Grammaire de l’hébreu biblique/Écriture/Paragraphe 26

Paul Joüon
Institut biblique pontifical (p. 67-68).
§ 26. Des consonnes vocaliques ו, י.

a Les consonnes vocaliques ו, י perdent souvent leur valeur consonantique, se contractent souvent avec une voyelle précédente, parfois disparaissent complètement.

b Le groupe uu̯ devient ū, p. ex. *huu̯šab > הוּשַׁב. Le groupe ii̯ devient ī, p. ex. i̯ii̯raš > יִירַשׁ ; avec les prépositions בְּ, כְּ, לְ, מִן et la conjonction וְ on a p. ex. avec יְמֵי « jours de » : בִּימֵי, כִּימֵי, לִימֵי, מִימֵי, וִימֵי (cf. § 103 b).

Le groupe ii̯ final peut devenir ◌ֶה p. ex. šemōnii̯שְׁמֹנֶה (cf. arabe ṯamānin ثَمَانٍ) « huit » ; גֵּאֶה « altier » (forme qittil) ; cf. Barth, Nominalbildung, p. xxx sqq.

c Les groupes au̯, ai̯ tantôt se maintiennent, tantôt sont contractés en ọ̄, ẹ̄ (moins souvent ē̦) :

  1. À l’état absolu on a מָ֫וֶת, mais יוֹם, שׁוֹט, צוֹם (d’après l’état cst. § 96 A l) ; à l’état cst. מוֹת, יוֹם, etc.[1].
  2. À l’état absolu on a בַּ֫יִת, avec ה paragogique בַּ֫יְתָה ; à l’état cst. בֵּית[2].
  3. La particule négative אַ֫יִן devient אֵין en liaison (§ 160 h).
  4. Le substantif śadai̯, poét. שָֹׁדַי devient abs. שָׂדֶה, cst. שְׂדֵה. Devant les suff‍ixes, la forme du nom pluriel sūsai̯ devient סוּסֵי dans סוּסֵ֫ינוּ etc. mais סוּסֶי dans סוּסֶ֫יךָ, סוּסֶ֫יהָ, § 94 d.

Sur la prononciation des groupes au̯, ai̯ etc. cf. § 7 d.

d En finale , , après consonne, deviennent u, i ; p. ex. u̯a̦i̯i̯ištá̦ḥu̯, forme apocopée de יִשְׁתַּחֲוֶה « il adorera », devient וַיִּשְׁתַּ֫חוּ u̯a̦i̯i̯ištá̦ḥu (§ 79 t) ; śáḥu̯ « natation » devient שָׂ֔חוּ (Éz 47, 5) ; páṯi̯ « ingénu » devient פֶּ֫תִי.

Remarquer que ces u, i brefs sont nécessairement écrits plene.

e La conjonction וְ devant labiale devient וּ c’est-à-dire la simple voyelle u, probablement brève (cf. § 14 c 2), p. ex. וּמֶ֫לֶךְ umé̦le̦ḵ (cf. § 104 c).

Le יִ initial, proprement i̯i, semble avoir été prononcé simplement i, du moins dans certaines écoles. Ainsi le nom propre יִשַׁי est écrit אִישַׁי dans 1 Ch 2, 13. D’après Qimḥi יִקְטֹל se prononce iqṭọl.

f Un  initial est supplanté par , p. ex. *u̯alad > יָלַד « enfanter » (§ 75 a), de sorte qu’on ne trouve pas de mots commençant par ו, sinon la conjonction וְ, l’usuel וָו « crochet », deux noms isolés et suspects וָזָר, וָלָד, et quelques noms propres.

Les verbes à 3e radicale primitive ont été absorbés par les verbes à 3e radicale (§ 79 a).

À côté de la forme normale mais très rare קִוֵּם (de קוּם) on a la forme rare קִיֵּם (§ 80 h).

  1. On remarquera l’absence de contraction dans עַוְלָה injustice (sans doute pour éviter la confusion avec עוֹלָה holocauste) et dans שַׁוְעָה cri au secours (pour שַׁוְּעָה* de שִׁוַּע crier au secours) ; cf. aussi § 79 a שָׁלַוְתִּי.
  2. Remarquer l’absence de contraction dans לַ֫יְלָה > nuit § 93 g N.