Grammaire de l’hébreu biblique/Morphologie/Nom/Paragraphe 93

Paul Joüon
Institut biblique pontifical (p. 222-228).
§ 93. Voyelles paragogiques du nom ◌ָה, ◌ִי, וֹ, וּ.

a On trouve dans le nom certaines voyelles paragogiques (= ajoutées ), à savoir principalement un ◌֫◌ָה atone (opp. le ◌ָ֫ה paragogique tonique du cohortatif § 45), puis une voyelle ◌ִי assez fréquente, enfin un וֹ et un וּ très rares. Pour expliquer l’origine de ces voyelles (ainsi que de certaines autres §§ 94 b, c ; 102 b) il est nécessaire de connaître l’ancienne déclinaison sémitique, telle qu’elle existe en arabe et telle qu’elle a dû exister, à une certaine époque, en hébreu[1].

b La déclinaison sémitique complète avait trois cas correspondant aux nominatif, génitif et accusatif du latin. Quand le nom est indéterminé, à la voyelle casuelle on ajoutait un m (mimation) qui est devenu n en arabe (nunation). La déclinaison du mot i̯au̯m > יוֹם jour se présentait ainsi :

Nom. ʾabūNominatif Gén. ʾabīGénitif AccusatifAccusatif
Déterminé i̯áu̯mu i̯áu̯mi i̯áu̯ma
Indéterminé i̯áu̯mum i̯áu̯mim i̯áu̯mam

Dans quelques noms de parenté bilittères ʾab « père » , ʾaḫ « frère », ḥam « beau-père » (§ 98 b), la déclinaison à l’état construit (et devant suffixes) comportait une voyelle longue, p. ex. :

Indéterminé Nom. ʾabū Gén. ʾabī Acc. ʾabā

c Voyelle paragogique ◌֫◌ָה. Cet å atone et bref (cf.§ 28 e 3) correspond exactement à l’a atone et bref de l’ancien accusatif déterminé. Il est employé surtout dans le cas de l’accusatif de direction vers un lieu (§ 125 n), d’où l’appellation : ◌ָה de direction, ◌ָה local. Le nom avec ◌ָה paragogique est ordinairement déterminé, soit par lui-même, soit par l’article. La vocalisation du mot reste inchangée dans la mesure du possible. Dans les noms à finale féminine ◌ָה, le ת primitif reparaît, p. ex. תִּרְצָה, תִּרְצָ֫תָה vers Tirṣa. Les voyelles brèves se maintiennent en syllabe ouverte, p. ex. מִדְבַּרָה דַמָּ֑שֶׂק vers le désert de Damas 1 R 19, 15 (מִדְבָּר, cst. בַּ) ; פַּדֶּ֫נָה אֲרָם vers פַּדַּן־אֲרָם Gn 28, 2 (suite vocalique - § 29 f) ; הֶ֫רָה vers la montagne Gn 14, 10 † (de הַר ; au lieu *הַ֫רָה, suite vocalique -) ; כַּרְמֶ֫לָה 1 S 25, 5 (de כַּרְמֶל) ; בָּבֶ֫לָה (de בָּבֶל).

Dans les noms segolés, assez souvent, le ◌ָה ne se met pas à la forme primitive comme les suffixes, mais à la forme hébraïque, modifiée seulement dans la mesure du nécessaire. Ainsi on a בַּ֫יְתָֿה vers (dans) la maison (avec ת rafé) de בַּ֫יִת ; le shewa, vestige de la voyelle auxiliaire, est moyen (§ 8 f) ; opposer cst. בֵּ֫יתָה vers la maison de, בֵּיתָהּ sa maison, מַלְכָּהּ son roi. De même, de אֹ֫הֶל on forme אֹ֫הֱלָה, opposer אָֽהֳלָהּ sa tente. De יָם on forme הַיָּ֫מָּה vers la mer ; opposer יַמָּהּ sa mer[2]. De נֶ֫גֶב on forme נֶ֫גְבָּה vers le sud (avec shewa quiescent, mais cf. נֶ֫גְדָֿה Ps 116, 14, 18 devant). Mais d’après la forme primitive on a אַ֫רְצָה vers la terre (אֶ֫רֶץ) ; הַחַ֫דְרָה vers (dans) la chambre (חֶ֫דֶר).

Le ◌ָה est devenu anormalement ◌ֶ, sans raison apparente, dans נֹ֫בֶה vers Nob 1 S 21, 2 ; 22, 9 † (devant אֶל־) ; דְּדָ֫נֶה vers Dédan Éz 25, 13 †.

Le ◌ָה est tonique dans מִזְרְחָ֖ה שָׁ֑מֶשׁ vers le lever du soleil Dt 4, 41 (au lieu de מִזְרַ֫חָה, probablement à cause de la pause) et dans les deux noms propres גִּתָּ֫ה חֵ֫פֶר et עִתָּ֫ה קָצִין Jos 19, 13. Comparer עַתָּ֫ה § g.

d Le ◌ָה s’emploie surtout quand il y a idée de direction, de mouvement vers quelque chose[3] : קֵ֫דְמָה vers l’est (mais קֶ֫דֶם § 96 A f) ; הָהָ֫רָה vers la montagne (13 f. ; 1 f. sans article הֶ֫רָה § c[4] Gn 14, 10) ; הַח֫וּצָה au dehors, à l’extérieur (19 f. ; 8 f. ח֫וּצָה avec le même sens) ; הַיָּ֫מָּה vers la mer, mais יָּ֫מָּה vers l’ouest[5] ; הַבַּ֫יְתָה vers (dans) la maison, mais בַּ֫יְתָה vers (à) l’intérieur. Avec l’état construit : בֵּ֫יתָה יוֹסֵף vers (dans) la maison de Joseph Gn 43, 17, 24 ; אַ֫רְצָה מִצְרַ֫יִם vers la terre d’Égypte Ex 4, 20. Avec un pluriel : הַשָּׁמַ֫יְמָה vers le ciel, כַּשְׂדִּ֫ימָה vers les Chaldéens = vers la Chaldée Éz 11, 24 ; 16, 29 ; 23, 16 ; מִיָּמִים יָמִ֫ימָה d’année en année (mouvement appliqué au temps).

e L’idée de direction ou de mouvement vers (latin : ad, in avec l’acc.) peut s’affaiblir et même, dans certains cas, devenir nulle. On trouve assez souvent dans le rituel des sacrifices הַמִּזְבֵּ֫חָה proprement à l’autel, surtout avec הִקְטִיר faire fumer (Ex 29, 13, 25 etc.), aussi avec הֶֽעֱלָה faire monter (Lév 14, 20), זָרַק asperger (2 Ch 29, 22). Or, avec tous ces verbes, on a aussi עַל הַמִּזְבֵּחַ ; les deux expressions sont donc pratiquement synonymes. Dans Jér 29, 15 בָּבֶ֫לָה (si authentique) signifierait dans Babylone (sans mouvement).

C’est sans doute à l’analogie du nom avec ◌ָה ou sans ◌ָה qu’on emploie שָׁ֫מָּה surtout quand il y a mouvement, et שָׁם surtout quand il n’y a pas mouvement, § 102 h.

f Le ◌ָה de direction se trouve parfois après des prépositions exprimant déjà l’idée de mouvement vers ; il fait alors double emploi avec la préposition : אֶל־הַצָּפ֫וֹנָה vers le nord Éz 8, 14 † (comme צָפ֫וֹנָה 40, 40), לִשְׁא֑וֹלָה Ps 9, 18 † vers le sheol (comme l’usuel שְׁאֹ֫לָה). Le ◌ָה peut perdre sa valeur première au point d’être employé avec des prépositions sans idée de mouvement : לְמַ֫עְלָה[6] au dessus, en haut (avec ou sans mouvement), מִלְמַ֫עְלָה d’en haut, au dessus (sans mouvt) ; לְמַ֫טָּה en bas (avec ou sans mouvt), מִלְּמַ֫טָּה d’en bas, en bas (sans mouvt) ; בַּנֶּ֫גְבָּה dans le sud Jos 15, 21 (probablement parce que נֶ֫גְבָּה est assez fréquent) ; מִצָּפ֫וֹנָה du nord Jos 15, 10 ; cf. Jug 21, 19 † (probt parce que צָפ֫וֹנָה est assez fréquent). Avec les noms de villes, le ◌ָה a fini quelquefois par faire partie intégrante du mot. Ainsi à côté de תִּמְנָה on a עַד־כַּרְמֵי תִמְנָ֫תָה jusqu’aux vignes de Timna Jug 14, 5, בְּתִמְנָ֫תָה v. 2 ; on a toujours אֶפְרָ֫תָה (7 f. ; 1 f. אֶפְרָת, Gn 48, 7 b, probt fautif : haplographie, § 89 n) ; voir encore הַגֻּדְגֹּ֫דָה Dt 10, 7 b, קְהֵלָ֫תָה Nb 33, 23 ; יָטְבָ֫תָה v. 33. La cause de ce phénomène est sans doute qu’avec les noms de villes on avait souvent l’occasion d’employer l’accusatif de direction, p. ex. : « Je vais à Ephrata »[7].

g On a probablement l’a de l’accusatif dans le substantif masc. לַ֫יְלָה nuit[8]. Le mot est resté figé à l’accusatif déterminé de temps, sans doute parce qu’on avait souvent l’occasion de dire p. ex. « cette nuit » : הַלַּ֫יְלָה (cf. § 126 i).

Dans l’adverbe עַתָּה, mileraʿ en contexte, mais mileʿel en pause (עַ֔תָּה, עָ֑תָּה § 32 f) on a probablement aussi l’accusatif déterminé de עֵת temps : « hoc tempore », d’où nunc ; cf. Brockelmann, 1, 464.

h L’a de l’accusatif se trouve encore, dans certains mots, avec d’autres nuances. Dans חָלִ֫ילָה, qu’on traduit généralement par « ad profanum ! », il y a plutôt un accusatif de souhait comme dans certaines locutions arabes correspondantes (cf. § 105 f). Dans מְא֫וּמָה aliquid l’accusatif peut provenir de cas où le sens est quant à quelque chose, comme 1 S 21, 3. Dans אָ֫מְנָה en vérité Gn 20, 12 ; Jos 7, 20 †, synonyme de אָמְנָם vraiment (§ 102 b), on a, semble-t-il, l’accusatif de אֹ֫מֶן.

i Parfois le ◌ָה n’a plus aucune nuance d’accusatif ; il a un emploi purement rythmique. En poésie il a pu être parfois causé par une nécessité métrique : הַֽחַשְׁמַ֑לָה l’électrum Éz 8, 2 (en pause, dans une description grandiose), נַ֫חְלָה ruisseau Ps 124, 4, הַמָּ֫וְתָהla mort Ps 116, 15, אָ֑רְצָהla terre Job 37, 12.

j Le fait est assez fréquent au féminin, où l’on a la finale ◌ָ֫תָה (pour ◌ָ֫ה). Dans certains cas cette forme semble avoir été choisie pour éviter le contact de deux syllabes toniques : אֵין יְשׁוּעָ֫תָה לּוֹ pas de salut pour lui Ps 3, 3[9] ; קוּמָ֫ה עֶזְרָ֫תָה לָּ֫נוּ lève-toi à notre secours 44, 27 (opp. לְעֶזְרָ֖ה לוֹ 2 Ch 28, 21) ; לֹא עַוְלָ֫תָה בּוֹ Ps 92, 16. Autres exemples : בְּעַוְלָ֫תָה יְדֵיהֶם 125, 3 ; אֵימָ֫תָה וָפַחַד Ex 15, 16.

k Enfin on trouve le ◌ָה atone, qui ne peut donc pas être la finale féminine, dans quelques exemples suspects ou fautifs : הָֽרָחָ֫מָהle percnoptère Dt 14, 17 ; תַנּוּר בֹּעֵ֫רָהfour brûlant Os 7, 4 ; הַשַּׁ֫עַר הַתַּחְתּ֫וֹנָה la porte inférieure Éz 40, 19 ; גָּלִ֫ילָה ⸮ 2 R 15, 29 (l. גליל ו) ; הַֽחִיצ֫וֹנָה ⸮ 16, 18 (ה dittographique).

l Voyelle paragogique ◌ִי. Cette voyelle est appelée ḥireq compaginis (i de jointure) parce qu’elle se trouve ordinairement dans des noms à l’état cst., par conséquent en liaison étroite. À raison de son emploi ordinaire et de son origine, cet ◌ִי peut être appelé i de l’état construit. C’est le ◌ִי qu’on trouve à l’état construit des noms de parenté bilittères אֲבִי, אֲחִי, חֲמִי* (§ 98 b)[10]. Ce ◌ִי a été employé en poésie, avec le nom, l’adjectif et surtout le participe, d’abord pour exprimer l’état construit, au sens strict ou au sens large ; puis, comme voyelle purement rythmique. Dans quelques particules il est devenu partie intégrante du mot (§ q).

m Avec substantifs. Dans certains noms propres composés, dont le premier substantif est construit sur le second : מַלְכִּי־צֶ֫דֶק roi de justice, גַּבְרִיאֵל homme de Dieu, עַבְדִּיאֵל serviteur de Dieu, חַנִּיאֵל grâce de Dieu (comp. le phénicien Hannibal = חַנִּיבַ֫עַל). De plus בְּנִי אֲתֹנוֹ son ânon (son fils-d’ânesse) Gn 49, 11 ; עַל־דִּבְרָתִי מַלְכִּי־צֶ֫דֶק à la manière de M. Ps 110, 4 ; devant préposition רַבָּ֫תִי בַגּוֹיִם la Grande parmi les nations et שָׂרָ֫תִי בַּמְּדִינוֹת la Princesse parmi les provinces Lam 1, 1[11].

Avec adjectifs : רַבָּ֫תִי עָם populeuse (nombreuse de peuple) Lam 1, 1 ; מְלֵֽאֲתִי מִשְׁפָּט pleine de justice Is 1, 21.

n Avec le participe le ◌ִי de l’état construit est assez fréquent. Ce fait tient d’une part à ce qu’un participe précédant un substantif se met volontiers à l’état construit (§ 121 l), d’autre part à ce qu’un participe, comme p. ex. קֹטֵל, garde ordinairement ◌ֵ à l’état cst. : une forme telle que קֹֽטְלִי avait donc l’avantage d’exprimer clairement l’état construit.

Avec génitif : עֹֽזְבִי הַצֹּאן abandonnant le troupeau (abandonneur du troupeau) Zach 11, 17 (רֹעִי הָֽאֱלִיל pasteur de néant pour רֹעֵה est étrange ; p.-ê. pour l’assonance) ; שֹֽׁכְנִי סְנֶה habitant du buisson Dt 33, 16.

Par extension, dans des constructions, où il y a état construit (devant préposition) : שֹֽׁכְנִי בְּחַגְוֵי הַסֶּ֫לַע habitant dans les refuges du rocher Jér 49, 16[12]). Puis, par extension de cette construction : חֹֽצְבִי מָרוֹם קִבְרוֹ taillant dans la hauteur son tombeau Is 22, 16 ; שֹֽׁכְנִי לְבָדָד יַ֫עַר habitant solitairement une forêt Mich 7, 14 ; — Ps 101, 5 ; 113, 7 ; Gn 49, 11.

Enfin il y a des cas sans aucune idée, même lointaine, d’état construit. La voyelle ◌ִי, de même qu’il est arrivé pour ◌ָה (§§ i-k), n’a plus qu’une valeur rythmique : אֹהַ֣בְתִּי לָדוּשׁ aimant à fouler (le blé) Os 10, 11 ; — Ps 113, 5, 6 ; 114, 8 ; 123, 1.

o La forme archaïque en ◌ִי a été, dans quelques cas, corrigée par le qeré : Jér 10, 17 : K. יוֹשַׁבְתִּי, Q. יוֹשֶׁ֫בֶת ; Lam 4, 21 ; Éz 27, 3. Dans Jér 22, 23 le qeré demande étrangement יוֹשַׁבְתְּ (§ 89 j) et semblablement (ibid.) מְקֻנַּנְתְּ ; 51, 13 שֹׁכַנְתְּ. Dans tous ces exemples la forme en ◌ִי est justifiée et peut être considérée comme authentique. Au contraire, dans 2 R 4, 23, K. הֹלַכְתּי est probablement fautif dans ce texte de prose très simple ; le ◌ִי sera dû à l’influence de אַתִּי.

On trouve un exemple probable de participe passif[13] dans Gn 31, 39 גְּנֻֽבְתִי יוֹם וּגְנֻֽבְתִי לָ֑יְלָה volée de jour et volée de nuit : ce serait l’unique exemple probable de ◌ִי paragogique en prose.

p Le ◌ִי est purement fautif dans Ps 113, 8 לְהֽוֹשִׁיבִי (◌ִי amené par les ◌ִי paragogiques qui précèdent et suivent) ; il est suspect dans Ps 116, 1 קוֹלִי תַּחֲנוּנָ֑י, car ailleurs on a toujours (5 f.) קוֹל תּ׳.

q Le ◌ִי paragogique se trouve toujours dans la particule négative בִּלְתִּי (§ 160 m), לְבִלְתִּי (§ 160 l), qui suppose une forme בֵּלֶת* ou בֶּלֶת* (rac. בלה) usure, consomption, d’où déficience, non-existence ; toujours (6 fois) dans זֽוּלָתִי à l’exception de (donc l’unique זוּלַת 2 R 24, 14 est suspect). On a assez souvent la forme poétique מִנִּי pour מִן § 103 d. Dans la locution אֲנִי וְאַפְסִי עוֹד moi, et moi exclusivement ◌ִי est plutôt le suffixe de la 1re personne que le ◌ִי paragogique (§ 160 n).

r Voyelle paragogique וֹ. Cette voyelle se trouve seulement dans quelques noms à l’état construit, notamment חַיָּה animal. De même que le ◌ִי de l’état cst. provient du ◌ִי du type אֲבִי (lequel provient lui-même du génitif sémitique ʾabī § l), le וֹ provient probablement du ā de l’accusatif du type ʾabā § b. On l’a affecté à l’état cst., dans quelques cas, au lieu de ◌ִי, pour des raisons qui nous échappent. Au lieu de בְּנִי Gn 49, 11 (§ m) on a בְּנוֹ צִפֹּר fils de Ṣ. Nb 23, 18, בְּנוֹ בְעֹר fils de B. 24, 3, 15 (textes poétiques et archaïques). Au lieu de לְמַעְיְנוֹ־מָ֑יִם Ps 114, 8 il faut p.-ê. lire le pluriel לְמַעְיְנֵי (cf. LXX, Pesh., Jér.). Enfin on a 7 fois חַיְתוֹ (dont 1 f. en prose). Dans Gn 1, 24 חַֽיְתוֹ־אֶ֫רֶץ des animaux sauvages (littt : des animaux de terre) la forme poétique a peut-être été préférée pour éviter חַיַּת־אֶ֫רֶץ* jugé trop dur (mais v. 25 חַיַּת הָאָ֫רֶץ avec l’article) ; cf. Ps 79, 2 לְחַיְתוֹ־אָ֑רֶץ. Autres exemples : חַיְתוֹ־שָׂדָ֑י Is 56, 9 ; Ps 104, 11 ; חַיְתוֹ־יָ֑עַר 50, 10 ; 104, 20 ; חַיְתוֹ־גוֹי Soph 2, 14.

s Voyelle paragogique וּ. Cette voyelle וּ ne se trouve que dans quelques noms propres composés, dont le premier substantif est construit sur le second. Elle a donc le même rôle que la voyelle ◌ִי dans les noms propres (§ m). Comme ◌ִי et וֹ proviennent finalement des types ʾabī, ʾabā, cet וּ provient sans doute du type de nominatif ʾabū (§ b)[14]. Dans les exemples, qui du reste sont rares, il faut réserver la possibilité d’un radical devenu u[15]. De plus, d’après Prätorius[16], il y aurait dans certains noms une forme de caritatif qatūl. Exemples : פְּנוּאֵל face de Dieu Gn 32, 32 (v. 31 פְּנִיאֵל), רְעוּאֵל ami de Dieu (?) 36, 4 ; שְׁמוּאֵל nom de Dieu (?) ; גְּאוּאֵל majesté de Dieu (?) (p.-ê. d’une forme *gaʾu̯). Avec מְתוּ homme (dont la forme propre est inconnue) מְתוּשָׁאֵל, מְתוּשֶׁ֫לַח (cf. phénicien Metuastart « homme d’Astarté »).

En dehors de ces noms composés, le וּ du nominatif se trouverait p.-ê. dans quelques noms : בֹּֽכְרוּ, מְלִיכוּ Néh 12, 14 qeré, גַּשְׁמוּ 6, 6 (nom d’un Arabe ; cf. v. 1 גֶּ֫שֶׁם)

  1. Les voyelles finales u, i, a se trouvent dans les gloses cananéennes de Tell el Amarna, comme en akkadien.
  2. Comp. שָׁ֫מָּה, avec le qameṣ de שָׁם.
  3. On peut avoir aussi le nom à l’accusatif sans ◌ָה § 125 n.
  4. Comme הֶ֫רָה on a סֶ֫לָה, mot inexpliqué (Hab 3, 3, 9, 13 ; Ps 3, 3 etc.).
  5. De même ordinairement הַיָּם la mer, יָם l’ouest. Cf. § 137 q.
  6. Remarquer l’absence de ḥaṭef auxiliaire, après voyelle tonique ; opposer מַֽעֲלָה, מַֽעֲלֶה (cf. § 22 b 1).
  7. C’est ainsi que Stamboul vient de εἰς τὴν πόλιν, Isnik de εἰς Νίκαια, Stanco de εἰς τὴν Κῶ, etc.
  8. 3 fois seulement לַ֫יִל, cst. לֵיל ; pl. לֵילוֹת. La forme primitive lai̯lai̯ a été, en hébreu (et en arabe), abrégée en lai̯l ; cf. Brockelmann, 1, p. 260, 464. Dans לַ֫יְלָה la contraction de ai̯ en ẹ̄ n’a pas lieu (cf. § 26 c N ; tendance à changer le moins possible la vocalisation, § 93 c) ; opposer לֵילוֹת.
  9. Cf. Briggs in h. l. (International critical Commentary).
  10. L’ī du type אֲבִי, spécial à l’hébreu, semble être l’ancien ī du génitif *ʾabī (§ b) affecté à une nouvelle fonction, après la perte des cas (cf. § 98 b).
  11. Le ton mileʿel dans ces deux exemples est peut-être dû à רַבָּ֫תִי עָם qui précède (où il y a nesīgah).
  12. Comp. la construction du type יֹֽשְׁבֵי בְּאֶ֫רֶץ צַלְמָ֫וֶת Is 9, 1 (§ 129 m).
  13. Cependant la forme pourrait être un qatāl > קָטוֹל avec abrègement de ọ̄ (comp. שָׁלשׁ, שְׁלָשְׁתָּם) ; Brockelmann, 2, 251 traduit Diebstahl.
  14. En arabe de Syrie, où les cas de l’ancien arabe ont à peu près disparu, ʾabū est la forme normale à l’état cst. et avec suffixes : ʾAbū Bekr, ʾAbū Nāder ; ʾabūna « notre père » (par affectation certaines personnes disent ʾabīna).
  15. Comp. l’arabe ġazu̯ غَزْوْ razzia prononcé ġazū ; hébreu *u̯ai̯i̯ištaḥu̯, devenu וַיִּשְׁתַּ֫חוּ § 79 t.
  16. (3) Zeitschrift d. deutschen morgenl. Gesellschaft, 57, 777 sq.