétiques et ferrées. La terre glaise qui en est la base fait qu’il s’attache aux lèvres, comme l’hématite ou la terre de Lemnos. Les médecins qui joignent cette pierre à l’aétite lui donnent mal à propos la vertu de prévenir les avortements.

On a dit de toute espèce d’aimant que l’ail peut lui enlever sa propriété attractive ; opinion certainement fausse, quoiqu’elle nous ait été transmise par Solin, Pline, Plutarque, Matthiole, etc. Toutes les expériences l’ont démentie. Un fil d’archal rougi, puis éteint dans le jus d’ail, ne laisse pas de conserver sa vertu polaire ; un morceau d’aimant enfoncé dans l’ail aura la même puissance attractive qu’auparavant ; des aiguilles laissées dans l’ail jusqu’à s’y rouiller n’en retiendront pas moins cette force d’attraction. On doit porter le même jugement de cette autre assertion, que le diamant a la vertu d’empêcher l’attraction de l’aimant, Placez un diamant (si vous en avez) entre l’aimant et l’aiguille, vous les verrez se joindre, dussent-ils passer par-dessus la pierre précieuse. Les auteurs que nous combattons ont sûrement pris pour des diamants ce qui n’en était pas.

Mettez sur la même ligne, continue Brown, cette autre merveille contée par certains rabbins, que les cadavres humains sont magnétiques et que, s’ils sont étendus dans un bateau, le bateau tournera jusqu’à ce que la tête du corps mort regarde le septentrion. — François Rubus, qui avait une crédulité très-solide, reçoit comme vrais la plupart de ces faits inexplicables. Mais tout ce qui tient du prodige, il l’attribue au prestige du démon[18], et c’est un moyen facile de sortir d’embarras.

Disons un mot du tombeau de Mahomet. Beaucoup de gens croient qu’il est suspendu, à Médine, entre deux pierres d’aimant placées avec art, l’une au-dessus et l’autre au-dessous ; mais ce tombeau est de pierre comme tous les autres, et bâti sur le pavé du temple. — On lit quelque part, à la vérité, que les mahométans avaient conçu un pareil dessein ; ce qui a donné lieu à la fable que le temps et l’éloignement des lieux ont fait passer pour une vérité, et que l’on a essayé d’accréditer par des exemples. On voit dans Pline que l’architecte Dinochàrès commença de voûter, avec des pierres d’aimant, le temple d’Arsinoé à Alexandrie, afin de suspendre en l’air la statue de cette reine ; il mourut sans avoir exécuté ce projet, qui eût échoué. — Rufin conte quel dans le temple de Sérapis, il y avait un chariot de fer que des pierres d’aimant tenaient suspendu ; que ces pierres ayant été ôtées, le chariot tomba et se brisa. Bède rapporte également, d’après des contes anciens, que le cheval de Bellérophon, qui était de fer, fut suspendu entre deux pierres d’aimant.

C’est sans doute à la qualité minérale de l’aimant qu’il faut attribuer ce qu’assurent quelques-uns, que les blessures faites avec des armes aimantées sont plus dangereuses et plus difficiles à guérir, ce qui est détruit par l’expérience ; les incisions faites par des chirurgiens avec des instruments aimantés ne causent aucun mauvais effet. Rangez dans la même classe l’opinion qui fait de l’aimant un poison, parce que des auteurs le placent dans le catalogue des poisons. Gardas de Huerta, médecin d’un vice-roi espagnol, rapporte au contraire que les rois de Ceylan avaient coutume de se faire servir dans des plats de pierre d’aimant, s’imaginant par là conserver leur vigueur.

On ne peut attribuer qu’à la vertu magnétique ce que dit Ætius, que si un goutteux tient quelque temps dans sa main une pierre d’aimant, il ne se sent plus de douleur, ou que du moins il éprouve un soulagement. C’est à la même vertu qu’il faut l’apporter ce qu’assure Marcellus Empiricus, que l’aimant guérit les maux de tête. Ces effets merveilleux ne sont qu’une extension gratuité de sa vertu attractive, dont tout le monde convient. Les hommes, s’étant aperçus de cette force secrète qui attire les corps magnétiques, lui ont donné encore une attraction, d’un ordre différent, la vertu de tirer la douleur de toutes les parties du corps ; c’est ce qui a fait ériger l’aimant en philtre.

On dit aussi que l’aimant resserre les nœuds de l’amitié paternelle et de l’union conjugale, en même temps qu’il est très-propre aux opérations magiques. Les basilidiens en faisaient des talismans pour chasser les démons. Les fables qui regardent les vertus de cette pierre sont en grand nombre. Dioscoride assure qu’elle est pour les voleurs un utile auxiliaire ; quand ils veulent piller un logis, dit-il, ils allument du feu aux quatre coins, et y jettent des morceaux d’aimant. La fumée qui en résulte est si incommode, que ceux qui habitent la maison sont forcés de l’abandonner. Malgré l’absurdité de cette fable, mille ans après Dioscoride, elle a été adoptée par les écrivains qui ont compilé les prétendus secrets merveilleux d’Albert le Grand.

Mais on ne trouvera plus d’aimant comparable à celui de Laurent Guasius. Cardan affirme que toutes les blessures faites avec des armes frottées de cet aimant ne causaient aucune douleur.

Encore une fable : je ne sais quel écrivain assez grave a dit que l’aimant fermenté dans du sel produisait et formait le petit poisson appelé rémore, lequel possède la vertu d’attirer l’or du puits le plus profond. L’auteur de cette recette savait qu’on ne pourrait jamais le réfuter par l’expérience[19] ; et c’est bien dans ces sortes de choses qu’il ne faut croire que les faits éprouvés.

Aimar. Voy. Baguette divinatoire.

Ajournement. On croyait assez généralement autrefois que, si quelque opprimé, au moment de mourir, prenait Dieu pour juge, et s’il ajournait son oppresseur au tribunal suprême, il se faisait toujours une manifestation du gouvernement temporel de la Providence. Le mot toujours est une témérité, car on ne cite que quelques faits à l’appui de cette opinion. Le roi de Castille Ferdinand IV fut ajourné par deux gentils hommes injustement condamnés, et mourut au bout de trente jours. Énéas Sylvius raconte, et c’est encore un fait constaté, que François Ier, duc de Bretagne, ayant fait assassiner son frère (en 1450), ce prince, en mourant, ajourna son meurtrier devant Dieu, et que le duc expira au jour fixé[20].

Nous ne mentionnerons ici l’ajournement du grand maître des templiers, que l’on a dit avoir cité le pape et le roi au tribunal de Dieu, que pour faire remarquer au lecteur que cet ajournement a été imaginé longtemps après le supplice de ce grand maître. Voy. Templiers.

Akbaba, vautour qui vit mille ans en se nourrissant de cadavres. C’est une croyance turque.

 
Akbaba
Akbaba
 

Akhmin. Ville de la moyenne Thébaïde, qui avait autrefois le renom d’être la demeure des plus grands magiciens[21]. Paul Lucas parle, dans son second voyage[22], du serpent merveilleux d’Akhmin, que les musulmans honorent comme un ange, et que les chrétiens croient être le démon Asmodée. Voy. Haridi.

Akiba, rabbin du premier siècle de notre ère, précurseur de Bar-Cokébas[23]. De simple berger, poussé par l’espoir d’obtenir la main d’une jeune fille dont il était épris, il devint un savant renommé. Les Juifs disent qu’il fut instruit par les esprits élémentaires, qu’il savait conjurer, et qu’il eut, dans ses jours d’éclat, jusqu’à quatre-vingt mille disciples… On croit qu’il est auteur du Jetzirah ou livré de la création, attribué aussi par les uns à Abraham, et par d’autres à Adam même.

Akouan, démon géant, qui, dans les traditions persanes, lutta longtemps contre Roustam, et fut enfin, malgré sa masse énorme, tué par ce héros. — Roustam est en Perse un personnage que l’on ne peut comparer qu’à Roland, chez nous.

Alain de l’Isle (Insulensis). religieux bernardin, évêque d’Auxerre au douzième siècle, autour vrai ou supposé de l’Explication des prophéties de Merlin (Explanationes in prophetias Merlini Angli ; Francfort, 1608, in-8o ). Il composa, dit-on, ce commentaire, en 1170, à l’occasion du grand bruit que faisaient alors lesdites prophéties.

Un autre Alain ou Alanus, qui vivait dans le même siècle, a laissé pour les alchimistes un livre intitulé Dicta de lapide philosophico, in-8o  ; Leyde, 1600.

Alaric, roi des Goths et premier roi du premier royaume d’Italie (car il y en a eu quatre avant nos jours, et aucun n’a pu durer). Olympiodore nous a conservé un récit populaire de son temps, suivant lequel, lorsque Alaric voulut envahir la Sicile, il fut repoussé par une statue mystérieuse qui lui lançait des flammes par l’un de ses pieds et des jets d’eau par l’autre. Il se retira à Cosenza, où il mourut subitement peu de jours après (an 410).

Alary (François), songe-creux, qui a fait imprimer à Rouen, en 1701, la Prophétie du comte Bombaste, chevalier de la Rose-Croix, neveu de Paracelse, publiée en l’année 1609, sur la naissance de Louis le Grand.

Alastor, démon sévère, exécuteur suprême des sentences du monarque infernal. Il fait les fonctions de Némésis. Zoroastre l’appelle le bourreau ; Origène dit que c’est le même qu’Azazel ;

 
Alastor
Alastor
 
d’autres le confondent avec l’ange exterminateur. Les anciens appelaient les génies malfaisants alastores, et Plutarque dit que Cicéron, par haine contre Auguste, avait eu le projet de se tuer auprès du foyer de ce prince pour devenir son alastor.

Albert le Grand, Albert le Teutonique, Albert de Cologne, Albert de Ratisbonne, Albertus Grotus, car on le désigne sous tous ces noms (le véritable était Albert de Groot), savant et pieux dominicain, mis à tort au nombre des magiciens par les démonographes, fut, dit-on, le plus curieux de tous les hommes. Il naquit dans la Souabe, à Lawigen sur le Danube, en 1205. D’un esprit fort grossier dans son jeune âge, il devint, à la suite d’une vision qu’il eut de la sainte Vierge, qu’il servait tendrement et qui lui ouvrit les yeux de l’esprit, l’un des plus grands docteurs de son siècle. Il fut le maître de saint Thomas d’Aquin. Vieux, il retomba dans la médiocrité, comme pour montrer qu’évidemment son mérite et sa science étendue n’étaient qu’un don miraculeux et temporaire. — D’anciens écrivains ont dit, après avoir remarqué la dureté naturelle de sa conception, que d’âne il avait été transmué en philosophe ; puis, ajoutent-ils, de philosophe il redevint âne[24].

Albert le Grand fut évêque de Ratisbonne, et mourut saintement à Cologne, âgé de quatre-vingt-sept ans. Ses ouvrages n’ont été publiés qu’en 1651 ; ils forment vingt et un volumes in-folio. En les parcourant, on admire un savant chrétien ; on ne trouve jamais rien qui ait pu le charger de sorcellerie. Il dit formellement au contraire : « Tous ces contes de démons qu’on voit rôder dans les airs, et de qui on tire le secret des choses futures, sont trop souvent des absurdités ou des fourberies[25]. » — C’est qu’on a mis sous son nom des livres de secrets merveilleux, auxquels il n’a jamais eu plus de part qu’à l’invention du gros canon et du pistolet que lui attribue Matthieu de Luna.

Mayer dit qu’il reçut des disciples de saint Dominique le secret de la pierre philosophale, et qu’il le communiqua à saint Thomas d’Aquin ; qu’il possédait une pierre marquée naturellement d’un serpent, et douée de cette vertu admirable, que si on la mettait dans un lieu fréquenté par des serpents, elle les attirait tous ; qu’il employa, pendant trente ans, toute sa science de magicien et d’astrologue à faire, de métaux bien choisis et sous Inspection des astres, un automate doué de la parole, qui lui servait d’oracle et résolvait toutes les questions qu’on lui proposait : c’est ce qu’on appelle l’androïde d’Albert le Grand ; que cet automate fut anéanti par saint Thomas d’Aquin, qui le brisa à coups de bâton, dans l’idée que c’était un ouvrage ou un agent du diable. On sent que tous ces petits faits sont des contes. On a donné aussi à Virgile, au pape Sylvestre II, à Roger Bacon, de pareils androïdes. Vaucanson a montré que c’était un pur ouvrage de mécanique.

Une des plus célèbres sorcelleries d’Albert le Grand eut lieu à Cologne. Il donnait un banquet dans son cloître à Guillaume II, comte de Hollande et roi des Romains ; c’était dans le cœur de l’hiver ; la salle du festin présenta, à la grande surprise de la cour, la riante parure du printemps ; mais, ajoute-t-on, les fleurs se flétrirent a la fin du repas. À une époque où l’on ne connaissait pas les serres chaudes, l’élégante prévenance du bon et savant religieux dut surprendre. — Ce qu’il appelait lui-même ses opérations magiques n’était ainsi que de la magie blanche.

Finissons en disant que son nom d’Albert le Grand n’est pas un nom de gloire, mais la simple traduction de son nom de famille, Albert de Groot. On lui attribue donc le livre intitulé les Admirables secrets d’Albert le Grand, contenant plusieurs traités sur les vertus des herbes, des pierres précieuses et des animaux, etc., augmentés d’un abrégé curieux de la physionomie et d’un préservatif contre la peste, les fièvres malignes, les poisons et l’infection de l’air, tirés et traduits des anciens manuscrits de l’auteur qui n’avaient pas encore paru, etc., in-18, in-24, in-12. Excepté du bon sens, on trouve de tout dans ce fatras, jusqu’à un traité des fientes qui, « quoique viles et méprisables, sont cependant en estime, si on s’en sert aux usages prescrits (les engrais) ». Le récollecteur de ces secrets débute par une façon de prière ; après quoi il donne la pensée du prince des philosophes, lequel pense que l’homme est ce qu’il y a de meilleur dans le monde, attendu la grande sympathie qu’on découvre entre lui et les signes du ciel, qui est au-dessus de nous, et par conséquent nous est supérieur.

Le livre Ier traite principalement, et de la manière la plus inconvenante, de l’influence des planètes sur la naissance des enfants, du merveilleux effet des cheveux de la femme, des monstres, de la façon de connaître si une femme enceinte porte un garçon ou une fille, du venin que les vieilles femmes ont dans les yeux, surtout si elles y ont de la chassie, etc. Toutes ces rêveries grossières sont fastidieuses, absurdes et fort sales. On voit au livre II les vertus de certaines pierres, de certains animaux, et les merveilles du monde, des planètes et des astres. — Le livre III présente l’excellent traité des fientes, de singulières idées sur les urines, les punaises, les vieux souliers et la pourriture ; des secrets pour amollir le fer, pour manier les métaux, pour dorer l’étain et pour nettoyer la batterie de cuisine. Le livre IV est un traité de physiognomonie, avec des remarques savantes, des observations sur les jours heureux et malheureux, des préservatifs contre la fièvre, des purgatifs, des recettes de cataplasmes et autres choses de même nature. Nous rapporterons en leur lieu ce qu’il y a de curieux dans ces extravagances, et le lecteur, comme nous, trouvera étonnant qu’on vende chaque année par milliers d’exemplaires les secrets d’Albert le Grand aux habitants malavisés des campagnes.

Le solide Trésor du Petit Albert, ou secrets merveilleux de la magie naturelle et cabalistique, traduit exactement sur l’original latin intitulé Alberti Parvi Lucii liber de mirabilibus naturæ arcanis, enrichi de figures mystérieuses et la manière de les faire (ce sont des figures de talismans). Lyon, chez les héritiers de Beringos fratres, à l’enseigne d’Agrippa. In-18, 6516 (année cabalistique). — Albert le Grand est également étranger à cet autre recueil d’absurdités, plus dangereux que le premier, quoiqu’on n’y trouve pas, comme les paysans se l’imaginent, les moyens d’évoquer le diable. On y voit la manière de nouer et de dénouer l’aiguillette, la composition de divers philtres, l’art de savoir en songe qui on épousera, des secrets pour faire danser, pour multiplier les pigeons, pour gagner au jeu, pour rétablir le vin gâté, pour faire des talismans cabalistiques, découvrir les trésors, se servir de la main de gloire, composer l’eau ardente et le feu grégeois, la jarretière et le bâton du voyageur, l’anneau d’invisibilité, la poudre de sympathie, l’or artificiel, et enfin des remèdes contre les maladies, et des gardes pour les troupeaux. Voy. ces divers articles.

Albert d’Alby, auteur de l’Oracle parfait. Voy. Cartomancie, à la fin.

Albert de Saint-Jacques, moine du dix-septième siècle, qui publia un livre intitulé Lumure aux vivants par l’expérience des morts, ou diverses apparitions des âmes du purgatoire en notre siècle. In-8o , Lyon, 1675.

Albigeois, fusion de manichéens très-perfides, dont l’hérésie éclata dans le Languedoc,

 
Albigeois
Albigeois
 
et eut pour centre Albi. Ils admettaient deux principes, disant que Dieu avait produit de lui-même Lucifer, qui était ainsi son fils aîné ; que Lucifer, fils de Dieu, s’était révolté contre lui ; qu’il avait entraîné dans sa rébellion une partie des anges ; qu’il s’était vu alors chassé du ciel avec ses complices ; qu’il avait, dans son exil, créé ce monde que nous habitons, où il régnait et où tout allait mal. Ils ajoutaient que Dieu, pour rétablir l’ordre, avait produit un second fils, qui était Jésus-Christ.

Ce singulier dogme se présentait avec des variétés, suivant les différentes sectes. Presque toutes niaient la résurrection de la chair, l’enfer et le purgatoire, disant que nos âmes n’étaient que des démons logés dans nos corps en châtiment de leurs crimes. — Les Albigeois avaient pris, dès la fin du douzième siècle, une effrayante consistance. Ils tuaient les prêtres et les moines, brûlaient les croix, détruisaient les églises. De si odieux excès marquaient leur passage, que, les remontrances et les prédications étant vaines, il fallut faire contre eux une croisade, dont Simon de Montfort fut le héros. On a dénaturé et faussé par les plus insignes mensonges l’histoire de cette guerre sainte[26] ; on a oublié que, si les Albigeois eussent triomphé, l’Europe retombait dans la plus affreuse barbarie. Il est vrai que leurs défenseurs sont les protestants, héritiers d’un grand nombre de leurs erreurs, et les philosophes, amateurs assez souvent de leurs désordres.

Albigerius. Les démonographes disent que les possédés, par le moyen du diable, tombent quelquefois dans des extases pendant lesquelles leur âme voyage loin du corps, et fait à son retour des révélations de choses secrètes. C’est ainsi, comme dit Leloyer, que les corybantes devinaient et prophétisaient, phénomènes que le somnambulisme expliquerait peut-être. Saint Augustin parle d’un Carthaginois, nommé Albigerius, qui savait par ce moyen tout ce qui se faisait hors de chez lui. Chose plus étrange, a la suite de ses extases, il révélait souvent ce qu’un autre songeait dans le plus secret de sa pensée.

Saint Augustin cite un autre frénétique qui, dans une grande fièvre, étant possédé du mauvais esprit, sans extase, mais bien éveillé, rapportait fidèlement tout ce qui se faisait loin de lui. Lorsque le prêtre qui le soignait était à six lieues de la maison, le diable, qui parlait par la bouche du malade, disait aux personnes présentes en quel lieu était ce prêtre à l’heure où il parlait et ce qu’il faisait, etc. On prétend que Cagliostro en faisait autant. Ces choses-là sont surprenantes. Mais l’âme immortelle, suivant la remarque d’Aristote, peut quelquefois voyager sans le corps[27].

Albinos. Nom que les Portugais ont donné à des hommes d’une blancheur extrême, qui sont ordinairement enfants de nègres. Les noirs les regardent comme des monstres, et les savants ne savent à quoi attribuer cette blancheur. Les albinos sont pâles comme des spectres ; leurs yeux, faibles et languissants pendant le jour, sont brillants à la clarté de la lune. Les noirs, qui donnent aux démons la peau blanche, regardent les albinos comme des enfants du démon. Ils croient qu’ils peuvent les combattre aisément pendant le jour, mais que la nuit les albinos sont les plus forts et se vengent. Dans le royaume de Loango, les albinos passent pour des démons champêtres et obtiennent quelque considération à ce titre.

Vossius dit qu’il y a dans la Guinée des peuplades d’albinos. Mais comment ces peuplades subsisteraient-elles, s’il est vrai que ces infortunés ne se reproduisent point ?

Il paraît que les anciens connaissaient les albinos. « On assure, dit Pline, qu’il existe en Albanie des individus qui naissent avec des cheveux blancs, des yeux de perdrix, et ne voient clair que pendant la nuit. » Il ne dit pas que ce soit une nation, mais quelques sujets affectés d’une maladie particulière. « Plusieurs animaux ont aussi leurs albinos, ajoute M. Salgues ; les naturalistes ont observé des corbeaux blancs, des merles blancs, des taupes blanches ; leurs yeux sont rouges, leur peau est plus pale et leur organisation plus faible[28]. »

Alborak. Voy. Borak.

Albumazar, astrologue du neuvième siècle, né dans le Khorassan, connu par son traité astrologique intitulé Milliers d’années, où il affirme que le monde n’a pu être créé que quand les sept planètes se sont trouvées en conjonction dans le premier degré du Bélier, et que la fin du monde aura lieu quand ces sept planètes, qui sont aujourd’hui (en 1862) au nombre de cinquante et une, se rassembleront dans le dernier dégrèves Poissons. On a traduit en latin et imprimé d’Albumazar le Tractatus florum astrologiæ, in-4o, Augsbourg, 1488. On peut voir dans Casiri, Biblioth. arab. hispan., t. Ier, p. 351, le catalogue de ses ouvrages.

Albunée, sibylle célèbre. On voit encore son temple à Tivoli, en ruines, il est vrai. Voy. Sibylles.

Alchabitius. Voy. Abd-el-Azys.

Alchimie. L’alchimie ou chimie par excellence, qui s’appelle aussi philosophie hermétique, est cette partie éminente de la chimie qui s’occupe de l’art de transmuer les métaux. Son résultat, en expectative, est la pierre philosophale. Voy. Pierre philosophale et Gobineau.

Alchindus, que Wierus[29] met au nombre des magiciens, mais que Delrio[30] se contente de ranger parmi les écrivains superstitieux, était un médecin arabe du onzième siècle qui employait comme remède les paroles charmées et les combinaisons de chiffres. Des démonologues l’ont déclaré suppôt du diable, à cause de son livre intitulé Théorie des arts magiques, qu’ils n’ont point lu. Jean Pic de la Mirándole dit qu’il ne connaît que trois hommes qui se soient occupés de la magie naturelle et permise : Alchindus, Roger Bacon et Guillaume de Paris. Alchindus était simplement un peu physicien dans des temps d’ignorance. À son nom arabe Alcendi, qu’on a latinisé, quelques-uns ajoutent le prénom de Jacob ; on croit qu’il était mahométan. — On lui reproche d’avoir écrit des absurdités. Par exemple, il pensait expliquer les songes en disant qu’ils sont l’ouvrage des esprits élémentaire qui se montrent à nous dans le sommeil et nous représentent diverses actions fantastiques, comme des acteurs qui jouent la comédie devant le public ; ce qui n’est peut-être pas si bête.

Alcoran. Voy. Koran.

Alcyon. Une vieille opinion, qui subsiste encore chez les habitants des côtes, c’est que l’alcyon ou martin-pêcheur est une girouette naturelle, et

 
Alcyon
Alcyon
 
que, suspendu par le bec, il désigne le côté d’où vient le vent, en tournant sa poitrine vers ce point de l’horizon. Ce qui a mis cette croyance en crédit parmi le peuple, c’est l’observation qu’on a faite que l’alcyon semble étudier les vents et les deviner lorsqu’il établit son nid sur les îlots, vers le solstice d’hiver. Mais cette prudence est-elle dans l’alcyon une prévoyance qui lui soit particulière ? N’est-ce pas simplement un instinct de la nature qui veille à la conservation de cette espèce ? « Bien des choses arrivent, dit Brown, parce que le premier moteur l’a ainsi arrêté, et la nature les exécute par des voies qui nous sont inconnues. »

C’est encore une ancienne coutume de conserver les alcyons dans des coffres, avec l’idée qu’ils préservent des vers les étoffes de laine. On n’eut peut-être pas d’autre but en les pendant au plafond des chambres. « Je crois même, ajoute Brown, qu’en les suspendant par le bec on n’a pas suivi la méthode des anciens, qui les suspendaient par le dos, afin que le bec marquât les vents. Car c’est ainsi que Kirker a décrit l’hirondelle de mer. » Disons aussi qu’autrefois, en conservant cet oiseau, on croyait que ses plumes se renouvelaient comme s’il eut été vivant, et c’est ce qu’Albert le Grand espéra inutilement dans ses expériences[31].

Outre les dons de prédire le vent et de chasser les vers, on attribue encore à l’alcyon la précieuse qualité d’enrichir son possesseur, d’entretenir l’union dans les familles et de communiquer la beauté aux femmes qui portent ses plumes. Les Tartares et les Ostiaks ont une très-grande vénération pour cet oiseau. Ils recherchent ses plumes avec empressement, les jettent dans un grand vase d’eau, gardent avec soin celles qui surnagent, persuadés qu’il suffit de loucher quelqu’un avec ces plumes pour s’en faire aimer. Quand un Ostiak est assez heureux pour posséder un alcyon, il en conserve le bec, les pattes et la peau, qu’il met dans une bourse, et, tant qu’il porte ce trésor, il se croit à l’abri de tout malheur[32]. C’est pour lui un talisman comme les fétiches des nègres. Voy. Âme damnée.

Aldon. Voy. Granson.

Alectorienne (Pierre). Voy. Coq.

Alectryomancie ou Alectromancie. Divination par le moyen du coq, usitée chez les anciens.

 
Coq
Coq
 
Voici quelle était leur méthode : — On traçait sur le sable un cercle que l’on divisait en vingt-quatre espaces égaux. On écrivait dans chacun de ces espaces une lettre de l’alphabet ; on mettait sur chaque lettre un grain d’orge ou de blé ; on plaçait ensuite au milieu du cercle un coq dressé à ce manège ; on observait sur quelles lettres il enlevait le grain ; on en suivait l’ordre, et ces lettres rassemblées formaient un mot quu donnait la solution de ce que l’on cherchait à savoir. Des devins, parmi lesquels on cite Jamblique, voulant connaître le successeur de l’empereur Valens, employèrent l’alectryomancie ; le coq tira les lettres Théod… Valens, instruit de cette particularité, fit mourir plusieurs des curieux qui s’en étaient occupés, et se défit même, s’il faut en croire Zonaras, de tous les hommes considérables dont le nom commençait par les lettres fatales. Mais, malgré ses efforts, son sceptre passa à Théodose le Grand. — Cette prédiction a dû être faite après coup[33].

Ammien-Marcellin raconte la chose autrement. Il dit que sous l’empire de Valens on comptait parmi ceux qui s’occupaient de magie beaucoup de gens de qualité et quelques philosophes. Curieux de savoir quel serait le sort de l’empereur régnant, ils s’assemblèrent la nuit dans une des maisons affectées à leurs cérémonies : ils commencèrent par dresser un trépied de racines et de rameaux de laurier, qu’ils consacrèrent par d’horribles imprécations ; sur ce trépied ils placèrent un bassin formé de différents métaux, et ils rangèrent autour, à distances égales, toutes les lettres de l’alphabet. Alors le mystagogue le plus savant de la compagnie s’avança, enveloppé d’un long voile, la tête rasée, tenant à la main des feuilles de verveine, et faisant à grands cris d’effroyables invocations qu’il accompagnait de convulsions. Ensuite, s’arrêtant tout à coup devant le bassin magique, il y resta immobile, tenant un anneau suspendu par un fil. C’était de la dactylomancie. À peine il achevait de prononcer les paroles du sortilège, qu’on vit le trépied s’ébranler, l’anneau se remuer, et frapper tantôt une lettre, tantôt une autre. À mesure que ces lettres étaient ainsi frappées, elles allaient s’arranger d’elles-mêmes, à côté l’une de l’autre, sur une table où elles composèrent des vers héroïques qui étonnèrent toute l’assemblée.

Valens, informé de cette opération, et n’aimant pas qu’on interrogeât les enfers sur sa destinée, punit les grands et les philosophes qui avaient assisté à cet acte de sorcellerie : il étendit même la proscription sur tous les philosophes et tous les magiciens de Rome. Il en péril une multitude ; et les grands, dégoûtés d’un art qui les exposait à des supplices, abandonnèrent la magie à la populace et aux vieilles, qui ne là firent plus servir qu’à de petites intrigues et à des maléfices subalternes. Voy. Coq, Mariage, etc.

Alès (Alexandre), ami de Mélanchthon, né en 1500 à Édimbourg. Il raconte que, dans sa jeunesse, étant monté sur le sommet d’une très-haute montagne, il fit un faux pas et roula dans un précipice. Comme il était près de s’y engloutir, il se sentit transporter en un autre lieu, sans savoir par qui ni comment, et se retrouva sain et sauf, exempt de contusions et de blessures. Quelques-uns attribuèrent ce prodige aux amulettes qu’il portait au cou, selon l’usage des enfants de ce temps-là. Pour lui, il l’attribue à la foi et aux prières de ses parents, qui n’étaient pas hérétiques.

Alessandro Alessandri, en latin Alexander ab Alexandro, — jurisconsulte napolitain, mort en 1523. Il a publié un recueil rare de dissertations sûr les choses merveilleuses. Il y parle de prodiges arrivés récemment en Italie, de songes vérifiés, d’apparitions et de fantômes qu’il dit avoir vus lui-même. Par la suite, il a fondu ces dissertations dans son livre Genialium dierum, où il raconte toutes sortes de faits prodigieux. Voy. Possessions et Spectres, et les Légendes des esprits et démons.

Aleuromancie, divination qui se pratiquait avec de la farine. On mettait des billets roulés dans un tas de farine ; on les remuait neuf fois confusément. On partageait ensuite la masse aux différents curieux, et chacun se faisait un thème selon les billets qui lui étaient échus. Chez les païens, Apollon était appelé Aleuromantis, parce qu’il présidait à cette divination. Il en reste quelques vestiges dans certaines localités, où l’on emploie le son au lieu de farine. C’est une amélioration.

Alexandre le Grand, roi de Macédoine, etc. Il a été le sujet de légendes prodigieuses chez les Orientaux, qui ont sur lui des contes immenses. Ils l’appellent Iskender. Les démonographes disent qu’Aristote lui enseigna la magie ; les cabalistes lui attribuent un livre sur les propriétés des éléments ; les rabbins écrivent qu’il eut un songé qui l’empêcha de maltraiter les Juifs, lorsqu’il voulut entrer en conquérant dans Jérusalem.

 
Alexandre le Grand
Alexandre le Grand
 

La figure d’Alexandre le Grand, gravée en manière de talisman sous certaines influences, passait autrefois pour un excellent préservatif. Dans la famille des Macriens, qui usurpèrent l’empire du temps de Valérien, les hommes portaient toujours sur eux la figure d’Alexandre ; les femmes en ornaient leur coiffure, leurs bracelets, leurs anneaux. Trebellius Pollio dit que cette figure est d’un grand secours dans toutes les circonstances de la vie, si on la porte en or ou en argent… Le peuple d’Antioche pratiquait cette superstition, que saint Jean Chrysostome eut beaucoup de peine à détruire[34].

Alexandre de Paphlagonie, imposteur et charlatan du genre d’Apollonius de Tyane, né au deuxième siècle, en Paphlagonie, dans le bourg d’Abonotique. Ses pauvres parents n’ayant pu lui donner aucune éducation, il profita, pour se pousser dans le monde, de quelques dons qu’il tenait de la nature. Il avait le teint net, l’œil vif, la voix claire, la taille belle, peu de barbe et peu de cheveux, mais un air gracieux et doux. Il s’attacha, presque enfant, à une sorte de magicien qui débitait des philtres pour produire l’affection ou la haine, découvrir les trésors, obtenir les successions, perdre ses ennemis, et autres résultats de ce genre. Cet homme, ayant reconnu dans Alexandre un esprit adroit, l’initia à ses secrets. Après la mort du vieux jongleur, Alexandre se lia avec un certain Cocconas, homme malin, et ils parcoururent ensemble divers pays, étudiant l’art de faire des dupes. Ils rencontrèrent une vieille dame riche, que leurs prétendus secrets charmèrent, et qui les fit voyager à ses dépens depuis la Bithynie jusqu’en Macédoine. — Arrivés en ce pays, ils remarquèrent qu’on y élevait de grands serpents, si familiers qu’ils jouaient avec les enfants sans leur faire de mal ; ils en achetèrent un des plus beaux pour les scènes qu’ils se proposaient de jouer. Ils se rendirent à Abonotique, où les esprits étaient grossiers, et là ils cachèrent des lames de cuivre dans un vieux temple d’Apollon qu’on démolissait, Ils avaient écrit dessus qu’Esculape et son père viendraient bientôt s’établir dans la ville.

Ces lames ayant été trouvées, les habitants se hâtèrent de décerner un temple à ces dieux, et ils en creusèrent les fondements. — Cocconas mourut alors de la morsure d’une vipère. Alexandre se hâta de prendre son rôle, et, se déclarant prophète, il se montra avec une longue chevelure, une robe de pourpre rayée de blanc ; il tenait dans sa main une faux, comme on en donne une à Persée, dont il prétendait descendre du côté de sa mère ; il publiait un oracle qui le disait fils de Podalyre, lequel, à la manière des dieux du paganisme, avait épousé sa mère en secret. Il faisait débiter en même temps une prédiction d’une sibylle qui portait que des bords du Pont-Euxin il viendrait un libérateur d’Ausonie.

Dès qu’il se crut convenablement annoncé, il parut dans Abonotique, où il fut accueilli comme un dieu. Pour soutenir sa dignité, il mâchait la racine d’une certaine herbe qui le faisait écumer, ce que le peuple attribuait à l’enthousiasme divin. Il avait préparé une tête habilement fabriquée, dont les traits représentaient la face d’un homme, avec une bouche qui s’ouvrait et se fermait par un fil caché. Avec cette tête et le serpent apprivoisé qu’il avait acheté en Macédoine, et qu’il cachait soigneusement, il prépara un grand prodige. Il se transporta de nuit à l’endroit où l’on creusait les fondements du temple, et déposa dans une fontaine voisine un œuf d’oie où il avait enfermé un petit serpent qui venait de naître. Le lendemain matin, il se rendit sur la place publique, l’air agité, tenant sa faux à la main, et ceint d’une écharpe dorée. Il monta sur un autel élevé, et s’écria que ce lieu était honoré de la présence d’un dieu. À ces mots, le peuple accouru commença à faire des prières, tandis que l’imposteur prononçait dés mots en langue phénicienne, ce qui servait à redoubler l’étonnement général. — Il courut ensuite vers le lieu où il avait caché son œuf, et, entrant dans l’eau, il commença à chanter les louanges d’Apollon et d’Esculape, et à inviter ce dernier à se montrer aux mortels ; puis, enfonçant une coupe dans la fontaine, il en retira l’œuf mystérieux. Le prenant dans sa main, il s’écria : « Peuples, Voici votre Dieu ! » Toute la foule attentive poussa des cris de joie, en voyant Alexandre casser l’œuf et en tirer un petit serpent qui s’entortilla dans ses doigts.

Chacun se répandit en accents de joie ; les uns demandant au dieu la santé, les autres les honneurs ou des richesses. — Enhardi par ce succès, Alexandre fit annoncer le lendemain que le dieu qu’ils avaient vu si petit lit veille avait repris, sa grandeur naturelle.

Il se plaça sur un lit, revêtu de ses habits de prophète, et, tenant dans son sein le serpent qu’il avait apporté de Macédoine, il le laissa voir entortillé autour de son cou et traînant une longue queue ; il en cachait la tête sous son aisselle, et faisait paraître à la place la figure humaine qu’il avait préparée. Le lieu de la scène était faiblement éclairé ; on entrait par une porte et on sortait par une autre ; sans qu’il fût possible, à cause de l’affluence, de s’arrêter longtemps. Ce spectacle dura quelques jours ; il se renouvelait toutes les fois qu’il arrivait quelques étrangers. On fit des images du dieu en cuivre et en argent.

Alexandre, voyant les esprits préparés, annonça que le dieu rendrait des oracles, et qu’on eût à lui écrire des billets cachetés. Alors, s’enfermant dans le sanctuaire du temple qu’on venait de bâtir, il faisait appeler ceux qui avaient donné des billets, et les leur rendait sans qu’ils parussent avoir été ouverts, mais accompagnés de la réponse du dieu. Ces billets avaient été lus avec tant d’adresse qu’il était impossible de s’apercevoir qu’on eût rompu le cachet, Des espions et des émissaires informaient le prophète de tout ce qu’ils pouvaient apprendre, et ils l’aidaient à rendre ses réponses, qui d’ailleurs étaient toujours obscures ou ambiguës, suivant la prudente coutume des oracles. On apportait des présents pour le dieu et pour le prophète.

Voulant nourrir l’admiration par une nouvelle supercherie, Alexandre annonce un jour qu’Esculape répondrait en personne aux questions qu’on lui ferait : cela s’appelait des réponses de la propre bouche du dieu. On opérait cette fraude par le moyen de quelques artères de grues, qui aboutissaient d’un côté à la tête du

dragon postiche, et de l’autre a la bouche d’un homme caché dans une chambre voisine ; — à moins pourtant qu’il n’y eût dans son fait quelque magnétisme. — Les réponses se rendaient en prose ou en vers, mais toujours dans un style si vague, qu’elles prédisaient également le revers où le succès. Ainsi l’empereur Marc-Aurèle, faisant la guerre aux Germains, lui demanda un oracle. On dit même qu’en 174 il fit venir Alexandre à Rome, le regardant comme le dispensateur de l’immortalité. L’oracle sollicité disait qu’il fallait, après les cérémonies prescrites, jeter deux lions vivants dans le Danube, et qu’ainsi l’on aurait l’assurance d’une paix prochaine, précédée d’une victoire éclatante. On exécuta la prescription. Mais les deux lions traversèrent le fleuve à la nage, les barbares les tuèrent, et mirent ensuite l’armée de l’empereur en déroute ; à quoi le prophète répliqua qu’il avait annoncé la victoire, mais qu’il n’avait pas désigné le vainqueur.

Une autre fois, un illustre personnage fit demander au dieu quel précepteur il devait donner à son fils ; il lui fut répondu : — Pythagore et Homère. L’enfant mourut quelque temps après. — L’oracle annonçait la chose, dit le père, en donnant au pauvre enfant deux précepteurs morts depuis longtemps. S’il eût vécu, on l’eût instruit avec les ouvrages de Pythagore et d’Homère, et l’oracle aurait encore eu raison.

Quelquefois le prophète dédaignait d’ouvrir les billets, lorsqu’il se croyait instruit de la demande passes agents ; il s’exposait à de singulières erreurs. Un jour il donna un remède pour le mal de côté, en réponse à une lettre qui lui demandait quelle était la patrie d’Homère. On ne démasqua point cet imposteur, que l’accueil de Marc-Aurèle avait entouré de vénération. Il avait prédit qu’il mourrait à cent cinquante ans, d’un coup de foudre, comme Esculape : il mourut dans sa soixante-dixième année, d’un ulcère à la jambe, ce qui n’empêcha pas qu’après sa mort il eût, comme un demi-dieu, des statues et des sacrifices.

Alexandre de Tralles, médecin, né à Tralles, dans l’Asie Mineure, au sixième siècle. On dit qu’il était très-savant ; ses ouvrages prouvent au moins qu’il était très-crédule. Il conseillait à ses malades les amulettes et les paroles charmées. Il assure, dans sa Médecine pratique[35], que la figure d’Hercule étouffant le lion de la forêt de Némée, gravée sur une pierre et enchâssée dans un anneau, est un excellent remède contre la colique. Il prétend aussi qu’on guérit parfaitement la goutte, la pierre et les lièvres par des philactères et des charmes. Cela montre au moins qu’il ne savait pas les guérir autrement.

Alexandre III, roi d’Écosse. Il épousa en 1285 Yolette, fille du comte de Dreux. Le soir de la solennité du mariage, on vit entrer à la fin du bal dans la salle où la cour était assemblée un spectre décharné qui se mit à danser, suivi d’une ombre voilée. Les gambades du

 
Alexandre III
Alexandre III
 
spectre troublèrent les assistants ; les fêtes furent suspendues, et des habiles déclarèrent que cette apparition annonçait la mort prochaine du roi. En effet, la même année, dans une partie de chasse, Alexandre, montant, un cheval mal dressé, fut jeté hors de selle et mourut de la chute[36].

Alexandre VI, élu pape en 1492 ; pontife qui a été jugé sur un misérable pamphlet laissé par un chanoine laïque, son ennemi[37]. Quelques sots écrivains affirment qu’il avait à ses ordres un démon familier, qui passa ensuite aux ordres de César Borgia.

Alfader, dieu très-important dans la théogonie Scandinave. Avant de créer le ciel et la terre, il était prince des géants. Les âmes, des bons doivent vivre avec lui dans le Simle ou le Wingolff ; mais les méchants passent aux mains d’Héla, qui les envoie au Niflheim, la région des nuages inférieurs au neuvième monde. L’Edda lui donne divers noms : Nikar (le sourcilleux), Svidrer (l’exterminateur), Svider (l’incendiaire), Oske (celui qui choisit les morts), etc. — Le nom d’Alfader a été donné aussi à Odin.

Alfares, génies Scandinaves. Les bons sont appelés lios ou lumineux, les méchants docks ou noirs.

Alfridarie, espèce de science qui tient de l’astrologie et qui attribue successivement quelque influence sur la vie aux diverses planètes, chacune régnant à son tour un certain nombre d’années. Voy. Planètes.

Alfs, demi-lutins en Angleterre et dans le Nord. — Voy. Elfes.

Algol. Des astrologues arabes ont donné ce nom au diable.

Aliorumnas, sorcières qui, bannies par Fé-

 
Aliorumnas
Aliorumnas
 
limer, roi des Goths, avaient dans les déserts contracté des mariages avec les démons et furent mères des Huns, des Avares et des Hongrois.

Alice de Télieux, nonne du monastère de Saint-Pierre de Lyon, qui s’échappa de son couvent, au commencement du seizième siècle, en un temps où cette maison avait besoin de réforme, mena mauvaise vie et mourut misérablement, toutefois dans le repentir. Son âme revint après sa mort et se manifesta à la manière de ce qu’on appelle aujourd’hui les esprits frappeurs. Cette histoire a été écrite par Adrien de Montalembert, aumônier de François Ier[38].

Alkalalaï, cris d’allégresse des Kamtschadales ; ils le répètent trois fois à la fêté des balais, en l’honneur de leurs trois grands dieux, Filiat-Chout-Chi, le père ; Touïta, son fils, et Gaëlch, son petit-fils. La fête des balais consiste, chez ces peuples sales, à balayer avec du bouleau le foyer de leurs cabanes.

Aliette. Voy. Etteila.

Allan-Kardec. Voy. Kardec.

Alléluia, mot hébreu qui signifie louange à Dieu. Les bonnes gens disent encore dans plusieurs provinces qu’on fait pleurer la sainte Vierge lorsqu’on chante alléluia pendant le carême[39].

Il y avait à Chartres une singulière coutume. À l’époque où l’on en cesse le chant, l’Alléluia était personnifié et représenté par une toupie qu’un enfant de chœur jetait au milieu de l’église et poussait dans la sacristie avec un fouet. Cela s’appelait l’Alléluia fouetté.

On appelle trèfle de l’Alléluia mie plante qui donne, vers le temps de Pâques, une petite fleur blanche étoilée. Elle passe pour un spécifique contre les philtres.

Allix. Voici un de ces traits qui accusent l’ignorance et la légèreté des anciens juges de parlement. — Allix, mathématicien, mécanicien et musicien, vivait à Aix en Provence, vers le milieu du dix-septième siècle ; il fit un squelette qui, par un mécanisme caché, jouait de la guitare. Bonnet, dans son Histoire de la musique, page 82, rapporte l’histoire tragique de ce pauvre savant. Il mettait au cou de son squelette une guitare accordée à l’unisson d’une autre qu’il tenait lui-même dans ses mains, et plaçait les doigts de l’automate sur le manche ; puis, par un temps calme et serein, les fenêtres et la porte étant ouvertes, il s’installait dans un coin de sa chambre et jouait sur sa guitare des passages que le squelette répétait sur la sienne. Il y a lieu de croire que l’instrument résonnait à la manière des harpes éoliennes, et que le mécanisme qui faisait mouvoir les doigts du squelette n’était pour rien dans la production des sons. (Nous citons M. Fétis[40] sans l’approuver, et nous le renvoyons aux automates musiciens de Vaucanson, qui n’étaient pas des harpes éoliennes). — Quoi qu’il en soit, poursuit le biographe, ce concert étrange causa de la rumeur parmi la population superstitieuse de la ville d’Aix ; Allix fut accusé de magie, et le parlement lit instruire son procès. Jugé par la chambre de la Tournelle, il ne put faire comprendre que l’effet merveilleux de son automate n’était que la résolution d’un problème mécanique. L’arrêt du Parlement le condamna à être pendu et brûlé en place publique, avec le squelette complice de ses sortilèges ; la sentence fut exécutée en 1664. »

Almanach. Nos ancêtres traçaient le cours des lunes pour toute l’année sur un petit morceau de bois, carré qu’ils appelaient al-mon-agt (observation de toutes les lunes) : telles sont, selon quelques auteurs, l’origine des almanachs et l’étymologie de leur nom.

D’autres se réclament des Arabes, chez qui al-manack veut dire le mémorial.

Les Chinois passent pour les plus anciens faiseurs d’almanachs. Nous n’avons que douze constellations ; ils en ont vingt-huit. Toutefois leurs almanachs ressemblent à ceux de Matthieu Laensberg par les prédictions et les secrets dont ils sont farcis[41].

Bayle raconte l’anecdote suivante, pour faire voir qu’il se rencontre des hasards puérils qui éblouissent les petits esprits et donnent un certain crédit à l’astrologie. Guillaume Marcel, professeur de rhétorique au collège de Lisieux, avait composé en latin l’éloge du maréchal de Gassion, mort d’un coup de mousquet au siège de Lens. Il était près de le réciter en public, quand on représenta au recteur de F université que le maréchal était mort dans la religion prétendue réformée, et que son oraison funèbre ne pouvait être prononcée, dans une université catholique. Le recteur convoqua une assemblée ou il fut résolu, à la pluralité des voix, que l’observation était juste, Marcel ne put donc prononcer son panégyrique ; et les partisans de l’astrologie triomphèrent en faisant remarquer à tout le monde que, dans l’almanach de Pierre Larrivey pour cette même année 1648, entre autres prédictions, il se trouvait écrit en gros caractères : LATIN PERDU !

Almanach du diable, contenant des prédictions très-curieuses pour les années 1737 et 1738 ; aux Enfers, in-24. Cette plaisanterie contre les jansénistes était l’ouvrage d’un certain Quesnel, joyeux quincaillier de Dijon, affublé d’un nom que le fameux appelant a tant attristé. Elle est devenue rare, attendu qu’elle fut supprimée pour quelques prédictions trop hardies. Nous ne la citons qu’à cause de son titre. Les jansénistes y répondirent par un lourd et stupide pamphlet dirigé contre les jésuites et supprimé également. Il était intitulé Almanach de Dieu, dédié à M. Carré de Montgeron, pour l’année 1738, in-24 ; au Ciel…

Almoganenses, nom que les Espagnols donnent à certains peuples inconnus qui, par le vol et le chant des oiseaux, par la rencontre des bêtes sauvages et par divers autres moyens, devinaient tout ce qui devait arriver. « Ils conservent avec soin, dit Laurent Valla, des livres qui traitent de cette espèce de science ; ils y trouvent des règles pour toutes sortes de pronostics. Leurs devins sont divisés en deux classes : finie de chefs ou de maîtres, et l’autre de disciples ou d’aspirants. » — On leur attribue aussi l’art d’indiquer non-seulement par où ont passé les chevaux et les autres bêtes de somme égarées, mais encore le chemin qu’auront pris une ou plusieurs personnes ; ce qui est très-utile pour la poursuite des voleurs. Les écrivains qui parlent des Almoganenses ne disent ni dans quelle province ni dans quel temps ont vécu ces utiles devins.

Almuchefi, miroir merveilleux. Voy. Bacon.

Almulus (Salomon), auteur d’une explication des songes en hébreu, in-8o. Amsterdam, 1642.

Alocer, puissant démon, grand-duc aux enfers ; il se montre velu en chevalier, monté sur un cheval énorme ; sa figure rappelle les traits

 
Alocer
Alocer
 
du lion ; il a le teint enflammé, les yeux ardents ; il parle avec gravité ; il enseigne les secrets de l’astronomie et des arts libéraux ; il domine trente-six légions.

Alogricus. Voy. Alruy.

Alomancie, divination par le sel, dont les procédés sont peu connus. C’est en raison de l’alomancie qu’on suppose qu’une salière renversée est d’un mauvais présage.

Alopécie, sorte de charme par lequel on fascine ceux à qui l’on veut nuire. Quelques auteurs donnent le nom d’alopécie à l’art de nouer l’aiguillette. Voy. Ligatures.

Aloros. C’est le nom que les Chaldéens don-

 
Aloros
Aloros
 
naient à leur premier roi ; et, selon leurs traditions, il avait reçu le sceptre de la main de Dieu même en personne.

Alouette. Voy. Casso.

Alp. C’est le nom que les Allemands donnent au cauchemar.

Alpes. Les Alpes, les Pyrénées et tous les pays de montagnes ont été chez nous et ailleurs les principaux foyers de magie. Voy. Sorciers.

Alphitomancie, divination par le pain d’orge. Cette divination importante est très-ancienne. Nos pères, lorsqu’ils voulaient dans plusieurs accusés reconnaître le coupable et obtenir de lui l’aveu de son crime, faisaient manger à chacun des prévenus un rude morceau de pain d’orge. Celui qui l’avalait sans peine était innocent : le criminel se trahissait par une indigestion[42]. C’est même de cet usage, employé dans les épreuves du jugement de Dieu, qu’est venue l’imprécation populaire : « Je veux, si je vous trompe, que ce morceau de pain m’étrangle ! »

Voici comment se pratique cette divination, qui, selon les doctes, il est d’un effet certain que pour découvrir ce qu’un homme a de caché dans le cœur. On prend de la pure fariné d’orge ; on la pétrit avec du lait et du sel ; on n’y met pas de levain ; on enveloppe ce pain compacte dans un papier graissé, on le fait cuire sous la cendre ; ensuite on le frotte de feuilles de verveine et on le fait manger à celui par qui on se croit trompé, et qui ne digère pas si la présomption est fondée.

Il y avait près de Lavinium un bois, sacré où l’on pratiquait l’alphitomancie. Dés prêtres nourrissaient dans une caverne un serpent, selon quelques-uns ; un dragon, selon d’autres. À certains jours on envoyait des jeunes filles lui porter à manger ; elles, avaient les yeux bandés et allaient à la grotte, tenant à la main un gâteau fait par elles avec du miel et de la farine d’orge, « Le diable, dit Delrio, les conduisait leur droit chemin. Celle dont le serpent refusait de manger le gâteau n’était pas sans reproche. »

Alphonse X, roi de Castille et de Léon, surnommé l’astronome et le philosophe, mort en 1284. On lui doit les Tables Alphonsines. C’est lui qui disait que, si Dieu l’avait appelé à son conseil au moment de la création, il eût pu lui donner de bons avis. Ce prince extravagant croyait à l’astrologie. Ayant fait tirer l’horoscope de ses enfants, il apprit que le cadet serait plus heureux que l’aîné, et il le nomma son successeur au trône. Mais, malgré la sagesse de cet homme, qui se jugeait capable de donner des conseils au Créateur, l’aîné tua son frère cadet, mit son père dans une étroite prison et s’empara de la couronne ; toutes choses que sa science ne lui avait pas révélées.

Alpiel, ange ou démon qui, selon le Talmud, a l’intendance des arbres fruitiers.

Alrinach, démon de l’Occident, que les démonographes font présider aux tempêtes, aux tremblements de terre, aux pluies, à la grêle, etc. C’est souvent lui qui submerge les navires. Lorsqu’il se rend visible, il paraît sous les traits et les habits d’une femme.

 
Alphonse X.
Alphonse X.
Alphonse X.
 

Alrunes, démons succubes ou sorcières qui furent mères des Huns. Elles prenaient toutes séries de formes, mais ne pouvaient changer de sexe. Chez les Scandinaves, on appelait alrunes des sortes de fétiches nommés ailleurs Mandragores. Voy. ce mot.

Alruy (David), imposteur juif qui, en 1199, se prétendant de la race de David, se vanta d’être le Messie destiné à ramener les Juifs dans Jérusalem. Le roi de Perse le fit mettre en prison ; mais on voit dans Benjamin de Tudèle, qui le cite, qu’il s’échappa en se rendant invisible. Il ne daigna se remontrer qu’aux bords de la mer. Là, il étendit son écharpe sur l’eau, planta ses pieds dessus et passa la mer avec une légèreté incroyable, sans que ceux qu’on envoya avec des bateaux à sa poursuite le pussent arrêter. — Cela le mit en vogue comme grand magicien. Mais enfin le scheik Aladin, prince turc, sujet du roi de Perse, fit tant à force d’argent, avec le beau-père de David Alruy ou Alroy, lequel beau-père était peu délicat, que le prétendu Messie fut poignardé dans son lit. « C’est toujours la fin de telles gens, dit Leloyer ; et les magiciens juifs n’en ont pas meilleur marché que les autres magiciens, quoi que leur persuadent leurs talmudistes, qu’ils sont obéis de l’esprit malin. Car c’est encore une menterie du Talmud des Juifs, qu’il n’est rien de difficile aux sages, maîtres et savants en leurs lois, que les esprits d’enfer et célestes leur cèdent, et que Dieu même (ô blasphème !) ne leur peut résister[43]… » — Ce magicien est appelé encore dans de vieux récits Alogricus. Il est enterré dans une île mystérieuse de l’Inde[44].

Altangatufun, idole dès Kalmouks, qui avait le corps et la tête d’un serpent, avec quatre pieds de lézard. Celui qui porte avec vénération son image est invulnérable dans les combats. Pour en faire l’épreuve, un khan lit suspendre cette idole attachée à un livre, et l’exposa aux coups dès plus habiles archers ; leurs traits ne purent atteindre le livre, qu’ils percèrent au contraire dès que l’idole en fut détachée. C’est là une légende de Cosaques.

Alveromancie ou Aleuromancie. Voy. ce mot.

Amadeus, visionnaire qui crut connaître par révélation deux psaumes d’Adam : le premier, composé en transport de joie à la création de la femme ; le second, en triste dialogue avec Ève après la chute[45].

Amaimon. Voy. Amoymon.

Amalaric, roi d’Espagne, qui épousa la princesse
 
Amalaric
Amalaric
 
Clotilde, sœur du roi des Francs Childebert. La pieuse reine, n’approuvant pas les excès de son mari, tombé dans l’arianisme, le barbare, après d’autres mauvais traitements, lui fit crever les yeux. Clotilde envoya à son frère un mouchoir teint de son sang, et Childebert marcha aussitôt avec une armée contre Amalaric. La justice des hommes fut prévenue par la justice éternelle. Tandis que le bourreau de Clotilde s’avançait au-devant des Francs, il tomba percé d’un trait percé par une main invisible. Des légendaires ont écrit que cette mort était l’ouvrage du diable ; mais le trait ne venait pas d’en bas[46].

Amalarie (Madeleine), sorcière qui allait au sabbat, et qui, chargée de onze homicides, fut mise à mort à soixante-quinze ans dans la baronnie de la Trimouille, à la fin du seizième siècle[47].

Amane. Le soleil, sans doute. C’était le dieu d’une secte des Parsis, qui l’honoraient par un feu perpétuel.

Amant (Jean d’), médecin empoisonneur qui fut accusé de magie et signalé à l’évêque de Fréjus au treizième siècle. Il avait une médecine empirique au moyen de laquelle il se vantait de pouvoir allonger la vie ou la raccourcir. Nous ignorons ce qu’il advint de fui.

Amarante, fleur que l’on admet parmi les symboles de l’immortalité. Les magiciens attribuent aux couronnes faites d’amarante de grandes propriétés, et surtout, la vertu de concilier les faveurs et la gloire à ceux qui les portent.

Amazeroth. Reginald Scott, qui a fait, comme Wierus, un dénombrement des puissances de l’enfer, cite Amazeroth comme un duc, ayant soixante légions sous ses ordres.

Amasis. Hérodote raconte qu’Amasis, roi d’Égypte, eut l’aiguillette nouée, et qu’il fallut employer les plus solennelles imprécations de la magie pour rompre le charme, Voy. Ligatures.

Amazones, nation de femmes guerrières, dont Strabon regarde à tort l’existence comme une fable. François de Torre-Blanca dit[48] qu’elles étaient sorcières ; ce qui est plus hasardé. Elles se brûlaient la mamelle droite pour mieux tirer de l’arc ; et le père Ménestrier croit que la Diane d’Éphèse n’était ornée de tant de mamelles qu’à cause que les Amazones lui consacraient celles qu’elles se retranchaient. On dit que cette république sans hommes habitait la Cappadoce et les bords du Thermodon. Les modernes ont cru retrouver des peuplades d’Amazones en voyant des femmes armées sur les bords du Maragnon, qu’on a nommé pour cela le fleuve des Amazones. Des missionnaires en placent une nation dans les Philippines, et Thévenot une autre dans la Mingrélie. Mais, dit-on, une république de femmes ne subsisterait pas six mois, et ces États merveilleux ne sont que des fictions inventées pour récréer l’imagination. Cependant, un curieux passage nous est fourni par les explorations récentes de M. Texier dans l’Asie Mineure : il a découvert une enceinte de rochers naturels, aplanis par l’art, et sur les parois de laquelle on a sculpté une scène d’une importance majeure dans l’histoire de ces peuples. Elle se compose de soixante figures, dont quelques-unes sont colossales. On y reconnaît l’entrevue de deux rois qui se font mutuellement des présents.

Dans l’un de ces personnages, qui est barbu ainsi que toute sa suite, et dont l’appareil a quelque chose de rude, le voyageur avait d’abord cru distinguer le roi de Paphlagonie ; et dans l’autre, qui est, imberbe ainsi que les siens, il voyait le roi de Perse, monté sur un lion et entouré de toute la pompe asiatique. Mais en communiquant ses dessins et ses conjectures aux antiquaires de Smyrne, qu’il a trouvés fort instruits, M. Texier s’est arrêté a l’opinion que cette scène remarquable représentait l’entrevue annuelle des Amazones avec le peuple voisin, qui serait les Leuco-Syriens ; et la ville voisine, où le témoignage des géographes l’avait empêché de reconnaître Tavia, serait Thémiscyre, capitale de ce peuple.

Ambrosius ou Ambroise, roi d’Angleterre. — Voy. Merlin.

Amduscias, grand-duc aux enfers. Il a la

 
Amduscias
Amduscias
 
forme d’une licorne ; mais lorsqu’il est évoqué, il se montre sous une figure humaine. Il donne des concerts, si on les lui commande ; on entend alors, sans rien voir, le son des trompettes et des autres instruments de musique. Les arbres s’inclinent à sa voix. Il commande vingt-neuf légions.

Âme. Tous les peuples ont reconnu l’immortalité de l’âme. Les hordes les plus barbares ne l’ont jamais été assez pour se rabaisser jusqu’à la brute. La brute n’est attachée qu’à la terre : l’homme seul élève ses regards vers un plus noble séjour. L’insecte est à sa place dans la nature ; l’homme n’est pas à la sienne.

La conscience, le remords, ce désir de pénétrer dans un avenir inconnu, ce respect que nous portons aux tombeaux, cet effroi de l’autre monde, cette croyance aux âmes qui ne se distingue que dans l’homme, tout nous instruirait déjà quand même la révélation ne serait pas là pour repousser nos doutes. Les matérialistes, qui, voulant tout juger par les yeux du corps, nient l’existence de l’âme parce qu’ils ne la voient point, ne voient pas non plus le sommeil ; ils ne voient pas le vent ; ils ne comprennent pas la lumière, ni l’électricité, ni cent mille autres faits que pourtant ils ne peuvent nier.

On a cherché de tout temps à définir ce que c’est que l’âme, ce rayon, ce souffle de la Divinité. Selon les uns, c’est la conscience, c’est l’esprit ; selon d’autres, c’est cet espoir d’une autre vie qui palpite dans le cœur de tous les hommes. C’est, dit Léon l’Hébreu, le cerveau avec ses deux puissances, le sentiment et le mouvement volontaire. C’est une flamme, a dit un autre. Dicéarque affirme que l’âme est une harmonie et une concordance dès quatre éléments.

Quelques-uns sont allés loin, et ont voulu connaître la figure de l’âme. Un savant a même prétendu, d’après les dires d’un revenant, qu’elle ressemblait à un vase sphérique de verre poli, qui a des yeux de tous les côtés[49].

L’âme, a-t-on dit encore, est comme une vapeur légère et transparente qui conserve la figure humaine. Un docteur talmudique, vivant dans un ermitage avec son fils et quelques amis, vit un jour l’âme d’un de ses compagnons qui se détachait tellement de son corps, qu’elle lui faisait déjà ombre à la tête. Il comprit que son ami allait mourir, et fit tant par ses prières, qu’il obtint que cette pauvre âme rentrât dans le corps qu’elle abandonnait. « Je crois de cette bourde ce qu’il faut en croire, dit Leloyer[50], comme de toutes les autres bourdes et baveries des rabbins. »

Les Juifs se persuadent, au rapport du Hollandais Hoornbeeck, que les âmes ont toutes été créées ensemble, et par paires d’une âme d’homme et d’une âme de femme ; de sorte que les mariages sont heureux et accompagnés de douceur et de paix, lorsqu’on se marie avec l’âme à laquelle on a été accouplé dès le commencement ; mais ils sont malheureux dans le cas contraire. On a à lutter contre ce malheur, ajoute-t-il, jusqu’à ce qu’on puisse être uni, par un second mariage, à l’âme dont on a été fait le pair dans la création ; et cette rencontre est rare.

Philon, Juif qui a écrit aussi sur l’âme, pense que, comme il y a de bons et de mauvais anges, il y a aussi de bonnes et de mauvaises âmes, et que les âmes qui descendent dans les corps y apportent leurs qualités bonnes ou mauvaises. Toutes les innovations dés hérétiques et des philosophes, et toutes les doctrines qui n’ont pas leur base dans les enseignements de l’Église, brillent par de semblables absurdités.

Les musulmans disent que les âmes demeurent jusqu’au jour du jugement dans le tombeau, auprès du corps qu’elles ont animé. Les païens croyaient que les âmes, séparées de leurs corps grossiers et terrestres, conservaient après la mort une forme plus subtile et plus déliée de la figure du corps qu’elles quittaient, mais plus grande et plus majestueuse ; que ces formes étaient lumineuses et de la nature dès astres ; que les âmes gardaient de l’inclination pour les choses qu’elles avaient aimées pendant leur vie, et que souvent elles se montraient autour de leurs tombeaux. Quand l’âme de Patrocle se leva devant Achille, elle avait sa voix, sa taille, ses yeux, ses habits, du moins en apparence, mais non pas son corps palpable.

Origène trouve que ces idées ont une source respectable, et que les âmes doivent avoir en effet une consistance, mais subtile ; il se fonde sur ce qui est dit dans l’évangile de Lazare et du mauvais riche, qui ont tous deux des formes, puisqu’ils se parlent et se voient, et que le mauvais riche demande une goutte d’eau pour rafraîchir sa langue. Saint Irénée, qui est de l’avis d’Origène, conclut du même exemple que les âmes se souviennent après la mort de ce qu’elles ont fait en cette vie.

Dans la harangue que fit Titus à ses soldats pour les engager à monter à l’assaut de la tour Antonia, au siège de Jérusalem, on remarque une opinion qui est à peu près celle des Scandinaves. Vous savez, leur dit-il, que les âmes de ceux qui meurent à la guerre s’élèvent jusqu’aux astres, et sont reçues dans les régions supérieures, d’où elles apparaissent comme de bons génies ; tandis, que ceux qui meurent dans leur lit, quoique ayant vécu dans la justice, sont, plongés sous terre dans l’oubli et les ténèbres[51].

Il y a parmi les Siamois une secte qui croit que les âmes vont et viennent où elles veulent après la mort ; que celles des hommes qui ont bien vécu acquièrent une nouvelle force, une vigueur extraordinaire, et qu’elles poursuivent, attaquent et maltraitent celles des méchants partout où elles les rencontrent. Platon dit, dans le neuvième livre de ses Lois, que les âmes de ceux qui ont péri de mort, violente, poursuivent avec fureur, dans l’autre inonde, les âmes de leurs meurtriers. Cette croyance s’est reproduite souvent et n’est pas éteinte partout.

Les anciens pensaient que toutes les âmes pouvaient revenir après la mort, excepté les âmes des noyés. Servius en dit la raison : c’est que l’âme, dans leur opinion, n’était autre chose qu’un feu, qui s’éteignait dans l’eau ; comme si le matériel pouvait détruire le spirituel.

On sait que la mort est la séparation de l’âme d’avec le corps. C’est une opinion de tous les temps et de tous les peuples que les âmes en quittant ce monde passent dans un autre, meilleur ou plus mauvais, selon leurs œuvres. Les anciens donnaient au batelier Caron la charge de conduire les âmes au séjour des ombres. On trouve une tradition analogue à cette croyance chez les vieux Bretons. Ces peuples plaçaient le séjour des âmes dans une île qui doit se trouver entre l’Angleterre et l’Islande. Les bateliers et pêcheurs, dit Tzetzès, ne payaient aucun tribut, parce qu’ils étaient chargés de la corvée de passer les âmes ; et voici comment cela se faisait : — Vers minuit, ils entendaient frapper à leur porte ; ils suivaient sans voir personne jusqu’au rivage ; là ils trouvaient des navires qui leur semblaient vides, mais qui étaient chargés d’âmes ; ils les conduisaient à l’île des Ombres, où ils ne voyaient rien encore ; mais ils entendaient les âmes anciennes qui venaient recevoir et complimenter les nouvelles débarquées ; elles se nommaient par leurs noms, reconnaissaient leurs parents, etc. Les pêcheurs, d’abord étonnés, s’accoutumaient à ces merveilles et reprenaient leur chemin. — Ces transports d’âmes, qui pouvaient bien cacher une sorte de contrebande, n’ont plus lieu depuis que le Christianisme est venu apporter la vraie lumière.

On a vu parfois, s’il faut recevoir tous les récits des chroniqueurs, des âmes errer par troupes. Dans le onzième siècle, on vit passer près de la ville de Narni une multitude infinie de gens vêtus de blanc, qui s’avançaient du côté de l’Orient. Cette troupe défila depuis le matin jusqu’à trois heures après midi. Mais sur le soir elle diminua considérablement. Tous les bourgeois montèrent sur les murailles, craignant que ce ne fussent, des troupes ennemies ; ils les virent passer avec une extrême surprise. Un citadin, plus résolu que les autres, sortit de la ville ; remarquant dans la foule mystérieuse un homme de sa connaissance, il l’appela par son nom et lui demanda ce que voulait dire cette multitude de pèlerins. L’homme blanc lui répondit : « Nous, sommes des âmes qui, n’ayant point expié tous nos péchés et n’étant pas encore assez pures, allons ainsi dans les lieux saints, en esprit de pénitence ; nous venons de visiter le tombeau de saint Martin, et nous allons à Notre-Dame de Farfe[52]. »

Le bourgeois de Narni fut tellement effrayé de cette vision, qu’il en demeura malade pendant un an. Toute la ville de Narni, disent de sérieuses relations, fut témoin de cette procession merveilleuse, qui se fit en plein jour.

N’oublions pas, à propos du sujet qui nous occupe, une croyance très-répandue, en Allemagne : c’est qu’on peut vendre son âme au diable. Dans tous les pactes faits avec l’esprit des ténèbres, celui qui s’engage vend son âme. Les Allemands ajoutent même qu’après cet horrible marché le vendeur n’a plus d’ombre. On conte à ce propos l’histoire d’un étudiant qui fit pacte avec le diable pour devenir l’époux d’une jeune dame dont il ne pouvait obtenir la main. Il y réussit en vertu du pacte. Mais au moment de la célébration du mariage, un rayon de soleil frappa les deux époux qu’on allait unir ; on s’aperçut avec effroi que le jeune homme n’avait pas d’ombre : on reconnut qu’il avait vendu son âme, et tout fut rompu.

Généralement les insensés qui vendent leur âme font leurs conditions, et s’arrangent pour vivre un certain nombre d’années après le pacte. Mais si on vend sans fixer de terme, le diable, qui est pressé de jouir, n’est pas toujours délicat ; et voici un trait qui mérite attention :

Trois ivrognes s’entretenaient, en buvant, de l’immortalité de l’âme et des peines de l’enfer. L’un d’eux commença à s’en moquer, et dit là-dessus des stupidités dignes de la circonstance. C’était dans un cabaret de village. Cependant survient un homme de haute stature, vêtu gravement, qui s’assied près des buveurs et leur demande de quoi ils rient. Le plaisant villageois le met au fait, ajoutant qu’il fait si peu de cas de son âme, qu’il est prêt à la vendre au plus offrant et à bon marché, et qu’ils en boiront l’argent. « Et combien me la veux-tu vendre ? » dit le nouveau venu. Sans marchander, ils conviennent du prix ; l’acheteur en compte l’argent, et ils le boivent. C’était joie jusque-là. Mais, la nuit venant, l’acheteur dit : « Il est temps, je pense, que chacun se retire chez soi ; celui qui a acheté un cheval a le droit de l’emmener. Vous permettrez donc que je prenne ce qui est à moi. » Or, ce disant, il empoigne son vendeur tout tremblant, et l’emmène où il n’avait pas cru aller si vite ; de telle sorte que jamais plus de pays n’en ouït nouvelles[53]. Voy. Mort.

 
Les trois ivrognes
Les trois ivrognes
Les trois ivrognes.
 

Âme damnée. On donne ce nom, à Constantinople, à l’alcyon voyageur, qui est très-commun dans ce pays. Quelque rapide que soit son vol, il n’est jamais accompagné d’aucun bruit. On ne le voit jamais se poser, ni chercher, ni prendre sa nourriture. Il a le dos noir, le ventre blanc. Il plane toute la journée sur le Bosphore, et ne s’en écarte rarement que pour y revenir avec précipitation.

Âme des bêtes. Dans un petit ouvrage très-spirituel sur l’âme des bêtes, un père jésuite a ingénieusement développé cette singulière idée de quelques philosophes anciens, que les bêtes étaient animées par les démons les moins coupables, qui faisaient ainsi leur expiation. Voy. Albigeois.

Âme du monde. « La force, sans cesse changeante, du sein de laquelle s’épanchent et se précipitent sur nous tant de merveilles, c’est l’âme du monde, » nous dit Cornélius Agrippa, le grand héritier de l’École d’Alexandrie, et cette âme féconde toute chose, tout être que la nature enfante ou que façonne l’art ! Elle le féconde en y infusant ses propriétés célestes. Arrangées selon la formule que la science enseigne, ces choses reçoivent le don de nous communiquer leurs vertus. Il suffit alors de les porter sur soi pour qu’elles opèrent sur le corps et sur l’âme. Tout aussitôt vous les sentez produire en vous la maladie ou la santé, l’audace ou la peur, la tristesse ou la joie, et nous devenons par elles tantôt un objet de faveur et d’amour, tantôt un objet de haine, d’horreur et d’abomination[54]. « Ainsi, ajoute M. le chevalier Gougenot des Mousseaux, que nous transcrivons ici[55], l’âme du monde, la grande force universelle et fluidique, devient sous nos doigts l’âme des talismans et des charmes du magnétisme ou de la sorcellerie ! Quel autre trait nous peindra plus au vif sa nature !… »

Amenon. Les Chaldéens comptaient ce héros parmi leurs rois. Ils disaient qu’il a régné douze sares. Or, s’il faut en croire les doctes, le sare est de trois mille six ans. Ce qui ferait un règne assez long.

Améthyste, pierre précieuse d’un violet foncé, autrefois la neuvième en ordre sur le pectoral du grand prêtre des Juifs. Une vieille opinion populaire lui attribue la vertu de garantir de l’ivresse.

Amiante, espèce de pierre incombustible, que Pline et les démonographes disent excellente contre les charmes de la magie[56].

Amilcar, général carthaginois. Assiégeant Syracuse, il crut entendre, pendant son sommeil, une voix qui l’assurait qu’il souperait le lendemain dans la ville. En conséquence, il fit donner l’assaut de bon matin, espérant enlever Syracuse et y souper, comme le lui promettait son rêve. Il fut pris par les assiégés et y soupa en effet, non pas en vainqueur, ainsi qu’il s’y était attendu mais en captif, ce qui n’empêcha pas le songe d’avoir prédit juste[57].

Hérodote conte encore qu’Amilcar, vaincu par Gélon, disparut vers la fin de la bataille, et qu’on ne le retrouva plus, si bien que les Carthaginois le mirent au rang de leurs dieux et lui offrirent des sacrifices.

Ammon. Voy. Jupiter-Ammon.

Amniomancie, divination sur la coiffe ou membrane qui enveloppe quelquefois la tête des enfants naissants, ainsi nommée de cette coiffe que les médecins appelaient en grec amnios. Les sages-femmes prédisaient le sort futur du nouveau-né par l’inspection de celle coiffe ; elle annonçait d’heureuses destinées si elle était rouge, et des malheurs si elle présentait une couleur plombée. Voy. Coiffe.

Amon, ou Aamon, grand et puissant marquis de l’empire infernal. Il a la figure d’un loup, avec une queue de serpent ; il vomit de la flamme ; lorsqu’il prend la forme humaine, il n’a de l’homme que le corps ; sa tête ressemble à celle d’un hibou et son bec laisse voir des dents canines très-effilées. C’est le plus solide des princes des démons. Il sait le passé et l’avenir, et réconcilie, quand il le veut, les amis brouillés. Il commande à quarante légions.

 
Amon ou Aamon
Amon ou Aamon
 

Les Égyptiens voyaient dans Amon ou Amoun leur Dieu suprême ; ils le représentaient avec la peau bleue, sous une forme assez humaine.

Amour. Parmi les croyances superstitieuses qui se rattachent innocemment à l’amour, nous citerons celle-ci, qu’un homme est généralement aimé quand ses cheveux frisent naturellement. À Roscoff, en Bretagne, les femmes, après la messe, balayent la poussière de la chapelle de la Sainte-Union, la soufflent du côté par lequel leurs époux ou leurs fiancés doivent revenir, et se flattent, au moyen de cet inoffensif sortilège, de fixer le cœur de celui qu’elles aiment[58]. Dans d’autres pays, on croit stupidement se faire aimer en attachant à son cou certains mots séparés par des croix. Voy. Philtre. Voy. aussi Rhombus.

Il y a eu des amants entraînés par leurs passions qui se sont donnés au démon pour être heureux. On conte qu’un valet vendit son âme au diable à condition qu’il deviendrait l’époux de la fille de son maître, ce qui le rendit le plus infortuné des hommes[59].

On attribue aussi à l’inspiration des démons certaines amours monstrueuses, comme la passion de Pygmalion pour sa statue. Un jeune homme devint pareillement éperdu pour la Vénus de Praxitèle ; un Athénien se tua de désespoir aux pieds de la statue de la Fortune, qu’il trouvait insensible. Ces traits ne sont que des folies déplorables, pour ne pas dire plus.

Amoymon, ou Amaimon, l’un des quatre rois de l’enfer, dont il gouverne la partie orientale. On l’évoque le matin, de neuf heures à midi, et le soir de trois à six heures. Asmodée est son lieutenant et le premier prince de ses États[60].

Amphiaraüs, devin de l’antiquité, qui se cacha pour ne pas aller à la guerre de Thèbes, parce qu’il avait prévu qu’il y mourrait ; ce qui eut lieu lorsqu’on l’eut découvert et forcé à s’y rendre. Mais on ajoute qu’il ressuscita. On lui éleva un temple dans l’Attique, près d’une fontaine sacrée par laquelle il s’était glissé en revenant des enfers.

Il guérissait les malades en leur indiquant des remèdes dans des songes, comme font de nos jours ceux qui pratiquent le somnambulisme magnétique. Il rendait aussi par ce moyen des oracles, moyennant argent. Après les sacrifices, le consultant s’endormait sur une peau de mouton, et il lui venait un rêve qu’on savait toujours interpréter après l’événement. On lui attribue des prophéties écrites en vers, qui ne sont pas venues jusqu’à nous. Il inventa la pyromancie. Voy. ce mot.

Amphiloque, devin qui, après sa mort, rendit des oracles en Cilicie.

Amphion. Pausanias, Wierus et beaucoup d’autres mettent Amphion au rang des habiles magiciens, parce qu’il rebâtit les murs de Thèbes au son de sa lyre.

Amphisbène, serpent auquel on attribue deux têtes aux deux extrémités, par lesquelles il mord également. Le docteur Brown a combattu cette erreur, que Pline avait adoptée, « On ne nie point, dit Brown[61], qu’il n’y ait eu quelques serpents à deux têtes, dont chacune était à l’extrémité opposée. Nous trouvons dans Aldrovandi un lézard de cette même forme, et tel était, peut-être l’amphisbène dont Cassien du Puy montra la figure au savant Faber. Cela arrive quelquefois aux animaux, qui font plusieurs petits à la fois, et surtout aux serpents, dont les œufs étant attachés les uns aux autres, peuvent s’unir sous diverses formes et s’éclore de la sorte. Mais ce sont là des productions monstrueuses, contraires à cette loi suivant laquelle toute créature engendre son semblable, et qui sont marquées comme irrégulières dans le cours général de la nature. Nous douterons donc que l’amphisbène soit une race de serpents à deux têtes, jusqu’à ce que le fait soit confirmé. »

Amrita. Breuvage de l’immortalité chez les Hindous. Leurs dieux ont été mortels pendant dix mille ans, à la suite desquels ils ont trouvé le moyen de faire l’amrita, ce qui les a placés hors des atteintes de la mort.

Amschaspands. Génies du premier ordre chez les Persans. Ils sont au nombre de six, et ont pour chef Ormusd ou Ormouzd. Ils président avec lui aux sept planètes.

Amulette, préservatif. On appelle ainsi certains remèdes superstitieux que l’on porte sur soi ou que l’on s’attache au cou pour se préserver de quelque maladie ou de quelque danger. Les Grecs les nommaient phylactères, les Orientaux, talismans. C’étaient des images capricieuses (un scarabée chez les Égyptiens), des morceaux de parchemin, de cuivre, d’étain, d’argent, ou encore des pierres particulières où l’on avait tracé certains caractères ou certains hiéroglyphes.

Comme cette superstition est née d’un attachement excessif à la vie et d’une crainte puérile de tout ce qui peut nuire, le Christianisme n’est venu à bout de la détruire que chez les fidèles[62]. Dès les premiers siècles de l’Église, les Pères et les conciles défendirent ces pratiques du paganisme. Ils représentèrent les amulettes comme un reste idolâtre de la confiance qu’on avait aux prétendus génies gouverneurs du monde. Le curé Thiers[63] a rapporté un grand nombre de passages des Pères à ce sujet, et les canons de plusieurs conciles.

Les lois humaines condamnèrent aussi l’usage des amulettes. L’empereur Constance défendit d’employer les amulettes et les charmes à la guérison des maladies. Cette loi, rapportée par Ammien Marcellin, fut exécutée si sévèrement, que Valentinien fit punir de mort une vieille femme qui ôtait la fièvre avec des paroles charmées, et qu’il fit couper la tête à un jeune homme qui touchait un certain morceau de marbre en prononçant sept lettres de l’alphabet pour guérir le mal d’estomac.

Mais comme il fallait des préservatifs aux esprits fourvoyés, qui sont toujours le plus grand nombre, on trouva moyen d’éluder la loi. On fit des amulettes avec des morceaux de papier chargés de versets de l’Écriture sainte. Les lois se montrèrent moins rigides contre cette coutume, et on laissa aux prêtres le soin d’en modérer les abus.

Les Grecs modernes, lorsqu’ils sont malades, écrivent le nom de leur infirmité sur un papier triangulaire qu’ils attachent à la porte de leur chambre. Ils ont grande foi à cette amulette.

Quelques personnes portent sur elles le commencement de l’Évangile de saint Jean comme un préservatif contre le tonnerre ; et, ce qui est assez particulier, c’est que les Turcs ont confiance à cette même amulette, si l’on en croit Pierre Leloyer.

Une autre question est de savoir si c’est une superstition de porter sur soi les reliques des saints, une croix, une image, une chose bénite par les prières de l’Église, un Agnus Dei, etc., et si l’on doit mettre ces choses au rang des amulettes, comme le prétendent les protestants. — Nous reconnaissons que si l’on attribue à ces choses la vertu surnaturelle de préserver d’accidents, de mort subite, de mort dans l’état de péché, etc., c’est une superstition. Elle n’est pas du même genre que celle des amulettes, dont le prétendu pouvoir ne peut pas se rapporter à Dieu ; mais c’est ce que les théologiens appellent une vaine observance, parce que l’on attribue à des choses saintes et respectables un pouvoir que Dieu n’y a point attaché. Un chrétien bien instruit ne les envisage point ainsi ; il, sait que les saints ne peuvent nous secourir que par leurs prières et par leur intercession auprès de Dieu. C’est pour cela que l’Église a décidé qu’il est utile et louable de les honorer et de les invoquer. Or c’est un signe d’invocation et de respect à leur égard de porter sur soi leur image ou leurs reliques ; de même que c’est une marque d’affection et de respect pour une personne que de garder son portrait ou quelque chose qui lui ait appartenu. Ce n’est donc ni une vaine observance ni une folle confiance d’espérer qu’en considération de l’affection et du respect que nous témoignons à un saint, il intercédera et priera pour nous. Il en est de même des croix et des Agnus Dei[64].

On lit dans Thyræus[65] qu’en 1568, dans le duché de Juliers, le prince d’Orange condamna un prisonnier espagnol à mourir ; que ses soldats l’attachèrent à un arbre et s’efforcèrent de le tuer à coups d’arquebuse ; mais que leurs balles ne l’atteignirent point. On le déshabilla pour s’assurer s’il n’avait pas sur la peau une armure qui arrêtât le coup ; on trouva une amulette portant la figure d’un agneau : on la lui ôta, et le premier coup de fusil l’étendit roide mort.

On voit dans la vieille chronique de don Ursino que quand sa mère l’envoya, tout petit enfant qu’il était, à Saint-Jacques de Compostelle, elle lui mit au cou une amulette que son époux avait arrachée à un chevalier maure. La vertu de cette amulette était d’adoucir la fureur des bêtes cruelles. En traversant une forêt, une ourse enleva le petit prince des mains de sa nourrice et l’emporta dans sa caverne. Mais, loin de lui faire aucun mal, elle l’éleva avec tendresse ; il devint par la suite très-fameux sous le nom de don Ursino, qu’il devait à l’ourse, sa nourrice sauvage, et il fut reconnu par son père, à qui la légende dit qu’il succéda sur le trône de Navarre.

Les nègres croient beaucoup à la puissance des amulettes. Les bas Bretons leur attribuent le pouvoir de repousser le démon. Dans le Finistère, quand on porte un enfant au baptême, on lui met au cou un morceau de pain noir, pour éloigner les sorts et les maléfices que les vieilles sorcières pourraient jeter sur lui[66]. Voy. Alès.

Amy, grand président aux enfers, et l’un des princes de la monarchie infernale. Il paraît là-bas environné de flammes mais il affecte sur la terre des traits humains. Il enseigne les secrets de l’astrologie et des arts libéraux ; il donne de bons domestiques ; il découvre à ses amis les trésors gardés par les démons ; il est préfet de trente-six légions. Des anges déchus et des puissances sont sous ses ordres. Il espère qu’après deux cent mille ans il retournera dans le ciel pour y occuper le septième trône ; ce qui n’est pas croyable, dit Wierus[67].

Amyraut (Moïse), théologien protestant, né dans l’Anjou en 1596, mort en 1664. On lui doit un Traité des songes, aujourd’hui peu recherché.

Anabaptistes, secte née de Luther, qui rebaptisait ; ce que signifie son nom. Voy. Jean de Leyde et Muncer.

Anagramme. Il y eut des gens, surtout dans les quinzième et seizième siècles, qui prétendaient trouver des sens cachés dans les mots qu’ils décomposaient, et une divination dans les anagrammes. On cite comme une des plus curieuses celle que l’on fit sur le meurtrier de Henri III, Frère dit Jacques Clément, où l’on trouve : C’est l’enfer qui m’a créé. — Deux religieux en dispute, le père Proust et le père d’Orléans, faisaient des anagrammes ; le père Proust trouva dans le nom de son confrère : l’Asne d’or, et le père d’Orléans découvrit dans celui du père Proust : Pur sot.

Un nommé André Pujon, de la haute Auvergne, passant par Lyon pour se rendre à Paris, rêva la nuit que l’anagramme de son nom était : pendu à Riom. En effet, on ajoute que le lendemain il s’éleva une querelle entre lui et un homme de son auberge, qu’il tua son adversaire, et qu’il fut pendu huit jours après sur la place publique de Riom. — C’est un vieux conte renouvelé. On voit dans Delancre[68] que le pendu s’appelait Jean de Pruom, dont l’anagramme est la même.

J.-B. Rousseau, qui ne voulait pas reconnaître son père, parce que ce n’était qu’un humble cordonnier, avait pris le nom de Verniettes, dont l’anagramme fut faite ; on y trouva : Tu te renies. On fit de Pierre de Ronsard rose de Pindare, — L’anagramme de monde, est démon ; l’anagramme d’Amiens, en amis ; celle de Lamartine, mal t’en ira ; celle de révolution française, un Corse te finira ; en 1848, on a trouvé insolemment dans ces trois noms : A. Thiers, Odilon Barrot, Chambolle, trois Aliboron de la Chambre.

On donna le nom de cabale à la ligue des favoris de Charles II d’Angleterre, qui étaient Clifford, Ashley, Buckingham, Arlington, Lauderdale, parce que les initiales des noms de ces cinq ministres formaient le mot cabal.

On voulut présenter comme une prophétie cette anagramme de Louis quatorzième, roi de France et de Navarre : « Va, Dieu confondra l’armée qui osera te résister… »

Parfois les anagrammes donnent pourtant un sens qui étonne. Qu’est-ce que la vérité ? Quid est veritas ? demande Pilate à l’Homme-Dieu ; et il se lève sans attendre la réponse. Mais elle est dans la question, dont l’anagramme donne exactement : Est vir qui adest, c’est celui qui est devant vous.

Les Juifs cabalistes ont fait des anagrammes la troisième partie de leur cabale : leur but est de trouver dans la transposition des lettres ou des mots des sens cachés ou mystérieux. Voy. Onomancie.

Anamelech, ou Anamalech, démon obscur, porteur de mauvaises nouvelles. Il était adoré à Sepharvaïm, ville des Assyriens. Il s’est montré sous la figure d’une caille. Son nom signifie, à ce qu’on dit, bon roi ; et des doctes assurent que ce démon est la lune, et Adramelech le soleil. Il joue un rôle dans le poëme où Gessner a chanté la mort d’Abel.

Anancitide. Voy. Aglaophotis.

Anania ou Anagni (Jean d’), jurisconsulte du quinzième siècle, à qui on doit quatre livres De la nature des démons[69], et un traité De la magie et des maléfices[70]. Ces ouvrages sont peu connus. Anania mourut en Italie en 1458.

Ananisapta. Les cabalistes disent que ce mot, écrit sur un parchemin vierge, est un talisman très-efficace contre les maladies. Les lettres qui le composent sont, à leur avis, les initiales des mots qui forment la prière suivante : Antidotum Nazareni Auferat Necem Intoxicationis, Sanctificet Alimenta Poculaque Trinitas Alma.

Anansié. C’est le nom de l’araignée gigantesque et toute-puissante à qui les nègres de la Côte-d’Or attribuent la création de l’homme. Voy. Araignée.

Anarazel, l’un des démons chargés de la garde des trésors souterrains, qu’ils transportent d’un lieu à un autre pour les dérober aux recherches des hommes.

 
Anarazel
Anarazel
 
Anarazel, avec ses compagnons Gaziel et Fécor, ébranle les fondements des raisons, excite les tempêtes, sonne les cloches à minuit, fait paraître les spectres et inspire les terreurs nocturnes.

Anathème. Ce mot, tiré du grec, signifie exposé, signalé, dévoué. On donnait chez les païens le nom d’anathèmes aux filets qu’un pêcheur déposait sur l’autel dès nymphes de la mer, au miroir que Laïs consacra à Vénus, aux offrandes de coupes, de vêtements, d’instruments et de figures diverses. On l’appliqua ensuite aux objets odieux que l’on exposait dans un autre sens, comme la tête ou les dépouilles d’un coupable ; et l’on appela anathème la victime vouée aux dieux infernaux. Chez les Juifs l’anathème a été généralement pris ainsi en mauvaise part ; chez les chrétiens c’est la malédiction ou l’être maudit. L’homme frappé d’anathème est retranché de la communion des fidèles.

Il y a beaucoup d’exemples qui prouvent les effets de l’anathème ; et comment expliquer ce fait constant, que peu d’excommuniés ont prospéré ? — Voy. Excommunication.

Les magiciens et les devins emploient une sorte d’anathème pour découvrir les voleurs et les maléfices : voici cette superstition. Nous prévenons ceux que les détails pourraient scandaliser qu’ils sont extraits des grimoires. — On prend de l’eau limpide, on rassemble autant de petites pierres qu’il y a de personnes soupçonnées, on les fait bouillir dans cette eau, on les enterre sous le seuil de la porte par où doit passer le voleur ou la sorcière, en y joignant une lame d’étain sur laquelle sont écrits ces mots : Christus vincit, Christus regnat, Christus imperat. On a eu soin de donner à chaque pierre le nom de l’une des personnes qu’on a lieu de soupçonner. — On ôte le tout de dessus le seuil de la porte au lever du soleil ; si la pierre qui représente le coupable est brûlante, c’est déjà un indice. Mais, comme le diable est sournois, il ne faut pas s’en contenter ; on récite donc les sept psaumes de la pénitence avec les litanies des saints ; on prononce ensuite les prières de l’exorcisme contre le voleur ou la sorcière ; on écrit son nom dans un cercle, on plante sur ce nom un clou d’airain de forme triangulaire, qu’il faut enfoncer avec un marteau dont le manche soit de bois de cyprès, et on dit quelques paroles prescrites à cet effet. Alors le voleur se trahit par un grand cri.

S’il s’agit d’une sorcière, et qu’on veuille seulement ôter le maléfice pour le rejeter sur celle qui l’a fait, on prend, le samedi, avant le lever du soleil, une branche de coudrier d’une année, et on dit l’oraison suivante : « Je te coupe, rameau de cette année, au nom de celui que je veux blesser comme je te blesse. » On met la branche sur la table, en répétant trois fois une certaine prière[71] qui se termine par ces mots : Que le sorcier ou la sorcière soit anathème, et nous saufs !…

Anatolius, philosophe platonicien, maître de Jamblique, et auteur d’un traité Des sympathies et des antipathies, dont Fabricius a conservé quelques fragments dans sa Bibliothèque grecque.

Anaxilas, philosophe pythagoricien qui vivait sous Auguste. On, l’accusa de magie, parce qu’il faisait de mauvaises expériences de physique, et Auguste le bannit. Il fut l’inventeur du flambeau infernal, qui consiste à brûler du soufre dans un lieu privé de lumière, ce qui rend les assistants fort laids.

Andaine, fée suzeraine ou reine, qui chassait avec sa suite dans les bois du château de Rasnes, et qui en épousa le seigneur[72].

Anderson (Alexandre). Voy. Vampires, à la fin de l’article.

Andrade, médecin qui eut des révélations en 853. Elles sont peu curieuses ; cependant Duchesne les a recueillies dans sa collection des historiens français[73].

Andras, grand marquis aux enfers. On le voit avec le corps d’un ange, la tête d’un chat-huant, à cheval sur un loup noir et portant à la main un sabre pointu. Il apprend à ceux qu’il favorise à tuer leurs ennemis, maîtres et serviteurs ; c’est lui qui élève les discordes et les querelles ; il commande trente légions.

 
Andras
Andras
 

André (Tobie), auteur d’un livre Sur le pouvoir des mauvais anges, rare et peu recherché[74].

Andreæ (Jean-Valentin), luthérien, né dans le duché de Wurtemberg en 1596, mort en 1654. Ses connaissances confuses, son activité mal réglée, les mystérieuses allusions qui se remarquent dans ses premiers ouvrages, l’ont fait regarder comme le fondateur du fameux ordre des Rose-Croix. Plusieurs écrivains allemands lui attribuent au moins la réorganisation de cet ordre secret, affilié depuis à celui des Francs-Maçons, qui révèrent encore la mémoire d’Andreæ. — Ses ouvrages, au nombre de cent, prêchent généralement la nécessité des sociétés secrètes, surtout la République Christianopolitaine, la Tour de Babel, le Chaos des jugements portés sur la fraternité de la Rose-Croix, l’idée d’une société chrétienne, la Réforme générale du monde, et les Noces chimiques de Chrétien Rosencreutz. — On attribue, à Andreæ des voyages merveilleux, une existence pleine de mystère, et des prodiges qu’on à copiés récemment en grande partie dans la peinture qu’on nous a faite des tours de passe-passe de Cagliostro.

Andriague, animal fabuleux, espèce de cheval ou de griffon ailé, que les romans de chevalerie donnent quelquefois aux magiciens, qu’ils prêtent même à leurs héros, et qu’on retrouve aussi dans des contes de fées.

Androalphus, puissant démon, marquis de l’empire infernal ; il se montre sous la figure d’un paon à la voix grave. Quand il paraît avec la forme humaine, on peut le contraindre à donner des leçons de géométrie. Il est astronome, et il enseigne de plus à ergoter habilement. Il donne aux hommes des figures d’oiseaux ; ce qui permet à ceux qui commercént avec lui d’éviter la griffe des juges. Trente légions sont sous ses ordres[75].

Androgina. Bodin et Delancre content[76] qu’en 1536, à Casale, en Piémont, on remarqua qu’une sorcière, nommée Androgina, entrait dans les maisons, et que bientôt après on y mourait. Elle fut prise et livrée aux juges ; elle confessa que quarante sorcières avaient composé avec elle le maléfice. C’était un onguent dont elles allaient graisser les loquets des portes; ceux qui touchaient ces loquets mouraient en peu de jours. — « La même chose advint à Genève en 1563, ajoute Delancre, si bien qu’elles y mirent la peste, qui dura plus de sept ans. Cent soixante-dix sorcières avaient été exécutées à Rome pour cas semblable, sous le consulat de Claudius Marcellus et de Valerius Flaccus : mais la sorcellerie n’étant pas encore bien reconnue, on les prenait simplement alors pour ce qu’elles étaient : des empoisonneuses… »

Androïdes, automates à figure humaine. — Voy. Albert le Grand.

Âne. Les Égyptiens traçaient son image sur les gâteaux qu’ils offraient à Typhon, dieu du mal. Les Romains regardaient la rencontre de l’âne comme un mauvais présage. Mais cet animal était honoré dans l’Arabie.

Certains peuples trouvaient quelque chose de mystérieux dans cette innocente bête, et on pratiquait autrefois une divination dans laquelle on employait une tête d’âne. Voy. Kephalonomancie. Ce n’est pas ici le lieu de parler de la fête de l’Âne. Mais relevons une croyance populaire qui fait de la croix noire qu’il porte sur le dos une distinction accordée à l’espèce, à cause de l’ânesse de Bethphagé. C’est un fait assez singulier.

 
Âne
Âne
 

Chez les indiens du Maduré, une des premières castes, celle des cavaravadouks, prétend descendre d’un âne ; ceux de cette caste traitent les ânes en frères, prennent leur défense, poursuivent en justice, et font condamner à l’amende quiconque les charge trop ou les bat et les outrage sans raison. Dans les temps de pluie, ils donneront le couvert à un âne avant de le donner à son conducteur, s’il n’est pas de certaine condition[77].

Voici une vieille fable sur l’âne : Jupiter venait de prendre possession de l’empire ; les hommes, à son avénement, lui demandèrent un printemps éternel, ce qu’il leur accorda ; il chargea l’âne de Silène de porter sur la terre ce présent. L’âne eut soif, et s’approcha d’une fontaine ; le serpent qui la gardait, pour lui permettre d’y boire, lui demanda le trésor dont il était porteur, et le pauvre animal troqua le don du ciel contre un peu d’eau. C’est depuis ce temps, dit-on, que les vieux serpents changent de peau et rajeunissent perpétuellement.

Mais il y a des ânes plus adroits que celui-là : à une demi-lieue du Kaire se trouvait, dans une grande bourgade, un bateleur qui avait un âne si instruit que les manants le prenaient pour un démon déguisé. Son maître le faisait danser ; ensuite il lui disait que le soudan voulait construire un bel édifice, et qu’il avait résolu d’employer tous les ânes du Kaire à porter la chaux, le mortier et la pierre. Aussitôt l’âne se laissait tomber, raidissait les jambes, et fermait les yeux comme s’il eût été mort. Le bateleur se plaignait de la mort de son âne, et priait qu’on lui donnât un peu d’argent pour en acheter un autre.

Après avoir recueilli quelque monnaie : Ah ! disait-il, il n’est pas mort, mais il a fait semblant de l’être, parce qu’il sait que je n’ai pas le moyen de le nourrir. — Lève-toi, ajoutait-il. — L’âne n’en faisait rien. Ce que voyant, le maître annonçait que le soudan avait fait crier à son de trompe que le peuple eût à se trouver le lendemain hors de la ville du Kaire pour y voir de grandes magnificences. — Il veut, poursuivait-il, que les plus nobles dames soient montées sur des ânes…

L’âne se levait à ces mots, dressant la tête et les oreilles en signe de joie. — Il est vrai, reprenait le bateleur, que le gouverneur de mon quartier m’a prié de lui prêter le mien pour sa femme, qui est une vieille roupilleuse édentée.

L’âne baissait aussitôt les oreilles, et commençait à clocher comme s’il eût été boiteux[78].

Ces ânes merveilleux, disent les démonographes, étaient sinon des démons, au moins des hommes métamorphosés ; comme Apulée, qui fut, ainsi qu’on sait, transmué en âne. L’auteur du Speculum naturæ raconte la légende de deux femmes qui tenaient une petite auberge auprès de Rome, et qui allaient vendre leurs hôtes au marché après les avoir changés en pourceaux, en poulets, en moutons. Une d’elles, ajoute-t-il, transforma un comédien en âne, et comme il conservait ses talents sous sa nouvelle peau, elle le menait dans les foires des environs, où il lui gagnait beaucoup d’argent. Un voisin acheta très-cher cet âne savant. En le lui livrant, la sorcière se borna à lui recommander de ne pas le laisser entrer dans l’eau, ce que le nouveau maître de l’âne observa quelque temps. Mais un jour le pauvre animal, ayant trouvé moyen de rompre son licou, se jeta dans un lac, où il reprit sa forme naturelle, au grand étonnement de son conducteur. L’affaire, dit le conte, fut portée au juge, qui fit châtier les deux sorcières.

Les rabbins font très-grand cas de l’ânesse de Balaam. C’est, disent-ils, un animal privilégié que Dieu forma à la fin du sixième jour. Abraham se servit d’elle pour porter le bois destiné au sacrifice d’Isaac ; elle porta ensuite la femme et le fils de Moïse dans le désert. Ils assurent que cette ânesse est soigneusement nourrie, et réservée dans un lieu secret jusqu’à l’avénement du Messie juif, qui doit la monter pour soumettre toute la terre. Voy. Borack.

Angada, roi des singes ; il aida le dieu Rama (septième incarnation de Vichnou) dans son expédition contre Ravana.

Angat. Nom du diable à Madagascar, où il est regardé comme un génie sanguinaire et cruel. On lui donne la figure du serpent.

Angelieri, Sicilien du dix-septième siècle qui n’est connu que par un fatras dont il publia deux volumes, et dont il en promettait vingt-quatre, sous le titre de Lumière magique, ou origine, ordre et gouvernement de toutes les choses célestes, terrestres et infernales, etc.[79]. Mongitore en parle dans le tome Ier de sa Bibliothèque sicilienne.

Angélique, plante qui passe pour un préservatif contre les fascinations de la magie. On la mettait en manière d’amulette au cou des petits enfants pour les garantir des maléfices.

Angerbode ou Angurbode, femme gigantesque qui se maria avec Lock, selon l’opinion des Scandinaves, et qui enfanta trois monstres : le loup Fenris, le serpent Jormungandur et la démone Héla qui garde le monde souterrain.

Anges. Saint Augustin prouve que les anges ont été créés dans l’œuvre des six jours, car ils ne l’ont pas été avant, puisqu’il n’existait alors aucune créature ; ils ne l’ont pas été après, puis que Dieu dit dans l’Écriture : « Quand les astres furent formés, tous mes anges me louèrent à haute voix. » Ils ont probablement reçu l’existence quand le Créateur dit : « Que la lumière soit ! » parole qui s’applique toujours tout ensemble, suivant le grand évêque d’Hippone, au monde visible et au monde invisible.

Quel est leur nombre ? Daniel en vit mille millions qui servaient le Seigneur, et dix mille millions qui étaient devant lui. Les bienheureuses armées des esprits supérieurs forment, dit l’Aréopagite, une multitude que nous ne pouvons compter. Puisque Dieu veut la perfection dans ses ouvrages, poursuit l’Ange de l’école, plus une chose est parfaite, plus elle est multipliée ; de sorte que les substances immatérielles sont incomparablement plus nombreuses que les substances matérielles.

 
Anges
Anges
Anges.
 

La théologie a donné des ailes aux anges, dit saint Denis l’Aréopagite, pour marquer la célérité de leur mouvement. Tertullien reprend : Ils peuvent se transporter partout en un moment. Albert le Grand signale quelques erreurs sur le mouvement angélique. « Les uns croient, dit-il, que les anges se meuvent par la pensée. Opinion fausse. Quand je me représente Constantinople, Calcutta, Canton, ma pensée ne traverse pas les régions de l’Orient ; elle trouve là, dans mon cerveau, les idées qui fixent son regard. Si donc les esprits célestes se mouvaient comme la pensée, ils resteraient dans le même lieu. » Albert le Grand continue : « D’autres pensent que les anges se meuvent par l’effet des vertus qui leur obéissent. Cette opinion va droit à l’hérésie : elle est contraire à l’enseignement des livres saints. Commander à des forces actives, leur donner l’impulsion, les diriger en quelque sorte à travers l’espace, ce n’est pas se mouvoir soi-même. Or, l’Écriture sainte attribue en mille endroits le mouvement personnel aux célestes intelligences, D’autres disent enfin que les anges se meuvent par la faculté qu’ils ont d’être en même temps dans plusieurs lieux, même partout quand ils le désirent. Mais cette opinion mérite aussi la note d’hérésie. L’être qui est partout ne se meut point, et un esprit supérieur qui pourrait être partout serait immense, infini : il serait Dieu[80].

Les Juifs, à l’exception des sadducéens, admettaient et honoraient les anges, en qui ils voyaient, comme nous, des substances spirituelles, intelligentes, les premières en dignité entre les créatures, et qui, pour nous, n’ont au-dessus d’eux que la sainte Vierge.

Les rabbins, qui depuis la dispersion ont tout altéré, et qui placent la création des anges au second jour, ajoutent qu’ayant été appelés au conseil de Dieu, lorsqu’il voulut former l’homme, leurs avis furent partagés, et que Dieu fit Adam à leur insu, pour éviter leurs murmures. Ils reprochèrent néanmoins à Dieu d’avoir donné trop d’empire à Adam. Dieu soutint l’excellence de son ouvrage, parce que l’homme devait le louer sur la terre, comme les anges le louaient dans le ciel. II leur demanda ensuite s’ils savaient le nom de toutes les créatures ? Ils répondirent que non ; et Adam, qui parut aussitôt, les récita tous sans hésiter, ce qui les confondit.

L’Écriture sainte a conservé quelquefois aux démons le nom d’anges, mais anges de ténèbres, anges déchus ou mauvais anges. Leur chef lest appelé le grand dragon et l’ancien serpent, à cause de la forme qu’il prit pour tenter la femme.

Zoroastre enseignait l’existence d’un nombre infini d’anges ou d’esprits médiateurs, auxquels il attribuait non-seulement un pouvoir d’intercession subordonné à la providence continuelle de Dieu, mais un pouvoir aussi absolu que celui que les païens prêtaient à leurs dieux[81]. C’est le culte rendu à des dieux secondaires que saint Paul a condamné[82].

 
Anges
Anges
 

Les musulmans croient que les hommes ont chacun deux anges gardiens, dont l’un écrit le bien qu’ils font, et l’autre le mal. Ces anges sont si bons, ajoutent-ils, que, quand celui qui est sous leur garde fait une mauvaise action, ils le laissent dormir avant de l’enregistrer, espérant qu’il pourra se repentir à son réveil. Les Persans donnent a chaque homme cinq anges-gardiens, placés : le premier à sa droite pour écrire ses bonnes actions, le second à sa gauche pour écrire les mauvaises, le troisième devant lui pour le conduire, le quatrième derrière pour le garantir des démons, et le cinquième, devant son front pour tenir son esprit élevé vers le Prophète. D’autres en ce pays portent le nombre des anges gardiens de chaque homme jusqu’à cent soixante ; ce qui est une grande vanité.

Les Siamois divisent les anges en sept ordres, et les chargent de la garde des planètes, des villes, des personnes. Ils disent que c’est pendant qu’on éternue que les mauvais anges écrivent les fautes des hommes.

Ange
Ange

Les théologiens admettent neuf chœurs d’anges, en trois hiérarchies : les séraphins, les chérubins, les trônes ; — les dominations, les principautés, les vertus des cieux ; — les puissances, les archanges et les anges.

Parce que des anges, en certaines occasions où Dieu l’a voulu, ont secouru les Juifs contre leurs ennemis, les peuples modernes ont quelquefois attendu le même prodige. Le jour de la prise de Constantinople par Mahomet II, les Grecs schismatiques, comptant sur la prophétie d’un de leurs moines, se persuadaient que les Turcs n’entreraient pas dans la ville, mais qu’ils seraient arrêtés aux murailles par un ange armé d’un glaive, qui les chasserait et les repousserait jusqu’aux frontières de la Perse. Quand l’ennemi parut sur la brèche, le peuple et l’armée se réfugièrent dans le temple de Sainte-Sophie, sans avoir perdu tout espoir ; mais l’ange n’arriva pas, et la ville fut saccagée.

Cardan raconte qu’un jour qu’il était à Milan, le bruit se répandit tout à coup qu’il y avait un ange dans les airs au-dessus de la ville. Il accourut et vit, ainsi que deux mille personnes rassemblées, un ange qui planait dans les nuages, armé d’une longue épée et les ailes étendues. Les habitants s’écriaient que c’était l’ange exterminateur ; et la consternation devenait générale, lorsqu’un ecclésiastique fit remarquer que ce qu’on voyait n’était que la représentation dans les nuées d’un ange de marbre blanc placé au haut du clocher de Saint-Gothard.

Angeweiller (Le comte d’) épouse de la main gauche une fée qui lui laisse des dons merveilleux. Voy. Fées[83].

Anguekkok, espèce de sorciers auxquels les Groenlandais ont recours dans leurs embarras. Quand les veaux marins ne se montrent pas en assez grand nombre, on va prier l’anguekkok d’aller trouver la femme prodigieuse qui, selon la tradition, a traîné la grande île de Disco de la rivière de Baal, où elle était située autrefois, pour la placer à plus de cent lieues de là, à l’endroit ou elle se trouve aujourd’hui. D’après la légende, cette femme habite au fond de la mer, dans une vaste maison gardée par les veaux marins ; des oiseaux de mer nagent dans sa lampe d’huile de poisson, et les habitants de l’abîme se réunissent autour d’elle, attirés par son éclat, sans pouvoir la quitter, jusqu’à ce que l’anguekkok la saisisse par les cheveux, et, lui enlevant sa coiffure, rompe le charme qui les retenait auprès d’elle.

Quand un Groenlandais tombe malade, c’est encore l’anguekkok qui lui sert de médecin ; il se charge également de guérir les maux du corps et ceux de l’âme[84]. Voy. Torngarsuk.

Anguille. Les livres de secrets merveilleux donnent à l’anguille des vertus surprenantes. Si on la laisse mourir hors de l’eau, qu’on mette ensuite son corps entier dans de fort vinaigre mêlé avec du sang de vautour, et qu’on place le tout sous du fumier, cette composition « fera ressusciter tout ce qui lui sera présenté, et lui redonnera la vie comme auparavant[85] ».

Des autorités de la même force disent encore que celui qui mange le cœur tout chaud d’une anguille sera saisi d’un instinct prophétique, et prédira les choses futures.

Les Égyptiens adoraient l’anguille, que leurs prêtres seuls avaient droit de manger.

On a beaucoup parlé, dans le dernier siècle, des anguilles formées de farine ou de jus de mouton ; c’était une de ces plaisanteries qu’on appelle aujourd’hui des canards.

N’oublions pas le petit trait d’un avare, rapporté par Guillaume de Malmesbury, doyen d’Elgin, dans la province de Murray, en Écosse, lequel avare fut, par magie, changé en anguille et mis en matelote[86].

Animaux. Ils jouent un grand rôle dans les anciennes mythologies. Les païens en adoraient plusieurs, ou par terreur, ou par reconnaissance, ou par suite des doctrines de la métempsycose. Chaque dieu avait un animal qui lui était dévoué.

Les anciens philosophes avaient parfois, au sujet des animaux, de singulières idées. Celse, qui a été si bien battu par Origène, soutenait que les animaux ont plus de raison, plus de sagesse, plus de vertu que l’homme (peut-être jugeait-il d’après lui-même), et qu’ils sont dans un commerce plus intime avec la Divinité. Quelques-uns ont cherché dans de telles idées l’origine du culte que les Égyptiens rendaient à plusieurs animaux. Mais d’autres mythologues vous diront que ces animaux étaient révérés, parce qu’ils avaient prêté leur peau aux dieux égyptiens en déroute et obligés de se travestir. Voy. Âme des bêtes.

Divers animaux sont très-réputés dans la sorcellerie, comme le coq, le chat, le crapaud, le bouc, le loup, le chien, ou parce qu’ils accompagnent les sorcières au sabbat, ou pour les présages qu’ils donnent, ou parce que les magiciens et les démons empruntent leurs formes. Nous en parlerons à leurs articles particuliers.

Dix animaux sont admis dans le paradis de Mahomet : la baleine de Jonas, la fourmi de Salomon, le bélier d’Ismaël, le veau d’Abraham, l’ânesse de Balaam, la chamelle du prophète Saleh, le bœuf de Moïse, le chien des sept dormants, le coucou de Balkis, reine de Saba, et la mule de Mahomet. Voy. Borack.

Nous ne dirons qu’un mot d’une erreur populaire qui, aujourd’hui, n’est plus très-enracinée. On croyait autrefois que toutes les espèces qui sont sur la terre se trouvaient aussi dans la mer. Le docteur Brown a prouvé que cette opinion n’était pas fondée. « Il serait bien difficile, dit-il, de trouver l’huître sur la terre ; et la panthère, le chameau, la taupe ne se rencontrent pas dans l’histoire naturelle des poissons. D’ailleurs le renard, le chien, l’âne, le lièvre de mer ne ressemblent pas aux animaux terrestres qui portent le même nom. Le cheval marin n’est pas plus un cheval qu’un aigle ; le bœuf de mer n’est qu’une grosse raie ; le lion marin, une espèce d’écrevisse et le chien marin ne représente pas plus le chien de terre que celui-ci ne ressemble a l’étoile Sirius, qu’on appelle aussi le chien[87]. »

Il serait long et hors de propos de rapporter ici toutes les bizarreries que l’esprit humain a enfantées par rapport aux animaux. Voy. Bêtes. etc.

Aniran, génie musulman qui préside aux noces.

Anjorrand. Voy. Denis.

Anka. Voy. Simorgue.

Annaberge, démon terrible parmi les démons gardiens des mines. Il tua un jour plusieurs ouvriers dans la riche mine d’argent de l’Allemagne appelée Corona Rosacea.

« L’annaberge se montrait sous la forme d’un bouc avec des cornes d’or, et se précipitait sur les mineurs avec impétuosité, ou sous la forme d’un cheval, qui jetait la flamme et la peste par ses naseaux. » Ce terrible annaberge pouvait bien n’être qu’un esprit très-connu aujourd’hui des chimistes sous le nom de feu grisou. La lampe de sûreté d’Humphrey Davy aurait été un talisman précieux aux mineurs de la Couronne de roses[88].

Annabry, l’un des sept princes de l’enfer qui se montrèrent un jour à Faust. Il était en chien noir et blanc, avec des oreilles longues de quatre aunes[89]. Voy. Faust.

Anne l’Écossaise. — Voy. Auxonne.

Anneau. Il y avait autrefois beaucoup d’anneaux enchantés ou chargés d’amulettes. Les magiciens faisaient des anneaux constellés avec lesquels on opérait des merveilles. Voy. Éléazar. — Cette croyance était si répandue chez les païens, que leurs prêtres ne pouvaient porter d’anneaux, a moins qu’ils ne fussent si simples qu’il était évident qu’ils ne contenaient pas d’amulettes[90].

Les anneaux magiques devinrent aussi de quelque usage chez les chrétiens, et même beaucoup de superstitions se rattachèrent au simple anneau d’alliance. On croyait qu’il y avait dans le quatrième doigt, qu’on appela spécialement doigt annulaire ou doigt destiné à l’anneau, un nerf qui répondait directement au cœur ; on recommanda donc de mettre l’anneau d’alliance à ce seul doigt. Le moment où le mari donne l’anneau à sa jeune épouse devant le prêtre, ce moment, dit un vieux livre de secrets, est de la plus haute importance. Si le mari arrête l’anneau à l’entrée du doigt et ne passe pas la seconde jointure, la femme sera maîtresse ; mais s’il enfonce l’anneau jusqu’à l’origine du doigt, il sera chef et souverain. Cette idée est encore en vigueur, et les jeunes mariées ont généralement soin de courber le doigt annulaire au moment où elles reçoivent l’anneau, de manière a l’arrêter avant la seconde jointure.

Les Anglaises, qui observent la même superstition, font le plus grand cas de l’anneau d’alliance, à cause de ses propriétés. Elles croient qu’en mettant un de ces anneaux dans un bonnet de nuit, et plaçant le tout sous leur chevet, elles verront en songe le mari qui leur est destiné.

Les Orientaux révèrent les anneaux et les bagues, et croient aux anneaux enchantés. Leurs contes sont pleins de prodiges opérés par ces anneaux. Ils citent surtout, avec une admiration sans bornes, l’anneau de Salomon, par la force duquel ce prince commandait à toute la nature. Le grand nom de Dieu est gravé sur cette bague, qui est gardée par des dragons, dans le tombeau inconnu de Salomon. Celui qui s’emparerait de cet anneau serait maître du monde et aurait tous les génies à ses ordres. Voy. Sakhar. — À défaut de ce talisman prodigieux, ils achètent à des magiciens des anneaux qui produisent aussi des merveilles.

L’abominable Henri VIII bénissait des anneaux d’or, qui avaient, disait-il, la propriété de guérir de la crampe[91]. Les faiseurs de secrets ont inventé des bagues magiques qui ont plusieurs vertus. Leurs livres parlent de l’anneau des voyageurs. Cet anneau, dont le secret n’est pas bien certain, donnait à celui qui le portait le moyen d’aller sans fatigue de Paris à Orléans, et de revenir d’Orléans à Paris dans la même journée.

Anneau d’invisibilité. On n’a pas perdu le secret de l’anneau d’invisibilité. Les cabalistes ont laissé la manière de faire cet anneau, qui plaça Gygès au trône de Lydie. Il faut entreprendre cette opération un mercredi de printemps, sous les auspices de Mercure, lorsque cette planète se trouve en conjonction avec une des autres planètes favorables, comme la Lune, Jupiter, Vénus et le Soleil. Que l’on ait de bon mercure fixé et purifié ; on en formera une bague où puisse entrer facilement le doigt du milieu ; on enchâssera dans le chaton une petite pierre que l’on trouve dans le nid de la huppe, et on gravera autour de la bague ces paroles : Jésus passant au milieu d’eux s’en alla[92] ; puis, ayant posé le tout sur une plaque de mercure fixé, on fera le parfum de Mercure ; on enveloppera l’anneau dans un taffetas de la couleur convenable à la planète, on le portera dans le nid de la huppe d’où l’on a tiré la pierre, on l’y laissera neuf jours ; et quand on le retirera, on fera encore le parfum comme la première fois ; puis on le gardera dans une petite boîte faite avec du mercure fixé, pour s’en servir à l’occasion. Alors on mettra la bague a son doigt. En tournant la pierre au dehors de la main, elle a la vertu de rendre invisible aux yeux des assistants celui qui la porte ; et quand on veut être vu, il suffit de rentrer la pierre en dedans de la main, que l’on ferme en forme de poing.

Porphyre, Jamblique, Pierre d’Apone et Agrippa, ou du moins les livres de secrets qui leur sont attribués, soutiennent qu’un anneau fait de la manière suivante a la même propriété. Il faut prendre des poils qui sont au-dessus de la tête de l’hyène, et en faire de petites tresses avec lesquelles son fabrique un anneau, qu’on porte aussi dans le nid de la huppe. On le laisse là neuf jours ; on le passe ensuite dans des parfums préparés sous les auspices de Mercure (planète). On s’en sert comme de l’autre anneau, excepté qu’on l’ôte absolument du doigt quand on ne veut plus être invisible.

Si, d’un autre côté, on veut se précautionner contre l’effet de ces anneaux cabalistiques, on aura une bague faite de plomb raffiné et purgé ; on enchâssera dans le chaton un œil de jeune belette qui n’aura porté des petits qu’une fois ; sur le contour on gravera les paroles suivantes : Apparuit Domina Simoni. Cette bague se fera un samedi, lorsqu’on connaîtra que Saturne est en opposition avec Mercure. On l’enveloppera dans un morceau de linceul mortuaire qui ait enveloppé un mort ; on l’y laissera neuf jours ; puis, l’ayant retirée, on fera trois fois le parfum de Saturne, et on s’en servira.

Ceux qui ont imaginé ces anneaux ont raisonné sur le principe de l’antipathie qu’ils supposaient entre les matières qui les composent. Rien n’est plus antipathique à la huppe que l’hyène, et Saturne rétrograde presque toujours à Mercure ; ou, lorsqu’ils se rencontrent dans le domicile de quelques signes du zodiaque, c’est toujours un aspect funeste et de mauvais augure[93]. Nous parlons astrologie.

On peut faire d’autres anneaux sous l’influence des planètes, et leur donner des vertus au moyen de pierres et d’herbes merveilleuses. « Mais dans ces caractères, herbes cueillies, constellations et charmes, le diable se coule, » comme dit Leloyer, quand ce n’est pas simplement le démon de la grossière imposture. « Ceux qui observent les heures des astres, ajoute-t-il, n’observent que les heures des démons qui président aux pierres, aux herbes et aux astres mêmes. » — Et il est de fait que ce ne sont ni des saints ni des cœurs honnêtes qui se mêlent de ces superstitions.

Anneberg, démon des mines ; il tua un jour de son souffle douze ouvriers qui travaillaient à une mine d’argent dont il avait la garde. C’est un démon méchant, rancunier et terrible. Il se montre surtout en Allemagne ; on dit qu’il a la figure d’un cheval, avec un cou immense et des yeux effroyables[94]. C’est le même que l’annaberge.

Année. Plusieurs peuples ont célébré par des cérémonies plus ou moins singulières le retour du nouvel an. Chez les Perses, un jeune homme s’approchait du prince et lui faisait des offrandes, en disant qu’il lui apportait la nouvelle année de la part de Dieu. Chez nous, on se donne des étrennes.

Des Gaulois commençaient l’année par la cérémonie du gui de chêne, qu’ils appelaient le gui de l’an neuf ou du nouvel an. Les druides, accompagnés du peuple, allaient dans une forêt, dressaient autour du plus beau chêne un autel triangulaire de gazon, et gravaient sur le tronc et sur les deux plus grosses branches de l’arbre révéré les noms des dieux qu’ils croyaient les plus puissants : Theutatès, Hésus, Taranis, Belenus. Ensuite l’un d’eux, vêtu d’une blanche tunique, coupait le gui avec une serpe d’or ; deux autres druides étaient là pour le recevoir dans un linge et prendre garde qu’il ne touchât la terre. Ils distribuaient l’eau où ils faisaient tremper ce nouveau gui, et persuadaient au peuple qu’elle guérissait plusieurs maladies et qu’elle était efficace contre les sortilèges[95].

Année platonique. On appelle année platonique un espace de temps à la fin duquel tout doit se retrouver à la même place. Les uns comptent seize mille ans pour cette révolution, d’autres trente-six mille[96]. Il y en eut aussi qui croyaient anciennement qu’au bout de cette période le monde serait renouvelé, et que les âmes rentreraient dans leurs corps pour commencer une nouvelle vie semblable à la précédente. On conte là-dessus cette petite anecdote :

Des Allemands, arrêtés dans une auberge de Châlons-sur-Marne, amenèrent la conversation sur cette grande année platonique où toutes les choses doivent retourner à leur premier état ; ils voulurent persuader au maître du logis qu’il n’y avait rien de si vrai que cette révolution ; « de sorte, disaient-ils, que, dans seize mille ans d’ici, nous serons à boire chez vous à pareille heure et dans cette même chambre. »

La-dessus, ayant très-peu d’argent, en vrais Allemands qu’ils étaient, ils prièrent l’hôte de leur faire crédit jusque-là.

Le cabaretier champenois leur répondit qu’il le voulait bien. « Mais, ajouta-t-il, parce qu’il y a seize mille ans, jour pour jour, heure pour heure, que vous étiez pareillement à boire ici comme vous faites, et que vous vous êtes retirés sans payer, acquittez le passé, et je vous ferai crédit du présent… »

Année climatérique. Le préjugé des années climatériques subsiste encore, quoiqu’on en ait à peu près démontré l’absurdité. Auguste écrivait à son neveu Caius pour l’engager à célébrer le jour de sa naissance, attendu qu’il avait passé la soixante-troisième année, — qui est cette grande climatérique si redoutable pour les humains. — Beaucoup de personnes craignent encore l’année climatérique ; cependant une foule de relevés prouvent qu’il ne meurt pas plus d’hommes dans la soixante-troisième année que dans les années qui la précèdent. Mais un préjugé se détruit avec peine. Selon ces idées, que Pythagore fit naître par ses singulières rêveries sur les nombres, notre tempérament éprouve tous les sept ans une révolution complète. Quelques-uns disent même qu’il se renouvelle entièrement. D’autres prétendent que ce renouvellement n’a lieu que tous les neuf ans : aussi les années climatériques se comptent par sept et par neuf. Quarante-neuf et quatre-vingt-un sont des années très-importantes, disent les partisans de cette doctrine ; mais soixante-trois est l’année la plus fatale, parce que c’est la multiplication de sept par neuf. Un Normand disait : Encore un des miens pendu à quarante-neuf ans ! et qu’on dise qu’il ne faut pas se méfier des années climatériques !

 
Allemands causant de l’année platonique
Allemands causant de l’année platonique
Allemands causant de l’année platonique.
 


« On ne doit pourtant pas porter trop loin, dit M. Salgues, le mépris de la période septénaire, qui marque en effet les progrès du développement et de l’accroissement du corps humain. Ainsi, généralement, les dents de l’enfance tombent à sept ans, la puberté se manifeste à quatorze, le corps cesse de croître à vingt et un. » — Mais cette observation n’est pas complètement exacte.

Anninga, la lune chez les Groënlandais. C’était au commencement un jeune garçon qui aimait à courir les champs avec sa sœur Malina. Or un jour qu’il la poursuivait, elle se retourna tout à coup et lui barbouilla de noir la figure. Après quoi Malina, perdant terre, s’élança dans le ciel, où elle devint le soleil. Anninga, qui n’a cessé de la poursuivre, est devenu la lune.

Annius de Viterbe (Jean Nanni), savant ecclésiastique, né à Viterbe en 1432. Il a publié une collection de manuscrits attribués à Bérose, à Fabius Pictor, à Caton, à Archiloque, à Manéthon, etc., et connus sous le nom d’Antiquités d’Annius. Ce recueil a peu de crédit. On prétend qu’il contient beaucoup de fables ; mais plusieurs de ces fables sont d’antiques légendes.

On doit encore à Annius un Traité de l’empire des Turcs, et un livre des Futurs triomphes des chrétiens sur les Turcs et les Sarasins, etc. Ces deux ouvrages sont des explications de l’Apocalypse. L’auteur pense que Mahomet est l’Antéchrist, et que la fin du monde aura lieu quand le peuple des saints (les chrétiens) aura soumis entièrement les juifs et les mahométans.

Anocchiatura, fascination involontaire qui s’exerce soit par les yeux, soit par les paroles, selon les croyances populaires des Corses, mais dans un sens très-bizarre, les puissances mystérieuses qui président à l’anocchiatura ayant la singulière habitude d’exécuter le contraire de ce qu’on souhaite. Aussi, dans la crainte de fasciner les enfants en leur adressant des bénédictions ou des éloges, le peuple qui leur veut du bien le leur prouve par des injures et des souhaits d’autant plus favorables qu’ils sont plus affreusement exprimés[97].

Anpiel, l’un des anges que les rabbins chargent du gouvernement des oiseaux ; car ils mettent chaque espèce créée sous la protection d’un ou de plusieurs anges.

Anselme de Parme, astrologue né à Parme, où il mourut en 1440. Il avait écrit des Institutions astrologiques, qui n’ont pas été imprimées. Wierus[98] et quelques démonographes le mettent au nombre des sorciers. Des charlatans, qui guérissaient les plaies au moyen de paroles mystérieuses que l’on prétend inventées par lui, ont pris le nom d’anselmistes ; et, pour mieux en imposer, ils se vantaient de tenir leur vertu de guérir non d’Anselme de Parme, mais de saint Anselme de Cantorbéry. Voy. Art de saint Anselme.

 
Anocchiatura
Anocchiatura
Anocchiatura.
 

Ansuperomain, sorcier des environs de Saint-Jean-de-Luz, qui, selon des informations prises sous Henri IV par le conseiller Pierre Delancre[99], fut vu plusieurs fois au sabbat, à cheval sur un démon qui avait la forme de bouc, et jouant de la flûte pour la danse des sorcières.

Anthæus. Il y a, comme dit Boguet, des familles où il se trouve toujours quelqu’un qui devient loup-garou. Évanthes et après lui Pline rapportent que dans la race d’un certain Anthæus, Arcadien, on choisissait par le sort un homme que l’on conduisait près d’un étang. Là, il se dépouillait, pendait ses habits à un chêne ; et, après avoir passé l’eau à la nage, s’enfuyait dans un désert où, transformé en loup, il vivait et conversait avec les loups pendant neuf ans. Il fallait que durant ce temps il ne vît point d’hommes ; autrement le cours des neuf ans eût recommencé. Au bout de ce terme il retournait vers le même étang, le traversait à la nage et rentrait chez lui, où il ne se trouvait pas plus âgé que le jour de sa transmutation en loup : le temps qu’il avait passé sous cette forme ne faisant pas compte dans le nombre des années de sa vie[100].

Antamtapp, enfer des Indiens, plein de chiens enragés et d’insectes féroces. On y est couché sur des branches d’épines et continuellement caressé par des corbeaux à bec de fer. Les Brahmes disent que les supplices de cet enfer sont éternels.

Antéchrist. Par Antéchrist on entend ordinairement un tyran impie et cruel, ennemi de Jésus-Christ. Il doit régner sur la terre lorsque le monde approchera de sa fin. Les persécutions qu’il exercera contre les élus seront la dernière et la plus terrible épreuve qu’ils auront à subir ; et même Notre-Seigneur a déclaré que les élus y succomberaient, si le temps n’en était abrégé en leur faveur ; car il se donnera pour le Messie et fera des prodiges capables d’induire en erreur les élus mêmes.

Leloyer rapporte cette opinion populaire, que les démons souterrains ne gardent que pour lui les trésors cachés, au moyen desquels il pourra séduire les peuples ; et sa persécution sera d’autant plus redoutable, qu’il ne manquera d’aucun moyen de séduire, et agira beaucoup plus par la corruption que par la violence brutale. C’est à cause des miracles qu’il doit faire que plusieurs l’appellent le singe de Dieu.

Le mot de passe des sectateurs de l’Antéchrist sera, dit Boguet : Je renie le baptême.

Ce qui est assez grotesque, assurément, c’est que les protestants, ces précurseurs de l’Antéchrist, donnent le nom d’Antéchrist au pape, comme les larrons qui crient au voleur pour détourner d’eux les recherches[101]. Voy. Abdeel.

On a raillé l’abbé Fiard, qui regardait Voltaire et les encyclopédistes comme des précurseurs de l’Antéchrist. Il est très-possible que les railleurs aient tort.

Antesser, démon. Voy. Blokula.

Anthropomancie, divination par l’inspection des entrailles d’hommes ou de femmes éventrés. Cet horrible usage était très-ancien. Hérodote dit que Ménélas, retenu en Égypte par les vents contraires, sacrifia à sa barbare curiosité deux enfants du pays, et chercha à savoir ses destinées dans leurs entrailles. Héliogabale pratiquait cette divination. Julien l’Apostat, dans ses opérations magiques et dans ses sacrifices nocturnes, faisait tuer, dit-on, un grand nombre d’enfants pour consulter leurs entrailles. Dans sa dernière expédition, étant à Carra, en Mésopotamie, il s’enferma dans le temple de la Lune ; et, après avoir fait ce qu’il voulut avec les complices de son impiété, il scella les portes, et y posa une garde qui ne devait être levée qu’à son retour. Il fut tué dans la bataille qu’il livra aux Perses, et ceux qui entrèrent dans le temple de Carra sous le règne de Jovien, son successeur, y trouvèrent une femme pendue par les cheveux, les mains étendues, le ventre ouvert et le foie arraché.

Anthropophages. Le livre attribué à Énoch dit que les géants nés du commerce des anges avec les filles des hommes furent les premiers anthropophages. Marc-Paul rapporte que de son temps, dans la Tartarie, les magiciens avaient le droit de manger la chair des criminels ; les sorciers ont été souvent convaincus d’anthropophagie, notamment les loups-garous, et des écrivains ont relevé ce fait notable qu’il n’y a que les chrétiens qui n’aient pas été anthropophages.

Antide. Une vieille tradition populaire rapporte que saint Antide, évêque de Besançon, vit un jour dans la campagne un démon fort maigre et fort laid, qui se vantait d’avoir porté le trouble dans l’Église de Rome. Le saint appela le démon, le fit mettre à quatre pattes, lui sauta sur le dos, se fit par lui transporter à Rome, répara le dégât dont l’ange déchu se montrait si fier, et s’en revint en son diocèse par la même voiture.

Antiochus, moine de Séba, qui vivait au commencement du septième siècle. Dans ses 190 homélies, intitulées Pandectes des divines Écritures, la 84e, De insomniis, roule sur les visions et les songes[102].

Antipathie. Les astrologues prétendent que ce sentiment d’opposition qu’on ressent pour une personne ou pour une chose est produit par les astres. Ainsi deux personnes nées sous le même aspect auront un désir mutuel de se rapprocher, et s’aimeront sans savoir pourquoi ; de même que d’autres se haïront sans motif, parce qu’elles seront nées sous des conjonctions opposées. Mais comment expliqueront-ils les antipathies que les grands hommes ont eues pour les choses les plus communes ? On en cite un grand nombre auxquelles on ne peut rien comprendre. La Mothe-le-Vayer ne pouvait souffrir le son d’aucun instrument, et goûtait le plus vif plaisir au bruit du tonnerre. César n’entendait pas le chant du coq sans frissonner. Le chancelier Bacon tombait en défaillance toutes les fois qu’il y avait une éclipse de lune. Marie de Médicis ne pouvait supporter la vue d’une rose, pas même en peinture, et elle aimait toutes les autres fleurs. Le cardinal Henri de Cardonne éprouvait la même aversion, et tombait en syncope lorsqu’il sentait l’odeur des roses. Le maréchal d’Albret se trouvait mal dans un repas où l’on servait un marcassin ou un cochon de lait. Henri III ne pouvait rester seul dans une chambre où il y avait un chat. Le maréchal de Schomberg avait la même faiblesse. Ladislas, roi de Pologne, se troublait et prenait la fuite quand il voyait des pommes. Scaliger frémissait à l’aspect du cresson. Érasme ne pouvait sentir le poisson sans avoir la fièvre. Tycho-Brahé défaillait à la rencontre d’un lièvre ou d’un renard. Le duc d’Épernon s’évanouissait à la vue d’un levraut. Cardan ne pouvait souffrir les œufs ; le poète Arioste, les bains ; le fils de Crassus, le pain ; Jules César Scaliger, le son de la vielle.

On trouve souvent la cause de ces antipathies dans les premières sensations de l’enfance. Une dame qui aimait beaucoup les tableaux et les gravures s’évanouissait lorsqu’elle en trouvait dans un livre ; elle en dit la raison : étant encore petite, son père l’aperçut un jour qui feuilletait les volumes de sa bibliothèque pour y chercher des images ; il les lui retira brusquement des mains, et lui dit d’un ton terrible qu’il y avait dans ces livres des diables qui l’étrangleraient si elle osait y toucher… Ces menaces absurdes, ordinaires à certains parents, occasionnent toujours de funestes effets qu’on ne peut souvent plus détruire.

Pline assure qu’il y a une telle antipathie entre le loup et le cheval, que si le cheval passe où le loup a passé, il sent aux jambes un engourdissement qui l’empêche de marcher. Un cheval sent le tigre en Amérique, et refuse obstinément de traverser une forêt où son odorat lui annonce la présence de l’ennemi. Les chiens sentent aussi très-bien les loups, avec lesquels ils ne sympathisent pas ; et peut-être serions-nous sages de suivre jusqu’à un certain point, avec les gens que nous voyons la première fois, l’impression sympathique ou antipathique qu’ils nous font éprouver, car l’instinct existe aussi chez les hommes mêmes, qui le surmontent plus ou moins à propos par la raison.

Antipodes. L’existence des antipodes était regardée naturellement comme un conte, dans le temps où l’on croyait que la terre était plate. Mais il n’est pas vrai, comme on l’a perfidement écrit, que le prêtre Virgile fut excommunié par le pape Zacharie pour avoir soutenu qu’il y avait des antipodes. Ce Virgile au contraire, à cause de sa science, fut comblé d’honneurs par le saint-siége et nommé à l’évêché de Salzbourg. D’ailleurs le pape Zacharie savait probablement qu’il y a des antipodes, puisque avant lui Origène, le pape saint Clément et d’autres en avaient parlé. Saint Basile, saint Grégoire de Nysse, saint Athanase et la plupart des Pères n’ignoraient pas la forme sphérique de la terre. On en a le témoignage dans le livre de la Création du monde, écrit par Jean Philoponos au septième siècle.

La plupart des hommes à qui l’éducation n’a pas étendu les bornes de l’esprit croient encore que la terre n’est qu’un grand plateau, et il serait difficile de leur persuader qu’on trouve au-dessous de nous des humains qui ont la tête en bas, et les pieds justement opposés aux nôtres[103].

Les anciens mythologues citent, dans un autre sens, sous le nom d’Antipodes, des peuples fabuleux de la Libye, à qui on attribuait huit doigts aux pieds, et les pieds tournés en arrière. On ajoute qu’avec cela ils couraient comme le vent.

Antithées. Les païens donnaient ce nom à des esprits grossiers, démons du dernier ordre, qui venaient souvent à la place des dieux évoqués par les magiciens et leur jouaient de vilains tours.

Antoine. Saint Antoine est célèbre par les tentations qu’il eut à subir de la part du diable. Ceux qui ont mis leur esprit à la torture pour donner à ces faits un côté plaisant n’ont pas toujours eu autant d’esprit qu’ils ont voulu en montrer. Ils n’égalent certainement pas le bon légendaire, qui conte qu’Antoine, ayant dompté Satan, le contraignit à demeurer auprès de lui sous sa forme la plus convenable, qui était celle d’un cochon. Voy. Ardents.

Apantomancie, divination tirée des objets qui se présentent à l’improviste. Tels sont les présages que donne la rencontre d’un lièvre ou d’un aigle, etc.

Aparctiens, peuples fabuleux que d’anciens conteurs ont placés dans le Septentrion. Ils étaient transparents comme du cristal, et avaient les pieds étroits et tranchants comme des patins, ce qui les aidait merveilleusement à glisser sur leurs lacs gelés. Leur longue barbe ne leur pendait pas au menton, mais au bout du nez. Ils n’avaient point de langue, mais deux solides râteliers de dents, qu’ils frappaient musicalement l’un contre l’autre pour s’exprimer. Ils ne sortaient que la nuit, et se reproduisaient par le moyen de la sueur, qui se congelait et formait un petit. Leur dieu était un ours blanc[104].

Apis, ou mieux Hapi. C’est le bœuf que les Égyptiens adoraient. Il devait être noir et avoir une tache blanche carrée sur le front. Dès qu’il avait trôné vingt-cinq ans dans ses deux étables, qui étaient deux temples, on le noyait, et on lui cherchait un remplaçant. On croit que ce bœuf représentait Osiris.

Apocalypse. Dans cette clôture redoutable du saint livre qui commence par la Genèse, l’esprit de l’homme s’est souvent égaré. La manie de vouloir tout expliquer, quand nous sommes entourés de tant de mystères que nous ne pouvons comprendre ici-bas, a fourvoyé bien des esprits. Après avoir trouvé la bête à sept têtes et l’Antechrist dans divers personnages, on est aussi peu avancé que le premier jour. Newton a échoué, comme les autres, dans l’interprétation de l’Apocalypse. Ceux qui l’ont lue comme un poëme hermétique ont leur excuse dans leur folie. Pour nous, attendons que Dieu lève les voiles.

Il y a eu plusieurs Apocalypses supposées, de saint Pierre, de saint Paul, de saint Thomas, de saint Étienne, d’Esdras, de Moïse, d’Élie, d’Abraham, de Marie, femme de Noé, d’Adam même. Porphyre a cité encore une Apocalypse de Zoroastre.

Apollinaire, plante ainsi nommée chez les païens parce qu’elle était consacrée à Apollon. Les chrétiens lui ont conservé ce nom à cause du grand saint qui l’a porté.

Apollonie de Leuttershausen. Cette femme vivait au temps où s’établit la réforme. Elle habitait avec son mari, Hans Geisselbrecht, le margraviat de Brandebourg. Son histoire a été publiée par Sixte Agricola et Georges Witmer (Ingolstadt, 1584). Gorres l’a résumée dans le quatrième volume de sa Mystique. Nous l’empruntons à ce grand ouvrage. — Hans Geisselbrecht était un chenapan qui passait sa vie à boire, à jurer et à maltraiter sa femme. Un matin, les voisines reprochèrent à la pauvre Apollonie le vacarme qui s’était fait toute la nuit chez elle. Furieuse de subir des reproches après tout ce qu’elle endurait de son mari, elle s’écria : — Si le bon Dieu ne veut pas me délivrer de cet homme violent, eh bien, que le diable vienne à mon aide. — Le soir, lorsque le bétail fut rentré, elle s’en alla traire ses vaches. Alors elle vit voler autour de sa tête deux oiseaux qui semblaient des corbeaux, quoique à cette époque il n’y en eût plus dans le pays. Puis un homme de haute taille parut à ses côtés et lui dit : — Ah ! ma pauvre femme, j’ai bien pitié de vous et de votre triste sort, avec un affreux mari qui dévorera tout ce que vous possédez. Si vous voulez être à moi, je vais vous conduire à l’instant en un lieu charmant où vous pourrez boire, manger, chanter, danser à votre aise, et mener une vie comme vous n’en avez jamais mené jusqu’ici, car le ciel n’est pas tel que vous le représentent vos prêtres ; je vous ferai voir bien autre chose. — Apollonie, sans plus réfléchir, donna sa main à l’inconnu en disant qu’elle voulait bien être à lui. Aussitôt elle fut possédée. Les voisins, un instant après, accoururent à ses cris, car elle venait de se jeter dans un égout situé près de son étable, et elle pouvait s’y noyer. Comme on la remportait dans sa maison, elle s’écriait : — Laissez-moi ! ne voyez-vous pas la vie délicieuse que je mène ; je ne fais que boire, manger, chanter et danser[105]… Il paraît que les exorcismes la guérirent, et nous n’avons pas la suite de son histoire.

Apollonius de Tyane, philosophe pythagoricien, né à Tyane en Cappadoce, peu de temps après Notre-Seigneur Jésus-Christ. C’était un de ces aventuriers qui s’occupaient de théurgie, et qui cherchaient auprès des magiciens et des jongleurs, si nombreux chez les païens, ces secrets mystérieux au moyen desquels ils étonnaient la foule. Il était oublié lorsque l’impératrice Julie, femme de Septime Sévère, princesse de mœurs dissolues, et par conséquent ennemie de l’Évangile, pria Philostrate, autre ennemi des chrétiens, de faire d’Apollonius un héros que l’on pût opposer au Christ. Avec des matériaux recueillis plus d’un siècle après la mort de cet homme, dont on ne se souvenait plus, il composa un récit que Lactance compare à l’Âne d’or d’Apulée. Apollonius de Tyane était un magicien comme Faust, et, comme lui, on l’a entouré de merveilles souvent imaginaires. Sa vie, qui n’est ainsi qu’un roman, a été traduite en français par Vigenère, un volume in-4o[106].

Eusèbe ne parle d’Apollonius de Tyane que comme d’un escamoteur. Leloyer dit que ce fut Simon le magicien qui lui enseigna la magie noire, et Ammien Marcellin le met au nombre des hommes qui ont été assistés d’un démon familier, comme Socrate, Numa et une foule d’autres. On sait peu de choses sur la fin d’Apollonius. Hiéroclès, qui, d’après les récits de Philostrate, voulait faire sa cour à Domitien en vantant ce faiseur de tours de passe-passe, eut le front de dire qu’il avait été enlevé au ciel, tandis que de plus avisés ont écrit qu’il avait été emporté par le diable dans un âge avancé.

Et il n’est pas le seul qui ait eu cette chance, quoique le vulgaire des philosophes n’y voie que du feu. On a dit aussi que, si Aurélien, qui venait de prendre Tyane en Cappadoce, et qui avait juré de la détruire, l’épargna cependant, c’est que le spectre d’Apollonius lui avait apparu et avait intercédé pour sa ville. — Le croira qui voudra.

Il y a eu des gens qui ont trouvé Apollonius vivant au douzième siècle. Voy. Artephius.

Apomazar. Des significations et événements des songes, selon la doctrine des Indiens, Perses et Égyptiens, par Apomazar. Vol. in-8o ; Paris, 1580. Fatras oublié, mais rare.

Apone. Voy. Pierre d’Apone.

A
pparitions. On ne peut pas très-bien préciser ce que c’est qu’une apparition. Dom Calmet dit que si l’on voit quelqu’un en songe, c’est une apparition. « Souvent, ajoute-t-il, il n’y a que l’imagination de frappée ; ce n’en est pas moins quelquefois un fait surnaturel quand il a des relations. »

Dans la rigueur du terme, une apparition est la présence subite d’une personne ou d’un objet contre les lois de la nature : par exemple, l’apparition d’un mort, d’un ange, d’un démon, etc.

Ceux qui nient absolument les apparitions sont téméraires. Spinoza, malgré son matérialisme, reconnaissait qu’il ne pouvait nier les apparitions ni les miracles.

On ne raisonne pas mieux lorsqu’on dit qu’une chose qui est arrivée autrefois devrait arriver encore. Il y a bien des choses qui ont eu lieu jadis et qui ne se renouvellent pas, dans le système même des matérialistes, comme il y a bien des choses qui ont lieu aujourd’hui et que jadis on n’a pas soupçonnées.

Nous devons admettre et croire les apparitions rapportées dans les saintes Écritures. Nous ne sommes pas tenus à la même foi dans les simples histoires ; et il y a des apparitions qui, réelles ou intellectuelles, sont fort surprenantes. On lit dans la vie de saint Macaire qu’un homme ayant reçu un dépôt le cacha sans en rien dire à sa femme et mourut subitement. On fut très-embarrassé quand le maître du dépôt vint le réclamer. Saint Macaire pria, dit la légende, et le défunt apparut à sa femme, à qui il déclara que l’argent redemandé était enterré au pied de son lit, ce qui fut trouvé vrai. Ces sortes d’apparitions ne peuvent pas être repoussées, parce qu’elles ont devant Dieu un motif raisonnable. Mais Dieu ne permet jamais les apparitions ridicules, qui ne sont généralement que de mauvaises farces. Ce sont les apparitions des morts chez les anciens qui ont donné naissance à la nécromancie. Voy. Nécromancie.

 
Apparitions
Apparitions
 

Nous ne songerons à nous occuper ici que des apparitions illusoires ou douteuses, et le nombre en est immense. Nous suivrons un moment les écrivains qui ne doutent de rien, et qui, dans leurs excès mêmes, sont encore moins stupides et moins à quatre pattes que ceux qui doutent de tout. Quelquefois, disent-ils, les apparitions ne sont que vocales : c’est une voix qui appelle. Mais dans les bonnes apparitions l’esprit se montre. — Quand les esprits se font voir à un homme seul, ajoutent les cabalistes, ils ne présagent rien de bon ; quand ils apparaissent à deux personnes à la fois, rien de mauvais ; ils ne se montrent guère à trois personnes ensemble.

Il y a des apparitions imaginaires causées par les remords ; des meurtriers se sont crus harcelés ou poursuivis par leurs victimes. Une femme, en 1726, accusée à Londres, d’être complice du meurtre de son mari, niait le fait ; on lui présente l’habit du mort, qu’on secoue devant elle ; son imagination épouvantée lui fait voir son mari même ; elle se jette à ses pieds et déclare qu’elle voit son mari. Mais on trouvera des choses plus inexplicables.

Les apparitions du diable, qui a si peu besoin de se montrer pour nous séduire, faibles que nous sommes, ont donné lieu à une multitude de récits merveilleux. Des sorciers brûlés à Paris ont dit en justice que, quand le diable veut se faire un corps aérien pour se montrer aux hommes, « il faut que le vent soit favorable et que la lune soit pleine ». Et lorsqu’il apparaît, c’est toujours avec quelque défaut nécessaire, ou trop noir, ou trop pâle, ou trop rouge, ou trop grand, ou trop petit, ou le pied fourchu, ou les mains en griffes, ou la queue au derrière et les cornes en tête, etc., à moins qu’il ne prenne une forme bizarre. Il parlait à Simon le Magicien, et à d’autres, sous la figure d’un chien ; à Pythagore, sous celle d’un fleuve ; à Apollonius, sous celle d’un orme, etc.

Excepté les démons de midi, les démons et les spectres apparaissent la nuit plutôt que le jour, et la nuit du vendredi au samedi de préférence à toute autre, comme le déclare Jean Bodin, d’après un grand nombre de témoignages.

Les apparitions des esprits, dit Jamblique, sont analogues à leur essence. L’aspect des habitants des cieux est consolant, celui des archanges terrible, celui des anges moins sévère, celui des démons épouvantable. Il est assez difficile, ajoute-t-il, de se reconnaître dans les apparitions des spectres, car il y en a de mille sortes. — Delancre donne pourtant les moyens de ne point s’y tromper. « On peut distinguer les âmes des démons, dit-il. Ordinairement les âmes apparaissent en hommes portant barbe, en vieillards, en enfants ou en femmes, bien que ce soit en habit et en contenance funeste. Or les démons peuvent se montrer ainsi. Mais, ou c’est l’âme d’une personne bienheureuse, ou c’est l’âme d’un damné. Si c’est l’âme d’un bienheureux, et qu’elle revienne souvent, il faut tenir pour certain que c’est un démon, qui, ayant manqué son coup de surprise, revient plusieurs fois pour le tenter encore. Car une âme ne revient plus quand elle est satisfaite, si ce n’est par aventure une seule fois pour dire merci. — Si c’est une âme qui se dise l’âme d’un damné, il faut croire encore que c’est un démon, vu qu’à grand’peine laisse-t-on jamais sortir l’âme des damnés. » Voilà les moyens de se reconnaître que Pierre Delancre donne comme aisés[107].

Il dit un peu plus loin que le spectre qui apparaît sous une peau de chien ou sous toute autre forme laide est un démon ; mais le diable est si malin, qu’il vient aussi sous des traits qui le font prendre pour un ange. Il faut donc se défier. — Voyez pour les anecdotes : Visions, Spectres, Fantômes, Hallucinations, Esprits, Lutins, Vampires, Revenants, Songes, Armées prodigieuses, etc.

Voici, sur les apparitions, un petit fait qui a eu lieu à la Rochelle, et que les journaux rapportaient en avril 1843 : « Depuis quelque temps, la population se préoccupait des revenants qui apparaissaient tous les soirs sous la forme de flammes phosphorescentes, bleuâtres et mystérieuses. Ces revenants ont été pris au trébuchet : c’étaient cinq gros réjouis de paysans des environs qui, grimpés tous les soirs sur des arbres très-élevés, lançaient des boulettes phosphoriques avec un fil imperceptible. Pendant la nuit, ils donnaient le mouvement et la direction qu’ils voulaient à leurs globes de feu, et quand les curieux couraient après une flamme, elle devenait aussitôt invisible ; mais à l’instant il en surgissait une autre sur un point opposé pour détourner l’attention. Ce jeu s’effectuait ainsi pendant quelques instants successivement, et puis simultanément, de manière à produire plusieurs flammes à la fois. — Cette jonglerie trompa bien des incrédules effrayés ; mais enfin il se trouva un esprit rassis. Caché derrière une haie, il observa attentivement la mise en scène et devina le secret de la comédie. Suffisamment édifié, il alla quérir la gendarmerie, et les cinq mystificateurs furent arrêtés au moment où ils donnaient une nouvelle représentation. Quel était leur but ? On l’ignore. Le plus curieux de l’histoire, c’est qu’une commission scientifique avait déjà préparé un rapport sur l’étonnant phénomène météorologique de ces mauvais plaisants. »

Mais il ne faut pas s’appuyer sur des farces de ce genre pour nier les apparitions. IL y en a d’incontestables, comme on le verra en divers articles de ce livre.

Apsaras. Les apsaras sont les fées de la mythologie indienne.

 
Apsara
Apsara
 

Apulée. Philosophe platonicien, né en Afrique, connu par le livre de l’Âne d’or. Il vécut au deuxième siècle, sous les Antonins. On lui attribue plusieurs prodiges auxquels sans doute il n’a jamais songé. Il dépensa tout son bien en voyages, et mit tous ses soins à se faire initier dans les mystères des diverses religions païennes ; après quoi il s’aperçut qu’il était ruiné. Comme il était bien fait, instruit et spirituel, il captiva l’affection d’une riche veuve de Carthage, nommée Pudentilla, qu’il parvint à épouser. Il était encore jeune, et sa femme avait cinquante ans. Cette disproportion d’âge et la pauvreté connue d’Apulée firent soupçonner qu’il avait employé, pour parvenir à ce riche mariage, la magie et les philtres. On disait même qu’il avait composé ces philtres avec des filets de poissons, des huîtres et des pattes d’écrevisses. Les parents de la femme, à qui ce mariage ne convenait pas, l’accusèrent de sortilège ; il parut devant ses juges, et quoique les préjugés sur la magie fussent alors en très-grand crédit, Apulée plaida si bien sa cause qu’il la gagna pleinement.

Boguet et d’autres démonographes disent qu’Apulée fut métamorphosé en âne, comme quelques autres pèlerins, par le moyen des sorcières de Larisse, qu’il était allé voir pour essayer si la chose était possible et faisable[108]. La femme qui lui démontra que la chose était possible en le changeant en âne le vendit, puis le racheta. Par la suite, il devint si grand magicien qu’il se métamorphosait lui-même au besoin en cheval, en âne, en oiseau. Il se perçait le corps d’un coup d’épée sans se blesser. Il se rendait invisible, étant très-bien servi par son démon familier. C’est même pour couvrir son asinisme, dit encore Delancre, qu’il a composé son livre de l’Âne d’or.

Taillepied prétend que tout cela est une confusion, et que s’il y a un âne mêlé dans l’histoire d’Apulée, c’est qu’il avait un esprit familier qui lui apparaissait sous la forme d’un âne[109]. Les véritables ânes sont peut-être ici Delancre et Boguet. Ceux qui veulent jeter du merveilleux sur toutes les actions d’Apulée affirment que, par un effet de ses charmes, sa femme était obligée de lui tenir la chandelle pendant qu’il travaillait ; d’autres disent que cet office était rempli par son démon familier. Quoi qu’il en soit, il y avait de la complaisance dans cette femme ou dans ce démon.

Outre son livre de l’Âne d’or, on a encore d’Apulée un petit traité du démon de Socrate, De deo Socratis, réfuté par saint Augustin ; il a été traduit sous ce titre : De l’esprit familier de Socrate, avec des remarques, in-12. Paris, 1698.

Aquelare, ou le Bosquet du Bouc. C’est ainsi qu’on appelait dans le pays Basque un plateau où se faisait le sabbat.

Aquiel, démon que l’on conjure le dimanche. Voy. Conjurations.

Aquin (Mardochée d’), rabbin de Carpentras, mort en 1650, qui se fit chrétien, et changea au baptême son nom de Mardochée en celui de Philippe. On recherche de lui l’Interprétation de l’arbre de la cabale des Hébreux ; Paris, in-8o, sans date.

Arachula, méchant esprit de l’air et grand ennemi de la lune, chez les Chinois voisins de la Sibérie. Voy. Lune.

Arael, l’un des esprits que les rabbins du Talmud font, avec Anpiel, princes et gouverneurs du peuple des oiseaux.

Araignées. Les anciens regardaient comme un présage funeste les toiles d’araignée qui s’attachaient aux étendards et aux statues des dieux. Chez nous, une araignée qui court ou qui file promet de l’argent ; les uns prétendent que c’est de l’argent le matin, et le soir une nouvelle ; d’autres, au contraire, vous citeront ce proverbe axiome : Araignée du matin, petit chagrin ; araignée de midi, petit profit ; araignée du soir, petit espoir. « Mais, comme dit M. Salgues[110], si les araignées étaient le signe de la richesse, personne ne serait plus riche que les pauvres. »

Quelques personnes croient aussi qu’une araignée est toujours l’avant-coureur d’une nouvelle heureuse, si on a le bonheur de l’écraser. M. de T***, qui avait cette opinion, donna, en 1790, au théâtre de Saint-Pétersbourg, une tragédie intitulée Abaco et Moïna. La nuit qui en précéda la représentation, au moment de se coucher, il aperçut une araignée à côté de son lit. La vue de l’insecte lui fit plaisir ; il se hâta d’assurer la bonté du présage en l’écrasant ; il avait saisi sa pantoufle, mais l’émotion qu’il éprouvait fit manquer le coup, l’araignée disparut. Il passa deux heures à la chercher en vain ; fatigué de ses efforts inutiles, il se jeta sur son lit avec désespoir : « Le bonheur était là, s’écria-t-il, et je l’ai perdu ! Ah ! ma pauvre tragédie ! » Le lendemain il fut tenté de retirer sa pièce, mais un de ses amis l’en empêcha ; la pièce alla aux nues, et l’auteur n’en demeura pas moins persuadé qu’une araignée porte bonheur lorsqu’on l’écrase[111].

Dans le bon temps de la loterie, des femmes enfermaient le soir une araignée dans une boîte avec les quatre-vingt-dix numéros écrits sur de petits carrés de papier. L’araignée, en manœuvrant la nuit, retournait quelques-uns de ces papiers. Ceux qui étaient retournés de la sorte étaient regardés le lendemain matin comme numéros gagnants…

Cependant les toiles d’araignée sont utiles : appliquées sur une blessure, elles arrêtent le sang et empêchent que la plaie ne s’enflamme. Mais il ne faut peut-être pas croire, avec l’auteur des Admirables secrets d’Albert le Grand, que l’araignée pilée et mise en cataplasme sur les tempes guérisse la fièvre tierce.

Avant que Lalande eût fait voir qu’on pouvait manger des araignées, on les regardait généralement comme un poison. Un religieux du Mans disant la messe, une araignée tomba dans le calice après la consécration. Le moine, sans hésiter, avala l’insecte. On s’attendait à le voir enfler ; ce qui n’eut pas lieu.

Il y a de vilaines histoires sur le compte des araignées. N’oublions pourtant pas que, dans son cachot, Pellisson en avaitapprivoisé une que Delille a célébrée. Mais la tarentule est aussi une araignée. Le maréchal de Saxe, traversant un village, coucha dans une auberge infestée, disait-on, de revenants qui étouffaient les voyageurs. On citait des exemples. Il ordonna à son domestique de veiller la moitié de la nuit, promettant de lui céder ensuite son lit et de faire alors sentinelle à sa place. À deux heures du matin, rien n’avait encore paru. Le domestique, sentant ses yeux s’appesantir, va éveiller son maître, qui ne répond point ; il le croit assoupi et le secoue inutilement. Effrayé, il prend la lumière, ouvre les draps, et voit le maréchal baigné dans son sang. Une araignée monstrueuse lui suçait le sein gauche. Il court prendre des pincettes pour combattre cet ennemi d’un nouveau genre, saisit l’araignée et la jette au feu. Ce ne fut qu’après un long assoupissement que le maréchal reprit ses sens ; et depuis lors on n’entendit plus parler de revenant dans l’auberge. — Nous ne garantissons pourtant pas cette anecdote ; mais elle est conservée dans plusieurs recueils.

Au reste l’araignée a de quoi se consoler de notre horreur et de nos mépris. Les nègres de la côte d’Or attribuent la création de l’homme à une grosse araignée qu’ils nomment Anansiè, et ils révèrent les plus belles araignées comme des divinités puissantes.

Arbres. On sait que dans l’antiquité les arbres étaient consacrés aux dieux : le cyprès à Pluton, etc. Plusieurs arbres et plantes sont encore dévoués aux esprits de l’enfer : le poirier sauvage, l’églantier, le figuier, la verveine, la fougère, etc.

Des arbres ont parlé. Chez les anciens, dans les forêts sacrées, on a entendu des arbres gémir. Les oracles de Dodone étaient des chênes qui parlaient. Voy. Dodone.

On entendit, dans une forêt d’Angleterre, un arbre qui poussait des gémissements ; on le disait enchanté. Le propriétaire du terrain tira beaucoup d’argent de tous les curieux qui venaient voir une chose aussi merveilleuse. À la fin, quelqu’un proposa de couper l’arbre ; le maître du terrain s’y opposa, non par un motif d’intérêt’propre, disait-il, mais de peur que celui qui oserait y mettre la cognée n’en mourût subitement ; on trouva un homme qui n’avait pas peur de la mort subite, et qui abattit l’arbre à coups de hache. Alors on découvrit un tuyau qui formait une communication à plusieurs toises sous terre, et par le moyen duquel on produisait les gémissements que l’on avait remarqués.

Arc-en-ciel. Le chapitre IX de la Genèse semble dire, selon des commentateurs, qu’il n’y eut point d’arc-en-ciel avant le déluge ; mais je ne sais[112] où l’on a vu « qu’il n’y en aura plus quarante ans avant la fin du monde, « parce que la sécheresse qui précédera l’embrasement de l’univers consumera la matière de ce météore ». C’est pourtant une opinion encore répandue chez ceux qui s’occupent de la fin du monde.

L’arc-en-ciel a son principe dans la nature ; et croire qu’il n’y eut point d’arc-en-ciel avant le déluge, parce que Dieu en fit le signe de son alliance, c’est comme si l’on disait qu’il n’y avait point d’eau avant l’institution du baptême. Et puis, Dieu ne dit point, au chapitre IX de la Genèse, qu’il plaça son arc en ciel, mais son arc en signe d’alliance ; et comment attribuera-t-on à l’arc-en-ciel ce passage d’Isaïe : J’ai mis mon arc et ma flèche dans les nues !

Chez les Scandinaves, l’arc-en-ciel est un pont qui va de l’enfer au walhalla. Les enfants croient en Alsace que toutes les fois qu’il y a dans le firmament un arc-en-ciel il tombe du ciel un petit plat d’or qui ne peut être trouvé que par un enfant né le dimanche.

Ardents (mal des), appelé aussi feu infernal. C’était au onzième et au douzième siècle une maladie non expliquée, qui se manifestait comme un feu intérieur et dévorait ceux qui en étaient frappés. Les personnes qui voyaient là un effet de la colère céleste l’appelaient feu sacré ; d’autres le nommaient feu infernal ; ceux qui l’attribuaient à l’influence des astres le nommaient sidération. Les reliques de saint Antoine, que le comte Josselin apporta de la terre sainte à la Mothe-Saint-Didier, ayant guéri plusieurs infortunés atteints de ce mal, on le nomme encore feu de saint Antoine.

Le mal des Ardents, lorsqu’il tomba sur Paris et sur Arras, au douzième siècle, était une affreuse maladie épidémique, une sorte de lèpre brûlante, plus terrible que le choléra. On en dut à Paris la guérison à sainte Geneviève. Le même bienfait est célèbre à Arras, où quelques gouttes d’un cierge miraculeux, apporté par la sainte Vierge[113], distillées dans l’eau, enlevaient le mal des Ardents.

On fêtait à Paris sainte Geneviève des Ardents, en souvenir des cures merveilleuses opérées alors par la châsse de la sainte sur les infortunés atteints de ce mal.

Ardents, exhalaisons enflammées qui paraissent sur les bords des lacs et des marais, ordinairement en automne, et qu’on prend pour des esprits follets, parce qu’elles sont à fleur de terre et qu’on les voit quelquefois changer de place. Souvent on en est ébloui et on se perd. Leloyer dit que lorsqu’on ne peut s’empêcher de suivre les ardents, ce sont bien en vérité des démons[114].

Il y eut, sous le règne de Louis XIII, une histoire de revenant qui lit assez de bruit à Marseille ; c’était une espèce de feu ardent ou d’homme de feu. Le comte et la comtesse d’Alais voyaient toutes les nuits un spectre enflammé se promener dans leur chambre, et aucune force humaine ne pouvait le forcer à se retirer. La jeune dame supplia son mari de quitter une maison et une ville où ils ne pouvaient plus dormir. Le comte, qui se plaisait à Marseille, voulut employer d’abord tous les moyens pour l’expulsion du fantôme. Gassendi fut consulté ; il conclut que ce fantôme de feu qui se promenait toutes les nuits était formé par des vapeurs enflammées que produisait le souffle du comte et de la comtesse… D’autres savants donnèrent des réponses aussi satisfaisantes. On découvrit enfin le secret. Une femme de chambre, cachée sous le lit, faisait paraître un phosphore à qui la peur donnait une taille et des formes effrayantes ; et la comtesse elle-même faisait jouer cette farce pour obliger son mari à partir de Marseille, qu’elle n’aimait pas…

Ardibèhecht, l’un des sept Amschaspands. Il préside au feu.

Argens (Boyer d’), marquis, né en 1704, à Aix en Provence. On trouve, parmi beaucoup de fatras, des choses curieuses sur les gnomes, les sylphes, les ondins et les salamandres, dans ses « Lettres cabalistiques, ou Correspondance philosophique, historique et critique entre deux cabalistes, divers esprits élémentaires et le seigneur Astaroth ». La meilleure édition est de 1769, 7 vol. in-12. Ce livre, d’un très-mauvais esprit, est infecté d’un philosophisme que l’auteur a désavoué ensuite.

Argent. L’argent qui vient du diable est ordinairement de mauvais aloi. Delrio conte qu’un homme ayant reçu du démon une bourse pleine d’or n’y trouva le lendemain que des charbons et du fumier.

Un inconnu, passant par un village, rencontra un jeune homme de quinze ans d’une figure intéressante et d’un extérieur fort simple. Il lui demanda s’il voulait être riche ; le jeune homme ayant répondu qu’il le désirait, l’inconnu lui donna un papier plié, et lui dit qu’il en pourrait faire sortir autant d’or qu’ils le souhaiterait, tant qu’il ne le déplierait pas, et que s’il domptait sa curiosité, il connaîtrait avant peu son bienfaiteur. Le jeune homme rentra chez lui, secoua son trésor mystérieux, il en tomba quelques pièces d’or… Mais, n’ayant pu résister à la tentation de l’ouvrir, il y vit des griffes de chat, des ongles d’ours, des pattes de crapaud, et d’autres figures si horribles, qu’il jeta le papier au feu, où il fut une demi-heure sans pouvoir se consumer. Les pièces d’or qu’il en avait tirées disparurent, et il reconnut qu’il avait eu affaire au diable.

Un avare, devenu riche à force d’usure, se sentant à l’article de la mort, pria sa femme de lui apporter sa bourse, afin qu’il pût la voir encore avant de mourir. Quand il la tînt, il la serra tendrement, et ordonna qu’on l’enterrât avec lui, parce qu’il trouvait l’idée de s’en séparer déchirante. On ne lui promit rien précisément, et il mourut en contemplant son or. Alors on lui arracha la bourse des mains, ce qui ne se fit pas sans peine ; mais quelle fut la surprise de la famille assemblée, lorsqu’en ouvrant le sac on y trouva, non pas des pièces d’or, mais deux crapauds !… Le diable était venu, et en emportant l’âme de l’usurier il avait emporté son or, comme deux choses inséparables et qui n’en faisaient qu’une.

Voici autre chose : Un homme qui n’avait que vingt sous pour toute fortune se mit à vendre du vin aux passants. Pour gagner davantage, il mettait autant d’eau que de vin dans ce qu’il vendait. Au bout d’un certain temps il amassa, par cette voie injuste, la somme de cent livres. Ayant serré cet argent dans un sac de cuir, il alla avec un de ses amis faire provision de vin pour continuer son trafic ; mais, comme il était près d’une rivière, il tira du sac de cuir une pièce de vingt sous pour une petite emplette ; il tenait le sac dans la main gauche et la pièce dans la droite ; incontinent un oiseau de proie fondit sur lui et lui enleva son sac, qu’il laissa tomber dans la rivière. Le pauvre homme, dont toute la fortune se trouvait ainsi perdue, dit à son compagnon : — Dieu est équitable ; je n’avais qu’une pièce de vingt sous quand j’ai commencé à voler ; il m’a laissé mon bien, et m’a ôté ce que j’avais acquis injustement.

Un étranger bien vêtu, passant au mois de septembre 1606 dans un village de la Franche-Comté, acheta une jument d’un paysan du lieu pour la somme de dix-huit ducatons. Comme il n’en avait que douze dans sa bourse, il laissa une chaîne d’or en gage du reste, qu’il promit de payer à son retour. Le vendeur serra le tout dans du papier, et le lendemain trouva la chaîne disparue, et douze plaques de plomb au lieu des ducatons[115].

Terminons en rappelant un stupide usage de quelques villageois qui croient que, quand on fait des beignets avec des œufs, de la farine et de l’eau, pendant la messe de la Chandeleur, de manière qu’on en ait de faits après la messe, on a de l’argent pendant toute l’année[116]. On en a toute l’année aussi, quand on en porte sur soi le premier jour où l’on entend le chant du coucou, — et tout le mois, si on en a dans sa poche la première fois qu’on voit la lune nouvelle.

Argent potable. Si vous êtes versé dans les secrets de l’alchimie et que vous souhaitiez posséder cette panacée, prenez du soufre bleu céleste, mettez-le dans un vase de verre, versez dessus d’excellent esprit-de-vin, faites digérer au bain pendant vingt-quatre heures, et quand l’esprit-de-vin aura attiré le soufre par distillation, prenez une part de ce soufre, versez dessus trois fois son poids d’esprit blanc mercuriel extrait du vitriol minéral, bouchez bien le vase, faites digérer au bain vaporeux jusqu’à ce que le soufre soit réduit en liqueur ; alors versez dessus de très-bon esprit-de-vin à poids égal, digérez-les ensemble pendant quinze jours, passez le tout par l’alambic, retirez l’esprit par le bain tiède, et il restera une liqueur qui sera le vrai argent potable, ou soufre d’argent, qui ne peut plus être remis en corps. Cet élixir blanc est un’remède à peu près universel, qui fait merveilles en médecine, fond l’hydropisie et guérit’tous les maux intérieurs[117].

Argouges. Voy. Fées, à la fin.

 
Arioch
Arioch
Arioch.
 

Arignote. Lucien conte qu’à Corinthe, dans le quartier de Cranaüs, personne n’osait habiter une maison qui était visitée par un spectre. Un certain Arignote, s’étant muni de livres magiques égyptiens, s’enferma dans cette maison pour y passer la nuit, et se mit à lire tranquillement dans la cour. Le spectre parut bientôt : pour effrayer Arignote, il prit d’abord la figure d’un chien, ensuite celles d’un taureau et d’un lion. Mais, sans se troubler, Arignote prononça dans ses livres des conjurations qui obligèrent le fantôme à se retirer dans un coin de la cour, où il disparut. Le lendemain on creusa à l’endroit où le spectre s’était enfoncé ; on y trouva un squelette auquel on donna la sépulture, et rien ne parut plus dans la maison. — Cette anecdote n’est autre chose que l’aventure d’Athénodore, que Lucien avait lue dans Pline, et qu’il accommode à sa manière pour divertir ses lecteurs.

Arimane, prince des enfers chez les anciens Perses, source du mal, démon noir, engendré dans les ténèbres[118], ennemi d’Oromaze ou Or-mouzd, principe du bien. Mais celui-ci est éternel, tandis qu’Arimane est créé et doit périr un jour.

Arimaspes, peuples fabuleux de la Scythie ; ils n’avaient qu’un œil et passaient leur vie à détruire les dragons.

Arioch, démon de la vengeance, selon quelques démonographes ; différent d’Alastor, et occupé seulement des vengeances particulières de ceux qui l’emploient.

Ariolistes, devins de l’antiquité, dont le métier se nommait ariolatio, parce qu’ils devinaient par les autels (ab aris). Ils consultaient les démons sur leurs autels, dit Daugis[119] ; ils voyaient ensuite si l’autel tremblait ou s’il s’y faisait quelque merveille, et prédisaient ce que le diable leur inspirait.

Aristée, charlatan de l’île de Proconèse, qui vivait du temps de Crésus. Il disait que son âme sortait de son corps quand il voulait, et qu’elle y retournait ensuite. Les uns content qu’elle s’échappait, à la vue de sa femme et de ses enfants, sous la figure d’un cerf, Wierus dit sous la figure d’un corbeau[120]. — Hérodote

 
Aristée
Aristée
 
rapporte, dans son quatrième livre, que cet Aristée, entrant un jour dans la boutique d’un foulon, y tomba mort ; que le foulon courut avertir ses parents, qui arrivèrent pour le faire enterrer ; mais on ne trouva plus le corps. Toute la ville était en grande surprise, quand des gens qui revenaient de quelque voyage assurèrent qu’ils avaient rencontré Aristée sur le chemin de Crolone[121]. Il paraît que c’était une espèce de vampire. Hérodote ajoute qu’il reparut au bout de sept ans à Proconèse, y composa un poëme et mourut de nouveau.

Leloyer, qui regarde Aristée comme un sorcier à extases[122], cite une autorité d’après laquelle, à l’heure même où ce vampire disparut pour la seconde fois, il aurait été transporté en Sicile, et s’y serait fait maître d’école.

Il se montra encore trois cent quarante ans après dans la ville de Métaponte, et il y fit élever des monuments qu’on voyait du temps d’Hérodote. Tant de prodiges engagèrent les Siciliens à lui consacrer un temple, où ils l’honoraient comme un demi-dieu.

Aristodème, roi des Messeniens. Voy. Ophioneus et Ololygmancie.

Aristolochie, ou paille de sarasin, ou plutôt espèce de plante appelée pistoloche, avec, laquelle Apulée prétendait qu’on pouvait dénouer l’aiguillette, sans doute en l’employant à des fumigations. Voy. Ligatures.

Aristomène, général messénien, si habile et si adroit, que toutes les fois qu’il tombait au pouvoir des Athéniens, ses ennemis, il trouvait moyen de s’échapper de leurs mains. Pour lui ôter cette ressource, ils le firent mourir ; après quoi on l’ouvrit et on lui trouva le cœur tout couvert de poils[123].

Aristote, que l’Arabe Averrhoës appelle le comble de la perfection humaine. Sa philosophie a été en grande vénération, et son nom a toujours de l’éclat. Mais il ne fallait pas se quereller pour ses opinions et emprisonner dans un temps ceux qui ne les partageaient pas, pour emprisonner dans un autre temps ceux qui les avaient adoptées. Ces querelles, au reste, n’ont été élevées que par les hérétiques.

Delancre semble dire qu’Aristote savait la magie naturelle[124] ; mais il ne parle guère en homme superstitieux dans aucun de ses écrits. Quant à la vieille opinion, soutenue par Procope et quelques autres, qu’Aristote, ne pouvant comprendre la raison du flux et du reflux de l’Euripe, s’y précipita en faisant de désespoir ce mauvais calembour : — Puisque je ne puis te saisir, saisis-moi[125] ; — cette opinion est aujourd’hui un conte méprisé.

Nous ne citerons ici des ouvrages d’Aristote que ceux qui ont rapport aux matières que nous traitons : 1° De la divination par les songes ;Du sommeil et de la veille, imprimés dans ses œuvres. On peut consulter aussi les Remarques de Michel d’Éphèse sur le livre De la divination par les songes[126], et la Paraphrase de Thémistius sur divers traités d’Aristote, principalement sur ce même ouvrage[127].

Arithmancie ou Arithmomancie. Divination par les nombres. Les Grecs examinaient le nombre et la valeur des lettres dans les noms de deux combattants, et en auguraient que celui dont le nom renfermait plus de lettres et d’une plus grande valeur remporterait la victoire. C’est en vertu de cette science que quelques devins avaient prévu qu’Hector devait être vaincu par Achille.

Les Chaldéens, qui pratiquaient aussi l’arith-momancie, partageaient leur alphabet en trois parties, chacune composée de sept lettres, qu’ils attribuaient aux sept planètes, pour en tirer des présages. Les platoniciens et les pythagoriciens étaient fort adonnés à cette divination, qui comprend aussi une partie de la cabale des Juifs[128].

Arius, fameux hérétique qui niait la divinité de Jésus-Christ, Notre-Seigneur. Voici comment on raconte sa mort : — Saint Alexandre, évêque de Byzance, voyant que les sectateurs d’Arius voulaient le porter en triomphe, le lendemain dimanche, dans le temple du Seigneur, pria Dieu avec zèle d’empêcher ce scandale, de peur que si Arius entrait dans l’église, il ne semblât que l’hérésie y fût entrée avec lui. Et le lendemain dimanche, au moment où l’on s’attendait à voir Arius, l’hérétique ivrogne, sentant un certain besoin qui aurait pu lui être fort incommode dans la cérémonie de son triomphe, fut obligé d’aller aux lieux secrets, où il creva par le milieu du ventre, perdit les intestins, et mourut d’une mort infâme et malheureuse, frappé, selon quelques-uns, par le diable, qui dut en recevoir l’ordre, car Arius était de ses amis.

Armanville. Une dame d’Armanville, à Amiens, fut battue dans son lit en 1746. Sa servante attesta que le diable l’avait maltraitée. La cloche de la maison sonna seule ; on entendit balayer le grenier à minuit. Il sembla même que les démons qui prenaient cette peine avaient un tambour et faisaient ensuite des évolutions militaires. La dame, effrayée, quitta Amiens pour retourner à Paris ; c’est ce que voulait la femme de chambre. Il n’y eut plus de maléfices dès lors, et l’on a eu tort de voir là autre chose que de la malice.

Armées prodigieuses. Au siège de Jérusalem par Titus, et dans plusieurs autres circonstances, on vit dans les airs des armées ou des troupes de fantômes, phénomènes non encore expliqués, et qui jamais ne présagèrent rien de bon.

Plutarque raconte, dans la Vie de Thémistocle, que pendant la bataille de Salamine on vit en l’air des armées prodigieuses et des figures d’hommes qui, de l’île d’Égine, tendaient les mains au-devant des galères grecques. On publia que c’étaient les Eacides, qu’on avait invoqués avant la bataille.

Quelquefois aussi on a rencontré des troupes de revenants et de démons allant par bataillons et par bandes. Voy. Retz, etc.

En 1123, dans le comté de Worms, on vit pendant plusieurs jours une multitude de gens armés, à pied et à cheval, allant et venant avec grand bruit, et qui se rendaient tous les soirs, vers l’heure de none, à une montagne qui paraissait le lieu de leur réunion. Plusieurs personnes du voisinage s’approchèrent de ces gens armés, en les conjurant, au nom de Dieu, de leur déclarer ce que signifiait cette troupe innombrable et quel était leur projet. Un des soldats ou fantômes répondit : Nous ne sommes pas ce que vous vous imaginez, ni de vrais fantômes ni de vrais soldats. Nous sommes les âmes de ceux qui ont été tués en cet endroit dans la dernière bataille. Les armes et les chevaux que vous voyez sont les instruments de notre supplice, comme ils l’ont été de nos péchés. Nous sommes tout en feu, quoique vous n’aperceviez en nous rien qui paraisse enflammé. — On dit qu’on remarqua en leur compagnie le comte Enrico et plusieurs autres seigneurs tués depuis peu d’années, qui déclarèrent qu’on pouvait les soulager par des aumônes et des prières[129]. Voy. Apparitions, Phénomènes, Visions, Aurore boréale, etc.

Armide. L’épisode d’Armide, dans le Tasse, est fondé sur une tradition populaire qui est rapportée dans les chroniques de la première croisade et citée par Pierre Delancre[130]. Cette habile enchanteresse était fille d’Arbilan, roi de Damas ; elle fut élevée par Hidraote, son oncle, puissant magicien, qui en fit une grande sorcière. La nature l’avait si bien partagée, qu’elle surpassait en attraits les plus belles femmes de l’Orient. Son oncle l’envoya comme un redoutable ennemi vers la puissante armée chrétienne que le pape Urbain II avait rassemblée sous la conduite de Godefroid de Bouillon ; et là, comme dit Delancre, « elle charma en effet quelques chefs croisés » ; mais elle ne compromit pas l’espoir des chrétiens ; et même elle fut tuée par un projectile au siège de Jérusalem[131].

Armomancie, divination qui se faisait par l’inspection des épaules[132]. On juge encore aujourd’hui qu’un homme qui a les épaules larges est plus fort qu’un autre qui les a étroites.

Arnauld (Angélique). Apparition de la mère Marie-Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal de Paris, peu avant la mort de la sœur Marie-Dorothée Perderaux, abbesse intruse de ladite maison ; rapportée dans une lettre écrite en 1685, par M. Dufossé, à la suite de ses mémoires sur Port-Royal. — « Deux religieuses de Port-Royal, étant à veiller le Saint-Sacrement pendant la nuit, virent tout à coup la feue mère Angélique, leur ancienne abbesse, se lever du lieu où elle avait été inhumée, ayant en main sa crosse abbatiale, marcher tout le long du chœur et s’aller asseoir à la place où se met l’abbesse pendant les vêpres.

» Étant assise, elle appela une religieuse qui se trouvait au même lieu, et lui ordonna d’aller chercher la sœur Dorothée, laquelle, ou du moins son esprit, vint se présenter devant la mère Angélique, qui lui parla quelque temps, sans qu’on pût entendre ce qu’elle lui disait ; après quoi, tout disparut.

» On ne douta point que la mère Angélique n’eût cité la sœur Dorothée devant Dieu ; et c’est la manière dont elle l’interpréta elle-même, lorsque les deux religieuses qui avaient été témoins de cette apparition la lui rapportèrent. Elle s’écria : — Ah ! je mourrai bientôt. Et en effet, elle mourut quinze jours ou trois semaines après. » Voilà !

Arnauld de Bresse (Brescia), moine du douzième siècle, disciple d’Abeilard. Turbulent et ambitieux, il se fit chef de secte. Il disait que les bonnes œuvres sont préférables au sacrifice de la messe, ce qui est absurde ; car le sacrifice de la messe n’empêche pas les bonnes œuvres, il les ordonne au contraire. Il avait jeté le froc, comme tous les réformateurs. Ayant excité de grands troubles, et chargé de noirs forfaits, il fut pris et brûlé à Rome en 1155.

Cet homme est peint sous d’affreuses couleurs dans une chronique contemporaine intitulée le Maléfice, attribuée à Hues de Braye-Selves et publiée en style moderne par M. Léon Dussillet. Chassé, maudit, traqué partout, il s’est attaché à Sibylle de Bourgogne, plus connue sous le nom de la Dame aux jambes d’or, qu’on lui donna dans les croisades, que par la violence de ses passions. Pendant qu’il prépare le maléfice qui doit tuer une jeune fille dont Sibylle veut la mort, neuf gouttes de sang jaillissent d’une cicatrice qu’il avait à la joue. — Déjà ! dit le sorcier d’une voix creuse ; maître, tu comptes bien, et moi seul j’oubliais le terme. — Quel terme ? s’écria Sibylle frappée de la pâleur subite d’Arnauld de Bresse. Pour qui ce sang a-t-il coulé ? je n’avais point remarqué ce terrible stigmate, qu’on croirait imprimé avec un sceau de feu. — Ce sceau brûle en effet, répliqua le moine, toujours plus troublé et plus pâle ; et celui qui l’a imprimé ne souffre jamais qu’il s’efface. Les genoux du sorcier fléchirent sous lui, et ses membres frémiront d’une horreur invincible[133]… Il prévoyait que bientôt celui à qui il s’était vendu allait arriver ; il acheva l’envoûtement qui amena la mort de la jeune fille ; et c’est sans doute après ces abominations qu’il gagna Rome, on ne sait dans quel but. Il y mourut sur le bûcher.

Arnauld de Villeneuve, médecin, astrologue et alchimiste, qu’il ne faut pas confondre, comme on l’a fait quelquefois, avec Arnauld de Bresse. Il était né auprès de Montpellier ; il mourut dans un naufrage en 1314.

La chimie lui doit beaucoup de découvertes ; il ne cherchait, à la vérité, que la pierre philosophale et ne songeait qu’à faire de l’or ; mais il trouva les trois acides sulfurique, muriatique et nitrique. Il composa le premier de l’alcool et du ratafia ; il fit connaître l’essence de térébenthine, régularisa la distillation, etc. Il mêlait à ses vastes connaissances en médecine des rêveries astrologiques, et il prédit la fin du monde pour l’année 1335.

On l’accusa aussi de magie. François Pegna dit qu’il devait au démon tout ce qu’il savait d’alchimie, et Mariana[134] lui reproche d’avoir essayé de former un homme avec de certaines drogues déposées dans une citrouille. Mais Delrio justifie Arnauld de Villeneuve de ces accusations ; et le pape Clément V ne l’eût pas pris pour son médecin s’il eût donné dans la magie. — L’inquisition de Tarragone fit brûler ses livres frois ans après sa mort, mais elle les fit brûler comme étant empreints de plusieurs sentiments hérétiques.

On recherche d’Arnauld de Villeneuve un traité de l’explication des songes[135] ; mais on met sur son compte beaucoup d’ouvrages d’alchimie ou de magie auxquels il n’a pas en la moindre part. Tels sont : le livre des Ligatures physiques[136], qui est une traduction d’un livre arabe ; et celui des Talismans des douze signes du zodiaque[137]. On lui attribue aussi faussement le livre stupide et infâme des Trois imposteurs.

Arnold (Paul), vampire. Voy. Paul.

Arnoux, auteur d’un volume in-12 publié à Rouen en 1630, sous le titre des Merveilles de l’autre monde, ouvrage écrit dans un goût bizarre et propre à troubler les imaginations faibles par des contes de visions et de revenants.

Arnuphis, sorcier égyptien. Voyant Marc-Aurèle et son armée engagés dans des défilés dont les Quades fermaient l’issue, et mourant de soif sous un ciel brûlant, il fit tomber, par le moyen de son art, une pluie prodigieuse qui permit aux Romains de se désaltérer, pendant que la grêle et le tonnerre fondaient sur les Quades et les contraignaient à rendre les armes. C’est ce que racontent, dans un but intéressé, quelques auteurs païens. D’autres font honneur de ce prodige aux impuissantes prières de Marc-Aurèle. Les auteurs chrétiens, les seuls qui soient ici dans la vérité, l’attribuent unanimement, et avec toute raison, à la prière des soldats chrétiens qui se trouvaient dans l’armée romaine.

Arnus, devin tué par Hercule, parce qu’il aisait le métier d’espion. Apollon vengea la mort d’Arnus, qu’il inspirait, en mettant la peste dans le camp des Iiéraclides. ІГfallut, pour faire cesser le fléau, établir des jeux en l’honneur du défunt.

Arot. Voy. Marot.

Arphaxat, sorcier perse, qui fut tué d’un coup de foudre, si l’on en croit Abdias de Babylone[138], à l’heure même du martyre de saint Simon et de saint Jude. — Dans la possession de Loudun, on a vu un démon Arphaxat.

Art de saint Anselme, moyen superstitieux de guérir, employé par des imposteurs qui prenaient le nom d’anselmisles. Ils se contentaient de toucher, avec certaines paroles, les linges qu’on appliquait sur les blessures. Ils devaient le secret de leur art, disaient-ils, à saint Anselme de Cantorbéry. Aussi l’appelaient-ils l’art de saint Anselme, voulant de la sorte se donner un certain vernis. Mais Delrio assure que leur véritable chef de file est Anselme de Parme. Voyez ce mot.

Art de saint Paul, moyen de prédire les choses futures, que des songe-creux ont prétendu avoir été enseigné à saint Paul dans son voyage au troisième ciel. Des charlatans ont eu le front de s’en dire héritiers.

Art des Esprits, appelé aussi art angélique. Il consiste dans le talent d’évoquer les esprits et de les obliger à découvrir les choses cachées. D’autres disent que l’art angélique est l’art de s’arranger avec son ange gardien, de manière à recevoir de lui la révélation de tout ce qu’on veut savoir. Cet art superstitieux se pratique de deux manières : ou par des extases, dans lesquelles on reçoit des avis, ou par des entretiens avec l’ange que l’on évoque, qui apparaît, et qui en cette circonstance n’est probablement pas un ange de lumière. Voy. Évocations.

Art notoire, espèce d’encyclopédie inspirée. Le livre superstitieux qui contient les principes de l’art notoire promet la connaissance de toutes les sciences en quatorze jours. L’auteur du livre dit effrontément que le Saint-Esprit le dicta à saint Jérôme. Il assure encore que Salomon n’a obtenu la sagesse et la science universelle que pour avoir lu en une seule nuit ce merveilleux livre. Il faudrait qu’il eût déjà été dicté à quelque enfant d’Israël ; car ce serait un prodige trop grand que Salomon eût lu le manuscrit de saint Jérôme. Mais les faiseurs d’écrits de ce genre ne reculent pas pour si peu.

Gilles Bourdin a publié, au seizième siècle, un grimoire obscur sous le titre de l’Art notoire. Il n’est pas probable que ce soit la bonne copie, qui sans doute est perdue.

Delrio dit que de son temps les maîtres de cet art ordonnaient à leurs élèves une sorte de confession générale, des jeûnes, des prières, des retraites, puis leur faisaient entendre, à genoux, la lecture du livre de l’Art notoire, et leur persuadaient qu’ils étaient devenus aussi savants que Salomon, les prophètes et les apôtres. Il s’en trouvait qui le croyaient.

Ce livre a été condamné par le pape Pie V. Mêlant les choses religieuses à ses illusions, l’auteur recommande entre autres soins de réciter tous les jours, pendant sept semaines, les sept psaumes de la pénitence, et de chanter tous les matins au lever du soleil le Veni Creator, en commençant un jour de nouvelle lune, pour se préparer ainsi à la connaissance de l’Art notoire[139]. Érasme, qui parle de ce livre dans un de ses colloques, dit qu’il n’y a rien compris ; qu’il n’y a trouvé que des figures de dragons, de lions, de léopards, des cercles, des triangles, des caractères hébreux, grecs, latins, et qu’on n’a jamais connu personne qui eût rien appris dans tout cela.

Des doctes prétendent que le véritable Ars notoria n’a jamais été écrit, et que l’esprit le révèle à chaque aspirant préparé. (Mais quel esprit ?) Il leur en fait la lecture pendant leur sommeil, s’ils ont sous l’oreiller le nom cabalistique de Salomon, écrit sur une lame d’or ou sur un parchemin vierge. Mais d’autres érudits soutiennent que l’Ars notoria existe écrit, et qu’on le doit à Salomon. Le croira qui pourra.

Art sacerdotal. C’est, selon quelques adeptes, le nom que les Égyptiens donnaient à l’alchimie. Cet art, dont le secret, recommandé sous peine de mort, était écrit en langue hiéroglyphique, n’était communiqué qu’aux prêtres, à la suite de longues épreuves.

Arts du serpent. C’est le nom qu’on donne souvent aux arts magiques.

Artémidore, Éphésien qui vécut du temps d’Antonin le Pieux. On lui attribue le traité des songes intitulé Oneïrocriticon, publié pour la première fois en grec à Venise, 1518, in-8o. On recherche la traduction latine de Rigaut[140], et quelques traductions françaises[141].

Artéphius, philosophe hermétique du douzième siècle, que les alchimistes disent avoir vécu plus de mille ans par les secrets de la pierre philosophale. François Pic rapporte le sentiment de quelques savants qui affirment qu’Artéphius est le même qu’Apollonius de Tyane, né au premier siècle sous ce nom, et mort au douzième sous celui d’Artéphius.

On lui attribue plusieurs livres extravagants ou curieux : 1° l’Art d’allonger sa vie (De vita Propaganda), qu’il dit dans sa préface avoir composé à l’âge de mille vingt-cinq ans ; 2° la Clef de la Sagesse suprême[142] ; 3° un livre sur les caractères des planètes, sur la signification du chant des oiseaux, sur les choses passées et futures, et sur la pierre philosophale[143]. Cardan, qui parle de ces ouvrages au seizième livre de la Variété des choses, croit qu’ils ont été composés par quelque plaisant qui voulait se jouer de la crédulité des partisans de l’alchimie.

Arthémia, fille de l’empereur Dioclétien. Elle fut possédée d’un démon qui résista aux exorcismes païens, et ne céda qu’à saint Cyriaque, diacre de l’Église romaine.

L’idée de rire et de plaisanter des possessions et des exorcismes de l’Église est venue quelquefois à des esprits égarés, qu’il eût été bon peut-être d’exorciser eux-mêmes.

Arthus ou Artus, roi des Bretons, célèbre dans les romans de la Table Ronde, et dont la vie est entourée de fables. On prétend qu’il n’est qu’assoupi à Avallon, et qu’il revient la nuit dans les forêts de la Bretagne chasser à grand bruit, avec des chiens, des chevaux et des piqueurs, qui ne sont que des démons et des spectres, au sentiment de Pierre Delancre[144]. Quand le grand veneur apparut à Henri IV dans la forêt de Fontainebleau, quelques-uns dirent que c’était la chasse du roi Arthus.

La tradition conserve, aux environs de Huelgoat, dans le Finistère, le souvenir curieux de l’énorme château d’Arthus. On montre des rochers de granit entassés comme étant les débris de ses vastes murailles. Il s’y trouve, dit-on, des trésors gardés par des démons, qui souvent traversent les airs sous la forme de feux follets en poussant des hurlements répétés par les échos du voisinage[145]. L’orfraie, la buse et le corbeau sont les hôtes sinistres qui fréquentent ces ruines merveilleuses, où de temps en temps apparaît l’âme d’Arthus endormi avec sa cour enchantée dans son vieux manoir d’Avalon. Voy. Merlin.

En Angleterre on a cru et dans plusieurs contrées de ce pays on croit encore que le roi Arthus a été par enchantement transformé en corbeau ; et pour cela on respecte beaucoup les corbeaux, car l’un d’eux pourrait être l’héroïque monarque.

Arundel (Thomas). Comme il s’était opposé (quatorzième siècle) aux séditions des wickleffites, Chassaignon, dans ses Grands et redoutables jugements de Dieu, imprimés à Morges en 1581, chez Jean Lepreux, imprimeur des très-puissants seigneurs de Berne, Chassaignon, réformé et défenseur de tous les hérétiques, dit qu’il mourut cruellement, la langue tellement enflée qu’il ne pouvait plus parler, « lui qui avait voulu empêcher, dans la bouche des disciples de Wickleff, le cours de la sainte parole… » Mais il n’ose pas rechercher si Thomas Arundel fut, comme Wickleff, étranglé par le diable.

Aruspices, devins du paganisme, dont l’art se nommait aruspicine. Ils examinaient les entrailles des victimes pour en tirer des présages ; il fallait être de bonne maison pour exercer cette espèce de sacerdoce. Ils prédisaient 1opar la simple inspection des victimes vivantes ; 2o par l’état de leurs entrailles après qu’elles étaient ouvertes ; 3o par la flamme qui s’élevait de leurs chairs brûlées. — La victime qu’il fallait amener avec violence, ou qui s’échappait de l’autel, donnait des présages sinistres ; le cœur maigre, le foie double ou enveloppé d’une double tunique, et surtout l’absence du cœur ou du foie, annonçaient de grands maux. On croirait que les aruspices étaient habiles dans l’art d’escamoter, car le cœur manqua aux deux bœufs immolés le jour où l’on assassina César.

C’était mauvais signe quand la flamme ne s’élevait pas avec force et n’était pas transparente et pure ; et si la queue de la bête se courbait en brûlant, elle menaçait de grandes difficultés dans les affaires. Voy. Hépatoscopie.

Arzels. Voy. Cheval.

Asaphins, devins ou sorciers chaldéens, qui expliquaient les songes et tiraient les horoscopes. Ils avaient pour divinité une idole nommé Asaph.

Ascaroth. C’est le nom que donnent les démonographes à un démon peu connu qui protège les espions et les délateurs. Il dépend du démon Nergal.

Ascèse diabolique. L’ascèse chrétienne élève les âmes à Dieu ; l’ascèse diabolique les abaisse et les enfonce jusqu’aux démons.

Ascik-Pacha, démon turc, qui favorise les intrigues secrètes, facilite les accouchements, enseigne les moyens de rompre les charmes et donne l’art d’en composer.

Asclétarion, astrologue qui se permit de faire des prophéties dont l’empereur Domitien ne fut pas content. Il le fit venir et lui dit : « Toi qui sais le moment de ma mort, connais-tu le genre de la tienne ? — Oui, répondit l’astrologue. Je serai mangé par les chiens. » Domitien pour prouver que sa science était vaine, le fit tuer sur-le-champ et ordonna que son corps fût brûlé. Mais un grand orage qui survint éteignit le bûcher et mit les exécuteurs en fuite. Des chiens vinrent, mirent le corps en pièces et le mangèrent. Suétone et Dion Cassius mentionnent ce singulier fait.

Aselle. L’aselle aquatique, espèce de cloporte, était révérée des Islandais, qui croyaient qu’en tenant cet insecte dans la bouche, ou son ovaire desséché sur la langue, ils obtenaient tout ce qu’ils pouvaient désirer. Ils appelaient son ovaire sec pierre à souhaits.

Ases. Divinités Scandinaves. Elles sont au nombre de trente, dont douze dieux qui ont pour maître Odin, et dix-huit déesses, à la tête desquelles domine Frigga.

Asgard. C’est la ville des ases ou dieux Scandinaves. Odin habite cette ville somptueuse, située en un lieu du monde d’où il peut voir tous les êtres et tous les événements.

Ashmole (Élie), antiquaire et alchimiste anglais, né en 1617. On lui doit quelques ouvrages utiles et le musée ashmoléen d’Oxford. Mais il

 
Élie Ashmole
Élie Ashmole
 
publia à Londres, en 1652, un volume in-4o, intitulé Theatrum chemicum britannicum, contenant différents poèmes des philosophes anglais qui ont écrit sur les mystères hermétiques. Six ans après, il fit imprimer le Chemin du bonheur, in-4o, 1658. Ce traité, qui n’est pas de lui, mais auquel il mit une préface, roule aussi sur la pierre philosophale. Voy. Pierre philosophale.

Asile. Les lois qui accordaient droit d’asile aux criminels dans les églises exceptaient ordinairement les sorciers, qui, d’ailleurs, ne cherchaient pas trop là leur recours.

Asima, démon qui rit quand on fait le mal. Il a été adoré à Emath, dans la tribu de Nephtali, avant que les habitants de cette ville fussent transportés à Samarie.

Aske, le premier homme dans les traditions religieuses des Scandinaves.

Asmodée, démon destructeur, le même que Samaël, suivant quelques rabbins. Il est surintendant des maisons de jeu. Il sème la dissipation et l’erreur. — Les rabbins content qu’il détrôna un jour Salomon ; mais que bientôt Salomon le chargea de fers, et le força de l’aider à bâtir le temple de Jérusalem. — Tobie, suivant les mêmes rabbins, l’ayant expulsé, avec la fumée du fiel d’un poisson, du corps de la jeune Sara qu’il possédait, l’ange Raphaël l’emprisonna aux extrémités de l’Égypte. Paul Lucas dit qu’il l’a vu dans un de ses voyages. On s’est amusé de lui à ce sujet ; cependant on a pu lire dans le Courrier de l’Egypte que le peuple de ce pays adore encore le serpent Asmodée, lequel a un temple dans le désert de Ryanneh. On ajoute que ce serpent se coupe par morceaux, et qu’un instant après il n’y paraît pas. Voy. Haridi.

 
Asmodée
Asmodée
 

Cet Asmodée est, au jugement de quelques-uns, l’ancien serpent qui séduisit Eve. Les Juifs, qui l’appellent Asmodai, faisaient de lui le prince des démons, comme on le voit dans la paraphrase chaldaïque. C’est aux enfers, dans Wierus, un roi fort et puissant, qui a trois têtes : la première ressemble à celle d’un taureau, la seconde à celle d’un homme, la troisième à celle d’un bélier. Il a une queue de serpent, des pieds d’oie, une haleine enflammée. Il se montre à cheval sur un dragon, portant en main un étendard et une lance. Il est soumis cependant, par la hiérarchie infernale, au roi Amoymon[146].

Lorsqu’on l’exorcise, il faut être ferme sur ses pieds, et l’appeler par son nom. Il donne des anneaux constellés ; il apprend aux hommes à se rendre invisibles et leur enseigne la géométrie, l’arithmétique, l’astronomie et les arts mécaniques. Il connaît aussi des trésors, qu’on peut le forcer à découvrir ; soixante-douze légions lui obéissent. On le nomme encore Chammadaï et Sydonaï. Asmodée était un des démons qui possédaient Madeleine Ravent.

Le Sage a fait d’Asmodée le héros d’un de ses romans (le Diable boiteux).

Asmund et Asweith, compagnons d’armes danois. Liés d’une étroite amitié, ils convinrent, par un serment solennel, de ne s’abandonner ni à la vie ni à la mort. Asweith mourut le premier et, suivant leur accord, Asmund, après avoir enseveli son ami, avec son chien et son cheval, dans une grande caverne, y porta des provisions pour une année et s’enferma dans ce tombeau. Mais le démon, qu’ils avaient probablement assez bien servi tous deux, étant entré dans le corps du mort, le remit debout et se mit à tourmenter le fidèle Asmund, le déchirant, lui défigurant le visage et lui arrachant même une oreille, sans lui donner de raisons de sa fureur. Asmund, impatienté après un siècle de lutte, coupa la tête du mort, voyant bien enfin qu’il avait affaire ou au diable ou à un vampire. — Sur ces entrefaites, précisément, le roi de Suède, Eric, passant devant la caverne murée et entendant du vacarme, crut qu’elle renfermait un trésor gardé par des esprits. Il la fit ouvrir, et fut bien surpris d’y trouver Asmund, pâle, ensanglanté, auprès d’un cadavre puant ; il lui fit conter son histoire, et le voyant mourir lui-même, aussitôt après son récit, il le fit percer d’un pieu et brûla son corps avec celui de son féroce compagnon[147] ; car alors déjà on connaissait les vampires, quoiqu’on ne leur donnât pas ce nom. Voy. Ghole.

Asmoug, l’un des démons qui, sous les ordres d’Arimane, sèment en Perse les dissensions, les procès et les querelles.

Asoors ou Asouras. C’est le nom que les Indiens donnent à certains mauvais génies qui font tomber les voyageurs dans des embûches.

Aspame. « Zorobabel était épris d’un si fol amour pour Aspame, qu’elle le souffletait comme un esclave et lui ôtait le diadème pour en orner sa tête, indigne d’un tel ornement, dit De-lancre ; elle le faisait rire et pleurer, quand bon lui semblait, le tout par philtres et fascinations[148]. » Les belles dames font tous les jours d’aussi grands excès et produisent d’aussi énormes stupidités, sans fascination et sans philtre.

Aspilcuetta
Aspilcuetta

Aspilcuetta (Marie d’), sorcière d’Andaye, dans le pays de Labour, sous le règne de Henri IV.

Elle fut arrêtée à l’âge de dix-neuf ans, et avoua qu’on l’avait menée au sabbat, que là elle avait baisé le derrière du diable au-dessous d’une grande queue, et que ce derrière était fait comme le museau d’un bouc[149].

Aspidomancie, divination peu connue qui se pratique aux Indes, selon quelques voyageurs. Delancre dit[150] que le devin ou sorcier trace un cercle, s’y campe assis sur un bouclier, marmotte des conjurations, devient hideux, et ne sort de son extase que pour annoncer les choses qu’on veut savoir, et que le diable vient de lui révéler.

Asrafil, ange terrible qui, selon les musulmans, doit sonner de la trompette et réveiller

 
Asrafil
Asrafil
 
tous les morts pour le jugement dernier. On le confond souvent avec Azraël.

Assa-fœtida. Les Hollandais appellent cette plante fiente du diable (duivelsdrek).

Assassinat. Ce crime a son démon.

 
Assassinat
Assassinat
 

Assassins, secte d’Ismaéliens qu’on enivrait de brachick et à qui l’on faisait un dogme de tuer. Le souverain des Assassins s’appelait le cheick ou Vieux de la Montagne. Il est célèbre dans l’histoire des croisades. Voy. Thuggisme.

Assheton (Guillaume), théologien anglican, mort en 1711. Il publia, en 1691, un petit ouvrage peu recherché, intitulé La possibilité des apparitions.

Astaroth, grand-duc très-puissant aux enfers. Il a la figure d’un ange fort laid, et se montre chevauchant sur un dragon infernal ; il tient à la

 
Astaroth
Astaroth
 
main gauche une vipère. Quelques magiciens disent qu’il préside à l’Occident, qu’il procure l’amitié des grands seigneurs, et qu’il faut l’évoquer le mercredi. Les Sidoniens et les Philistins, l’adorèrent. Il est, dit-on, grand trésorier aux enfers. Wierus nous apprend qu’il sait le passé et l’avenir, qu’il répond volontiers aux questions qu’on lui fait sur les choses les plus secrètes, et qu’il est facile de le faire causer sur la création, les fautes et la chute des anges, dont il connaît toute l’histoire. Mais dans ses conversations, il soutient que pour lui il a été puni injustement. Il enseigne à fond les arts libéraux, et commande quarante légions. Celui qui le fait venir doit prendre garde de s’en laisser approcher, à cause de son insupportable puanteur. C’est pourquoi il est prudent de tenir sous ses narines un anneau magique en argent, qui est un préservatif contre les odeurs fétides des démons[151]. Astaroth a figuré dans plusieurs possessions. Il est cité comme l’un des sept princes de l’enfer qui visitèrent Faust, selon la tradition anglaise ; il parut en serpent, ayant « la queue colorée comme des briques changeantes, deux petits pieds fort courts, tout jaunes, le ventre blanc et jaunâtre, le cou châtain roux, et une pointe en forme de trait, comme ceux du hérisson, qui avance de la longueur d’un doigt[152] ».

Astarté, femelle d’Astaroth. On la représente avec une tête de génisse.

Astiages, roi des Mèdes. Quand Cyrus eut vaincu l’Asie, on publia qu’Astiages, son grand-père, avait songé en dormant que dans le sein de sa fille Mandane croissait une vigne qui de ses feuilles couvrait l’Asie entière : présage de la grandeur de Cyrus, fils de Mandane.

Astier, l’un des prophètes du Dauphiné. Voy. Prophètes.

Astragalomancie, divination par les dés. Prenez deux dés, marqués comme d’usage des numéros 1, 2, 3, 4, 5, 6. On peut jeter à volonté un dé seul ou les deux dés à la fois ; on a ainsi la chance d’amener, les chiffres 1 à 12. Vous voulez deviner quelque affaire qui vous embarrasse on pénétrer les secrets de l’avenir, posez la question sur un papier que vous aurez passé, au-dessus de la fumée du bois de genièvre ; placez ce papier renversé sur la tablé, et jetez les dés. — Vous écrirez les lettres à mesure qu’elles se présentent. En se combinant, elles vous donneront la réponse : 1 vaut la lettre A ; 2 vaut E ; 3 vaut I ou Y ; 4 vaut O ; 5 vaut U ; 6 vaut B, P ou V ; 7 vaut C, K ou Q ; 8 vaut D ou T ; 9 vaut F, S, X ou Z ; 10 vaut G ou J ; 11 vaut L ; M ou N ; 12 vaut R. — Si la réponse est obscure, il ne faut pas s’en étonner : le sort est capricieux. Dans le cas ou vous n’y pouvez rien comprendre, recourez à d’autres divinations. — La lettre H n’est point marquée, parce qu’elle n’est pas nécessaire. Les règles du destin se dispensent de celles de l’orthographe ; PH s’expriment fort bien par la lettre F, et CH par la lettre X.

Les anciens pratiquaient l’astragalomancie avec des osselets marqués des lettres de l’alphabet, et les lettres que le hasard amenait faisaient les réponses. C’est par ce moyen que se rendaient les oracles d’Hercule en Achaïe. On mettait les lettres dans une urne, et on les tirait comme on lire les numéros des loteries.

Astres. La première idolâtrie a commencé parle culte des astres. Tous les peuples fourvoyés les adoraient au temps de Moïse. Lui seul ; dit aux Hébreux : « Lorsque vous élevez les yeux vers le ciel, que vous voyez le soleil ; la lune et les autres astres, gardez-vous de tomber dans l’erreur et de les adorer, car c’est Dieu qui les a créés. » (Deutéronome, chap. 4.)

Ceux qui ne croient pas à la révélation devraient nous apprendre comment Moïse a été plus éclairé que les sages de toutes les nations dont il était environné[153].

Mahomet dit dans le Koran que les étoiles sont les sentinelles du ciel, et qu’elles empêchent les démons d’en approcher et de connaître ainsi les secrets de Dieu.

Il y a des sectes qui prétendent que chaque corps céleste est la demeure d’un ange. — Les Arabes, avant Mahomet, adoraient les astres. Les anciens en faisaient des êtres animés ; les Égyptiens croyaient qu’ils voguaient dans des navires à travers les airs comme nos aéronautes ; ils disaient que le soleil, avec son esquif, traversait l’Océan toutes les nuits pour retourner d’Occident en Orient.

D’autres physiciens ont prétendu que les étoiles sont les yeux du ciel, et que les larmes qui en tombent forment les pierres précieuses. C’est pour cela, ajoutent-ils, que chaque étoile (ou plutôt chaque planète) a sa pierre favorite.

Astrolabe, instrument dont on se sert pour observer les astres et tirer les horoscopes. Il est souvent semblable à une sphère armillaire. L’astrologue, instruit du jour, de l’heure, du moment où est né celui qui le consulte ou pour lequel on le consulte, met les choses à la place qu’elles occupaient alors, et dresse son thème suivant la position des planètes et des constellations.

Il y a eu des gens, autrefois qui faisaient le métier de découvrir les voleurs par le moyen

 
Un astronome regardant à travers un télescope
Un astronome regardant à travers un télescope
 
d’un astrolabe. « Le ciel, disaient-ils, est un livre dans lequel on voit le passé, le présent et l’avenir ; pourquoi ne pourrait-on pas lire les événements de ce monde dans un instrument qui représente la situation des corps célestes[154] ? »

Astrologie, art de dire la bonne aventure, de tirer les horoscopes et de prédire les événements, par l’aspect, les positions et les influences des corps célestes. — On croit que l’astrologie, qu’on appelle aussi astrologie judiciaire, parce qu’elle consiste en jugements sur les personnes et sur les choses, a pris naissance dans la Chaldée, d’où elle pénétra en Égypte, en Grèce et en Italie, Quelques antiquaires attribuent l’invention de cette science ; à Cham, fils de Noé. Le commissaire de Lamarre, dans Son Traité de police, titre VII, chap. 1er, ne repousse pas les opinions qui établissent qu’elle lui a été enseignée par le démon…

Diogène Laërce donne à entendre que les Égyptiens connaissaient la rondeur de la terre et la cause des éclipses. On ne peut leur disputer l’habileté en astronomie ; mais, au lieu de se tenir aux règles, droites de cette science, ils en ajoutèrent d’autres qu’ils fondèrent uniquement sur leur imagination ; ce furent là les principes de l’art de deviner et de tirer les horoscopes. Ce sont eux, dit Hérodote, qui enseignèrent à quel dieu chaque mois, chaque jour est consacré ; qui observèrent les premiers sous quel ascendant un homme est né, pour prédire sa fortune, ce qui lui arriverait dans sa vie, et de quelle mort il mourrait.

« J’ai lu dans les registres du ciel tout ce qui doit vous arriver a vous et à votre fils, » disait a ses crédules enfants Bélus, prince de Babylone. Pompée, Cesar, Crassus, croyaient à l’astrologie, Pline en parle comme d’un art respectable. Cette science gouverne encore la Perse et une grande partie de l’Asie « Rien ne se fait ici, dit Tavernier dans sa relation d’Ispahan, que de l’avis des astrologues. Ils sont plus puissants et plus redoutés que le roi, qui en a toujours quatre attachés à ses pas. Il les consulte sans cesse, et ils l’avertissent du temps où il doit se promener, de l’heure où il doit se renfermer dans son palais, se purger, se vêtir de ses habits royaux, prendre ou quitter le sceptre, etc. Ils sont si respectés dans cette cour, que le roi Schah-Sophi étant accablé depuis plusieurs années d’infirmités que l’art ne pouvait guérir, les médecins jugèrent qu’il n’était tombé dans cet état de dépérissement que par la faute des astrologues, qui avaient mal pris l’heure à laquelle il devait être élevé sur le trône. Les astrologues reconnurent leur erreur ; ils s’assemblèrent de nouveau avec les médecins, cherchèrent de nouveau dans le ciel-la véritable heure propice, ne manquèrent pas de la trouver, et la cérémonie du couronnement fut renouvelée, à la grande satisfaction de Schah-Sophi, qui mourut quelques jours après. »

Il en est de même en Chine, où l’empereur n’ose rien entreprendre sans avoir consulté son thème natal.

La vénération des Japonais pour l’astrologie est plus profonde encore : chez eux personne n’oserait construire un édifice sans avoir interrogé quelque astrologue sur la durée du bâtiment. Il y en a même qui, sur la réponse des astres, se dévouent et se tuent pour le bonheur de ceux qui doivent habiter la nouvelle maison[155].

Presque tous les anciens, Hippocrate, Virgile, Horace, Tibère, croyaient à l’astrologie. Le moyen âge en fut infecté. On tira l’horoscope de Louis XIII et de Louis XIII et Boileau dit qu’un téméraire auteur n’atteint pas le Parnasse, si son astre en naissant ne l’a formé poëte.

En astrologie, on ne connaît dans le ciel que sept planètes et douze constellations dans le zodiaque. Le nombre de celles-ci n’a pas changé ; mais il y a aujourd’hui neuf fois plus de planètes. Nous ne parlerons pourtant que des sept vieilles employées seules par les astrologues. Nous n’ayons, disent-ils, aucun membre que les corps célestes ne gouvernent. Les sept planètes sont comme, on sait, le Soleil, la Lune, Vénus, Jupiter, Mars, Mercure et Saturne. Le Soleil préside à la tête, la Lune au bras droit, Vénus au bras gauche, Jupiter à l’estomac, Mars aux parties sexuelles, Mercure au pied droit, et Saturne au pied gauche ; — où bien Mars gouverne la tête, Vénus le bras droit, Jupiter le bras gauche, le Soleil l’estomac, la Lune les parties sexuelles, Mercure le pied droit, et Saturne le pied gauche.

Parmi les constellations, le Bélier gouverne la tête, le Taureau le cou, les Gémeaux les bras et les épaules, l’Écrevisse la poitrine et le cœur, le Lion l’estomac, la Vierge le ventre, la Balance les reins et les fesses, le Scorpion les parties sexuelles, le Sagittaire les cuisses, le Capricorne les genoux, le Verseau les jambes, et les Poissons les pieds.

On a mis aussi le monde c’est-à-dire les empires et les villes sous l’influence des constellations. Des astrologues, allemands, au seizième siècle, avaient déclaré Francfort sous l’influence du Bélier, Wurtzbourg sous celle du Taureau, Nuremberg, sous îles Gémeaux, Magdebourg sous l’Écrevisse, Ulm sous le Lion, Heidelberg sous la Vierge, Vienne sous la Balance, Munich sous le Scorpion, Stuttgard sous le Sagittaire, Augsbourg sous le Capricorne, Ingolstadt sous le Verseau, et Ratisbonne sous les Poissons.

Hermès a dit que c’est parce qu’il y a sept trous à la tête qu’il y a aussi dans le ciel sept planètes pour présider à ces trous : Saturne et Jupiter aux deux oreilles, Mars et Vénus aux deux narines, le Soleil et la Lune aux deux yeux, et Mercure à la bouche. Léon l’Hébreu, dans sa Philosophie d’amour, traduite par le sieur Duparc, Champenois, admet cette opinion, qu’il précise, très-bien : « Le Soleil préside à l’œil droit, dit-il, et la Lune à l’œil gauche, parce que tous les deux sont les yeux du ciel ; Jupiter gouverne l’oreille gauche, Saturne la droite, Mars le pertuis droit du nez, Vénus le pertuis gauche, et Mercure la bouche, parce qu’il préside à la parole. »

Ajoutons encore que Saturne domine sur la vie, les changements, les édifices et les sciences ; Jupiter sur l’honneur, les souhaits, les richesses et la propreté des habits ; Mars sur la guerre, les prisons, les mariages, les haines ; le Soleil sur l’espérance, le bonheur, le gain, les héritages ; Vénus sur les amitiés et les amours ; Mercure sur les maladies, les perles, les délies, le commerce et la crainte ; la Lune sur les plaies, les songes et les larcins. Ainsi, du moins, le décide le livre des Admirables secrets d’Albert le Grand.

En dominant de la sorte tout ce qui arrive à l’homme, les planètes ramènent le même cours, de choses toutes les fois qu’elles se retrouvent dans le ciel au lieu de l’horoscope. Jupiter se retrouve au bout de douze ans au même lieu, les honneurs seront les mêmes ; Vénus, au bout de huit ans, les amours, seront les mêmes, etc., mais dans un autre individu.

N’oublions pas non plus, que chaque planète gouverne un jour de la semaine : le Soleil le dimanche, la Lune le lundi, Mars le mardi, Mercure le mercredi, Jupiter le jeudi, Vénus le vendredi, Saturne le samedi, — que le jaune est la couleur du Soleil, le blanc celle de la Lune, le vert celle de Vénus, le rouge celle, de Mars, le bleu celle de Jupiter, le noir celle de Saturne, le mélangé celle de Mercure ; — que le Soleil préside à l’or,-la Lune à l’argent, Vénus à l’étain, Mars au fer, Jupiter à l’airain, Saturne au plomb, Mercure au vif-argent, etc.

Le Soleil est bienfaisant et favorable, Saturne triste, morose et froid ; Jupiter tempéré et bénin, Mars ardent, Vénus bienveillante, Mercure inconstant, la Lune mélancolique.

Dans les constellations, le Bélier, le Lion et le Sagittaire sont chauds, secs et ardents ; le Taureau, la Vierge et le Capricorne, lourds, froids et secs ; les Gémeaux, la Balance et le Verseau, légers, chauds et humides ; l’Écrevisse, le Scorpion et les Poissons, humides, mous et froids.

Au moment de la naissance d’un enfant dont on, veut tirer l’horoscope, ou bien au jour de l’événement dont on cherche à présager les suites, il faut d’abord voir sur l’astrolabe quelles sont les constellations et planètes qui dominent dans le ciel, et tirer les conséquences qu’indiquent leurs vertus, leurs qualités et leurs fonctions. Si trois signes de la même nature se rencontrent dans le ciel, comme, par exemple, le Bélier, le Lion et le Sagittaire, ces trois signes forment le trin aspect, parce qu’ils partagent le ciel en trois et qu’ils sont séparés l’un de l’autre par trois autres constellations. Cet aspect est bon et favorable.

Quand ceux qui partagent le ciel par sixièmes se rencontrent à l’heure de l’opération, comme le Bélier avec les, Gémeaux, le Taureau avec l’Écrevisse, etc., ils forment l’aspect sextil, qui est médiocre.

Quand ceux qui partagent le ciel qui quatre, comme le Bélier avec l’Écrevisse, le Taureau avec le Lion, les Gémeaux avec la Vierge, se rencontrent dans le ciel, ils forment ; l’aspect carré, qui est mauvais.

Quand ceux qui se trouvent aux parties opposées du ciel, comme le Bélier avec la Balance, le Taureau avec le Scorpion, les Gémeaux avec le Sagittaire, etc., se rencontrent à l’heure de la naissance, ils forment l’aspect contraire, qui est méchant et nuisible.

Les astres, sont en conjonction quand deux planètes se trouvent réunies dans le même signe ou dans la même maison, et en opposition quand elles sont à deux points opposés.

Chaque signe du zodiaque occupe une pince qu’un appelle maison céleste ou maison du soleil ; ces douze maisons du soleil coupent ainsi le zodiaque en douze parties. Chaque-maison occupe trente degrés, puisque le cercle en à trois-cent soixante. Les astrologues représentent les maisons par des simples numéros, dans une figure ronde ou carrée, divisée en douze cellules.

 
Carré astrologique
Carré astrologique
 

La première maison est celle du Bélier, qu’on appelle l’angle oriental en argot astrologique. C’est la maison de la vie, parce que ceux qui naissent quand celle constellation domine peuvent vivre longtemps.

La seconde maison est celle du Taureau, qu’on appelle la porte inférieure. C’est la maison des richesses et des moyens de fortune.

La troisième maison est, celle des Gémeaux, appelée la demeure des frères. C’est la maison des héritages et des bonnes successions.

La quatrième maison est celle de l’Écrevisse. On l’appelle le fond du ciel, l’angle de la terre, la demeure des parents. C’est la maison des trésors et des biens de patrimoine.

La cinquième maison est celle du Lion, dite la demeure des enfants. C’est la maison des legs et des donations.

La sixième maison est celle de la Vierge ; on l’appelle l’amour de Mars. C’est la maison des chagrins, des revers et des maladies.

La septième maison est celle de la Balance, qu’on appelle l’angle occidental. C’est la maison des mariages et des noces.

La huitième maison est celle du Scorpion, appelée la porte supérieure. C’est la maison de l’effroi, des craintes et de la mort.

La neuvième maison est celle du Sagittaire, appelée l’amour du soleil. C’est la maison de la piété, de la religion, des voyages et de la philosophie.

La dixième maison est celle du Capricorne, dite le milieu du ciel. C’est la maison des charges, des dignités et des couronnes.

La onzième maison est celle du Verseau » qu’on appelle l’amour de Jupiter. C’est la maison des amis, des bienfaits et de la fortune.

La douzième maison est celle des Poissons, appelée l’amour de Saturne. C’est la plus mauvaise de toutes et la plus funeste : c’est la maison des empoisonnements, des misères, de l’envie, de l’humeur noire et de la mort violente.

Le Bélier et le Scorpion sont les maisons chéries de Mars ; le Taureau et la Balance, celles de Vénus ; les Gémeaux et la Vierge, celles de Mercure ; le Sagittaire et les Poissons, celles de Jupiter ; le Capricorne et le Verseau, celles de Saturne ; le Lion, celle du Soleil ; l’Écrevisse, celle de la Lune.

Il faut examiner avec soin les rencontres des planètes avec les constellations. Si Mars, par exemple, se rencontre avec le Bélier à l’heure de la naissance, il donne du courage, de la fierté et une longue vie ; s’il se trouve avec le Taureau, richesses et courage. En un mot, Mars augmente l’influence des constellations avec lesquelles il se rencontre, et y ajoute la valeur et la force. — Saturne, qui donne les peines, les misères, les maladies, augmente les mauvaises influences et gâte les bonnes. Vénus, au contraire, augmente les bonnes influences et affaiblit les mauvaises. — Mercure augmente ou affaiblit les influences suivant ses conjonctions : s’il se rencontre avec les Poissons, qui sont mauvais, il devient moins bon ; s’il se trouve avec le Capricorne, qui est favorable, il devient meilleur. — La Lime joint la mélancolie aux constellations heureuses ; elle ajoute la tristesse ou la démence aux constellations funestes. — Jupiter, qui donne les richesses et les honneurs, augmente les bonnes influences et dissipe à peu près les mauvaises. — Le Soleil ascendant donne les faveurs des princes ; il a sur les influences presque autant d’effet que Jupiter ; mais descendant il présage des revers.

Ajoutons que les Gémeaux, la Balance et la Vierge donnent la beauté par excellence ; le Scorpion, le Capricorne et les Poissons donnent une beauté médiocre. Les autres constellations donnent plus ou moins la laideur. — La Vierge, la Balance, le Verseau et les Gémeaux donnent une belle voix ; l’Écrevisse, le Scorpion et les Poissons donnent une voix nulle où désagréable. Les autres constellations n’ont pas d’influence sur la voix.

Si les planètes et les constellations se trouvent à l’orient à l’heure de l’horoscope, on éprouvera leur influence au commencement de la vie ou de l’entreprise ; on l’éprouvera au milieu si elles sont au haut du ciel, et à la fin si elles sont à l’occident.

Afin que l’horoscope ne trompe point, il faut avoir soin d’en commencer les opérations précisément à la minute où l’enfant est né, ou à l’instant-précis d’une affaire dont on veut savoir les suites. — Pour ceux qui n’exigent pas une exactitude si sévère, il y a des horoscopes tout dressés, d’après les constellations de la naissance. Voy. Horoscopes.

Tels sont en peu de mois, les principes de cet art, autrefois si vanté, si universellement répandu, et maintenant un peu tombé en désuétude. Les astrologues conviennent que le globe roule si rapidement, que la disposition des astres change en un moment. Il faudra donc, pour tirer les horoscopes, que les sages-femmes aient soin de regarder attentivement les horloges, de marquer exactement chaque point du jour, et de conserver à celui qui naît ses étoiles comme son patrimoine. « Mais combien de fois, dit Barclai, le péril des mères empêche-t-il ceux qui sont autour d’elles de songer à cela ! Et combien de fois ne se trouve-t-il là personne qui soit assez superstitieux pour s’en occuper ! Supposez, cependant, qu’on y ait pris garde, si l’enfant est longtemps à naître, et si, ayant montré la tête, le reste du corps ne paraît pas de suite, comme il arrive, quelle disposition des astres sera funeste ou favorable ? sera-ce celle qui aura présidé à l’apparition de la tôle, ou celle qui se sera rencontrée quand l’enfant est entièrement né ?… »

Astrologues. Voici quelques anecdotes sur le compte des astrologues : Un valet, ayant volé son maître, s’enfuit avec l’objet dérobé. On mit des gens à sa poursuite, et, comme on ne le trouvait pas, on consulte un astrologue. Celui-ci, habile à deviner les choses passées, répondit que le valet s’était échappé parce que la lune s’était trouvée, à sa naissance, en conjonction avec Mercure, qui protégé les voleurs, et que de plus longues recherches seraient inutiles. Comme il disait ces mots, on amena le domestique, qu’on venait de prendre enfin, malgré la protection de Mercure.

Les astrologues tirent vanité de deux ou trois de leurs prédictions accomplies, quoique souvent, d’une manière indirecte, entre mille qui n’ont pas eu de succès, L’horoscope du poëte Eschyle portait qu’il serait écrasé par la chute d’une maison ; il s’alla, dit-on, mettre en plein champ, pour éviter sa destinée ; mais un aigle, qui avait enlevé une tortue, la lui laissa tomber sur la tête, et il en fut tué. Si ce conte n’a pas été fait après coup, nous répondrons qu’un aveugle, eu jetant au hasard une multitude de flèches, peut atteindre le but une fois par hasard. Quand il y avait en Europe des milliers d’astrologues qui faisaient tous les jours de nouvelles prédictions, il pouvait s’en trouver quelques-unes que l’événement, par cas fortuit, justifiait ; et celles-ci, quoique rares, entretenaient la crédulité que des millions de mensonges auraient du détruire.

L’empereur Frédéric-Barberousse, étant sur le point de quitter Vicence, qu’il venait de prendre d’assaut, défia le plus fameux astrologue de de-

 
Astrologues
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viner par quelle porte il sortirait le lendemain. Le charlatan répondit au défi par un tour de son métier : il remit à Frédéric un billet cacheté, lui recommandant de ne l’ouvrir qu’après sa sortie. L’empereur fit abattre, pendant la nuit, quelques toises de mur, et sortit par la brèche. Il ouvrit ensuite le billet, et ne fut pas peu surpris d’y lire ces mots : — « L’empereur sortira par la porte neuve. » C’en fut assez pour que l’astrologue et l’astrologie lui parussent infiniment respectables.

Un homme que les astres avaient condamné en naissant à être tué par un cheval avait grand soin de s’éloigner dès qu’il apercevait un de ces animaux. Or, un jour qu’il passait dans une rue, une enseigne lui tomba sur la tête, et il mourut du coup : c’était, dit le conte, l’enseigne d’une auberge où était représenté un cheval noir.

Mais il y a d’autres anecdotes : Un bourgeois de Lyon, riche et crédule, ayant fait dresser son horoscope, mangea tout son bien pendant le temps qu’il croyait avoir à vivre. N’étant pas mort à l’heure que l’astrologue lui avait assignée, il se vit obligé de demander l’aumône, ce qu’il faisait en disant : — «Ayez pitié d’un homme qui a vécu plus longtemps qu’il ne croyait. »

Une dame pria un astrologue de deviner un chagrin qu’elle avait dans l’esprit. L’astrologue, après lui avoir demandé l’année, le mois, le jour et l’heure de sa naissance, dressa, la figure de

 
Astrologues
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son horoscope, et dit beaucoup de paroles qui signifiaient peu de chose, lui dame lui donna une pièce de quinze sous. — « Madame, dit alors l’astrologue, je découvre encore dans Votre horoscope que vous n’êtes pas riche. — Cela est vrai, répondit-elle. — Madame, poursuivit-il on considérant de nouveau les figures des astres, n’avez-vous rien perdu ? — J’ai perdu, lui dit-elle, l’urgent que je viens de vous donner. »

Darah, l’un des quatre fils du Grand Mogol Schah-Géhan, ajoutait beaucoup de foi aux prédictions des astrologues. Un de ces doctes lui avait prédit, au péril de sa tête, qu’il porterait la couronne. Darah comptait là-dessus. Comme on s’étonnait que cet astrologue osât garantir sur sa vie un événement aussi incertain : — « Il arrivera de deux choses l’une, répondit-il, ou Darah parviendra au trône, et ma fortune est faite ; ou il sera vaincu : dès lors sa mort est certaine, et je ne redoute pas sa vengeance. »

Heggiage, général arabe sous le calife Valid, consulta, dans sa dernière maladie, un astrologue qui lui prédit une mort prochaine. — « Je compte tellement sur votre habileté, lui répondit Heggiage, que je veux vous avoir avec moi dans l’autre monde, et je vais vous y envoyer le premier, afin que je puisse me servir de vous dès mon arrivée. » Il lui fit couper la tête, quoique le temps fixé par les astres ne fut pas encore arrivé.

L’empereur Manuel, qui avait aussi des prétentions à la science de l’astrologie, mit en mer, sur la foi des astres, une flotte qui devait faire des merveilles et qui fut vaincue, brûlée et coulée bas.

Henri VII, roi d’Angleterre, demandait à un astrologue s’il savait où il passerait les fêtes de Woël. L’astrologue répondit qu’il n’en savait rien. — « Je suis donc plus habile que toi, répondit le roi, car je sais que tu les passeras dans la Tour de Londres. » Il l’y fit conduire en même temps. Il est vrai que c’était une mauvaise raison.

Un astrologue regardant au visage Jean Galéas, duc de Milan, lui dit : — « Seigneur, arrangez vos affaires, car vous ne pouvez vivre longtemps. — Comment le sais-tu ? lui demanda le duc. — Par la connaissance des astres. — Et toi, combien dois-tu vivre ? — Ma planète me promet une longue vie. — Oh bien ! tu vas voir qu’il ne faut pas se fier aux planètes ; » et il le fit pendre sur-le-champ.

Astronomancie, divination par les astres. C’est la même chose que l’astrologie.

Astyle, devin fameux dans l’histoire des Centaures. On trouvé dans Plutarque un autre devin nommé Astyphile. Voy. Cimon.

Asuman, l’ange de la mort, chez les Mages.

Asweith. Voy. Asmund.

Até, fille de la Discorde, divinité funeste dans la mythologie grecque.

Athénagore, philosophe platonicien, qui embrassa le christianisme au deuxième siècle. On peut lire son Traité de la résurrection dès morts, traduit du grec en français par Gaussart, prieur de Sainte-Foy, Paris, 1574, et par Duferrier, Bordeaux, 1577, in-8o.

Athénaïs, sibylle d’Érythrée. Elle prophétisait du temps d’Alexandre.

Athénodore, philosophe stoïcien du siècle d’Auguste. On conte qu’il y avait à Athènes une fort belle maison où personne n’osait demeurer, à cause d’un spectre qui s’y montrait la nuit. Athénodore, étant arrivé dans cette ville, ne s’effraya point de ce qu’on disait de la maison décriée, et l’acheta.

La première nuit qu’il y passa, étant occupé a écrire, il entendit tout à coup un bruit de chaînes, et il aperçut un vieillard hideux, chargé de fers, qui s’approchait de lui à pas lents. Il continua d’écrire, Le spectre l’appelant du doigt, lui fit signe de le suivre. Athénodore répondit à l’esprit, par un autre signe, qu’il le priait d’attendre, et continua son travail ; mais le spectre lit retentir ses chaînes à ses oreilles, et l’obséda tellement, que le philosophe, fatigué, se détermina a voir l’aventure. Il marcha avec le fantôme, qui disparut dans un coin de la cour, Athénodore étonné arracha une poignée de gazon pour reconnaître le lieu, rentra dans sa chambre, et, le lendemain, il lit part aux magistrats de ce qui lui était arrivé. On fouilla dans l’endroit indiqué ; on trouva les os d’un cadavre avec des chaînes, on lui rendit les honneurs de la sépulture, et, dès ce moment, ajoute-t-on, la maison fut tranquille[156]. Voy. Ayola et Arignote.

Atinius. Tite-Live raconté que, le matin d’un jour où l’on représentait les grands jeux, un citoyen de Rome conduisit un de ses esclaves à travers le cirque en le faisant battre de verges ; ce qui divertit ce grand peuple romain. Les jeux commencèrent à la suite de cette parade ; mais quelques jours après Jupiter Capitolin apparut la nuit, en songe, à un homme du peuple nommé Atinius[157], et lui ordonna d’aller dire de sa part aux consuls qu’il n’avait pas été content de celui qui menait la danse, aux derniers jeux, et que l’on recommençât la fête avec un autre danseur. — Le Romain, à son réveil, Craignit de se rendre ridicule en publiant ce songe, et le lendemain son fils, sans être malade, mourut subitement. La nuit suivante, Jupiter lui apparut de nouveau et lui demandai s’il se trouvait bien d’avoir méprisé l’ordre des dieux, ajoutant que s’il n’obéissait il lui arriverait pis. Atinius, ne s’étant pas encore décidé à parler aux magistrats, fut frappé d’une paralysie qui lui ôta l’usage de ses membres. Alors, il se fit porter en chaise au sénat, et raconta tout ce qui s’était passé. Il n’eut pas plutôt fini son récit, qu’il se leva, rendu à la santé. Toutes ces circonstances parurent miraculeuses. On comprit que le mauvais danseur était l’esclave battu. Le maître de cet infortuné fut recherché et puni ; on ordonna aussi de nouveaux jeux qui furent célébrés avec plus de pompe que les précédents. — An de Rome 265.

Atré, divinité ou plutôt démon des Anglo-Saxons, auxquels il ne faisait que du mal.

Atropos, l’une des trois Parques ; c’est elle qui coupait le fil. Hésiode la peint comme très-féroce ; on lui donne un vêtement noir, des traits ridés et un maintien peu séduisant.

Attila, dit le Fléau de Dieu, que saint Loup, évêque de Troyes, empêcha de ravager la Champagne. Comme il s’avançait sur Rome pour la détruire, il eut une vision : il vit en songe un vieillard vénérable, vêtu d’habits sacerdotaux, qui, l’épée nue au poing, le menaçait de le tuer s’il résistait aux prières du saint pape Léon. Le lendemain, quand le Pape vint lui demander d’épargner Rome, il répondit qu’il le ferait, et ne passa pas plus avant. Paul Diacre dit, dans le livre XV de son Histoire de la Lombardie, que ce vieillard merveilleux n’était autre, selon l’opinion générale, que saint Pierre, prince des apôtres. — Des légendaires ont écrit qu’Attila était fils du démon.

Attouchement, Pline dit que Pyrrhus guérissait les douleurs de rate en touchant les malades du gros doigt de son pied droit ; et l’empereur Adrien, en touchant les hydropiques du bout de l’index, leur faisait sortir l’eau du ventre. Beaucoup de magiciens et de sorciers ont su produire également des cures merveilleuses par le simple attouchement. Voy. Chaumes, Écrouelles, etc.

Aubigné (Nathan d’), en latin Albineus, fils du fameux huguenot d’Aubigné. Il était partisan de l’alchimie. Il a publié, sous le titre de Bibliothèque chimique, un recueil de divers traités, recherché par ceux qui croient à la pierre philosophale[158].

Aubrey (Jean), Alberius, savant antiquaire anglais, mort en 1700, Il a donné, en 1696, un livre intitulé Mélanges sur les sujets suivants : Fatalité de jours, fatalité de lieux, présages, songes, apparitions, merveilles et prodiges ; réimprimé en 1721, avec des additions.

Aubry (Nicole), jeune fille de Vervins, dont la possession a fait, très-grand bruit au treizième siècle. À l’âge de seize ans, étant allée prier sur la tombe de son père, l’esprit de cet homme lui apparut, sortant du tombeau, et lui prescrivit combien elle devait faire dire de messes pour le repos de son âme. Elle exécuta ponctuellement tout ce qui lui était recommandé ; mais, malgré son exacte, obéissance, elle n’en continua pas moins à être tous les jour visitée par cet esprit, qui finit-par lui-avouer qu’il était un démon. Ce démon la transporta en divers lieux et l’enleva même devant de nombreux témoins, ce qui fit reconnaître évidemment qu’elle en était possédée. L’évêque de Laon la fit exorciser, et ce fut pendant trois mois sans résultat. Dix hommes, et quelquefois plus, la tenaient durant les exorcismes, et elle leur était arrachée à la vue de la foule. Des notaires publics dressaient les procès-verbaux de ces faits, qui se sont répétés deux siècles plus tard sur la tombe du diacre Paris, et qui, dans l’une et l’autre affaire, ont été constatés dans toutes les formes et avec toutes les garanties désirables. La science humaine a barboté autour de ces monstrueux phénomènes sans pouvoir les expliquer. En même temps que cette puissance qui, dans une jeune fille, rendait vains les efforts de quinze ou seize hommes robustes, Nicole Aubry parlait plusieurs langues, découvrait les choses les plus secrètes et voyait ce qui se passait à quelques lieues d’elle.

Cette première période-des exorcismes avait eu lieu à Vervins ; l’évêque, étonné, fit venir la jeune fille à Laon, où il l’exorcisa lui-même dans la cathédrale remplie continuellement à ce sujet de dix à douze mille spectateurs. Ce n’était plus un seul démon qui s’était installé dans Nicole Aubry. C’était dès lors, sans aucun doute, par la permission de Dieu, toute une légion d’esprits mauvais ; et il y eut des scènes si étranges, que le Parlement de Paris et l’Université envoyèrent des commissaires à Laon ; le nonce du pape y vint aussi. Les démons, voyant ce concours, en devinrent plus insolents : ils insultaient les exorcistes et l’évêque lui-même ; mais ils ne ménageaient pas les protestants, qui demandèrent qu’on emprisonnât la possédée. Un médecin, de leur secte, ayant tenté de l’empoisonner, on ne les écouta points Les démons, malgré eux probablement, turlupinaient la réforme pur des sarcasmes si incisifs, qu’ils eurent pour résultat la conversion d’un grand nombre de calvinistes, parmi lesquels nous citerons Florimond de Rémond, qui a laissé un nom dans les sciences historiques. Les démons enfin furent vaincus et la jeune fille délivrée. On a dit qu’ils étaient au nombre de vingt-neuf, en tête desquels étaient Belzébut, qui était venu à elle sous la figure d’un taureau, Baltazo sous celle d’un mouton, Astaroth sous celle d’un porc, les autres sous forme de chats gros comme des brebis. — L’histoire de Nicole Aubry fut publiée par la Sorbonne, en français, en latin, en espagnol, en italien et en allemand. Elle avait tant de retentissement que Charles IX en voulut voir l’héroïne, qui lui fut présentée le 27 août 1506.

Cette histoire a été tellement dénaturée par les protestants, qui ont falsifie aussi de Loudun et quelques autres, qu’il est très-rare chez nous de la trouver exacte. Gorres l’a donnée, consciencieusement dans le tome IV de sa Mustique.

Audumla. Une étincelle de la lumière divine ayant fondu une portion des glaces de la Scandinavie, il naquit de cette goutte, la génisse Audumla, qui nourrit de son lait Imir né avec elle. Puis elle lécha des glaçons d’où sortit Bor ou Buri. (Mythologie Scandinave.)

Augerot d’Armore, sorcier. Voy. Chorropique.

Augures. Les augures étaient, chez les Romains, les interprètes des dieux. On les consultait avant toutes les grandes entreprises : ils jugeaient du succès par le vol, le chant et la façon de manger des oiseaux. On ne pouvait élire un magistrat, ni donner une bataille, sans avoir consulté l’appétit, des poulets sacrés ou les entrailles des victimes. Annibal pressant le roi Prusias de livrer bataille aux Romains, celui-ci s’en excusa en disant que les victimes s’y opposaient. — « C’est-à-dire, reprit Annibal, que vous préférez l’avis d’un mouton à celui d’un vieux général. »

Les augures prédisaient aussi l’avenir par le moyen du tonnerre et des éclairs, par les éclipses et par les présages qu’on tirait de l’apparition des comètes. Les savants n’étaient pas dupes de leurs cérémonies, et Cicéron disait qu’il ne concevait pas que deux augures pussent se regarder sans rire.

Quelques-uns méprisèrent, il est vrai, la science des augures ; mais ils s’en trouvèrent mal, parce que le peuple la respectait. On vint dire à Claudius Pulcher, prêt à livrer bataille aux Carthaginois, que les poulets sacrés refusaient de manger. — « Qu’on les jette à la mer, répondit-il, s’ils ne mangent pas, ils boiront. » Mais Famée fût indignée de ce sacrilège, et Claudius perdit la bataille[159].

Les oiseaux ne sont pas, chez nos bonnes gens, dépourvus du dori de prophétie. Le cri de la chouette annonce la mort ; le chant du rossignol promet de la joie ; le coucou donne de l’argent, quand on porte sur soi quelque monnaie le premier jour qu’on a le bonheur de l’entendre, etc.

Si une corneille vole devant vous, dit Cardan, elle présage un malheur futur ; si elle vole à droite, un malheur présent ; si elle vole à gauche, un malheur qu’on peut éviter par la prudence ; si elle vole sur votre tête, elle annonce la mort, pourvu toutefois qu’elle croasse ; si elle garde le silence, elle ne présage rien…

On dit que la science des augures passa des Chaldéens chez les Grecs, et ensuite chez les Romains. Elle est défendue aux Juifs par le chapitre xxix du Lévitique.

Gaspard Peucer dit que les augures se

 
Augures
Augures
Augures.
 
prenaient de cinq choses : 1o du ciel ; 2o des oiseaux ; 3o des bêtes à deux pieds ; 4o des bêtes à quatre pieds ; 5o de ce qui arrive au corps humain, soit dans la maison, soit hors de la maison.

Mais les anciens livres auguraux, approuvés par Maggioli dans le deuxième colloque du supplément a ses Jours caniculaires, portent les objets d’augures a douze chefs principaux, selon le nombre des douze signes du zodiaque : 1o l’entrée d’un animal sauvage ou domestique dans une maison ; 2o la rencontre d’un animal sur la route ou dans la rue ; 3o la chute du tonnerre ; 4o un rat qui mange une savate, un renard qui étrangle une poule, un loup qui emporte une brebis, etc. ; 5o un bruit inconnu entendu dans la maison, et qu’on attribuait à quelque lutin ; 6o le cri de la corneille ou du hibou, un oiseau qui tombe sur le chemin, etc. ; 7o un chat ou tout autre animal qui entre par un trou dans la maison : on le prenait pour un mauvais génie ; 8o un flambeau qui s’éteint tout seul, ce que l’on croyait une malice d’un démon ; 9o le feu qui pétillé. Les anciens pensaient que Vulcain leur parlait alors dans le foyer ; 10o ils Liraient encore divers présages lorsque la flamme étincelait d’une manière extraordinaire ; 11o lorsqu’elle bondissait, ils s’imaginaient que les dieux Lares s’amusaient à l’agiter ; 12° enfin, ils regardaient comme un motif d’augure une tristesse qui leur survenait tout à coup.

Nous avons conservé quelques traces de ces superstitions, qui ne sont pas sans poésie.

Les Grecs modernes tirent des augures du cri des pleureuses à gages. Ils disent que si l’on entend braire un âne à jeun, on tombera infailliblement de cheval dans la journée, — pourvu toutefois qu’on aille à cheval. Voy. Ornithomancie, Aigle, Corneille, Hibou, Aruspices, etc.

Auguste. Leloyer rapporte, après quelques anciens, que la mère de l’empereur Auguste, étant enceinte de lui, eut un songe où il lui sembla que ses entrailles étaient portées dans le ciel, ce qui présageait la future grandeur de son fils. Ce nonobstant, d’autres démonographes disent, qu’Auguste était enfant du diable. — Les cabalistes n’ont pas manqué de faire de ce diable une salamandre.

Auguste était superstitieux ; Suétone rapporte[160] que, comme on croyait de son temps que la peau d’un veau marin préservait de la foudre, il était toujours muni d’une peau de veau marin. Il eut encore la faiblesse de croire qu’un poisson qui sortait de la mer, sur le rivage d’Actium, lui présageait le gain d’une bataille. Suétone ajoute qu’ayant ensuite rencontré un ânier, il lui demanda le nom de son âne ; que l’ânier lui ayant répondu que son âne s’appelait Nicolas, qui signifie vainqueur des peuples, il ne douta plus de la victoire ; et que, par la suite, il fit ériger des statues d’airain à Panier, à l’âne et au poisson sautant. Il dit même que ces statues furent placées dans le Capitole.

On sait qu’Auguste fut proclamé dieu de son vivant, et qu’il eut des temples et des prêtres[161].

Augustin (saint), évêque d’Hippone, l’un des plus illustres Pères de l’Église. On lit dans Jacques de Varasc une gracieuse légende sur ce grand saint :

Un jour qu’il était plongé dans ses méditations, il vit passer devant lui un démon qui portait un livre énorme sur ses épaules. Il l’arrêta et lui demanda à voir ce que contenait ce livre. — C’est le registre dé tous les péchés des hommes, répond le démon ; je les ramasse où je les trouve, et je les écris à leur place pour savoir plus aisément ce que chacun me doit. — Montrez-moi, dit le pieux évêque d’Hippone, quels péchés j’ai faits depuis ma conversion ?… Le démon ouvrit le livre, et chercha l’article de saint Augustin, où il ne trouva que cette petite note : — « il a oublié tel jour de dire les compiles, » Le prélat ordonna au diable de l’attendre un moment ; il se-rendit à l’église, récita les complies, et revint auprès du démon, à qui il demanda de lire une seconde fois sa note. Elle se trouva effacée. — Ah ! vous m’avez joué, s’écria le diable,… mais on ne m’y reprendra plus… En disant ces mots, il s’en alla peu content.

Nous avons dit que saint Augustin avait réfuté le petit livre du Démon de Socrate, d’Apulée. On peut lire aussi de ce Père le traité de l’Antéchrist et divers chapitres de son admirable ouvrage de la Cité de Dieuqui ont rapport au genre de merveilles dont nous nous occupons.

Aumône. Le peuple croit, en Angleterre, que, pour les voyageurs qui ne veulent pas s’égarer dans leur route, c’est une grande imprudence de passer auprès d’une vieille femme sans lui donner l’aumône, surtout quand elle regarde en face celui dont elle sollicite la pitié[162]. — Cette opinion, nous n’aurons pas le courage de la condamner.

Aupetit (Pierre), prêtre border du village de Fossas, paroisse de Paias, près la ville-de Chalus, en Limousin, exécuté à l’âge de cinquante ans, le 25 mai 1598. — Il ne voulut pas d’abord répondre au juge civil ; il en fut référé au parlement de Bordeaux, qui ordonna que le juge laïque connaîtrait de cette affairé, sauf à s’adjoindre un juge d’église. L’évêque de Limoges envoya un membre de l’officialité pour assister, avec le vice-sénéchal et le conseiller Peyrat, à l’audition du sorcier. — Interrogé s’il n’a pas été au sabbat de Mendras, s’il n’a pas vu Antoine Dumons de Saint-Laurent, chargé de fournir des chandelles pour l’adoration du diable ; si lui, Pierre Aupetit, n’a pas tenu le fusil pour les allumer, etc. ; il a répondu que non, et qu’à l’égard du diable, il priait Dieu de le garder de sa figure : ce qui était le langage ordinaire des sorciers. — Interrogé s’il ne se servait pas de graisses, et si, après le sabbat, il n’avait pas lu dans un livre pour faire venir une troupe de cochons qui criaient et lui répondaient : « Tiran, tiran, ramassien, ramassien, nous réclamons cercles et cernes pour faire l’assemblée que nous t’avons promise ; » il a répondu qu’il, ne savait ce qu’on lui demandait. — Interrogé s’il ne sait, pas embarrer ou désembarrer, et se rendre invisible étant prisonnier, il répond que non. — Interrogé s’il sait dire des messes pour obtenir la guérison des malades, il répond qu’il en sait dire en l’honneur des cinq plaies de Notre-Seigneur et de M. saint Côme.

Pour tirer de lui la vérité, selon les usages d’alors, on le menaça de la question. Il avoua alors qu’il était allé au sabbat ; qu’il lisait dans le grimoire ; que le diable, en forme de mouton, plus noir que blanc, se faisait baiser le derrière ; que Gratoulet, insigne sorcier, lui avait appris le secret d’embarrer, d’étancher et d’arrêter le sang ; que son démon ou esprit familier s’appelait Belzébut, et qu’il avait reçu en cadeau son petit doigt. Il déclara qu’il avait dit la messe en l’honneur de Belzébut, et qu’il savait embarrer en invoquant le nom du diable et en mettant un liard dans uñe aiguillette ; il dit, de plus, que le diable parlait en langage vulgaire aux sorciers, et que, quand il voulait envoyer du mal à quelqu’un, il disait ces mots : « Vach, vech, stet, sty, stu ! » Il persista jusqu’au supplice dans ces ridicules révélations, mêlées d’indécentes grossièretés[163]. Pour comprendre ces choses, voy. Sabbat.

Aurinie, druidesse dont les Germains vénéraient grandement la mémoire. Elle est antérieure à Velléda.

Aurore boréale, espèce de nuée rare, transparente, lumineuse., qui paraît la nuit, du côté du nord. On ne saurait croire, dit Saint-Foix, sous combien de formes l’ignorance et la superstition des siècles passés nous ont présenté l’aurore boréale. Elle produisait des visions différentes dans l’esprit des peuples, selon que ces apparitions étaient plus ou moins fréquentes, c’est-à-dire selon qu’on habitait des pays plus ou moins éloignés du pôle. Elle fut d’abord un sujet d’alarmes pour les peuples du Nord ; ils crurent leurs campagnes en feu et l’ennemi à leur porte. Mais ce phénomène devenant presque journalier, ils s’y sont accoutumés. Ils disent que ce sont des esprits qui se querellent et qui combattent dans les airs. Cette opinion est surtout très-accréditée en Sibérie.

Les Groënlandais, lorsqu’ils voient une aurore boréale, s’imaginent que ce sont les âmes qui jouent à la boule dans le ciel, avec une tête de baleine. Les habitants des pays qui tiennent le milieu entre les terres arctiques et l’extrémité méridionale de l’Europe n’y voient que des sujets tristes ou menaçants, affreux ou terribles ; ce sont dès armées en feu qui se livrent de sanglantes batailles, des têtes hideuses séparées de leurs troncs, des chars enflammés, des cavaliers qui se percent de leurs lances. On croit voir des pluies de sang ; on entend le bruit de la mousqueterie, le son des trompettes, présages funestes de guerre et de calamités publiques.

Voilà ce que nos pères ont aussi vu et entendu dans les aurores boréales. Faut-il s’étonner, après cela, des frayeurs affreuses que leur causaient ces sortes de nuées quand elles paraissaient ? — La Chronique de Louis XI rapporte qu’en 1465 on aperçut à Paris une aurore boréale qui fit paraître toute la ville en feu. Les soldats qui faisaient le guet en furent épouvantés, et un homme en devint fou. On en porta la nouvelle au roi, qui monta à cheval et courut sur les remparts. Le bruit se répandit que les ennemis qui étaient devant Paris se retiraient et mettaient le feu, à la ville. Tout le monde se rassembla en désordre, et on trouva que ce grand sujet de terreur n’était qu’un phénomène.

Ausitif, démon peu connu, qui est cité dans la possession de Loudun.

Auspices, augures qui devinaient surtout par le vol et le chant des oiseaux. Voy. Augures, Aruspices, etc.

Automates. On croyait autrefois que ces ouvrages de l’art étaient l’œuvre du démon. Voy. Albert le Grand, Bacon, Enchantements, etc.

Autopsie, espèce d’extase où des fous se croyaient en commerce avec les esprits.

Autruche. Il est bien vrai qu’elle avale du fer, car elle avale tout ce qu’elle rencontre ; mais il n’est pas vrai qu’elle le-digère, et l’expérience a détruit cette opinion erronée[164]. — Les traditions du moyen âge donnaient pour père à l’autruche un cygne et pour mère une chamelle.

Autun (Jacques d’). Voy. Chevannes.

Auxonne. On trouve dans le onzième tome des Causes célèbres l’histoire d’une possession qui eut lieu à Auxonne, au milieu du dix-septième siècle ; et l’attestation des faits a été signée par l’archevêque de Toulouse, l’évêque de Rennes, l’évêque de Rodez, l’évêque de Châlons-sur-Saône et par F. Morel, N. Cornet, Ph. Leroy, N. Grandin, tous docteurs de Sorbonne. Dix-huit femmes, les unes religieuses, les autres dû monde, se sont trouvées possédées, comme le reconnaissent les vénérables signataires de l’acte que nous citons, lequel porte la daté du 20 janvier 1652. La possession avait duré dix ans, avec des phases diverses. Toutes ces filles étaient pieuses et de mœurs pures. C’était donc une série d’épreuves. On nomme dans la déclaration authentique des faits Anne l’Écossaise, appelée sœur de la Purification ; Denise Parisot, servante du lieutenant général d’Auxonne ; la sœur M. Janini ; la sœur Humberte de Saint-François ; la sœur Marguerite de l’Enfant Jésus ; la sœur L. Arivey.

 
Auxonne
Auxonne
 
Elles étaient agitées de convulsions lorsqu’il leur fallait se confesser ; elles frémissaient à la vue du Saint-Sacrement ; elles proféraient des blasphèmes ; elles se sentaient enlevées, courbées en deux ; elles se frappaient le crâne aux piliers de l’église sans en rien souffrir. Elles étaient insensibles aux piqûres, aux brûlures. Lorsque les exorcismes eurent obtenu leur délivrance, l’une d’elles vomit un gros crapaud ; Anne l’Écossaise vomit un morceau de drap enveloppé d’un cercle de cuir ; une autre rejeta un rouleau de taffetas sur lequel étaient des caractères. L’évêque de Châlons-sur-Saône ayant ordonné au démon qui possédait Denise de sortir par une vitre qu’il lui désigna, la vitre se brisa aussitôt. Il se fit ainsi de ces choses qui sont au-dessus des forces humaines et qui ne peuvent être qu’œuvres de démons. — Personne, jusqu’ici, n’a contesté ces récits que nous ne donnons qu’en sommaire.

Avarice. Ce vice infâme a souvent amené des

 
Avarice
Avarice
 

possessions. Voy. Fischer et les Légendes des péchés capitaux.

Avenar, astrologue qui promit aux Juifs, sur la foi des planètes, que leur Messie arriverait sans faute en 1414, ou, au plus tard, en 1464. Il donnait pour ses garants Saturne, Jupiter, l’Écrevisse et les Poissons. Tous les Juifs tinrent leurs fenêtres ouvertes pour recevoir l’envoyé de Dieu, qui n’arriva pas, soit que l’Écrevisse eût reculé, soit que les Poissons d’Avenar ne fussent que des poissons d’avril[165].

Avenir. C’est pour en pénétrer les secrets qu’on a inventé tant de moyens de dire la bonne aventure. Toutes les divinations ont principalement pour objet de connaître l’avenir.

Averne, marais consacré à Pluton, près de Bayes. Il en sortait des exhalaisons si infectes, qu’on croyait que c’était l’entrée des enfers.

Averroès, médecin arabe et le plus grand philosophe de sa nation, né à Cordoue dans le douzième siècle. Il s’acquit une si belle réputation de justice, de vertu, et de sagesse, que le roi de Maroc le fit jugé de toute la Mauritanie. Il traduisit Aristote en arabe, et composa plusieurs ouvrages sur la philosophie et la médecine. Quelques démonographes ont voulu le mettre au nombre des magiciens et lui donner un démon familier. Malheureusement, Averroès était un épicurien, mahométan pour la forme, et ne croyait pas à l’existence des démons[166]. L’empereur de Maroc, un jour, lui fit faire amende honorable à la porte d’une mosquée, où tous les passants eurent permission de lui cracher au visage, pour avoir dit que la religion de Mahomet était une religion de pourceaux.

 
Averroès
Averroès
Averroès.
 

Aveux des sorciers. Les ennemis de l’Église disent que les aveux des sorciers ont été d’ordinaire, obtenus par la torture ; ce qui n’est pas exact. Les aveux tacites sont sans nombre. Ceux qui sont au diable, par possession ou, pacte, ne peuvent voir un prêtre, sans frémir, ni assistera la messe, ni rien supporter de ce qui est a Dieu. Ensuite la torture n’a jamais été exercée par l’Église, mais seulement par la puissance civile.

Avicenne, célèbre médecin arabe, mort vers le milieu du onzième siècle, fameux par le grand nombre et l’étendue de ses ouvrages, et par sa vie aventureuse. On peut, en quelque sorte, le comparer à Agrippa. Les Arabes croient qu’il maîtrisait les esprits et qu’il, se faisait servir par des génies. Comme il rechercha la pierre philosophale, on dit encore, dans plusieurs contrées de l’Arabie, qu’il n’est pas mort ; mais que, grâce à l’élixir de longue vie et à l’or potable, il vit dans une retraite ignorée avec une grande puissance. — Il a composé divers livres d’alchimie recherchés, des songe-creux. Son traité de la Congélation de la pierre et son Tractatulus de alchimia se trouvent dans les deux premiers volumes de l’Ars aurifera, Bâle, 1610. Son Ars chimica a été imprimé à Berne, 1572. On lui attribue encore deux opuscules hermétiques insérés dans le Theatrum chimicum, et un volume in-8o, publié à Bâle, en 1572, sous le titre de la Porte des éléments, Porta elementorum. — Les livres de secrets merveilleux s’appuient souvent du nom d’Avicenne pour les plus absurdes recettes.

Axaphat, démon invoqué dans les litanies du sabbat.

Axinomancie, divination par le moyen d’une hache ou cognée de bûcheron. François de Torre-Blanca, qui en parle[167], ne nous dit pas comment les devins maniaient la hache. Nous ne ferons donc connaître que les deux moyens employés ouvertement dans l’antiquité et pratiqués encore dans certains pays du Nord.

1o  Lorsqu’on veut découvrir un trésor, il faut se procurer une agate ronde, faire rougir au feu le fer de la hache, et la poser de manière que le tranchant soit bien perpendiculairement en l’air. On place la pierre d’agate sur le tranchant. Si elle s’y tient, il n’y a pas de trésor ; si elle tombe, elle roule avec rapidité. On la replace trois fois, et si elle roule trois fois vers le même lieu, c’est qu’il y a un trésor dans ce lieu même ; si elle prend à chaque fois une route différente, on peut chercher ailleurs.

2o  Lorsqu’on veut découvrir des voleurs, on pose la hache à terre ; le fer en bas et le bout du manche perpendiculairement en l’air ; on danse en rond alentour jusqu’à ce que le bout du manche s’ébranle et que la hache s’étende sur le sol : le bout du manche indique la direction qu’il faut prendre pour-aller à la recherche des voleurs. Quelques-uns disent que pour cela il faut que le fer de la hache soit fiché en un pot rond : « Ce qui est absurde tout à fait, comme dit Delancre[168] ; car quel moyen de ficher une cognée dans un pot rond, non plus que coudre ou rapiécer ce pot, si la cognée l’avait une fois mis en pièces ? »

Aym. Voy. Haborym.

Aymar (Jacques), paysan né à Saint-Véran, en Dauphiné, le 8 septembre 1662, entre minuit et une heure. De maçon qu’il était, il se rendit célèbre par l’usage de la baguette divinatoire. Quelques-uns, qui donnaient dans l’astrologie, ont attribué son rare talent à l’époque précise de sa naissance ; car son frère, né dans le même mois, deux ans plus tard, ne pouvait rien faire avec la baguette. Voy. Baguette divinatoire.

Aymon (les quatre fils). Siècle de Charlemagne. Ils avaient un cheval merveilleux. Voy. Bayard.

Aynas, mauvais démons, ennemis des Coudais, qui sont les dieux des Tartares.

Ayola (Vasques de). Vers 1570, un jeune homme nommé Vasques de Ayola étant allé à Bologne, avec deux de ses compagnons, pour y étudier en droit, et n’ayant pas trouvé de logement dans la ville, ils habitèrent une grande et belle maison, abandonnée parce qu’il y revenait un spectre qui épouvantait tous ceux qui osaient y loger ; mais ils se moquèrent de tous ces récits et s’y installèrent.

Au bout d’un mois, Ayola veillant un soir seul dans sa chambre, et ses compagnons dormant tranquillement dans leurs lits, il entendit de loin un bruit de chaînes, qui s’approchait et qui semblait venir de l’escalier de la maison ; il se recommanda à Dieu, prit un bouclier, une épée, et, tenant sa bougie en main, il attendit le spectre, qui bientôt ouvrit la porte et parut. C’était un squelette qui n’avait que les os ; il était, avec cela, chargé de chaînes. Ayola lui demanda ce qu’il souhaitait. Le fantôme, selon l’usage, lui fit signe de le suivre. En descendant l’escalier, la bougie s’éteignit. Ayola eut le courage d’aller la rallumer, et marcha derrière le spectre, qui le mena le long d’une cour où il y avait un puits. Il craignit qu’il ne voulût l’y précipiter, et s’arrêta. L’esprit lui fit signe de continuer à le suivre ; ils entrèrent dans le jardin, où la vision disparut. — Le jeune homme arracha quelques poignées d’herbe, pour reconnaître l’endroit ; il alla ensuite raconter à ses compagnons ce qui lui était arrivé, et, le lendemain matin, il en donna avis aux principaux de Bologne. Ils vinrent sur les lieux et y firent fouiller. On trouva un corps décharné, chargé de chaînes. On s’informa qui ce pouvait être ; mais on ne put rien découvrir de certain. On fit faire au mort des obsèques convenables ; on l’enterra, et depuis ce temps la maison ne fut plus inquiétée. Ce fait est rapporté par Antoine de Torquemada, dans son Hexaméron.

Ayperos, comte de l’empire infernal. C’est le même qu’Ipès. Voy. ce mot.

Azael, l’un des anges qui se révoltèrent contre Dieu. Les rabbins disent qu’il est enchaîné sur des pierres pointues, dans un endroit obscur du désert, en attendant le jugement dernier.

Azariel, ange qui, selon les rabbins du Talmud, a la surintendance des eaux de la terre. Les pêcheurs l’invoquent pour prendre de gros poissons.

Azazel, démon du second ordre, gardien du bouc. À la fête de l’Expiation, que les Juifs célébraient le dixième jour du septième mois[169], on

 
Azazel
Azazel
 
amenait au grand prêtre deux boucs qu’il tirait au sort : l’un pour le Seigneur, l’autre pour Azazel Celui sur qui tombait le sort du Seigneur était immolé, et son sang servait pour l’expiation. Le grand prêtre niellait ensuite ses deux mains sur la tête de l’autre, confessait ses péchés et ceux du peuple, en chargeait cet animal, qui était alors conduit dans le désert et mis en liberté ; et le peuple, ayant laissé au bouc d’Azazel, appelé aussi le bouc émissaire, le soin de ses iniquités, s’en retournait en silence. — Selon Milion, Azazel est le premier porte-enseigne des armées infernales. C’est aussi le nom du démon dont se servait, pour ses prestiges, l’hérétique Marc.

Azer, ange du feu élémentaire, selon les Guèbres. Azer est encore le nom du père de Zoroastre.

Aziel, l’un des démons évoqués par Faust.

Azote. L’aspiration de l’oxyde d’azote fait sur les sens l’effet du haschisch sur le cerveau. Elle amène des illusions.

Azourcheb, selon les traditions des mages de la Perse, est le plus grand de tous les anges. Il avait un temple à Balkh, dans le Korassan.

Azraël ou Azraïl, ange de la mort. On conte que cet ange, passant un jour sous une forme visible auprès de Salomon, regarda fixement un homme assis à côté de lui. Cet homme demanda qui le regardait ainsi, et, ayant appris de Salomon que c’était l’ange de la mort : — « Il semble m’en vouloir, dit-il ; ordonnez, je vous prie, au vent de m’emporter dans l’Inde. » — Ce qui fut fait aussitôt. Alors l’ange dit à Salomon : — « Il n’est pas étonnant que j’aie considéré cet homme avec tant d’attention : j’ai ordre d’aller prendre son âme dans l’Inde, et j’étais surpris de le trouver près de toi, en Palestine… » — Voy. Mort, Âme, etc. — Mahomet citait cette histoire pour prouver que nul ne peut échapper à sa destinée. — Azraël est différent d’Asrafil.



  1. Wierus, De præstigiis, lib. VI, cap. vii.
  2. Cambry, Voyage dans le Finistère, t. II, p. 16.
  3. Wierus, in Pseudomonarchia dæm., etc.
  4. Plusieurs de ces faits, s’ils sont bien, authentiques, peuvent être des miracles. Une aventure plus prodigieuse, et qui est admise comme un châtiment miraculeux, a eu lieu en Hollande. Voyez, dans les Légendes des Vertus théologales : Les plats de Loosduynen.
  5. De stratagematibus Satanæ in religionis negotio, per superstitionem, errorem, hæresim, odium, calumniam, schisma, etc., lib. VIII. Bâle, 1565. Souvent réimprimé et traduit en plusieurs langues.
  6. Voyez les légendes d’Adam, des préadamites et des génies, dans les Légendes de l’Ancien Testament.
  7. Robert Gaguin, Philipp.
  8. Wierus, De præstigiis dæmon., lib. I.
  9. Examéron, de Torquémada, traduit par Gabriel Chappius, Tourangeau, sixième journée.
  10. Leloyer, Disc, et hist. des spectres, liv. III, ch. v.
  11. Leloyer, Disc, et hist. des spectres, liv. VIII, ch. vi.
  12. M. Gougenot des Mousseaux : La magie au dix-neuvième siècle, p. 210.
  13. Lapurdum, autrefois, dans la Gascogne.
  14. Delancre, Tableau de l’inconstance des démons, etc., liv. II, discours iv.
  15. Les admirables secrets d’Albert le Grand, liv. II, ch. iii. (Livre supposé.)
  16. De mirac. mortuor., pars V, cap. xxii.
  17. Essai sur les erreurs, etc., liv. II, ch. iii.
  18. Discours sur les pierres précieuses dont il est fait mention dans l’Apocalypse.
  19. Brown, au lieu cité.
  20. Voyez, dans les Légendes des Femmes dans la vie réelle, l’ajournement de la femme du comte Alarcos, et la légende de l’ajournement dans les Légendes des Vertus théologales et cardinales.
  21. D’Herbelot, Bibliothèque orientale.
  22. Liv. V, t. II, p. 83.
  23. Voyez la légende de Bar-Cokébas, dans les Légendes de l’Ancien Testament.
  24. Voyez, dans les Légendes de la sainte Vierge, la Vision de l’Ecolier.
  25. De somn. et vig., lib. III, tract. I, cap. viii.
  26. Voyez, dans les Légendes des Croisades, la croisade contre les Albigeois.
  27. Leloyer, Hist. et disc. des spectres, liv. IV.
  28. Des erreurs et des préjugés, etc., t. I, p. 479.
  29. De præstigiis, lib. II, cap. iii.
  30. Disquisit. magicæ, lib. I, cap. iii.
  31. Brown, Erreurs populaires, liv. III, ch. x.
  32. M. Salgues, Des erreurs et des préjugés, t. III, p. 374,
  33. M. Junquières, dans le quatrième chant de son poëme intitulé Caquet Bonbec, ou la Poule à ma tante, a fait un spirituel usage de cette divination.
  34. Voyez les faits merveilleux attribués à Alexandre le Grand dans les Légendes de l’Ancien Testament.
  35. Liv. X, ch. i.
  36. Hector de Boèce, in Annalibus Scot.
  37. Voyez son histoire, par M. l’abbé Jorry.
  38. La merveilleuse histoire de l’esprit qui depuis naguère s’est apparu au monastère des religieuses de Saint-Pierre de Lyon, etc., par Adrien de Montalembert, aumônier du roi François Ier. Paris, 1528, petit in-8o  gothique. Voyez cette légende résumée dans les Légendes de l’autre monde.
  39. Thiers, Traité des superstitions.
  40. Biographie universelle des musiciens.
  41. L’almanach de Matthieu Laensberg commença à paraître en 1636. Mais, avant lui on avait déjà des annuaires de même nature. Fischer a découvert à Mayence, en 1804, un almanach imprimé pour 1457, tout à fait à la naissance de l’imprimerie.
  42. Delrio, Disquisit. magic., lib. IV, cap. ii, quæst. vii.
  43. Leloyer, Discours des spectres, liv. IV, ch. iv.
  44. Voyez Corbeau. L’histoire d’Alruy est plus étendue dans les Légendes de l’Ancien Testament.
  45. Ces deux psaumes sont imprimés dans le Codex pseudepigraphus Veteris Testamenti de Fabricius.
  46. Lambertini de Cruz-Houen, Theatrum regium Hispanicum, ad ann. 510.
  47. Rikius, Disc. sommaire des sortilèges, vénéfices, idolâtries, tirés des procès criminels jugés au siège royal de Montmorillon, en Poitou, la présente année 1599, p. 29.
  48. Epist, delict., sive De magia, lib. I. cap. viii.
  49. Voyez Gontran, dont l’âme avait l’apparence d’une belette.
  50. Leloyer, Dict. et hist. des spectres, liv. IV, ch. i.
  51. Josèphe, De bello jud., liv. VI, cap. i, cité par D. Calmet, première partie du Traité des apparitions, ch. xvi.
  52. De cura pro mortuis, cité par D. Calmet, première partie, ch. xiv.
  53. Il se publie en ce moment (1862) à Genève un journal dont voici le titre : « Journal de l’âme, s’occupant essentiellement des phénomènes d’intuition ou de sentiment, et en particulier de ceux relatifs à la prière, aux songes, à la contemplation, à l’extase, aux visions, à la lucidité magnétique, à l’instinct des animaux, aux phénomènes des tables, à ceux du crayon, etc. » Les protestants commencent donc à croire au delà de leur Bible ?
  54. De philosophia occulta, Cornelius Agrippa, p. 65, 239, etc.
  55. La magie au dix-neuvième siècle, p. 210, 211.
  56. Delancre, De l’inconstance, etc., liv. IV, disc. iii.
  57. Valère-Maxime.
  58. Voyage de M. Cambry dans le Finistère, t. I.
  59. Voyez à ce propos, dans les Légendes infernales : Un pacte à Césarée.
  60. Wierus, in Pseudomonarchia dæm.
  61. Essai sur les erreurs, liv. III, ch. xv.
  62. Bergier, Dictionnaire théologique.
  63. Traité des superstitions, liv. V, ch. I.
  64. Bergier. Dictionnaire théologique.
  65. Disp. de dæmoniac., pars III, cap. xlv.
  66. On lit dans les observations de Thomas Campbell sur Alger : « Il y a dans l’Algérie quelques Maures et quelques Juifs qui se prétendent docteurs, et des femmes qui se disent accoucheuses. Mais les médecins et les chirurgiens du pays ne savent pas un mot d’anatomie ; ils ignorent jusqu’au nom des drogues qu’ils prennent à tort et à travers. En chirurgie, ils ne savent pas même manier la lancette. En médecine, ils viennent au secours d’une colique, de la pierre et de la pleurésie, par l’application d’un fer rouge sur la partie souffrante : ce traitement force souvent le patient à crier qu’il est guéri, afin qu’on cesse le remède. Ils saignent avec un rasoir, et arrêtent les hémorrhagies avec de la poix ! Le docteur Abernethy, dans une leçon sur le goitre, disait qu’il ne savait comment guérir cette maladie, et que peut-être la meilleure ordonnance serait de siffler. Il est possible, en vérité, que les amulettes données aux Algériens par leurs marabouts soient les remèdes les plus innocents de leur pharmacie. »
  67. In Pseudomon. dæmonum.
  68. L’incrédulité et mécréance, etc., traité V.
  69. De natura dæmonum, lib. IV, in-12 ; Neapoli, 1562.
  70. De magia et maleficiis, in-4o ; Lugduni, 1669.
  71. On ajoute aux paroles saintes du signe de la croix : Droch, Mirroch, Esenaroth, Bètubaroch, Assmaaroth, qu’on entremêle de signes de croix…
  72. Voyez sa légende dans les Légendes des esprits et démons.
  73. Excerpta libri revelationum Andradi medici, anno 853, tomo II, Scriptorum And. Duchesne.
  74. Tobiæ Andreæ Exercitationes philosophicæ de angelorum malorum potentia in corpora, in-12 ; Amstel., 1691.
  75. Wierus, in Pseudomon. dæmon.
  76. Démonomanie, liv. IV, ch. iv. Tableau de l’inconstance, etc., liv. II, disc. iv.
  77. Saint-Foix, Essai sur Paris, tome II.
  78. Leon Africanus, part. VIII, della Africa, cité dans Leloyer.
  79. Lux magica academica, cælestium, terrestrium et infernorum origo, ordo et subordinatio cunctorum, quoad esse, fieri et operari, XXIV voluminibus divisa. Pars I, Venise, 1686, sous le nom de Livio Betani ; pars II, Venise, 1687. Ces deux volumes sont in-4o.
  80. M. l’abbé Lachat, Analyse du livre de M. l’abbé Thiboudet sur les esprits.
  81. Bergier, Dictionnaire théologique.
  82. Coloss., cap. ii, vers. 48.
  83. Voyez aussi la Fée d’Angeweiller, dans les Légendes des esprits et des démons.
  84. Expédition du capitaine Graah dans le Groenland.
  85. Admirables secrets d’Albert le Grand, liv. II, ch. iii.
  86. Cité par M. Salgues, Des erreurs et des préjugés.
  87. Brown, Des erreurs populaires, liv. III, ch. xxiv.
  88. Quarterly Review, Essai sur les superstitions populaires.
  89. M. François Hugo, le Faust anglais.
  90. Aulu-Gelle, lib. X, cap. xxv.
  91. Misson, Voyage d’Italie, t. III, p. 16, à la marge.
  92. Saint Luc, ch. iv, verset 30.
  93. Petit Albert.
  94. Wierus, De præst., lib. I, cap. xxii.
  95. Saint-Foix, Essais,, etc., t. II.
  96. Quelques-uns disaient que les corps célestes seulement se retrouvaient au même point au bout de la grande année. Cicéron, dans un passage de son Hortensius, conservé par Servius, fait cette grande année de douze mille neuf cent cinquante-quatre des nôtres.
  97. M. P. Mérimée, Colomba.
  98. In libro apologetico.
  99. Tableau de l’inconstance des démons, lib. III, disc. iv.
  100. Discours des spectres, liv. IV, ch. xv.
  101. Voyez la Légende de l’Antéchrist, à la fin des Légendes du Nouveau Testament.
  102. Voyez t. XII de la Bibliotheca Patrum, ed. Lugdun.
  103. M. Salgues, Des erreurs et des préjugés, t II. p. 72.
  104. Supplément à l’Histoire véritable de Lucien.
  105. La mystique divine, naturelle et diabolique, par Gorres, traduit de l’allemand par M. Charles Sainte-Foi.
  106. Voyez l’abrégé de cette vie dans les Légendes infernales.
  107. L’Inconstance des démons, liv. V, disc. ii.
  108. Delancre, Tableau de l’inconstance de démons, etc., liv. IV, ch. i.
  109. De l’apparition des esprits, ch. xv.
  110. Des erreurs et des préjugés, t. I. p. 510.
  111. Annales dramatiques, ou Dictionnaire des théâtres, par une société de gens de lettres, t. I, au mot Abaco.
  112. Brown, Erreurs populaires, liv. VII, ch. v.
  113. Voyez ce fait dans les Légendes de la sainte Vierge.
  114. Discours des spectres, liv. I, ch. vii.
  115. Boguet, Discours des sorciers.
  116. Thiers, Traité des superstitions.
  117. Traité de chimie philosoph. et hermétique, p. 168.
  118. Plutarque, Sur Isis et Osiris.
  119. Traité sur la magie, etc., p. 66.
  120. De præstigiis dæm., lib. I, cap. xiv.
  121. Plutarque, dans la Vie de Romulus.
  122. Discours des spectres, liv. IV, ch. xxiv.
  123. Valère-Maxime, liv. I, ch. viii, ext. n° 15.
  124. Tableau de l’inconstance des mauvais anges, etc., liv. VI, disc. ii.
  125. Si quidem ego non capio te, tu capies me.
  126. Michaelis Ephesii Annotationes in Aristotelem de somno, id est, de divinatione per somnum. Venise, in-8o, 1527.
  127. Themistii Paraphrasis in Aristotelem de memoria et reminiscentia, de insomniis, de divinatione per somnum, latine, interprété Hermolao Barbaro. Bâle, in-8o, 1530.
  128. Delancre, Incrédulité et mécréance du sortilège pleinement convaincue, traité V.
  129. Chronique d’Ursperg.
  130. Tableau de l’inconstance des mauvais anges, etc., liv. I.
  131. Voyez les Légendes des croisades.
  132. Du mot latin armus, épaule. Les anciens appliquaient surtout cette divination aux animaux. Ils jugeaient par l’armomancie si la victime était bonne pour les dieux.
  133. Chapitre III du livre cité.
  134. Rerum hispanar., lib. XIV, c. ix.
  135. Arnaldi de Villanova libellus de somniorum interpretatione et somnia Danielis, in-4o. Ancienne édition très-rare.
  136. De physicis ligaturis.
  137. De sigillis duodecim signorum.
  138. Certaminis apostolici, lib. VI.
  139. Franc. Torreblanca, cap. xiv, Epist. de mag.
  140. Artemidori Ephesii Oneirocritica, seu de somniorum interpretatione, græc-lat., cum notis Nie. Rigaltii, in-4o, Paris, 1603.
  141. Artémidore, De l’explication des songes, avec le livre d’Augustin Nyphus, Des divinations, in-16. Rouen, 1600 ; édition augmentée, 1604. — Epitome des cinq livres d’Artémidore traitant des songes, traduit du grec par Charles Fontaine ; avec un recueil de Valère-Maxime sur le même sujet, traduit du latin, in-8o. Lyon, 1555.
  142. Clavis majoris sapientiæ, imprimé dans le Théâtre chimique. Francfort, 1614, in-8o, ou Strasbourg, 1699, in-12.
  143. De characteribus planetarum, cantu et motibus avium, rerum prœteritarum et futurarum, lapideque philosophico. Le traité d’Artéphius sur la pierre philosophale a été traduit en français par P. Arnauld, et imprimé avec ceux de Sinésius et de Flamel. Paris, 1612, 1659, 1682, in-4o. On attribue encore à Artéphius le Miroir des miroirs, Spéculum speculorum, et le Livre secret, Liber secretus.
  144. Tableau de l’inconstance des mauvais songes, liv. IV, disc. iii.
  145. Cambry, Voyage dans le Finistère, t. I, p. 277.
  146. Wierus, in Pseudomonarchia dæmon.
  147. Saxo Grammat. Danicæ hist., lib. V.
  148. Incrédulité et mécréance du sortilège, etc.
  149. Incrédulité et mécréance, etc., traité V.
  150. Delancre, Tableau de l’inconstance des mauvais anges, etc., liv. II, disc. i.
  151. Wierus, in Pseudomonarchia dæmon.
  152. M. François Hugo, le Faust anglais.
  153. Bergier, Dict. théolog., au mot Astres.
  154. Le père Lebrun, Hist. des pratiques superst., t. I, p. 220.
  155. Essai sur les erreurs et les superstitions, par M. L. C, ch. v.
  156. Plin. junior, lib. vii, epist. 27.
  157. Plutarque le nomme Titus Latinus.
  158. Bibliotheca chimica contracta ex delectu et amendatione Nathanis Albinei, in-8o. Genève, 1654 et 1673.
  159. On sait que Livie, étant grosse, imagina de couver et d’éclore un œuf dans son soin, voulant augurer du sexe de son enfant par le sexe du poussin qui viendrait. Ce poussin fut mâle, et son enfant aussi. Les augures ne manquèrent pas de se prévaloir du fait pour montrer aux plus incrédules la vérité de leur art ; mais ce qui reste le mieux prouvé, c’est que la chaleur humaine est suffisante pour l’incubation des œufs.
  160. In Augusto, cap. xc.
  161. Il a quelques légendes sur Auguste dans les Légendes de l’Ancien Testament.
  162. Fielding, Tom Jones, liv. XIV, ch. ii.
  163. Delancre, Tableau de l’inconstance des mauvais anges, liv. VI, disc. iv.
  164. Voyez Brown, Des erreurs populaires, liv. III, ch. xxii.
  165. M. Salgues, Des erreurs et des préjugés, t. I, p. 90.
  166. Magiam dæmoniacam pleno ore negarunt Averroes et alii epicurei, qui, una cum Saducæis dæmones esse negarunt. (Torre-Blanca, Délits magiques, liv. II, ch. v.
  167. Epist. delict., sive de magia, liv. I, cap. xxiv.
  168. L’incrédulité et mécréance, etc., traité V.
  169. Le septième mois chez les Juifs répondait à septembre.