Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Gontran

Henri Plon (p. 307).
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Gontran. Helinand conte qu’un soldat nommé Gontran, de la suite de Henry, archevêque de Reims, s’étant endormi en pleine campagne après le dîner, comme il dormait la bouche ouverte, ceux qui l’accompagnaient, et qui étaient éveillés, virent sortir de sa bouche une bête blanche semblable à une petite belette, qui s’en alla droit à un ruisseau assez près de là. Un homme d’armes, la voyant monter et descendre le bord du ruisseau pour trouver un passage, tira son épée et en fit un petit pont sur lequel elle passa et courut plus loin… Peu après, on la vit revenir, et le même homme d’armes lui fit de nouveau un pont de son épée. La bête passa une seconde fois et s’en retourna à la bouche du dormeur, où elle rentra… Il se réveilla alors ; et comme on lui demandait s’il n’avait point rêvé pendant son sommeil, il répondit qu’il se trouvait fatigué et pesant, ayant fait une longue course et passé deux fois sur un pont de fer. Mais ce qui est plus merveilleux, c’est qu’il alla par le chemin qu’avait suivi la belette ; qu’il bêcha au pied d’une petite colline et qu’il déterra un trésor que son âme avait vu en songe. Le diable, dit Wierus, se sert souvent de ces machinations pour tromper les hommes et leur faire croire que l’âme, quoique invisible, est corporelle et meurt avec le corps ; car beaucoup de gens ont cru que cette bête blanche était l’âme de ce soldat, tandis que c’était une imposture du diable…