Grammaire de l’hébreu biblique/Morphologie/Nom/Paragraphe 96A

Paul Joüon
Institut biblique pontifical (p. 234-242).
§ 96 A. Flexions des noms segolés.

a Dans cette catégorie de flexions nous faisons rentrer tous les noms avec une seule voyelle primitive brève, à savoir les noms de racines fortes ou de racines faibles qui ont pris une voyelle auxiliaire (normalement segol, d’où l’appellation : noms segolés) et aussi ceux qui n’ont pas de voyelle auxiliaire. Les paradigmes suivent l’ordre suivant : 1) noms segolés de racine forte sans gutturale § b : qatl מֶ֫לֶךְ § c, qitl סֵ֫פֶר § e, qutl קֹ֫דֶשׁ § g ; 2) avec gutturale : qatl נַ֫עַר § i, qutl פֹּ֫עַל § j ; 3)  qatl de rac. ע״ו : מָ֫וֶת § l ; de rac. ע״י : זַ֫יִת § m ; 4) noms de racine ע״ע : qatl עַם § n, qitl עֵז § o, qutl חֹק § p ; 5) qatl de rac. ל״ה : פְּרִי § q.

b Noms segolés de racine forte : מֶ֫לֶךְ roi, סֵ֫פֶר livre, קֹ֫דֶשׁ[1] sainteté. Explication synthétique. Trois questions se posent à propos de la flexion de ces trois types : 1) Pourquoi a-t-on uniformément ◌ֶ comme voyelle auxiliaire ? — 2) Pourquoi a-t-on uniformément un qameṣ prétonique au pluriel absolu ? — 3) Pourquoi, au pluriel cst., une 3e radicale begadkefat est-elle spirante ? On a essayé d’expliquer ces faits de diverses manières. Voici l’explication qui nous semble la plus satisfaisante[2].

Singulier. (L’explication doit commencer par le type *sifr). La forme primitive *sifr est devenue d’abord *sẹfr, puis a pris la voyelle auxiliaire voisine de  : סֵ֫פֶר[3]. Ce segol auxiliaire a passé dans le type *malk et dans le type *qudš.

La forme primitive *ma̦lk est devenue *ma̦läk, avec voyelle auxiliaire ä très ouverte (= ), sous l’influence de la voyelle auxiliaire du type סֵ֫פֶר. Puis la voyelle principale est devenue ä sous l’influence de la voyelle auxiliaire ä[4], d’où mälä = מֶ֫לֶךְ.

La forme primitive *qudš est devenue *qọdš, et a pris la voy. auxiliaire à l’analogie de סֵ֫פֶר et מֶ֫לֶךְ, d’où קֹ֫דֶשׁ[5].

Pluriel. Il y a en hébreu deux types de pluriel. Le premier, ancien et devenu très rare, est formé sur la forme primitive du singulier : *raḥm, pl. רַֽחֲמִים entrailles ; *šiqm (שִׁקְמָה), pl. שִׁקְמִים sycomores ; comp. חָכְמוֹת la Sagesse, sorte de pluriel de majesté formé sur le sing. חָכְמָה (§ 136 d). — Le second type de pluriel est un pluriel nouveau, formé non plus sur l’ancien singulier, mais sur le nouveau singulier, à savoir sur la forme segolisée. La voyelle auxiliaire ◌ֶ, considérée comme un ä, d’abord dans mälä, puis dans les deux autres types, est devenue å en syllabe ouverte : melåḵīm. Le qameṣ prétonique qu’on a dans les trois pluriels מְלָכִים, סְפָרִים, קֳדָשִׁים vient donc du segol auxiliaire des trois singuliers[6].

L’état construit, p. ex. מַלְכֵֿי, provient de la forme pleine de l’état absolu *målåḵīm. Le shewa (moyen § 8 f) est un vestige du qameṣ prétonique.

La forme légère de l’état construit est employée avec les suffixes lourds, p. ex. מַלְכֵיכֶם ; inversement le thème lourd מְלָכ de l’état abs. מְלָכִים est employé avec les suffixes légers, p. ex. מְלָכַי, מְלָכֶ֫יךָ[7].

Le duel se forme sur la forme primitive du singulier, comme le pluriel ancien : *ragl, רֶ֫גֶל pied, רַגְלַ֫יִם ; *birk, בֶּ֫רֶךְ genou, בִּרְכַּ֫יִם, בִּרְכֵּי (sans spiration § 92 g). Voir § 91 b quelques formes de duel anormales avec qameṣ prétonique.

c Flexion de 1. מֶ֫לֶךְ roi. L’a de la forme primitive malk reparaît au sing. avec les suffixes : מַלְכִּי, מַלְכְּכֶם. L’a reparaît aussi à la pause, sous forme de ◌ָ֑, mais pas dans tous les noms. Ainsi on a כָּ֑רֶם vigne, אָ֑רֶץ (cf. הָאָ֫רֶץ § 35 f), mais מֶ֑לֶךְ. On a généralement ◌ֶ֑ dans les noms qui sont d’anciens qitl passés au type מֶ֫לֶךְ, p. ex. probablement צֶ֫דֶק justice, קֶ֫דֶם orient, דֶּ֫שֶׁא herbe, פֶּ֫לֶא merveille, כֶּ֫לֶא prison.

Mais l’a primitif s’affaiblit assez souvent en i dans la flexion, et ainsi la forme qatl se confond avec la forme qitl : בֶּ֫טֶן ventre, בִּטְנִי ; בֶּ֫גֶד vêtement בִּגְדִֿי (דֿ spirant !), בִּגְדֵֿי ; קֶ֫בֶר tombeau, קִבְרֵי (et קִבְרוֹת). On a rarement la voyelle  : נֶ֫גֶד (prép.) en face de, נֶגְדִּי[8] ; נֶ֫כֶד race, נֶכְדִּי[9] ; חֶ֫לֶד vie, חֶ֫לְדִּי.

L’état construit, généralement, ne diffère pas de l’état absolu : מֶ֫לֶךְ. Parfois cependant l’état cst. a la forme קְטַל, p. ex. חֶ֫דֶר chambre, cst. חֲדַר (חֶ֫דֶר Ct 3, 4 †) ; שֶׁ֫גֶר portée, cst. שְׁגַר (שֶׁ֫גֶר Ex 13, 12 †). Comparer la forme קְטַל § 88 C g.

d Pluriel. Le paradigme, comme aussi tous les autres paradigmes des noms masculins, ne donne que le pluriel à finale masculine ◌ִים ; mais on peut, bien entendu, avoir le pluriel en וֹת. Ainsi on a le pluriel en וֹת dans les noms de genre féminin אֶ֫רֶץ, אֲרָצוֹת ; נֶ֫פֶשׁ âme, נְפָשׁוֹת et dans le nom de genre masc. קֶ֫בֶר tombeau, קְבָרוֹת (à côté de קְבָרִים). — Pour le type קַטְלִים cf. § b.

À l’état cst. מַלְכֵֿי (avec shewa moyen et spiration) parfois le shewa cesse d’être prononcé, et en conséquence la spiration disparaît. Dans plusieurs cas le fait est dû à l’influence d’une sifflante[10] : כַּסְפֵּיהֶם Gn 42, 25, 35 ; נִסְכֵּיהֶם Is 41, 29 etc. ; רִשְׁפֵּי Ct 8, 6 (mais רִשְׁפֵי Ps 76, 4) ; טַרְפֵּי Éz 17, 9 ; צִמְדֵּי Is 5, 10. — Pour l’affaiblissement de a en i, cf. § c. — Duel : cf. § b (fin).

e Flexion de 2. סֵ֫פֶר livre. Elle est symétrique à celle de מֶ֫לֶךְ. L’i de la forme primitive sifr reparaît au singulier avec les suffixes : סִפְרִי, et à l’état cst. pl. סִפְרֵי. Mais après une 1re gutt., i devient (§ 21 e) : חֵ֫לֶק part, חֶלְקִי, חֶלְקֵיהֶם (comp. doublet f. חֶלְקָה) ; עֵ֫זֶר secours, עֶזְרִי (comp. doublet f. עֶזְרָה) ; עֵ֫גֶל veau, עֶגְלֵךְ, עֶגְלֵי. En pause on a normalement סֵ֑פֶר ; parfois on a, p. ex., שָׁ֑בֶט verge, סָ֑תֶר cache, נֶ֑צַח éternité, יֶ֑שַׁע secours, חֶ֑רֶם anathème, sous l’influence du type qatl qui a souvent contaminé qitl (§ f). — L’état construit, en général, ne diffère pas de l’état absolu. Le cst. הֲבֵל souffle suppose (ainsi que הֶבְלִי) un abs. *הֵ֫בֶל à côté de (ou supplanté par) הֶ֫בֶל.

Pluriel. Le type de pluriel ancien (§ b) se trouve dans שִׁקְמִים sycomores, פִּשְׁתִים lin. — Le sing. חֵטְא péché (sans voyelle auxiliaire) a le pl. cst. חֲטָאֵי avec le qameṣ de חֲטָאִים (comp. גְּדִי, גְּדָיִים, גְּדָיֵי § q ; מִקְרָאֵי § C b).

f Contamination des formes qatl et qitl. Un nombre assez considérable de formes primitives qitl sont devenus qatl en hébreu. Le passage d’un type à l’autre était facile, à cause des formes semblables dans la flexion : ainsi les formes קִטְלִי, קְטָלִים[11], קִטְלֵי[12] peuvent venir de qatl ou de qitl. La forme segolée קֵ֫טֶל tend à devenir קֶ֫טֶל, forme plus sonore (cf. l’infinitif שֶׁ֫בֶת § 75 a). Dans un même nom on trouve des formes qui supposent un qatl et des formes qui supposent un qitl ; dès lors il est parfois difficile ou même impossible de dire si tel nom est originairement un qatl ou un qitl, ou si les deux formes ont existé simultanément. Exemple : la forme קֵ֫דְמָה vers l’est (§ 93 d) suppose une forme qidm ; קֶ֫דֶם, קַדְמֵי, קַדְמוֹן supposent une forme qadm ; mais il est probable que seule la forme qidm est primitive.

g Flexion de 3. קֹ֫דֶשׁ sainteté. Elle est symétrique aux flexions de מֶ֫לֶךְ et de סֵ֫פֶר (cf. § b). Toutefois la voyelle primitive u ne reparaît dans la flexion que très rarement : p. ex. גֻּדְלוֹ Ps 150, 2 † (partout ailleurs גָּדְלוֹ etc.). Presque partout on a  ; p. ex. קָדְשִׁי[13]. On a la voyelle i (difficile à expliquer) dans בֹּ֫סֶר verjus, בִּסְרוֹ ; אֹ֫מֶר parole, אִמְרוֹ, אִמְרֵי etc. ; שֹׁ֫קֶת canal, pl. cst. שִֽׁקֲתוֹת (§ 89 p).

Pluriel. Le pluriel ordinaire a la même forme קְטָלִים que le pluriel du type מֶ֫לֶךְ et du type סֵ֫פֶר, p. ex. בְּקָרִים matins. Avec une 1re gutturale on a חֳדָשִׁים mois, עֳפָרִים gazelles. On a ce même très bref dans הַגֳּרָנוֹת les aires (1 S 23, 1 ; Joël 2, 24), קֳדָשִׁים saintetés. L’ très bref est allongé en bref dans le doublet קָֽדָשִׁים qo̦-ḏåšīm et dans שָֽׁרָשִׁים racines (cf. § 6 l). Dans tous ces mots l’, au lieu du shewa, est dû à l’influence de la consonne qui précède[14]. — Le type de pluriel ancien (§ b) se trouve dans בָּטְנִים pistaches (de *בֹּ֫טֶן ou *בֹּטְנָה). — Duel : p. ex. מָתְנַ֫יִם reins, hanches (de *mutn > *מֹ֫תֶן) ; cf. § b (fin).

h Noms segolés avec gutturales. Une 2e ou 3e gutturale amène généralement un ◌ַ au lieu du ◌ֶ. Les particularités des gutturales exposées dans la Phonétique ont ici leur application. Avec une 3e gutturale on a les types זֶ֫רַע semence, נֵ֫צַח éternité qui ne présentent aucune difficulté, et le type רֹ֫מַח lance identique au type פֹּ֫עַל œuvre avec 2e gutturale. Avec une 2e gutturale on a le type פֹּ֫עַל pour les qutl et le type נַ֫עַר garçon pour les qatl. Il n’y a pas de forme qitl avec 2e gutturale, ou s’il y en a elle sera probablement aussi du type נַ֫עַר et par conséquent indiscernable (cf. שֵׂעָר § B c).

i Flexion de 4. נַ֫עַר garçon. On a souvent une voyelle auxiliaire après la gutturale, à savoir ◌ֲ, ou la voyelle pleine ◌ַ quand le mot s’allonge : נַֽעֲרִי, נַֽעַרְךָ (§ 22 b-c). — Dans deux noms finissant par le groupe חם, la vocalisation ordinaire ◌ֶ֫◌ֶ s’est introduite pour une cause difficile à dire[15] : לֶ֫חֶם pain, רֶ֫חֶם matrice, sein (mais רַ֫חַם au sens de femme ou jeune fille dans le texte archaïque et poétique Jug 5, 30 †) ; en pause לָ֑חֶם, רָ֑חֶם. Sur le pluriel du type ancien רַֽחֲמִים cf. § b.

j Flexion de 5. פֹּ֫עַל œuvre. Ici aussi on a souvent une voyelle auxiliaire après la gutturale, à savoir ◌ֳ, ou la voyelle pleine ◌ָ quand le mot s’allonge : פָּֽעֳלִי, פָּֽעָלְךָ (§ 22 b-c). On a cette même voy. auxiliaire ◌ָ, sans gutturale, dans קָֽטָבְךָ (comp. קָֽרָבְכֶם § 65 c). Au lieu de la forme normale פָּֽעֳלוֹ on a פֹּֽעֲלוֹ dans Is 1, 31 ; Jér 22, 13 (avec moyen en syllabe ouverte, et ◌ֲ normal sous le ע), תֹּֽאֲרוֹ Is 52, 14 (mais תָּֽאֳרוֹ 1 S 28, 14) ; comparer phénomène semblable dans le verbe, § 68 f.

Dans אֹ֫הֶל tente le א initial a toujours une voyelle pleine, soit soit  : אָֽהֳלִי, אָֽהֳלְךָ, אָֽהֳלֵי etc. ; — אֹֽהָלִים, אֹֽהָלַי etc. ; pour הָאֹ֫הֱלָה cf. § 93 c. On a encore l’ moyen dans אֹֽרְחוֹתֶ֫יךָ tes voies, אֹֽרְחֹתָיו (mais אָרְחֹתַי, אָרְחוֹתָם, אָרְחֹֽתֵיהֶם). Le mot בֹּ֫הֶן pouce a ◌ֶ malgré la gutturale[16] ; le pl. cst. בְּהֹנוֹת, avec nécessairement long en cette position, suppose un sing. בְּהוֹן* (lu partout par le Pentateuque samaritain).

k Flexion des noms monosyllabes avec voyelle à la fin : קְטַל, קְטֵל, קְטֹל (cf. § 88 C g, i, k). Dans les קְטַל il y a généralement redoublement spontané devant les affermantes, p. ex. מְעַט peu, מְעַטִּים[17]. Avec suffixes on a p. ex. דְּבַשׁ miel, דִּבְשִׁי ; שְׁכֶם[18] dos, שִׁכְמוֹ. Les exemples de קְטֵל ont la 2e rad. א, p. ex. בְּאֵר puits, pl. בְּאֵרוֹת, cst. בֶּֽאֱרוֹת ; זְאֵב loup, pl. זְאֵבִים, זְאֵבֵי. — Dans קְטֹל on a nécessairement le redoublement spontané (§ 18 e) : לְאֹם peuple, לְאֻמִּים. Avec suffixe on a בְּאשׁ puanteur, בָּאְשׁוֹ. Pour la forme de l’infinitif קְטֹל avec suffixes cf. § 65 b.

l Flexion de 6. מָ֫וֶת mort. Les formes qatl de racines ע״ו (§ 88 C f) ont le ו consonantique. Forme primitive mau̯t : l’a a été labialisé en å () devant le ו ; la voyelle auxiliaire ◌ֶ est à l’analogie des segolés à racine forte. Seul le mot רֶ֫וַח espace est entièrement semblable à un segolé de racine forte, p. ex. זֶ֫רַע. Autres exemples § 88 C f. À l’état cst. la forme est contractée : mau̯t > mọ̄ṯ מוֹת ; cette forme se maintient dans la flexion.

Dans certains mots la contraction se fait même à l’état absolu : שׁוֹט fouet, יוֹם jour, צוֹם jeûne, etc. ; ou plutôt l’état cst. a été employé comme état absolu.

Au lieu du pluriel normal, comme שׁוֹטִים, on a שְׁוָרִים Os 12, 12 † (de שׁוֹר bœuf). Comparer dans la forme qūl : שׁוּק rue, שְׁוָקִים ; דּוּדּ, דְּוָדִים au sens de pots 2 Ch 35, 13 † (mais דּוּדִים au sens de corbeilles 2 R 10, 7 †).

m Flexion de 7. זַ֫יִת olive. Les formes qatl de racines ע״י (§ 88 C f) ont le י consonantique. Forme primitive zai̯t, d’où avec voyelle auxiliaire i due au qui précède : זַ֫יִת. À l’état cst. la forme est contractée : zai̯t > zẹ̄ṯ זֵית ; cette forme se maintient dans la flexion.

Dans quelques rares mots la contraction se fait même à l’état absolu : חֵיק sein, חֵיל rempart, (לֵ֑יל nuit Is 21, 11 †) ; ou plutôt l’état cst. a été employé comme état absolu.

Au lieu du pluriel normal, comme זֵיתִים, on a חַ֫יִל armée, pl. חֲיָלִים ; תַּ֫יִשׁ bouc, תְּיָשִׁים ; עַ֫יִר ânon, עֲיָרִים ; עַ֫יִן source, עֲיָנוֹת.

Le mot גַּיְא vallée présente plusieurs anomalies. Au singulier le א, non prononcé, est parfois omis dans la graphie : גַּי, cst. גֵּי. Au pluriel on a Q. גֵּֽאָיוֹת (anormal !), K. גְּיָאוֹת ou גֵּיאוֹת.

n Flexion de 8. עַם peuple. Formes qatl de racines ע״ע (cf. § 88 B g). Certains mots présentent des particularités. Au lieu de עַם on a עָם avec accent disjonctif et avec l’article. On a יָם mer même à l’état construit (même avec maqqef) sauf dans יַם־סוּף mer des roseaux, mer Rouge (§ 13 c). — Devant une gutturale, le redoublement réel étant impossible, il y a seulement redoublement virtuel, p. ex. פַּחִים pièges, ou absence totale de redoublement, d’où ◌ָ en syllabe ouverte, p. ex. שָׂרִים princes (pour śarrīm). Ce ◌ָ est une voyelle stable : cst. שָׂרֵי, מָרֵי, רָעֵי. — Dans la flexion rarement l’a s’affaiblit en i : פַּת morceau, פִּתִּי (comp. בַּת fille, בִּתִּי § 98 d) ; סַף seuil, סִפִּים ; סַפ coupe, סִפּוֹת (et סַפּוֹת 2 S 17, 28). — Les formes avec l’état dissocié (cf. § 82 a) sont très rares : עֲמָמִים à côté de l’usuel עַמִּים ; הֲרָרִי, pl. cst. הַֽרֲרֵי. Le mot אַף nez, de la rac. אנף, a la flexion du type עַם : אַפִּי, duel אַפַּ֫יִם visage.

o Flexion de 9. עֵז chèvre (אֵם mère). [Dans le paradigme on a préféré עֵז à cause de son pluriel en ◌ִים, bien que la racine soit ענז et non עזז]. Formes qitl de racines ע״ע (§ 88 B h). En syllabe aiguë l’i primitif se maintient : עִזִּי, אִמִּי ; duel שִׁנַּ֫יִם dents. — Formes avec l’état dissocié : צֵל ombre, צְלָלִים ; חֵץ flèche, חֲצָצֶ֫יךָ Ps 77, 18 (à côté de l’usuel חִצִּים). Comme עֵז ont la 2e radicale נ assimilée : חֵךְ palais (de la bouche) ; זֵק*, זִקִּים chaînes.

p Flexion de 10. חֹק droit. Formes qutl de racines ע״ע (cf. § 88 B i). En syllabe aiguë l’u primitif se maintient généralement : חֻקִּי, עֻזִּי ; rarement on a ◌ָ : עָזִּי. Si le redoublement est omis, on a ◌ָ : חָקְךָ, חָקְכֶם. À l’état cst. on a חֹק, כֹּל, mais avec maqqef חָק־, כָּל־(cf. § 13 b). — La forme avec l’état dissocié חִקְקֵי Jug 5, 15 (poét. et archaïque), Is 10, 1 † ne vient probablement pas de חֹק (malgré des cas comme אֹ֫מֶר, אִמְרֵי § g), mais d’un חֵק*.

q Flexion de 11. פְּרִי fruit. Formes qatl de racines ל״ה (cf. § 88 C e). La forme primitive qati̯ devient ordinairement קְטִי, moins souvent קֶ֫טֶה ; ainsi pour *baki̯ « pleurs » on a le doublet בְּכִי et בֶּ֑כֶה Esd 10, 1 †. Cette double forme peut s’expliquer ainsi : la forme primitive baki̯ est devenue à l’état absolu בֶּ֫כֶה, à l’analogie de מֶ֫לֶךְ, מֶ֫לֶךְ ; à l’état cst. la voyelle a est tombée et le est devenu vocalique : בְּכִי ; et cette forme a été employée aussi à l’état absolu. À la pause on a בֶּ֑כִי avec ◌ֶ, probablement à l’analogie de בֶּ֫כֶה. Comme בֶּ֫כֶה on a : הֶ֫גֶה murmure, קֶ֫צֶה fin ; — comme בְּכִי : פְּרִי, שְׁבִי captivité, צְבִי I ornement, II gazelle, גְּדִי chevreau, לְחִי joue. — Dans la flexion l’a de pari̯ s’affaiblit généralement en i : פִּרְיִי ; mais on a parfois , p. ex. פֶּרְיְךָ (suite vocalique - § 29 f), פֶּרְיְכֶם. On trouve des formes avec le thème פְּרִי, p. ex. פְּרִיהֶם, פְּרִיהֶן. Au pluriel on a, à l’analogie de מְלָכִים, כְּלָאִים : גְּדָיִים (cst. גְּדָיֵי avec ◌ָ conservé ; comp. חֲטָאֵי § e), אֲרָיוֹת, 1 f. אֲרָייִם lions (de אֲרִי ; doublet plus usuel אַרְיֵה), חֲלָאִים anneaux (de חֲלִי ; א pour י). Au lieu des formes attendues צְבָאִים*, פְּתָאִים* la massore demande צְבָאיִם, פְּתָאיִם (de צְבִי gazelle et פֶּ֫תִי ingénu [seul ex. de forme pausale employée comme contextuelle]). — De même, au duel, on a לְחָיַ֫יִם, cst. לְחָיֵי. (Comparer les pluriels cst. avec voyelle pénultième ◌ֵ § B d).

r Flexion de חֲצִי moitié. Forme qitl de racine ל״ה (§ 88 C h). La forme primitive ḥiṣi̯ devient חֲצִי état cst. et abs., en pause חֵ֑צִי avec suff. חֶצְיוֹ (◌ֶ après la gutturale ; cf. § e).

s Flexion de חֳלִי maladie. Formes qutl de racine ל״ה (cf. § 88 C j). La forme primitive ḥuli̯ devient חֳלִי état cst. et abs., en pause חֹ֑לִי ; avec suff. חָלְיוֹ. Au lieu du shewa (ou, après gutturale, du ḥaṭef pataḥ) on a généralement ◌ֳ, vestige de la voyelle caractéristique de la forme. Parfois cependant on a ◌ְ : בִּדְמִי (cst., à côté de דֳּמִי) Is 38, 10 ; יְפִי (cst.) Éz 28, 7 ; וּצְרִי Gn 37, 25.

  1. On a gardé le paradigme usuel קֹ֫דֶשׁ malgré une petite anomalie que présente ce nom au pluriel absolu : קָֽדָשִׁים ou קֳ׳, au lieu de קְ׳ (opp. בֹּ֫קֶר matin, בְּקָרִים).
  2. Cf. Mélanges Beyrouth, 51, p. 375 sqq.
  3. Comparer, dans le futur qal apocopé des ל״ה, les formes יִגְלְ, יֵגְלְ, יִ֫גֶל ; la forme plus ordinaire יִ֫גֶל ne se trouve pas dans les noms, non plus que יִגְלְ (cf. § 79 i).
  4. Cf. Brockelmann, 1, 184.
  5. Il a existé probablement un stade intermédiaire *qọdš, à en juger d’après certaines transcriptions des LXX, p. ex. : Γοσόν = גֹּ֫שֶׁן, Τοφόλ = תֹּ֫פֶל, Βοόζ = בֹּ֫עַז, Βοόν = בֹּהַן ; cf. Lagarde, Nominalbildung, p. 52.
  6. Voir § 97 A b N.
  7. Il y a là une sorte de loi d’équilibre. Le double thème se trouve encore dans les pluriels des types masc. à deux voyelles brèves primitives דָּבָר § B b et זָקֵן § B d. Semblablement on a כָּ avec les suffixes lourds כָּכֶם, כָּהֵם, et כָּמוֹ avec les suffixes légers כָּמ֫וֹנִי, כָּמ֫וֹךָ § 103 g ; אֶת avec suffixes lourds אֶתְכֶם, אֶתְהֶם, et אֹת avec suff. légers אֹתִי, אֹֽתְךָ § 103 k. Remarquer qu’une forme *מְלָכֵיכֶם serait tout à fait anormale : le qameṣ se trouverait en syllabe antéprétonique.
  8. Cf. Brockelmann, 1, 198 : sous l’influence de la palatale qui suit.
  9. Cf. Brockelmann, 1, 198 : sous l’influence de la palatale qui suit.
  10. Nöldeke, Zeitschrift für Assyriologie, t. 18, 72.
  11. La forme קְטָלִים des trois types segolés est aussi le pl. du type דָּבָר § B b.
  12. La forme קִטְלֵי est des plus ambiguës ; outre qu’elle est le pluriel constant de קֵ֫טֶל, קֵטָל, et ordinaire de קָטָל, קָטֵל, on la trouve parfois comme pluriel de קֶ֫טֶל, et même de קֹ֫טֶל.
  13. De même dans les formes féminines, p. ex. חָכְמָה §§ 88 C j ; 97 A a.
  14. Pour ג et ק rapprocher la conservation de ŭ avec les consonnes g, q, k, en éthiopien.
  15. P.-ê. influence de la nasale ; de même pour בֹּ֫הֶן § j.
  16. Voir § i N.
  17. Comp. le pluriel גְּמַלִּם de גָּמָל § B b.
  18. Unique forme avec ◌ֶ. La forme primitive est probablement šakm (Bauer, 1, 456 cite ša-ak-mi des lettres de Tell el Amarna). Mais שְׁכֶם pourrait être aussi un qitl et même l’état cst. d’une forme qatil (assez fréquente pour les noms de membres § 88 D b) qui serait devenu état absolu.