Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Onomancie

Henri Plon (p. 504).
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Onomancie ou Onomatomancie, divination par les noms. Elle était fort en usage chez les anciens. Les pythagoriciens prétendaient que les esprits, les actions et les succès des hommes étaient conformes à leur destin, à leur génie et à leur nom. On remarquait qu’Hippolyte avait été déchiré par ses chevaux, comme son nom le portait. De même, on disait d’Agamemnon que, suivant son nom, il devait rester longtemps devant Troie ; et de Priam, qu’il devait être racheté d’esclavage. Une des règles de l’onomancie, parmi les pythagoriciens, était qu’un nombre pair de voyelles dans le nom d’une personne signifiait quelque imperfection au côté gauche, et un nombre impair quelque imperfection au côté droit. Ils avaient encore pour adage que de deux personnes, celle-là était la plus heureuse dans le nom de laquelle les lettres numérales jointes ensemble formaient la plus grande somme. Ainsi, disaient-ils, Achille devait vaincre Hector, parce que les lettres numérales comprises dans le nom d’Achille formaient une somme plus grande que celles du nom d’Hector. C’était sans doute d’après un principe semblable que, dans les parties de plaisir, les Romains buvaient à la santé de leurs belles autant de coups qu’il y avait de lettres dans leur nom. Enfin, on peut rapporter à l’onomancie tous les présages qu’on prétendait tirer des noms, soit considérés dans leur ordre naturel, soit décomposés et réduits en anagrammes ; folie trop souvent renouvelée chez les modernes. Voy. Anagrammes.

Cœlius Rhodiginus a donné la description d’une singulière espèce d’onomancie ; Théodat, roi des Goths, voulant connaître le succès de la guerre qu’il projetait contre les Romains, un devin juif lui conseilla de faire enfermer un certain nombre de porcs dans de petites étables, de donner aux uns des noms goths, avec des marques pour les distinguer, et de les garder jusqu’à un certain jour. Ce jour étant arrivé, on ouvrit les étables, et l’on trouva morts les cochons désignés par des noms goths, ce qui fit prédire au juif que les Romains seraient vainqueurs[1].


  1. M. Noël, Dictionnaire de la Fable.