Grammaire de l’hébreu biblique/Morphologie/Nom/Paragraphe 97A

Paul Joüon
Institut biblique pontifical (p. 250-251).
§ 97 A. Flexions des noms avec une seule voyelle primitive.

a Cette catégorie comprend les noms féminins des formes qatl, qitl, qutl, dont les masculins correspondants ont été pour la plupart segolisés. Pour former le nom féminin on ajoute at > åh à la forme primitive d’où qatlat, qitlat, qutlat, p. ex. מַלְכָּה reine, סִתְרָה protection, טֻמְאָה impureté. Parfois la voyelle primitive est altérée, comme elle l’est dans le noms masculins avec les suffixes. Ainsi *kabś (כֶּ֫בֶשׂ agneau) a la forme fém. כִּבְשָׂה agnelle, à côté de כַּבְשָׂה § 88 C b ; *rašʿ (רֶ֫שַׁע, רָ֑שַׁע impiété) a le fém. רִשְׁעָה (synonyme) avec i comme dans רִשְׁעוֹ (comp. les formes comme בִּטְנִי à côté de מַלְכִּי § 96 A c)[1]. — À la forme qitl on a ◌ֶ après une 1re gutturale (§ 21 e), p. ex. *ḥilq (חֵ֫לֶק part) חֶלְקָה comme on a חֶלְקִי § 96 A e ; de même עֵ֫גֶל veau, עֶגְלָה génisse comme on a עֶגְלֵךְ ; עֵ֫זֶר secours, עֶזְרָה comme on a עֶזְרִי. — À la forme qutl, l’u devient presque toujours ◌ָ comme dans la flexion du masculin, p. ex. קָרְחָה endroit chauve, comme on a קָדְשִׁי § 96 A g (cf. § 88 C j). L’u primitif est conservé dans טֻמְאָה impureté (devant la labiale), dans le nom propre de femme חֻלְדָּה (comp. חֹ֫לֶד belette ou taupe).

Avec 2e gutturale : נַ֫עַר garçon, fém. נַֽעֲרָה jeune fille (comp. נַֽעֲרִי) ; טָֽהֳרָה pureté (comp. פָּֽעֳלִי), בָּאְשָׁה mauvaise herbe (comp. בָּאְשׁוֹ de בְּאשׁ puanteur § 96 A k).

Racines ע״ע : רַב nombreux, fém. רַבָּה ; (avec gutturale) רַע mauvais, רָעָה ; חֹק droit, décret , חֻקִָּה décret (comp. חֻקִּי).

Racines ל״ה : אַלְיָה queue grasse (de *ʾali̯, comp. פְּרִי de *pari̯) ; שְׁבִי captivité (de *šabi̯, d’où שְׁבִי) avec affaiblissement de a en i (comp. שִׁבְיוֹ). Sur les formes secondaires גְּדִי chevreau, אֳנִי flotte on a formé les fém. גְּדִיָּה chevrette, אֳנִיָּה vaisseau.

b Flexion de 21. מַלְכָּה reine (forme qatlat § 88 C b). Le ◌ָ est traité comme le ◌ָ final de דָּבָר : מַלְכָּתִי, מַלְכָּֽתְךָ, mais avec suffixe lourd מַלְכַּתְכֶם. Pluriel : État abs. מְלָכוֹת avec qameṣ prétonique, à l’analogie du qameṣ prétonique du type masculin מְלָכִים § 96 A b (où le qameṣ provient de la voy. auxiliaire du singulier)[2]. État cst. מַלְכֿוֹת (avec shewa moyen, comme מַלְכֵֿי). On remarquera que le thème de l’état cst. s’emploie avec tous les suffixes. (Opposer le double thème du pluriel dans les masc. segolés et dans les types דָּבָר, זָקֵן). Une forme מְלָכוֹתַי* serait tout à fait anormale : le qameṣ se trouverait en syll. antéprétonique (comp. l’impossibilité de מְלָכֵיכֶם* § 96 A c Note).

Pour le duel, cf. § 91 b.

c Flexions de la forme qitlat § 88 C h et de la forme qutlat § 88 C j. Les flexions de ces formes קִטְלָה (קֶטְלָה) et קֻטְלָה (קָטְלָה) sont parfaitement symétriques à celle de קַטְלָה. Ainsi de שִׁפְחָה servante, esclave on forme le pl. abs. שְׁפָחוֹת, cst. שִׁפְחוֹת ; de חָרְבָּה ruine, pl. abs. חֳרָבוֹת, cst. חָרְבֿוֹת (comp. קֳדָשִׁים, חֳדָשִׁים § 96 A g) ; mais de עָרְלָה prépuce on a הָֽעֲרָלוֹת Jos 5, 3 †, cst. עָרְלוֹת[3].

Dans la flexion de תְּאֵנָה figue (forme qetil § 88 C i) le ◌ֵ se maintient : תְּאֵֽנָתִי, תְּאֵנִים, תְּאֵנֵי (comp. בְּרֵכָה § 97 B d).

  1. Qatlat peut aussi devenir קֶטְלָה, mais il n’y a pas d’exemple sûr.
  2. Aussi, en dehors de la catégorie des noms segolés, n’a-t-on pas de qameṣ prétonique, p. ex. מִרְמָה fraude, pl. מִרְמוֹת (non מְרָמוֹת*) ; מִצְוָה pl. מִצְוֺה (formes מִקְטָלָה § 88 L f).
  3. Sur la forme חָכְמוֹת la Sagesse cf. § 96 A b.