Dictionnaire de la Bible/Tome 2.2.b ECCLÉSIASTE-ESCLAVE

Dictionnaire de la Bible
Letouzey et Ané (Volume IIp. 1533-1534-1927-1928).

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ECBATANE — ECCLÉSIASTE (LE LIVRE DE L’)

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d’hui Réï, ville du nord-est de la Médie, n’était pas située à proprement parler dans la montagne d’Ecbatane. On a supposé qn’Ecbatane désignait ici une chaîne de montagnes de Médie qui tirait son nom de la ville d’Ecbatane ; mais il est plus probable que le texte latin actuel est altéré ou la traduction défectueuse. Les textes grecs n’ont rien de pareil, non plus que l’ancienne Italique, quoiqu’elle amplifie dans ce passage le texte grec de la manière suivante : s Rages, ville des Mèdes. Il y a deux jours de marche de Rages à Ecbatane. Rages est dans les montagnes et Ecbatane dans la plaine. » Voir Rages.

F. Vigouroux.

    1. ECCÉTAN##

ECCÉTAN (hébreu : Haqqâtân, « le petit ; » Septante : ’AxxaTav), père de Jobanan, qui revint de la captivité de Babylone au temps d’Esdras. I Esdr., viii, 12.

    1. ECCHELLENSIS ou ECHELLENSIS Abraham##

ECCHELLENSIS ou ECHELLENSIS Abraham,

savant maronite, né à Éckel en Syrie, d’où il tira son nom, mort à Rome en 1664, dans un âge avancé. Après avoir étudié en cette dernière ville, il se fit recevoir docteur en philosophie et en théologie et y enseigna l’arabe et le syriaque. En 1630, il vint à Paris pour travailler à la Polyglotte de Le Jay, où il publia le livre de Ruth en syriaque et en arabe, et le livre III des Machabées en arabe. Son travail sur Ruth fut vivement attaqué par Valérien de Flavigny et Gabriel Sionite, auxquels il répondit par trois lettres apologétiques : Epislolm apologelicse duse adversus Valerianum de Flavigny pro editione syriaca libelli Ruth, in-8°, Paris, 1647 ; Epistola apologetica tertia in qua respondetur libello Gabrielis Sionitx, in-8°, Paris, 1647. À la suite de ces démêlés, il revint en Italie et fut employé par la congrégation de la Propagande à la traduction de la Bible en arabe. Il avait encore composé une Apologia de editione Bibliorum polyglottorutn Parisiensium, in-8°, Paris, 1647 ; Linguse syriacse sive chaldaicss perbrevis institutio, in-4°, Rome, 1628, et autres nombreux ouvrages. — Voir Lelong, Bibl. sacr., p. 24, 28, 39, 593 ; Gesenius, dans Ersch et Gruber, Allgemeine Encyklopàdie, sect. i, t. XXX, p. 360 ; R. Gosche, dans Herzog, Real -Encyklopàdie, 2e édit.,

t. iv, p. 17.
B. Heurtebize.

1. ECCLÉSIASTE (hébreu : Qôhéléf). Titre que prend l’auteur du livre de l’Ecclésiaste. Voir Ecclé SIASTE 2.

2. ECCLÉSIASTE (LE LIVRE DE) (hébreu : Qôhéléf ; Septante : ’ExxXr]<ria<jTrjç ; Vulgate : Ecclesiastes), un des cinq livres sapientiaux de l’Ancien Testament. Il est le second de ces livres dans les Septante et dans la Vulgate. Dans la Bible hébraïque, il occupe la septième place parmi les hagiographes (ketûbîm) et il est le quatrième des cinq megillôf, « rouleaux » que les Juifs lisent dans leurs cinq principales fêtes. L’Ecclésiaste se lit dans les synagogues à la fête des Tabernacles.

I. Nom du livre. — Il est difficile d’expliquer avec certitude le sens du nom hébreu du livre, Qôhéléf. nSnp vient de bnp, qâhal, inusité, dont la notion radicale offre l’idée d’  « appeler, convoquer », et de « parler, prêcher ». Du moins est-ce l’opinion de plusieurs. rnnp (participe présent féminin) peut donc se traduire : « celui qui parle dans une réunion, en public ». Cf. S. Jé-TÔme, In Eccle., i, 1, t. xxiii, col. 1011 (concionator). L’étymologie, l’opinion de graves auteurs, et le ton général de l’écrit, qui est comme un discours véhément sur la vanité des choses humaines, telles sont les raisons qui appuient ce sens.. La forme féminine s’explique probablement par l’usage hébreu assez récent de mettre au féminin les noms d’offices ou de dignités. I Esdr., ii, 55, 57 ; I Par., iv, 8 ; vii, 8. Cf. J. Olshausen, Lehrbuch der hebr. Sprache, Brunswick, 1861, p. 224. Voir d’autres significations du mot et d’autres explications de sa termi. liaison féminine dans G. Gietmann, In Ecclesiasten,

Paris, 1890, p. 58-64. — Le mot grec’Ev.yà^maT-rf^, « Ecclésiaste, » signifie le prédicateur qui parle et enseigne dans une assemblée (èxx).r, (7Îa).

IL Doctrine. — L’Ecclésiaste tend, en somme, â montrer que la félicité ici-bas consiste à craindre Dieu et à observer sa loi, en jouissant modérément de tous les biens que la Providence a départis à l’homme, xii, 13. Ce livre est ainsi une sorte de traité de la béatitude terrestre. L’idée de piété envers Dieu y est exprimée nettement comme condition d’une vie heureuse. L’usage modéré des choses y est cent fois répété. Qôhéléf prouve donc, par une série de petits paragraphes : 1° que la félicité ne consiste ni dans la science, i, 18 ; — 2° ni dans le rire et le plaisir, qui est « une folie », ii, 2 ; — 3° ni dans l’éclat et la magnificence, le luxe et l’abondance des biens : « J’ai reconnu, dit-il, que tout cela est vanité et pâture de vent » (Vulgate : afflictio animi). ii, 11. Dieu a fixé un temps pour chaque chose, et ainsi il n’y a de bon pour l’homme que de se réjouir et de mener une vie honnête ici-bas. iii, 12. — Il arrive à la même conclusion par ses observations sur ce qui se passe dans la vie civile. L’injustice et l’impiété le révoltent. L’oppression partout triomphe. Il s’indigne. À quoi bon ? Le succès est jalousé. L’envie se ronge. Vanité encore et pâture de vent. Ainsi en est-il de l’homme solitaire et morose. Il rompt avec ses semblables ; mais « malheur à l’homme seul ». Toujours vanité et affliction d’esprit, iv, 16. « Ne vaut-il pas mieux manger, boire et jouir en paix de son travail : ce qui est un don de Dieu ? » v, 17-18. — Toutes ces maximes sont reprises dans le reste du livre, et récapitulées et amplifiées, un peu au gré de l’auteur. Dieu a voulu que l’effort de l’homme servît à son honnête jouissance, vu, 7. Il faut éviter les extrêmes, le rire insensé, la tristesse exagérée, les passions excessives. La vraie sagesse rend fort, plus fort que « dix princes ». vii, 19. Avec elle j’ai cherché la cause de cette infinie misère, et j’ai trouvé que c’était la femme en général, car Dieu a fait la nature humaine droite ; ce sont les hommes qui inventent les mensonges sans fin et les maux, vii, 24-30. Cf. Gietmann, In Eccle., p. 251-257. Il ne faut cependant pas se tromper. L’honnête jouissance des biens de la vie ne doit pas exclure l’assiduité dans l’action, ni la piété et la crainte de Dieu. Il y a un Dieu, providence suprême réglant le temps et les choses ; il faut y être attentif. Parmi les injustices dont ce bas monde est rempli, attendons. Encore une fois il n’y a rien de bon pour l’homme que de manger, de boire, de se réjouir pendant les jours que Dieu lui a donnés sur terre, viii, 15. Même la science, modères-en l’ardeur : l’homme ne sait rien de rien. Affranchis-toi des vains désirs. Jouis de la vie honnêtement gagnée. Une fois dans le scheol, on ne peut plus agir. Applique-toi à la vraie sagesse. Surtout prends garde à l’indignation qu’éveille la vue des iniquités sociales, x, 4-15. Il vaut mieux se donner au silence, à la paix. Du reste travaille matin et soir, quoique les affaires de ce triste monde se règlent non sur le mérite, mais par le hasard. Pratique enfin la piété et la religion dès tes jeunes années jusqu’à ce qu’arrivent ces jours dont tu diras : Rien ne m’y plait. Voilà donc le résumé de tout : se garder de l’excès dans le savoir, le plaisir, les richesses ; user modérément, avec joie, des biens de la vie, et craindre Dieu en obéissant à sa loi ; car, en dehors de cela, vanité des vanités et tout est vanité. — Telle est la doctrine du livre. Qohélét regarde la vie par ses côtés douloureux, et c’est dans les constatations de l’infinie misère des choses humaines qu’il cherche ses raisons et ses arguments. Tout est vanité, tel est le résultat vingt fois exprimé de toutes ses expériences. Ce qui ajoute à l’impression d’acre tristesse causée par ce livre, c’est la vigueur et la profondeur du sentiment exprimé. Toutes ces misères, qu’il décrit par aphorismes, l’une après l’autre, il en a senti lui-même personnellement, à une profondeur incroyable, l’amer1535

    1. ECCLÉSIASTE##

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tnme. Il les a vécues. On le voit de reste, on l’éprouve rien qu’à remarquer le ton véhément, tragique, dont il ne se départit guère. Il exagère, il parle en orateur, en poète parfois ; mais avec quel mouvement, quel heurt de pensées ! À part Job peut-être, nul n’est descendu si avant dans cet inexorable ennui qui fait le fond de la vie humaine. "Voir iii, 18-21 ; iv, 2-16 ; ix, 11, 12 ; xii. C’est par là, en parlant avec exagération des côtés sombres de la vie, que sa doctrine a donné prise aux objections.

Objections doctrinales. — On accuse l’Ecclésiaste d’épicurisme, de fatalisme, de pessimisme. On trouve qu’il nie la valeur de la raison, et qu’il ne reconnaît pas l’immortalité de l’âme. Reprenons ces affirmations. — 1° Qôhélét admet l’immortalité de l’âme. Il n’en donne pas la notion complète, qui était réservée aux temps nouveaux, mais il en exprime la notion essentielle, telle qu’il convenait qu’elle fût alors. Il ne peut pas ne pas l’avoir, car les Hébreux dès le temps de Moïse l’avaient très certainement. J. Knabenbauer, Das Zeugniss des Menschengeschlechtes fur die Unsterblichkeit der Seeîe, vi" Ergà’nzungsheft des Stimmen aus Maria-Laach, Fribourg-en-Brisgau, 1878, p. 9. Et il l’a en effet. Quoi de plus clair que xii, 7 : « La poussière fera retour à la terre, comme ce qu’elle était, et l’esprit reviendra vers Dieu, qui l’a donné. » Du reste, sa théorie favorite du jugement futur dans l’autre vie exige qu’il croie à l’immortalité. Cf. m, 17 ; viii, 1-8, 11 ; XI, 9 ; xii, 14. Pas de justice ici-bas, et cependant il faut une justice ; c’est Dieu qui la rendra après la mort. Tel est son raisonnement. Un seul passage : (Quis novit si spiritus filiorum Adam ascendat swsum, et si spiritus jumentorum descendat deorsuni ?) m, 21, semble contredire. Il n’en est rien. Ou bien il affirme, en effet, l’idée de survivance, si l’on entend ascendat sursum de l’immortalité bienheureuse, et descendat deorsum de l’immortalité malheureuse (voir G. Gietmann, In Eccle., p. 185)., ou bien il ne touche pas même à la question, si l’on traduit ruâfy, spiritum, par souffle, et non pas par « esprit » : il s’agirait simplement alors du dernier souffle de l’homme et de la bête exhalé identiquement, mais dont le lieu de retour serait différent, l’un porté en haut, l’autre tombant en bas. Voir trois autres sens au mot Ame, t. i, col. 468. Qôhélét ne nie donc pas l’immortalité. — Il ne méconnaît pas davantage la valeur de la raison. Quand même il dirait que « l’homme ne peut se rendre compte de rien », i, 8 ; que même en se privant de sommeil pour étudier, il « ne saurait jamais arriver à la compréhension de ce qui se fait sous le soleil », viii, 16, 17 ; que lui, Qôhélét, ayant appliqué toute son âme à la sagesse et à la science, il a vu enfin que « cela aussi n’est que vanité et pâture de vent », i, 12-18, il ne dit rien que de très orthodoxe : ce n’est pas la capacité de la raison et sa valeur intime qu’il met en doute, il ne traite pas cela ; mais c’est sa limite dans la compréhension qu’il affirme. La raison ne peut comprendre tout : est-ce dire qu’elle ne sait rien avec certitude ? Non, certes. Il en exalte ailleurs la force, ix, 14-18 ; la lumière, la gloire, viii, 1 ; la divine origine, vii, 29. — 2° Passons à l’accusation de pessimisme. L’Ecclésiaste serait, dit-on, un désenchanté, un ennuyé incurable, parce qu’il sent et exprime avec passion le néant des choses qui occupent le cœur de l’homme. Mais ne nous trompons pas. Autre est cette doctrine, et autre le pessimisme d’un Schopenhauer ou d’un von Hartmann. C. H.Wright, Ecclesiastes, Londres, 1883, e. vi et vii, p. 141-214. La raison et la foi répudient les opinions de ces philosophes ; elles admettent au contraire l’appréciation de l’Ecclésiaste sur la vie et sçs misères, parce qu’elle est vraie au fond, quoique très noire. Voici comment il faut comprendre sa pensée. Qôhélét cherche à établir l’homme dans l’usage modéré des choses. Pour y atteindre, il s’efforce d’assombrir la vie et d’en exagérer le vide et le néant. Il sait que, lié comme il l’est aux sens, l’homme ne se déprendra pas si totalement de ses illusions qu’il ne lui paraisse toujours

bon et joyeux de vivre : ce sera alors Vaurea mediocritas, son rêve. Qôhélét, en effet, est si peu pessimiste dans le sens moderne du mot, que çà et là il interrompt sa lamentation pour exciter à la vie et à la joie. II n’y a qu’une chose de bonne : jouir de la vie et de son travail, manger son pain en liesse, boire son vin en bonne humeur, iii, 22 (Vulgate, 21) ; viii, 15 ; ix, 7 ; xi, 9. S’il était pessimiste, il ne pourrait pousser au travail assidu comme il le fait avec tant d’éloquence. Sème le matin, et le soir ne laisse pas reposer ta main, xi, 1, 2, 6. Il croit à la Providence qui régit tout, sans que l’homme puisse pénétrer le secret de ses lois, xi, 11, 12, et il exhorte celui-ci, malgré cette douloureuse ignorance, à la piété et à la crainte de Dieu. Certes ce n’est pas là la doctrine d’un pessimiste. — 3° Il n’est pas plus fataliste qu’il n’est pessimiste. Il a des textes qui semblent tout assujettir à l’aveugle hasard, ne, 11, 12. L’homme, d’après d’autres passages, ne saurait agir librement : sa vie, son sort, sa condition ne sont pas dans sa main. Il, 15, 16, 26. Tout ce que Dieu a fait restera éternellement ce qu’il l’a fait. Rien n’y peut être changé ni retranché, m, 14, 15. Il est possible, à ne prendre que les mots, d’entendre les textes dans ce sens. Mais, en fait, ce n’est très certainement pas celui qu’il faut leur donner. Les interpréter de la sorte, ce serait nier l’action divine dans le monde et dans l’homme la liberté. Or il est incontestable que ces deux dogmes sont acceptés par l’auteur de l’Ecclésiaste. Il reconnaît une loi générale immuable, devant laquelle tout finit par plier ; mais en même temps les misères de la vie, dont il parle sur un ton si amer, il les dit expressément causées par la volonté de Dieu, iii, 11, 14 ; vi, 2, 10 ; vii, 14, 15 ; viii, 3, 8 ; x, 5. Il les rapporte aussi à la volonté de l’homme, vii, 30. Partout il parle de la liberté humaine. Il invite à la piété, il exhorte à la modération, il veut que l’on cultive la sagesse, 1, 13-18 ; viii, 16-17 ; il oppose la vraie prudenceà la prudence mondaine, vi, 5, 12, 20 ; vii, 1, 5 ; ix, 13 ; x, 12 ; xii, 10. Est-ce le fait d’un sage qui nie la liberté ? De plus, la cause de tous ces maux, dont il se plaint, c’est l’abus qu’a fait le premier homme de sa liberté, le péché originel, vii, 30. La doctrine de l’Ecclésiaste n’est donc nullement le fatalisme. — 4° On l’a accusé d’épicurisme. Personne ne songe à nier qu’il y a dans son livre des mots et des textes qui d’apparence justifient l’accusation. — 1. Les mots ou expressions’qu’on relève sont : y’ôkal vesâfâh (comedere et bibere), ii, 24, cf. v, 18 (hébreu, 17) ; viii, 15 ; râ’âh tôb (videre bonum), iii, 13 ; éâmah (lœtari), iii, 12, 22. Écartons’âéâh tôb (facere bene), iii, 12, qui n’a pas le sens de « se réjouir », qu’on lui donne. — 2. Les textes sont : ii, 10 ; iii, 12, 22, 23, 24 ; v, 17 ; viii, 15 ; ix, 7, 8, 9 ; xi, 9. Dans tous ces passages, l’Ecclésiaste invite à jouir de la vie, mais une sage exégèse les explique sans difficulté. — 1. Par eux-mêmes d’abord, les mots n’énoncent pas nécessairement l’épicurisme, c’est évident. Ils sont peut-être littérairement peu délicats ; mais qui ne sait que l’hébreu ne doit pas se juger comme nos langues occidentales ? Ils ne signifient pas autre chose que : jouir de la vie et des biens qu’elle nous offre. Or cela même, réglé par la droite raison, n’est pas l’épicurisme, mais la simple et honnête morale convenant à ces temps-là. — 2. Les textes n’ont pas un autre sens, il faut les interpréter selon les deux grande’s pensées du livre. La première pensée est exprimée dans ces passages d’une indicible mélancolie où se sent le vide, des émotions humaines épuisées jusqu’au dégoût. Voilà/ un excès, un désordre qui n’est pas selon la raison. Pour le redresser et placer l’homme dans le vrai, l’auteur ramène celui-ci à l’usage réglé de la vie, dont la condition est Vaurea mediocritas du poète : c’est la seconde pensée générale. Qu’il faille le comprendre ainsi, c’est ce qu’il montre lui - même clairement, quand il dit cent fois que cette joie de vivre est un « don » de Dieu, qu’elledoit être jointe au « travail », à « la crainte de Dieu >, i 1537

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ECCLÉSIASTE (LE LIVRE DE L’)

1538 « la sagesse », à « l’ordre » et à la « paix domestique ». il, 26 ; ix, 9 ; cf. xi, 8-xii, l ; ii, 24 ; iii, 13, 22 ; v, 11, 17. Qui oserait affirmer que cette morale est l’épicurisme païen ? Morale élémentaire, soit ; mais morale irréprochable, convenant à des lecteurs de Salomon vivant sous un régime de rémunérations terrestres. A. Motais, L’Ecclésiaste, Paris, 1877, p. 66-118 ; Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, 4e édit., t. v, p. 69-79. III. Division et analyse. — Il y a dissentiment parmi les auteurs sur la division du livre. Il en est qui le partagent en deux parties, d’autres en trois. Plusieurs en font quatre parties. Quelques-uns même vont jusqu’à sept et treize parties. Les divisions en deux ou trois parties sont les plus communément admises. B. Schàffer, Nette Untersuchungen ûber das Buch Koheleth, Frihourg-en-Brisgau, 1870, p. 172. Nous allons donner dans l’analyse la division en trois parties, parce que c’est celle qui répond le mieux, selon nous, à l’allure libre et quelque peu irrégulière de l’ouvrage. — L’Ecclésiaste comprend un prologue, trois parties et un épilogue. — Prologue. I, 1-11. — Vanité des choses en général. Toutes choses sont vaines : l’homme passe, tandis que tout autour de lui demeure, i, 1-7 ; il ne sait que peu de chose de ce qui est toujours, i, 8-11. — Première partie, i, 12-m, 15. — Vanité des choses dans la vie privée. Vaine est la science. I, 12-18. Vain le plaisir. Il, 1, 2. Vaines les grandes choses faites avec une prudence achevée : les maisons, les vignes, les jardins, les vergers, les réservoirs, ii, 3-11. Comparaison de cette prudence avec la fausse sagesse, ii, 12-17. Et cela aussi est vain ; car le fruit de son labeur, c’est à un autre, à un inconnu qu’on le laisse, ii, 18 23. Mieux vaut jouir de ce que l’on a fait, de ce qui vient de Dieu, ii, 24-26.

— Appendice : Toutes choses ont un temps fixé, et l’homme ne peut rien y changer, iii, 1-15. — Deuxième partie, iii, 16-vi, 6. — Vanité dans la vie civile. Vaine est la douleur de ceux qui s’indignent en voyant d’iniques jugements, iii, 16-22, d’iniques oppressions, iv, 1, 2. Vaine est la jalousie, vain l’effort pour surpasser son semblable, iv, 4-6. Vain est l’homme solitaire (l’avare), que Je dédain des conseils isole de la société, iv, 7-16. — Récapitulation. — Indignation contre l’injustice, iv, 17*v, 7. Cf. G. Gietmann, In Eccl., p. 193. Censure de l’avarice, v, 8-19. Folie du roi qui méprise les conseils, vi, 1-6 ; cf. iv, 13-16. — Amplification. Répétition : 1. Soumission à la volonté arrêtée de Dieu, vt, 7-vu, 1 (Vul^ate) ; cf. m. — 2. Excès dans la légèreté et la joie, vii, 2-7 ; cf. n. — 3. Excès dans la tristesse et l’indignation, vu, 8-15 ; cf. iii, 16. — 4. Louange de la médiocrité, qui se tient entre ces extrêmes, vii, 16-23. — 5. Cause profonde de l’universelle vanité : la femme « dont le cœur est un lacs, et les mains des chaînes », vii, 24-29, et le premier péché, vii, 30. — Troisième partie : Préceptes de sagesse pratique. ( Ils ont des affinités avec ce qui précède. ) viii, 1-xii, 8. — 1° Observe le temps du roi (Dieu), et ne cherche pas à t’y soustraire, viii, 1-8. — 2° Reste calme et froid devant les injustices de ce monde, viii, 9-15. Réjouis-toi modérément. — 3° Réprime le désir de connaître tout ce qui se passe sous le soleil, viii, 16 IX, 1 ; cf. i, 13-18. — 4° Affranchis-toi de tout vain désir. Jouis de la vie, qui est meilleure que la mort, et attends en paix l’heure de la destinée, qui t’est inconnue, jx, 3-12 ; cf. ii, 1-11 ; iv, 1-16. — 5° Cherche la vraie sagesse, IX, 13 X, 3. — 6° Surtout garde-toi de l’indignation, x, 4-15 ; cf. iii, 16 ; iv, 1. — 7° Du reste travaille hardiment et assidûment, x, 16-xi, 6 ; cf. x, 10. — 8° Enfin jouis de la vie, selon Dieu. Souviens-toi de ton Créateur jusqu’à la vieillesse. ( Belle et saisissante description de la vieillesse, xii, 2-8.) xi, 7- xii, 8. — Épilogue. L’Ecclésiaste y loue les « dires des sages », et y proclame que craindre Dieu et observer ses commandements, c’est là tout l’homme ; car le jugement attend chacune de ses actions. Tel est le résumé du livre, xii, 9-16.

DICT. SE LA BIDLE.

IV. Forme, langue. — L’Ecclésiaste est sous le rapj port du style et de la langue unique en son genre. Ne

considérons ici son hébreu qu’en lui-même. On sait qu’à côté de la langue des livres, classique et savante, il y a la langue parlée, nécessairement moins polie et moins pure, avec des mots et des tournures de provenance étrangère. L’hébreu de Qohélét se rapproche plutôt de celle-ci que de celle-là. Son vocabulaire, ses particularités grammaticales, ses périodes qui sentent l’artifice et la recherche, . les sens singuliers attribués à des mots, en font comme un hébreu à part dans les écrits salomoniens. — i. Vocabulaire : 1° Mots aryens : 1. pardesîm, horti (paradis), m, 5 ; — 2. pifgam, sententia, viii, 11. — 2° Mots araméens : 1. békén, tune, viii, 10 ; — 2. bâtai (forme hébr.), otiosus fuit, xii, 3 ; — 3. zemân, tempus, iii, 1 ;

— 4. kisrôn, sollicitudo, iii, 21 ; iv, 4 (industria) ; — 5.’anîân, ratio, i, 13 (peut être hébreu) ; — 6. pésar, explicatio, viii, 1 ; — 7. re’ûf, pastio, I, 14, etc. ; — 8. kebar, i, 10 ; — 9. besal, propter quod, viii, 17 ; — 10. taqan, rectus fuit, i, 15 ; — 11. nekâsîm, v, 18 ;

— 12. zua’, commotus est, xii, 3 ; — 13.’illû, etiamsi, vi, 6 ; — 14. kânas, congregavit, ii, 8, 26 ; — 15. miskén, pauper, iv, 13 ; — 16. medinâh, provincia, ii, 8. B. Schïffer, Neue Untersuchungen, p. 151-155 ; Bohl, De aramaismis libri Koheleth, Erlangen, 1861. La liste des àîtaÇ Xey<S|j.sva et des mots qu’on dit volontiers chaldéens ou usités seulement dans les écrits postérieurs à la captivité de Babylone et particulièrement dans la Mischna, les Targums et les livres rabbiniques, a été dressée avec soin par Frz. Delitzsch, Hoheslied und Koheleth, Leipzig, 1875, p. 197-206 : c’est cette liste, trop abondante, que l’on reproduit encore aujourd’hui. V. C. H. Wright, Ecclesiastes, Excursus iv, p. 488-500. — n. Particularités grammaticales. Les verbes dits lamed-aleph se conjuguent comme les verbes lamed-hé : hôte’pour hôte’, viii, 12 ; yôsâ’pour yôse’dh, x, 5. Quelques-uns nient que ce soit une particularité de Qohélé(. G. Gietmann, In Eccl., p. 24. Certains modes sont relativement très peu usités : l’optatif, vii, 23 ; le subjonctif, vii, 16, 18 ; x, 4. Une autre singularité est la rareté du vav conversif, i, 17 ; iv, 1, 7. Une particularité facile à remarquer est le verbe suivi du pronom personnel qui en est le sujet, i, 16 ; ii, 1, 11, 12, 13, 15, 18, 20, etc. Les participes et les adjeclifs verbaux sont aussi très souvent suivis de leur pronom. Le relatif *, s, composé ou non avec les particules, se lit dans le livre soixante-huit fois : c’est certainement un de ses traits les plus caractéristiques. Voir C. H. Wright, Ecclesiastes, p. 199. — m. La syntaxe des phrases est assez fréquemment irrégulière. — Tel est l’hébreu de Qôhélé(, un hébreu original, comme l’exigeaient le sujet du livre et le cercle dos lecteurs, hébreux et non hébreux, pour lesquels Salomon l’écrivait. Oratoire en général, poétique par endroits, le style de la dernière partie ressemble beaucoup au style de la poésie proverbiale.

V. Texte original. — Le texte original actuel est l’hébreu massorétique. Nul doute qu’il ne représente dogmatiquement et, en un sens, diplomatiquement même l’hébreu primitif. M. G. Bickell, il est vrai, ne le pense pas : il a imaginé deux reconstitutions du texte qui font honneur à la finesse de sa critique, mais que nous ne pouvons admettre parce qu’elles sont difficilement conciliables avec la notion d’intégrité substantielle et d’inspiration. Voir G. Bickell, Der Prediger ûber den Werth des Daseins, Inspruck, 1881, p. 53, 54, 57-110. Cf. Theologische Zeitschrift, 1886, p. 556 et suiv. ; 1887, p. 203 et suiv. ; S. Euringer, Der Masorahtext des Koheleth, "Leipzig, 1890, p. 19-29 ; R. Coruely, Introductio, p. 159-160. Il faut donc s’en tenir au texte actuel. Il ne paraît pas avoir souffert, du moins en ce qui concerne les mots et les consonnes. Les manuscrits présentent sans doute des variantes ; mais de ces variantes très peu portent sur les lettres mêmes, un grand nombre ont trait aux voyelles,

II. — 49 1539

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et aucune ne modifie le texte. Après avoir compare les versions anciennes, grecques, syriaques, coptes, latines, et plus de trois cents citations tirées des écrits juifs des sept premiers siècles, S. Euringer, en somme, n’enregistre par rapport aux consonnes qu’une trentaine de leçons différentes, qui n’atteignent pas la substance du texte. Der Masorahlext des Koheleth, p. 136. Cf. de Rossi, Variée lectiones Vet. Test., Parme, 1780, t. iii, p. 247-204.

VI. Versions. — 1° La version des Septante, qui date de l’an 132 au plus tard, est en général trop littérale, quelquefois au détriment du sens. Aussi est-elle inélégante et assez souvent incompréhensible, par exemple, V, 10 : KaV t£ iv&pi(a tô> rap’aùtîic ; Sti &pyr toû âpâv éqp8aX[ioï ; aùtoû. Le traducteur a rendu l’hébreu en quelque sorte syllabe par syllabe, coupant mal en partie les mots et n’en saisissant pas le vrai sens. Du reste, elle a été corrigée dans la suite, et actuellement il semble impossible de la restituer dans son état originel. Voir G. Gietmann, In Eccle., p. 54-56. Cf. C. H. Wright, Ecclesiasles, p. 50-52. Avec les signes critiques d’Origène, elle forme l’Ecclésiaste hexaplaire, duquel dérive la version syro-hexaplaire de Paul de Tela. C’est sur les Septante que furent faites VItala « des premiers temps de la foi » et la version copte, qui fut retouchée. P. Ciasca, Sacrorum Bibliorum fragmenta copto-sahidica Musei Borgiani, Rome, 1885-1889, t. ii, p. 47. — 2° La Peschito provient aussi de l’hébreu, mais elle dépend notablement des Septante. — 3° Il faut en dire autant de la version latine qu’on lit dans le commentaire de saint Jérôme ; elle se rapproche des Septante « en ce qui ue s’écarte pas beaucoup de l’hébreu » ; il s’y rencontre pareillement quelques adaptations aux autres versions grecques. In Eccle., Pnef., t. xxiii, col. 1011-1012. L’autre version latine est la Vulgate actuelle. Quoique achevée très rapidement, puisque saint Jérôme ne mit que trois jours, avec son maître d’hébreu, à traduire les écrits de Salomon, elle rend exactement l’original ; elle est élégante, recherchée même ; elle ajoute, elle supprime, selon que la clarté l’exige, et aussi le génie du latin. Il est vrai. qu’elle n’est pas absolument sans défauts ; ainsi on lui reproche quelques faux sens et quelques additions discutables ; mais au total, de toutes les versions de l’hébreu, c’est encore celle qui est la plus exacte et la plus apte à reconstituer l’hébreu primitif. G. Gietmann, In Eccle., p. 50-52. Cf. S. Euringer, Der Masorahtext, p. 6-15.

VII. Origine salomonienne. — Toute l’antiquité juive et chrétienne, on peut le dire, regarde Salomon comme étant l’auteur de Qôhélét. Le Talmud et les talmudistes le font clairement entendre. Voir A. Motais, Ecclésiaste, t. ii, p. 7-8. Cf. C. H. Wright, Ecclesiastes, Excursus i, p. 451-459. Les Pères et les écrivains ecclésiastiques, qui rapportent le canon hébraïque, le prouvent également en rangeant l’Ecclésiaste parmi les écrits de Salomon. Que si la Bible massorétique ne le place pas avec les autres écrits de ce roi, c’est pour une raison d’ordre liturgique. Les écrivains des quinze premiers siècles, quels qu’ils soient, l’ont attribué invariablement à Salomon, à partir de la version des Septante transmise par les Apôtres aux Églises qu’ils fondaient. Voir A. Motais, L’Ecclésiaste, t. ii, p. 8-10 (avec les références bibliographiques). La pleine unanimité à cet égard a été brisée par Luther (Pineda, In Eccle., Prxf., v, 1, Paris, 1620) et surtout par H. Grotius (Annotata ad Vet. Test., Paris, 1648, t. i, p. 521). Celui-ci découvrit dans le livre « beaucoup de mots » qui sont d’auteurs venus après l’exil : c’en fut assez pour nier que l’auteur soit Salomon. La négation ne fit que s’accentuer avec le temps. Aujourd’hui tous les non-catholiques, sauf un petit nombre, et même plusieurs catholiques, comme Herbst, Mo vers, et maintenant, en un sens, MM. G. Bickell et F. Kaulen, révoquent en doute ou rejettent l’origine salomonienne du livre. — Pour combattre le témoignage de la tradition, ils

en appellent à un témoignage identique, disentils, donnant comme de Salomon le livre de la Sagesse et celui de l’Ecclésiastique, qui certainement ne sont pas de lui. Comme si ces deux témoignages étaient réellement identiques et non pas, ce que l’on prouve, inégaux et dissemblables. L’un est constant, universel, l’autre partiel et controversé. Saint Augustin, par exemple, écrit que « les savants, doctiores, ne doutent pas que ces deux sapientiaux sont d’un autre auteur que Salomon ». De Civ. Dei, vil, 20, 1, t. xli, col. 554. Rien de pareil lorsqu’il s’agit de l’Ecclésiaste. D’autre part, le livre lui-même, le titre i, l, certains mots, les idées exprimées, le style, l’art achevé avec lequel il est composé, sa parenté de mots, de phrases, de facture, notamment avec les Proverbes et le Cantique (The authorship of Ecclesiastes, Londres, 1880, p. 57-64, 66-82, 99, etc. ; B. Schàffer, Neue Vntersuchungen, p. 92-99), sont une preuve confirmative qu’il vient de Salomon. Salomon, en particulier, y est désigné comme auteur i, 1, 12, 16 ; ii, 4-10 ; xii, 9, 10 ; cf. III Reg., m, 12 ; vii, 1 ; ix, 28 ; x, 12, 23 ; aucun si ce n’est lui, et, en tout cas, aucun comme lui ne réalise la donnée de ces textes. — Fraude pieuse et fiction, dit-on, pur procédé littéraire : l’auteur a pris le nom de Salomon pour concilier à son livre plus d’autorité, moyen du reste usité par l’auteur de la Sagesse, par des psalmistes intitulant leurs Psaumes : « De David, » et par des historiens grecs et latins mettant parfois dans la bouche de leurs héros des discours que ceux-ci n’ont pas prononcés. — Non, d’abord parce que ce genre de fraude ne convient pas à des écrivains inspirés, et ensuite parce que les analogies apportées sont imparfaites et non concluantes. Salomon, il est vrai, parle dans la Sagesse ; mais il ne s’y donne nulle part comme en étant l’auteur. David est nommé dans les titres, mais là seulement et non pas dans le texte des Psaumes ; or il faudrait établir que ces titres sont authentiques, ce qui est difficile. — Quant aux discours amplifiés ou inventés par les historiens, disons qu’il s’agit précisément de discours et non pas de livres entiers, et qu’en outre, en admettant qu’il y ait dans les Livres Saints des discours quelque peu développés, non dans les pensées, mais dans les mots et les expressions seulement, il n’est en fait aucun écrit scripturaire qui soit attribué à un auteur totalement étranger à sa composition. Nous affirmons donc que l’Ecclésiaste a eu Salomon pour auteur, et nous le démontrons t° par le témoignage et 2° par l’examen du livre lui-même. Cf. pour les preuves extrinsèques : B. Schàffer, Neue Vntersuchungen, p. 11-21 ; G. Gietmann, In Eccle., p. 20-23, etc. Pour les preuves intrinsèques : B. Schàffer, p. 24-125.

Objections rationalistes. — Il y en a deux principales (nous écartons celles qui sont faciles à résoudre, cf. R. Cornely, Introductio, ii, 2, p. 170, 171). L’une est tirée de la langue, l’autre des choses dites, toutes deux du livre même ; ce sont elles qui, pour les adversaires, établissent la thèse négative. D’après eux, la langue, avec ses aramaïsmes, ses mots nouveaux, son très rare usage des verbes à certains modes, ses particules composées, ses noms de forme abstraite, son style et sa syntaxe, est récente, au moins postérieure à l’exil. Donc le livre n’est pas de Salomon. « S’il était de Salomon il n’y aurait plus d’histoire de la langue hébraïque. » Frz. Delitzsch, Hoheslied und Koheleth, p. 197. — Seconde preuve : « Les allusions aux choses sociales et politiques qu’on y rencontre ne sont pas de celles qui devraient tomber des lèvres de Salomon. Le Salomon historique, ce chef d’un empire grand et prospère, ne saurait avoir ainsi censuré son propre gouvernement. » Voir nr, 16 ; iv, 1 ; v, 8. « Qôhéléf n’a aucun des sentiments d’un roi ou d’un patriote juif. Il vit dans un temps de servitude politique, sans patriotisme, sans enthousiasme. Parle-t-il des rois, il les voit d’en bas, comme quelqu’un de la foule souffrante. Ses pages reflètent un état d’abaissement qui est causé par le despotisme orien1541

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tel, avec sa corruption, ses injustices, iii, 16 ; iv, 1 ; v, 8 ; vjii, 9 ; ses caprices, x, 5 ; ses révolutions, x, 7 ; son système de délation, x, 20 ; son horreur des réformes. Il doit avoir vécu lorsque les Juifs, ayant perdu leur indépendance, ne formaient déjà plus qu’une province de l’empire persan. » S. R. Driver, An Introduction, p. 441. — Il s’en faut bien que ces raisons soient convaincantes. Elles sont d’ordre interne, relevant uniquement delà critique. Or « les questions d’histoire, telles que sont l’origine et la conservation des livres, c’est par des témoignages historiques avant tout qu’elles doivent être tranchées… ; les raisons internes en général ne sont pas telles qu’on puisse les invoquer, si ce n’est par mode de confirmation… ». Encycl. Providentissimus Deus, § Est primum, t. i, p. xxvii. Et, en effet, examinons ici l’argument tiré de la langue. Il est si peu décisif, que les rationalistes, dont cependant c’est l’argument capital, se partagent, sur la date et l’auteur de Qôhélét, en plus de vingt-quatre groupes différents ; et ces groupes d’opinions, qui se recommandent surtout de la langue, s’échelonnent entre l’an 975 et l’an 4 avant notre ère. La langue et le style ne sont donc pas une preuve péremptoire. (Voir la liste de ces opinions dans G. Gietmann, In Eccle., p. 22, 23.) À vrai dire, en fait, rien ne s’oppose positivement à ce que la langue et le style soient de Salomon. Il suffit, pour s’en convaincre, de remarquer : 1° que l’araméen est un dialecte très voisin de l’hébreu, qu’il a été parlé eu Israël en tout temps, plus ou moins, qu’il a dû l’être notamment dans le royaume de Salomon, qui s’étendait jusqu’à Thapsa, III Reg., iv, 24 ; 2° qu’il y a des raisons de croire que, parlant en général à son peuple, aux Hébreux et aux non Hébreux, aux Araméens, il s’est servi de termes et de tours araméens ; 3° qu’il a dû, en ce cas, choisir de préférence non pas l’hébreu Classique et savant, mais l’hébreu vulgaire, moins pur nécessairement, dans lequel reviennent des mots et des formes non employés ailleurs. Ajoutons enfin que la critique a singulièrement exagéré le nombre de ces irrégularités linguistiques araméennes. Plusieurs n’en sont pas et plusieurs se rencontrent dans des écrits antérieurs, par exemple Jud., v ; Ps. lxviii. L’argument de la langue et des aramaïsmes n’est donc pas probant. Voir G. Gietmann, In Eccle., p. 23-39. — L’autre est moins concluant encore. Tout ce que Qohélél écrit des injustices sociales, des vexations du pouvoir, de l’esprit de révolte, de la justice mal rendue, de l’incertitude sur l’héritier du ^trône, tout cela est général et s’entend de tous les âges. Plusieurs traits conviennent à Salomon. Et pourquoi pas ? Ne pouvait-il savoir que son gouvernement était blâmé, difficilement supporté, vers la fin surtout ? Et s’il le savait, qu’avait-il à cacher ? Le fait est qu’il faut considérer son livre comme une peinture de la vie privée et de la vie sociale ou politique en général, représentant en Orient à peu près tous les pays et tous les temps dans leur universalité. Rien qui exige qu’il soit rapporté à l’époque persane. Conclusion : le témoignage de la tradition établit qu’il a été composé par Salomon, et la critique sagement exercée, loin d’y contredire, le confirme. — Il n’est pas certain qu’il l’ait compose dans sa vieillesse. Plusieurs le pensent. Quelques-uns prétendent, au contraire, que ce fut dans son âge mur, après les Proverbes, mais avant sa chute. Nous croyons plus probable que c’est une œuvre de son repentir et de ses dernières années. S. Jérôme, In Eccle., t. xxiii, col. 1021. Cf. R. Cornely, Inlroductio, II, 2, p. 174-176.

VIII. Inspiration du livre. — Elle ne fait aucune difficulté. Les Juifs l’ont toujours professée, comme le montrent leurs citations assez nombreuses ( Si nai Schiffer, Das Buch Kohelet nach der Auffassung der Weisen des Talmud und Midrasch und der jûdischen Erklârer tfc » Miltelalters, in-8°, Leipzig, 1844, p. 73, 74, 77-104 ; C. 11. Wright, Ecclesiasles, Excursus i, § 5, p. 469), leurs

listes ou catalogues connus, et la lecture offmelle qui s’en fait dans les synagogues. Elle fut discutée vivement entre les deux écoles juives du I er siècle ; mais, remarquons-le, ce n’est pas de la réception de Qôhéléf dans le canon qu’il s’agissait : il y était admis, mais de son exclusion. Discussion du reste ignorée du vulgaire et tranchée affirmativement en l’an 90, au synode de Jamnia. Les objections soulevées, rapportées par saint Jérôme, In Eccle., t. xxiii, col. 1110, tombèrent devant la récapitulation de la fin, xii, 13. II en fut ainsi dans l’Église. Les preuves de sa foi sur ce point sont les citations, les commentaires, la lecture publique et les listes privées ou officielles. Il s’éleva vers le Ve siècle des doutes à cet égard et même des négations. De qui provenaient-elles, il est malaisé de le dire, Philastre, Her., XII, t. cxxxiv, col. 1265-1267, qui les mentionne, n’étant pas clair. Théodore de Mopsueste est explicite : il soutint que le livre n’avait pas été écrit avec l’esprit prophétique, mais suivant une prudence humaine. Il fut condamné au Ve concile œcuménique, II » de Constantinople. Mansi, Coll. conc, t. ix, p. 223. Et depuis lors l’inspiration de l’Ecclésiaste demeura inattaquée. — Il en est qui ont objecté contre elle les doctrines qui y semblent professées et quelques contradictions ; mais celles - ci n’existent pas, et nous avons montré que celles-là n’ont rien que d’orthodoxe. Il est inutile, pour les justifier, de recourir aux conceptions de ceux pour lesquels le livre est une discussion ou dispute où sont émises des opinions fausses que l’on réfute, ou un dialogue vrai ou fictif entre un jeune et ardent philosophe et un sage, ou encore entre un Juif hellénisant et un Juif attaché aux traditions. La vraie conception de ce livre est tout autre ; nous l’avons montré. R. Cornely, Introduclio, ii, 2, p. 158, 159.

IX. Commentaires. — 1° Période palrislique. — Il ne reste des premiers siècles de l’Église que le commentaire « très court et inachevé » de Denys d’Alexandrie, t. x, col. 1578-1588 ; la MsT « çpâ<ri ; « courte, mais très. utile », de saint Grégoire Thaumaturge, t. x, col. 987-1018 ; huit homélies pratiques de saint Grégoire de Nysse sur les trois premiers chapitres, t. xliv, col. 615-754, et le commentaire complet d’Olympiodore, t. xciii, col. 478-628. Ajoutons la Chaîne des Pères grecs, dont l’auteur est CEcumenius (Vérone, 1532). Le meilleur à tous égards des commentaires latins est celui de saint Jérôme, t. xxiii, col. 1010-1116. Il a été souvent abrégé ou reproduit, dans la suite : Salonius, t. lui, col. 993-1012 ; Alcuin, t. c, col. 665-720 ; Walafrid Strabon, Glossa ordinaria, t. cxiii, col. 1115-1126. Plus personnel est le petit commentaire de saint Grégoire pape, Dial., iv, 4, t. lxxvii, col. 321-328. — 2° Période scolastique. — Il existe dix-neuf homélies de Hugues de SaintVictor sur Eccle., i, l-rv, 5, t. clxxv, col. 114-256. Hugues de Saint-Chera un commentaire sur le livre tout entier, ainsi que saint Bonaventure, qui l’explique selon la méthode scholastique. Mais le plus savant et le plus complet commentaire de cette époque est incontestablement celui de J. de Pineda, Commentarii in Eccle., Séville, 1619 ; Paris, 1620.

— 3° Beaucoup d’autres ont paru avant ou après, il serait trop long d’en citer les auteurs et les titres. Nommons seulement J. Férus, Sermones in Eccle. juxta lilteram, Mayence, 1550 ; Corn. Jansénius de Gand, Commentarii, Anvers, 1589 ; J. Lorin, Commentarii, Lyon, 1606 ; Salazar, Expositio in Eccle., Lyon, 1651 ; Bossuet, Nottsin quinque lib. Sap., dans ses Œuvres, Paris, 1867, t. i, p. 529-568.

— 4° Période moderne. — Il s’y rencontre peu de grands travaux catholiques. Indiquons L. van Essen, Der Prediger Salonw’s, Schaffhouse, 1856 ; B. Schàffer, Neue Vntersuchungen ûber das Buch Kohelelh, Fribourg-en-Brisgau, 1870 ; Vegni, Il Ecclesiaste secondo il testo ebraico, Florence, 1871 ; A. Motais, Salomon et l’Ecclésiaste, Paris, 1876 (épuise la matière) ; L’Ecclésiaste, Paris, 1877 ; Rambouillet, L’Ecclésiaste, Paris, 1879 ; G. Bickell, 1543 ECCLÉSIASTE (LE LIVRE DE L’) — ECCLÉSIASTIQUE (LE LIVRE DE L’) 1544

Der Prediger ûber den Werth des Daseins, Inspruck, 1885 ; G. Gietmann, Commentarius in Ecclesiaslen, Paris, 1890, p. 1-336 (commentaire critique et exégétique très approfondi). — Du côté des protestants et des rationalistes, les travaux sont très nombreux, mais d’inégale valeur. Voici les principaux : H. G. Bernstein, (Juœstiones nonnullx Kohelethanx, Breslau, 1854 ; Bohl, De Aramaismis iibri Koheleth, Erlangen, 1860 ; Bullock, Commentaiand critical notes on Ecclesiastes, dans Speaker’s Commentary, Londres, 1878 ; 0. Zôckler, Dos Hohelied und der Prediger, Bielefeld et Leipzig, 1868 ; édition américaine avec annotations et dissertations par Taylor Lewis, Edimbourg, 1872 ; Frz. Delitzsch, dans Hoheslied und Koheleth, Leipzig, 1875, p. 191-462 ; A. H. Mac Neile, An introduction to Ecclesiastes, in-8°, Cambridge, 1904. — On peut voir une histoire de l’interprétation de ce livre dans C ; D. Ginsburg, Cohelet, Londres, 1861, p. 27-243, 495, histoire mise au courant par C. H. H.Wright, The Bookof Koheleth commonly called Ecclesiastes, in-8, Londres, 1883, p.xiv-xvii. Cf. B. Scliâffer, Neue Untersuchengen, p. 7. E. Philippe.

1. ECCLÉSIASTIQUE, un des livres sapientiaux de l’Ancien Testament.

I. Titres du livre. — Le livre de l’Ecclésiastique a porté des noms divers. Son titre hébreu n’est pas connu d’une manière certaine. D’après un passage de saint Jérôme, Prssf. in lib. Salomonis, A. xxviii, col. 1242, il se serait appelé en hébreu d’un mot qu’il traduit par « Proverbes », et qui aurait été par conséquent Mislê Yèsû’a ben Sirach. Le titre grec : 20ç ! o’lrjiioù u’oO Sstpi-/, suppose cependant un autre titre hébreu : ffokmat Yêsû’a ben Sirach. Il est possible que l’Ecclésiastique ait été désigné, dans la langue originale, tantôt sous le nom de MiSlê, tantôt sous celui de Ifokmâh. En grec, le titre du livre est quelquefois abrégé en <ro ?îa Eapdfy, ou même simplement vi ao ?ia. Ce livre partage aussi en grec, avec les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique des cantiques et la Sagesse, le nom générique de r) fcavdpsTOç uoçîa (G. Cédrénus, Hist. cômp., t. cxxi, col. 377), d’où le nom latin de Panssrelus Jesu filii Sirach liber, qu’on lit dans saint Jérôme, Prsef. in lib. Salom., t. xxviii, col. 1242. — Chez les rabbins, il est cité sous le nom de Ben Sirach, et beaucoup plus communément sous celui de Ben Sirà (Sirâ étant, d’après certains critiques, la forme primitive, et Sirach une forme corrompue). — En syriaque, il est appelé « La Sagesse du fils d’Asiro (le lié, le captif) », et plus complètement : « Livre de Jésus le fils de Simon Asiro. » — Dans l’Eglise latine, on trouve parfois le titre de Liber Jesu filii Sirach ; mais le titre communément admis est celui d’Ecclesiasticus, que le concile de Trente a employé dans sa définition du canon des Écritures. Ce nom d’Ecclésiastique a été diversement expliqué. — « Le titre d’Ecclésiastique, que les Latins donnent à cet ouvrage, dit dom Calmet, marque ou l’usage que l’on en a fait en le lisant dans les assemblées de religieux et dans l’Église, ou il sert seulement à le distinguer de celui de Salomon, qui est intitulé l’Ecclésiaste ou le Prédicateur, l’un et l’autre contenant des exhortations à la sagesse et des instructions sur les devoirs communs de la vie. » Ecclésiastique, 1730, Préface, p. 1. Voir d’autres explications dans Rufin, In Symb. Apost., 36, t. xxi, col. 374 ; Rhaban Maur, Comment, in Eccli., t. cix, col. 764. L’explication d’après laquelle le nom d’Ecclésiastique équivaut à celui de Livre de lecture -à l’usage de l’Eglise paraît être la vraie. — Des critiques, tels que Westcott, pensent que le mot Ecclesiasticus, appliqué au livre de Ben Sirach, est d’origine africaine, qu’il fat admis d’abord par la Velus lalina, et devint commun en Occident après que saint Jérôme eut adopte cette traduction pour le livre quinous occupe. — Quant au titre grec de jtavâpEto ; , il doit avoir été employé pour insinuer que le groupe de livres ainsi nommé contient

la règle de toutes les vertus. — Le titre syriaque de « Sagesse de Jésus, fils de Simon le prisonnier », est dû à l’interprétation fautive du mot Asiro, qui représente en le défigurant le nom propre Sirach de l’hébreu. En faisant d’Asiro un qualificatif, « le captif, » on a éprouvé le besoin de préciser le nom propre que l’on regardait comme sous-entendu, et l’on a supposé au hasard le nom de Simon, peut - être en l’identifiant avec le nom de l’un des grands prêtres qui ont jeté le plus d’éclat.

II. Auteur. — Un certain nombre d’écrivains anciens ont attribué l’Ecclésiastique à Salomon ; mais « les plus doctes », dit saint Augustin, De Civ. Dei, xvil, 20, t. XLl, col. 554, n’ont pas voulu dire que le livre était de Salomon ; ils voulaient seulement laisser entendre que par son caractère littéraire ce livre se rattachait au genre gnomique, dont la paternité était attribuée au grand roi d’Israël. Cf. S. Isidore de Séville, In libros Vet. et Nov. Test. Proœmia, 8, t. i.xxxm, col. 158. L’Ecclésiastique nous fait connaître lui-même son auteur. On lit l, 29, en un passage qui est comme la conclusion de tout le livre avant le cantique final : IlaiSei’ocv ouvéuew ; xa’t è(*i<TTir l jjLif]ç l](dipa|a Iv tù (SiëXiqi tovtgi’Irinoûç uiôç 2eipâj(’Iepona-Xv (j.i’ttic. « Jésus, fils de Sirach, de Jérusalem, a écrit la doctrine de sagesse et de science dans ce livre. » Ce texte désigne donc comme auteur du livre un certain Jésus fils de Sirach. Ce renseignement, parfaitement en rapport avec les titres mentionnés plus haut, est confirmé par le prologue du traducteur, qui désigne ainsi l’auteur du livre : 6 jiccjitio ; [iou’Iyiooûç, « mon aïeul Jésus ». Le premier texte nous fournit en outre un second détail sur la personne de l’auteur : il était de Jérusalem.

Ces renseignements sont précis, mais peu abondants. Diverses traditions ont tenté de les compléter. C’est ainsi que saint Isidore de Séville, De officiis, i, 12, t. lxxxiii, col. 749, croyait savoir que Ben Sirach était petit-fils du grand prêtre Jésus, dont parle Zacharie, iii, 1. Le grand prêtre dont il est ici question ne saurait être que Josué ou Jason, fils de Josédec (536 avant J.-C). Nous verrons que cette date est de trois siècles antérieure à celle qu’il faut attribuer à notre livre. — Georges le Syncelle, Chronog. , édit. de Bonn, 1829, t. i, p. 525, identifiait à son tour Ben Sirach avec le grand prêtre Jésus, successeur d’Onias III (175-172). Ainsi Jésus ben Sirach aurait été grand prêtre pendant six ans et le treizième pontife après la captivité de Babylone. Il aurait été le fils de Simon II et le frère et successeur d’Onias III. Toutes ces données sont basées sur de fallacieuses assimilations de noms. On ne saurait confondre l’auteur d’un livre aussi religieux et aussi patriotique que celui qui nous occupe, avec le grand prêtre Jason qui mit tout en œuvre pour introduire les coutumes grecques chez les Juifs, au dépens de l’esprit national. — C’est par des conclusions tout à fait hasardées que l’on a voulu déduire de son livre que Ben Sirach était prêtre. Les passages sur lesquels on s’appuie (vu, 31-35) prouvent simplement qu’il était un pieux Israélite. C’est également sans raison qu’en s’appuyant sur l’éloge qu’il fait de la médecine (xxxviii, 1-15), on a conclu que Ben Sirach était médecin.

Ce que l’on peut déduire plus sûrement de son livre, c’est que Ben Sirach était très versé dans la littérature religieuse des anciens. Il imite le style des écrivains antérieurs, il en reproduit les expressions et parfois des phrases entières. Il connaît tous les livres protocanoniques existant à son époque. Il les mentionne ou s’en inspire dans les fameux chapitres xliv-xlix, consacrés à l’éloge des ancêtres. Il est facile d’établir des rapports entre ces chapitres et les livres suivants : Pentateuque (Eccli., xliv-xlv) ; Josué (Eccli., xlvi, 1-12) ; Juges (Eccli., xlvi, 13-15) ; Samuel (Eccli., xlvi, 16-xlvii, 13) ; les Psaumes de David (Eccli., xlvii, 9-12) ; Rois (Eccli., xl vii, 14-xlix, 9) ; Proverbes, Cantique, Ecclésiaste {Eccli., xlvii, 18 ; douteux en ce qui regarde l’Ecclésiasle ) ; Isaïe (Eccli., xlviii, 23-28, où l’on voit des allu1545

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sions à la seconde partie d’Isaïo aussi bien qu’à la première ) ; Jérémie (Eccli., xlix, 9 ; le ^.8 semble viser les Lamentations) ; Ezéchiel (Eccli., xlix, 9-11) ; les douze petits prophètes (Eccli., xlix, 12) ; enfin les mémoires de Néhémie (Eccli., xlix, 13-15). De ce dernier témoignage on peut même inférer que Ben Sirach connaissait également Esdras. Il connaissait aussi le livre de Job, comme on peut le voir par Eccli., xlix, 9, dont le sens est définitivement fixé par le fragment du texte hébreu découvert en 1896 : « Ezéchiel… fit aussi mention de Job. » Les seuls livres protocanoniques qui ne figurent pas dans ces chapitres sont Daniel et Esther. Ces renseignements, qui nous donnent une si haute idée de la culture intellectuelle et religieuse de Ben Sirach, sont très précieux au point de vue de l’histoire du canon de l’Ancien Testament.

Très versé dans la littérature religieuse d’Israël, Ben Sirach s’est personnellement adonné à la « Sagesse » ; il en a étudié l’origine en Dieu et la communication dans les hommes ; il a décrit la place que doit avoir la pratique de la sagesse dans la vie humaine. Il appartenait à la catégorie des sages, des Ifakamim. Peut-être aussi était-il un scribe, comme on l’a conclu de xxxviii, 24. En tout cas, il est tout à fait étranger à l’esprit pharisaïque, qui devait être plus tard un élément si important dans le judaïsme. — Notons enfin que, de certains passages (xxxiv, 12-13 ; li, 3-13), on peut inférer que Ben Sirach n’était pas toujours demeuré à Jérusalem, mais qu’il avait beaucoup voyagé et couru de grands dangers.

III. Date de composition. — Nous avons sur ce point deux données principales à recueillir. La première de ces données nous est fournie par Ben Sirach lui-même. Dans son livre, en effet, l’éloge des ancêtres d’Israël se termine par le panégyrique du grand prêtre Simon, fils d’Onias, L, 1-23 ; et ce dernier panégyrique dépasse par son étendue et par la magnificence du langage tout ce que notre auteur a dit précédemment à la gloire des plus illustres ancêtres de son peuple. Ce n’est pas témérité de conclure de là que Ben Sirach, en parlant de Simon fils d’Onias, parle de quelqu’un qu’il a vii, admiré et vénéré en union avec tout le peuple. D’ailleurs les paroles : 5 ; êv ïonj aÙToû jnépoa’j/ev olxou, « qui a pendant sa vie soutenu la maison (le Temple), » lesquelles sont au début du panégyrique, supposent que le grand prêtre n’était plus en vie au moment où Ben Sirach écrivait. Cette première donnée tendrait donc à faire regarder notre livre comme composé quelques années seulement après le pontificat de Simon (ils d’Onias, à une époque où le souvenir du grand prêtre était vivant dans toutes les mémoires.

Une seconde donnée nous est fournie par le prologue du traducteur, petit-fils de l’auteur. Il nous apprend qu’il est venu en Egypte à une date très précise, et qu’après y être demeuré un certain temps il a entrépris de traduire l’œuvre de son grand-père. Malheureusement il est assez difficile d’identifier la date précise dont il est question en ce passage : ’Ev tw by&ôm xal rpiaxocrcô) etsi iià toO EùepyiTou ftauiiéto ; . « La trente-huitième année au temps du roi (Ptolémée) Evergètc. » Le traducteur veut-il nous dire qu’il était âgé de trente-huit ans quand il vint en Egypte, sous le règne du roi Évergète ? ou bien veut-il nous dire qu’il vint en Egypte la trente-huitième année du règne d’Évergète ? La première opinion est soutenue par Cornélius a Lapide et autres commentateurs ; la seconde a encore plus de partisans. Elle traduit èm tgû E-iepféTûu par « sous le règne d’Évergète », donnant à la préposition grecque le sens qu’elle a dans I Mach., xiii, 42 ; Agg., i, 1 ; ii, 1 ; Zach., i, 7 ; vii, 2 (Septante). De là il résulte que le traducteur est allé en Egypte la trentehuitième année du roi Évergète. Comme d’ailleurs le traducteur était le petit-fils de l’auteur, il est assez facile de remonter de deux générations jusqu’à la date de Ben Sirach lui-même. En combinant ces deux données, on arrive à un renseignement en apparence très précis, que

l’on peut ainsi formuler : Ben Sirach vivait et composait son livre cinquante ans environ avant que son petit-fils le traduisit, une quinzaine d’années avant le règne d’Évergète, très peu de temps après la mort du grand prêtre Simon fils d’Onias.

Mais une difficulté très sérieuse surgit de ce fait qu’il y a eu deux grands prêtres du nom de Simon : Simon I er, . fils d’Onias, grand prêtre de 310 à 291, et Simon II, fils d’un autre Onias (219-199). De même il y a eu deux Ptolémées qui ont porté le surnom d’Évergète : Ptolémée III, fils et successeur de Ptolémée Philadelphe, qui régna de 247 à 222, et Ptolémée VII, plus connu sous le surnom de Physcon, qui gouverna de 170 à 117. Il ne faut donc pas trop s’étonner qu’il n’y ait pas moins de quatre opinions sur la date à assigner à notre livre de l’Ecclésiastique. — 1° Les uns, tels que Horowitz, Das Buch Jésus Sirach, dans la Monalsschrift des Judenthums, Breslau, 1865, admettent que le traducteur parle de la trente-huitième année du règne d’Évergète et que cet Évergète est Ptolémée VII ; ils croient en outre que le grand prêtre Simon dont Ben Sirach fait l’éloge est Simon I er, dit le Juste. Mais quand le traducteur désigne l’auteur du livre par cette épithète : 6 irimto ; [ioy’lriooO ; , il emploierait le mot 7rinnoç, non dans le sens strict de grand-père, mais dans le sens plus général d’ancêtre. Ce qui explique comment Ben Sirach a pu écrire vers 280, date de Simon I er, et le traducteur vers 130, date qui correspond à la trente-huitième année de Ptolémée VII. — 2° Westcott, dans le Dictionary of the Bible de Smith, admet, avec Winer et de Wette, qu’il est question de Simon I er le Juste ; mais que Ben Sirach pouvait bien encore quelques années avant le règne de Ptolémée VIL faire en termes pompeux l’éloge d’un grand prêtre aussi populaire que le fut Simon 1 er. Par conséquent Westcott admet que le traducteur a écrit sous le règne de Ptolémée VII, et que le mot n<Î7t7ro ; est à prendre au sens strict. — 3° Les partisans de la troisième opinion (Cornélius a Lapide, Welte, Danko, Hug, Keil, Haneberg, etc.) prétendent que Ben Sirach parle de Simon I" le Juste. Ils déclarent en outre, comme d’ailleurs Westcott lui-même le faisait, que la locution êv yàp icj) ôySoM xcù Tpiaxoffrô) exei liA toO EùepféTou désigne, dans la pensée du traducteur, la trente-huitième année de son âge et non la trente-huitième année du règne d’Évergète. Ils préfèrent enfin voir dans l’Évergète dont il est question le roi Ptolémée III. Dès lors le traducteur a vécu sous le règne de ce prince (247-222) ; la date de l’auteur peut se placer vers 280, peu d’années après la mort de Simon I er. — 4° Enfin, d’après la quatrième opinion, le traducteur est venu en Egypte la trente-huitième année du règne de Ptolémée VII ; l’auteur est son grandpère ; il avait écrit environ cinquante ans auparavant, peu de temps après la mort du grand prêtre Simon II, et c’est de ce pontife qu’il nous fait l’éloge. — Cette dernière opinion, qui est celle de Bossuet, Prasf. in Eccli., vii, édit. de Versailles, t. ii, p. 367, de Frz. Delitzsch, de Fritzsche, Die Weisheit Jesus-Sirach’s, p. xm-xvii, etc., nous paraît la mieux fondée.

IV. Mode de composition. — Il existe deux opinions principales sur le mode de composition de l’Ecclésiastique. — 1° D’après les uns, Ben Sirach est le véritable auteur des maximes et des discours contenus dans ce livre et de leur arrangement, quoiqu’il ait dû écrire à diverses époques et emprunter à d’autres livres plus anciens de même qu’aux adages populaires (cf. Eccli., viii, 9-12 ; xxx, 15 [texte grec] ; xxxiii, 16 ; L, 29). — 2° D’après les autres, Ben Sirach, à part quelques parties qu’il faudrait lui attribuer, se serait borné à réunir des collections de proverbes antérieurement existantes. Ils croient retrouver la trace de ces collections diverses dans la structure même du livre, dans la manière dont les séries de sentences se succèdent sans lien apparent, dans des répétitions de plusieurs maximes, reproduites çà et là, 1547

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XX, 29, 30 ; xli, 14, 15, etc, sans qu’on puisse s’expliquer ces répétitions autrement que par la multiplicité des collections, dans certains jugements en apparence contradictoires, etc. Cette opinion remonte pour le fond jusqu’au Pseudo-Athanase, l’auteur de la Synapse de la Sainte Écriture, t. xxviii, col. 1377. Elle peut être soutenue comme la première.

V. Langue originale et histoihe du texte. — L’auteur du Prologue de l’Ecclésiastique déclare que son grand-père avait écrit son livre en hébreu : iêpaïml. Son témoignage est pleinement confirmé par la découverte faite, en 1896, de plusieurs chapitres du texte original. Au Ve siècle, saint Jérôme, Prsef. in lib. Saloni., t. xxviii, col. 1242, avait eu entre les mains le texte hébreu de l’Ecclésiastique. Ce même texte avait été cité aux v « et VIe siècles par divers rabbins ; au vu » et au vm « par les Midraschim ; au IXe par R. Nathan ; au Xe par un gaon de Dagdad, R. Saadyah († 919). À partir du x" siècle, on n’en trouvait plus de trace. Dans un voyage en Palestine fait en 1896, M m8 Agnès Smith Lewis et M me Gibson, sa sœur, firent l’acquisition d’un certain nombre de manuscrits hébreux, la plupart fragmentaires. Au mois de juin 1896, elles les remirent à- M. Schechter, professeur d’hébreu rabbinique à l’université de Cambridge, qui y découvrit deux pages du texte original de l’Ecclésiastique correspondant à Eccli., xxxix, 15-xl, 6. — Presque en même temps un nouveau fragment plus considérable du même manuscrit était arrivé d’une synagogue juive du Caire à Oxford par l’intermédiaire du professeur Sayce. Il correspond à Eccli., xl, 9-xlix, 11. (Voir, fig. 511, le fac-similé des folios 1, recto, et 9, verso, du Bodleian Ms. du texte hébreu de l’Ecclésiastique, reproduits avec autorisation. ) M. Suhechtêr a retrouvé en 1897 dans la même synagogue du Caire une autre partie notable du texte hébreu. D’après M. Neubauer, sousbibliothécaire de la Bibliothèque Bodléienne, à Oxford, le manuscrit remonte au plus tôt à la fin du XIe siècle : il a été probablement composé à Bagdad ou en Perse. Cette dernière conclusion s’appuie sur l’existence de quelques indications qu’on lit dans le manuscrit et’qui sont rédigées en persan. On y remarque aussi un certain nombre de notes marginales qui ont dû être empruntées à des copies différentes. Les variantes proviennent en général d’une série de manuscrits assez bien conservés et présentant souvent la meilleure leçon. Quant au texte (et à quelques rares variantes), il appartient à une famille de manuscrits beaucoup plus altérés. Le manuscrit qui a fourni le texte peut provenir des communautés juives de Babjlonie ; les manuscrits auxquels sont empruntées les variantes peuvent être palestiniens d’origine.

Ben Sirach a écrit en hébreu classique. Sa syntaxe ne renferme aucune trace des constructions particulières au néo-hébreu. Toutefois on rencontre çà et là des expressions et des mots récents ou araméens. Le style, souvent aisé et coulant, est meilleur que celui des Chroniques ou Paralipomènes, etc. Le lexique renferme aussi des particularités : mots anciens employés en des sens nouveaux, verbes à des formes inconnues, expressions que l’on ne trouve nulle part ailleurs dans la Bible.

VI. Version grecque. — Elle a été faite par le petit-fils de l’auteur ; son nom est inconnu ; une tradition ancienne, mais de peu de valeur, lui donne le nom de Jésus fils de Sirach, comme à son grand-père. — La version grecque de l’Ecclésiastique, pas plus que le texte hébreu, n’a été exempte des altérations auxquelles donnent lieu les transcriptions fréquentes des copistes. La comparaison des manuscrits nous fournit de nombreux exemples de ces corruptions : changement de cas, substitutions de noms ou d’adjectifs, suppressions de mots, parfois de vers entiers, interversion dans l’ordre des mots, déplacement de phrases et de distiques. Voici, d’après Westcott, toute une série de passages qui figurent dans le Codex Atexandrinus, le Codex Vaticanus et l’édition de Cam plute, et qui manquent dans les meilleurs manuscrits : 1, 5, 7, 18’, 21 ; iii, 25 ; iv, 23^ ; vii, 2C ; x, 21 ; xii, 6 « ; xiii, ’25* ; xvi, 15, 16, 22 « ; xvii, 5, 9, 16, 17°, 18, 21, 23s 261> ; xviii, 2 b, 3, 27’, 33’; xix, 5'> > 6>, 131>, 14 « , 18, 19, 21, 25° ; xx, 3, l4 b, l7 b, 32 ; xxii, 9, 10, 23s xxiii, 3 « , 4 « , 5<>, 28 ; xxiv, 18, 21 ; xxv, 12, lfc ; xxvi, 19-27 ; l, 29>>. Parfois les désordres sont allés plus loin encore, et des chapitres entiers ont été bouleversés. Le tableau suivant, emprunté aussi à Westcott, donne une idée de ces changements :

Edit. Compl. lai. syr. E. V. Edit. Vat. A. S. C.

xxx, 25 xxxiii, 13, XapKpà-xa^ôss

y., t.), .

XXXI, XXXII XXXIV, XXXV.

xxxiii, 16, 17, Y)Yp-jjrïr, oa. xxxvii, $1-$20. xxxiii, 10 et suivants, ù ;

xa).a(i.(D ; j.eyo ; xxx, 25 et suivants.

    1. XXXIV##

XXXIV, XXXV XXXI, XXXII.

xxxvi, 1-11, çuXà ; ’laxiôo. XXXIII, 1-13. xxxvi, 12 et suivants, xaî

xaTîx).ï)pové(i.7|o<x xxxvi, 17 et suivants.

Les manuscrits ne suffisent pas toujours à rétablir la teneur primitive de la version grecque ; il faut assez souvent avoir recours à la conjecture critique.

Fritzsche, dans son commentaire sur l’Ecclésiastique, estimait qu’entre tous les manuscrits grecs le Codex Vaticanus était celui qui représentait le plus fidèlement le grec primitif. La comparaison que l’on peut établir entre ce Codex et les fragments hébreux paraît confirmer cette conclusion. Les autres codices portent des traces évidentes de relouches, de corrections après coup, et souvent par ailleurs ils sont plus altérés. Entre ces derniers toutefois, Fritzsche attribuait une importance toute spéciale au Codex 248 : ce manuscrit, corrigé d’après l’hébreu, a ceci de remarquable, que les corrections qu’il présente sont du même auteur et que plusieurs d’entre elles étaient déjà connues de Clément d’Alexandrie : ce qui montre que ce manuscrit représente un travail de correction déjà fort ancien, et est par conséquent précieux pour le rétablissement du texte hébreu.

En comparant le grec avec les fragments hébreux, on remarque que la traduction est en général plus conforme aux variantes qu’au texte ; et quand elle s’écarte de ces variantes, c’est souvent pour suivre une leçon hébraïque meilleure. Ce n’est pas à dire que la version reproduise toujours fidèlement la variante ou l’autre leçon ; mais même si la traduction est fautive, on peut reconnaître la leçon qui lui a donné naissance et conclure que la version grecque représente un texte moins altéré que les meilleurs d’entre les manuscrits dont les particularités sont consignées dans les fragments hébreux.

D’ailleurs la traduction est généralement fidèle ; le petit-fils de Ben Sirach connaissait la langue hébraïque et la langue grecque assez bien pour que son travail ne laisse pas trop à désirer de ce chef. Il traduit servilement, rendant chaque mot dans l’ordre où il se trouve dans le texte ; les exemples de traduction large sont rares en somme. Les différences qui existent entre le texte et les versions sont dues à des lectures différentes, quelquefois meilleures que celles du texte hébreu nouvellement découvert. En un mot, cette version présente des ressources très précieuses, pourvu qu’on sache, en la consultant, user de toutes les précautions que suggère la critique et ne donner qu’à bon escient créance aux renseignements qui portent sur de petits détails.

VII. Version latine. — Des auteurs tels que Cornélius a Lapide, Sabatier, G. Bengel, frappés des divergences qui existent entre le grec et le latin, ont prétendu que la version latine avait été faite sur l’hébreu. Celte hypothèse, contre laquelle de Wetle, B. Welte et Westcott n’avaient pas osé se prononcer, était regardée par Fritzsche comme inadmissible et contraire à toutes les vraisem 1551

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doit se comporter dans les diverses situations où il se trouve et éviter le péché. — xxiv, 1-xxxvi, 16. La sagesse, la Loi, et les rapports de l’auteur avec la première. Proverbes, développements et avis sur la conduite de l’homme au point de vue social. — xxx, 28-xxm, 11 ; xxxvi, 16 b -22 (d’après le grec). La conduite sage et juste de l’homme. Le Seigneur et son peuple. — xxxvi, 23- xxxix, 11. Avis et exhortations sur les rapports sociaux. — xxxix, 12-xui, 14. La création et la place que l’homme y occupe. — Comme on le voit, la plupart des subdivisions de cette première partie rentrent les unes dans les autres ; il est impossible qu’il en soit autrement avec un livre tel que l’Ecclésiastique.

2° La secondé partie forme, au contraire, un tout complet parfaitement ordonné, consacré à l’éloge des œuvres divines, xlii, 15-XLlll, et au panégyrique des ancêtres d’Israël. Le plan de l’auteur est facile à suivre. Dans l’hymne au Créateur, Ben Sirach commence par célébrer la grandeur de Dieu et de ses attributs, xlii, 15-25 ; puis il passe en revue les principales merveilles de la création : le soleil, xliii, 1-5 ; la lune, 6-8 ; les étoiles, 9-10 ; l’arc-en-ciel, 11-12 ; la neige, les nuages, la grêle, la tempête, le tonnerre, 13-22 ; la mer et les lies, 23-25 ; il termine en déclarant que ce dont il vient de parler n’est rien en comparaison de ce qu’il ignore. — Dans l’éloge des ancêtres et après un assez long préambule, xuv, 1-15, l’auteur parle successivement d’Enoch, 16 ; de Noé, 17-18 ; d’Abraham, 19-21, d’Isaac, 22, et de Jacob, 23 ; de Moïse, xlv, 1-5, d’Aaron, 6-22, et de Phinées, 23-26 ; de Josué, xlvi, l-#, et de Caleb, 9-12 ; de Samuel, 13-20 ; de Nathan, xlvii, 1 ; de David, 2-1 1 ; de Salomon, 13-25 ; d’Élie, xlviii, 1-11, et d’Elisée, 12-16 ; d’Ézéchias et d’Isaïe, 17-25 ; de Josias, xlix, 1-5 ; de Jérémie, 6-7 ; d’Ézéchiel, 8-9 ; des douze petits prophètes, 10 ; de Zorobabel, 11 ; de Josué fils de Josédec, 12 ; de Néhémie, 31, et de Simon fils d’Onias, ii, 1-21. Les f$. 22-20 sont comme l’épilogue de l’éloge des ancêtres : c’est une invitation à bénir Dieu pour toutes les merveilles qu’il a opérées dans son peuple. Suit la première conclusion de tout le livre, 27-29, et le cantique final additionnel du chapitre u.

XL Doctrine de l’Ecclésiastique. — On peut caractériser d’un mot la doctrine de l’Ecclésiastique : Ben Sirach est avant tout traditionnel. C’est la vieille doctrine juive sur Dieu, sur l’homme, sur les destinées d’outre-tombe, qu’il nous transmet. Il est étranger aux développements qui s’étaient accomplis dans les idées juives en certains milieux, particulièrement à Alexandrie. Les progrès que l’on peut constater en comparant son livre avec ceux de l’ancienne littérature hébraïque ne portent que sur quelques points spéciaux.

1° Dieu. — 1. Le monothéisme de Ben Sirach dérive en droite ligne de celui du Pentateuquè, des prophètes et des sages. Dieu est un, et il n’y a pas d’autre Dieu que Jébovah, xxxvi, 5. Il existe en dehors du monde ; il est absolu, éternel, parfait, xviii, 1-5, 8, 14 ; ses attributs de toute-puissance et de bonté, de justice et de miséricorde, sont décrits comme dans les anciens livres de la Bible, xvi, 13-20. — 2. Ben Sirach en ditil davantage sur la nature divine ? Est-il initié à la conception de la pluralité des personnes divines en une seule nature ? 11 ne le paraît pas : le texte de Eccli., i, 9, « [Dieu] lui-même l’a créée (la sagesse) dans l’Esprit-Saint, » si clair en faveur de la Trinité elle-même, n’est que dans le latin ; le texte de Eccli., li, 14 : « J’ai invoqué le Seigneur, père de mon Seigneur », n’est pas sans difficulté aux yeux de la critique. Toutefois par ce qu’il dit de la sagesse, Ben Sirach nous fait faire un grand pas vers la doctrine du Logos et de sa génération éternelle. — 3. Par rapport au monde, Dieu en est le créateur. xviii, l-5. D’une parole il a produit tous les êtres ; la création est la manifestation de sa toute-puissance et de sa sagesse, xvi, 23-31 ; tous les êtres sont bons et utiles en leur temps. xxxix, 39. Après avoir créé le monde, Dieu le conserve

et le dirige : la création se continue par la Providence. xli, 19-20.

2° L’homme. — Créé lui aussi par Dieu et à son image, l’homme est le prince de la nature, xvii, 1-5. Il est doué d’intelligenCe et de science : Dieu lui a fait connaître la grandeur de ses œuvres, afin qu’il pût célébrer son saint nom. xvii, 6-8. Mais les jours de l’homme sont comptés, et toutes ses voies sont sous les yeux du Seigneur, xvii, 10-13. L’homme est libre et peut choisir entre le bien et le mal, xvi, 14-21 ; mais Dieu est juste à son égard, quoiqu’il reçoive avec miséricorde celui qui revient à lui. xvii, 16-28. Ben Sirach connaît d’ailleurs ce qui est raconté du premier couple humain dans Gen., ni ; il sait que de 1° femme nous sont venus tous les maux, xxv, 33. — L’auteur dit très peu de chose sur les destinées de l’homme. La récompense terrestre occupe la place principale, on pourrait dire unique, dans l’Ecclésiastique comme dans les anciens livres de la Bible, xiv, 22- xv, 6 ; xvi, 1-14. La mort n’a le caractère de récompense ou de châtiment qu’en tant qu’elle est calme pour le juste ou qu’elle vient le délivrer de maux plus terribles que la mort même, xli, 3, 4, tandis que pour le pécheur elle le surprend au beau milieu de la vie, alors qu’il croit ses plaisirs éternels, ix, 16-17. Quant au scheol, c’est toujours le séjour morne et triste où l’on ne loue pas Dieu, xvii, 27-28.

3° Israël. — Dieu s’occupe de tous les hommes et de tous les peuples ; il donne un roi à chaque nation. Mais Israël a une place à part ; il est le peuple choisi, xxiv, 12-16. Au moment où Ben Sirach écrit, le peuple de Dieu est humilié, avili sous le joug étranger. Mais le Sage espère en des jours meilleurs : Dieu, qui a châtié Israël, se montrera à nouveau son protecteur, et bientôt il le délivrera de ses ennemis, xxxvi, 1-19. Le prophète Élie aura une place à part dans cette restauration : c’est lui qui apaisera la colère du Seigneur, lui qui affermira la paix, xlviii, 10. C’est uniquement par cette espérance de la restauration d’Israël que Ben Sirach touche à l’idée messianique : en nul endroit il ne parle directement du Messie.

4° La sagesse. — 1. Comme le livre des Proverbes, l’Ecclésiastique donne une très grande place à la doctrine de la sagesse ; et à cet égard Ben Sirach est en progrès sur les auteurs qui l’ont précédé. La sagesse a son origine en Dieu ; elle vient du Seigneur et demeure avec lui à jamais, i, 1. Elle est éternelle ; elle a été produite la première de toutes choses, avant le temps, dès le commencement, dès l’éternité. I, 4. Venue de Dieu et demeurant en Dieu, la sagesse se manifeste en toutes les œuvres divines ; Dieu l’a répandue sur toute la création. I, 9. Quant à l’homme, Dieu la lui communique ; il l’a répartie à ceux qui l’aiment et ils en retirent d’immenses avantages : la sagesse, qui produit en eux la crainte du Seigneur, réjouit leur cœur, leur assure une longue vie et une fin tranquille, i, 10-13. Toutefois c’est en Israël surtout que la sagesse fixe son séjour, xxiv, 11 - 20, — Un trait particulier à Ben Sirach consiste en ce qu’il regarde la sagesse en tant qu’elle se communique à l’homme et qu’elle est l’objet de sa connaissance, comme incarnée dans la loi mosaïque, xxiv, 32-33. D’ailleurs la sagesse est un abîme de science : les prophètes y ont puisé ; les sages y ont puisé ; Ben Sirach y puise à son tour, et la source n’est jamais tarie, xxiv, 38-47. — 2. Si la sagesse est ainsi offerte par Dieu à l’homme et si elle produit de si précieux fruits, l’homme doit faire tout son possible pour l’acquérir et pour y faire participer les autres. VI, 18-23. — Or, en lui et dans les autres, cette sagesse doit produire des résultats pratiques. Elle doit produire la foi en Dieu, l’espérance ; elle doit engendrer l’amour, qui lutte jusqu’à la mort pour la justice et contre la tentation ; la religion ou la crainte de Dieu sera la perfection, le comble de la sagesse, i, 16. Comme la Loi occupe une grande place dans les préoccupations de Ben Sirach, le sage est invité à en observer toutes les ordonnances cultuelles, vii, 32-35 ; là toutefois, Ben Sirach 1553

    1. ECCLÉSIASTIQUE##

ECCLÉSIASTIQUE (LE LIVRE DE L’)

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se montre très éloigné des exagérations du pharisaïsme.

— 3. La sagesse ne règle pas seulement les rapports de l’homme avec Dieu, mais elle pénètre dans tous les détails de sa vie morale. C’est elle qui lui fait éviter l’orgueil, l’avarice, l’impureté et les autres vices qui souillent l’âme, x, 14 30, etc. ; elle qui bannit de la société le fléau de la mauvaise langue, elle qui règle les devoirs des divers membres de la famille et de la société, xlii, 9-14, etc. — Nous ne pouvons entrer dans tous les détails de cette morale ; c’est la morale juive traditionnelle, bien rudimentaire encore si on la compare à la morale chrétienne ; mais bien élevée, au contraire, si on la met en parallèle avec les diverses morales du paganisme.

XII. Autorité de l’Ecclésiastique chez les Juifs et CHEZ les chrétiens. — Il est étrange qu’un livre aussi traditionnel que l’Ecclésiastique n’ait pas été universellement reçu par les Juifs ; il n’a pas été admis dans le canon des Écritures par les Juifs de Palestine. On ne saurait expliquer cette anomalie en disant que le livre n’était pas ou était peu connu dans son texte original ; la découverte dont nous avons parlé prouve, au contraire, que le livre hébreu a été répandu dans les milieux palestiniens et y a été maintes et maintes fois copié. La véritable raison semble être que, si le canon n’était pas clos à cette époque, on n’y admettait néanmoins que des livres anciens ou se recommandant de noms vénérés en Israël. Or Ben Sirach était un contemporain ; peut-être même que les persécuteurs contre lesquels il avait protesté durant sa vie ne lui firent pas grâce après sa mort. Il se peut aussi que, selon la remarque d’Ewald (Jahrbùcher der Biblischen Wissenschaft, t. ix, 1858, p. 190), ce livre fût considéré comme formant double emploi avec les Proverbes salomoniens, et que cette raison ait contribué à le faire définitivement exclure du canon palestinien. À certaines époques, en effet, les Proverbes de Ben Sirach paraissent avoir été comme sur la limite du recueil officiel, même dans les communautés juives asiatiques ; l’Ecclésiastique est cité une fois dans le Talmud (Talmud babylonien traité Baba Qama, ꝟ. 92 b), comme appartenant à la classe des ketubim ou hagiographes, et avec la formule « comme il est écrit a, réservée aux écrits canoniques. D’ailleurs même après avoir été exclu du canon palestinien, il est cité avec honneur par les rabbins ; il est considéré comme un livre bon à lire. Le Talmud, dans plusieurs de ses traités, lui emprunte nombre de proverbes. Il faut, en effet, identifier avec notre auteur ce Ben Sira auquel sont attribuées quatre-vingts sentences environ : la concordance qui existe entre le texte hébreu et plusieurs de ces sentences ne laisse aucun doute sur cette identification (cf. Cowley et Neubauer, The original Hebrew of a portion, of Ecclesiasticus, p. xix-xxx). — Quant aux Juifs alexandrins, ils ont toujours regardé ce livre comme canonique.

L’Ecclésiastique n’est parvenu aux Églises chrétiennes que dans la traduction grecque, et les doutes qui avaient plané sur sa canonicité dans la synagogue ont eu leur écho dans l’Église. — Il est difficile de déterminer si ce livre a été cité dans le Nouveau Testament. Nulle part il n’est allégué avec la formule consacrée aux Écritures canoniques de l’Ancien Testament. Si en certains cas on peut établir des rapprochements entre des passages de l’Ecclésiastique et tel ou tel écrit du Nouveau Testament, Joa., xiv, 23, Luc, XII, 10, notamment l’Épître de saint Jacques, I, 19, ces rapprochements sont trop vagues pour qu’en stricte logique on puisse conclure à un emprunt direct. — Quant aux Pères, le premier qui cite le livre de Ben Sirach d’une manière précise et certaine est Clément d’Alexandrie, et en trente endroits de son Pxdag., i, 8, etc., t. viii, col. 325, 329, etc., il le cite comme Écriture ; il en présente les extraits comme étant la voix du grand Maître. Origène le cite à son tour, avec la formule « comme il est écrit. » In Numer., Hom. xviii, 3, t. xii, col. 714. Les autres écrivains de l’école d’Alexandrie, notamment

saint Athanase, Ëpistol. ad Episcopos Egypti, 3, t. xxv, col. 540, en parlent dans les mêmes termes. D’ailleurs les Églises d’Orient, avec saint Cyrille de Jérusalem, Catech., 11, 9, t. xxxiii, col. 716, et saint Épiphane, Hœr., 24, 6, t. iii, col. 316, en Palestine ; saint Jean Chrysostome, Ad vid. jun., 6, t. xlviii, col. 608, et Théodoret, In Dan., 1, 9, t. lxxxi, col. 1278, à Antioche ; saint Basile, In Psalm. xiv, 10, , t. xxix, col. 257, saint Grégoire de Nysse, De vita Moysis, t. xliv, col. 357, et saint Grégoire de Nazianze, Orat. xiv, 30, t. xxxv, col. 898, en Cappadoce ; saint Éphrem, Opéra gr. lat., Rome, 1732, 1. 1, p. 71, 76, 77, etc., à Édesse, le reçoivent bientôt sans aucun doute comme Écriture inspirée. Plus tard toutefois, saint Jean Damascène, De fide orth., iv, 17, t. xciv, col. 1180, émet des doutes sur son inspiration, et l’Église d’Abyssinie ne l’admet que pour l’instruction des enfants. — En Occident, la défiance à l’égard de l’Ecclésiastique persiste plus longtemps. Néanmoins saint Cyprien, De mortalit., 9, t. IV, col. 588 ; saint Ambroise, De bono mortis, 8, t. XIV, col. 556, saint Optât, De schism. Don, , iii, 3, t. xi, col. 1000, le traitent avec le même respect que l’Écriture, qu’un livre protocanonique. Saint Augustin, De civil. Dei, xvil, 20, t. xli, col. 554, croit même pouvoir dire que l’autorité de l’Ecclésiastique, comme d’ailleurs des autres livres deutérocanoniques, est acceptée depuis longtemps dans l’Église et surtout en Occident ; et il l’emploie contre les hérétiques. Saint Jérôme, Prsefal. in libr. Salorn., t. xxviii, col. 1242, 1243, au contraire, tout en le considérant comme inspiré, émet des doutes sur sa canonicité et pense que, si on peut l’employer pour l’édification des fidèles, on ne saurait s’en servir pour prouver le dogme. — Toutefois le courant traditionnel s’accentue vite en faveur de la canonicité de l’Ecclésiastique ; le décret du pape saint Gélase devient de plus en plus la règle de la foi. Et c’est bien l’idée de la tradition tout entière que consacre le décret du concile de Trente en définissant l’inspiration et la canonicité du livre de Ben Sirach.

Depuis lors les protestants sont les seuls à en rejeter la valeur scripturaire. Les raisons qu’ils allèguent ne sont pas des plus sérieuses. C’est ainsi que Raynald veut y reconnaître trois erreurs très graves : le chapitre xxiv favoriserait l’arianisme ; le chapitre xlvi, par ce qu’il dit de Samuel, favoriserait la nécromancie, et enfin le rôle attribué à Élie au chapitre xlviii consacrerait une superstition judaïque. Exposer de telles raisons, c’est les réfuter. Aussi bien les protestants d’aujourd’hui n’y attachent-ils que peu de valeur. — Remarquons, à propos de la définition du concile de Trente, que, selon l’avis de graves exégètes, elle ne porte en aucune façon sur le Prologue, œuvre du traducteur, et que ce Prologue n’est pas considéré comme inspiré. (Cf. Laur. Veith, Script, sacra contr. incred. propugnala, Malines, 1824, p. 328.)

XIII. Commentateurs principaux. — En partie peut-être à cause des doutes qui planaient sur sa canonicité, à cause aussi de sa forme et de son caractère gnomique, le livre de l’Ecclésiastique, comme celui des Proverbes, a été peu commenté par les Pères. On ne trouve guère que les courtes explications que saint Patère a recueillies dans les livres de saint Grégoire le Grand, t. lxxix, col. 922-940. D’après Cassiodore, t. lxx, col. 1117, saint Ambroise et saint Augustin auraient fait des homélies sur l’Ecclésiastique, mais elles ont péri. Rhaban Maur, t. cix, col. 763-1126, est le premier qui ait commenté le livre de Ben Sirach, et c’est de son commentaire que Walafrid Strabon a tiré la Glose ordinaire de notre livre, t. cxiii, col. 1183-1230. — Au moyen âge, parmi les commentaires des Postilles, celui de Nicolas de Lyre occupe la première place. — Aux xvie et xviie siècles, les commentaires de l’Ecclésiastique sont plus nombreux ; citons ceux de : Cornélius a Lapide, in-f°, Anvers, 1664 ; de Paul Palazio de Salazar, in-8°, Cologne, 1593 ; d’Oct. de Tufo (pour les chap. i-xviii seulement), Cologne, 1628 ; 1557

    1. ECCLÉSIASTIQUE##

ECCLÉSIASTIQUE (LE LIVRE DE L’) — ÉCHANSON

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de Jean" de Pina., Lyon, "1630-1648, etc. etc. — Au xviii » siècle, dora Calmet est le principal commentateur de l’Ecclésiastique, in-4°, Paris, "1714. — Au xixe siècle, citons : M. Lesêtre, L’Ecclésiastique, in-8°, Paris, 1880, parmi les catholiques. Le meilleur commentaire protestant est celui de O. Fritzsche, Die Weisheit JésusSirach’s dans le Kurzgefassles exegetisches Handbuch zu den Apocryphen der Alten Testaments, in-8°, Leipzig, 1860. — Les fragments hébreux découverts en 1896 ont été publiés par E. A. Cowley et Ad. Neubauer, The original Hebrew of a portion of Ecclesiaslicus (xxxix, 15 to XLlX, 11) together with the early versions and an English translation followed by the quotations from Ben Sira in rabbinical literature, in-8°, Oxford, 1897. Sur le texte hébreu de l’Ecclésiastique, voir J. Halévy, Étude sur la partie du texte hébreu de l’Ecclésiastique récemment découverte, in-8°, Paris, 1897 ; J. Touzard, L’original hébreu de l’Ecclésiastique, in-8°, Paris, 1897 ; R. Smend, Dos hebrâische Fragment der Weisheit des Jésus Sirach, dans les Abandlungen der Gesellschaft der Wissenschaften zu Gôttingen, 1897.

J. Touzard.

2. ECCLÉSIASTIQUES (LIVRES), nom donné quelquefois aux livres deutérocanoniques (Ruiin, Comm. in symb., 38, t. XXI, col. 374), parce que, quoique dans lès premiers siècles ils ne fussent pas admis de tous comme Écritures canoniques, on les lisait cependant dans l’Église pour l’édification des fidèles.

    1. ÉCHAÏA##

ÉCHAÏA (hébreu : Ahiyyâh ; Septante : ’A fa), un des chefs du peuple qui signèrent le renouvellement de l’alliance sous Néhémie. H Esdr., x, 26.

ÉCHALOTTE. Voir Ail, t. 1, col. 310-311.

    1. ÉCHANGE EN NATURE##

ÉCHANGE EN NATURE (hébreu : femûrâh ; Septante : àvTaXX « Y|A5t, aXXavixa ; Vulgate : commutatio), transaction en vertu de laquelle un vendeur cède la propriété d’un objet quelconque à un acheteur, en recevant de celui-ci un autre objet qu’il estime avoir une valeur équivalente. — Dans les derniers temps du peuple juif, les achats se faisaient ordinairement, comme aujourd’hui, au moyen de la monnaie frappée (voir Monnaie) ; mais antérieurement, avant l’époque des rois perses, lorsqu’on n’avait pas encore inventé la monnaie proprement dite, les ventes et achats se faisaient soit par des échanges en nature, soit à l’aide de métaux précieux. Cf. Gen., xlvii, 14-25. Les Égyptiens avaient imaginé des coupures d’or et d’argent d’un poids déterminé, qui jouaient le rôle de notre monnaie. Les Hébreux devaient avoir des coupures de ce genre (seror Itaspô), Gen., xlii, 35 ; cꝟ. 25, 27-28 ; xlhi, 12, 15, 18, 21-23 ; Deut., xiv, 22-26. Ce qui est du moins certain, c’est qu’ils faisaient quelquefois usage dans leurs transactions, surtout lorsqu’il s’agissait d’achats importants, de fragments de métaux d’un poids fixe dont l’unité était le sicle. Gen., xxiii, 15-16. Voir Sicle. Pour s’assurer qu’il n’y avait pas de fraude dans les poids, on avait soin d’ailleurs de peser toujours le métal qui était donné en payement. Gen., xxm, 16. Voir Balance, t. i, col. 1403-1404. Dans la plupart des cas, lorsqu’il s’agissait de menues ventes, les échanges se faisaient en nature. Une peinture fort curieuse, sur un tombeau de Saqqarah (fig. 512), fait assister, en quelque sorte, aux transactions de ces siècles primitifs. Elle remonte à la Ve djnastie, et par conséquent est antérieure à l’époque du patriarche Abraham. Non seulement elle nous met sous les yeux les scènes elles-mêmes, mais les légendes hiéroglyphiques qui les accompagnent nous en donnent l’explication. Le marchand est assis, comme aujourd’hui encore en Orient, devant les marchandises qu’il met en vente. L’acheteur est debout, tenant dans ses mains les objets qu’il lui propose en échange. Dans le registre supérieur, nous voyons

d’abord, à droite, un marchand de sat. « Voici pour toi de la liqueur sat douce, » ditil à l’acheteur. Celui-ci lui présente une paire de sandales en disant : « Voici pour toi des sandales solides. » Derrière lui, un autre Égyptien s’avance pour acheter à son tour, en offrant en échange un petit coffret.’La scène suivante, à gauche, figure un marchand de poissons ; il en tient un à la main, et l’on en voit quatre autres dans une nasse placée devant lui. Une ménagère vient lui en acheter. Elle porte dans un coffret placé sur son épaule ce qu’elle va donner en échange au vendeur. Derrière elle, une autre acheteuse offre des vases à un marchand accroupi devant elle.

— Sur le registre inférieur, à droite, deux acheteurs viennent acheter des oignons et des céréales. « Fais voir, donne l’équivalent, » dit le marchand au premier personnage qui tient sous le bras gauche une sacoche et qui vient d’en tirer un collier de verroterie multicolore qu’il offre au marchand ; il tient un autre collier dans la main gauche. Le second personnage va faire ses achats en échange d’un éventail qu’il tient de la main droite et d’un attise-feu qu’il a dans la main gauche. — Dans la dernière scène, deux hommes, à droite, sont en pourparlers ; celui de gauche offre trois hameçons qu’il porte de la main droite. Enfin une femme portant un coffret sur l’épaule débat les prix d’échange avec un marchand d’habits. Voir G. Maspero, Gazette archéologique, t. VI, 1880, p. 97 ; Id., histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. r, 1895, p. 323. — Ce qui se passait ainsi en Egypte se faisait d’une manière analogue en Palestine. Aujourd’hui encore, en Orient, où la monnaie est rare dans les villages et parmi le peuple, les ventes et les achats de denrées et d’objets usuels ne se font pas autrement. C’est ainsi que nous avons vu à Latroun, au pied des montagnes de Juda, les Arabes acheter aux Trappistes des choux-fleurs en leur donnant en échange une poignée de blé ou deux œufs de poule. — Plusieurs passages des Écritures font allusion à ces échanges en nature. Job, xxviii, 17, dit qu’on ne peut acheter la sagesse en donnant en échange (temûrâh) des vases d’or. Cf. Job, xv, 31 (hébreu) ; Lev., xxvii, 10, 33 ; Ruth, iv, 7 ; IVReg., v, 26 ; Is., lv, 1 ; Ezech., xxvii, 27 (Ma’ârdbêk) ;

PS. XLHI (XLIV), 13. F. VlGOL’ROUX.

    1. ÉCHANSON##

ÉCHANSON (hébreu : maSqéh, de Sâqâh, « boire ; » Septante : àpxtoivo ; (<50ç ; « chef des échansons ; » ohox^o ; ,

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513. — Ecbanson égyptien. Kléthya.

D’après ChampolUon, Monuments de l’Egypte, U ii, pi. cxi.n. « échanson ; » Vulgate : pincerna), officier chargé de verser à boire au roi et de tout préparer en conséquence.

— La Genèse, xl, 2-23, raconte que, dans la prison

égyptienne où fut enfermé Joseph, arrivèrent un jour deux prisonniers de marque qui avaient encouru la colère du roi, le grand panetier et le grand échanson. Ce dernier était le chef des échansons de la cour. Il décrit lui-même ses fonctions dans le récit qu’il fait à Joseph du songe qu’il a eu : « Je voyais devant moi une treille ; elle avait trois branches ; il y croissait des bourgeons, puis des fleurs et des raisins qui mûrissaient. J’avais en main la coupe du pharaon ; je pris les raisins, j’en exprimai le jus dans la coupe et je la tendis au pharaon. » Les échansons sont souvent représentés sur les monuments égyptiens (fig. 513). Il y avait alors des vignes en Egypte, et l’on y importait du vin de Syrie et d’ailleurs. Les riches n’avaient pas seuls le privilège d’en boire : le vin était d’un usage général, et, à en croire les monuments, il arrivait assez souvent qu’on en abusait. Voir F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. ii, p. 39-40, 73-82. Dans des entrepôts ou « maisons du vin » se conservaient les provisions destinées à la table royale, et à la tête de ces magasins étaient des préposés de haut rang dont l’office se combinait avec celui des échansons. Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, t. i, 1895, p. 284-286. Quand Joseph eut expliqué à l’échanson le sens du songe qu’il avait eu, cet officier sortit bientôt de prison et fut rétabli dans son emploi. C’est seulement par la suite qu’il se souvint de l’interprète et le fit venir à la cour pour expliquer les songes du pharaon. Gen., xi, i, 12-14. — Le texte sacré, III Reg., x, 5 ; II Par., IX, 4, énumére des échansons parmi les officiers dé la cour de Salomon. — D’après le texte grec du livre de Tobie, i, 22, un neveu de ce saint personnage, Achiacharus (voir t. i, col. 131), était échanson du roi d’Assyrie Sacherdon ou Asarhaddon. On voit sur plusieurs monuments assyriens des échansons remplissant des coupes et les apportant aux convives (voir fig. 389, col. 1077). — Il y avait aussi des échansons à Suse, à la cour du roi de Perse Assuérus (Xerxès I er). Quand celui-ci donna ses grands festins pendant cent quatre-vingts jours (voir t. i, col. 1142), des officiers royaux étaient préposés à chaque table, et parmi eux des échansons, « sans qu’aucun obligeât à boire ceux qui ne voulaient pas. s.Esth., i, 8. — Néhémie était échanson du roi Artaxerxès dans la même ville de Suse. II Esdr., i, 11. — Sur l’architriclinus, le maître d’hôtel des noces de Cana,

voir t. i, col. 936.
H. Lesêtre.
    1. ÉCHELLE##

ÉCHELLE (hébreu : sullàm ; Septante : yllu.il ; Vulgate : scala), instrument portatif, composé de deux montants en bois, qui réunissent et supportent des bâtons disposés l’un au-dessus de l’autre en forme d’escalier. Elle sert à monter et à descendre. L’échelle, employée aux usages ordinaires, n’est pas mentionnée dans la Bible. Nous ne pouvons douter cependant qu’elle n’ait été connue de bonne heure, puisque Jacob vit en songe à Béfhel une échelle, sullàm, qui s’élevait de terre et touchait le ciel, et sur laquelle les auges de Dieu montaient et descendaient. Gen., xxviir, 12 et 13. Cette échelle gigantesque était un symbole de la providence par laquelle Dieu veille constamment sur les hommes et dont les anges sont les ministres. Voir t. i, col. 1672-1673. Elle est aussi un indice certain de l’emploi habituel de l’échelle à cette époque reculée de l’histoire. Les songes divins, en effet, aussi bien que les songes humains, présentent à l’imagination de l’homme endormi des images d’objets qui l’entourent et dont il peut saisir facilement la signification. Les rabbins distinguaient l’échelle de Tyr, qui était courte, de l’échelle égyptienne, qui était longue. Talmud de Jérusalem, Eroubin, ix, 1, trad. Schwab, Paris, 1881, p. 288. — L’échelle peut devenir machine de guerre et servir à tenter l’assaut d’une ville assiégée. L’application des échelles aux remparts pour forcer l’entrée d’une forteresse est le procédé ! e plus anciennement employé, et on le voit souvent représenté sur

les bas-reliefs égyptiens (voir t. i, fig. 286, col. 1CC2) et assyriens (t. i, fig. 261, col. 983), comme chez les Romains (fig. 514). Il est indiqué une fois seulement dans la Bible. Lorsque Judas Machabée alla au secours de la forteresse de Dathéma pour la délivrer, les Syriens, qui en faisaient le siège, s’armèrent d’échelles et de machines de guerre pour l’emporter d’assaut, mais sans succès.

SU. — Soldat romain portant une échelle do s ; <ge. D’après FrOhner, Xa colonne Trajane, pi. 115.

IMach., v, 30. L’échelle dut servir aussi à d’autres sièges, dans les guerres racontées dans les Livres Saints, quoique ce soit le seul passage où elle soit nommée.

E. Makgenot.

ÉCHI (hébreu : ’Êhî ; Septante : ’Ay^iç), un des fils de Benjamin. Gen., xlvi, 21. Les Septante font Échi fils de Bala, et par conséquent petitfils seulement de Benjamin. Échi semble être le même que Ahiram de Num., xxvi, 38. Voir Ahara, t. i, col. 290. Dans la généalopie donnée dans la Genèse, il faut unir à Échi une partie du mot suivant, Ros : n>sn wNni iro », et l’on retrouve la généalogie des Nombres : Dnsur DnmN. Le ii, mem, ; ï été pris pour un N, aleph ; et après avoir fait deux mois on a ajouté naturellement la conjonction i, vav, « et. » De plus, le vi, schin, doit s’unir au mot suivant. Tous ces noms des enfants de Benjamin ont été maltraités par les copistes. Voir t. i, col. 1589. E. Levesque.

ÉCHO (v^<i), son réfléchi ou renvoyé par un corps solide de telle sorte que l’oreille l’entend de nouveau

une ou plusieurs fois, et lieu où se produit cette répétition du son. L’écho est mentionné par l’auteur du livre de là Sagesse, xyn, 18, dans sa description de la plaie des ténèbres en Egypte. Cette plaie, dit-il, avait tellement effrayé les Égyptiens, que tout devenait pour eux un sujet de nouvelle terreur, même l’écho, àvTavaxXw[iÉviri èx xoi-Xotixtuv (xotXdTTjToç, Deane, The Book of Wisdom, in-4°, Oxford, 1881, p. 101, 208) ôpéwv fix**" ; * l’écho répercuté du creux des montagnes. » La Vulgate n’a pas rendu rigoureusement tous les mots grecs ; au lieu de traduire : « du creux des montagnes, » elle dit : « des montagnes très hautes. » — Les Septante ont employé le mot -Jj^û dans deux autres passages de leur version, mais sans qu’il soit question d’un écho proprement dit dans le texte original. III (I) Reg., xviii, 41 (hébreu : hâmôn, « bruit » ), et Job, iv, 13 (hébreu : liazôn, « vision » ).

F. Vigouroux.

    1. ECLAIR##

ECLAIR (hébreu : bârâq, et une fois bâzâq, Ezech., I, 14 ; poétiquement, ’ôr, « lumière, » Job, xxxvi, 32 ; xxxvii, 3, 4, 11, 15 ; liâzîz, « trait, » Job, xxviii, 26 ; xxxviii, 25 ; Zach., x, 1 ; liés, « flèche, » Ps. xvii, 15 ; Hab., iii, 11 ; Septante et Nouveau Testament grec : âorpami ; Vulgate : fulgur), vive lumière produite par le dégagement de l’électricité atmosphérique. — Les éclairs sont fréquents en Palestine, surtout en automne. La Sainte Écriture parle de l’éclair dans un certain nombre de passages, à l’occasion des phénomènes atmosphériques qu’il accompagne. Voir Tonnerre. D’autres fois l’éclair est pris pour la foudre elle-même. — 1° Il est fait mention de l’éclair dans les théophanies où Dieu apparaît entouré de toutes les puissances de la création, comme au Sinaï. Exod., xix, 16. L’éclair accompagne les manifestations de la justice divine. Exod., ix, 23 ; Il Reg., xxii, 15 ; Ps. xvii, 15 ; i.xxvi, 19 ; xcvi, 4 ; cxliii, 6 ; Nahum, i, 3-6 ; Zach., ix, 14 ; Apoc, iv, 5 ; viii, 5 ; xi, 19 ; xvi, 18. — 2° L’éclair est un phénomène naturel qui excite l’admiration de l’homme. Job, xxxvii, 15 ; Dan., m, 73. Sa rapidité est merveilleuse. Job, xxxviii, 3, 4, 11 ; Matth., xxiv, 27 ; Luc, x, 18 ; xvii, 24. Sa lumière est si éblouissante, qu’on lui compare les objets les plus brillants. Ezech., i, 13, 14 ; Nah., ii, 4 ; ïlabac, iii, 11 ; Dan., x, 6 ; Matth., xxviii, 3. L’éclair est ordinairement suivi d’une abondante chute de pluie. Ps. cxxxiv, 7 ; Jer., x, 13 ; Ll, 16. — 3° Ce n’est pas l’homme qui commande à l’éclair. Job, xxxviii, 35. C’est Dieu seul qui le fait briller et le dirige, et l’éclair lui obéit. Job, xxviii, 26 ; xxxvi, 32 ; xxxviii, 35 ; Zach., x, 1 : « le Seigneur donnera frtïzîzîm, » les éclairs ; Septante : çavrccafaç ; Vulgate :

nives ; Bar., vi, 60 ; Sap., v, 22.
H. Lesêtre.
    1. ECLIPSE##

ECLIPSE, occultation momentanée, soit partielle, soit totale, de la lumière du soleil ou de la lune. Quand le soleil, la terre et la lune arrivent à se trouver exactement sur la même ligne droite, une éclipse de soleil peut se produire si la lune est placée entre cet astre et la terre ; on a, au contraire, une éclipse de lune si la terre se trouve entre les deux autres astres. L’éclipsé est partielle ou totale pour un point donné de la terre, suivant que l’astre interposé cache en partie ou en totalité la lumière envoyée à la terre par le soleil ou par la lune. Les anciens Égyptiens ne savaient pas se rendre compte du phénomène des éclipses. L’éclipsé de soleil était à leurs yeux le résultat d’une attaque du serpent Apôpi contre Rà, le dieu-soleil. Ils ne savaient pas prédire le Tetour de ces éclipses solaires ; mais, quand elles se produisaient, ils cherchaient à venir en aide au soleil en effrayant le monstre Apôpi par leurs cris et le bruit de toutes sortes d’instruments et d’ustensiles. La lune avait également ses ennemis qui la guettaient, le crocodile, l’hippopotame, la truie, constellations qui faisaient courir les plus grands périls à l’astre des nuits vers le quinzième jour de chaque mois, et qui parfois l’avalaient gloutonnement, mais étaient obligés par les dieux à le rendre.

Les Chaldéens possédaient des notions plus précises sur la nature des éclipses et sur les lois qui régissent ces phénomènes. Les nombreuses observations faites chez eux de longue date sur l’état du ciel leur avaient permis de découvrir la période de deux cent vingt-trois lunaisons, au bout de laquelle les éclipses lunaires se reproduisent dans le même ordre. Ils prédisaient donc ces dernières, sinon à coup sûr, du moins avec un succès habituel. Il n’en était pas de même pour les éclipses de soleil. Les éclipses de lune sont visibles de tous les points de la terre d’où l’on peut apercevoir la lune ; les éclipses de soleil, au contraire, tout en ayant la même périodicité et une plus grande fréquence, n’affectent pas toujours le même point du globe terrestre. Aussi, comme les observations des Chaldéens étaient nécessairement locales, par conséquent très incomplètes, les astronomes de ce pays ne pouvaient saisir la loi qui préside à la périodicité de ces phénomènes. Ils prédisaient néanmoins les éclipses solaires, qui précèdent ou suivent à environ quatorze jours et demi d’intervalle une éclipse lunaire ; mais leurs prédictions ne se réalisaient pas toujours, au moins pour la contrée où ils vivaient. Cf. Oppert, dans le Journal asiatique, 1871 ; t. xviii, p. 67 ; Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, t. i, 1895, p. 91-93, 776. — L’hébreu n’avait aucun mot spécial pour désigner les éclipses. L’Écriture ne s’en est occupée que pour y faire allusion directement ou indirectement. Il en est question dans plusieurs passages. — 1° Amos, IV, 13, dit que le Seigneur « change l’aurore en ténèbres », ce qui s’entend plus naturellement d’une éclipse que d’un temps couvert (Septante : « il fait l’aurore et l’obscurité ; » Vulgate : faciens malutinam nebulam).

— 2° II dit encore, viii, 9 : « Le soleil se Couchera en plein midi ». La comparaison des ténèbres qui succèdent inopinément à la clarté du soleil semble empruntée au phénomène des éclipses, et figure l’adversité succédant tout d’un coup à la prospérité. On a supposé qu’Amos faisait allusion à une éclipse totale de soleil qui fut visible à Jérusalem, un peu après midi, le 9 février 784 avant J.-C, ou à une autre éclipse qui se produisit le 6 août 803 ; mais rien ne prouve que le prophète ait en vue une éclipse spéciale. J. Knabenbauer, Comment, in proph. min., t. i, 1886, p. 324. — 3° Joël, ii, 32, décrivant les signes précurseurs de la venue du Seigneur, dit que « le soleil se changera en ténèbres et la lune en sang », c’est-à-dire qu’elle prendra cette teinte d’un rouge obscur qu’elle a durant les éclipses. Ces phénomènes inspiraient toujours l’effroi aux anciens ; c’est pour cela que le prophète les range au nombre des signes terribles de la venue de Dieu. — 4° Michée, iii, 6, annonce qu’en punition des péchés du peuple, « le jour sera obscurci. » Certains commentateurs ont pensé qu’il s’agissait là de l’éclipsé de soleil qui eut lieu le 5 juin 716 avant J.-C, et dont il est question dans Denys d’Halicarnasse, ii, 56 ; mais c’est là une hypothèse sans fondement. Le prophète s’exprime métaphoriquement, et il est même douteux que sa métaphore soit empruntée à une éclipse. — 5° Il en est de même du passage de Zacharie, xiv, 6 : « En ce jour, il n’y aura pas de lumière. » — 6° On doit également expliquer au sens figuré l’expression de Jérémie, xv, 9 : « Son soleil s’est couché pendant qu’il était encore jour. » Le soleil est ici l’image de la vie, qui, comme dans une éclipse, s’éteint prématurément. On ne doit donc pas voir dans ce prophète la mention de l’éclipsé du 30 septembre 610, dont Hérodote, i, 74, 103, a conservé le souvenir. — Les ténèbres qui se produisirent à la mort de Notre -Seigneur, Matth., xxvii, 45 ; Marc, xv, 33 ; Luc, xxiii, 44, ne furent point l’effet d’une éclipse de soleil. On célébrait alors la Pàque juive, et par conséquent on était au quatorzième jour de la lune, c’est-à-dire à la pleine lune. Exod. xii, 6. Or la pleine lune est l’époque possible des éclipses de lune, parce qu’alors la terre se trouve placée entre cet astre et le soleil ; les éclipses de

soleil, au contraire, ne peuvent avoir lieu qu’à l’époque de la nouvelle lune, quand ce satellite est interposé entre la terre et le soleil. Les ténèbres du Vendredi-Saint ont donc un caractère miraculeux et sont dues soit à une interposition extraordinaire de nuages très épais, soit à une atténuation momentanée de la transparence atmosphérique. H. Lesêtke.

1. ÉCOLE, local dans lequel des enfants ou des jeunes gens apprennent des leçons d’un maître les éléments d’un art ou d’une science (fig. 515). Les écoles sont privées ou publiques, selon qu’elles sont tenues par des particuliers ou bien au nom de l’Etat. On ne trouve pas trace d’écoles publiques chez les Hébreux avant la captivité de Babylone. Ce qu’on appelle improprement « écoles des prophètes » n’a point de relation avec un enseignement suivi et méthodique. Voir ce mot. L’instruction religieuse et morale des enfants se donnait dans la famille. Voir Édv S’il y avait quarante enfants, il devait y avoir un assistant ; pour cinquante, deux maîtres étaient nécessaires. Si nous en croyons les Talmuds, les écoles étaient très répandues en Palestine ; mais leur exagération à ce sujet dépasse toute mesure. À l’époque de sa destruction, Jérusalem aurait compté dans son sein quatre cent quatre-vingts écoles. Bien plus, au dire de R. Simon ben Gamaliel, la ville d’ailleurs inconnue de Béthar avait encore soùs Adrien, cinquante-deux ans après la ruine du Temple, cinq cents écoles, dont la plus petite réunissait cinq cents enfants. Talmud de Jérusalem, Taanilh, trad. Schwab, Paris, 1883, t. vi, p. 190. Selon R. Simon ben Yohaï, beaucoup de villes de la Palestine ont été ruinées, faute d’ëcoles et d’instituteurs. D’après d’autres rabbins, les écrivains, les professeurs et ceux qui instruisent la jeunesse sont les véritables gardiens des cités. Talmud de Jérusalem, Haghiga, ibid., p. 265. Les rabbins disaient encore : « L’haleine des enfants qui fréquentent les écoles est le

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515. — École égyptienne de musique et de danse. Tell el-Amarna. xvin » dynastie. D’après Lepslus, Denkmiiler,

Abth. iii, Bl. 106.

cation. Après l’exil, les synagogues servirent en quelque sorte d’écoles publiques pour la lecture et l’interprétation de la Loi et des prophètes. Voir Synagogue. Cependant il y eut encore, en dehors d’elles, des écoles élémentaires pour les garçons et des écoles supérieures, dirigées par des scribes et des docteurs.

I. ÉCOLES ÉLÉMENTAIRES POUR LES GARÇONS. — La tradition rabbinique rapporte leur origine à Siméon ben Schétah, frère de la reine Salomé et président du sanhédrin dans le i" siècle avant Jésus-Christ. Il établit cette disposition : « Les enfants doivent aller à l’école. » Talmud de Jérusalem, Kethouboth, viii, 8, trad. Schwab, Paris, 1886, t. viii, p. 110. Il nomma l’école Beth-hassépher, « maison du livre. » Mais ce ne fut que l’an 64 de notre ère que des écoles publiques pour les petits garçons de six à sept ans furent fondées dans toutes les villes de Palestine. Le grand prêtre Jésus ben Gamala rendit cette fondation obligatoire. Chaque ville devait entretenir au moins une école primaire. Si la cité était très grande ou coupée en deux par un fleuve difficile à traverser, on devait bâtir deux écoles. Si la communauté était pauvre, la synagogue pouvait servir d’école pendant la semaine. Partout où il y avait vingtcinq enfants en âge de s’instruire, on devait établir un maître spécial. Si le nombre des élèves était inférieur à ce chiffre, le liazzan, ou sacristain de la synagogue, servait de maître.

plus ferme soutien de la société. — Périsse le sanctuaire ! mais que les enfants aillent à l’école. » À leur jugement, les femmes qui conduisaient leurs enfants aux écoles méritaient la faveur spéciale de Dieu. Talmud de Babylone, Bevakhoth) trad. Schwab, Paris, 1871, p. 29-1.

Le Pirké Abotli détermine ainsi les divers degrés de l’instruction de l’enfant : « À cinq ans, il doit commencer les études sacrées ; à dix ans, il doit se livrer à l’étude de la tradition ; à treize ans, il doit connaître et accomplir les commandements de Jéhovah ; à quinze ans, il dqjt perfectionner ses études. » Le nombre des heures de classe était limité. À cause de la chaleur, les leçons étaient interrompues de dix heures du matin à trois heures de l’après-midi. Aux mois de juin et de juillet, on no consacrait que quatre heures par jour à l’enseignement, et il était alors interdit aux maîtres de châtier leurs élèves. Le maître no devait rien promeltre qu’il ne put tenir. Il devait éviter tout ce qui pouvait provoquer dos pensées désagréables ou déshonnétes. Il ne devait pas s’impatienter contre les enfants qui apprenaient difficilement. Il avait le droit de punir, quand le châtiment était nécessaire ; et il pouvait frapper avec une lanière, mais jamais avec une baguette. Il devait graduer les leçons et traiter l’enfant comme une génisse dont on augmente chaque jour le fardeau. Son office était honorable, et les parents ne pouvaient envoyer leurs enfants à une autre école qu’à

celle de la ville où ils habitaient. Le jour du sabbat, le maître pouvait surveiller la lecture des enfants et énoncer les premiers mots des chapitres que ses élèves devaient lire. Mais, en raison du repos sabbatique, il ne pouvait lire lui-même. Talmud de Jérusalem, Schabbath, i, 3, trad. Schwab, t. iv, 1881, p. 13 et 16. Nul célibataire, homme ou femme, ne devait exercer la profession d’instituteur. Talmud de Jérusalem, Qiddouschin, iv, 10 ; trad. Schwab, t. ix, 1887, p. 287 et 289. En somme, l’instruction primaire des jeunes Israélites se bornait à savoir lire et écrire et à répéter par cœur les passages essentiels de la Loi mosaïque.

IL Écoles supérieures des scribes. — Les scribes, dont il est si souvent parlé dans l’Évangile, tenaient des écoles où ils distribuaient aux jeunes gens, leurs disciples, et aux Israélites qui assistaient à leurs leçons, un haut enseignement religieux. Leur école était appelée

Les auditeurs restaient debout ; après la mort de Gamaliel seulement, ils purent s’asseoir. Quelquefois on comparait poétiquement les rangs d’auditeurs aux rangées des ceps dans une vigne, et on appelait l’école « la vigne ». Le mailre se tenait sur un siège élevé ou dans une chaire. Il exerçait sur ses élèves un très grand empire. Il se faisait nommer Rabbi, « mon maître. » Matth., xxiii, 7. Les rabbins prétendaient passer dans le respect et l’affection de leurs disciples avant les parents de ceux-ci. Talmud de Jérusalem, Baba Mecia’, ii, 11, trad. Schwab, Paris, 1888, t. x, p. 99. « Le respect de ton maître touche au respect de Dieu. » Pirké Aboth, xiv, 12. Les rabbins prenaient partout la première place et se faisaient saluer jusqu’à terre par leurs disciples. Matth., xxiii, 6 et 7 ; Marc, xii, 38 et 39 ; Luc, xi, 43 ; xx, 46. Leur enseignement était gratuit, et ils exerçaient tous un métier qui leur permettait de gagner leur vie. Cependant quelques 516. — École grecque. À droite, leçon d’écriture ; à gauche, leçon de musique. — Le pédagogue, qui a conduit le Jeune Greo

il ses deux maîtres, est assis, a droite, sur nn siège ; il tient un bâton de la main gauche.

Coupe peinte de Duris. Musée de Berlin.

bet ha-midras, (’maison de recherche ou d’étude. » Ils y interprétaient l’Écriture et la tradition au point de vue légal ou juridique, suivant la méthode dite plus tard halaka. Ils faisaient de véritables cours de casuistique. Les réunions avaient lieu spécialement le jour du sabbat, après le service au temple ou à la synagogue. Elles se tenaient dans un des parvis ou dans une salle intérieure du Temple, ou à la maison d’école, quelquefois en plein air. D’après le Pirké Aboth, les hommes de la Grande Synagogue auraient dit : « Formez beaucoup d’élèves. » Par application de cet ordre et sous l’influence du mouvement d’idées qui accrut leur importance, les scribes multiplièrent les écoles. Ils avaient une haute estime de leurs fonctions. « On trouve l’Éternel dans les maisons d’étude aussi bien que dans les temples, » disaient-ils. Les hommes d’étude contribuent à la paix de l’univers. R. Nechounia ben Hakana faisait une courte prière en entrant à l’école et en en sortant. À l’entrée, il demandait de ne pas s’irriter contre ses disciples et de ne pas leur fournir de sujet d’irritation contre lui ; il demandait surtout de ne pas se tromper dans son enseignement, aCn de n’être pas méprisé en ce monde et en l’autre. A la sortie, il remerciait Dieu de son sort ; car il préférait fréquenter les écoles et les synagogues plutôt que les théâtres et les cirques. Talmud de Jérusalem, Berakhoth, trad. Schwab, 1. 1, Paris, 1871, p. 80-81, 97 et 176.

uns prenaient un salaire, mais c’était seulement en raison du dérangement que l’enseignement apportait à leurs occupations ordinaires. Talmud de Jérusalem, Nedarim, iv, 3, trad. Schwab, t. viii, 1886, p. 190. Ils exigeaient de leurs élèves une bonne mémoire et une grande fidélité à répéter leurs leçons. Chacun doit enseigner dans les termes mêmes dont son maître s’est servi. Le plus bel éloge d’un élève était de le comparer à une citerne enduite de ciment, qui ne perd pas une goutte de ses eaux. Cf. Talmud de Jérusalem, Haghiga, trad. Schwab, t. vi, 1883, p. 271-272. Comme chaque docteur avait son enseignement propre, des discussions s’élevaient souvent à la maison d’école et dégénéraient parfois en injures et en coups.

Les rabbins rattachent les écoles des scribes à la Grande Synagogue par l’intermédiaire de Siméon le Juste et d’Antigone de Soccho, et ils mentionnent, depuis les Machabées jusqu’à Hérode le Grand, une double série non interrompue de docteurs de la Loi, des zougoth, « couples, » de chefs d’écoles. Ces duumvirs sont José ben Joéser et Joseph ben Jochanan ; Josué ben Perachia et Nittaï d’Arbelles ; Siméon ben Schétach et Juda ben Tabbaï ; Schemaïa et Abtalion ; Hillel et Schammaï. Nous ne savons presque rien sur leur histoire, et Josèphe ne les nomme même pas, sauf les derniers. Ilillel s’instruisit à l’école de Schemaïa et d’Abtalion.

Lui-même ouvrit une école rivale de Schammaï et la laissa à ses successeurs. Son fils Siméon et son petit-fils Gamaliel y enseignèrent. Saint Paul étudia la Loi aux pieds de ce dernier. Act., xxil, 3. Ces écoles furent continuées après la ruine de Jérusalem par l’école rabbinique de Tibériade, dont nous n’avons pas à nous occuper ici. Cf. E. Stapfer, La Palestine au temps de Jésus-Christ, Paris, 1885, p. 138-139, 285-296 ; Trochon, Introduction générale, Paris, 1887, t. ii, p. 681-687 ; B. Strassburger, Geschichte der Erziehung und des Unlerrichts bei den Israeliten, in-8°, Stuttgart (1885), p. 1-91.

III. École grecque.

Il est question accidentellement dans les Actes, xix, 9, d’une école, σχολή, de la ville d’Éphèse, qui est désignée comme l’école d’un certain Tyrannus. Il s’agit probablement d’une maison ou d’une salle où l’on donnait des leçons (fig. 516). Saint Paul, ne voulant plus prêcher l’Évangile dans la synagogue des Juifs d’Éphèse, à cause de leur endurcissement, continua ses prédications dans l’école de Tyrannus. Voir ce mot.

E.Mangenot.


2.ÉCOLES DE PROPHÈTES. On appelle de ce nom, qui n’appartient pas à l’Écriture et qui est assez impropre d’ailleurs, des associations religieuses que formèrent les prophètes Samuel, Élie et Elisée, et sous lesquelles ils groupèrent un certain nombre de membres ou de disciples. On s’est fait souvent une idée fausse ou exagérée de ces associations. Il importe donc de distinguer nettement les renseignements certains qui nous sont parvenus sur leur existence et leur histoire, et les hypothèses que les exégètes ont faites sur leur nature et leur organisation.

I. Leur existence et leur histoire.

1° Les Livres Saints ne font allusion à cette institution qu’incidemment, et ils ne racontent pas son origine. La première mention qui en est faite se lit I Reg., x, 5, 6, 10-13. Samuel venait d’oindre Saül. Parmi les signes d’élection divine qu’il donne au nouveau roi, il lui annonce qu’il rencontrera à Gabaa une troupe (hébreu : ḥébel, « bande, file ; » Septante : χορός, « chœur ; » Vulgate : grex) de prophètes, qui descendraient de la hauteur où ils habitaient et qui chanteraient avec accompagnement d’instruments de musique. Les événements s’accomplirent comme Samuel l’avait prédit. L’Esprit du Seigneur se saisit de Saül, qui se mit à prophétiser avec les prophètes. Les habitants de Gabaa s’étonnèrent d’un changement si soudain et dirent : « Qu’est-il donc arrivé au fils de Cis ? Saül est-il devenu prophète ? » D’autres repartirent : « Les prophètes héritent-ils de leur père ? » voulant dire que la fonction prophétique n’est pas héréditaire et que Dieu en investit qui il veut, Saül aussi bien que d’autres. Et dès lors la formule : « Saül est-il aussi parmi les prophètes ? » devint une locution proverbiale.

Saül revint une seconde fois dans l’assemblée des prophètes (lahäqâh, ἐκκλησία, cuneus), à Ramatha, pour y poursuivre David. Le fugitif s’était réfugié auprès de Samuel, qui l’emmena dans les habitations rustiques, nâyôṭ, dans lesquelles étaient réunis ses disciples. Le roi y envoya des émissaires pour prendre son gendre. Mais ceux-ci, à la vue d’une assemblée de prophètes qui prophétisaient sous la direction de Samuel, furent saisis de l’Esprit du Seigneur et se mirent aussi à prophétiser. Le même effet se produisit deux autres fois sur de nouveaux émissaires de Saül. Ce dernier y vint en personne, et, saisi à son tour de l’Esprit divin, il se dépouilla de ses vêtements royaux, prophétisa avec les autres devant Samuel, et demeura nu par terre tout le jour et toute la nuit. Cette circonstance donna une nouvelle signification au proverbe : « Saül est-il donc aussi devenu prophète ? » I Reg., xix, 18-24.

On a conclu de ces renseignements que Samuel avait été le fondateur de ces réunions de prophètes. On sait que, lorsqu’il était enfant, la parole de Dieu était rare et que Dieu ne se manifestait pas clairement. I Reg., iii, 1. Comme dans son âge mûr il a autour de lui des prophètes en grand nombre, il en résulte qu’il peut passer avec vraisemblance pour l’instigateur de ces assemblées de prophètes, dont nous déterminerons plus loin la nature. Nous ignorons si des colonies semblables existaient ailleurs et si celle de Ramatha s’est perpétuée. On a présupposé, malgré le silence des Livres Saints, qu’elle avait persévéré jusqu’au temps d’Élie, où il est de nouveau question de réunions de prophètes. Il est permis aussi de penser qu’après avoir disparu ces associations furent alors rétablies.

2° A la seconde période de leur histoire, elles reparaissent incidemment encore dans les récits bibliques, qui en parlent comme d’une institution établie et connue, mais sous le terme nouveau de réunions de « fils de prophètes ». Comme l’expression « fils » a le sens de « disciple », l’usage s’est introduit de désigner ces assemblées par le nom d’« écoles de prophètes ». Quand l’impie Jézabel faisait mourir les prophètes du Seigneur, Abdias, l’intendant de la maison d’Achab, cacha cent « fils de prophètes », en les plaçant par groupes de cinquante dans les cavernes du pays, et leur donna la nourriture nécessaire. III Reg., xviii, 4 et 13. Voir t. 1, col. 23. Les autres périrent par le glaive. Élie pouvait donc se dire seul en présence des quatre cent cinquante prophètes de Baal. III Reg., xviii, 22, et xix, 10 et 14. On pense qu’il était le chef des fils de prophètes tués ou cachés.

La persécution finie, ceux qui avaient échappé sortirent de leur retraite, et au moment de l’enlèvement d’Élie, leur maître, nous les retrouvons réunis à Béthel et à Jéricho. Ils savaient la disparition prochaine du prophète, et ils l’annoncèrent à son disciple Elisée. Cinquante de ceux qui habitaient Jéricho furent témoins de l’enlèvement d’Élie, et ils reconnurent Elisée comme leur chef. IV Reg., ii, 3-7, 15-18. Leur histoire sous son gouvernement est tout épisodique. La femme de l’un d’eux, après la mort de son mari, eut recours à Elisée, qui multiplia l’huile pour payer les dettes du défunt. IV Reg., iv, 1-7. Ceux qui demeuraient à Galgala eurent à souffrir de la famine, et se crurent empoisonnés pour avoir mangé des coloquintes, que le cuisinier de la communauté avait cueillies dans les champs. Elisée enleva l’amertume du potage en y mélangeant un peu de farine. IV Reg., iv, 38-41. Voir col. 859. Ces fils de prophètes étaient au nombre de cent. IV Reg., iv, 43. Giézi demanda à Naaman un talent d’argent et deux vêtements de rechange pour deux jeunes disciples des prophètes, qui venaient d’arriver des montagnes d’Éphraïm. IV Reg., v, 22. Un jour les fils des prophètes dirent à Elisée : « Vous le voyez, le lieu que nous habitons avec vous est trop petit pour nous ; allons nous bâtir une maison auprès du Jourdain. » Ils y allèrent, et c’est en travaillant que l’un d’eux laissa tomber dans le fleuve sa hache, qu’Elisée fit surnager. IV Reg., vi, 1-7. Ce prophète chargea un de ses disciples d’oindre Jéhu, roi d’Israël. IV Reg., ix, 1-10. De ces textes isolés on a conclu que les fils des prophètes vivaient en communauté, et qu’ils avaient à Galgala, à Béthel, à Jéricho et sur les bords du Jourdain, des centres où ils se trouvaient cent ou au moins cinquante. Comme, pour justifier sa mission divine, Amos répond à Amasias qu’il n’est ni prophète ni fils de prophète, mais un simple berger, vii, 14, on a pensé que les écoles de prophètes existaient encore de son temps (804-799). Trochon, Les petits prophètes, Paris, 1883, p. 181. On ignore quand et comment elles disparurent.

II. Leur nature et leur organisation.

1° Les anciens commentateurs à la suite des Pères, saint Jérôme, Epist. Lviii ad Paulinum, n° 5, et cxxv ad Rusticum monachum, n° 7, t. xxii, col. 583 et 1076 ; Cassien, De cœnobiorum instituits. l. i. c. ii, et Collatio xviii, c. vi, t. un, col. 61 et 1101 ; saint Isidore, De ecclesiastiers officiis, 1. ii, c. xvi, t. lxxxiii, col. 794, tenaient généralement les communautés de prophètes pour de véri- tables monastères, où des moines s’exerçaient, sous l’autorité d’un supérieur, à toutes les pratiques de la vie religieuse. Cf. Haneberg, Histoire de la révélation biblique, trad. franc., Paris, 1856, 1. 1, p. 304-305. L’assimilation ne saurait être complète, car il ne parait pas que les fils de prophètes fussent liés par des vœux, et on pense ordinairement que ceux qui étaient mariés ne menaient pas la vie commune.

2° Appuyé sur l’autorité d’Abarbanel et de David Kimchi, qui reconnaissaient dans les écoles de prophètes des « maisons d’interprétation », Vitringa, De Synagoga vetere, 1726, p. 349-361, a vu dans les fils de prophètes des jeunes gens qui s’adonnaient à l’étude de la philosophie et de la théologie et écoutaient les leçons d’un maître savant, et dans les écoles de prophètes, des académies, qui étaient bâties dans la solitude et où s’enseignaient les sciences religieuses. D’après le même principe, d’autres critiques ont pensé qu’on formait, dans ces écoles normales, des maîtres ou des catéchistes pour instruire le peuple. Les déistes anglais du siècle dernier se sont représenté ces écoles comme des collèges, dont ils ont dressé le programme d’études et où l’on enseignait l’histoire, la rhétorique, la poésie, les sciences naturelles et la philosophie. C’est à ce sentiment que l’on doit le nom d’ « écoles de prophètes ». L’hypothèse d’écoles proprement dites n’est pas justifiée par le texte sacré, et elle est peu vraisemblable en elle-même. Ramenée à de justes bornes, elle peut signifier au plus que les prophètes expliquaient oralement à leurs disciples la loi mosaïque et leur enseignaient la musique vocale et instrumentale, qui servait aux exercices religieux.

3° Beaucoup de critiques modernes font de ces écoles de véritables séminaires de prophétisme, où des jeunes gens se préparaient à la mission prophétique par des exercices appropriés, sous la conduite d’un chef expérimenté. Mais tous n’ont pas du prophétisme et de la prophétie la même idée. Les uns conservent la véritable notion des prophètes, qu’ils regardent comme des hommes réellement inspirés de Dieu en vue d’une mission spéciale et pour annoncer l’avenir. Sans doute ils reconnaissent que Dieu appelle qui il veut au ministère prophétique ; mais, conformément aux principes de saint Thomas, Summa Theologica, 2a 2ae, q. 172, art. iv, ils pensent que cette vocation, toute miraculeuse qu’elle était, avait d’ordinaire sa providentielle préparation dans les écoles de prophètes. Tous les prophètes ne sont pas sortis de ces écoles ; mais cette institution fut souvent le moyen dont Dieu se servit pour leur recrutement. Kranichfeld, De iis quai in Testamento Veteri commemorantur prophetarum societatibus, Berlin, 1860 ; J. Datiko, Historia revelationis divinse Veteris Testamenti, Vienne, 1862, p. 227-230 ; Mgr Meignan, De Moïse à David, Paris, 1896, p. 480 ; Les prophètes d’Israël. Quatre siècles de lutte contre l’idolâtrie, Paris, 1892, p. 14-18. Mais les rationalistes ont une autre conception des écoles prophétiques. Pour eux, les prophètes sont seulement des orateurs inspirés, des interprètes officiels de la loi mosaïque et des avocats de la théocratie, et leurs collèges ont été un institut permanent, qui exerça une grande influence en Israël et représenta le véritable esprit de la Loi, en face des prêtres souvent trop attachés au culte matériel, en face du pouvoir dont il empêchait les empiétements. S. Munk, Palestine, Paris, 1881, p. 247 et 419 ; A. Réviile, Les prophètes d’Israël au point de vue de la critique historique, dans la Revue des Deux Mondes, t. lxxix, 1867, p. 844 ; Michel Nicolas, Études critiques sur la Bible, Ancien Testament, Paris, 1862, p. 357-364. Quelques-uns même attribuent à ces groupements de prophètes des ivresses orgiastiques, des accès de fureur divine, E. Renan, Histoire du peuple d’Israël, t. i, 1887, p. 378-380 ; t. ii, 1889, p. 278-280, ou au moins les apparences de la névrose et une invasion épidémique de la grande hystérie. Marcel Dieulafoy, Le roi David, Paris, 1897, p. 120-137. Ces explications si diverses ont un fondement commun ; elles donnent au verbe nâbâ‘, « prophétiser », I Sam. (I Reg.), x, 5 et 6, 13 ; xix, 20-24, le sens strict d’annoncer la volonté de Dieu et de présager l’avenir. Cf. Knabenbauer, Commentarius in libros Samuelis, Paris, 1886, p. 114 et 196-197. Or ce verbe, aux formes niphal et hithpael, qui sont ici employées, a d’autres significations. Il signifie notamment louer Dieu par le chant des cantiques sacrés avec accompagnement d’instruments de musique. I Par., xxv, 1-3. Or, la première fois que l’assemblée des prophètes est mentionnée, elle comprend des instrumentistes. I Sam. (I Reg), x, 5. Nous pouvons en conclure légitimement que ces prophètes prophétisaient, non pas en prédisant l’avenir, mais en parlant et en chantant sous une impulsion surnaturelle et avec accompagnement musical. C’est à cet exercice de piété que Saül prit part, en se mêlant à la troupe des prophètes. Quant aux manifestations extraordinaires, qui se produisaient au milieu des chants et des louanges divines, et sur la nature desquelles nous sommes peu renseignés, elles n’avaient rien de commun avec la manie des devins antiques ni avec la névrose ; c’étaient des charismes, analogues à ceux dont l’Esprit-Saint favorisa les premiers chrétiens. D’ailleurs elles n’eurent lieu que du temps de Samuel, et rien n’indique qu’elles se soient reproduites sous Élie et Elisée.

4° Pour caractériser autant que cela est possible les écoles de prophètes, nous dirons que « les prophètes y enseignaient simplement à bien croire et à bien vivre ». Le Hir, Études bibliques, Paris, 1869, t. i, p. 4, note. Ils se proposaient un but pratique, celui de former de véritables adorateurs de Dieu, des observateurs fidèles de la loi mosaïque, qui par leurs exemples agiraient sur la foule, arrêteraient les progrès de l’idolâtrie et ramèneraient leurs frères au culte du vrai Dieu. Ces écoles, en effet, fleurirent à des époques troublées, sous Samuel et plus tard exclusivement dans le royaume d’Israël, sous le règne désastreux d’Achab. Leur organisation n’a peut-être pas été identique aux deux périodes de leur histoire. A la première il n’y aurait eu, semble-t-il, que des réunions accidentelles, sous la présidence de Samuel. Les écoles des prophètes auraient donc été alors des associations libres, dont les membres se groupaient pour la prière et la louange de Dieu au son des instruments. Durant la seconde période, elles auraient eu un caractère plus stable et auraient ressemblé à des collèges, soumis à une discipline et régis par un supérieur. Cependant les habitations dressées sur les bords du Jourdain ne paraissent guère propres qu’à une destination passagère, et l’existence des fils de prophètes mariés rend douteuse la stabilité des communautés. Mais toute conclusion tirée de données historiques si insuffisantes reste nécessairement conjecturale.

Cf. Schwebel-Mieg, De prophetarum scholis, Strasbourg, 1833 et 1835 ; Clair, Les livres des Rois, Paris, 188i, t. i, p. 67-75 ; Trochon, Introduction générale aux prophètes, Paris, 1883, p. xxix-xxxii ; F. Vigouroux, Manuel biblique, 9° édit, 1896, t. ii, p. 103-104.

E.Mangenot.

ÉCONOME ( Nouveau Testament : οἰκονόμος ; Vulgate : dispensator, Luc, xii, 42 ; I Cor., iv, 1, 2, etc. ; villicus, Luc, xvi, 1, 3, 8 ; actor, Gal., iv, 2 ; arcarius, Rom., xvi, 23), homme de confiance chargé de l’administration d’une maison, ce qui, dans le Nouveau Testament grec, est appelé οἰκονομία. Luc, xvi, 2, 3, 4. Cf. Septante, III Reg., iv, 6 (hébreu : ’al-hab-bâiṭ, « celui qui est préposé à la maison » ) ; I Par., xxix, 6 ; Esth., i, 8 ; viii, 9.

1° L’économe a soin de tous les intérêts, fait valoir les biens, Luc, xii, 42 ; I Cor., iv, 2, vend, achète, règle les dépenses, etc. Son rôle est plus étendu que celui du villicus, chargé seulement de faire valoir un domaine. Cf. S. Jérôme, Epist. cxxi, ad Algas., 6, t. xxii, col. 1018, 1019.

2° Dans une de ses paraboles, Luc, xvi, 1-8, Notre-Seigneur met en scène un économe employé dans la maison d’un riche. Le maître, informé que l’économe dilapidait ses biens, lui ordonna de rendre ses comptes et lui signifia que sa charge allait lui être ôtée. L’économe, habitué à commander et à être bien traité, réfléchit sur sa situation et conclut qu’il ne pourrait se faire ni au travail des champs ni à la mendicité. Il résolut en conséquence de se ménager des amis parmi les débiteurs de son maître. Il les appela donc les uns après les autres, prit leurs créances et leur en fit substituer de nouvelles, dans lesquelles le montant des dettes était considérablement diminué. Aussi peu scrupuleux que l’économe, les débiteurs se prêtèrent à cette opéralion malhonnête, qui servait si bien leurs propres intérêts, et les disposait à accueillir chez eux l’économe, quand celui-ci aurait quitté la maison de son maître. La prudence de cet économe est louée dans l’Évangile, sans qu’on puisse déterminer si le « maître » qui formule cet éloge est le maître de la maison ou NotreSeigneur lui-même. La seconde hypothèse paraît plus probable, car les débiteurs durent garder pour eux le secret de ce qui s’était passé, sous peine de s’exposer aux revendications du maître. Il est évident que ce qui est loué par Notre-Seigneur, ce n’est pas la malhonnêteté de l’économe, qu’il range lui-même parmi « les fils de ce siècle » ; mais son habileté, offerte en exemple aux « fils de la lumière ». Cette parabole rappelait aux auditeurs du divin Maître un fait qui ne devait pas être absolument exceptionnel. La tentation de s’enrichir aux dépens d’un propriétaire opulent était trop forte pour que, même chez les Juifs de cette époque, on n’y succombât pas de temps à autre. — Tous les économes ne ressemblaient pas à celui de la parabole. Il y avait aussi « le serviteur fidèle et prudent que le maître a préposé à sa famille pour lui fournir la nourriture au temps voulu ». Matth., xxiv, 45. En récompense de sa fidélité, cet économe est mis à la tête de tous les biens de son maître. Luc, xii, 42, 44. Cf. Luc, xiv, 17, 23. — 3° Le trésorier de certaines villes grecques portait le titre de otxovd(io ;. Un disciple de saint Paul, nommé Éraste, était « économe » (Vulgate : arcarius) de Corinlhe. Rom., xvi, 23. — 4° Par une belle image, les Apôtres et les chrétiens qui annoncent l’Évangile sont appelés, I Cor., iv, 1 : oîxovôiiot |ui<JTïip ! uv ©soO, « les administrateurs des mystères divins. » Dans l’Épître à Tite ; I, 7, l’évêque est qualifié oîxov6|ioç 0eoG, « l’économe de Dieu. » Saint Pierre recommande aux fidèles d’être de « bons économes des multiples grâces de Dieu », xotvo oixov<S|*ot itoixiAï]C z » P"o « @eoû. I Petr., IV, 10.

H. Lesêtre.
    1. ÉCRITOIRE##

ÉCRITOIRE (de scriptorium, chambre ou meuble à écrire ; hébreu : qését), petite boîte portative dans laquelle on met les ustensiles nécessaires à écrire, l’encre, les calâmes ou roseaux et le canif. L’écritoire comprenait deux

517. — Scribe égyptien avec son ccritoire. Tbcbos. D’après Wilkinson, llanntrs, t. ii, p. îsr.

compartiments : un vase contenant l’encre et un étui pour les roseaux et le couteau. Elle différait donc de Vencrier, qui peut être renfermé dans l’écritoire ou en être isolé. Les scribes égyptiens se servaient de palettes en bois, en ivoire ou en pierre, dans lesquelles étaient creusés des godets pour détremper l’encre sèche (voir

fig. 17, col. 51), et aussi de petits vases contenant de l’encre noire et de l’encre rouge (fig. 517). L’écritoire n’est mentionnée qu’une fois dans la Bible. Le prophète Ézéchiel, ix, 2-11, vit sept anges que le Seigneur envoyait châtier Jérusalem. L’un d’eux, vêtu comme les scribes, portait à la ceinture le qését hassôfêr. Le Seigneur lui ordonna de passer au milieu de la ville et de marquer d’un (av (voir col. 1131) le front des pieux Israélites qui devaient échapper au carnage de leurs concitoyens. Étymologiquement, le qését paraît désigner exclusivement l’encrier, la fiole qui contient l’encre ; mais il pouvait fort bien, en vertu de l’usage, signifier l’écritoire. Les Septante avaient lu un autre mot et avaient traduit îwvt) aampefpou, « une ceinture de saphir. » Aquila, dans la première édition de sa version, et Théodotion avaient transcrit en caractères grecs le mot hébreu qu’ils ne comprenaient pas, xi(rru Ypau.u, aTé{. Aquila traduisit dans sa seconde édition |i£).avo80-/£ ; ov ypa<fiu>i, et Symmaque tcivoxJSiov Ypapéoi ;. Un Juif, interrogé par Origène, lui dit que le xiuru d’Aquila et de Théodotion correspondait au x « Xou.âpiov

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518. — Écritoire orientale moderne, en cuivre.

ou écritoire des Grecs. Selecta in Ezech., vii, 2, t. xiii, col. 800 ; Hexapl., Ezech., ix, 2, t. xvi, col. 2451-2455. Saint Jérôme a traduit atramentarium, « encrier. » Le saint docteur savait cependant que beaucoup de commentateurs donnaient à ce passage d’Ézéchiel un sens plus précis, et entendaient le qéséf de l’écritoire, « thecae scribentium calamorum. » In Ezech., 1. iii, t. xxv, col. 86-87. On a découvert à Pompéi des encriers en terre cuite ou en bronze, ordinairement munis d’un couvercle. Parfois deux encriers étaient soudés : l’un contenait l’encre noire, l’autre l’encre rouge. Ces objets ont souvent une anse ou un anneau, qui permet de les pendre à la ceinture. Voir fig. 20, col. 53. Aujourd’hui encore, les écrivains do profession en’Orient portent toujours appendu à leur ceinture un tube de métal (fig. 518) ou d’ébène, qui renferme le roseau et l’encrier. — Dans le Nouveau Testament, il est plusieurs fois question d’encre ; mais l’écritoire n’est pas nommée. Voir Encre.

E. Mangenot.

1. ÉCRITURE, ÉCRITURE SAINTE, c’est-à-dire écriture par excellence, un des noms par lesquels on désigne les « écrits » inspirés qui composent l’Ancien et le Nouveau Testament. L’origine de cette expression se trouve dans les livres de l’Ancien Testament postérieurs à la captivité de Babylone. L’auteur des Paralipomènes désigne les prescriptions de la loi en disant kakkâtûb, « comme il est écrit, » ce que les Septante traduisent : xotà Trp ypocç-rçv, rcapà Tiyv çpaç-rçv, « selon l’Écriture ». II Par., xxx, 5, 18. La même locution se lit dans Esdras et dans Néhémie. I Esdr., iii, 4 ; II Esdr., viii, 15. De là l’usage d’en appeler à l’autorité des livres inspirés par la formule ylYp « 7rt « t, Matth., iv, 4, 6 ; x, 21, etc. ; xa6ù> ; yÉ-ypatTat, Bom., i, 11 ; ii, 24, etc., ce qui est la traduction de l’hébreu kakkâtûb, et d’appeler simplement ces livres par antonomase l’Écriture. Les écrivains du Nouveau Testament nomment l’Ancien » i Tpaipri, Scriptura, Joa., vii, 38 ; x, 35 ; Act., viii, 32 ; Rom., iv, 3 ; ix, 17 ; Gal., iii, 8, 22 ; iv, 30 ; II Tim., iii, 16 ; Jac, ii, 8 ; I Petr., ii, 6 ; II Petr., i, 20 ; al rpocçai’, Scriptural, Matth., xxi, 42 ; xxii, 29 ; xxvi, 54 ; Marc, xii, 24 ; xiv, 49 ; Luc, xxiv, 27, 45 ; Joa., v, 39 ; Act., xvii, 2, 11 ; xviii, 21, 28 ; I Cor., xv, 3, 4 ; Tpaça’i âfi », Scriptwrat Sanctse, Rom., 1573

ÉcniTURE — écriture hébraïque

1574

1, 2 ; ils citent 1rs prophètes en les appelant « l ypxfxi tûv jrpo ?ï)Twv, Scripturæ prophetarum, Matfh., xxvi, 56 ; ypaçaî jtpoçTiTixai, Scripturse prophetarum, Rom., xvi, 26, et ils reproduisent des versets on passages des auteurs sacrés en général en les nommant simplement ypa^r, , scriptura : « N’avezvous pas lu cette écriture ? » c’est-à-dire ce passage de l’Écrilure. Marc, xii, 10. Voir aussi Luc, iv, 21 ; Joa., XIX, 37 ; Act., i, 16. — Saint Pierre a appliqué le nom d’Écritures, al Y pif xi, aux écrits du Nouveau Testament, aussi bien qu’à ceux de l’Ancien, II Petr., iii, 16, et l’Église a adopté universellement cette manière de désigner tous les livres inspirés, de la même manière qu’elle a adopté les noms de Livres Saints, de Saintes Lettres, d’Ancien et de Nouveau Testament, qui sont également d’origine biblique. Pour le mot Bible, voir t. i, col. 1175-1176. F. Vigouroux.

2. ÉCRITURE HÉBRAÏQUE. L’écriture est l’art de représenter la pensée et de fixer la parole par des signes ou caractères, naturels ou conventionnels, tracés à la main ou à l’aide d’un instrument. On appelle idéographique l’écriture qui exprime directement, par des peintures ou des symboles, les idées ; phonétique, celle qui reproduit les sons de la parole. Cette dernière est syllabique ou alphabétique, selon que les caractères représentent des articulations complexes ou des syllabes, ou bien des sons simples ou des lettres. Les Hébreux n’ont employé que l’écriture alphabétique ; mais ils se sont servis successivement de deux formes différentes d’alphabets et ils ont eu deux écritures, la phénicienne et l’assyrienne, dont nous allons résumer l’histoire et les transformations.

I. Écriture phénicienne. — 1° Son origine. — Les Hébreux, parlant une langue semblable à celle des Phéniciens, adoptèrent de bonne heure l’écriture de ces derniers. Voir Alphabet hébreu, 1. 1, col. 402-416, pour l’origine et les éléments de l’écriture phénicienne. Sa dépendance des caractères hiératiques égyptiens paraît certaine. Toutefois l’emprunt n’a pas été fait de toutes pièces ni d’un seul coup. Le passage des hiéroglyphes à l’alphabet n’a été ni si simple ni si direct qu’on l’avait cru d’abord. Les hiéroglyphes héthéens et les inscriptions cypriotes, qui en dérivent, montrent par quels tâtonnements on a passé avant d’inventer l’alphabet. Le syllabaire cypriote (voir col. 467-469) se rattache au courant de simplification qui s’est produit presque simultanément dans les anciennes écritures idéographiques et d’où est sorti l’alphabet ; c’est un de ces essais qui ont précédé l’invention de l’alphabet et ont contribué soit directement, soit indirectement, à son éclosion. Il faut en rapprocher, semble-t-il, les caractères gravés sur des sceaux en pierre, découverts récemment dans le Péloponèse et l’île de Crète. À côté de signes hiéroglyphiques, empruntés au corps humain, aux animaux, aux plantes et à d’autres motifs d’ornementation, on a trouvé des formes cursives qui en sont le développement et qui constituent un syllabaire, semblable à celui de Chypre. A. J. Evans, Primitive Pictographs and a prse-pheenician Script front Crète and the Péloponnèse, dans le Journal of Hellenic Studies, t. xiv, 1894. Cf. Beilage zur Allgemeinen Zeitung, du 21 octobre 1895. Des signes de même nature ont été rencontrés dans la Basse Egypte, à Kahoun, sur des objets, de la XII 8 dynastie, et à Médinet-Ghorab, sur des objets de la XVIIIe et de la XIX » dynastie. Ce sont des marques de potier ou de maçon, qui reproduisent des signes hiératiques et des lettres des alphabets phénicogrecs. L’auteur de cette découverte, FI. Pétrie, les attribue à des prisonniers de race méditerranéenne, que les Égyptiens employaient comme captifs aux travaux publics. Ces travailleurs étrangers ne furent pas vraisemblablement initiés à l’écriture hiéroglyphique ; mais ils purent apprendre des maçons égyptiens, avec qui ils vivaient, l’usage des

marques d’ouvrage. On finit par employer ces marques hiéroglyphiques pour reproduire le son des mots qu’elles représentaient. Après avoir été d’abord une simple convention d’ouvriers, ces signes syllabiques furent transportés à travers la Méditerranée par le commerce international et servirent de mode d’écriture pour d’autres usages que leur emploi primitif. Ainsi ils pourraient être considérés comme un anneau intermédiaire entre les signes hiératiques et l’alphabet phénicien. FI. Pétrie, Kahun, Gurob and Hawara, in-4°, Londres, 1890. Cf. Revue critique d’histoire et de littérature, du 27 avril 1891, p. 322-323.

L’époque à laquelle les Phéniciens ont tiré leur alphabet des caractères hiératiques égyptiens est incertaine. On la fixe au temps de la domination des Hyksos. M. de Vogué, Corpus inscripfionum serniticarum, part, ii, t. i, Paris, 1889, p. il. Renan, Histoire du peuple d’Israël, t. i, Paris, 1887, p. 134-136, a précisé le lieu de l’emprunt. Ce lieu serait San ou Tanis, centre de l’empire des Hyksos. Ces Chananéens adaptèrent l’hiéroglyphisme égyptien à leur langue et transcrivirent les noms sémitiques au moyen d’un choix de vingt-deux caractères hiératiques. L’emprunt doit être plus ancien, car des découvertes récentes nous ont appris que les relations des tribus chananéennes avec l’Egypte ont précédé l’invasion des rois Pasteurs. D’ailleurs la présence de signes identiques aux caractères phéniciens sur les monuments de Kahun, qui remontent à trois mille ans environ avant notre ère, prouve au moins que les premiers essais d’alphabétisme sont bien antérieurs aux Hyksos. Tout ancienne que soit son origine, l’écriture alphabétique n’est devenue usuelle et commune chez les tribus palestiniennes qu’à une époque assez tardive, vers le XIVe ou le xm » siècle avant notre ère. En effet, la correspondance trouvée à Tell-el-Amarna nous a révélé que l’écriture cunéiforme était employée au xve siècle avec la langue assyrienne comme moyen officiel de communication entre le roi d’Egypte et ses tributaires ou alliés de la Mésopotamie, de la Syrie et de la Palestine. Si l’écriture alphabétique avait été répandue alors dans les pays araméens et phéniciens, les gouverneurs de Byblos, de Sidon et de Jérusalem auraient sans doute écrit au pharaon en phénicien, avec des caractères alphabétiques. L’emploi de ces caractères était donc alors limité. La nouvelle écriture n’était pas encore une écriture littéraire ; elle servait surtout aux Phéniciens dans leurs relations commerciales et n’était guère employée par les tribus chananéennes et autres qui habitaient l’intérieur de la Palestine. A. Loisy, Histoire critique du texte et des versions de la Bible, dans L’enseignement biblique, Paris, 1892, p. 64-70.

2° Époque à laquelle les Hébreux ont adopté l’écris ture phénicienne. — Nous manquons de renseignements précis pour déterminer cette époque, et nous ne pouvons dire avec certitude si les Israélites connurent l’alphabet durant leur passage en Palestine avant leur entrée en Egypte, ou seulement pendant leur séjour dans la terre de Gessen. Les philosophes français du siècle dernier niaient que Moïse fût l’auteur du Pentateuque, sous le faux prétexte que l’écriture n’était pas inventée de son temps. Tout en reconnaissant l’existence de l’alphabet avant Moïse, les rationalistes prétendent encore que les Hébreux ont appris à écrire sous les Juges, et qu’en Israël l’écriture est postérieure à Moïse et à Josué de trois à quatre cents ans. E. Reuss, L’histoire sainte et la loi, Paris, 1879, t. i, p. 114 ; E. Renan, Histoire du peuple d’Israël, Paris, 1887, 1. 1, p. 143 et p. 181, note 3. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. ii, p. 548-551. On peut soutenir que l’écriture était connue en Chanaan avant l’exode, et que malgré leur vie nomade les patriarches Abraham, Isaac et Jacob s’en servirent dans leurs relations d’affaires avec les habitants de la Palestine. Trochon, Introduction générale, Paris, 1886, 1. 1, p. 259-260. Il y a tout lieu de penser que, s’ils n’avaient 1575

écriture hébraïque

1576

pas auparavant l’usage de l’alphabet, les Israélites le prirent durant leur séjour dans la terre de Gessen. Ignorant la langue des Égyptiens, Gen., xlii, 23, ils ne furent guère sans doute initiés aux hiéroglyphes. Ne se mêlant pas avec la population égyptienne, habitant près de la frontière, en contact avec des Chananéens, ils adoptèrent plutôt l’écriture phénicienne, qui servait à reproduire une langue voisine de la leur. D’ailleurs ils comptaient parmi eux, durant la persécution, des chefs d’équipe qui, sous les ordres des officiers royaux, surveillaient les corvées. Exod., v, 6, 10, 15. On les nommait Sôterim, c’est-à-dire « scribes ». Ils savaient écrire et ils notaient la présence de tous les ouvriers, la quantité de matériaux employés et la besogne accomplie. Les quatre derniers livres du Pentateuque nous fournissent d’autres renseignements qui montrent que les Israélites faisaient au temps de Moïse un usage fréquent de l’écriture. Sans

Jud., viii, 14. Lorsque la royauté fut établie en Israël, Samuel rédigea le pacte de la monarchie et le déposa auprès de l’arche. I Reg., x, 25. À partir de cette époque, l’usage de l’écriture fut très répandu. David et ses successeurs eurent auprès d’eux une sorte de secrétaire d’État, qui rédigeait et conservait les actes publics. Les annales du royaume furent tenues régulièrement depuis Salomon. Malheureusement nous ne possédons aucun document de ces temps reculés. Les plus anciennes inscriptions sémitiques sont seulement du ix" siècle avant Jésus-Christ. Nous pouvons suivre dès lors les modifications successives de l’écriture hébraïque.

3° Développement de l’écriture hébraïque. — Au moment où nous la trouvons, cette écriture est encore : presque identique avec l’écriture phénicienne. Cependant les deux alphabets se diversifient déjà dans deux sens divergents, qui donneront deux types différents. Lés diver 519. — Inscription phénicienne sur le bord d’une coupe en bronze dédiée a BaaI-Lebanon. Cabinet des antiques de la Bibliothèque nationale de Paris. — D’après le Corpus inscriptionum semiticaTUm, part. 1, 1. 1, pi. iv, n° 5.

Partie supérieure de-la coupe : n nsma rramnn m » fiab Srab jn> w niiï-bn mn iay rrannmp pDl. « … sôken de Qartahdast, serviteur de Hiram, roi des Sidoniens. Il a donné ceci a Baal - Lebanon, son seigneur, des prémices de l’airain… » — Petit fragment à gauche : « rwrnnp JDD 313, I …tob, Sôken de Qartahdast… » — Petit fragment a droite : >3TN pab Sy[38], « … [à Ba] al -Lebanon, son seigneur. »

parler des tables du Décalogue, gravées par Dieu lui-même, Exod., xxiv, 12 ; xxxi, 18 ; xxxii, 15 et 16, etc., Moïse écrit par ordre divin le récit de la victoire remportée sur Amalec, Exod., xvii, 14 ; les conditions de l’alliance avec le Seigneur, qu’il lut au peuple, Exod., xxiv, 4 et 7 ; la suite des campements depuis Ramessès jusqu’au mont Hor, Num., xxxiii, 2 ; le livre de la Loi, qu’il remit aux lévites et aux anciens. Deut., xxxi, 9. Cf. xxviii, 58 et 61 ; xxix, 20 et 27 ; xxxi, 19-26. Les noms des tribus d’Israël sont gravés surl’éphod d’Aaron. Exod., xxviii, 9-12. Une inscription se lit sur la lame d’or qui servait de coiffure au grand prêtre. Exod., xxviii, 36, et xxxix, 29. Les noms des tribus sont écrits sur douze verges. Num., xvii, 2. Le prêtre devait transcrire les malédictions lancées contre la femme adultère, et les effacer dans les eaux amères que l’accusée devait boire. Num., v, 23 et 24. Chaque Israélite était obligé d’écrire sur sa porte le Décalogue. Deut., vi, 9 ; xi, 20. Le mari qui répudiait sa femme était tenu de lui remettre un acte de divorce. Deut., xxiv, 1. Moïse ordonne au peuple d’écrire sur des pierres une partie de la législation, Deut., xxvii, 2-8, et cet ordre est exécuté après le passage du Jourdain. Jos., viii, 32. Une description du pays de Chanaan est écrite dans un livre pour préparer le partage entre les tribus. Jos., xviii, 6-9. Le renouvellement de l’alliance divine fut rédigé par Josué dans le volume de la Loi du Seigneur. Jos., xxiv, 26. Un jeune homme de Soccoth écrivit pour Gédéon les noms des notables de l’endroit.

gences se produisent sous l’influence de la rapidité du mouvement, qui amène la main à se soulever le moins possible, Le plus ancien spécimen du type phénicien est une inscription tracée sur le bord d’une coupe en bronze, qui a été découverte, vers 1876, dans l’île de Chypre, et qui est dédiée au dieu Liban (fig. 519). Le caractère archaïque de l’écriture oblige à placer cette inscription au plus tard à 800 ans avant notre ère. Quelques pierres gravées, telles que le sceau de Molokram, trouvé sous le pied d’un des grands taureaux ailés du palais de Khorsabad, appartiennent à la même période. Certaines inscriptions de Sardaigne, quoique plus récentes, reproduisent le même type. Dans les épigraphes tracées sur les jambes d’un des colosses du grand temple d’Ipsamboul, entre 650 et 595 avant notre ère (fig. 520), l’écriture phénicienne est en voie de transformation ; quelques lettres ont déjà la forme du phénicien classique. La stèle de Byblos offre l’exemple le plus remarquable de cette écriture de transition. La plupart des caractères y ont une tournure moderne. Les inscriptions les plus récentes (400-100 avant J.-C.) se rapportent à trois types bien distincts : le type sidonien, dans l’inscription du sarcophage d’Esmunazar, vers 380 ; le type cypriote, dont le sommet des lettres s’entr’ouvre, et le type carthaginois, dont l’écriture est plus légère et plus élancée. Par une dernière modification, l’écriture phénicienne aboutit en Afrique, sous la dominatioii romaine, à l’alphabet néo-punique. Ph. Berger, Histoire de récriture dans l’antiquité, Paris, 1891, p. 169-187. 1577

écriture hébraïque

1578

De son côté, l’écriture hébraïque se développe dans une direction différente. Nous en possédons peu de monuments. Bien que moabite, la stèle de Mésa appartient à la même famille paléographique que l’hébreu. L’inscription qui y est gravée reproduit la série complète des lettres de l’alphabet. On y observe déjà une tendance marquée à pencher les caractères et à recourber leur queue. Les lettres quiescentes y sont employées plus souvent que dans le phénicien. Tous les mots sont séparés l’un de l’autre par un point. L’écriture présente des traces d’usure qui attestent un emploi déjà assez long de l’alphabet. Elle a aussi les traits distinctifs qui deviendront les marques caractéristiques de l’écriture hébraïque. Les angles sont très aigus et fortement accusés ; les barres transversales du hé, du iod, du zaïn et du tsadé acquièrent une importance qu’elles n’ont pas en phénicien ; le vav présente une forme arrondie très particulière. Ces caractères sont encore plus sensibles sur les pierres gravées

jours dans l’écriture samaritaine. Les monuments de cette écriture sont des manuscrits du Pentateuque et des inscriptions provenant de Naplouse. Les manuscrits ne remontent pas au delà du Xe siècle de notre ère. Les inscriptions sont plus anciennes. On a voulu les rapporter à l’époque du temple de Garizim, qui fut détruit l’an 129 avant J.-G. Mais, plus probablement, elles sont seulement antérieures à la révolte des Samaritains sous Justinien I er, en l’an 529 de notre ère. L’alphabet qu’elles reproduisent est sensiblement le même que celui des manuscrits, et il dérive de l’ancienne écriture hébraïque. Les enjolivements y tiennent une trop grande place et donnent à l’écriture samaritaine quelque chose de factice et de capricieux. Elle paraît s’être arrêtée à un moment de son développement et être devenue hiératique. Anguleuse et massive, elle se replie sur elle-même et elle s’immobilise dans ses caractères stéréotypés. Ph. Berger, Histoire de l’écriture dans l’antiquité, p. 188-204. « 20. — Inscription phénicienne des colosses d’Ipsamboul. D’après le Corpus Inscriptionum semitiearum, part. i, pi. xx, n « 112. C’est une série de graffiti, contenant des noms propres. Voir laid., p. 131-135.

à légendes hébraïques. Mais ces cachets n’ont que très peu de lettres. Un monument plus complet, c’est l’inscription commémorative du percement du canal de Siloé. Voir t. l, col. 805 - 806. Il date du règne d’Ézéchias, delà fin du vin" siècle. Les mots sont séparés par un point, comme dans l’inscription de Mésa (voir Mésa). Les lettres ont quelque chose d’archaïque et de heurté ; leurs profils sont nettement accusés. Les queues, déjà penchées sur la stèle de Mésa, se replient de plus en plus sous la lettre.

Telles sont les modifications qu’a subies l’écriture monumentale. Nous ne pouvons, faute de documents, suivre les transformations de la paléographie manuscrite. Il nous est impossible de savoir si l’écriture a subi les mêmes changements dans les manuscrits que sur les monuments. Nous pouvons soupçonner seulement, d’après la règle générale et par analogie avec l’écriture araméenne, que l’écriture manuscrite des Hébreux s’est altérée plus vite que celle des inscriptions. Une grande lacune nous dérobe pendant plusieurs siècles l’écriture hébraïque, et, quand nous la retrouvons, elle est totalement modifiée ; elle s’est confondue avec l’écriture araméenne, dont est sorti l’hébreu carré. Cependant, même après cette substitution, l’ancienne écriture a persévéré dans la numisr matique. Sous les Machabées, quand l’hébreu carré est déjà devenu l’écriture courante, les monnaies frappées par Simon et ses successeurs ont toutes des légendes en caractères archaïques. Le même retour aux formes anciennes se retrouve sur les monnaies de Barcochébas, dont la révolte amena la ruine définitive du judaïsme, en l’an 134 après Jésus-Christ.

L’alphabet phénicien a même persévéré jusqu’à nos

4° Manière dont l’écriture phénicienne était transcrite.

— Les verbes qui désignent l’action d’écrire, kâfab, bê’êr, hârat, « tailler, sculpter, » nous indiquent que l’écriture fut d’abord gravée. Nous savons que les Hébreux ont gravé sur la pierre des inscriptions commémoratives ou des textes assez courts, comme le Décalogue et des passages de la Loi. Exod., xxrꝟ. 18 ; xxxiv, 28 ; Deut., xxvii, 8 ; Jos., viii, 32. Ils écrivaient aussi sur des plaques de métal, Exod., xxviii, 36 ; Job, xix, 24, et sur des tablettes de bois. Num., xvii, 3 ; Ezech., xxxvii, 16 et 17. Mais cette écriture monumentale ne pouvait être employée pour les œuvres littéraires un peu étendues, ni dans l’usage ordinaire. On ne voit pas que les Israélites aient eu coutume d’écrire sur l’argile, comme on le faisait à Ninive et à Babylone. Une Bible écrite sur des briques exigerait une grande bibliothèque pour la loger. Nous n’avons pas de renseignements explicites sur la matière dont les Hébreux se servaient pour écrire leurs livres. Mais le nom de « rouleau », megillâh, Ps. xxxix, 8 ; Jer., xxxvi, 2 ; Ezech., ii, 9 ; iii, 1-3 ; Zach., v, 1-2, laisse supposer que les livres étaient formés d’une matière flexible, peau préparée, papyrus ou étoffe. Des bandes de papyrus ou de cuir étaient rattachées l’une à l’autre et s’enroulaient autour de deux bâtons. De simples feuillets de papyrus ou des morceaux de parchemin servaient à recevoir des écrits plus courts. On n’écrivait que d’un seul côté. Dans les rouleaux, le texte était disposé en colonnes perpendiculaires, allant de droite à gauche. Les pages étaient appelées delâtôf, « portes, » Jer., xxxvi, 23, probablement à cause de leur ressemblance avec une porte rectangulaire.

Les caractères étaient gravés sur la pierre avec un 4579

écriture hébraïque

1580

style, l.iérét. Is., viii, 1. Cf. Job, xix, 24. Pour l’écriture ordinaire, on employait le calame, ’et (voir col. 50-53), qu’on taillait avec le canif (voir col. 131). Le calame portait l’encre, Jer., xxxvi, 18 (voir Encre), et traçait les lettres. À l’origine, les scribes hébreux ne séparaient pas les mots les uns des autres, et leur écriture était continue, sans interruption ni intervalle. Sur la stèle de Mésa et dans l’inscription de Siloé, les mots sont distingués par un point. On ne peut affirmer avec certitude qu’il en était de même dans l’écriture cursive, et il se pourrait que dans les manuscrits la séparation n’ait pas été marquée. Le Pentateuque samaritain a conservé l’usage du style lapidaire, et des points sont placés entre les mois. Cf. Trochon, Introduction générale, Paris, t. ir, 1887, p. 6C6-669 ; A. Loisy, Histoire critique du texte et des versions de

Voir d’autres variantes dans Montfaucon, In Hexapla prxlim., Patr. gr., t. xv, col. 41-46.

II. Écriture assyrienne. — 1° Écriture araméenne.

— Les Hébreux, après le retour de la captivité de Babylone, changèrent d’écriture et remplacèrent l’alphabet phénicien, dont ils s’étaient servis dès l’origine, par l’alphabet araméen. Celui-ci dérivait du premier, et il s’en était distingué par des modifications successives, dont on peut se rendre compte par les monuments. Les Araméens ou Syriens donnèrent peu à peu à l’écriture phénicienne, qu’ils avaient adoptée, cette forme cursive, qui est appropriée au génie de leur race, qui a été acceptée par les autres peuples sémitiques, et qui a fait d’eux les propagateurs de l’alphabet dans le monde oriental. Une inscription découverte à Singerli, au nord d’Antioche, et con 521. — Papyrus Borgianus. — D’après le Corpus tnscHptionum semUicarnm, part, ii, t. î, pi. xv, n° 111.

…pi nn> >b » iD N-i>-iun mn N » n.3 — …omis "p 37 nnrrrnriD > » id bb ».1 « 1. À mon seigneur Mithravahlst, ton serviteur Palitm… — 2. vivant, joyeux et fort. Mon seigneur, qu’il soit… »

la Bible, dans L’enseignement biblique, Paris, 1892, p. 96-100.

5° Influence de l’ancienne écriture sur la version des Septante. — Cette traduction a été faite sur des manuscrits écrits en caractères phéniciens. En effet, Origène, Selecta in Ps. ii, t. xii, col. 1104, dit que les meilleurs manuscrits grecs de cette version reproduisaient le nom ineffable de Dieu avec les anciens caractères hébraïques, êëpïi’xoïc àpxafoiç -(piy.y.aai, . Or certaines variantes qui existent entre la version grecque et le texte hébreu s’expliquent seulement par l’ancienne écriture. Ainsi plusieurs leçons proviennent d’une confusion de lettres, qui n’a été possible qu’avec l’alphabet phénicien : 6aio61[i (pxii) au lieu de pïN, Gen., xlvi, 16 ; t^ç ènaûXecoi ; (rrnxiirT) au lieu de rvn’nn, Exod., xiv, 2 ; ttj ; (rro16r)ç (nwiîn) au lieu de nain ?, Ruth, iii, 7 ; XocX^cn) ("m>) au lieu de nar », Ps. xvii, 3 ; jioi (>b) au lieu de xb, Ps. xxxv, 20 ; xparatoùç (dhdk) au lieu de nnn », Ps. CXXXVI, 18 ; çoeYWnevoç ("in » ) au lieu de iwb », Lam., 1, 12, etc. Cf. F. Kaulen, Einleitung in die heilige Schrift, 3e édit., Fribourg, 1890, p. 63. D’autre part, l’écriture continue a produit des coupures différentes de la séparation actuelle des mots. Ainsi les mots jssn » ay pi, Zach., XI, 7 et 11, ont été traduits : eiç ttjv Xavaocvfttv, parce que les traducteurs n’ont fait qu’un seul mot des deux premiers et ont lu likna’anî au. lieu de lâkên’aniyê. F. Vigoureux, Manuel biblique, 9e édit., 1895, 1. 1, p. 196.

temporaine de la chute de Samarie, sinon antérieure, par conséquent de la seconde moitié duviir 5 siècle avant notre ère, montre la transition entre l’écriture phénicienne et l’araméenne. Les caractères y sont très mélangés ; quelques-uns ont gardé les anciennes formes phéniciennes ; d’autres, comme le iod, ont déjà les signes distinctifs de l’écriture araméenne. Les mots et parfois même des lettres isolées sont séparés par des points, comme sur la stèle de Mésà. Le même mélange se rencontre dans les plus anciennes inscriptions araméennes des poids de bronze qui ont été trouvés dans les ruines de Ninive, et dont l’alphabet se confond presque avec le phénicien. Le changement est très petit en apparence, mais il est caractéristique. Dans toutes les lettres qui ont une tête fermée, le sommet s’ouvre ; il se fait comme un trou, et au lieu d’un triangle il ne reste qu’une petite cavité dont les parois latérales vont en diminuant. Les divergences s’accusent de très bonne heure et vont rapidement en augmentant. Ces modifications rapides proviennent de l’emploi fréquent de l’écriture araméenne comme écriture cursive et populaire.

A l’époque perse, l’écriture araméenne prit une grande extension et devint l’instrument officiel des relations quotidiennes des rois perses avec leurs vassaux. Par suite, elle s’altéra vite. On peut suivre la marche des modifications et en déterminer les lois. La transformation s’opéra de trois façons à la fois : 1. par la suppression de 1581

écriture hébraïque

1582

la tête des lettres ; 2. par l’effacement des angles ; 3. par une sorte de retour des lettres sur elles-mêmes. Elle s’explique par l’usage du papyrus et de l’écriture cursive. L’élan de la main en écrivant amène ces modifications. Toutes les inscriptions de cette période ne présentent pas le même degré d’altération pour toutes les formes. Il y a de grandes variétés d’un pays à l’autre et parfois sur le même monument. Les nouveaux caractères se trouvent réunis sur les papyrus (fig. 521) et les monuments araméens d’Egypte qui datent de 500 à 200 avant Jésus-Christ. L’écriture diffère tout à fait de la phénicienne, et on l’a appelée araméenne de transition, parce qu’elle sert d’intermédiaire entre l’ancien alphabet et toutes les écritures sémitiques modernes. Sur la stèle de Teima, découverte en Arabie, en 1883, par Ch. Huber (fig. 522), les lettres sont mieux formées que sur les mo- 522. — Inscription de Teima.

D’après le Corpus inscript, semit., part, ii, pi. x, n « 114.

rÔN obs’T j[-i].3 np >i N3n>[D].1

nïrsa » nS n.4 Dy na I37D[3] s « 1. Trône qu’a offert — 2. Ma’anân, flls de’Im — 3. rân, an dieu Salin, — 4. pour sa vie. »

numents araméens d’Egypte, bien qu’elles appartiennent au même type. À la fin de la période perse, l’écriture araméenne, devenue l’écriture populaire et courante, est adoptée par tous les peuples sémitiques. Nous suivrons ses modifications postérieures chez les Hébreux seulement. Ph. Berger, Histoire de l’écriture dans l’antiquité, p. 205-220 ; M. de Vogué, Corpus inscriptionwn semiticarum, pars il", t. i, Paris, 1889, proœm., p. n-v.

2° L’écriture araméenne devient l’hébreu carré. — L’hébreu carré, tel que nous l’écrivons encore aujourd’hui, dérive de l’écriture araméenne, qui s’est substituée peu à peu chez les Juifs à l’écriture phénicienne. Les auteurs juifs attribuent cette substitution à Esdras. Ils appellent la nouvelle écriture nnwK, assyrienne, parce qu’ils l’ont rapportée du pays de. la captivité, et ils la distinguent de l’ancienne, qu’ils nomment nnsy, hébraïque. Talmud de Jérusalem, traité Meghilla, trad. Schwab, t. vi, Paris, 1883, p. 212-213. Origène, Selecta in Psalmos, ii, 2, t. xii, col. 1103, et saint Jérôme, Prologus galeatus, t. xxviii, col. 548-549, ont connu cette tradition, que les Juifs acceptent encore. Cf. L. Wogue * Histoire de la Bible et de l’exégèse biblique, Paris, 1881, p. 115 -118 ; Ad. Neubauer, The Introduction of the Square Characters in Biblical Mss., dans les Studia B’tblica, t. iii, 1891, p. 1-22. Mais les critiques modernes pensent généralement que ce changement d’écriture est moins ancien et qu’il s’est fait progressivement. Il ne peut être attribué ni à l’activité personnelle ni même à l’influence d’Esdras. L’écriture carrée n’est que l’écriture ancienne peu à peu transformée par les calligraphes,

sous l’influence et à l’imitation des Araméens. L’écriture hébraïque s’aramaïsa en même temps que la langue hébraïque, et elle suivit les mêmes phases que la paléographie araméenne. On constate sur les monuments ses transformations progressives.

Il faut en placer le point de départ au ve ou au vie siècle avant notre ère. À cette époque, le peuple juif a été mis en rapport direct et constant avec la civilisation araméenne, et il en a subi l’influence. Le premier terme de, comparaison des écritures doit être emprunté aux papyrus araméens d’Egypte. On peut penser que les prophètes contemporains de la captivité écrivaient leurs œuvres, et que la Loi était transcrite au temps d’Esdras avec des caractères à peu près analogues. On se représente ainsi l’aspect du texte à cette époque, et on comprend l’origine de certaines fautes de copistes. La transition de cette écriture araméenne cursive à l’hébreu carré ne fut pas brusque et ne se produisit pas de la même façon pour toutes les lettres. Les formes anciennes gardèrent plus longtemps leur pureté primitive dans l’écriture monumentale que dans les manuscrits. Le nom de Tobie, lu sur les soubassements de la citadelle d’Araq-el-Émir, est un document de la transformation. Le hé, le beth et le iod ont encore une forme nettement araméenne. Or le iod en particulier rend mieux compte de l’hébreu carré que celui des papyrus araméens.

Nous trouvons l’hébreu carré entièrement formé dans les inscriptions de Jérusalem et des environs, du I er siècle avant notre ère. L’inscription du tombeau de Benê Hézir, dit tombeau de saint Jacques, reproduit l’écriture carrée avec ses caractères distinclifs, qui dérivent de la triple tendance de l’alphabet araméen à l’époque perse. La tête des lettres a complètement disparu, et il ne reste plus que la base du crâne, qui forme comme une barre continue. Cependant le beth, le daleth, le caph et le resch gardent encore un vestige de la tête, une légère encoche qui dépasse la ligne. L’appendice qui dans le hé, le heth et le tliav surpasse la barre, ira peu à peu en diminuant, et disparaîtra entièrement vers le me ou le iv « siècle de notre ère. Le iod garde encore ses dimensions premières et son inclinaison sur la ligne, mais il perd la barre transversale qui le distinguait du zaïn, Il sera réduit bientôt à un simple trait, plus ou moins grand, qui se transformera insensiblement en un point, le > de l’hébreu moderne.

Dans les inscriptions des deux synagogues de Kefr-Berein (fig. 523 et 524), que Benan rapporte au m » ou au IVe siècle avant notre ère, l’hébreu carré est définitivement constitué. D’autres exemples de l’hébreu carré nous sont fournis par l’inscription de la synagogue d’Alma, par celles de la synagogue de Palmyre, qui datent probablement de l’époque de Zénobie. L’écriture palmyrénienne ressemble singulièrement à l’hébreu carré ; ce sont deux écritures sœurs, deux rameaux parallèles et à peu près contemporains de l’écriture araméenne. Celle de Palmyre est plus ornementée ; l’hébreu carré est plus massif et plus anguleux. Les lettres se referment par en bas, sauf dans les finales, qui s’allongent au-dessous de la ligne, et dont l’apparition, excepté pour le nun, ne date guère que des premiers siècles de notre ère. Les dernières traces d’archaïsme disparaissent à la même époque.

Aux vu" et vm’siècles de notre ère, l’hébreu arrive à sa forme à peu près définitive. Les rabbins le regardent comme une écriture sacrée ; ils le stéréotypent, pour ainsi dire. Les caractères n’ont pas toujours la régularité mathématique des types de l’imprimerie ; cela tient exclusivement à la main du scribe. Dans les manuscrits et les rouleaux des synagogues, l’écriture reste la même et ne subit plus de transformations pareilles à celles des âges antérieurs. Les Juifs du moyen âge en ont tiré cependant une écriture cursive, qu’on appelle l’hébreu rabbinique. Il revêt, suivant les pays, des formes assez différentes. Sans parler des manuscrits babyloniens (voir 1. 1, col. 1359), 1583

écriture hébraïque

1584

les manuscrits occidentaux présentent trois types différents d’écriture. Les manuscrits allemands et polonais ont des caractères anguleux ; les manuscrits espagnols ont des lettres carrées et majestueuses ; les manuscrits français et italiens ont des formes intermédiaires. Ph. Berger, Histoire de l’écriture, p. 252-263 ; M. de Vogué, L’alphabet araméen et l’alphabet hébraïque, dans la Revue archéologique, 1865, p. 319-341, et dans les Mélanges d’archéologie orientale, Paris, 1868, p. 164-166 ; A. Loisy, Histoire critique du texte et des versions de la Bible, dans L’enseignement biblique, 1892, p. 80-95.

Berein, la distinction des mots n’est que peu ou point marquée. Il n’est donc pas certain que dans les manuscrits communs on ait toujours laissé un intervalle entre les mots. La séparation a dû se régulariser avec l’usage des lettres finales. Le Talmud de Babylone, Menachoth, 30 a, détermine l’espace exact qu’il faut laisser entre chaque mot dans la transcription des Livres Saints. Celui de Jérusalem, Meghilla, trad. Schwab, t. vi, Paris, 1883, p. 213-217, y ajoute d’intéressants détails, dont voici le résumé. Les rouleaux de la Loi doivent être écrits sur des morceaux de parchemin, cousus ensemble par des

SÏ3. — Inscription d’une des fenêtres de la synagogue I de Kefr-Bereln en Galilée. TH. » 12 "ITy’îN …3 <i B… Éléazar… ?… » D’après E. Renan, Mission de Fhéaicie, pi. lxx et p. 764.

Consulter les tableaux des différents alphabets, t. i, col. 407-414.

3° Manière d’écrire durant cette période. — Les matériaux sur lesquels on écrivait furent les mêmes que durant la période précédente. Cependant le parchemin supplanta graduellement le papyrus. Les traducteurs grecs de Jérémie, xxxvi, 2, 4, 6, et d’Ézéchiel, ii, 9, se servent de termes qui supposent l’emploi du papyrus. Josèphe, Ant. jud., XII, ii, 11, rapporte que Ptolémée Philadelphe

nerfs. Chaque bande contiendra trois colonnes au moins et huit au plus. Les lignes sont tracées avec un jonc. Il faut laisser entre deux lignes l’équivalent d’une ligne, entre deux mots l’espace d’une lettre, entre deux lettres un espace infime, entre deux pages la largeur d’un pouce. La longueur et l’épaisseur du parchemin ne sont pas déterminées ; mais il faut laisser en haut une marge de deux doigts, et en bas une marge de trois doigts. On établira un cjlindre de bois sur lequel on collera la fin

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524. — Inscription de la porte de la synagogue II de KefrBerein. Cette inscription, sur un listel de 5 centimètres de large

ménagé à la partie inférieure du linteau, est sur une seule ligne, qui a été ici partagée en deux.

Partie supérieure de notre fac-similé : DV "ww WDipD " « ai niîl DipD3 obw >n>

(Partie inférieure) VWÏD3 roia N3n n » l rjipwn nwy lV) J3 >-ftn n « Soit la paix en ce lieu et dans tous les lieux (de réunion) d’Israël i Jos |] é, lévite, fils de Lévl, a fait ee linteau.

Vienne la bénédiction sur son œuvre ! » D’après E. Renan, Mission de Pliénicie, pi. lxx et p. 766-771,

admira beaucoup, pour la finesse du parchemin et la beauté des caractères, l’exemplaire du Pentateuque que le grand prêtre lui avait envoyé de Jérusalem. La forme du manuscrit continua longtemps encore à être le rouleau. Après le commencement de l’ère chrétienne seulement, les manuscrits des particuliers prirent la forme des codices ordinaires. Pour l’usage liturgique, on a maintenu jusqu’à nos jours les anciens rouleaux. R. Simon, Histoire critique du Vieux Testament, 1. I, ch. xxi, Rotterdam, 1685, p. 117-121, et Lettres choisies, 2e édit., Amsterdam, 1730, t. iv, p. 190-195. Quant à la séparation des mots, elle existe sur certains monuments de l’écriture araméenne. Les inscriptions de Ninive et de Babylone la marquent quelquefois par un point, le plus souvent par un intervalle. Les papyrus araméens d’Egypte mettent aussi un intervalle entre chaque mot. Mais dans d’autres textes, comme les inscriptions de Palmyre, celles du tombeau des Bené Hézir et de la synagogue de Kefr d’un texte complet de la Bible. Pour le Pentateuque, il y aura deux bois, un à chaque bout. Ainsi une bible complète sera enroulée de façon à laisser le commencement ouvert ; pour le Pentateuque, on laissera libre le milieu. Les lettres finales sont regardées comme de tradition mosaïque. — Plus tard, les massorètes ne se bornèrent pas à inventer les points-voyelles ; ils étudièrent aussi les consonnes et notèrent les moindres particularités des manuscrits. Ils distinguèrent les majuscules, les minuscules et les lettres renversées ou suspendues. J. Buxtorf, Tiberias, Bâle, 1620, p. 152-173. Ces minutieuses remarques furent scrupuleusement observées dans la transcription des textes sacrés, et firent de l’écriture hébraïque une écriture hiératique, dont les plus légères modifications contenaient des mystères.

III. Bibliographie. — Gesenius, Gescldchte der hebrâischen Sprache und Schrift, in-8°, Leipzig, 1815 ; E. A. Steglich, Schrift und Bucherwesen der Hebrâer, 1585

écriture hébraïque — ed

1586

Leipzig, 1876 ; Héron de Villefosse, Notice des monuments provenant de la Palestine, in-8°, Paris, 1876 ; Conder, Hebreiv Inscriptions, dans Palestine Exploration Fund, octobre 1883, p. 170 ; Corpus inscriptionum semiticarum, Paris, 1881-1893 ; Chwolson, Corpus inscriptionum hebraicarum, in-4°, Saint-Pétersbourg, 1882.

E. Mangenot. ÉCRIVAIN (hébreu : sôfér, « celui qui écrit » ). LaVulgate a traduit deux fois par scriptor, « écrivain, » Ezech., IX, 2, 3, le mot hébreu sôfêr, qu’elle traduit ailleurs par scriba. Voir Scribe. Dans les deux versets cités, le prophète parle de l'écritoire que « l'écrivain » porte à sa ceinture. Voir Écritoiiie.

    1. ÉCURIE##

ÉCURIE ( hébreu : 'uryâh ou 'urvâh, « crèche, mangeoire », et, par suite, écurie ; Septante : çixvri ; Vulgate : stabulum, prxsepe), lieu où l’on renferme les chevaux ou les autres animaux de selle ou de trait. La Bible ne parle d'écurie que dans deux circonstances. — 1° Quand Salomon eut acquis un grand nombre de chevaux, il les plaça dans des écuries réparties entre Jérusalem et les villes où il tenait ses chars. I Reg., v, 6 (Vulgate, III Reg., iv, 26, prassepia ; Septante, dans le Codex Alexandrinus : toxotSeç, puerperse equse). II Par., IX, 25 (Vulgate : stabula ; Septante : O^Xsiai, fœminse [equse]). — 2° Ézéchias, dit le texte sacré, eut « des écuries (Vulgate : prsssepia ; Septante : cpàtvaî) pour toute espèce de bêtes (behêmâh) et des écuries (étables ; Vulgate : caulas ; Septante : ^àvôpa ; ) pour les troupeaux ('àdârirn) ». II Par., xxxii, 28. Nous n’avons aucun détail sur la construction des écuries des Hébreux. Les souterrains situés au sud-est de l’angle du Haram, à Jérusalem, et qui sont connus sous le nom d' « Écuries de Salomon », sont d’une époque inconnue, mais sans doute bien postérieure à ce prince. Voir Chauvet et Isambert, Syrie, Palestine, 1882, p. 287. Les monuments égyptiens nous montrent des ânes mangeant dans une écurie (flg, 525). On voit aussi sur un monument représentant une villa une écurie où est un cheval. Wilkinson, The manners and customs of the ancient Egyptians, 2e édit., in-8°,

525. — Anes à leur mangeoire. xviii « dynastie. Tell el-Amarna. D’après Lepsius, Denkmaler, Abth. iii, B l. 95.

Londres, 1878, t. i, p. 370, pi. ix. Un monument assyrien (reproduit flg. 250, col. 679) représente une écurie où plusieurs chevaux sont en train de manger, tandis qu’un valet étrille un autre cheval. Voir Étable.

E. Beurlier. ÉCUYER (Vulgate : armiger), serviteur chargé de porter le bouclier ou les armes d’un chef. La langue hébraïque n’a pas de mot spécial pour nommer ce serviteur ; elle le désigne par une périphrase : han-na’ar nasê' këlim, « le jeune homme qui porte les armes, » Jud., IX, 54 ; I Sam. (Reg.), xiv, 1, 6, etc. ; noie' ha&hnâh, « celui qui porte le bouclier. » I Sam. (Reg.), xvii, 7, 41. Les Septante traduisent ces mots par to jrarôipiov -rô ai’pov xà eræiir), Jud., ix, 54 ; I Reg., xiv, 1, 9, etc. ; à aîpojv ta ôirXï. I Reg., xvii, 1. Les écuyers accompagnaient leur maître à la guerre, portaient ses armes et Jes lui donnaient quand il avait à s’en servir. — Le pre mier écuyer dont il soit fait mention est celui d’Abimélech, qui, à la demande de son maître, le perça de son épée. Jud., IX, 54. Il est question à plusieurs reprises de l'écuyer de Jonathas, fils de Saûl. I Reg. (Sam.), xiv, 1, 6, 7, 12, 13, 14, 17 ; I Mach., iv, 30. Saùl avait aussi un

526. — Écuyers du roi d’Assyrie. Nimroud. D’après Layard, Monuments, t. i, pi. 20.

écuyer, I Reg. (Sam.), xxxi, 4, 5, 6 ; I Par., x, 4, 5, qui refusa de tuer son maître après la défaite de Gelboé, malgré l’ordre qu’il en reçut. David fut pendant quelque temps écuyer de Saùl. I Reg. (Sam.), xvi, 21. Joab avait à sa suite plusieurs jeunes gens chargés de porter ses armes. II Reg. (Sam.), xviii, 15. L’un d’eux, qui était l'écuyer en titre, s’appelait Naharai. II Reg. (II Sam.), xxin, 37 ; I Par., xi, 39. — Les écuyers étaient armés pour leur propre compte et combattaient à côté de leurs maîtres. I Reg. (Sam.), xiv, 13, 14. L’usage d’avoir des écuyers existait aussi chez les Philistins ; Goliath est accompagné d’un homme qui porte son bouclier. I Reg. (I Sam.), xvii, 7 et 41. Il ne semble pas que les rois d’Egypte aient ainsi fait porter leurs armes, on ne voit auprès d’eux que le cocher monté sur leur char. Au contraire, les rois d’Assyrie (flg. 526) sont accompagnés de porteurs d’armes : l’un tient le carquois, un autre le bouclier. G. Rawlinson, The five great monarchies in the Eastem world, 4e édit., in-8°, Londres, 1879, t. i, p. 495, 506, 507, 515 ; Layard, Monuments of Niniveh, t. i, pi. 17, 20 et 23 ; t. ii, pi. 42. Cf. flg. 321, t. i, col. 1159. Ces serviteurs étaient des eunuques, à l’exception du porte-bouclier. Les rois de Perse avaient auprès d’eux des officiers portant leur carquois et leur arc. C'étaient des personnages importants à la cour. G. Rawlinson, The five great monarchies, t, iii, p. 209-210.

E. Beurlier. ED (hébreu : 'Êd ; Vulgate : Testimonium, « témoignage » ), nom donné à un autel élevé par les tribus transjordaniennes de Gad, de Ruben et de Manassé oriental. Jos., xxii, 34. Lorsque ces tribus eurent pris définitivement possession de leur territoire, elles élevèrent, dans le pays de Galaad, près du Jourdain, peut-être près de l’embouchure du Jaboc, « un grand autel. » Jos., XXH, 10. Les tribus cisjordaniques craignirent qu’il n’y eût là un acte de schisme ; mais ceux qui avaient érigé l’autel les rassurèrent, en leur expliquant qu’ils n’avaient

eu d’autre intention’que de faire de ce monument un’êd, un « témoignage » durable de leur alliance avec leurs frères, d’où l’appellation qui lui fut attribuée. Le texte hébreu massorétique, dans sa forme actuelle, non plus que les Septante, ne donnent formellement le nom de’Êd, Maprùpiov, à l’autel, mais le conteste le suppose, et quelques manuscrits, la Peschito et la version arabe portent comme la Vulgate : « On l’appela’Êd ou le Témoignage. »

EDDO (hébreu : ’Iddô ; omis dans les Septante ; Codex Alexandrinus : ’AOocvei’n), lévite, chef des Nathinéens, qui étaient en captivité à Chasphia (voir col. 615). Au temps du second voyage de Babylone à Jérusalem, Esdras les envoya prévenir de son retour dans la ville sainte, et il les pria de se joindre à lui. I Esdr., viii, 17.

    1. ÉDÉMA##

ÉDÉMA (hébreu : ’Âdâmâh, « terre ; » Septante : Codex Alexandrinus, ’ABaju ; Codex Vaticanus, ’Aplatit), par suite de la confusion fréquente entre le dalelh, t, et le resch, i), ville forte de la tribu de Nephthali, mentionnée une seule fois dans l’Écriture. Jos., xix, 36. S’appuyant sur l’origine du mot hébreu, qui signifie » rouges, Knobel a imaginé de l’identifier avec Ras el-Ahmar, « la tête » ou « le cap rouge », localité située au nord de Safed. Cf. Keil, Josua, Leipzig, 1874, p. 161. C’est une assimilation fantaisiste. D’après l’énumération de l’auteur sacré, dans laquelle elle est citée après Cénéreth, elle appartient au groupe méridional de la tribu ; elle en marque même, croyons-nous, la limite extrême. Les explorateurs anglais l’ont identifiée avec le village actuel de Damiéh, à deux lieues environ à l’ouest de Tibériade. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, 1881, t. i, p. 365 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Namés and places in the-Old and New Testament, Londres, 1889, p. 4. Il nous semble que cet emplacement convient mieux à une autre ville de la même tribu et à peu près du même nom, c’est-à-dire Adami. Jos., xix, 33. Voir Adami 1, t. i, col. 209. Aussi reconnaissons-nous plus volontiers Édéma dans Khirbet Admah, sur la rive droite du Jourdain, un peu au-dessous de l’embouchure du Yarmouk. Il y a d’abord correspondance exacte entre l’hébreu noiti, ’Adâmâh, et l’arabe L*M, Admâ. Ensuite

Édéma termine la liste des villes méridionales de Nephthali, Jos., xix, 35-36, comme le nom suivant, Arama, commence celle des cités du nord. Jos., xix, 36-38. — La liste géographique des pylônes de Karnak donne un nom, n° 51, dont on peut rapprocher celui qui nous

occupe ; c’est TlTtT fcji 1 | À „ SémèS-Aduma. Le même

mot se retrouve sur une stèle votive d’Amenhotep II, et désigne une ville près de laquelle le roi « frappa comme un lion les pays de Ma-mn-n », et qui ne devait pas être située plus haut qu’Achsaph et Dan ou Laïs. Cf. W. Max Mûller, Asien und Europa nach altâgyptischen Denkmàlern, Leipzig, 1893, p. 203-204. Le rang qu’occupe Sémes-Aduma dans la liste égyptienne cadre bien avec la position de Khirbet Admah. Elle est, en effet, mentionnée entre Biar ou Bir, qu’il est facile d’assimiler à El-Biréh, sur l’ouadi de même nom qui se jette dans le Jourdain au-dessous du lac de Tibériade, et Anoukharotou OU Anûhertû, qui n’est autre que VAnaharath de la tribu d’Issachar, Jos., xix, 19, aujourd’hui En-Na’ourah, à la partie septentrionale du Djebel Dahy ou PetitHermon. Voir Anaharath, t. i, col. 535, et la carte d’IssACHAR. Si maintenant l’on admet que la première partie de SémeS-Aduma ait pu tomber, il sera permis de rapprocher la seconde de l’Édéma de Nephthali. Cf. G. Maspero, Sur les noms géographiques de la Liste de Thoutmos III qu’on peut rapporter à la Galilée, Londres, 1886, p. 10. — Khirbet Admah n’offre rien de particulier, sinon quelques ruines et quelques

sources aux environs. Cf. Survey of Western Palestine,

Memoirs, Londres, 1882, t. ii, p. 121.
A. Legendre.

ÉDEN ( hébreu : ’Êdén, « délices » ), nom d’un lévite et de plusieurs localités.

1. ÉDEN (hébreu : ’Êdén ; Septante : ’IwaSân), lévite, fils de Joah, d_> la descendance de Gerson. I Par., xxix, 12. Il prit part à la purification du Temple, sous Ézéchias. Probablement c’est le même qui était sous les ordres du portier Coré, chargé des dons volontaires. II Par., xxxi, 15.

2. ÉDEN (Septante : ’E8é(i, rpvqiij), nom du jardin où furent placés Adam et Eve et que nous appelons Paradis terrestre. La Vulgate a traduit’Êdén par voluptas, « délices. » Gen., ii, 8, 10, 15 ; iii, 23, 24. Elle n’a conservé le mot Éden que Gen., iv, 16. Voir Paradis terrestre.

3. ÉDEN (Septante : ’ESén, IV Reg., xix, 12 ; omis dans Is., xxxvii, 12), pays mentionné II (IV) Reg., xix, 12, et Is., xxxvii, 12, par les messagers de Sennachérib à Ézéchias, parmi ceux qui n’ont pas pu résister à la puissance des rois d’Assyrie. Il est nommé avec Gozan, Haran et Réseph (voir ces mots), et il est dit que « les fils d’Éden » habitaient « à Thélassar ». Dans Ézéchiel, xxvii, 23, Éden, qui fait le commerce avec Tyr, est également mentionné à côté de Haran. L’assyriologie a révélé le nom d’une ville de Bit-’Adini située sur les deux rives de l’Euphrate, entre Balis et Béredjik. Il y a tout lieu de croire que c’est l’Éderi dont s’étaient emparés les rois d’Assyrie. É. Schrader, Keilinschriften und Geschichlforschung, in-8°, Leipzig, 1878, p. 198-200 ; Id., Die Keilinschriften. und das Alte Testament, 2= édit., 1883, p. 327 ; Frd. Delitzsch, Wo lag das Paradies, in-12, Leipzig, 1881, p. 98, 184.

4. ÉDEN (omis dans les Septante), un des marchés qui approvisionnaient le commerce de Tyr d’étoffes brodées. Cet Éden ne différait probablement pas de l’Édea dont il est question IV Reg., xix, 2, et Is., xxxvii, 12. Voir Éden 3.

5. ÉDEN (BETH), lieu nommé dans Ainos, i, 5 (texte hébreu ; la Vulgate traduit : domus voluptatis, « maison de délices » ). C’est, d’après les uns, Bit-Adini (voir Éden 3), d’après les autres, une localité différente. Voir 1. 1, col. 1671.

EDER (hébreu : ’Êdér). Nom d’un lévite et d’une ville de Palestine. Voir Migdal Eder, t. iv, col. 1084.

1. ÉDER (Septante : ’ESfp), lévite, fils de Musi et pèrede Moholi, de la famille de Mérari, au temps de David. I Par., xxiii, 23 ; xxiv, 30.

2. ÉDER (hébreu : ’Êdér, « troupeau ; » Septante : Codex Vaticanus, "Apa ; Codex Alexandrinus, ’ESpaQ, ville de la tribu de Juda, située à l’extrémité, « près des frontières d’Édom, dans le négéb ou le midi. » Jos., xv, 21. C’est la seconde de l’énumération, et, comme la plupart des autres du même groupe, elle est inconnue. Quelques auteurs ont cru ici sans raison à une transposition de lettres pour’Arad. On a proposé de reconnaître cette localité dans Khirbet el-’Adâr, à deux lieues environ au sud de Gaza, ou dans Khirbet Oumm’Adréh, plus loin vers le sud-est, au-dessus de l’ouadi esch-Schérî’ah. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881-1883, t. iii, , p. 236 ; F. Buhl, Géographie des alten Palâstina, in-8, . Leipzig, 1896, p. 185. Ce n’est pas certain ; il semble

qu’il faudrait la chercher plus bas.
A. Legendre.
    1. EDERSHEIM##

EDERSHEIM (Alfred), né à Vienne le 7 mars 1825, .

1589

EDERSHEIM — ÉDRAI

1590

mort à Menton en mars 1880. Né de parents juifs, il se fit protestant et prit le grade de docteur en théologie à l’université d’Edimbourg. D’abord ministre de l’Église libre, en -1849, il reçut les ordres dans l’Église anglicane, en’1875, et fut vicaire de Loders, dans le comté de Dorset, de 1876 jusqu’en 1883. Il s’établit à Oxford, en 1884, et y devint, en 1886, Lecturer on the Septuagint. Il a été l’un des collaborateurs du Speakers Commentary et a laissé plusieurs ouvrages : History of the Jewish Nation after the destruction of Jérusalem, in-8°, Edimbourg, 1856 ; History of Elisha the Prophel, in-8°, Londres, 1868 ; The Temple, its Ministry and Services, in-12, Londres, 1874 ; The World before the Flood and the History of the Patriarchs, in-8°, Londres, 1875 ; Sketch of Jewish social Life in the days of Christ, in-16, Londres, 1876 (traduit en français par G. Roux, sous le titre de La société juive à l’époque de Jésus-Christ, in-16, Paris, 1896) ; The Exodus and the Wanderings in the Wilderness, in-8°, Londres, 1876 ; Israël in Canaan under Joshua and the Judges, in-8°, Londres, 1877 ; Israël under Samuel, Saul and David, in-8°, Londres, 1878 ; History of Judah and Israël from the birth of Solomon to the reign of Ahab, in-8°, Londres, 1880 ; Prophecy and History in Relation to the Messiah, being the Warburton Lectures for 1880-I881, in-8°, Londres, 1885 ; The Life and Times of Jésus the Messiah, 2 in-8°, Londres, 1883 (ce dernier ouvrage est son œuvre la plus remarquable ; il a eu une seconde édition en 1881) ; History of Israël and Judah from the reign of Ahab to the Décline of the Two Kingdoms, in- 8°, Londres, 1885 ; History of Israël and Judah from the Décline to the Assyrian captivity, in-8°, Londres, 1887, etc.

F. Vigouroux.

    1. ÉDISSA##

ÉDISSA (hébreu : Hâdassâh ; omis dans les Septante), nom hébreu d’Esther. Il signifie « myrte ». Voir Esiher.

EDNA (hébreu : ’Adnâ’; Septante : ’ES-it), un des fils de Phahath-Moab, qui sur l’ordre d’Esdras renvoyèrent les femmes étrangères qu’ils avaient prises en captivité contre la loi. I Esdr., x, 30.

    1. EDNAS##

EDNAS (hébreu : ’Adnâh), nom de deux personnages.

1. EDNAS (Septante : ’E8vâ), un des chefs de la tribu de Manassé qui se rangèrent au parti de David avant le dernier combat livré par Saùl aux Philistins. I Par., xii, 20. La Vulgate répète à tort deux fois ce même nom dans l’énumération que contient ce verset.

2. EDNAS (Septante : "ESvaj), chef d’armée de la tribu de Juda au temps de Josaphat ; il commandait à trois cent mille hommes. II Par., xvii, 14.

ÉDOM (hébreu : ’Èdôm, « roux ; » Septante : ’EMu.), surnom d’Ésaû, Geu., xxv, 30 ; xxxvi, 1, et du pays auquel il donna son nom et qui s’appelait auparavant mont Séir. Gen., xxxii, 3 ; xxxvi, 8, etc. Nous appelons ordinairement ce pays Idumée. Voir Ésau et Idumée.

    1. ÉDOMITES##

ÉDOMITES, habitants du pays d’Édom. Voir lou 8IÉENS.

    1. ÉDRAÏ##

ÉDRAÏ (hébreu : ’Edré’î, « fort, puissant ; » Septante : ’E8 ?cestv), nom de deux villes situées l’une à l’est, l’autre à l’ouest du Jourdain.

1. ÉDRAi (hébreu : ’Édré’i ; Septante : Codex Vaticanus, ’ESpæiv, Num., xxi, 33 ; Deut., i, 4 ; Jos., xii, 4 ; xiii, 12, 31 ; ’ESpaeîu., Deut., iii, 1, 10 ; Codex Alexandrintis, Eîpaîfi, Jos., xiii, 31 ; Nsaépâein, Jos., xiii, 12), ville à l’est du Jourdain, de la tribu de Manassé (fig. 527). Elle est mentionnée avec Àstaroth comme une des deux

capitales d’Og, roi de Basan, Deut., 1, 4 ; Jos., xii, 4 ; xm, 12, 31, et dans laquelle ou près de laquelle il fut défait par les Israélites. Num., xxi, 33 ; Deut., iii, 4.

I. Identification. — Édraï se trouvait sur la route que devaient suivre les Hébreux quand, remontant de Galaad vers le nord, ils allaient conquérir le pays de Basan. Num., xxi, 33. Le « chemin de Basan » dont il est ici question est probablement ce qu’on appelle aujourd’hui le Derb el-Hadj ou la « Route des Pèlerins » ( de la Mecque), qui traverse du nord au sud toute cette contrée orientale. Elle est citée avec Selcha (aujourd’hui Salkhad, au

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527. — Monnaie d’Édraï.

AOYKIAAA AYrOTSTA. Buste de Lucille, fllle de Marc-Aurèle, a droite. - 4 TTXH AAP | AHNQN. Buste de la Tyehê (Fortune) d’Àdraa, à droite.

sud du Djebel Hauran) comme une des limites de Basan. Deut., iii, 10. C’est pour cela que le roi vint jusque-là défendre l’entrée du pays. Elle était donc sur la frontière méridionale. Quelques auteurs ont tort de distinguer ici deux Édraî, l’une théâtre du combat, Num., xxi, 33 ; Deut., iii, 1, l’autre opposée à Selcha, Deut., iii, 10, et située par là même au nord-ouest de celle-ci, et identifiée par eux avec Ezra’, aux confins ouest du Ledjah. Cf. Keil, Numeri und Deuteronomium, Leipzig, 1870, p. 309, 426. Il est plus naturel d’admettre que l’écrivain sacré a tout simplement tracé une ligne de démarcation au sud, dans la direction de l’est à l’ouest.

Les données scripturaires sont vagues ; celles 1 de là tradition nous aideront à préciser la position de l’antique cité. Eusèbe et saint Jérôme, Onomaslica sacra, Gœttingue, 1870, p. 118, 253, nous disent que, de leur temps, « Edraï où fut tué Og, roi de Basan, » s’appelait Adra, "ASpi ou’ASpai, et était « une ville importante de l’Arabie, à vingt-quatre milles (vingt-cinq, au mot Astaroth, p. 86, 213), c’est-à-dire trente-cinq ou trente-six kilomètres de Bostra (Bosra) et à six milles (près de neuf kilomètres) d’Astaroth (Tell Aschtaréh). Dans la Table de Peutinger, Adraha est placée sur la voie romaine de Gadara (Oumm Qeïs) à Bostra, à seize milles (vingt-quatre kilomètres) de Capitolias (Beit er-Ràs ?) et vingt-quatre de Bostra. Elle est encore mentionnée par saint Ëpiphane et dans certaines listes épiscopales. Cf. Reland, Palœslina, Utrecht, 1714, t. ii, p. 547-549. Ces indications nous conduisent suffisamment à une ville du Hauran dont le nom se rapproche exactement de l’ancienne dénomination. Elle se trouve à environ dix kilomètres au sudsud -est d’El-Mezéirib, une des stations des pèlerins sur le Derb el-Hadj. On l’appelle généralement Der’ât, bien que le nom ait plusieurs variantes. Abulfeda, Tabula Syrix, édit. B. Kœhler, Leipzig, 1766, p. 97, écrit O^Oj^i’Adra’ât. Les autres géographes arabes disent également Adhra’âh ou Adhri’âh. Cf. Guy Le Strange, Palestine under the Moslems, in-8°, Londres, 1890, p. 383, 560. Les Bédouins prononcent C->^%^>’Edre’ât (avec dal au lieu de dal), d’où, dans certaines tribus, l’abréviation C-Ac)>, Der’ât, et même Der’à dans la ville, dans la Nouqra et à Damas. Cf. J. G. Wetzstein, Reisebericht ùber Haurand und die Trachonen, in-8°, Berlin, 1860, p. 77, note 1. Il est facile de retrouver là la forme hébraïque u™, ’Édré’i. Cf. G. Kampffmeyer,

Alte Namen xm heutigen Palâstina und Syrien, dans

la Zeitschrift des deutschen Palâslina-Vereins, Leipzig, t. XVI, 1893, p. 15-16. La position concorde aussi, d’une façon générale, avec les indications des auteurs anciens que nous venons de citer. Cette identification est admise par la plupart des voyageurs et des exégètes : J. Burckhardt, Travels in Syria and the Holy Land, Londres, 1822, p. 241 ; Van de Velde, Memoir to accompany the Map of the Holy Land, in-8°, Gotha, 1858, p. 308 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 51 ; R. von Riess, Bibel-Attas, Fribourg-en-Brisgau, 2e édit.,

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tion y sont même plus abondantes et plus frappantes qu’ailleurs. Nous trouverions suffisante à la rigueur la correspondance onomastique entre Ezra’et’Édré’i ; mais celle qui existe avec Der’ât nous satisfait davantage. Enfin l’hypothèse de Porter a contre elle les données traditionnelles de YOnomasticon et des sources anciennes. Enfin le voisinage de Tell Aschtaréh (Astaroth) et la situation de l’antique cité sur la frontière méridionale de Basan corroborent notre opinion : on comprend que le roi Og soit « venu au-devant » des Israélites, Num., xxi, 33, jusqu’à l’emplacement occupé par Der’ât,

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E23, — Ruines d’Édraï et plan de la cité souterraine. D’après G. Schumacher, Across the Jordan.

1887, p. 10 ; Fillion, La Sainte Bible, Paris, 1888, t. i, p. 505, etc.

J. L. Porter cependant s’est fait le défenseur d’une opinion qui cherche Édraï plus haut, à Ezra’, que nous avons mentionnée tout à l’heure sur le bord occidental duLedjah (l’ancienne Trachonitide). Ses principaux arguments sont tirés de la position relative des deux villes : l’une, Ezra’, située au sommet de rochers escarpés, entourée de hauteurs et de défilés qui, lui servant de défense naturelle, la destinaient à être la capitale d’une vieille nation guerrière ; l’autre, Der’ât, établie, au contraire, dans une plaine et sans fortifications. Il ajoute à cela que cette dernière n’avait ni puits ni fontaines qui pussent attirer des colons, obligée qu’elle était d’aller plus loin s’approvisionner d’eau au moyen d’un aqueduc. Enfin les ruines d’Ezra’seraient, d’après lui, plus anciennes, plus importantes et plus étendues que celles de Der’ât. Cf. J. L. Porter, Five years in Damascus, Londres, 1855, t. ii, p. 221-226 ; Handbook for travellers in Syria and Palestine, Londres, 1858, t. ii, p. 532-534 ; J. Kitto, Cyclopsedia of Biblical Literature, Edimbourg, 1862, t. i, p. 726. La description suivante montre que Der’ât était parfaitement apte à faire la capitale d’un peuple guerrier, que les traces d’une ancienne civilisa tandis qu’on ne comprend guère qu’il eut « attendu » l’ennemi dans sa forteresse d’Ezra’.

II. Description. — Der’ât est aujourd’hui la plus grande ville du Hauran et la résidence d’un kaïmmakam ; elle renferme de quatre à cinq mille habitants. Au milieu de ses maisons de pierre et de ses huttes en terre s’élèvent seulement quelques convenables et solides constructions, comme le Serai et la demeure du Scheikh Naïf. Elle a en somme un aspect misérable, pleine de boue pendant les hivers pluvieux, et si pleine de poussière en été, qu’on en souffre des yeux en marchant à travers les rues : boue et poussière proviennent des monceaux de cendres qui sont entassés en dehors des maisons. Partout sont les ruines d’anciennes bâtisses et de huttes modernes abandonnées et délabrées. Les pierres qui entrent dans les édifices sont antiques, et l’élévation actuelle de la ville est due aux débris anciens sur lesquels elle repose. Elle comprend deux quartiers (fig. 528, au haut) : le plus important est bâti sur un plateau uni, enclos à l’est et à l’ouest par Vouadi Zéidi desséché, et au sud par une vallée que forme un éperon des collines de Zoumléh. Au nord, elle est séparée par une sorte de dépression de l’autre quartier, nommé Karnh, situé sur une colline arrondie et un peu plus haute que la parlie principale

de la ville. La route de Mezéirib passe an nord le long d’une étroite langue de terre et se poursuit à travers une plaine fertile et bien cultivée.

Après avoir traversé un bras de Vouadi Zéidi, on arrive à un aqueduc appelé par les Arabes Qanâtir Fir’oûn, « les arches de Pharaon. » Son point de départ était autrefois le petit village de Dilli, bâti près d’un marais et sur le Derb el-Hadj. D’après des documents arabes, cet aqueduc a été construit par le Ghassanide Djébelé I er et est long de vingt lieues. Ruiné maintenant, il ne donne plus d’eau, en sorte que la ville a peine à s’approvisionner : les habitants doivent aller aux deux sources d’Aïn el-Mallâhah, vers le nord, et à celle d’Aïn et-Taouïléh, vers le sud ; encore les premières sont-elles saumàtres et peu abondantes. Il franchit la vallée sur un pont de cinq arches, à l’ouest d’un birket ou réservoir qu’il alimentait autrefois. Non loin se trouve le Hammam es-Siknâni, contraction ruinée, à voûtes arrondies, dont l’ensemble et les détails indiquent d’anciens thermes romains ; à côté, le Siknâni, mausolée inaccessible. Ces deux monuments sont situés sur un plateau entre la ville et Karak, séparés de ce dernier par une dépression de terrain.

En entrant dans la ville proprement dite, qui garde encore, vers le nord, quelques vestiges de ses vieilles murailles, on rencontre dans un même groupe les ruines d’une église, la mosquée et le Médany ou minaret, tour rectangulaire en forme de pyramide tronquée et assez élevée. En se dirigeant vers le sud, on arrive au Serai ou palais du gouvernement ; c’est une maison moderne bien bâtie. Mais ces édifices sont loin d’avoir pour nous l’intérêt que présente la ville souterraine qu’il nous reste à décrire.

L’entrée de ces singulières excavations se trouve à l’extrémité orientale de Der’ât, sur le bord de l’ouadi Zéidi. On rencontre d’abord (fig. 528) une petite cour (a), entourée de murs bâtis en pierres sans mortier, avec un escalier qui conduit à l’ouverture actuelle du souterrain. On pénètre ensuite en rampant dans un couloir bas et humide (6), long de sept mètres sur un mètre cinquante de large, qui se dirige en pente, à l’ouest, vers une chambre rectangulaire, fermée par une porte en pierre. Cette première chambre ( c) est évidemment une caverne artificielle ; les parois et le plafond gardent les traces d’un ancien plâtrage. Le toit naturel est formé de minces couches de cailloux, alternant avec un calcaire tendre et blanc, qui compose le banc rocheux dans lequel le tout est creusé. Il est soutenu par des colonnes surmontées d’une sorte d’abaque en forme de petite table de basalte, qui ont dû être ajoutées longtemps après le creusement, probablement à l’époque romaine. On voit aussi cependant de ces supports naturels taillés dans le roc vif dès l’origine. Au coté méridional, des mangeoires ont été pratiquées dans le mur. Çà et là se trouvent également dans la muraille, à environ deux mètres du sol, des cavités demi-circulaires vraisemblablement destinées à des lampes.

De cette chambre, un court et étroit passage (d) à travers la paroi occidentale conduit dans une autre pièce (e) également carrée et à peu près de même grandeur. Des colonnes de basalte y supportent la voûte ; outre des mangeoires semblables aux précédentes, il y a deux ouvertures à la partie supérieure, communiquant avec le dehors, pour donner de l’air. Ces soupiraux sont, à l’extérieur, entourés d’une muraille en ruine, ce qui fait supposer qu’ils étaient primitivement protégés par des constructions : on comprend du reste l’importance qu’ils avaient pour ces sortes d’habitations. Le sol est couvert de décombres, de pierres brutes et taillées, fragments de colonnes avec moulures. L’extrémité ouest communique avec une autre chambre (f) dont le plan est en forme de croix : on suppose que les deux côtés servaient de magasins. On arrive de là dans une autre

plus petite (g), dont le plafond est au centre soutenu par une colonne. Dans le mur opposé à l’entrée, à deux pieds du sol, est un réduit taillé dans le roc, et au fond duquel est disposé un rang d’auges, pas assez larges pour être des loculi, mais servant plus probablement de dépôts pour le blé. Au sud, au-dessous d’un soupirail, un étroit passage conduit dans une pièce (i) à laquelle est attenant un appartement rectangulaire. En rampant sur les mains et sur les genoux par un long couloir, qui descend vers l’ouest pour retourner vers le midi, on arrive à une chambre carrée (fe), ayant un soupirail à gauche, et, au milieu, une citerne avec un orifice circulaire et la forme d’une bouteille. Un escalier mène ensuite dans une pièce irrégulière, probablement restée inachevée, d’où l’on entre, en tournant à gauche, dans la chambre la plus vaste (l). Près de l’entrée est une citerne semblable à celle que nous venons de mentionner, et de l’autre côté un soupirail traverse la couche assez épaisse du rocher.

Ce n’est là qu’une partie des demeures souterraines. Les habitants assurent qu’elles s’étendent au-dessous de toute la ville, et qu’il y a d’autres ouvertures, maintenant en partie obstruées par les décombres. Celles que nous venons de décrire d’après G. Schumacher ne sont probablement pas celles que visita Wetzstein. Cette étrange et remarquable cité a dû être creusée pour abriter la population dans les moments de danger ; il faut avouer cependant que les ennemis avaient beau jeu s’ils parvenaient à boucher les soupiraux. Par contre, Guillaume de Tyr, Hist. rerum transmarin., lib. xvi, cap. x, t. cci, col. 650, nous montre comment les croisés, mourant de soif, éprouvaient une singulière déception en cherchant à puiser de l’eau dans les citernes dont l’orifice paraissait à l’extérieur. Des hommes cachés à l’intérieur coupaient la corde qui descendait les vases destinés à procurer quelque rafraîchissement aux soldats, et le dépit s’ajoutait à la souffrance. Cf. G. Schumacher, Across the Jordan, in-8°, Londres, 1886, p. 121-148 ; J. G. Wetzstein, Reisebericht, p. 47.

III. Histoire. — Il est permis de reconnaître dans cette ville souterraine l’œuvre des premiers habitants de la contrée, ces Baphaïm ou « géants » dont Og lui-même était un des derniers descendants. Les Israélites, après avoir vaincu les Amorrhéens du sud, montèrent vers le nord. C’est alors que le roi voulut leur barrer le passage à Édraï et qu’il fut complètement défait. Num., xxi, 33-35 ; Deut., i, 4 ; iii, 1-10. Le pays fut donné à la demitribu de Manassé. Num., xxxii, 33 ; Deut., iii, 13 ; Jos., xiii, 31. Après cela, la ville n’est plus mentionnée dans la Bible. Faut-il la reconnaître dans V’O-ta-ra’a des inscriptions égyptiennes (Listes géographiques de Karnak, n° 91) ? Quelques-uns le croient ; ce n’est pas certain. Cf. A. Mariette, Les Listes géographiques des pylônes de Karnah, Leipzig, 1875, p. 39 ; G. Maspero, Sur les noms géographiques de la Liste de Thotmés III qu’on peut rapporter à la Judée, extrait de l’Institut Victoria, Société philosophique de la Grande-Bretagne, 1888, p. Il ; W. Max Mùller, Asien und Europa nach altâgyptischen Denkmàlern, Leipzig, 1893, p. 159 ; F. Buhl, Géographie des Alten Palàstina, Leipzig, 1896, p. 251. Durant la période romaine, elle était une des principales villes de la province d’Arabie. Nous en avons des monnaies, qui sont d’une grande rareté ; les plus riches cabinets n’en comptent que peu de spécimens. Cf. F. de Saulcy, Numismatique de la Terre Sainte, in-4°, Paris, 1874, p. 373-377. Pour les inscriptions, cf. Waddington, Inscriptions grecques et latines de la Syrie, in-4°, Paris, 1870, p. 488 ; Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, 1890, p. 188-189.

A. Legendrk.

2. ÉORAl (hébreu : ’Édré’i ; Septante : Codex Vaticanus, ’AaaàpEi ; Codex Alexandrinus, ’ESpâei), ville forte de Nephthali, mentionnée une seule fois dans la

Bible, Jos., six, 37. Citée entre Cédés (Qadës) et Etfhasor (Khirbet Haziréh), elle fait partie du groupe septentrional, et peut être cherchée, avec certains auteurs, aux environs de cette dernière. On a, en effet, proposé de la reconnaître dans le village actuel de Ya’ter, au norii de Khirbet Haziréh. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881, 1. 1, p. 205 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 54. Si la correspondance onomastique laisse à désirer, la position est convenable. Cette identification nous paraît plus acceptable que celle suggérée par J. L. Porter, dans J. Kitto, Cyclopædia of Biblical Literature, Londres, 1862, t. i, p. 726, et d’après laquelle Édraï serait aujourd’hui El-Khouréibéh, au sud de Qadès. Voir Nephthali, tribu et carte. L’antique cité était ainsi sur la frontière de Nephthali et d’Aser.

Le village de Ya’ter n’est plus que l’ombre d’une petite ville jadis florissante. « Le site principal où elle s’élevait est à une très faible dislance au nord-nord-ouest de Ya’ter ; c’est une belle colline depuis longtemps livrée à la culture et parsemée de figuiers ; elle s’étendait aussi dans la vallée où se trouve le village actuel. Deux autres collines rocheuses situées, la première au sud, et la seconde au sud-est de ce même village, servaient de nécropole à la ville antique. C’est de là également qu’avaient été tirées toutes les pierres avec lesquelles elle avait été bâtie. De vastes carrières, des citernes, des pressoirs et des tombeaux ont été creusés sur les flancs et sur le sommet de ces monticules, que sépare un étroit vallon. La plupart des grottes sépulcrales contenaient chacune neuf auges funéraires, groupées trois à trois, à droite, à gauche et au fond, sous un arcosolium cintré. La far çade de deux d’entre elles est percée de plusieurs petites niches, les unes destinées à recevoir de simples lampes, les autres des statuettes. L’une de ces cavernes parait avoir eu un caractère sacré. Elles sont presque toutes très dégradées. » V. Guérin, Galilée, t. ii, p. 413-414.

A. Legendre.
    1. ÉDUCATION##

ÉDUCATION, art d’élever, de former un enfant et de le conduire jusqu’à l’âge d’homme, en développant et en dirigeant ses facultés physiques, intellectuelles et morales. Chez les Hébreux, l’éducation des enfants se faisait exclusivement dans la famille et était surtout l’œuvre des parents.

1° Éducation physique. — Les premiers soins étaient ordinairement donnés par la mère à l’enfant. Voir Enfant. Les familles riches confiaient parfois l’éducation de leurs fils à des gouvernantes, Il Reg., iv, 4, ou à des précepteurs. IV Reg., x, 1 et 5. À mesure que les garçons grandissaient, ils aidaient leur père dans les travaux agricoles et dans le soin des troupeaux. Quelques-uns apprenaient des métiers, et le nombre des artisans s’accrut en raison du développement que les arts prirent en Palestine. Le système pédagogique des Grecs pénétra un instant à Jérusalem, quand le grand prêtre Jason obtint d’Antiochus IV Épiphane l’autorisation d’établir dans la capitale juive uij gymnase et une éphébie, où les fils d’Aaron eux - mêmes s’exerçaient à la palestre et au disque. II Mach., ’iv, 9-14. La dynastie asmonéenne abolit d’abord ces coutumes païennes et devint plus tard favorable aux mœurs grecques. Mais la masse du peuple juif resta fidèle à la simplicité antique. Jésus était charpentier et pratiquait la profession de son père nourricier. Mattb., xiii, 55 ; Marc, vi, 3. Saint Paul fabriquait des tentes et exerçait, pour gagner sa vie, le métier qu’il avait appris dans son enfance. Act., xviii, 3 ; I Thess., iv, 11. Le travail manuel était à cette époque très en honneur en Palestine, et c’était une maxime des rabbins que « n’enseigner aucun métier à son fils, c’est en faire un voleur de grand chemin ». Talmud de Jérusalem, Qiddouschin, i, 8, et iv, 12, trad. Schwab, t. ix, Paris, 1887, p. 233 et 287. Cf. Frz. Delitzsch, Handwerkerleben zurZeitJesu, Erlangen, 1868 ; L.-C. Fillion, Le travail et les artisans chez les Juifs de Palestine au

temps de NotreSeigneur JésusChrist, dans les Essais d’exégèse, Paris, 1884, p. 239-266. — Les jeunes filles étaient employées par leurs mères aux soins du ménage, et elles vivaient en général très retirées. II Mach., iii, 19. Elles gardaient parfois les troupeaux, et elles allaient puiser de l’eau à la fontaine. I Reg., ix, 11.

2° Éducation intellectuelle. — Le principal devoir des parents était d’enseigner à leurs enfants la loi qu’ils devaient observer. Moïse leur en avait fait une obligation rigoureuse. Deut., iv, 9. Cf. Exod., xii, 6 ; xiii, 8, 14 ; Deut., vi, 7, 20 ; xi, 19. Les pieux Israélites pratiquaient exactement ce devoir. David avait été instruit dès sa jeunesse dans la Loi du Seigneur, Ps. lxx, 17, et il priait Dieu pour que Salomon profitât de l’éducation qui lui était donnée. I Par., xxix, 19. Salomon disait : « Instruis ton fils ; il te consolera et fera les délices de ton âme. » Prov., xxix, 17. Tobie pratiquait ce conseil et instruisait son fils et ses petits-fils. Tob., i, 10 ; iv, 6-20. Raguel donnait à Sara, sa fille, d’excellents avis. Tob., x, 13. Susanne était pieuse, parce que ses parents, qui étaient justes, l’avaient élevée suivant la loi de Moïse. Dan., xm, 3. Le jeune homme rend sa voie pure, s’il observe la parole de Dieu qu’il a étudiée. Ps. cxviii, 9. Timothée a hérité de la foi de son aïeule et de sa mère, et dès son enfance il a appris les Saintes Lettres. II Tirn., i, 5 ; iii, 15. Josèphe, Vita, § 2, et Cont. Apion., ii, 25, vante l’ardeur avec laquelle les jeunes Israélites de son temps apprenaient la Loi, et lui-même l’aurait connue tout entière à l’âge de quatorze ans. Philon, Legatio ad Caium, § 31, fait passer avant tout l’étude de la Loi. Les rabbins avaient la même doctrine, et ils disaient que cette étude n’a pas de limites et qu’il faut étudier la Loi le jour et la nuit. Talmud de Jérusalem, Péa, trad. Schwab, Paris, 1878, t. ii, p. 1 et 14. Cette étude, ajoutaient - ils, mérite le pardon des fautes. Talmud de Babylone, Berakhoth, trad. Schwab, t. i, Paris, 1871, p. 237 et 251. Elle est préférable à tous les métiers du monde. Talmud de Jérusalem, Qiddouschin, iv, 10, trad. Schwab, t. ix, Paris, 1887, p. 287-288. D’après ces principes et ces exemples, dans toute famille juive, l’enfant, dès qu’il savait parler, apprenait quelques passages de la Loi. Sa mère lui répétait un verset ; quand il le savait, elle lui en disait un autre. Plus tard, on mettait aux mains des enfants le texte écrit des versets qu’ils récitaient déjà de mémoire. Ils s’initiaient ainsi à la lecture, et, quand ils avaient grandi, ils pouvaient compléter leur instruction religieuse en lisant et en méditant la loi du Seigneur.

3° Éducation morale. — Elle était à la charge des parents, les premiers et les mieux écoutés des éducateurs. C’est au sanctuaire de la famille et sur les genoux de son père et de sa mère que l’enfant devait recevoir les premières et les plus profitables leçons de vertu. On l’a toujours compris et pratiqué en Israël, et on le constate à diverses époques de l’histoire juive. On connaissait l’influence de la formation morale durant la vie entière, et on savait que les bonnes habitudes contractées persévèrent. — 1° C’était un proverbe ancien que Salomon recueillait : « Le jeune homme, une fois engagé dans sa voie, ne la quittera pas, même en sa vieillesse. » Prov., xxii, 6. Aussi le sage roi conseille-til aux parents de donner à leurs enfants une éducation ferme, et il recommande d’user de la correction. Il en indique les raisons, le but et les effets. « La sottise est rivée au cœur de l’enfant ; c’est la verge de la discipline qui la chassera. » Prov., xxii, 15. S’il est nécessaire d’amender la mauvaise nature de l’enfant, c’est dans le dessein de le rendre meilleur. Mais le père n’a pas le droit de punir de mort son fils coupable ; il ne doit pas non plus le faire mourir par des châtiments excessifs. Prov., six, 18. Il n’emploiera la correction qu’en vue des bons effets qu’elle peut produire : « La verge et la correction procurent la sagesse ; mais l’enfant abandonné à son caprice fait la

honte de sa mère. » Prov., xxix, 15. « Ne ménage pas la correction à l’enfant ; car, si tu le frappes de la verge, il ne mourra point (de la mort de l’âme). Frappe-le de la verge, et tu sauveras son âme du se’ôl. » Prov., xxiii, 13 et 14. C’est en considération de ces heureux fruits que Salomon disait encore : « Le père qui ménage la verge n’aime pas son fils ; celui qui chérit son enfant le corrige au matin de sa vie. » Prov., xiii, 24. Le sage roi ne recommande pas la correction aveugle et brutale qui n’aboutit pas ; il condamne seulement une faiblesse coupable, qui serait contraire à la véritable affection du père pour ses enfants. En conséquence, il conseille aux fils d’écouter les instructions et les avis de leurs parents. Prov., i, 8 et 9 ; xxiii, 22. « L’enfant sage est le fruit de la discipline paternelle ; mais celui qui est moqueur n’écoute pas quand on le reprend. » Prov., xiii, 1. « L’irïsensé se rit des enseignements de son père ; mais celui qui tient compte des réprimandes deviendra plus habile. » Prov., xv, 5. — 2° Le fils de Sirach a sur l’éducation morale des enfants les mêmes idées que Salomon ; il est toutefois plus sévère, et il fait appel à des motifs moins élevés. Il préfère un seul fils pieux à une nombreuse postérité d’enfants impies. Eccli., xvi, 1-5. La mauvaise éducation des enfants ne procure aux parents que honte et désavantages, xxii, 3-5. La correction et l’instruction sont en tout temps des œuvres de sagesse, xxii, 6. Le morceau xxx, 1-13, est un court traité de pédagogie, et dans le texte grec il a pour titre : Ilepi texvùv, « Des enfants. » Le Sage indique d’abord les motifs qui doivent porter les parents à corriger et à instruire leurs enfants. La correction, marque d’une véritable affection, procurera finalement le bonheur du père, qui n’aura pas besoin dans sa vieillesse d’aller frapper à la porte des voisins. y. 1. L’instruction produira au père la gloire et le profit au milieu de ses amis et de ses ennemis eux-mêmes, durant sa vie et après sa mort, puisqu’elle lui préparera dans ses fils de dignes successeurs et héritiers..)L 2-6. Le père ne cédera donc pas aux caprices de son fils, il ne le flattera pas, ne plaisantera pas avec lui ; il ne lui laissera pas une trop grande liberté, mais surveillera toutes ses démarches et punira ses folies. ^. 7-11. « Fais plier sa tête pendant qu’il est jeune, et ne lui ménage pas les coups tandis qu’il esl enfant, dé peur qu’il ne devienne opiniâtre, ne t’obéisse pas et fasse la douleur de ton âme. » ^. 12. L’éducation est une œuvre laborieuse, qui mérite attention. jL 13. Le Sage avait déjà dit précédemment, : « As-tu des fils ? Élève-les bien et plieles au joug dès leur enfance. As-tu des filles ? Veille sur leur corps et ne leur montre pas un visage gai. » vii, 25 et 26. L’éducation des filles est particulièrement difficile, parce qu’il faut garder la jeune fille à la maison paternelle et en même temps lui trouver un parti honorable, vii, 27. Le Sage a été frappé des sollicitudes que causent aux parents les jeunes filles, xlii, 9-11. Les motifs naturels et parfois même égoïstes sur lesquels il appuie ses conseils et justifie sa sévérité montrent bien l’imperfection de l’ancienne alliance, qui faisait compter plus sur la récompense temporelle que sur le bonheur éternel. Card. Meignan, Les derniers prophètes d’Israël, Paris, 1894, p. 423-426. D’ailleurs la correction sévère a toujours été employée dans l’éducation de l’enfance. H. Lesèlre, Le livre des Proverbes, Paris, 1879, p. 128.

— 3° Saint Paul, qui exigeait de la veuve chrétienne qu’elle ait bien élevé ses enfants, I Tim., v, 10, a tracé aux pères leurs devoirs. Ephes., vi, 4 ; Col., iii, 21. Par une application touchante de l’esprit de douceur de l’Évangile, il leur recommande d’abord de ne pas provoquer leurs fils à la colère, en les traitant avec dureté ; il craignait que, poussés à bout par des châtiments exagérés, les enfants ne tombassent dans le découragement et le désespoir. L’Apôtre cependant ne condamne pas la juste et modérée correction des enfants par leurs pères, puisqu’il l’invoque, Hebr., xii, 7, pour justifier la conduite

de Dieu, qui éprouve les justes. D’ailleurs il place la correction parmi les moyens positifs et légitimes d’une bonne éducation. « Élevez vos enfants, dit-il, èv ica18eî<j xa vou-Huria Kupîou. » Ephes., "VI, 4. IlaiSsia désigne l’éducation, l’instruction, dans tous ses modes, même par le châtiment, s’il est nécessaire. NoviŒafa signifie « l’admonition », qui se manifeste, suivant les cas, par l’encouragement, la remontrance, la répréhension, le blâme. Cf. R. C. Trench, Synonymes du Nouveau Testament, trad. franc., Bruxelles et Paris, 1869, p. 129-133. L’éducation et l’admonition doivent être données par les parents chrétiennement, comme le veut NotreSeigneur, d’une manière conforme à son esprit. — Voir B. Strassburger, Geschichte der Erziehung und des Unterrichts bei den Isræliten von der vortalmudischen Zeit bis aùf die Gegenuiart, in-12, Stuttgart, 1885. E. Mangenot.’ÉDÛT, terme obscur, qui se lit au titre des Psaumes lx et lxxx, dans le texte hébreu de la Bible. Ps. lx : ’al sûSan.’édûf. miktârn le-Dâvîd. Ps. lxxx : lamnaséâh el SôSannim.’édûf. le’Âsâf mizmôr. Les versions anciennes gardent au mot’édûf, dans ces titres, sa signification commune de « précepte, loi, témoignage », naptûpiov, (tapTupia, qui peut, en s’appliquant à un hymne, se prendre comme équivalent de « louange ». Cf. Ps. cxxii, 4. Au premier de ces titres, ’édûf n’a été traduit ni par les Septante, ni par la Vulgate, ni par la Peschito, ni enfin par les Targums, mais seulement par Aquila et Symmaque. Au Psaume lxxx (lxxix), les versions grecques et syriaques semblent joindre’édût au mot suivant, soit : « Témoignage (règle) d’Asaph. » Les interprèles modernes varient dans leurs explications. Gesenius traduit « révélation », puis, au sens concret, « poème révélé, b ou encore « poème lyrique, destiné à être chanté sur la lyre ou le luth ». On peut, en effet, comparer le mot

hébreu à l’arabe.je, « luth. » L’antiquité asiatique

connut, excepté l’usage des instruments à archet, les instruments en usage dans l’Orient moderne. Le luth, comme les autres instruments à manche, peut, aussi bien que ceux à cordes pincées, figurer dans le titre des psaumes. J. Parisot.

    1. EFFRAIE##

EFFRAIE, oiseau de la famille des rapaces nocturnes et du genre chouette. Voir Chouette. L’effraie commune, strix flammea (fig. 529), a le

bec crochu, le plumage dorsal

nuancé de fauve et de cendré

ou de brun avec des mouche tures noires et blanches. C’est le

nocturne qui a la coloration la

plus agréable. L’effraie est un

peu plus grosse que le pigeon.

Elle est très répandue dans nos

pays, et y rend les plus grands

services à l’agriculture, en dé truisant une multitude de ron geurs nuisibles, rats, souris,

musaraignes, insectes, etc. L’ef fraie pousse dans le silence de

la nuit un cri aigu, entrecoupé

de bruissements réitérés. Le nom

français de l’oiseau vient sans

doute de l’effroi que cause ce

cri et de la crainte superstitieuse

qu’inspirent d’ailleurs tous les

rapaces nocturnes. La strix

flammea est aussi commune en

Palestine que dans nos contrées.

Elle y habite les ruines et les cavernes, où son cri prend quelque chose de plus lugubre encore etde plus effrayant. Tristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 192, identifie l’effraie avec l’oiseau impur appelé

829. — L’uŒrale.

en hébreu tahmâs. Lev., xi, 16 ; Deut., xiv, 15. Ce nom vient de fyâmas, « opprimer, » et convient par conséquent à un rapace. Les anciennes versions supposent que le pahmâs est un rapace nocturne : Septante : y^ùÇ ; Vulgate : noctua ; Gr. Venet. : vuxtixipat Les Targums en font aussi un oiseau rapace. L’identification du tahmâs et de la strix flammea est donc possible et même très

probable.
H. Lesêtre.
    1. EGBERTI##

EGBERTI (CODEX). Ce manuscrit latin appartient à la bibliothèque de la ville de Trêves. L'écriture est onciale et d’une main du x » siècle. C’est un volume de 165 feuillets format in-4° : 27 cent, de hauteur sur 21 cent, de largeur. Ce n’est pas un manuscrit des Évangiles, mais un évangéliaire, c’est-à-dire un recueil des leçons (épîtres et évangiles) du missel : Liber evangeliorum per circulum anni sumptus ex libro comitis. Le Codex Egberti est célèbre, non pour son texte, mais pour ses miniatures, dont la publication en phototypie a été faite par F. X. Kraus, Die Miniaturen des Codex Egberti, in-4°, Fribourg-en-Brisgau, 1884. Le manuscrit avec ses miniatures fut fait pour Egbert, archevêque de Trêves de 977 à 993 ; il fut exécuté à l’abbaye de Reichenau, par les moines Kerald et Héribert. C’est un important monument pour l’histoire de l’illuslralion de la Bible.

P. Batiffol.

EGÉE (hébreu : hêgé', Eslh., ii, 3, et hègay, Esth., n, 8, 15 ; Septante : Tat, Esth., ii, 8 ; omis ii, 3, 15 ; Vulgate : Egeus), eunuque de la cour-d’Assuérus (Xerxès I er), spécialement chargé de pourvoir au harem royal. Esth., il, 3, 8, 15. Les Septante, qui omettent ce nom aux yy. 3 et 15, l’introduisent au y. 14, à la place de Susagazi (hébreu, Sa’asgaz), nom d’un autre eunuque, préposé à la garde des concubines du roi. On trouve un 'Hft’aç parmi les officiers de la cour de Xerxès. Ctésias, Pers., 24 ; Hérodote, ix, 33. D’autre part, selon quelques interprètes, hêgé' ne serait pas un nom propre, mais un nom commun signifiant « eunuque », comme âga en sanscrit. Cf. turc : agha. Gesenius, Thésaurus, Addenda, p. 86.

E. Levesque.

ÉGLÂ (hébreu : 'Eglâh, « génisse ; » Septante : Alyix ot 'AyXâ), une des femmes de David, mère de Jethraam, le sixième des enfants qui naquirent au roi à Hébron. H Reg., iii, 5 ; I Par., iii, 3. D’après une ancienne tradition juive, mentionnée par l’auteur des Quxst. hebr., Patr. lat., t. xxiii, col. 1347, 1370, Égla ne serait autre que Michol, l'épouse de sa jeunesse. Cette opinion repose uniquement sur la particularité suivante : parmi les six femmes de David, citées II Reg., iii, 2-5, et I Par., iii, 3, le nom d'Égla est seul accompagné de l’apposition, « épouse de David. » La raison n’est pas suffisante, même pour insinuer cette identification. E. Levesque.

    1. ÉGLISE##

ÉGLISE, du grec ltyMaia., signifie proprement « assemblée ». Dans l’Ancien Testament, les Septante ont traduit par èxxXr|er£a l’hébreu qâhâl, qui désigne tantôt une réunion quelconque, Ps. xxv, 5 ; tantôt la réunion des Israélites, Num., xx, 4 ; tantôt la société religieuse formée par le peuple de Dieu, qehal Yehôvâh. Num. xix, 20 ; Deut., xxiii, 2, 3, 7 (Vulgate, 1, 2, 3, 8), . 8, Dans le Nouveau Testament, IxxXirieria a des sens analo gués. Il signifie quelquefois une assemblée quelconque Act., xix, 32, 39, 40. Il désigne le plus souvent une ré union de fidèles, soit leur réunion en un même lieu pour prier et accomplir d’autres devoirs religieux, I Cor. xi, 18 ; xiv, 4, 12, 19, 34 ; Col., iv, 15 ; Philem., 2 (cette réunion des chrétiens ne porte qu’une seule fois jac, II, 2, le nom de nyvayaJYTi, qui était réservé aux réunions des Juifs et aux édifices où elles se faisaient) — soit la société particulière formée des fidèles d’une même ville, par exemple Jérusalem, Act., viii, 1 ; xi, 22 xv, 4 ; Antioche, Act., xiii, 1 ; xiv, 26 ; xv, 3 ; Ephèse, Act., xx, 17 ; Cenchrée, Rom., xvi, 1 ; — soit enfin la société

de tous les fidèles répandus dans le monde. Matth., xvi, 18 ; I Cor., xii, 28 ; Eph., i, 22, 23 ; iii, 10 ; v, 23, 24, 25, 27, 29, 32 ; Col., i, 18, 24 ; I Tim., iii, 15. C’est de l'Église entendue en ce dernier sens que nous allons nous occuper. Nous ne parlerons pas de son organisation ni des sacrements et autres moyens de sanctification qui lui ont été confiés. Il en est question dans d’autres articles. Nous l’envisagerons seulement comme la société des fidèles.

I. L'Église dans les Évangiles. — Pour nous donner ses enseignements sur l'Église, le Sauveur s’est servi de trois métaphores principales. Il l’a appelée le royaume des cieux, Matth., xvi, 19, en promettante saint Pierre de l’en Constituer le chef. C’est de cette manière qu’il la désigne aussi dans les paraboles du festin nuptial, Matth., xxii, 2-14 ; des filets, Malth., xiii, 47-50 ; du champ qui contient de l’ivraie, Matth., xiii, 24-30, paraboles où il fait ressortir que l'Église est destinée à recevoir des justes, et que cependant il s’y rencontre des pécheurs avec eux. Il l’a encore appelée le royaume des cieux dans la parabole du grain de sénevé et dans celle du levain, Matth., xm, 31, 32, où il annonce comment elle [devait se répandre par tout l’univers. — Il l’a désignée sous son nom propre d'Église, Matth., xvi, 18, lorsqu’il l’a représentée sous la figure d’un édifice bâti sur l’apôtre Pierre comme sur un rocher inébranlable. Il lui donna alors une constitution monarchique, et lui promit une indéfectibilité qui devait rendre inutiles tous les assauts de l’enfer. — Il l’a enfin comparée à un troupeau dont il est le pasteur, Joa., x, 1-16, et déclaré que ce troupeau doit être unique. Reprenant cette comparaison, il a établi ' saint Pierre le pasteur de ce troupeau. Joa., xxi, 15-17. Il a ainsi réalisé les promesses qu’il avait faites à cet apôtre et l’a investi d’une primauté perpétuelle sur l'Église. — Il a également conféré à ses Apôtres et à leurs successeurs une autorité perpétuelle dans cette Église, en les chargeant de porter sa doctrine à toutes les nations et d’en faire des chrétiens par le baptême. Matth., xxviii, 18-20 ; Marc, xyi, 15-20 ; Luc, i, 8.

IL L'Église dans les Épitres. — Saint Paul nous montre l'Église comme une société organisée et unique. Il se repent de l’avoir persécutée. I Cor., xv, 9 ; Gal., i, 13 ; cf. Act., viii, 3. Il l’appelle « la maison de Dieu, l'Église du Dieu vivant, la colonne et la base de la vérité ». I Tim., m, 15. Il montre l’union étroite de cette Église avec le Christ dans plusieurs comparaisons, où il fait ressortir en même temps son caractère social, £on unité, les relations de ses membres, la sainteté surnaturelle que le Christ lui a assurée en la rachetant et qui lui est communiquée par le Saint-Esprit, sa fin, qui est la sanctification et le salut de ceux qui la composent. Elle est le « temple de Dieu », habité par le divin Esprit, bâti sur le Christ, en dehors de qui il ne saurait y avoir d’autre fondement ; bâti aussi sur le fondement des Apôtres, avec le Christ pour pierre angulaire. I Cor, , iii, 9-17 ; vi, 19 ; Ephes., ii, 20-22. Elle est le « corps du Christ », dont le Christ lui-même est la tête et dont les fidèles sont les membres. Tous ne font qu’un même corps en vertu de leur baptême, qu’ils soient juifs ou païens, esclaves ou libres ; et cependant, comme les membres d’un même corps, ils se distinguent les uns des autres par la diversité des grâces, des ministères et des fonctions que l’Esprit Saint leur a partagés inégalement. Ils sont unis par la charité, et ils doivent s’appliquer à se revêtir de l’esprit et des vertus de Jésus-Christ, leur chef, comme d’une humanité nouvelle et parfaite. I Cor., xii, 4-30 ; Rom., xii, 4, 5 ; Eph., i, 22, 23 ; iv, 4-16 ; Col., i, 18. L'Église est encore appelée par saint Paul « l'épouse » soumise et bien-aimée du Christ, qui s’est livré pour elle, afin de la rendre sainte et sans tache. Eph., v, 23-32. — Les Épitres pastorales à Tite et à Timothée nous font connaître avec plus de précision l’organisation et la législation intérieure de cette Église, et spécialement l’autorité

qu’exerçait l'évêque sur l'église qu’il était chargé de gouverner. — La première Epltre de saint Pierre revient sur la comparaison par laquelle le Christ et ensuite saint Paul avaient représenté l'Église comme un édifice et un temple. Elle insiste sur la dignité surnaturelle et sacerdotale que les fidèles reçoivent en entrant avec le Christ, comme autant de pierres vivantes, dans cette divine bâtisse. I Petr., ii, 4-10. Elle leur rappelle qu"ils sont ainsi devenus une nation sainte, le peuple de Dieu, et les exhorte à pratiquer en conséquence les vertus chrétiennes, afin que les nations au milieu desquelles ils vivent rendent gloire à Dieu. Ils étaient des brebis errantes, mais ils sont revenus au Christ, le pasteur et l'évêque de leurs âmes. I Petr., Il, 11-25.

III. L'Église dans les Actes des Apôtres. — Les Actes nous racontent l’histoire de l'Église pendant les années qui suivirent la mort du Sauveur. Nous y voyons sa fondation le jour de la Pentecôte, par la descente du Saint-Esprit sur les Apôtres, ii, 4 ; les premières conversions des Juifs, ii, 41, et des païens, x, xi ; leur entrée dans l'Église par le baptême, x, xi ; leur union dans la doctrine des Apôtres, dans la fraction du pain, dans les prières en commun, ii, 43, et dans une charité mutuelle, n, 44 ; iv, 32, 34. Les Actes nous renseignent encore sur le rôle, les travaux et les miracles de saint Pierre, des Apôtres et des collaborateurs qu’ils se donnèrent, ii, 14 ; ni, v, 15, 25, 42 ; vi, 1-8 ; viii, 35-38, etc. ; ils nous exposent les hésitations des premiers chrétiens au sujet des observances mosaïques, et racontent comment tous se soumirent au décret porté à Jérusalem, sur la proposition de Pierre, par l’assemblée des Apôtres et des anciens, et adressé aux fidèles comme une décision inspirée par le Saint-Esprit, xv.

IV. Conclusion. — Il ressort de ces enseignements que l'Église est la société visible des fidèles, instituée par Jésus-Christ sous l’autorité de l’apôtre Pierre, fondée par les Apôtres, assistée par le Saint - Esprit, unie surnaturellement au Christ, son chef invisible, groupant les membres qui la composent dans la profession de la doctrine du Sauveur, l’observation de sa loi et l’usage de ses sacrements, pour procurer le règne de Dieu sur la terre et assurer aux fidèles le salut éternel. A. Vacant.

ÉGLON. Nom d’un roi de Moab et d’une ville chananéenne.

1. ÉGLON (hébreu : 'Églôn ; Septante : 'EyXcJ|jl), roi de Moab. Lorsque les Israélites, délivrés une première fois par Othoniel de l’oppression de Chusan Rasathaïm, furent retombés dans leurs infidélités, Dieu les châtia encore par une nouvelle oppression. Ce fut Églon qu’il choisit, avec les Ammonites et les Amalécites, alliés de ce roi, comme les instruments de sa vengeance et le (léau de son peuple. Jud., iii, 12-14. Cf. Deut., xxiii, 4 ; Exod., xvii, 8-16 ; Jud., vi, 3-5 ; vii, 12. L’intention d'Églon parait avoir été de s'établir d’une manière définitive dans le pays ; car après avoir battu les Hébreux, il alla se fixer à la « ville des Palmes », c’est-à-dire à Jéricho. Voir Jéricho. Églon ne pouvait choisir une position plus heureuse pour le centre de son gouvernement. En arrière, le Jourdain, dont il lui était facile de garder les gués, opposait un obstacle infranchissable aux attaques d’ailleurs peu probables qu’auraient pu tenter les Gadites et les Rubénites. Devant lui s’ouvrait en éventail le réseau des ouadis et des diverses voies qui pouvaient le mettre en communication avec les territoires d'Éphraïm, de Benjamin et de Juda, et lui permettre de se porter rapidement partout où sa présence serait nécessaire. En outre, grâce au peu de distance qui séparait Jéricho de la frontière moabite, le conquérant avait la facilité d’aller luimême d’un pays à l’autre selon que les circonstances l’exigeraient. Il n’est pas à présumer, en effet, que ce prince ait fixé sa résidence à l’ouest du Jourdain, sur le tern DICT. DE L. BIBLE,

toire conquis ; il dut continuer de demeurer dans ses États après sa victoire, et se rendre de là à Jéricho pour le règlement des affaires importantes et en particulier pour la perception du tribut annuel. Quoique le texte sacré ne dise pas expressément que cette perception eût lieu à Jéricho, cela semble bien résulter de l’ensemble du récit, et tel est le sentiment commun des interprètes. Jud., m, 20. — Le livre des Juges ne nous apprend rien touchant le caractère de ce prince et son administration. Il ne parait pas avoir exercé sa domination sur une partie fort étendue du territoire israélite ; elle ne dépassa pas probablement les limites des tribus méridionales à l’ouest du Jourdain ; mais elle n’en dut peser que plus lourdement sur cet espace restreint. Quelques mots de Jud., iii, 19-20, pourraient faire penser que l’oppression matérielle des étrangers était encore aggravée par le spectacle d’un culte idolâtrique importé par eux au milieu du peuple vaincu. On lit en cet endroit qu’Aod passa par « Pesîlîm, qui est à Gilgâl » (hébreu). Pesîlîm peut se traduire par « carrières » (voir col. 318) bu par « idoles ». La Vulgate et les Septante ont adopté ce dernier sens. S’il est fondé, on pourrait supposer que les Moabites avaient érigé en ce lieu quelque sanctuaire, où le culte des dieux étrangers offrait aux enfants de Jacob un perpétuel danger de tomber dans l’idolâtrie. Cf. Num., xxv, 1-3 ; III Reg., xi, 7. Le triste état dans lequel ils languissaient depuis dix-huit ans réveilla chez les Israélites le sentiment religieux et patriotique ; ils invoquèrent le Seigneur, et il les délivra. Aod, de la tribu de Benjamin, fut le libérateur qu’il leur envoya ; Églon fut tué par lui dans son palais, et cette mort, suivie du massacre général des étrangers, mit fin à la servitude du peuple de Dieu. Pour le récit de la mort d'Églon et des événements subséquents, voir Aod, t. i, col. 715-717. E. Palis>.

2. ÉGLON (hébreu : 'Églôn, Jos., x, 3, 5, 23, 37 ; xii, 12, xv, 39 ; 'Églônâh, avec hé local, Jos., x, 34, 36 ; Septante : 'OSoXXâ[i, Jos., x, 3, 5, 23, 34, 37 ; Codex Vaticanus, AÊXâu. ; Codex Alexandrinus, 'EyX<i[ ; . ; Codex Ambrosianus, 'EyX(iv, Jos., xii, 12), ancienne ville chananéenne dont le roi s’appelait Dabir. Jos., x, 3. Elle faisait partie du territoire amorrhéen, Jos., x, 5, fut prise par Josué, x, 34, 35, 37 ; xii, 12, et assignée à la tribu de Juda. Jos., xv, 39. Elle appartenait au second groupe de « la plaine » ou Séphélah, Jos., xv, 39, et était voisine de Lachis, avec laquelle elle est ordinairement mentionnée. Jos., x, 3, 5, 23, 34 ; xii, 12 ; xv, 39. Au chapitre x de Josué, les Septante ont mis Odollam au lieu d'Églon. De là vient sans doute qu’Eusèbe et saint Jérôme Onomastica sacra, Gœttingue, 1870, p. 118, 253, ne reconnaissent sous ces deux noms qu’une seule et même ville, qui de leur temps était encore « un très gros bourg, à dix milles (près de quinze kilomètres ; saint Jérôme met : douze milles, environ dix-huit kilomètres) à l’est d'Éleuthéropolis », aujourd’hui Beit - Djibrîn. Il y a ici une erreur évidente. D’abord la Bible distingue nettement Églon d’Odullam, Jos., xii, 12, 15, ou Adullam, Jos., XV, 35, 39. Voir Odollam. Ensuite il est impossible de placer Églon à quinze ou dix-huit kilomètres à l’est de BeitDjibrin, parce qu’alors on quitte la Séphélah et on s'éloigne beaucoup de Lachis, pour tomber dans la montagne de Juda. Faudrait-il donc corriger le texte des deux auteurs, et lire rcpb ; 8u<r(ictç, « vers l’occident, » au lieu de rcpôc âviToXà ; , « vers l’orient » ? Cette leçon nous conduirait directement à un endroit qu’ils appellent Agla, situé à dix milles d'Éleuthéropolis, sur la route de Gaza. Cf. Onomastica sacra, p. 103, 234, aux mots Bethagla et By)8 « X » i(i. À cette distance et dans cette direction se trouve actuellement le village de Khirbet 'Adjlân, dont le nom reproduit exactement la forme hébraïque : Tibiy, 'Églcn,

^^Li.Afi, 'Adjldn, avec l’aï » initial. Cf. Kampffmeyer, Aile Namen im heutigen Palâstina und Syrien, dans

II. — 51

la Zeltschrift des deutschen Palâstina-Verèins, t. xvi, 1893, p. 53. Il est placé à l’est d’Oumm Lâqiset au nord de Tell el-Hésy, dont le premier rappelle le nom, et le second marque plus probablement le site de l’ancienne Lachis. Les ruines s’étendent sur un plateau maintenant livré à la culture ; elles sont fort indistinctes et consistent uniquement en des amas confus de pierres, disséminés dans des champs de blé, ou formant divers enclos autour de plantations de tabac. Tout a été détruit et rasé. Cf. V. Guérin, Judée, t. ii, p. 298 ; W. M. Thomson, The Land and the Book, in-8°, Londres, 1881, t. i, p. 208. Cette identification est admise par tous les voyageurs et commentateurs modernes. Cf. E. Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres, 1856, t. ii, p. 49 ; Van de Velde, Memoir to accompany the Map ef the Holy Land, Gotha, 1858, p. 308 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 54, etc. Cependant un explorateur récent, M. Flinders Pétrie, dont les fouilles à Tell el-Hésy ont offert le plus grand intérêt, identifie Églon avec Tell Nedjiléh, an sud-est de ce dernier endroit. Ce site, d’après les ruines qu’il renferme, serait plus ancien que Khirbet’Adjlân. Pour expliquer cette différence entre l’antique emplacement et celui qui aujourd’hui en garde le nom incontestable, l’auteur suppose que la vieille cité d’Églon fut, au moment de la captivité, occupée par de nouveaux habitants. Les Juifs, à leur retour, n’ayant pas la force de les déloger, allèrent plus loin bâtir une nouvelle ville, à laquelle ils donnèrent le nom de l’ancienne. Cf. W. M. Flinders Pétrie, Tell el-Hesy, in-4°, Londres, 1891, p. 18-20 ; Explorations in Palestine, dans le Palestine Exploration Fund, Quarterly Slatement, 1890, p. 159-166.

Comme on le voit, l’histoire d’Églon ne va pas au delà de la conquête de la Terre Promise et n’en est qu’un épisode. Adonisédech, roi de Jérusalem, voyant que les Gabaonites avaient passé du côté des enfants d’Israël et avaient fait alliance avec eux, fut saisi de crainte et fit un appel aux rois d’Hébron, de Jérimoth, de Lachis et d’Églon, pour marcher tous ensemble contre Gabaon et la punir de sa trahison. Les cinq rois, vaincus dans cette fameuse journée où Josué arrêta le soleil, s’enfuirent et vinrent se cacher dans une caverne de Macéda. Ils en furent retirés pour être mis à mort. Le chef des Israélites s’empara alors successivement des différentes villes de la contrée, entre autres d’Églon, dont il extermina la population, comme il avait fait à Lachis. De là il monta à Hébron, qu’il attaqua et prit également, se rendant maître du plateau central comme de la plaine des Philistins. Jos., x. Églon n’est pas mentionnée au retour de la captivité. L’auteur sacré se contente de nommer « Lachis et ses dépendances ». I( Esdr., xi, 30.

A. Legendre.

1. EGYPTE (hébreu : Misraîm ; Septante : AfyunTo ;  ; Vulgate : ^Egyptus), contrée située à l’angle nord-est de l’Afrique.

I. Noms. — L’Egypte est ordinairement appelée en hébreu Misraim ou, sous une forme plus complète, ’érés Misraim, « la terre de Misraîm. » Ce nom lui vient de Misraîm, fils de Cham, par les descendants duquel elle fut peuplée. Gen., x, 6, 13. Misraîm a la forme du duel en hébreu, d’après l’opinion commune. On explique communément cette forme en disant qu’elle indique la division naturelle du pays en Haute et Basse-Egypte. — Quelques interprètes ont cru trouver la forme simple de Mifraîm dans Màsôr, qui, d’après eux, désigne la BasseEgypte, Is., xix, 6 jxxxvii, 25 ; II (IV) Reg., xix, 21 ; Mich., vii, 12 ; Gesenius, Thésaurus, p. 815 ; mais cette opinion est contestée. N4 les Septante ni la Vulgate n’y ont vu l’Egypte.

— Ce pays est certainement désigné en style poétique par l’appellation : ’érés Hâm, « la terre de Cham, » Ps. cv (Vulgate, civ), 23, 27 ; cf. lxxyiji (lxxvii), 51, par allusion sans doute à Cham, l’ancêtre des habitants de la

vallée du Nil. — On croit aussi généralement que le mot Rahab, « fier, superbe, » est un nom poétique de l’Egypte. Ps. lxxiv (lxxiii), 12 ; lxxxix (lxxxviii), 11 ; lxxxvii (lxxxvi), 4. — Le nom ordinaire de l’Egypte dans les

textes hiéroglyphiques est &m l q, Kern, copte,

Kême, Kemi, « noir, » par allusion sans doute à la couleur noire de la terre d’Egypte. Cf. Plutarque, De Is. et Osiris., 33. — Le nom d’Egypte, qui nous est venu des Grecs et des Romains, est expliqué comme une transformation grecque de l’expression égyptienne Ha-ka-Plah, c’est-à-dire le « temple du dieu Ptah », appellation religieuse donnée à la ville de Memphis, ou bien de Ageb ou Akeb, qui désigne « l’inondation » du Nil.

II. Géographie de l’Egypte. — 1° L’Egypte en général.

— L’Egypte s’étend depuis la Méditerranée au nord jusqu’aux limites d’Assouan, « de Migdol à Syène (Assouan), » dit Ézéchiel, xxix, 10 ; xxx, 6 (texte hébreu). Elle peut être considérée comme une vaste oasis au milieu des déserts africains ; elle est une vallée étroite parcourue par le Nil et bornée par deux chaînes de montagnes parallèles, qui ont la direction du nord au sud. La chaîne orientale est appelée arabique, et l’occidentale libyque. Ces montagnes se rapprochent vers le sud de manière à former des défilés. Le plus important est celui de Khennou, le Silsilis des Grecs et des Romains, aujourd’hui Djebel Selseléh. L’Egypte doit sa grande fertilité au Nil, qui la féconde par ses inondations périodiques. Voir Nil. — Au-dessous du Caire, le Nil se partage en deux branches, avec deux embouchures, dont l’orientale est celle de Damiette, et l’occidentale celle de Rosette. La première était appelée anciennement Phtanilique, et l’autre Bolbinitique. — Mais à une époque plus reculée, quand l’état géographique de cette partie de l’Egypte était fort différent, il y avait aussi d’autres branches et d’autres embouchures ; c’est-à-dire, en allant de l’est à l’ouest, la Péhtsiaque, la Tanitique, la Mendésienne, la Sébennitique et la Canopique. Le Nil aux temps pharaoniques formait trois lacs : 1. un lac au sud de l’embouchure Phtanitique (de Damiette), qui avec une plus grande extension est devenu aujourd’hui le grand lac de Menzaleh ; 2. le lac de Butis, au sud de l’embouchure Sébennitique, qui est appelé aujourd’hui le lac Burlus ; et 3. du côté occidental le lac Maréotis, près duquel Alexandrie fut fondée. Entre ce dernier et le lac Burlus, il y a aujourd’hui le lac Edku.

2° Le Delta. — L’espace compris entre les bras les plus éloignés du Nil inférieur (le Canopique et le Pélusiaque ) formait le territoire que les Grecs ont appelé Delta ; il a une superficie de 23000 kilomètres carrés. Arrosé par le fleuve et les canaux qui en dérivent, il est d’une très grande fertilité. Dans les temps préhistoriques, le Delta était couvert par les eaux de la mer. Dans la partie orientale du Delta se trouvait la terre de Gessen, où les Hébreux ont demeuré pendant leur séjour en Egypte. Voir Gessen.

3° Haute et Basse -Egypte. — La division la plus générale et la plus ancienne de l’Egypte était en septentrionale et méridionale ; la première formait ce qu’on appelle aujourd’hui Basse-Egypte, et la seconde la Haute-Egypte, d’après le cours du fleuve. La Haute-Egypte (appelée Es-Ça’id par les Arabes) commençait à Éléphantine, vis-à-vis d’Assouan, et arrivait jusqu’au voisinage du détroit de Memphis. La Basse -Egypte comprenait tout le reste du pays (le Behréh des Arabes), le Delta des écrivains grecs. La dénomination de Moyenne -Egypte n’est pas ancienne ; elle correspond au sud de Memphis, où, la chaîne libyque s’interronipant, on trouve un territoire fertile, arrosé par de nombreux canaux et par le lac de Fayoum, l’ancien lac Mceris. — La division en Haute et Basse-Égygte, qui concorde avec la différence de langage, de mœurs et de coutumes des habitants, remonte à la plus haute antiquité : on la trouve déjà sur les monuL.TInuIliEP.dal*

530. — Carte de l’^gypto.

1607

EGYPTE

1608

ments de la IV » dynastie, comme sur les monuments postérieurs, sous la dénomination de To-res, « terre du sud » (l’Egypte du sud), et To-mék, « terre du nord » (l’Egypte du nord). La formule la plus usuelle pour indiquer la souveraineté des pharaons était celle qui les désignait comme rois de la Haute et de la Basse -Egypte, c’est-à-dire Suten Sekhet, qui précède toujours les cartouches des noms royaux.

4° Nomes. — Chacune de ces deux parties du pays était divisée en districts ou provinces appelées par les Egyptiens hesep, et par les Grecs vo|ioî, « nomes ». L’Egypte entière était partagée en quarante-quatre nomes, dont vingt dans la Basse-Egypte et les autres dans la Haute-Egypte. Chaque nome était commandé par un chef militaire résidant dans la ville principale, et chaque nome avait aussi ses divinités locales et son culte spécial. — Nous sommes assez bien renseignés sur les noms de ces

cuit. » — Temples et localités diverses : Ater, lac sacré, près du temple de Ptah ; hat-amen, « la demeure mystérieuse ; » Pi-Imhotep-se Ptah, « le temple d’Imhotep fils de Ptah ; » Ro-sta-t, « la nécropole ; » Ha-pi-en Asar Hapi, s le temple de la demeure de Osiris-Apis ; » le célèbre Sérapéurri qui fut découvert par Mariette, à Sàqqarah, etc.

— Divinités du nome : Plah, Mathor, Sekhet, Imhotep. Voir Memphis.

5° Villes égyptiennes nommées dans l’Ecriture. — Un certain nombre de villes et localités d’Egypte sont mentionnées nommément dans les Écritures : On (Héliopolis), Gen., xli, 45 ; xlvi, 20 ; Ezech., xxx, 17 ; — Tanis, Num., xiii, 23 ; Ps. lxviii (lxxvii), 12 ; Is., xix, 11, 13 ; xxx, 4 ; Ezech., xxx, 14 (texte hébreu) ; — Péluse (hébreu : Sîn), Ezech., xxx, 15, 16 ; — Ramessès, Gen., xlvii, 11 ; Exod., i, 11 ; xii, 37 ; Num., xxxiii, 3 ; — Phithom, Exod., i, 11 ; — Socoth, Exod., xii, 27 ; xiii, 20 ; Num., xxxiii,

531. — Arrosage au moyen du schadouf dans l’ancienne Egypte. Tombeau d’Aponi. D’après les Mémoires de la mission française ou Caire, t. v, année 1894, pi. i, p. 612.

provinces et sur les villes et les divinités par les listes de nomes découvertes dans les inscriptions hiéroglyphiques, à Philæ à Karnak, à Dendérah, à Abydos, à Edlou et ailleurs, et publiées par H. Brugsch, Dùmichen et de fiougé. Voir H. Brugsch, Geographische Jnschriften, 3 in-4°, Leipzig, 1857-1860 ; J. de Rougé, Géographie ancienne de la Basse-Egypte, in-8°, Paris, 189t. — Les nomes étaient séparés l’un de l’autre par des lignes de pierres, et il y en avait de dimensions très inégales. Les plus célèbres étaient, dans la Basse-Egypte, ceux de Memphis et à’Héliopolis, et, dans la Haute-Egypte, celui de Thèbes. — Nous donnerons ici un échantillon des indications que nous possédons sur ces nomes, et nous choisirons le premier nome de la BasseEgypte (celui de Memphis), à cause de sa célébrité. — Premier nome : Aneb-hat (Memphites). Chef-lieu : Men-nefer, « la bonne place, » d’où le nom de Memphis. Celte ville avait aussi des noms symboliques, dont voici les principaux : Khanefer Ha-Ka-Ptah, « la demeure de Ptah, » d’où vient très probablement le nom grec Aîyu7rro ;  ; Ba-Ptah, a la demeure de Ptah ; » Khu-ta-ui, « la splendeur des deux pays, » etc. — Division du nome : 1. Mu ou canal ; 2. Vu, territoire appelé sekhet Ra, c’est-à-dire champ du soleil ; 3. Pehu, terrains inondés, appelés Sen-ur, « le grand cir 5, 6 ; — Élham, Exod., xiii, 20 ; Num., xxxiii, 6, 8 ; — Phihahiroth, Exod., xiv, 2 ; Num., xxxiii, 7, 8 ; — Magdalum, Exod., xiv, 2 ; Num., xxxiii, 7 ; Jer., xliv, 1 ; xlvi, 14 ; — Béelséphon, Exod., xiv, 2, 9 ; Num., xxxiii, 7 ; Bubaste, Ezech., xxx, 17 ; — Memphis., Is., xix, 13 ; Jer., il, 16 ; xuv, 1 ; xlvi, 14, 19 ; Ezech., xxx, 13, 16 ; Ose., ix, 6 ; — Taphnès, Jer., ii, 16 ; xlhi, 7, 8, 9 ; xliv, 1 ; xlvi, 14 ; Ezech., xxx, 18 ; — No-Amon (Thèbes), Nahum, m, 8 ; — Phathurès, Jer., xliv, 1, 15 ; Ezech., xxix, 14 ; xxx, 14 ; — Syène, Ezech., xxix, 10 ; xxx, 6. Voir ces mots.

6° Climat. — Le climat, surtout celui de la Haute-Egypte, est très salubre, quoique la chaleur en été y soit très forte. Le khamsin, vent du sud qui souffle pendant une période d’une cinquantaine de jours, en avril et en mai, avec des interruptions, est extrêmement fatigant. La pluie est très rare, surtout au Caire. La sécheresse de Fair produit ine énorme quantité de poussière qui cause de nombreuses maladies d’yeux. Voir Aveugle, t. i, col. 1289. Les maladies épidémiques y font quelquefois de grands ravages. Deut., vii, 15 ; xxviii, 27, 35, 60.

7° Fertilité. — La fertilité de l’Egypte est merveilleuse ; tout ce qui est arrosé par le Nil produit deux ou trois récoltes annuelles. Elle l’était encore plus du temps des Hébreux qu’aujourd’hui, parce que les canaux d’irri

gation étaient alors plus nomhreux. L'Écriture fait allusion à cette fécondité extraordinaire de la vallée du Nil, Gen., xiii, 10 ; Deut., xi, 10-11, due à l’inondation du fleuve. Amos, viii, 8 ; ix, 5. Dès la fin de l’inondation, vers les derniers jours de novembre, sur le riche limon noir déposé par les eaux on sème, et trois ou quatre mois après commence la moisson. L’arrosage est le grand moyen employé pour accroître la production du sol. Cf. Deut., xi, 10. Aussi dans toute l’Egypte, en dehors du temps de l’inondation, tant que l’eau ne manque pas, passe-t-on les journées entières à arroser, soit avec le schadouf (fig. 531 et 532), soit avec la sakiéh (fig. 533). L’agriculture a toujours été en grand honneur en Egypte :

des données des anciens écrivains grecs et romains. Mais la découverte, par Champollion, du secret de l'écriture hiéroglyphique ouvrit tout un monde aux recherches des savants. On dut écrire alors de nouveau l’histoire de l’Egypte et de sa civilisation, et une science nouvelle fut aussi fondée, Yégyptologie, qui devint une branche très importante des études orientales. Cependant au milieu de ce grand progrès une partie reste encore dans l’obscurité, c’est-à-dire la chronologie égyptienne, au moins pour ce qui regarde les premières dynasties des pharaons jusqu'à la XVIIIe ; et nous devons nous contenter à cet égard de documents incomplets et des données incertaines et vagues de la tradition.

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532. — Arrosage au moyen du schadouf dans l’Egypte moderne. D’après une photographie.

les peintures des tombeaux représentent à satiété toutes les opérations agricoles. Voir 1. 1, fig. 43-48, col. 277-284, etc. On cultivait un grand nombre de céréales, le liii, Ezech., xxvii, 7 ; la vigne et toute espèce de légumes, parmi lesquels les Israélites dans le désert regrettaient les concombres, les melons, les poireaux, les oignons et les aulx. Num., xi, 5. — Les animaux domestiques y étaient élevés, comme aujourd’hui, en très grand nombre : ânes, bœufs, brebis et plus tard chameaux et chevaux. Gen., xii, 16 ; jlu, 2, 3 ; Exod., îx, 3 ; I (III) Reg., x, 28-29. Voir ces mots. Voir aussi, pour la faune de l’Egypte, Crocodile, Hippopotame, etc. — Un grand nombre d’articles du Dictionnaire montrent, par les figures qu’ils reproduisent et par les détails qu’ils donnent, quels progrès avaient iaits les Égyptiens dans les arts et dans la civilisation. — Sur l’armée égyptienne, voir t. i, col. 992-994, 1034.

III. Histoire sommaire de l’Egypte. — Avant le commencement de notre siècle on connaissait bien peu de chose de l’histoire de l’Egypte, parce que, ayant perdu le secret de la langue égyptienne, les monuments étaient tout à fait muets. On était donc obligé de se contenter

On ne sait rien sur l’histoire de l’Egypte avant Menés, le fondateur du royaume et de la première dynastie. On suppose qu’avant cette fondation le peuple égyptien était divisé en petits États appelés hesep. Avec Menés commence l’histoire de l’Egypte, qui fut une monarchie où le pharaon était le chef suprême de l'État et de la religion ; il était aussi considéré comme une espèce de divinité et appelé « fils du dieu, fils du soleil », etc. — L’histoire de l’Egypte peut être divisée en périodes dont chacune est représentée par un certain nombre des dynasties royales des pharaons. On distingue l’ancien, le moyen et le nouvel empire (I r « -X s dynasties, XI'-XVII », XVIII » XXXI » ).

I" Période de l’ancien empire. — Elle est aussi appelée memphite, parce que ses rois résidaient alors à Memphis, dans la Basse-Egypte (près du Caire). — Dans cette période, il y eut dix dynasties de pharaons. Les plu : célèbres de ces dynasties anciennes ou au moins les plus connues sont la quatrième et la sixième. À la IVe appartiennent les rois bâtisseurs des grandes pyramides (fig. 534), Chufu, appelé par les Grecs Chéops, Kafra ( Chefrem), et

Menkau-ra (Mikerinos). On Suppose que ces pharaons ont régné 40Ô0 ans à peu près avant J.-C., et l’on doit admettre que la civilisation égyptienne fut très avancée à cette époque lointaine. En effet, les monuments contemporains des pyramides nous montrent que l’Egypte possédait alors déjà une organisation civile et religieuse et que la langue et l’écriture hiéroglyphique étaient tout à fait fixées. — La VIe dynastie est aussi très célèbre, surtout les pharaons Pepi et Vna ; et on sait par les inscriptions que les Égyptiens avaient déjà à cette époque des relations avec les peuplades de l’Afrique méridionale. II’Période. — Elle est appelée thébaine, parce que la capitale en fut Thèbes, dans la Haute-Egypte (près des

faire considérer comme.de vrais pharaons. Ils furent néanmoins toujours ennemis des rois de Thèbes, et lepharaon Rasqenen ou Soqnounra, de la XVIIe dynastie, commença contre eux une guerre sanglante, qui fut achevée par Ahmès I er. Ce pharaon, après avoir battu les Hyksos et après les avoir chassés de l’Egypte, réunit de nouveau le pays sous sa domination et inaugura la XVIIIe dynastie.

IV’Période ou nouvel empire thébain. — C’est la période la plus éclatante de l’Egypte. Elle embrasse trois dynasties, la XVIIIe, la XIXe et la XXe. Le plus puissant des rois de la XVIIIe fut Thotmès III, dont les guerres et les conquêtes, qui s’étendirent jusqu’à la Mésopotamie,

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533. — Arrosage au moyen de la sakléh. D’après une photographie.

villages modernes de Louqsor et de Karnak). Cette période va de la XIe à la XIIe dynastie. Ces pharaons de la XIe et de la XIIe sont bien connus. Parmi les rois de la XI » dynastie on doit rappeler les Mentuhotep, qui étendirent leur domination sur toute l’Egypte et purent être justement appelés « rois de la Haute et de la Basse-Egypte ». Parmi les pharaons de la XIIe dynastie, les plus célèbres furent les Osorlésen et les Amenhémat, dont le troisième de ce nom fut le constructeur du fameux lac Mœris, destiné à régler les inondations du Nil.

III’Période. — Invasion des Hyksos. — Ces Hyksos ou rois pasteurs étaient des chefs des populations nomades mêlées de Sémites et de Chamites, qui de l’Asie Mineure envahirent l’Egypte et fixèrent leur résidence à Avaris, dans la Basse -Egypte, ayant enlevé ces provinces aux pharaons du pays. On ne sait pas au juste à quel moment de l’histoire égyptienne cette invasion eut lieu ; mais elle arriva sans doute après la XII » dynastie et continua jusqu’à la XVIIe inclusivement. Les rois pasteurs, qui étaient au commencement tout à fait étrangers aux mœurs de l’Egypte, finirent par en adopter la civilisation et par se

nous sont connues par ses nombreuses inscriptions, et dont le règne peut être fixé vers le xve siècle avant J.-C. Cet éclat continua sous la dynastie suivante (XIXe), à laquelle appartient le règne très long de Ramsès II, l’un des plus grands pharaons et le plus célèbre par les monuments élevés dans toutes les régions de l’Egypte. Après ce pharaon, on commence à noter quelques indices de décadence dans l’Egypte ; elle perd ses provinces éloignées de l’Asie et reste enfermée dans ses anciennes limites. Néanmoins la XXe dynastie, appelée aussi des-Ramessides, est encore une dynastie puissante, comme nous le montrent les monuments.

V’Période. — Période de la décadence de la XXI’à la XXIVe dynastie. — La capitale des pharaons change de place à cette époque, et elle est successivement Tanis (dynastie tanite, XXIe), Bubaste (dynastie bubastite, XXIIe) et Sais (XXIVe). Survient ensuite Tinvasion des-Éthiopiens, qui fondent une nouvelle dynastie, la XXVe, appelée éthiopienne. Sous cette dynastie eut lieu la conquête de l’Egypte par les Assyriens ; puis le pays fut partagé : en douze petits États (dodécarchie, viie siècle avant J.-C.}..

1613

EGYPTE

1614

Vp période. — Période saîte. — Psammétique, roi de Sais, capitale d’un des douze États, après avoir soumis les autres, inaugure la dynastie XXVIe, appelée saîte, et la gloire de l’Egypte semble pour un moment revivre. Pendant cette période la civilisation égyptienne se mêle à la civilisation grecque, et on constate une vraie renaissance dans la littérature et surtout dans l’art. Mais cette gloire devait être de courte durée, parce que la puissance persane, qui avait succédé en Orient aux anciens -royaumes de Ninive et de Babylone, menaçait toujours l’indépendance égyptienne. Après la mort de Cyrus, son fils et successeur Cambyse porta ses armes contre Psammétique III, fils d’Amasis II, le vainquit à Péluse, et l’Egypte devint une province perse (525 avant J.-C.).

tain, c’est que le polythéisme était établi en Egypte dès les premières dynasties des pharaons. Ce polythéisme, du reste, était très compliqué ; mais le fond de toute la religion était une sorte de panthéisme. Il considérait tous les dieux et toutes les choses existantes comme des émanations d’une divinité suprême, qui se serait donnée naissance par soi-même dans le nun ou chaos primordial dans lequel nageaient tous les germes. Le soleil, qui se lève chaque jour après les ténèbres de la nuit, était regardé comme l’image la plus vive de Dieu, toujours jeune et toujours vainqueur des puissances malfaisantes de la nature ; et on peut dire que chaque divinité des Égyptiens était une divinité solaire et qui représentait un des attributs ou des effets du soleil. Le développement de ce

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531. — Les grandes pyramides de Ghizéh. D’après une photographie.

VIP Période. — Domination étrangère. — Après la conquête de Cambyse, les Égyptiens firent diverses tentatives pour rétablir l’ancien royaume des pharaons. ; mais à l’exception de quelques provinces où des rois nationaux réussirent à s’établir (dynasties locales, XX VIIIe -XX Xe), l’Egypte resta sous le joug des Perses jusqu’à la conquête d’Alexandre le Grand.

    1. VHP Période##

VHP Période, appelée alexandrine. — Après la mort d’Alexandre (323 avant J.-C.) son empire fut partagé entre ses capitaines, et l’Egypte fut assignée à Ptolémée, fils de Lagus, qui inaugura la dynastie des Ptolémées ou des Lagides. La résidence de ces rois fut Alexandrie, bâtie par le grand conquérant macédonien, et cette ville devint alors le centre d’une nouvelle civilisation grécoégyptienne, qui continua à briller même après la fin de la dynastie lagide, qui disparut avec Cléopâtre et fut remplacée par la domination romaine.

IV. Religion et civilisation des anciens Égyptiens.

— On ignore si les premiers habitants de la vallée du Nil furent monothéistes ou polythéistes ; ce qui est cer culte solaire fut dû en grande partie sans doute à la nature même et au climat de l’Egypte, où le ciel toujours pur et sans nuages permet d’admirer le grand astre du jour dans toute sa beauté. Au milieu du grand nombre des divinités qui forment le panthéon égyptien se détachent des groupes divins réunis en triades, formés d’un père, d’une mère et d’un fils, triades dont chacune était adorée d’une manière spéciale dans une des grandes villes de l’Egypte. La plus célèbre et la plus connue de ces triades est celle â’Osiris, Isis et Horus.

A la conception panthéistique du culte égyptien se rattache aussi le culte des morts, qui joue un rôle très important dans la religion de ce pays. En effet, les âmes des hommes étaient considérées comme des molécules détachées de la substance divine et qui devaient un jour se réunir à Dieu, d’où elles émanaient. C’est par suite de cette persuasion que l’âme de l’homme juste recevait le titre d’Osiris, qu’on la considérait comme une vraie divinité et qu’on l’adorait comme telle. On pouvait par conséquent ériger des temples et des autels aux âmes des

morts et surtout aux âmes des pharaons, qui étaient l’objet d’un culte spécial et même officiel. Le tombeau était considéré aussi comme l’habitation du défunt, où l'âme devait venir de temps en temps visiter le cadavre, pour s’unir à lui et y vivre d’une vie semblable à celle qu’elle avait vécue sur la terre. De cette idée était venu l’usage de l’embaumement, qui avait pour but de conserver le corps le plus longtemps possible, afin que l'âme put trouver où s’attacher dans sa visite au sépulcre. De là encore l’usage de décorer la chambre sépulcrale de peintures ou de sculptures qui se rapportaient aux occupations mêmes du défunt pendant sa vie, et d’y déposer les objets dont il avait fait usage.

On croyait aussi que les âmes des morts devaient parcourir différentes régions dans le monde souterrain et subir plusieurs épreuves avant de se réunir à la divinité. La description de ces pérégrinations était renfermée dans le document sacré appelé Sat per em heru ou Livre de sortir du jour, ou pendant le jour, que les égyptologues modernes appellent le Livre des morts. Ce précieux document, qu’on trouve en grand nombre dans l’intérieur des tombeaux, se composait de 165 chapitres, dont un des plus importants était le 125e, qui nous montre la scène du jugement de l'âme dans le tribunal d’Osiris. (Voir fig. 115, t. i, col. 469.) Après le jugement, même favorable, il y a encore pour l'âme d’autres épreuves à subir, et enfin l'âme purifiée tout à fait est absorbée par la divinité et réunie à l’essence divine. LeLivre des morts a été publié d’abord par Lepsius, in-4°, Leipzig, 1812, sous le titre : Das Todtenbuch der alten Aegypler. Une autre édition a été donnée par M. Edouard Naville, .Das àgxjptische Todtenbuch der XVIII. bis XX. Dynastie, 2 in-f », Berlin, 1886. Une traduction française du texte a été donnée par M. Pierret, Le livre des morts, Paris, 1882, et une anglaise par P. Lepage Renouf, The Egyplian Book of the Dead, in-8°, Londres (quatre parties parues, 1897), publiée par la Society of Biblical Arrhxology. Voir aussi W. Budge, À new and complète édition of the Book of the Dead, 3 in^i », Londres, 1897 (texte et traduction de la recension thébaine).

Sur les idées des anciens Égyptiens à propos de la vie future, nous possédons aussi un autre document très important, le Sat em ap ro ou Livre de l’ouverture de la bouche, qui porte aussi le nom de Livre des funérailles. Dans ce livre, qui a été confondu à tort avec le Livre des morts, il y a la description des rites funéraires qu’on pratiquait après l’embaumement du cadavre, jusqu'à l’enterrement et au sacrifice près du tombeau. Ce texte a été publié dans son intégrité pour la première fois par M. Ernest Schiaparelli, directeur du Musée égyptien de Turin : Il libro dei funerali degli antichi Egiziani, in-8 « , 1882-1890.

Dans les cercueils des momies, outre les papyrus funéraires, on a trouvé aussi d’autres papyrus traitant de sujets religieux, philosophiques, littéraires et scientifiques, de sorte qu’on peut dire que les tombeaux nous ont conservé le trésor de la science des anciens Égyptiens. Voici quelques-uns des plus importants : Les maximes du scribe Àni, traité de morale, traduit par Fr. Chabas, dans l'Égyptologie, 1874 et suiv. (ce sont sans doute des maximes comme celles d’Ani qui avaient valu aux Égyptiens la réputation de sagesse à laquelle il est fait allusion III Reg., iv, 30. Cf. Act. vii, 22 ; Is., xrx, 11 ; xxxi, 2 ; Josèphe, Ant. jud., viii, vi, 5) ; — Le papyrus magique Harris, formulaire de prières et d’exorcismes contre les mauvais esprits, traduit aussi par Chabas, Chalon-surSaône, 1860 ; — Le papyrus Sallier n° i, récit historique de la fin de la domination des Hyksos, traduit aussi par M. Chabas ; — Le grand papyrus Harris, le plus étendu des papyrus égyptiens, qui se rattache à l’histoire des pharaons de la XIXe dynastie. L'étude la plus complète sur ce papyrus est celle de M. Eisenlohr ; — Le papyrus de Senaaht ou de Sinéh du Musée de Berlin, épisode de

la XIIe dynastie, traduit par M. Griffilh, dans les Pro~ ceedings of the Society of Biblical Archœology, juin 18l12 ;

— Le papyrus Anastasi n° i, qui contient une description de voyage de l'époque de la XIXe dynastie, publié' par Chabas, Voyage d’un Égyptien en Syrie, en Phénicie, en Palestine, etc., in-4°, Paris, 1866 ; — Le papyrus d’Orbiney ou Le roman des deux frères, conte égyptien de l'époque de la XIXe dynastie, traduit et publié par de Rougé, Maspero, etc. ; — Le papyrus Harris n a 500 ou Le roman du prince prédestiné, traduit par Goodwin et Chabas, 1861, et par Maspero, dans les Études égyptiennes, Romans et poésies, in-8°, Paris, 1879 ; — Le roman de Setna, d’un manuscrit démotique du Musée du Caire, de la XXVIe dynastie. Voir Maspero, dans la Zeitschrift fur die âgyptische Sprache, 1877, p. 133.

— Enfin une quantité de textes épistolairés, décrets, etc. Le Musée de Turin en possède une belle collection, qui a été publiée par Rossi et Pleyte : Papyrus de Turin, Leyde, 1869-1876. Plusieurs des papyrus déjà cités appartiennent au Musée Britannique et sont publiés dans les Select Papyri of the British Muséum.

Les anciens Égyptiens se distinguèrent encore plus dans les arts que dans la littérature. Leurs monuments d’architecture, pyramides, temples, tombeaux, obélisques ; leurs sculptures, statues et bas-reliefs ; leurs peintures, qui représentent au vif leur vie de chaque jour, ont joui de tout temps d’une juste célébrité. Les travaux qu’ils avaient exécutés pour endiguer le Nil, canaliser et répandre partout ses eaux bienfaisantes, leur font le plus grand honneur. Leur industrie était très florissante. Leurs tapis étaient renommés en Orient, Prov., vil, 6, ainsi que leurs broderies, Ezech., xxvii, 3 (voir t. i, fig. 621 et 622, col. 1941, 1943) ; leurs tissus étaient d’une grande finesse ; leurs ameublements de bon goût et souvent d’une grande richesse, comme on peut en juger par les peintures et par les débris, qui, échappés aux injures du temps, sont conservés dans nos musées. Voir P. Pierret, Dictionnaire d’archéologie égyptienne, in-12, Paris, 1887.

V. L’Egypte dans la Bible. — 1° Dans le Pentateuque.

— 1. L’origine du peuple égyptien est indiquée, comme on l’a déjà remarqué plus haut, Gen., x, 6, 13. Les fils de Misraïm, qui peuplèrent l’Egypte et d’autres contrées, sont Ludim, Anamim, Laabim, Nephthuim, Phetrusim, Chasluim et Caphtorim. Voir ces mots. — 2. Peu après son arrivée dans la Terre Promise, une famine obligea Abraham d’aller en Egypte. Gen., xii. Voir t. i, col. 76. Plus tard, une autre famine étant survenue, Dieu défendit à Isaac, fils d’Abraham, d’aller dans ce pays, Gen., xxvi, 2 ; mais une autre famine devait, quelques années après, y conduire ses petits - fils, les enfants de Jacob. Dieu avait prédit à Abraham, Gen., xv, 13, que ses descendants seraient asservis en Egypte. Pour que la prophétie s’accomplit, il permit que Joseph, fils de Jacob, y fut vendu comme esclave et y devint premier ministre du pharaon, ce qui amena l'établissement de toute sa famille dans la terre de Gessen. Gen., xxxvii, xxxixxlvh. Voir Jacob et Joseph. C’est là que le peuple d’Israël grandit, sous la domination des Hyksos. Quand ces derniers eurent été expulsés, les progrès des Hébreux inquiétèrent les pharaons indigènes de la XIXe dynastie ; ils les opprimèrent et les soumirent à de dures corvées, dont Moïse les délivra au moyen des plaies d’Egypte et du passage miraculeux de la mer Rouge. Exod., i-xiv. Ces grands événements restèrent gravés en traits profonds dans la mémoire des Israélites, et l'écho en retentit dans tous les livres de l’Ancien Testament, Jos., ii, 10 ; xxiv, 4, etc., et jusque dans le Nouveau. Act. vu ; Hebr., m, 16 ; viii, 9 ; xi, 27 ; Jude, 5.

2° Sous les rois. — Depuis l’exode jusqu’au règne de Salomon, le peuple de Dieu n’a aucun rapport direct avec l’Egypte. Après son élévation au trône, le fils de David épousa la fille d’un pharaon, III Reg., iii, 1, et reçut de lui comme dot de la reine la ville de Gazer. UI Reg., ^âtZvfc

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535. — Table royale d’Abydos.

A gauche, le roi Sétl I" brûle des parfums en l’honneur des rois qui l’ont précédé. Devant lui, son flls Eamsès II tient les rouleaux des pharaons, ses ancêtres. La table royale contient les cartouches de soixante - seize rois, placés par ordre chronologique dans deux registres de trente-huit noms chacun. Le troisième registre ne contient que le prénom et le nom de Séti I" plusieurs fois répétés. La liste commence en haut, à gauche. La seconde partie de notre gravure ne fait qu’un tout avec la première dans le monument original. — I™ dynastie. 1. Mena. — 2. Téta. — 3. Atoth. — 4. Ata. — 5. Hesepti. — 6. Miriba. — 7. Semsou. — 8. Kabhou. — IIe dynastie. 9. Bouzaou. — 10. Kakéou. — 11. Baïnouterou. — 12. Outsnas. — 13. Senda. — III « dynastie. 14. Zazai.

— 15. Nebka. — 16. Zoslrsa. — 17. Téta. — 18. Sezès. — 19. Noferkara. — IV « dynastie. 20. Snofrou. — 21. Koufou. — 22. Doudefra. — 23. Khafra. — 24. Menkara. — 28. Shepeskaf. — V dynastie. 26. Ousirkaf. — 27. Sahoura. — 28. Kaka. — 29. Noferefra. — 30. RænouBer. — 31. Menkaouhor. — 32. Dadkara. — 33. Ounas. — VI » dynastie. 34. Téta. — 35. Ouserkara. — 36. Mérlra. — 37. Merenra. — 38. Noferkara. — Second registre : 1. Mehtlemsaf. — VII*- VIII" dynasties. 2. Nouterkara. — 3. Menkara. — 4. Noferkara. — 5. Noferkara-Nebi. — 6. Dadkaschemara. — 7. Noferkara-Khondou. — 8. Merenhor. — 9. Snofrika. 10. Bænka. — 11. Noferkara -Tererou. — 12. Hornoferka. — 13. Noferkara -Pepisenb. — 14. Snoferka-Anu. — 15. Oukaura. — 16. Noferkaura. — 17. Noferkauhor. — 18. Noferarkara. — XI « dynastie. 19. Nebkherra. — 20. Sankhkara. — XIIe dynastie. 21. Schotepabra (Aménemhat I"). — S2. Khoperkara (Osortésen I"). — 23. Noubkaura (Aménemhat II). — 24. Khakboperra (Osortésen II). — 25. Ehakaura (Osortésen III). — 26. Maatenra (Aménemhat III). — 27. Mââkheroura (Aménemhat IV). — XVIIIe dynastie. 28. Nebpehtira (Ahmès). — 29. Zoserkara (Amenhotep I er). — 30. Aâkhoperkara (Thothmès I « 0. — 31. Aâkhoperenra (Thothmès II). — 32. Menkhoperra (Thothmès III). — 33. Aakhoproura (Amenhotep II). — 34. Menkhoproura (Thothmès IV),

— 35. Nebmaatra (Amenhotep III). — 36. Zeserkhoprou-Râsotepenra (Horemhcb). — XIX* dynastie. 37, Menpehtlra (Bamsès I").

— 38. Ramauien ( prénom de Séti I"), — Troisième registre : Séti Meronptah ( Séti I"). - -

K, 16. Salomon fit aussi le commerce avec l’Egypte et y acheta des chars et des chevaux. III Reg., x, 28-29 ; II Par., I, 16 ; IX, 28. Ce pays était alors divisé entre plusieurs princes ennemis. L’un d’eus, du temps de David, avait donné asile dans la partie de l’Egypte qui était sous sa dépendance à un ennemi d’Israël, l’Iduméen Adad, qui fit plus tard la guerre à Salomon. III Reg., xi, 15-22. Voir 1. 1, col. 166. C’est aussi en Egypte, auprès de Sésac, que se réfugia Jéroboam, pour échapper à la colère de Salomon, lorsque le prophète Ahias, voir t. i, col. 291, lui eut prédit que Dieu lui donnerait dix tribus. III Reg., xi, 28-40 ; Il Par., x, 2. — Lorsque la prophétie eut été réalisée sous fioboam, fils de Salomon, ce fut sans doute Jéroboam qui appela le pharaon Sésac (voir Sésac) en Palestine, afin de mettre le roi de Juda dans l’impossibilité de porter ses armes contre le royaume d’Israël. III Reg., xiv, 25 ; II Par., xii, 2-9. Sésac est le premier pharaon qui soit nommé par son nom dans l’Écriture. Voir Pharaon. Du temps d’Asa, roi de Juda, l’Éthiopien Zara entreprit, mais sans succès, avec les troupes égyptiennes, une campagne contre la Palestine. II Par., xiv, 9-13. Voir Zara.

Sauf l’allusion vague que font les soldats syriens à une alliance de Joram, roi d’Israël, avec les Égyptiens, IV Reg., vu, 6, il n’est plus désormais question de l’Egypte, dans l’histoire du peuple de Dieu, que vers les derniers jours du royaume d’Israël. De graves événements se sontaccomplis alors dans l’Asie antérieure.. À une époque fort ancienne, les royaumes des bords de l’Euphrate et du Tigre avaient été en rapport avec l’Egypte. Les pharaons y avaient conduit leurs armées en conquérants ; de gré ou de force, des relations de commerce s’étaient établies entre eux et les princes asiatiques ; puis les uns et les autres s’étaient renfermés chez eux, et les rapports avaient cessé. Mais maintenant l’Assyrie avait établi sa prépondérance sur les rives du Tigre, elle s’avançait menaçante vers l’ouest et vers le sud, et l’Egypte lui apparaissait comme une riche proie. Les malheureuses populations placées sur là route qui conduisait d’Asie en Afrique, incapables de résister aux rois de Ninive, tournaient leurs regards vers les pharaons et les appelaient à leur secours, puisqu’ils étaient intéressés, eux aussi, à les défendre et à barrer le chemin de leurs États aux redoutables Assyriens. C’est pourquoi Osée, le dernier roi d’Israël, afin d’échapper au joug de Salmanasar, roi d’Assyrie, appela à son secours le pharaon Sua. IV Reg., xvii, 4. Voir Sua. Mais alors, comme souvent plus tard, soit parce qu’ils ne se rendirent pas suffisamment compte du danger qui les menaçait eux-mêmes, soit par négligence ou par manque d’énergie, les Égyptiens ne secoururent pas efficacement leurs alliés. Malgré cette leçon, lorsque, après la chute de Samarie, le royaume de Juda n’eut plus devant lui aucune barrière qui put le défendre contre les attaques de l’Assyrie, il y eut toujours à Jérusalem un puissant parti en faveur de l’alliance égyptienne contre Ninive. Ce parti, lors de l’invasion de Sennachérib, comptait, pour triompher des Assyriens, sur Tharaca, roi d’Ethiopie et d’Egypte ; mais ce ne fut pas ce pharaon qui sauva le royaume de Juda, ce fut l’intervention divine. IV Reg., xix, 9 ; Is., xxxvii, 9. Voir Tharaca. Les prophètes, au nom de Dieu, s’élevèrent constamment contre l’alliance avec l’Egypte, et c’est la pensée qui remplit tous leurs oracles contre ce pays. Ose., vii, 11, 16 ; îs., xviii ; xix ; xx ; xxx, 2-5, 7 ; xxx, 1, 3 ; cf. xxxvi, 6, 9-10 ; Jer., ii, 16, 18, 36 ; ix, 26 ; xxv, 19 ; xxxvii, 4-6 ; xliii, 8, 13 ; xliv ; xlvi ; Lam., v, 6 ; Ezech., xvii, 15 ; xxix-xxxii ; Nahum, iii, 8-10. Malgré leurs protestations, non seulement les enfants de Juda comptaient sur . les secours de l’Egypte, mais plusieurs se réfugiaient dans ce pays. Jer., xxiv, 8. Après la prise de Jérusalem par Nabuchodonosor, ils s’y rendirent en assez grand nombre, et ils y entraînèrent malgré lui Jérémie lui-même. Jer., xii, 17 ; xuii, 7-8 ; xuv, 1 ; IV Reg., xxv, 26. Josias fut

le seul roi de Juda qui se déclara contre les Égyptiens. Il essaya d’arrêter le pharaon Néchao dans sa marche contre l’Asie, mais il périt dans la bataille qu’il livra contre lui à Mageddo. IV Reg., xxiii, 29 ; II Par., xxxv, 20-24. Voir Néchao. Son fils Joachaz, qui lui avait succédé’sur le trône de Jérusalem, fut chargé de chaînes et emmené en Egypte par Néchao, qui fit régner à sa place un autre fils de Josias, Joakim. IV Reg., xxiv, 31-34 ; II Par., xxxvi, 3-4. Le pharaon ne tarda pas lui-même à être battu par le roi de Babylone, Nabuchodonosor, « et, dit le texte sacré, le roi d’Egypte (Néchao) ne sortit plus de son pays. » IV Reg., xxiv, 7. Pendant que Jérusalem était assiégée par Nabuchodonosor, le pharaon Éphrée essaya, mais inutilement, de lui porter secours. Voir Éphrée. C’est le dernier des pharaons mentionné dans les Saints Livres.

3° Après la captivité de Babylone. — Peu après la chute de l’empire de Chaldée, l’Egypte ne tarda pas à perdre son indépendance. Elle devint d’abord la proie des Perses, puis d’Alexandre et de ses successeurs. Sous ces derniers, les Juifs furent de nouveau à plusieurs reprises soumis aux nouveaux maîtres de l’Egypte. Les Lagides et les Séleucides se disputèrent souvent la Palestine et la Syrie ; le prophète Daniel, xi, avait prédit leurs compétitions, et les livres des Machabées y font plus d’une fois allusion. I Mach., i, 17-21 ; x, 51-57 ; xi, 1-13 ; II Mach., IV, 21 ; v, 1 ; ix, 29. Voir les articles sur les Piolémées. Sous leur domination, les Juifs s’établirent en grand nombre en Egypte, surtout à Alexandrie. Voir t. i, col. 355, 359. Cf. Esth., xi, 1 ; Eccli., Prol. ; II Mach., I, 1, 10 ; cf. Act., ii, 10 ; vi, 9. J. P. Mahaffy, The Empire of the Ptolemies, in-12, Londres, 1895, p. 85-89, 216, 267, 353, 381. C’est probablement à Alexandrie et certainement en Egypte que fut composé et écrit en grec le livre de la Sagesse. — Le pays où les enfants d’Israël étaient devenus un peuple fut enfin visité par la Sainte Famille. Joseph et Marie s’y réfugièrent avec Jésus enfant, pour se mettre à l’abri de la fureur du roi Hérode. Matth., ii, 13-15, 19-21. Le lieu où ils habitèrent et le temps qu’ils y séjournèrent nous sont inconnus. — Dans l’Apocalypse, xi, 8, la grande ville (Rome sans doute) où gisent les corps des saints est appelée symboliquement l’Egypte.

VI. Bibliographie. — Outre lès sources grecques, déjà connues par les anciens orientalistes, nous possédons aujourd’hui des sources égyptiennes, c’est-à-dire les nombreuses inscriptions qu’on est maintenant en état de déchiffrer et qui sont réunies dans les différents ouvrages d’égyptologie. — 1° Les listes de pharaons que nous possédons, outre les célèbres listes grecques de Manéthon, sont les suivantes : Le papyrus royal de Turin, publié par J. G. Wilkinson (The fragments of the hieratic Papyrus at Turin, in-8°, Londres, 1851). — La première table d’Abydos, découverte en 1818, et conservée aujourd’hui au British Muséum. — La nouvelle table d’Abydos, plus complète, découverte en 1864 (fig. 535). Voir Mariette, Revue archéologique, 2e série, t. xiii, 1866, p. 73-99. — La table de Saqqarah, découverte en 1863 et publiée aussi par Mariette, Revue archéologique, 2 « série, t. x, 1864, p. 169-186. Elle est au musée du Caire. — 2° Collections principales des textes originaux : Champollion, Monuments de l’Egypte et de la Nubie, 4 in-f », Paris, 1835-1845 ; Roselhni, Monuments dell’Egitloe délia Nubia, 3 in-f°, Florence, 1833-1838 ; R. Lepsius, Denkmâler aus Aegypten und Aethiopien, 12 in-f°, Berlin, 1850-1858 ; Select Papyri of the BHtish Muséum, Londres, 1844-1860 ; E. de Rougé, Inscriptions hiéroglyphiques copiées en Egypte, in-4°, Paris, 1877-1879, etc. — 3° Ouvrages modernes principaux d’histoire égyptienne : E. de Rougé, Recherches sur les monuments qu’on peut attribuer aux six premières dynasties, in-4°, Paris, 1866, Fr. Lenormant, Histoire ancienne de l’Orient, 6 iu-8%

Paris, 1811-I887 ; H. Brugsch, Geschichte Aegyplens unter dcn Pltaraonen, in-8°, Leipzig, 1877 ; G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, 4e édit., in-12, Paris, 1886 ; nouvelle édition illustrée, t. i, 1895 ; t..h, 1896 ; A. Erman, Aegypten und âgyptisches Leben im Allertum, 2 in-8°, Tubingue, 1887 ; Flinders Pétrie, À hislory of Egypt, 2 in-12, Londres, 18941896, etc. — 4° Quant aux applications de l’égyptologie à la Bible, on peut consulter surtout G. Ebers, Aegypten und die Bûcher Moses, t. I (ouvrage resté inachevé), in-8°, Leipzig, " 1868, et F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., Paris, 189C, t. i et h. — 5° Pour la bibliographie complète, voir H. Jolowicz, Bibliotheca xgypliaca, in-8°, Leipzig, 1858 ; Ergànzungsheft, 1861 ; Ibrahim Himly, The Literature of Egypt and the Sudan, 2 in-8°, Londres, 1888 ; A. von Fircks, Aegypten 1804, 2 in-8°, Berlin, 1895-1896, t. ii, p. 279-290. H. Marucchi.

2. EGYPTE (PLAIES D’). Voir Plaies.

3. EGYPTE (TORRENT ou RUISSEAU D’) (hébreu : nahal Misraim ; Septante : /eifiâpjîovî AîyOtitou ; Vulgate : torrens ou rivus Mgypti), ruisseau ou plutôt torrent ainsi appelé parce qu’il séparait de la terre de Chanaan l’Egypte, dont la domination s’était aulrefois étendue, comme aujourd’hui encore, jusqu’à cette limite. On admet communément que le Torrent d’Egypte est l’ouadi El-Arisch actuel, qui reçoit les eaux de la partie centrale du Sinaï et se jette dans la Méditerranée. (Voir la carte d’Egypte, col. 1600.) Il ne coule que dans la saison d’hiver et lorsqu’il pleut ; il est souvent à sec. Mais lorsqu’il a plu abondamment, il roule avec impétuosité des eaux jaunâtres, rongeant ses rives et entraînant dans son cours des arbres déracinés. Il est alors tris difficile de le traverser, et les caravanes sont quelquefois obligées d’attendre deux ou trois jours avant de pouvoir le franchir. Il tire son nom actuel du village d’El-Arisch, place fortifiée, entourée de murailles et flanquée de tours. Outre sa petite garnison, elle abrite une population d’environ quatre cents habitants. Elle s’élève sur le site de l’ancienne Rhinocolure, ainsi appelée, disent Diodore de Sicile, i, 60, et Strabon, XVI, ii, 31, en cela peu croyables, parce que le roi Actisane y envoyait en exil les criminels après leur avoir fait couper le nez. On désignait aussi quelquefois le Torrent d’Egypte par le nom de cette ville : c’est ainsi que les Septante dans Isaïe, xxvii, 12, traduisent nahal Misraim par’Pivoxopovpa, « Rhinocolure. » Cf. saint Jérôme, In Isahani, xxvii, 12, t. xxiv, col. 313.

Le Torreut d’Egypte est plusieurs fois mentionné dans l’Écriture comme marquant la frontière de la Terre Promise au sud-ouest. Gen., xv, 18 ; Num., xxxiv, 5 ; (Jos., Xiii, 3 ; ) Jos., xv, 4, 47 ; III Reg., viii, 65 ; IV Reg., xxiv, 7 ; (I Par., xiii, 5 ; ) II Par., vii, 8 ; Is., xxvii, 12. Dans deux de ces passages, Jos., xiii, 3, et I Par., xiii, 5, le Torrent d’Egypte, au lieu d’être appelé comme ailleurs en hébreu nahal Misraim, porte le nom de Sihôr. (Voir Chihob 2°, col. 702-703.) Dans Gen., xv, 18, le texte original, au lieu de dire comme dans les autres endroits nahal ( « torrent » ) Misraim, écrit : nehar Misraim, « fleuve d’Egypte, » comme traduit la Vulgate. Cette expression pouvant signifier le Nil, certains commentateurs ont conclu de là, comme Calmet, Commentaire littéral, Genèse, 1715, p. 389, que Dieu, indiquant à Abraham d’une manière tout à fait générale et sans précision rigoureuse les limites de la Terre Promise, lui avait dit réellement que la terre qu’il lui donnerait s’étendrait depuis le Nil jusqu’à l’Euphrate. Cette interprétation, quoique soutenable, paraît peu fondée, et il est préférable d’identifier le nehar Misraim avec l’ouadi el-Arisch. — Voir V. Guérin, Judée, t. ii, p. 237-249.

F. Vigouroux.

1. ÉGYPTIEN (hébreu : Misri ; Septante : At-rrârioî ; .

Vulgate : JEgyptius), natif d’Egypte (fig. 536). Les Égyptiens, en généra], sont souvent nommés dans les Saintes Écritures. Gen., xii, 14, etc. — Les Égyptiens dont il est question en particulier sont les suivants : 1° Agar, servante de Sara et mère d’Ismaël, était Égyptienne, Gen., xvi, 1 ; xxi, 9 ; xxv, 12, et elle fit épousera son fils une Égyptienne. Gen., xxi, 1. — 2° Moïse tua un Égyptien, dont le nom ne nous est pas connu, parce qu’il maltraitait

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636. — Type égyptien. Musée au Louvre.

un Hébreu. Exod., ii, 11-14 ; Act., vii, 24, 28. — 3° Un blasphémateur, qui fut lapidé dans le désert du Sinaï en punition de son crime, était fils d’un Égyptien et d’une Israélite, Salumith, de la tribu de Dan. Lev., xxiv, 10-14.

— 4° Le premier livre des Paralipomènes, iii, 34-35, mentionne’Un esclave égyptien de Sésan, de la tribu de Jnda. Il s’appelait Jéraa. Son maître, qui n’avait point de fils, lui donna en mariage une de ses filles. Voir Jéraa.

— 5° La ville de Siceleg, que le roi philistin Achis avait donnée à David pendant la persécution de Saùl, ayant été pillée par les Amalécites, tandis que tous les hommes valides étaient dans l’armée des Philistins avec leur chef, le fils de Jessé les poursuivit dès son retour ; il fut renseigné sur la route qu’ils avaient suivie et guidé lui-même dans sa marche par un Égyptien, esclave d’un Amalécite, qui l’avait abandonné en chemin, parce qu’il était malade. I Reg., xxx, 11-16. — 6° Parmi les exploits de Banaïas, fils de Joïada, un des gibborim, « les vaillants » de David, l’auteur sacré signale sa victoire sur un Égyptien de taille gigantesque, qu’il terrassa avec un bâton et tua avec sa propre lance, après la lui avoir arrachée. II Reg., xxxiii, 21 ; I Par., xi, 23. — 7° Le tribun romain Lysias, dans les Actes des Apôtres, xxi, 38, en parlant à saint Paul, qui venait d’être arrêté par les Juifs dans le temple de Jérusalem, lui demande s’il n’est pas « l’Égyptien qui quelque temps auparavant a excité une sédition et conduit quatre mille sicaires dans le désert ». Voir Sicaire. Le fait auquel il fait allusion a été raconté par Josèphe. D’après son récit, Bell, jud., II, xiii, 5, un Égyptien, qui était magicien et se faisait passer pour prophète, sous le règne de Néron, du temps du procurateur Félix, rassembla autour de lui 30000 hommes (nombre qui paraît en contradiction avec Anl. jud, . XX, viii, 6,

où le même historien ne mentionne que 400 des partisans de l’Égyptien comme ayant été tués et 200 pris) ; il les conduisit sur le mont des Oliviers, en annonçant qu’à son seul commandement les murs de Jérusalem tomberaient comme autrefois ceux de Jéricho. Jos., y, 13yi, 21. Félix les fit poursuivre par ses troupes et les dispersa ; mais l’Égyptien parvint à s’échapper, ce qui explique comment Lysias put d’abord prendre saint Paul pour cet Égyptien. Le nombre de « quatre mille sicaires », qui ne concorde pas avec les chiffres donnés par Josèphe, peut être celui des hommes armés que le tribun compte seul, tandis que l’historien juif compte tous les adhérents du faux prophète. F. Vigouroux.

2. ÉGYPTIENNE (LANGUE). La langue égyptienne avait des relations avec les langues sémitiques ; mais comme elle n’avait pas atteint le même degré de développement de ces dernières, on l’appelle langue subsémitique. Elle fut parlée pendant toute la période pharaonique et même à l’époque des Ptolémées, dont l’idiome officiel était le grec. Parlé toujours par le peuple, l’égyptien dut certainement se modifier sous l’influence grecque, de manière qu’il en résulta la langue copte, mélange de grec et d’égyptien. L’écriture de l’ancienne Egypte fut - employée même après la chute des pharaons, sous la domination perse, sous les rois grecs et aussi pendant la domination romaine. Le dernier exemple que l’on connaît appartient à l’époque de l’empereur Dèce (249-251 de J.-C.). Après le triomphe "du christianisme, elle fut abandonnée, et elle resta un mystère jusqu’à la découverte de l’inscription bilingue de Rosette (en 1799) et du texte bilingue de Philæ qui permirent à Champollion de faire le déchiffrement de quelques hiéroglyphes par la comparaison du texte égyptien avec la traduction grecque.

I. écriture. — L’écriture hiéroglyphique, employée dès l’époque la plus reculée, est formée de signes qui représentent des figures d’hommes et de femmes, des animaux, des plantes, des objets différents d’usage religieux, militaire et domestique, et aussi des objets dont l’usage est tout à fait inconnu. Voir Alphabet, t. i, col. 403. Ces signes, dont le nombre des plus usuels est de près d’un millier, étaient employés ou comme signes idéographiques ou comme signes phonétiques. — On peut distinguer les signes idéographiques en représentatifs, comme © = Râ = soleil, qui sont l’image même de la chose, et en symboliques, qui expriment la chose d’une manière conventionnelle, comme, par exemple :

H = neter = Dieu ; I = suten = roi. — Les signes

phonétiques (qui peuvent être aussi pour la plupart à leur tour idéographiques) sont ceux qui sont employés pour exprimer un son syllabique ou alphabétique contenu dans la prononciation du signe même, par le système appelé de Vacrophonisme. De cette manière, le signe déjà indiqué,

1 (suten), peut être employé pour la syllabe su, et le

signe de l’aigle, ^^, exprime la lettre A, c’est-à-dire

l’initiale du mot akoni, qui veut dire « aigle ». — Enfin on emploie très souvent des signes qui sont aussi à leur tour idéographiques, mais sans les prononcer et tout simplement pour indiquer la nature du mot précédent ; par exemple, une divinité pour un dieu, un homme ou une femme, un animal, un arbre, une pierre, un liquide, une ville, etc. Ce sont les signes « déterminatifs », qui sont d’une grande utilité dans l’étude des textes égyptiens. — On doit lire les hiéroglyphes en commençant par le côté vers lequel regardent les figures des animaux, et on les lit en conséquence quelquefois de gauche à droite et quelquefois de droite à gauche.

En général, les mots égyptiens ont été écrits par les scribes avec une combinaison compliquée de signes idéo graphiques et de signes phonétiques, soit syllabiques soit alphabétiques. Exemples : "1 ^ J ( neter = Dieu) ;

X — (suten = roi) ; T À Q (men-nofer = « la bonne place », la ville de Memphis). Les noms des pharaons, pour les distinguer des autres, étaient renfermés dans des cartouches et précédés de titres spéciaux. Il y avait deux cartouches, le premier du prénom ou nom d’intronisation et le second du vrai nom royal, et chacun était précédé d’un titre religieux ou de dignité, par exemple :

{ * 0î3 ¥ ŒEEMS

Suten seket Ra-user-ma-sotep-en-Ba se Ra Bamessu meri Amun.

Roi de la Haute et de la Basse -Egypte, RausermasotepenRa

Sis du Soleil Bamessu merl Amun.

Cartouches royaux du pharaon Ramsès II.

L’écriture hiéroglyphique était employée dans les inscriptions et aussi dans quelques papyrus religieux, comme, par exemple, dans le Livre des morts. Mais comme elle était d’une exécution toujours difficile, on adopta une écriture cursive dérivée des hiérogyphes et appelée écriture hiératique. Elle est employée dans presque tous les manuscrits à partir de l’Ancien Empire. Enfin, vers l’époque saïtique, en continuant encore l’usage de l’hiératique, on introduisit, surtout pour les documents privés, une forme d’écriture plus abrégée, à laquelle on donna le nom d’écriture démotique ou populaire.

II. grammaire. — La grammaire égyptienne est bien simple, et elle a des relations étroites avec la grammaire des langues sémitiques, comme, par exemple, l’hébreu, surtout pour l’usage des pronoms personnels et des possessifs. — 1° Article et pronoms. — 1. Article défini : singulier : pa (masculin) ; ta (féminin) ; pluriel : na (commun). — 2. Article indéfini : « a = un ; pa àtef, <s. le père ; » ta mât, « la mère ; » duel : na son-ui, « les deux frères ; » pluriel : na son-u, « les frères. » — 3. Particules de relation : em (de, en, a, du) ; en (du) ; en àtef, « du père ; » em son, « au frère ; » em per, « de la maison. » — 4. Pronoms personnels isolés : sing. : ànuk, « je » (comm.) ; entuk, « tu » (masc) ; entul, « tu » (fém.) ; entuf, « il ; » entus, « elle ; » plur. : anun, « nous » (comm.) ; entuten, « vous » (comm.) ; entusen, « ils » (comm.). — 5. Pronoms personnels sujets : sing. : 1™ pers., à (comm.) ; 2°, k (masc) ; t (fém.) ; 3e, /’(masc) ; s (fém.) ; plur. (comm.) : 1° pers., an ; 2°, ten ; 3e, sen. Celte série de pronoms sert pour former les possessifs après les substantifs ou après l’article défini, en intercalant une voyelle d’union, par exemple : pa-ik atef, « ton père » (de toi homme) ; pa-it mât, « ta mère » (de toi femme), etc. ; per- à, « ma maison ; » per-k, « ta maison » (masc) ; per-t, « ta maison » (fém.) ; per-f, « sa maison » (masc) ; per-s, « sa maison » (fém.). Cette série sert aussi pour la conjugaison des verbes, comme on le verra tout à l’heure. — 6. Pronom régime, qui sert dans la composition des phrases avec les verbes : sing. : Ire pers., ua (comm.) ; 2e, tu (comm.) ; su (masc) ; set (fém.) ; plur. (comm.) : 1™ pers., nu ; 2e, ten ; 3e, sen.

— 7. Pronoms démonstratifs : i™ série : àp, « ce ; » àpt, « cette ; » àpu, « ces ; » 2° série : pen, « ce ; » ten, « cette ; » nen, « ces. » — 8. Pronoms relatifs : sing. : enti, « qui » (comm.) ; plur. : entu, « qui. »

2° Le verbe. — Le temps simple du verbe consiste dans l’application de la série des pronoms personnels sujets à la racine verbale, très souvent avec l’intercalation d’une voyelle auxiliaire, par exemple : dr= faire ; sing. : ari-à, « je fais ; » ari-k, « tu fais » (masc) ; ari-t, « tu fais » (fém.) ; arif, « il fait ; » ari-s, « elle fait ; » plur. : ari-nu, « nous faisons ; » àri-ten, « vous faites ; » àri-sen, « ils font. » — Les temps composés sont formés avec la com

binaison de la racine verbale des pronoms personnels et des verbes auxiliaires : au, « être ; » tu, « être ; » un ( id.) ; àr, « faire, » où il y a à noter que le pronom personnel est quelquefois répété après l’auxiliaire et après la racine du verbe principal, par exemple : àu-à, àri-à, « je fais ; » àu-k, àri-k, « tu fais, » etc. — Aux verbes auxiliaires on peut ajouter aussi des prépositions et très souvent hir (sur), par exemple : àu-f hir djed en-f, « il fut sur dire à lui » (il lui dit). — Le temps du verbe égyptien peut être considéré toujours comme un aoriste ou indéfini qui est capable d’exprimer le présent, le passé et le futur. De cette manière, mer-à veut dire « j’aime, j’aimerai » et « j’ai aimé ». — Néanmoins il y a des marques spéciales pour distinguer les temps, et on peut dire en général que la particule en est la marque du passé, et la particule er est celle du futur, par exemple : au-à en mer, « j’ai aimé ; » au-à er mer, « j’aimerai. » — Enfin le verbe passif est formé avec l’auxiliaire tu, par exemple : mertu à, « je suis aimé. »

3° Particules. — 1. Voici quelques adverbes entre les plus usuels : àm, « là ; » hir, « dessus ; » kher, « dessous ; » djet, « toujours ; vmati, « pareillement. » — 2. La conjonction est henâ, « et. » — 3. La négation est an, « non. »

Bibliographie. — Th. Benfey, Ueber dos Verhâltniss der âgyptischen Sprache zum semitischen Sprachstamm, in-8°, Leipzig, 1844. — Comme grammaires, on peut citer : E. de Rougé, Chrestomathie égyptienne, 4 in-4°, Paris, 1867-1876 ; H. Brugsch, Grammaire hiéroglyphique, in-4°, Leipzig, 1872 ; Rossi, Grammatica copto-geroglifica, Turin, 1878 ; Loret, Manuel de la langue égyptienne (grammaire, tableau des hiéroglyphes, textes et glossaire), Parjs, 1889. — Dictionnaires : H. Brugsch, Hieroglyphisch-detnotisches Wôrterbuch, 7 in-4°, Leipzig, 1867-1882 ; P. Pierret, Vocabulaire hiéroglyphique, in-8°, Paris, 1875 ; S. Levi, Vocabolario geroglifico copto-ebraico, 7 in-f°, Turin, 1887-1889. H. Marucchi.

3. ÉGYPTIENNES ( VERSIONS j DE LA BIBLE. Voir

Coptes (versions) de la. Bible.

4. ÉGYPTIENS (ÉVANGILE DES). L’Évangile selon les Egyptiens, EùafréXtov iat’Aîyu « tîo - JÇ, est un évangile apocryphe, qui est signalé par les écrivains ecclésiastiques anciens, mais dont nous ne possédons que quelques fragments. Saint Épiphane écrit, Hxr., lxii, 2, t. xli, col. 1052 : « L’erreur des sabelliens et l’autorité de leur erreur est puisée par eux dans certains apocryphes, surtout le prétendu évangile égyptien, ainsi que quelques-uns l’ont nommé : dans cet évangile se rencontrent maintes maximes semblables [au sabellianisme ], soi-disant énoncées en secret et mystérieusement par le Sauveur enseignant ses disciples : par exemple, que le Père est le même que le Fils et le même que le Saint-Esprit. » L’auteur des Philosophoumena, v, 7, t. xvi, col. 3130, écrit des gnostiques naasséniens : « Ils enseignent que l’àme est insaisissable et inintelligible : car elle ne demeure pas en la même figure ou la même forme toujours… ; et ces transformations diverses, les naasséniens les trouvent exprimées dans l’évangile qui s’intitule Évangile selon les Égyptiens. » Origène, Homil. i* in Luc, t. xiii, col. 1803 : « L’Église a quatre Évangiles, les hérésies plusieurs, parmi lesquels un est intitulé selon les Égyptiens. » Clément d’Alexandrie surtout connaît et cite un même passage de ce faux évangile à maintes reprises, Strom., iii, 6, 9, 13 ; Excerpta ex Theod., 67, t. viii, col. 1149, 1165, 1192 ; t. ix, col. 689 ; il le donne comme une autorité chère aux encratites, pour la parole que cet évangile prêle au Sauveur sur la continence, et dont les encratites tirent la condamnation du mariage. —Ainsi au n « siècle l’Évangile des Égyptiens circulait dans les milieux gnostiques et encratites. Le

passage mentionné par les Philosophoumena fait penser que cet évangile ne répugnait pas à la métempsycose ; le passage mentionné par saint Épiphane, qu’il préludait au monarchianisme modaliste ; le passage cité par Clément, qu’il abondait dans la morale rigoriste et antipénitentielle. Ces trois passages, tout ce qui nous reste de sûr de l’Évangile des Égyptiens, ont été souvent reproduits : on les trouvera au mieux dans E. Nestlé, Novi Testamenti grxci supplementum, Leipzig, 1896, p. 72-73. Clément d’Alexandrie, dont le canon est si peu sûr, Revue biblique, 1895, p. 630, n’exprime aucune réserve sur l’autorité attribuée par les encratites à l’Évangile des Égyptiens ; il n’est même pas prouvé que Clément cite Cet évangile directement, et l’on peut penser que l’unique passage qu’il produit est pris par lui à l’encratite Cassianos. On a voulu retrouver l’Évangile des Égyptiens, mis au rang des Écritures canoniques, dans le morceau que l’on désigne sous le titre de seconde Épltre de saint Clément Romain, et qui est sans doute une homélie romaine datant de 150 environ. L’auteur a connu l’Évangile des Égyptiens ; il cite, en effet, une parole qu’il attribue au Sauveur, et cette parole est précisément celle que Clément d’Alexandrie rapporte d’après Cassianos comme empruntée à l’Évangile des Égyptiens. Il est à noter que la Secunda démentis attribue cette parole au Sauveur, sans exprimer qu’elle soit prise à une écriture quelconque. — Mais il y a dans la Secunda démentis d’autres citations de paroles du Christ : trois sont prises dans les Synoptiques textuellement, d’autres sont des citations infiniment plus libres, trois sont tenues par des critiques comme Hilgenfeld, Lightfoot, Harnack, pour des emprunts faits à l’Évangile des Égyptiens. — 1° « Le Seigneur dit : Si vous êtes avec moi réunis dans mon sein, et si vous n’observez pas mes préceptes, je vous rejetterai et vous dirai : Retirez-vous de moi, je ne sais d’où vous êtes, artisans d’iniquité. » IV, 5. — 2° « Le Seigneur dit : Vous serez comme des brebis au milieu des loups. Et Pierre répondant lui dit : Et si les loups déchirent les brebis ? Jésus répondit à Pierre : Que les brebis ne redoutent point les loups après leur mort : et vous ne redoutez point ceux qui vous tuent et après ne vous peuvent plus rien faire ; mais redoutez celui qui, après que vous serez morts, a pouvoir sur votre âme et sur votre corps, et vous peut jeter dans la géhenne du feu. » v, 2-4. — 3° « Le Seigneur dit dans l’Évangile : Si vous n’observez pas le petit, qui vous donnera le grand ? Je vous dis : Qui est fidèle dans le moindre sera fidèle dans l’important. » viii, 5. — Le fait que ces trois textes proviendraient de l’Évangile des Égyptiens est « supposé avec une haute vraisemblance », nous assuret-on (Harnack), et cette « haute vraisemblance » tient uniquement à ce que l’on trouve dans la Secunda démentis un emprunt à ce même évangile. À quoi nous répondons : 1° Il n’est pas établi que l’auteur de la Secunda démentis ait eu en mains l’Évangile des Égyptiens, cité par Clément d’Alexandrie d’après l’encratite Cassianos, et il est plus vraisemblable qu’il rapporte le même propos que Cassianos, mais de mémoire et comme un propos courant : la preuve en est que l’auteur de la Secunda démentis^ interprète le propos en question en un sens qui n’est nullement encralite, c’est-à-dire qui n’est nullement celui du propos même, et qu’il l’attribue à Jésus parlant à un personnage innommé, tandis que Cassianos l’attribue à Jésus parlant à Salomé. — 2° Il n’est pas établi même comme vraisemblance que les trois propos ci-dessus doivent appartenir à l’Évangile des Égyptiens : le premier dépend pour sa majeure part de saint Luc, xin, 27 ; le second de saint Matthieu, x, 28, et de saint Luc, x, 3 ; le troisième de saint Matthieu, xxv, 21-23, et de saint Luc, xvi, 10. Et si quelques traits, comme « Si vous êtes avec moi réunis dans mon sein… Et si les loups déchirent les brebis… », peuvent faire penser à un évangile apocryphe, l’idée que l’âme et le corps sont ensemble

pris dans la géhenne du feu fait penser à une doctrine très contraire à la métempsycose, que nous avons vu reprocher à l’Évangile des Égyptiens. Il se pourra donc que la Secunda démentis ait cité un évangile apocryphe d une certaine valeur ; mais cet évangile n’est pas l’Évangile des Égyptiens. Quant à ce dernier, il convient d’y voir une compilation apocryphe, sans valeur comme tradition évangélique, fiction égyptienne hérétique des environs de 150, loin d’y trouver, comme M. Harnack, une tradition parallèle aux évangiles synoptiques et dont la rédaction pourrait remonter à la fin du I er siècle. Pour l’hypothèse de M. Harnack, qui voit dans les Logia du papyrus de Benhésa, découvert par MM. Grenffell et Hunt, en Egypte (1897), des extraits de l’Évangile des Égyptiens, elle ne paraît pas fondée. A. Harnack, Geschichte der altchristlichen Litteratur, t. i, Leipzig, 1893, p. 12, et t. ii, 1897, p. 612 ; Batiffol, Anciennes littératures chrétiennes, la littérature grecque, 2 a édit., Paris, 1898, p. 38 ; Revue biblique, 1897, p. 501-515.

P. Batiffol.

    1. EICHHORN Jean Gottfried##

EICHHORN Jean Gottfried, exégète rationaliste allemand, né à Dorenzimmern le 16 octobre 1752, mort à Gœttingue le 25 juin 1827. D’abord professeur de langues orientales à l’université d’Iéna, en 1775, il passa, en 1788, à celle de Gœttingue. Il imagina l’explication naturelle des miracles et fut l’un des pères du rationalisme allemand. Voir F. Vigouroux, Mélanges bibliques, 2e édit., 1889, p. 144-161 ; Les Livres Saints et la critique rationaliste, 4e édit., t. ii, p. 438-449. Parmi ses nombreux écrits plusieurs se rapportent ^t l’Écriture Sainte ; nous citerons : Einleitung in das Alte Testament, 3 in-8°, Leipzig, 1780-1783 ; Einleitung in die apokryphischen Schriften des Alten Testaments, in-8°, Gœttingue, 1795 ; Einleitung in das Neue Testament, 2 in-8°, Gœttingue, 1804-1810 ; Commentarius in Apocalypsim Joannis,

2 in-8°, Gœttingue, 1791 ; Die hebrâischen Propheten,

3 in-8°, Gœttingue, 1816-1820. Il a en outre écrit un grand nombre d’articles dans les deux recueils suivants : Repertorium fur biblische und morgenlândische Literatur, 18 in-12, Leipzig, 1777-1786 ; Allgemeine Bibliothek der biblischen Literatur, 10 in-8°, Leipzig, 17871801.— Voir H. G. A. Eichstædt, Oratio de J. G. Eichhorn illustri e.xemplo felicitatis Academicse, in-4°, Iéna, 1827 ; Th. G. Tyschen, Memoria J. G. Eichhorn, in-4°, Gœttingue,

1828.
B. Heurtebize.

EL (hébreu : ’El ; Septante : ©erfç ; Vulgate : Deus ; assyrien : ilu), nom générique de Dieu, dans la langue hébraïque. Élohim a en hébreu la même signification, quoiqu’il en soit distinct. Voir Élohim. Nous n’avons d’ailleurs dans nos versions aucune trace de la distinction existant dans le texte original entre ces deux mots, parce qu’elles ont rendu l’un et l’autre par le même terme, 0e6î, Deus, Dieu. I. Le mot El. — On le fait dériver assez communément de Vin, ’ûl, racine verbale inusitée, à laquelle on attribue, entre autres sens, celui de « être fort », de sorte que’El signifierait « le fort ». Cf. Gen., xxxi, 29 (hébreu). Cette étymologie n’est pas acceptée aujourd’hui par plusieurs hébraïsants, qui donnent du mot des explications diverses et toutes sujettes à difficulté. Voir Fr. Buhl, Gesenius, Hebrâisches Handwôrterbuch, 12e édit., 1895, p. 39. Quoi qu’il eft soit, ’El a régulièrement dans l’Ancien Testament une valeur appellative, de même qu’Élohim, de sorte qu’il peut s’appliquer aux faux dieux comme au vrai Dieu. Par suite, pour désigner le vrai Dieu d’une manière précise et sans aucune équivoque, dans les écrits en prose on détermine souvent’El, soit par un adjectif : ’El haï, « le Dieu vivant, » Ts. xlii (xli), 3 ; lxxxiv (lxxxhi), 3 ; ’El’Ëlyôn, « le Dieu très haut, » Gen., Xiv, 18, etc. ; soit par un complément : hâ-’Êl’Ëlôhê’abîkâ, « le Dieu, dieu de ton père, » Gen., xlyi, 3 ; ’El’ôldm, « le Dieu d’éternité, » Gen.’, xxi, 33 ; ’El Bêt’El, « le Dieu de Béthel, » Gen., xxxi, 13 ; ’El’êlim, « le Dieu des dieux, » Dan., xi, 36, etc. Dans le style poétique, par abréviation’El peut s’employer sans aucun déterminant comme nom propre de Dieu. Job, v, 8 ; viii, 5 ; Ps. x, M ; xvi, 1 ; xvii, 6, etc. Quelquefois, mais plus rarement, il est précédé de l’article hâ-’Êl, pour désigner « le Dieu » par excellence, le seul vrai Dieu. Ps. lviii, 20 ; ls., xlii, 5. Voir F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. iv, p. 465-470.

II. Emploi du nom divin’El dans la Bible hébraïque.

—’El se lit, au singulier, deux cent vingt-six fois dans les livres protocanoniques de l’Ancien Testament (S. Xlendelkern, Concordantix hebraicse, 2 in-4°, Leipzig, 1896, t. i, p. 85-86) ; le pluriel’Êlim est employé seulement neuf fois.’Elôhîm est d’un usage beaucoup plus fréquent dans la Bible hébraïque. Voir Elohim. On doit remarquer que ce sont généralement les auteurs les plus anciens qui se sont le plus servis du mot’El. Il est dix-huit fois dans la Genèse (dont cinq fois avec l’épi—, thète èaddaï, « tout-puissant, » et quatre fois avec l’épithète’Élyôn) ; quatre fois dans l’Exode, vi, 3 (avec èaddaï ) ; xv, 2 ; xx, 5, et xxxiv, 14 ; dix fois dans les Nombres (huit fois dans les oracles de Balaam [xxm, 8, 19, 22, 23 ; xxiv, 4, 8, 16, 23] etxii, 13 ; xvi, 22) ; treize fois dans le Deutéronome (dont cinq dans les cantiques de Moïse). Il est absent des chapitres xi-xxxi de ce livre, de même que du Lévitique tout entier, où Dieu est toujours appelé Jéhovah et où Élohim lui-même ne se lit qu’une seule fois pour qualifier Jéhovah, xix, 2, et une autre fois pour désigner les faux dieux, xrx, 4. Josué l’emploie trois fois, Job plus de cinquante fois. Il est usité à peu près dans un tiers des Psaumes. Dans les livres de Samuel (I et II Reg.), il ne se rencontre que dans les morceaux poétiques. I Sam., i, 2, 3 ; II Sam., xxii (quatre fois) ; xxm (cinq fois). Isaïe l’emploie trois fois dans sa première partie, v, 16 ; xiv, 13 ; xxxi, 3 ; quatorze fois dans la seconde partie. Jérémie n’en fait usage que deux fois, li, 56, et xxxii, 18 ; ce dernier passage est un emprunt au Deutéronome, X, 17. Ézéchiel emploie’El Saddaï, x, 5 ; ’El seul, xxviii, 2, 9. On le trouve trois fois dans Osée et autant dans Malachie, une fois dans Michée, dans Nahum et dans Jonas, trois fois dans Daniel. On voit par là que peu à peu l’usage du nom de’El a diminué, et qu’il a été surtout conservé’par les poètes, qui ont toujours aimé les formes archaïques, et à qui l’emploi de ce mot monosyllabique était parfois plus commode que celui du nom d’Elohim. On ne le lit jamais dans le court livre de Ruth, dans le Cantique des cantiques, TEcclésiaste, les Proverbes, les (III et IV) livres des Rois, Joël, Amos, Abdias, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie, Esther, (I) Esdras, les Chroniques (Paralipomènes). Dans Néhémie (II Esdr.), il ne figure que dans une citation de l’Exode, II Esdr., ix, 31 et Exod., xxxiv, 6, et dans une double citation du même passage du Deutéronome, II Esdr., i, 5 ; ix, 32, et Deut., x, 17.

III. Le mot’El dans les noms propres. — Les Sémites, en général, manifestaient leur religion et leur piété envers leurs dieux en faisant entrer leur nom dans la composition des noms propres de personnes et de lieux, soit comme élément initial, soit comme élément final. Conformément à cet usage, les Hébreux se servirent du nom commun divin El (et plus souvent encore du nom propre de Dieu, Jéhovah, abrégé, voir Jéhovah ; jamais d’Elohim, qui était trop long) pour former leurs noms propres : par exemple, Éléazar, Elchanan, etc., Israël, Ézéchiel, Daniel, Métabéel ( nom de femme), etc. ; Phanuel, Béthel, etc. Cet usage existait encore du temps de Notre-Seigneur : nous trouvons dans l’Évangile : Nathana-el. Joa., i, 46, etc. Les Sémites polythéistes se servaient souvent, pour former leurs noms propres, du nom personnel de leurs dieux (voir Assurbanipal, Baltassar, etc.) ; mais on rencontre aussi l’emploi d’El chez plusieurs

autres peuples sémitiques, tels que les Moabites, Nachliel, Nom., xxi, 19 ; les Ammonites, Pudwilu, d’après les inscriptions cunéiformes (voir Schrader, Die Keilinschriften und das aile Testament, 2e édit., 1882, p. 141 ; comparer Phedaël, Num., xxxiv, 28) ; les Chananéens, Jezræl, I Sam., xxix, 1, etc. ; Jephtahel, Jos., xix, 14, 27 ; Jéraméel, I Sam., xxvii, 10 (tous les trois, noms de lieux) ; les Phéniciens, ’EvjXoî, roi de Byblos (Arrien, II, xx, 1), appelé sur ses monnaies SNi’y, « l’œil de Dieu, » etc.

IV.’El dans quelques locutions particulières. — Dans certaines locutions poétiques, ’El, complément d’un substantif, a la valeur d’un superlatif : harerê-’Êl, « montagnes de Dieu, » signifie « montagnes très hautes », Ps. xxxvi (xxxv), 7 ; ’arzê-’Êl, « cèdres de Dieu, » veut dire « cèdres très élevés ». Ps. lxxx (lxxix), 11. — Voir E. Nestlé, Die isrælilischen Eigennamen nach ihrer religionsgeschichllichen Bedeutung, in-8°, Harlem, 1876, p. 33 ; D. H. Mûller, Veber ha und ré im Sabâischen, dans les Actes du sixième Congrès des orientalistes, tenu en 1883, à Leyde, part, ii, sect. i, p. 465-472 ; Frd. Bæthgen, Beitràge zur semitischen Religionsgeschichte, in-8°, Berlin, 1888, p. 296-310 ; Th. Nôldeke, Elohim, El, dans les Sitzungsberichte der Akademie der Wissenschaften zu Berlin, 1882, p. 1175-1192 ; E. Renan, Des noms théophores apocopes dans les anciennes langues sémitiques, dans la Bévue des études juives, 1882, t. v, p. 161 ; E. G. King, Hebrew Words and Synonyms, Part. I. The Names of God, in-8°, Cambridge, 188Ï.

F. VlGOUROUX.

ÉLA (hébreu : ’Êlâh, et une fois’Élâ’), nom d’un Iduméen et de cinq Israélites.

1. ÉLA (Septante : ’HXâ ; ), un des alloufs ou chefs de tribu en Idumée. Gen., xxxvi, 41 ; I Par., i, 52.

2. ÉLA (hébreu : ’Élâ’; Septante : ’HXâ), père de Séméi, l’intendant de Salomon dans la tribu de Benjamin. III Reg. iv, 18.

3. ÉLA (Septante : ’H).â), fils et successeur de Baasa, roi d’Israël. III Reg., xvi, 6, 8. Il établit sa résidence à Thersa, ^.9, et imita la conduite coupable de ses pères, ꝟ. 13. II fut tué par Zambri, un de ses officiers, pendant qu’il s’enivrait dans la maison de son intendant, Arsa, Jꝟ. 9-12, la vingt-cinquième année d’Asa, roi de Juda. Son règne dura moins de deux ans, ꝟ. 8 ; toute sa famille périt avec lui, ^. 11.

4. ÉLA (’HXi), père d’Osée, le dernier roi d’Israël. IV Reg., xv, 30 ; xvii, 1 ; xviii, 1, 9. Il ne faut pas le confondre avec le précédent, qui vécut deux siècles plus tôt.

5. ÉLA (Septante : ’ASi ; Codex Alexandrinus : ’AXà), fils de Caleb, de la tribu de Juda. I Par. iv, 15.

6. ÉLA (Septante : ’HXcô ; Codex Alexandrinus : ’HXâ), fils d’Ozi, de la tribu de Benjamin. I Par., ix, 8.

ÉLAD (hébreu : ’El’âd, « Dieu a attesté ; » Septante : ’EXeâS), descendant d’Éphraïm par la branche de Suthala, selon la Vulgate ; plutôt frère de Suthala, selon le texte hébreu. I Par., vil, 21. II fut tué avec son frère Ézer par les habitants primitifs de Geth, dans une expédition où ils tentèrent de ravir leurs troupeaux.

    1. ELADA##

ELADA (hébreu : ’El’âdâh, « Dieu a orné ; » Septante : ’EXoeSi), fils de Thahath et père d’un autre Thahalh, dans la descendance d’Éphraïm. I Par., vii, 20.

EL AH, nom hébreu, ’Êlâh, de la vallée que la Vulgate appelle « vallée du Térébinlhe », parce que c’est la signification du mot’Êlâh. VoirTÉRÉBiNTHE (Vallée du).

ÉLAÏ (Septante : ’EXxîoe), ancêtre de Judith, de la tribu de Siméon. Judith, viii, 1. Les noms de cette généalogie présentent bien des divergences entre les Septante et la Vulgate. Les noms donnés dans cette dernière version paraissent assez altérés ; on ne voit guère qu’'EXxïoe des Septante qui puisse répondre à Élaï.

ÉLAM (hébreu : ’Êlâm), nom d’un descendant de Sem, de six Israélites et du pays habité par la postérité d’Élam, fils de Sem.

1. ÉLAM (Septante : ’EXâjz, Gen., x, 22 ; ’A ! X£p, I Par., i, 17 ; Vulgate : JElam), le premier des fils de Sem mentionnés dans les listes généalogiques de l’Écriture. Gen., x, 22 ; I Par., i, 17. Il s’agit ici de la branche la plus orientale des peuples sémitiques, et son histoire se confond avec celle du pays même. Voir Élam 8.

A. Legendre.

2. ÉLAM, chef de famille de la tribu de Benjamin, dans la descendance de Sésac. I Par., viii, 24, 25.

3. ÉLAM, lévite de la branche de Coré, cinquième fils de Mésélémia, Il était portier du Temple du temps Je David. I Par., xxvi, 3.

4. ÉLAM (Septante : ’AïXâ[i, ’HXiu.), chef de famille dont les descendants sous Zorobabel revinrent de la captivité de Babylone au nombre de douze cent cinquante-quatre. I Esdr., H. 7 ; II Esdr., vii, 12. Plus tard, soixanle et onze autres de ses descendants se joignirent à Esdras à son retour de l’exil. I Esdr., viii, 7. En ce dernier passage, la Vulgate le nomme Alam. Voir t. i, col. 333. Ce fut un de ses descendants, Séchénias, qui encouragea Esdras dans la réforme du peuple. I Esdr., x, 2. Parmi ceux qui renvoyèrent les femmes étrangères qu’ils avaient prises contre la loi se trouvent six membres de la famille d’Élam. I Esdr., x, 26. Dans 1 Esdr., x, 2, le texte hébreu porte Dbny, par allongement du >, yod, en î, vav ; aussi au qeri a-t-on ponctué’Olâm.

5. ÉLAM, chef de famille dont les descendants revinrent également de Babylone avec Zorobabel. On a soin de le distinguer du précédent, puisqu’on ajoute’ahêr, « autre, » à son nom : « l’autre Élam. » Mais ce qui est étrange, c’e.->t que le nombre de’ses descendants revenant de l’exil soit exactement le même, douze cent cinquante-quatre. I Esdr., H, 31 ; II Esdr., vii, 34. Il a dû se glisser ici quelque faute de copiste.

6. ÉLAM, un des chefs du peuple qui, à la prière de Néhémie, signèrent le renouvellement de l’alliance théocratique. II Esdr., x, 14.

7. ÉLAM, un des prêtres qui accompagnèrent Néhémie, quand il fit la dédicace des nouveaux remparts de Jérusalem. II Esdr., xii, 41 (hébreu, 42). E. Levesqie.

8. ÉLAM (hébreu : ’Êlâm, « pays haut ; » Septante : ’AiXan, Jer., xxv, 25 ; xlix, 34, 35, 36, 37, 38, 39 ; Ezech., XXXII, 21 ; Dan., viii, 2 ; Codex Vaticanus, AtXaneréai, Is., XI, 11 ; ’EXanetToei ; Is., xxi, 2 ; xxii, 6 ; Codex Sinaiticus, ’EXa[itTai, Is., xxi, 2 ; xxii, 6 ; Vulgate : Elam, Jer., xxv, 25 ; JElam, Is., xi, 11 ; xxi, 2 ; xxii, 6 ; Jer., xlix, 34-39 ; Ezech., xxxii, 24 ; Dan., viii, 2), nom du pays habité par les descendants d’Élam (voir Élam 1) et situé au nord du golfe Persique, avec Suse pour capitale. C’est aussi le nom du peuple lui-même. Is., xi, 11 ; xxi, 2 ; xxii, 6, Jer., xxv, 25 ; xlix, 34-39 ; Ezech., xxxii, 24 ; Dan., viii, 2.

I. NOM. — Élam est souvent mentionné dans les inscriptions assyriennes avec la forme féminine, Ilamtu, mât Ilam-ti, tandis que l’  « élamite » est appelé Ilamû. Le sens géographique de ce mot s’explique et se pré

cise encore davantage par l’inscription de Béhistoun, dans laquelle au babylonien I-lam-mat répond te persan Uvaja, c’est-à-dire « la Susiane ».’Êlâm, qui signifie « pays haut », est le nom donné par les Babyloniens sémites au pays montagneux qui commence au nord et à l’est de Suse. Le terme accadien employé pour désigner la même contrée, Numma-ki, avait la même valeur ; c’est ce qu’avaient déjà reconnu les premiers assyriologues. Le nom particulier, indigène) d’après les monuments eux-mêmes, était èuSinak (cf. Sûsankâyê’, I Esdr., IV, 9), de SuSân ou SUSin, Suse, la ville principale. Si la région élevée s’appelait Numma, Hamma, la plaine était nommée Anzân, AnSân, et par assimilation de la nasale à la chuintante, AsSân, nom qui se trouve mentionné dans les inscriptions des rois et des patesi de Lagas, dans le Livre des présages des vieux astronomes chaldéens, et dans le protocole royal de Cyrus et de ses ancêtres (cf. Rawlinson, Cun. Insc. W. A., t. v, pi. 35, 1. 12, 21), et qui a donné lieu à d’ardentes polémiques.’Êlâm est devenu en grec’EX’jjiai, ’EXuiiaïç, l’Élymaïde des auteurs classiques. Cf. Frd. Delitzsch, Wo lag das Paradies ? Leipzig, 1881, p. 320 ; E. Schrader, Die Keilinschriften und das Allé Testament, Giessen, 1883, p. 111 ; G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. ii, 1897, p. 33.

II. Géographie. — 1° Situation et description. — Plusieurs auteurs anciens ont confondu Élam avec la Perse. C’est une erreur au triple point de vue ethnographique, philologique et historique. N’eussions-nous que la Bible pour guide, nous pourrions encore assez exactement déterminer le territoire et le peuple désignés sous ce nom. Elle range les Élamites parmi les descendants de Sem, Gen., x, 22 ; I Par., i, 17, tandis que les Perses sont des Aryas, c’est-à-dire de race indogermanique. Elle leur donne pour voisins Sennaar ou la Babylonie, Gen., xiv, 1 ; I Esdr., iv, 9, le Guti (hébreu : Gôim ; Vulgate : Gentium), au nord de ce dernier royaume, Gen., xiv, 1, les Mèdes, Is., xxi, 2, et pour ville principale Suse, sur le fleuve Ulai, l’ancien Eulssus, EùXato ; . Dan., viii, 2. Toutes ces données nous conduisent à la Susiane, entre la Babylonie et la Perse, en sorte que le pays d’Élam touchait’au sud au golfe Persique, à l’ouest à la Chaldée, au nord à l’Assyrie et à la Médie, et du côté de l’est à la Perse. Les traducteurs arabes de la Bible l’avaient bien compris : Saadia rend le nom par Khouzistân, Gen., x, 22 ; xiv, 1 ; Is., xi, il ; l’auteur de la version des Prophètes dans la polyglotte de Londres, Is., xi, 11 ; xxi, 2 ; xxii, 6 ; Jer., xlix, 34 ; Ezech., xxxii, 21, le traduit par Ahouaz, ville encore existante de la contrée. Cf. A. Knobel, Die Volkertafel der Genesis, Giessen, 1850, p. 139. (Voir la carte, lig. 537.)

L’Élam correspond donc en grande partie au Khouzistân ou Arabistan actuel, dont la configuration est nettement accusée. Il comprend deux régions distinctes, celle de la plaine et celle des montagnes. Les plaines basses, que le golfe Persique borde au sud et le Schatt el-Arab à l’ouest, ont un aspect nu et inculte ; brûlées en été par une chaleur presque tropicale, elles sont partiellement inondées en hiver par les pluies et le débordement des rivières, qui les transforment en lacs ou en marais. Mais, à mesure qu’on s’élève vers l’intérieur, des collines à pente douce conduisent à un premier palier d’élévation moyenne, où se sont développées de tout temps les villes les plus importantes du pays, comme Suse anciennement et Chouster aujourd’hui. À partir de ce premier gradin commence la montagne proprement dite, qui se compose de chaînons parallèles, dont la direction générale est du nord-ouest au sud-est. La chaîne est principalement formée de roches calcaires et crétacées, tandis que les avant-monts rapprochés du Tigre ont pour la plupart des nummulites et des grès plus récents. En venant de la plaine, il faut monter par une succession de degrés et de cluse en cluse : les montagnes s’étagent l’une derrière l’autre et s’alignent

parallèlement sur six ou sept rangs, comme autant de remparts, entre le plateau de l’Iran et les campagnes du Tigre. Cette zone est entrecoupée de vallées nombreuses, latérales ou transversales, que parcourent d’innombrables cours d’eau alimentés par les sources ou par les neiges. Le sol ici est très riche ; on y récolte du blé et de l’orge ; mais la plus grande partie des vallées est couverte d’immenses pâturages où paissent des troupeaux de moutons et de gros bétail. Les étés y sont tempérés et les hivers très froids : aussi la végétation y est-elle bien différente de celle qui couvre les plaines inférieures. Le Khouzistân est situé tout entier sur le talus du pla Echdla

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537. — Carte de l’Elam.

teau incliné vers le bassin de l’Euphrate. C’est dans cette direction que s’écoulent toutes les eaux. Les rivières y sont nombreuses, et plusieurs sont considérables. Citons principalement la Kerkha, VUknû des Assyriens, le Khoaspès des Grecs, et le Kourân ou Karoûn, qui représente dans une partie de son cours l’Ulai de Daniel, viii, 2, 16, le nâr U-la-a des inscriptions assyriennes, VEu-Iseos des classiques, appelé aussi Pasitigris. Le bras du Karoûn qui passe à Dizfoul est aujourd’hui reconnu pour être l’ancien Ididi, nâr Id-id-ê. Cf. Frd. Delitzsch, Wo lag das Paradies ? p. 193, 329. Ces rivières se réunissent par des canaux en quittant les hauteurs et se déplacent perpétuellement à travers le sol meuble de la plaine susienne ; elles égalent bientôt la largeur de l’Euphrate, puis elles se perdent à moitié au milieu des vases, et elles vont rejoindre le Schatt el-Arab. Elles se jetaient autrefois dans la partie du golfe Persique qui pénétrait jusqu’à Kornah, et la mer servait de frontière au versant méridional du pays. La côte a quelques baies, et les cours d’eau qui se jettent dans le golfe y forment de petits estuaires.

2° Population. — À la division physique du pays correspond la division de la population. Deux races différentes, les Loûrs et les Arabes, occupent chacune exclusivement une des deux grandes régions. Les premiers, qui appartiennent à la famille iranienne ou persane, possèdent seuls le haut pays. Les seconds, beaucoup moins nombreux, sont répandus dans les plaines inférieures jusqu’au Tigre et à l’Euphrate. La classe pastorale forme la très grande majorité des habitants. Aussi le Khouzistân n’a guère d’autres produits que. ceux de ses troupeaux ; on y cultive cependant le tabac, le coton, l’indigo, le

maïs. La contrée d’alluvions qui s’étale derrière les marais est aussi féconde et aussi riche que les alentours de Eabylone. Le froment et l’orge y rendaient autrefois cent et même deux cents pour un. Strabon, xv, p. 731. Les palmiers entouraient les villes d’une ceinture épaisse ; les sculptures assyriennes nous les montrent nombreux au temps d’Assurbanipal comme ils le sont encore aujourd’hui. L’amandier, le figuier, l’acacia, le peuplier, le saule, se serraient en bandes étroites au bord des rivières. Cf. E. Reclus, L’Asie antérieure, Paris, 1884, p. 167, 290-298 ; Maspero, Histoire ancienne, t. II, p. 30-32 ; Jane Dieulafoy, La Perse, la Chaldée, la Susiane, dans le Tour du monde, t. ii, p. 65-112 ; À Suse, dans la même revue, t. liv, p. 1-96 ; t. lv, p. 1-80 ; Layard, Description of the province of Khûzistân, dans le Journal of the Society of Geography de Londres, t. xvi, 1846, p. 1-105.

B38. — Élamite. Bas-relief du Louvre.

Dans le pays que nous venons de décrire vivaient de toute antiquité trois peuples dont les descendants persistent de nos jours, amoindris et mêlés à des éléments d’origine plus récente. Les sculptures assyriennes représentant des scènes de guerre dans la contrée d’Élam, montrent qu’un type négroïde très caractérisé prédominait dans cette population de sang mélangé. C’étaient des hommes trapus, robustes, bien pris dans leur petite taille, avec peau brune, œil et cheveux noirs (fig. 538). Ils se tenaient principalement sur les plages basses et dans le creux des vallées, où le climat humide et chaud favorisait leur développement ; mais ils étaient répandus aussi par la montagne jusqu’aux premiers plans du plateau iranien. Ils y entraient en contact avec une autre race de stature moyenne, a la peau blanche, probablement apparentée aux nations de l’Asie centrale et septentrionale. Cette seconde population est rattachée par quelques auteurs à la race dite sumérienne, que l’on trouve établie en Chaldée. Il y avait enfin des Sémites. « Les sculptures assyriennes… justifient l’écrivain biblique en attribuant à la plupart des chefs de tribus et des hauts fonctionnaires de la cour des rois de Suse un type de race tout à fait différent de celui des hommes du peuple, des traits qui sont, sans aucun doute possible, ceux des nations syroarabes (fig. 539). Il y avait donc eu dans le pays d’Élam, à une époque qu’il nous est impossible de déterminer, introduction d’une aristocratie se rattachant à la race de Sem, aristocratie qui avait rapidement adopté le

langage du peuple auquel elle s’était superposée, mais qui, ne se mélangeant pas avec les indigènes des classes inférieures, avait conservé fort intact son type ethnique particulier. C’est là ce que le document sacré désigne sous le nom d’Élam, fils de Sem. » F. Lenormant, Histoire ancienne de l’Orient, Paris, 1881, t. i, p. 281. L’existence d’une population sémite en Élam est encore prouvée par les noms des villes anciennes que nous citons plus bas, et dans lesquels les préfixes appartiennent bien aux langues sémitiques : Bit, « . maison ; » TU, « colline ; » Bàb, n porte. »

L’Élam constituait une sorte d’empire féodal, divisé entre nombre de tribus : les Habardîp, qui sont les anciens Mardes ou Amardiens, les Khapirti-Apirti des textes susiens et akhéménides, et habitaient le pays au nord-est de Suse ; les Hussi ou Ouxiens ; les gens d’Yatbûr et d’Yamûtbal, dans la plaine, entre les marais du Tigre et la montagne ; VUmlial, entre l’Uknù et le Tigre. Ces

630.

Élamite. Koyoundjik. British Muséum.

tribus étaient indépendantes les unes des autres, mais souvent réunies sous l’autorité d’un suzerain qui demeurait à Suse. Cette ville s’épanouissait dans l’espace compris entre l’Ulai et l’ididi, huit ou dix lieues en avant des premières rangées de collines. La forteresse et le palais s’étageaient sur les penchants d’un monticule qui commandait au loin la campagne. Voir Suse. Les autres cités étaient : Mataktu, la Badaka de Diodore, xix, 19, située sur l’Eulæos, entre Suse et Ecbatane ; Nagîtu, près du golfe Persique ; Til-H^mba, la « Motte-Humba », ainsi appelée d’après l’un des principaux dieux élamites, peut-être aux ruines actuelles de Boudbar ; Dûr-UndaH, identifiée, mais sans certitude, avec la forteresse de Kalai-Dis, sur le Dizfoul-Roud ; Khidalu, Bit-Imbi, Bâb-Dûri, Pillatu, etc. La plupart s’attribuaient le titre de cités royales. Cf. Frd. Delitzsch, Wo lag das Parodies ? p. 322-329.

III. Histoire. — L’histoire d’Élam nous vient presque entièrement de sources étrangères, c’est-à-dire assyriennes et chaldéennes.

, /* Période. Empire élamite. — Aussi loin qu’elles nous font remonter, nous rencontrons une dynastie élamite qu’on a appelée celle des Kudurides, à cause du premier élément, Kutir ou Kudur, du nom de plusieurs souverains. Vers l’an 2285 avant notre ère, le prince qui gouvernait ce pays était KudurNanl.iundi (déformation de Kutur-Nal.iunta, que donnent les inscriptions susiennes, et qui veut dire « Serviteur de la déesse Nahunta » ). Grâce à la cohésion de l’unité nationale, la puissance du royaume avait grandi dans l’ombre, tandis que la Chaldée, affaiblie par des dissensions intes II. - 52

fines, avait fini par se trouver. hors d’état de défendre ses frontières et son indépendance. Une invasion, descendant le cours du Khoaspès, couvrit rapidement tout le bassin inférieur du Tigre et de l’Euphrate. Le roi d’Élam traversa la contrée en triomphateur, dévastant les campagnes, n’épargnant ni ville ni temple, emportant comme trophée la statue de la déesse Nanâ, qu’il enleva à Uruk et qu’il emprisonna au sanctuaire de Suse. Le souvenir de ce désastre resta gravé profondément au cœur des Chaldéens jusqu’au jour où, longtemps après, ils prirent une éclatante revanche en portant le fer et le feu dans la capitale de leurs ennemis séculaires. C’est le roi Assurbanipal qui, dans le récit d’une glorieuse campagne contre l’Élymaïde, nous raconte comment il trouva et réintégra dans son temple la statue qui « était dans le malheur depuis mille six cent trente-cinq ans ». Mais alors la Chaldée entière, et Bahylone elle-même, dut reconnaître la suprématie de l’envahisseur ; un empire susien l’absorba dont ses États furent les provinces et ses

idinnam est le nom du roi de Larsa (la tablette vient de Larsa-Senkeréh), qui fut détrôné par Kudur-Mabuk et Rimsin. Il fut sans doute remis au pouvoir par Hammurabi, roi de Babylone, après sa campagne contre le prince d’Ëmutbal (l’Élam occidental) et Rimsin, campagne qui est mentionnée, en dehors du texte que nous venons de citer, par les inscriptions des contrats de Tell-Sifr et Senkeréh. Cf. Revue biblique, Paris, t. v, 1896. p. 600-6M. On avait jusqu’ici identifié Kudur-Lagamar avec Kudur-Mabuk. Les monuments viennent de justifier la Bible en révélant le vrai nom du conquérant dont parle la Genèse dans son premier récit militaire. Gen., xiv. Dans cette campagne, les trois rois d’Élam, de Babylone. et de Larsa avaient été alliés ; car on reconnaît généralement Éri-Aku dans Arioch et Hammurabi dans Amraphel. Nous sommes à même de comprendre maintenant comment Chodorlahomor avait pu porter ses armes jusqu’à la Méditerranée. « L’ensemble des faits connus jusqu’à présent suggère l’idée d’un grand empire élamite, qui

540.’— Bataille d’Ulaï. Archers et chars de guerre des Élamites. Koyoundjlk. D’après Layard, Monuments

0/ Xïitevek, t. ii, pi. 45.

dynasties les vassales. Cette soumission résulte du titre d’Adda Martu, « souverains de l’Occident, » que prennent plusieurs princes élamites. C’est du reste ce qui explique comment ceux-ci purent étendre leur autorité par delà l’Euphrate, comme au temps de Chodorlahomor. La ville de Larsa paraît, d’après les monuments, avoir été la capitale du nouveau royaume. Après le départ de Kudur-Nanhundi, les vaincus s’appliquèrent à réparer le mal qu’il avait fait ; leur prospérité même attira à bref délai un second orage sur leur tête. Le roi tributaire voulut-il se soustraire à la suprématie des Élamites ? L’un des successeurs du Kudur-Nanhundi, SimtiSilhak, avait concédé la seigneurie d’Yamutbal en apanage à Kudur-Mabuk, l’un de ses enfants, qui se vante dans ses inscriptions d’avoir possédé toute la Syrie. Celui-ci détrôna le vassal et confia l’administration du royaume à Éri-Aku, son propre fils, qui, d’abord feudataire, puis associé à la couronne, puis seul maître après la mort de son père, épousa une princesse de sang chaldéen, et, après avoir régné en bon souverain, fut vaincu par Hammurabi, disparut enfin de la scène sans laisser de traces.

Eri-Aku avait demandé secours à son parent et suzerain Kudur-Lagamar, qui avait remplacé Simti-Silhak à Suse. Tous deux furent défaits. C’est ce qui ressort de certains documents et en particulier d’une inscription chaldéenne récemment découverte par le P. Scheil. Elle commence ainsi : « À Sinidinnam soit dit de Hammurabi : Les déesses du pays d’Emutbalim, je te les ai données comme prix de ta vaillance, au jour de la défaite de Ku-dur-la-ukh-ga-mar (Chodorlahomor). » Sin pesa quelque temps sur l’Asie antérieure, le même peut-être que les Grecs ont soupçonné vaguement et dont ils attribuaient la gloire au fabuleux Memnon. » G. Maspero, Histoire, t. ii, p. 47. Voir sur ces événements du chapitre xiv de la Genèse, F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, Paris, 6e édit., t. i, p. 481-504. II" Période. Démêlés avec la Chaldée et l’Assyrie. — A l’époque de NabuchodonosorI er, les Élamites arrachèrent à la Chaldée le Namar, dont les chevaux leur étaient précieux, et ce succès leur avait ouvert toutes les provinces situées sur la rive gauche du Tigre. Ils avaient même franchi le fleuve, pillé Babylone, emporté chez eux la statue de Bel et celle de la déesse Éria. Sous le coup des impitoyables exigences du vainqueur, le Namar se révolta. Plusieurs nobles se réfugièrent chez Nabuchodonosor, d’autres entamèrent avec lui des négociations secrètes et s’engagèrent à l’appuyer s’il s’armait pour les délivrer. Celui-ci envahit le Namar en plein été, dans une saison où les Élamites ne pensaient pas qu’il pût entrer en campagne. Il atteignit bientôt l’Ulaï. Le souverain d’Élam, pris au dépourvu, attendit le choc sur les bords de la rivière, en avant de Suse. Les Chaldéens finirent par avoir le dessus ; les Élamites renoncèrent à leurs prétentions sur la province envahie et restituèrent les statues divines.

Ummanigas ou Humbanigas régna de 733 à 716avant J.-C. Il fit alliance avec Mérodach-Baladan, roi de Babylone, contre Sargon, roi d’Assyrie. Mais celui-ci eut bientôt raison du roi d’Élam, dont il raconte la dé1C37

ÉLAM

1638

faite devant Duril en même temps que la prise de Samarie. Cf. Oppert, Fastes de Sargon, 1. 23-25 ; Records of the past, 1877, t. ix, p. 5 ; H. Winckler, Keilïnschriflliches Textbuch, p. 24-25 ; Keihchrift texte Sargon’s, p. 100-101 ; F. Vigoureux, La Bible et les découvertes modernes, t. iii, p. 559. Humbanigas après cela resta tranquille pendant trois ans et eut, en mourant, pour successeur Sutruk-Nalifrunla, qui régna dix-huit ans. Celui-ci fut détrôné par son frère Halluëû, qui, révolté contre lui, l’enferma prisonnier dans son palais.

Vers 692, Sennachéiib avait placé son fils Assur-nadin-Sum sur le trône de Babylone. Mérodach - Baladan, retiré dans le pays d’ÉIam et mis en possession d’un district de la côte, était parvenu à déterminer les habitants du Bit-Yakin et les plus ardents patriotes de la Chaldée et de la Babylonie à y émigrer en masse, moins pour fuir la domination assyrienne que pour former une nouvelle armée derrière la frontière et se jeter sur la Chaldée au moment propice, Sennachéiib prit les devants et, descendant jus provoquer la colère du monarque ninivite. Il eut lui-même une fin violente, et son frère Urtaku lui succéda, en 682. Une épouvantable famine s’étant abattue sur l’Élymaïde, Assurbanipal, qui tenait à ménager le peuple soumis, puisa spontanément dans les magasins de Ninive et fit transporter à Suse des convois de blé avec des troupeaux de bestiaux ; on recueillit sur le territoire même d’Assur tous les malheureux que la faim chassait de leurs foyers. Tant de bienfaits ne furent payés que par l’ingratitude. Urtaku envahit le pays d’Acead, alors sous la domination assyrienne. Il croyait sans doute son terrible antagoniste occupé à quelque lointaine expédition, et il espérait s’emparer de Babylone avant son retour. Apprenant que l’ennemi avançait, il leva le camp et rentra dans ses États, où il mourut assassiné J probablement à l’instigation de son troisième frère, Te-umman, qui lui succéda. Celuici, que les Assyriens regardaient comme la personnification du mal, résolut, pour se débarrasser de tout compétiteur, d’envelopper dans un même massacre les héri 641.

Le général assyrien présente aux Élamites vaincus leur nouveau roi Ummari-igaS. Koyoundilk. D’après Layard, Monuments of Nineveh, t. ii, pi. 48.

qu’au golfe Persique, vint occuper la ville de Nagitu et le district de Hilmu et balaya tous ses ennemis. Mais en même temps éclatait dans Babylone une insurrection soutenue par les Élamites, et le vice-roi, Assur-nadin-Sum, était chassé et remplacé par un Babylonien, Nergal-Usezib. Hallusu, étant mort, eut pour successeur Kudur-Nafyfyunta. Celui-ci n’était pas plus tôt sur le trône, que le roi d’Assyrie envahit l’Élam et ravagea une partie de la contrée ; mais la mauvaise saison l’empêcha de la soumettre entièrement. Peu de temps après mourait Kudur-Nahhunta ; il n’avait régné que dix mois. Le jour même de sa mort, suivant la coutume du royaume, Ummanmênanu, son frère, s’assit sur le trône. À la demande de Suzub, que le peuple de Babylone, chassant la garnison assyrienne, venait de proclamer roi, il passa la frontière à la tête d’une nombreuse armée, et vint rejoindre les troupes babyloniennes. Sennachérib attendit le choc près de la ville de Halulê, sur les bords du Tigre, et, après deux batailles où la victoire fut chaudement disputée, remporta un triomphe définitif. Quatre ans plus tard, par un de ces revirements si fréquents dans la politique ancienne, Umman-mênanu envahissait le territoire de ses anciens alliés, et, s’emparant du roi de Babylone, . l’envoyait en Assyrie. Il mourait trois mois plus tard, après un règne de quatre ans. — Pendant ces événements, Isaîe voyait dans Élam un des instruments dont Dieu se servirait pour châtier Babylone et Jérusalem. Is., xxr, 2 ; xxii, 6.

Ummanaldas (ou HumbahaldaS) monta sur le trône d’ÉIam en 687. Un fils de Mérodach -Baladan, Nabù-zernapisti-ésir, poursuivi par Assarhaddon, étant venu lui demander asile, il le mit lâchement à mort, pour ne pas

tiers de ses deux frères. Les princes cherchèrent protection à la cour d’Assyrie. Le roi d’ÉIam envoya ambassadeurs et présents pour demander la remise des fugitifs. Pour toute réponse, Assurbanipal envahit la Susiane. Te-umman, fait prisonnier sur les bords du fleuve Ulaï (fig. 540), eut la tête tranchée, et un de ses neveux, Umman-igas, fils d’Urtaku, fut placé sur le trône (fig. 541). Un bas-relief de Koyoundjik (au British Muséum) reproduit certains détails de cette terrible bataille (voir, 1. 1, fig. 292, col. 1081. On voit dans le haut, à gauche, le roi Te-umman agenouillé et percé de lances par les Assyriens.)

Au moment de la révolte de Samas-sum-ukin, roi de Babylone, contre son frère, le roi d’Assyrie, Umman-igaâ, qui devait la vie et le trône à Assurbanipal, se tourna contre lui pour soutenir l’insurrection. Mais bientôt son propre fils, Tammaritu, se révoltait à son tour et le mettait à mort pour prendre sa place. Tombant lui-même sous les coups d’un officier nommé IndabigaS, chef d’une troupe de mécontents, il s’enfuit en Assyrie, où il fut reçu généreusement. Le pays d’ÉIam n’était pas au bout de ses révolutions et de ses maux ; il ne devait en voir la fin, comme Babylone, que dans un immense désastre. Le nouvel usurpateur fut assassiné par Ummanaldas’, qui ceignit la couronne royale et s’attira dès le début l’inimitié du monarque assyrien. Assurbanipal envahit l’Élymaïde, accompagné d’un réfugié susien, Tammaritu, qui espérait faire valoir ses droits au trône. Ummanaldas, abandonnant sa capitale de Mataktu, s’enfuit dans les montagnes, et Tammaritu devint roi de la Susiane, mais pour trahir bientôt son bienfaiteur. Enfin le roi d’Assyrie réduisit complètement tout le pays. Il raconte dans une longue inscription cette campagne, au cours de laquelle

il délivra et remporta la statue de la déesse Nanâ. À côté du texte cunéiforme, de vastes tableaux, analogues à ceux qui se déploient sur les pylônes des temples de l’Egypte, nous font assister à toutes les péripéties de cette guerre d’Élam, la plus terrible de toutes celles qu’ait entreprises Assurbanipal.

/// Période. Perte de l’indépendance. — Grâce aux monuments chaldéens et assyriens, nous avons pu jusqu’ici suivre exactement l’histoire d’Élam et la série de ses rois, qui souvent ensanglantèrent le trône et préparèrent la lin réservée à tout royaume divisé contre lui-même. Après la chute de Ninive, la contrée recouvrat-elle son indépendance ? Ce n’est pas sur, bien que la Bible en parle toujours comme d’une nation distincte. Elle dut recevoir quelques enfants des Hébreux pendant la captivité. Is., XI, 11. Les prophètes annonçaient que tous ses malheurs n’étaient pas finis. Elle devait, comme les autres peuples, boire la coupe de la colère divine. Jer., xxv, 25. Au commencement du règne de Sédécias, roi de Juda, Jérémie s’écriait : « Ainsi parle le Seigneur des armées : Voici, je vais briser l’arc d’Élam et leur principale force. Et je ferai venir contre Élam quatre vents des quatre coins du ciel, et je les disperserai à tous ces vents, et il n’y aura pas une nation où n’arrivent les fugitifs d’Élam. Je ferai trembler Élam devant ses ennemis… Et j’établirai mon trône dans Élam, et j’en détruirai les rois et les princes. Mais dans les derniers jours je ferai revenir les captifs d’Élam, dit le Seigneur. » Jer., xlix, 34-39. Ézéchiel, xxxil, 24, la met au nombre des morts que l’Egypte ira rejoindre. Après avoir été une des provinces du dernier empire chaldéen, Dan., viii, 2, elle forma plus tard une importante satrapie du royaume des Perses, dont Suse devint la capitale et la résidence favorite des rois. Esth., i, 2. Voir Suse. — Pour les sources de cette histoire, voir la bibliographie des articles Assyrie, Babylonie, Chaldée ; J. Menant, Annales des rois d’Assyrie, Paris, 1874 ; Lenormant-Babelon, Histoire ancienne de l’Orient, t. iv, p. 286-290, 348-353, 358-364.

IV. Langue et civilisation. — On a retrouvé un certain nombre d’inscriptions susiennes, mais elles n’ont pas encore permis d’éclaircir complètement le mystère de la langue qu’elles expriment. Les caractères sont une modification du cunéiforme babylonien archaïque. Les textes ont été réunis en grande partie par F. Lenormant, Choix de textes cunéiformes inédits, p. 115-141. D’après lui, parmi les mots, en petit nombre, dont on peut déterminer le sens avec certitude, une portion notable se rattache étroitement au suméro-accadien. Exemples : an, a dieu ; » accadien, an ; meli, « homme ; » accadien, mulu, etc. D’autres, qui n’ont pas de correspondant en accadien, possèdent leurs parallèles non moins évidents en proto-médique. Exemples : aak, « et, aussi ; » protomédique, aak ; sak, « fils ; » proto-médique, sakri. Enfin quelques-uns demeurent encore sui juris et ne se prêtent jusqu’à présent à aucune comparaison. Exemples : burna, « loi ; » kudhur, « adoration, service. » Cf. F. Lenormant, La magie chez les Chaldéens, in-8°, Paris, 1874, p. 322, 323 ; Hommel, Geschichte Babyloniens und Assyriens, p. 46-47, 274 et suiv., et Die sumero-akkadische Sprache, dans la Zeitschrift fur Keilforschung, t. i, p. 330-340, la rattache au géorgien, et l’introduit dans une grande famille linguistique qui comprendrait l’héthéen, le cappadocien, l’arménien des inscriptions de Van, le cosséen. G. Maspero, Histoire ancienne, t. ii, p. 35, note 3. MOppert a pensé retrouver sur une tablette du British Muséum une liste de mots appartenant à l’un des idiomes probablement sémitiques de la Susiane, différents à la fois du suso-médique et de l’assyrien. Trois exemples nous suffiront ici :

Sumérien. Élamita. Srao-médique. Assyrien,

ciel… anna, ’ilûtu, dagigl, (an) lctk, sàmu.

dieu. … dingir, dimmer, bashu, an nap, ttu.

homme., lii, mclt, veli, rvh, avcla.

Après une liste d’une quarantaine de mots, le savant ajoute : a En voilà assez d’exemples pour démontrer l’existence de ces quatre langues dans le bassin de l’Euphrate, et pour faire voir que la langue élamite offre une grande diversité qui la sépare des autres idiomes sumérien, suso-médique et assyrien. Mais en même temps les lacunes considérables de notre savoir ne sauraient nous autoriser à prétendre et à affirmer que cette langue n’était pas une langue sémitique. » J. Oppert, La langue des Élamites, dans la Revue d’assyriologie, t. i, Paris, 1885, p. 45-49. — Les inscriptions susiennes ont été étudiées par Oppert, Les inscriptions en langue susienne, Essai d’interprétation, dans les Mémoires du congrès international des orientalistes de Paris, 1873, t. ii, p. 72-216 ; Sayce, The languages of the cuneiform Inscriptions of Elam, dans les Transactions of the Society of Biblical Archscology, t. iii, 1874, p. 465-485, et The Inscriptions of Mal-Amir dans les Actes du sixième congrès international des orientalistes, tenu en 1883, à Leyde, t. ii, p. 637-756 ; A. Quentin, Textes susiens, dans le Journal asiatique, Paris, 1891, t. xvil, p. 150 sq. ; V. Scheil, Textes élamites sémitiques, in-4°, Paris, 1900.

Les mœurs et la civilisation ne devaient pas différer beaucoup de celles de la Chaldée. Pour avoir une idée de la richesse et des arts chez les Élamites, il nous suffit de rappeler les trésors que leur enleva Assurbanipal : « Par la volonté d’Assur et d’istar, j’entrai dans le palais d’Ummanaldas, et je m’y installai en grande pompe ; je fouillai la maison du trésor, où l’or, l’argent et toutes les richesses se trouvaient entassées, que les rois élamites les plus anciens jusqu’aux rois de ce temps-ci avaient ramassées… C’étaient des vêtements royaux d’apparat, des armes de guerre et toutes choses servant à combattre, des arcs, des ustensiles et des fournitures de toute espèce ; les divans sur lesquels ils s’asseyaient et dormaient, les vases dans lesquels ils mangeaient et buvaient… ; des chars de guerre, des chars de parade dont le timon était orné de pierres précieuses ; des chevaux, de grandes mules dont les harnais étaient recouverts de lamelles d’or et d’argent. Je détruisis la pyramide de Suse, dont la masse était en marbre et en albâtre ; j’en abattis les deux pointes, dont le sommet était en cuivre étincelant. » Le même monarque parle de trente-deux statues de rois, en argent, en or, en bronze et’en albâtre, qu’il enleva aux villes de Suse, de Màtaktu, de Huradi, de lions et de taureaux à face humaine qui faisaient l’ornement des temples, des colosses qui gardaient les portes des sanctuaires. Cf. Lenormant-Babelon, Histoire ancienne, t. IV, p. 361. Tous ces détails supposent chez les Élamites de l’habileté et du goût pour les arts. II n’est pas question ici des monuments de l’époque persane. « Si dès le temps de Cyrus et peut-être même avant son avènement, cette contrée ( la Susiane) a été réunie à la Perse et en a depuis lors partagé les destinées, le peuple qui l’habitait, avant de perdre son existence distincte, avait eu tout un long passé de vie autonome et brillante ; on s’est quelquefois demandé si sa civilisation n’est pas, antérieure à celle même de la Chaldée. Quoi que l’on arrive à penser des affinités ethniques de la race susienne, ce qui est certain, c’est que l’histoire monumentale de l’Élam ne commence pas avec les princes achéménides. Lorsque ceux-ci choisirent Suse pour une de leurs résidences favorites, il y avait de longs siècles qu’avait surgi au-dessus de la plaine cette forteresse royale que l’on voit déjà figurée dans les tableaux de bataille des conquérants assyriens. Ce sont les couches superficielles des tumulus qui ont livré à Loftus et à M. Dieulafoy les restes des monuments de Darius et d’Artaxerxès ; mais l’énorme tertre renferme, profondément cachés dans ses flancs, les débris des constructions antérieures et des bas-reliefs en terre cuite qui les décoraient ; le plus récent explorateur croit même avoir mis au jour, dans quelques-unes de ses tranchées, des parties de murailles et des émaux qui appar

tiendraient à la période des anciennes dynasties nationales. .. L’on a signalé, sur d’autres points de la Susiane, des bas-reliefs rupestres qui remontent sans doute à ces temps lointains. Tels sont ceux qui se trouvent sur le plateau de Malamir, non loin de cette ville, dans le site sauvage connu sous le nom de Kalé-Pharan pu forteresse de Pharaon. Il y a là un ensemble de sculptures qu’accompagnent de longues inscriptions. » G. Perrot et Ch. Chipiez, Histoire de l’art dans l’antiquité, Paris, 1890, t. v, p. 773-771.

V. Religion. — Le peu que nous savons de la religion nous transporte dans un monde mystérieux, plein de noms étranges. Parmi les dieux que nous font connaître les inscriptions indigènes ou les récits des guerres d’Assurbanipal, nous rencontrons d’abord, au sommet de la hiérarchie divine, Susinak, « le Susien ; » le nom réel du dieu était probablement tenu secret ou ne se prononçait que rarement. On peut se demander s’il n’était pas ce Humba, Umma, Ummàn, qui revient si souvent dans les noms d’hommes ou de localités, et qui ne s’est pas rencontré jusqu’à présent, comme dieu isolé, dans une formule de prière ou de dédicace. Il s’appelait encore Agbag, Asgéa. Sa statue se cachait dans un sanctuaire inaccessible aux profanés, d’où Assurbanipal l’arracha au VIIe siècle. On trouve ensuite la déesse Nahhunte, dont le nom entre également dans la composition de certains noms royaux. Au - dessous de ces deux personnages viennent six dieux, que le monarque assyrien signale comme de premier ordre, et qui paraissent avoir été groupés en deux triades, correspondant peut - être aux deux triades supérieures de la religion chaldéobabylonienne ; ce sont : Sumudu, Lagamar (second élément de Kudur-Lagamar, Chodorlahomor), Partikira, Amman-KasimaS, Uduru et Sapak. Enfin les annales du même roi de Ninive mentionnent douze dieux et déesses de moindre importance, dont les images furent également enlevées dans le sac de Suse. Cf. F. Lenormant, La magie chez les Chaldéens, p. 321, note 1. Ces divinités résidaient dans des bois sacrés où les prêtres seuls et les souverains avaient accès ; leurs statues en sortaient à jour fixe, pour recevoir quelque hommage solennel. Voir fig. 454, t. i, col. 1481-1482. On leur apportait après chaque guerre heureuse la dlme du butin, vases précieux, lingots d’or et d’argent, meubles, étoffes, images des dieux ennemis. Parmi les bas-reliefs de Malamir signalés plus haut, il y en a qui paraissent représenter un dieu recevant les hommages des tidèles. Sur l’un d’eux en particulier, on croit reconnaître tous les détails d’un sacrifice. Cf. Perrot, Histoire de l’art, t. v,

p. 774-778, fig. 463, 461.
A. Legendre.
    1. ÉLAMITES##

ÉLAMITES (hébreu : ’Êlâm, Gen., xiv, 1, 9 ; ’Êlmâyê’, pluriel du chaldéen’Èlmai, I Esdr., IV, 9 ; Septante : ’EXâji, Gen., xiv, 1, 9 ; ’EXunafot, Judith, 1, 6 ; ’EXaiisÏTai, Act., ii, 9 ; Vulgate : Elamitx, Gen., xiv, l, 9 ; jElamitæ, I Esdr., IV, 9 ; Act., ii, 9 ; Elici, Judith, i, 6), habitants du pays d’Élam, Gen., xiv, 1, 9 ; I Esdr., iv, 9 ; Judith, i, 6 ; Act., ii, 9, les Êlamû, Êlamâa des inscriptions assyriennes, les’EXiijiatot de Strabon, xi, p. 524 ; xv, p. 732. Les Septante ont souvent traduit par’EXalit’tii le nom même du pays. Voir Élam 2. Ils ont omis ce mot, I Esdr., IV, 9, probablement comme superflu après celui de Eou<rava-/_aïoi (hébreu : SûSankdyê ; Vulgate : Susanechxi), qui désigne les habitants de Suse, capitale d’Élam. Le grec’EXujkxÏoi de Judith, i, 6, est préférable au latin Elici. Les Élamites, d’après Gen., x, 22 ; I Par., i, 17, étaient de race sémitique. La langue de leurs inscriptions semblerait démentir cette assertion ; mais nous savons, d’un côté, que le langage n’est pas un témoin nécessaire de l’origine ethnique ; de l’autre, qu’un certain nombre de mots élamites se rapprochent des idiomes sémitiques ; enfin que, d’après les monuments euxmêmes, une partie de la population avait bien le

type des enfants de Sem. Voir Élam 8, col. 1633. Nous avons, au même article, fait l’histoire de ce peuple et décrit sa civilisation ; il ne nous reste que peu de chose à ajouter. C’était une nation guerrière, comme le prouvent l’étendue de son empire au temps de Chodorlahomor, Gen., xiv, 1, 9, ses démêlés constants avec Babylone et Ninive, les difficultés qu’éprouvèrent à l’asservir les rois d’Assyrie. Elle était plutôt d’humeur turbulente. Ses soldats étaient d’habiles archers. Cf. Is., xxii, 6 ; Jer., xlix, 35. Assurbanipal nous parle des chefs des archers, capitaines, conducteurs de chars, écuyers, lanciers. Dans la bataille où périt Te-umman, un de ses officiers, Itunl, brisa de désespoir son arc, « la défense de son corps. » Les Élamites cultivaient les arts et avaient d’habiles ouvriers en différents genres. Ils avaient les mêmes instruments de musique que les Assyriens, cymbales, lyres et harpes, comme on le voit sur un des bas-reliefs de Malamir. Ils fournirent leur contingent au peuple transplanté en Samarie, au moment de la captivité. I Esdr., iv, 9. En perdant leur indépendance comme peuple, ils ne perdirent ni leur langage ni leur caractère national ; ils avaient encore les deux au jour de la Pentecôte. Act., H, 9. C’est probablement en cette circonstance solennelle que s’accomplit la prophétie de Jérémie, xlix, 39 : « Dans les derniers jours, dit le Seigneur, je ferai revenir les captifs d’Élam, » en leur donnant les prémices de l’Évangile. Si ce peuple ne tient pas une grande place dans l’Écriture, nous le trouvons cependant des origines de l’histoire sainte aux origines du christianisme.

A. Legendre.

ÉLASA. Hébreu : ’El’didh, « Dieu a fait. » Nom de quatre Israélites.

1. ÉLASA (Septante : ’Eza<ji), fils de Helles et père de Sisamoï, de la tribu de Juda, dans la descendance d’Hesron. I Par., ii, 39, 40.

2. ÉLASA (Septante : ’EXasâ ; Codex Alexandrinus : ’EXea<7<ï), fils de Rapha ou Raphaïa et père d’Asel. Il était de la tribu de Benjamin et de la descendance de Saùl par Jonathas. I Par., viii, 37 ; ix, 43.

8- ÉLASA (Septante : ’IlXa<ri), prêtre, descendant de Pheshur, qui, ayant épousé une femme étrangère pendant la captivité, la renvoya au retour de l’exil, pour se conformer à la loi. I Esdr., x, 22.

4. ÉLASA (Septante : ’EXea<xiv ; Codex Alexandrinus : ’EXsadâç), fils de Saphan, un des deux envoyés du roi Sédécias près de Nabuchodonosor, à Babylone. Jérémie se servit de leur entremise pour faire parvenir une lettre aux captifs. Jer., xxix, 3. Élasa était probablement frère d’Ahicam, l’ami de Jérémie. Jer., xxvi, 24.

    1. ÉLATER##

ÉLATER, insecte coléoptère de la famille des sternoxes, tribu des élatérides, connu vulgairement sous le nom de taupin. Il est facilement reconnaissable avec son corps ovale et elliptique, sa tête enfoncée dans le corselet et son sternum terminé par une pointe qui, pénétrant dans une cavilé antérieure, permet à cet insecte, couché sur le dos, de se contracter et de se heurter avec force contre le sol, de façon à sauter en l’air jusqu’à dix à douze fois la hauteur de sou corps et à retomber sur ses pieds. L’espèce elaler segetis (fig. 542), « taupin des moissons, » de couleur brune, à élytres striées, cause de grands préjudices aux céréales, non pas lorsque l’insecte est parvenu à l’état parfait, mais pendant qu’il n’est encore qu’à l’état de larve. C’est un petit ver filiforme, de vingt à vingt-cinq millimètres de long, au corps blanc jaunâtre, formé de douze segments et muni de six pattes courtes, à la peau luisante, écailleuse, à la tête brune. Il vit aux dépens de la racine ou de la partie souterraine des tiges du blé, du seigle, etc., qui ne tardent pas à

mourir ou à se casser. Cet insecte existe en" Palestine ; mais est-il désigné, comme l’ont cru certains auteurs, par le selâsal qui, selon Dcut., XXVIII, 42, dévorera les arbres et les fruits du sol ? Ce n’est pas probable : le selâsal est plutôt une espèce de sauterelle au bruit strident. Voir Sauterelle. Du reste, comme le taupin des

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642. — Velater segetls. — Larve et insecte parfait.

moissons ne fait ses ravages qu’à l’état de larve, Hébreux ne devaient pas distinguer cette larve des vers ordinaires. E. Levesque.

    1. ÉLATH##

ÉLATH (hébreu : ’Êlaf, Deut., ii, 8 ; IV Reg., xiv, 22 ; xvi, 6 ; ’Ëlôp, « arbres ; bois, » peut-être « bois de pal IV Reg., xiv, 22), ville du pays d’Édom, III Reg., ix, 26 ; IV Reg., xvi, 6 ; II Par., viii, 17, ordinairement mentionnée avec Asiongaber, sa voisine, Deut., », 8 ; III Reg., ix, 26 ; II Par., viii, 17, et située « sur le bord de la mer Rouge », III Reg., ix, 26 ; Il Par., viii, 17, c’est-à-dire à l’extrémité septentrionale du golfe Arabique (fig. 543). Son nom, dont l’orthographe, on le voit, est assez variable dans les versions, a passé avec des changements analogues dans les traductions grecques, latines et arabes. On le retrouve ainsi sous les formes suivantes : AD.avi, , Josèphe, Ant. jud., VIII, vl, 4 ; Aî).à6, Ant. jud., IX, xii, 1 ; ’EXiva, Ptolémée, v, 17 ; AUavi, Strabon, xvi p. 768 ; Aelana, Pline, v, 12 ; vi, 32 ; Ailath, Aila, Auâu., Aïkâ, Eusèbe et saint Jérôme, Onomastica sacra, Gœttingue, 1870, p. 84, 88, 210, 215. C’est d’AIXwv, Aftiv^, ’Ekiva, Aelana, mots qui cachent une forme hébraïque ou chaldéenne, ’Êlôn, ’Êlân, semblable à’Êlat, qu’est venue l’appellation à’Êlanitique, donnée au bras oriental de la mer Rouge. Le nom arabe, <*Jb, ’Allât ou’Ailéh, reproduit exactement l’hébreu ri’"'x, ’Êla(.

1° L’ancienne Élath n’est plus représentée que par quelques ruines et un pauvre village du nom d’Akabah. Voir la carte du golfe Élanitique, t. i, col. 1099. Voici, d’après L. de Laborde, Commentaire géographique sur l’Exode, in-f°, Paris, 1841, p. 126, l’origine de cette dénomination. « Makrizi, l’historien de l’Egypte, parle du passage de la caravane de la Mecque dans ces parages. — C’est ici, dit-il, que commence la caravane de la Mecque (la réunion des deux caravanes, celle de l’Egypte et celle de la Syrie). À une lieuè de là on voit un arc de triomphe

5 « . — Vue d’Êlath. D’après Léon de Laborde, Voyage de l’Arabie Pélrée, ln-1°, Paris, 1830.

miers », Ul Reg., ix, 26 ; II Par., viii, 17 ; xxvi, 2 ; Septante : A’Awv, Deut., ii, 8 ; Aftâô, III Reg., ix, 26 ; IV Reg., xvi, 6 ; II Par., viii, 17 ; xxvi, 2 ; Aft.w6 ; Codex Alexandrinus, ’EXiiB ; Codex Vaticanus, AM[i, IVReg., xiv, 23 ; Cod. VaUet Alex., Aftin, IV Reg., xvi, 6 ; II Par., viii, 17 ; Vulgate : Elath, Deut., ii, 8 ; Ailath, III Reg., ix, 26 ; II Par., viii, 17 ; xxvi, 1 ; Aila, IV Reg., xvi, 6 ; jElalli,

des empereurs romains (ce qu’il resle de cet arc de triomphe dans l’ouadi Gétoun se réduit à la base des piliers). C’était une jolie ville qui avait beaucoup de mosquées, et où il habitait un grand nombre de Juifs. Le sultan Ibnvhmed -Ebn-Touloun rendit praticable le chemin de la caravane à travers la montée (Akabah) rapide qui est en face d’Ailah. — Ce chemin, créé à

grands frais, fut creusé dans le rocher. Une inscription rappelle à quel homme généreux les pèlerins doivent ce bienfait. Dès lors cette descente rapide, ou cette montée pénible, selon qu’on partait d’Ailah ou qu’on y arrivait, resta dans le souvenir des pèlerins, et le mot akabah, qui signifie escarpement, s’unit au nom d’Ailah, qui fut appelé Akabahvilah, puis, en définitive, seulement Akabah ; c’est ainsi que ce lieu est nommé parles Arabes et qu’on le désigne dans les itinéraires modernes de la Mecque. » C’est de là que vient également le nom de golfe d’Akabah. Les ruines occupent en forme de buttes de sable et de décombres l’extrémité du golfe et les deux côtés du ravin creusé par les eaux. À quarante minutes plus bas se trouvé le village, abrité sous des plantations de palmiers (d’où peut-être le nom d’Élath) et entourant un château quadrangulaire, de forme oblongue, flanqué d’une tour à chacun des quatre angles. Ce château, où le vice-roi d’Egypte entretient une petite garnison, n’a d’autre objet que de protéger les pèlerins de la Mecque et de servir de dépôt aux provisions qui leur sont nécessaires. Tout le long de la côte, devant les palmiers, en creusant avec la main dans le sable, on obtient de l’eau qui, bien qu’à peine séparée de celle de, la mer, est cependant d’une douceur complète, lorsqu’on a soin de jeter le premier écoulement encore mêlé à l’eau salée dont le sable était imprégné. « Ces sources d’une espèce nouvelle excitent l’étonnement, mais on s’explique leur écoulement en considérant la côte. On voit alors qu’une croûte de sable couvre depuis l’embouchure des vallées la masse de rochers qui s’étendent en pente jusqu’au bord de la mer, où ils forment des brisants à marée basse. Les sources des différentes vallées à l’est, ainsi que les pluies, n’ont d’écoulement qu’entre cette superposition de sable et le fond solide ; c’est pourquoi elles descendent vers la mer en traversant les plantations de palmiers ; elles entretiennent leur végétation, se montrent au même niveau partout où l’on creuse, soit dans les murs de la forteresse, soit au milieu des palmiers, soit enfin au bord de la mer, où elles sont plus faciles à atteindre. » L. de La-Ijorde, Voyage de l’Arabie Pétrée, in-f°, Paris, 1830, p. 50.

2° Élath apparaît pour la première fois dans le Deutéronome, H, 8, à propos du chemin que suivirent les Hébreux, contournant les montagnes de Séir pour se diriger vers Moab. Elle appartenait alors aux Iduméens. Elle tomba plus tard au pouvoir de David, quand ce roi eut conquis le pays d’Édom. Il Reg., viii, 14 ; III Reg., XI, 15, 16. Son port fut utilisé par Salomon, avec celui d’Asiongaber. C’est de là que partait la flotte du monarque, montée par des marins phéniciens, pour aller à Ophir. III Reg., ix, 26 ; II Par., viii, 17. Elle prit sans doute part à la révolte de l’Idumée contre Joram. IV Reg., vm, 20-22. Mais elle fut reconquise par Azarias, qui « la rebâtit et la rendit à Juda ». IV Reg., xiv, 22 ; II Par., xxvi, 2. Bientôt après cependant, Rasin, roi de Syrie, s’en empara, en chassa les Juifs, et permit aux Iduméens de l’habiter de nouveau. IV Reg., xvi, 6. II portait ainsi un coup terrible au commerce du royaume de Juda avec l’Orient. Elle disparaît ensuite de l’histoire jusqu’à l’époque romaine, où elle devient une ville frontière, la résidence de la dixième légion, et plus tard le siège d’un évêché. — Cf. Reland, Palxstina, Utrecht, 1714, t. ii, p. 554-558 ; Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres, 1856, 1. 1, p. 169-172 ; E. Hull, Mount Seir, in-8°, Londres, 1889, p. 71. Voir Asiongaber, t. i, col. 1097.

A. Legendre.

EL-BÉTHEL (hébreu : ’El Bêf-’Êl, « Dieu de Béthel » ; Septante : BaifWjX ; Vulgate : Domus Dei ; les deux versions grecque et latine n’ont pas rendu le premier mot’El, « Dieu » ), nom donné par Jacob, Gen. xxxv, 7, à l’autel qu’il érigea à Béthel, à l’endroit où il avait eu la vision de l’échelle mystérieuse qui montait de la terre au ciel, Gen., xxviii, 11-17, lors de son retour de Mésopo tamie, en exécution du vœn qu’il avait fait à l’époque dé son départ, au moment de la vision. Gen., xxviii, 20-22. Cf. Gen., xxxi, 13.

ELCANA. Hébreu : ’Ëlqânâh, « Dieu a créé ; » Septante : ’EXxavà. Nom de huit Israélites.

1. ELCANA, lévite, second fils de Coré, de la branche de Caath. Exod., vi, 24. Aser (Asir) et Abiasaph sont donnés comme ses frères, tandis que dans I Par., vi, 22, 23 (hébreu, 7, 8), Asir, l’alné des fils de Coré, semble être le père d’Elcana, et celui-ci le père d’AbiasaphIl y a là une apparente contradiction, qui a été expliquée de deux façons. On bien l’expression de l’Exode : fils de Coré, doit s’entendre au sens large de descendants, et Elcana, Abiasaph après Asir seraient, comme dans I Par., vi, 22, 23 (hébreu, 7, 8), non pas ses frères, mais son fils et son petit-fils. li faut avouer cependant qu’il est étrange de voir mentionnés comme vivant à la même époque les trois familles du père, du fils et du petit-fils. Aussi est-il plus naturel de regarder la liste de l’Exode comme donnant les vrais fils de Coré, ce qui va bien au contexte, tandis que dans les Paralipomènes, I Par., VI, 22-28 (hébreu, 7-13), et 33-39 (hébreu, 19-25), on présente la généalogie de Samuel d’une façon plus ou moins complète. Alors Elcana de I Par., vi, 22 (hébreu, 8), n’est que I’Elcana du ^. 36 (hébreu, 22), c’est-à-dire un descendant d’Abiasaph, le frère du premier Elcana. Voir P. de Broglie, Les généalogies bibliques, dans Congrès scientifique international des catholiques, 1888, t. i, p. 143.

2. ELCANA, père du prophète Samuel et fils de Jéroham, d’après la généalogie de I Reg., i, 1, et les deux généalogies de I Par., vi, 27 (hébreu, 12, 13), et ^ ꝟ. 33, 34 (hébreu, 19, 20). Ces listes, malgré quelques altérations de noms ou omissions, peuvent être mises d’accord. Voir de Broglie, Les généalogies bibliques, loc. cit. Il habitait la montagne d’Ephraim, à Ramathaïm-Sophim. IReg., I, 1. Le même livre des Rois le dit Éphratéen et ne parle pas de sa descendance lévitique. Aussi des critiques modernes ont-ils prétendu que l’auteur des Paralipomènes avait imaginé une origine lévitique à Samuel pour justifier le droit d’offrir des sacrifices que le prophète prétendait avoir. Mais dans ce cas il n’eut pas suffi d’en faire un lévite ; il aurait fallu en faire un prêtre descendant d’Âaron. Cf. Ps. xcviii, 6. De plus, « Éphratéen » du livre des Rois peut marquer simplement un habitant d’Éphraïm, et non pas nécessairement un membre de cette tribu. Enfin cette expression peut aussi désigner un homme d’Éphrata, c’est-à-dire Bethléhem, d’où les ancêtres d’Elcana ont pu sortir. Cf. Ruth, i, 2 ; I Reg., xvil, 12. — Elcana vivait à l’époque du grand prêtre Héli ; chaque année il se rendait à Silo, pour adorer Dieu et offrir un sacrifice ; mais on ne voit pas qu’il ait rempli quelque fonction lévitique, soit qu’il eût passé l’âge de cinquante ans, où l’on cessait d’y être astreint ; soit qu’à cette époque troublée les obligations des lévites fussent tombées en désuétude, jusqu’à la restauration du culte par David. Elcana avait deux femmes : l’une, Anne, qu’il traitait avec prédilection, était stérile ; l’autre, Phénenna, avait plusieurs enfants. Les prières d’Anne lui obtinrent Samuel. Elcana en remercia Dieu par un sacrifice, I Reg., 1, 19-21, et selon leur promesse ils offrirent l’enfant au Seigneur, ꝟ. 25. Elcana eut encore de sa première femme, Anne, trois fils et deux filles. I Reg., ii, 21. Voir Anne et Samuel.

3. ELCANA, fils de Joël, descendant d’Asir, et par conséquent de Coré par Abiasaph. I Par., VI, 22, 36 (hébreu. 8, 18). Voir Elcana. 1.

4. ELCANA, descendant du précédent par Amasai et Achimoth (ou Mahath). I Par., vi, 25, 35 (hébreu, 10, 20).

5. ELCANA, lévite, père d’Asa, habitait "le village de Nétophati. I Par., ix, 16.

6. ELCANA, un de ceux qui se rangèrent au parti de David à Siceleg. I Par., xii, 6. La Vulgate le dit de Carehim, mais le texte hébreu porte haqqorhim, des Corahites ou fils de Coré. Ce sont des lévites fils de Coré habitant le territoire de Benjamin. Voir Cauehim.

7. ELCANA, portier de l’arche du temps de David.

I Par., xv, 23. On l’a souvent identifié avec le précédent. Rien ne s’y oppose, mais aussi rien né le prouve.

8. ELCANA, premier ministre d’Achaz, roi de Juda.

II fut tué par un guerrier d’Éphraïm dans la guerre de Phacée, roi d’Israël. II Par., xxviii, 7. E. Levesque.

    1. ELCÉSI##

ELCÉSI (hébreu : ’ÉlqôS), patrie du prophète Nahum. Nah., i, 1. Ce mot n’apparait qu’en ce seul passage de l’Écriture, sous la forme dénominativé, avec l’article, hà-Elqô’si ; Septante : ô’EXxeuaïo ;  ; Codex Sinaiticus : à’EXxaiasô ;  ; Vulgate : Elcesseus, « PElcéséen » ou l’homme d’Elqoâ. Ce n’est donc pas un nom patronymique, comme le prétendent quelques-uns, mais un nom d’origine. Son identification est encore un problème, et elle a donné lieu aux hypothèses suivantes : — 1° Une tradition remontant au xvie siècle place le berceau de Nahum à Alqousch, village situé sur la rive orientale du Tigre, à une certaine distance de Môssoul, près du monastère de Rabban Ilormuzd. Il y a là un tombeau, également vénéré par les chrétiens, les juifs et les musulmans, et qui passe pour être celui du prophète. Mais le monument et le bourg n’ont, comme la tradition, rien d’ancien. Cette opinion est probablement née de la similitude des noms et de certains rapprochements entre Nahum, qui prophétisa sur Ninive, et Jonas, dont on montre également le tombeau dans ces parages. D’autre part, rien n’autorise la supposition d’après laquelle Nahum serait né en Assyrie, de parents déportés en ce pays après la prise de Samarie. Cf. J. Knabenbauer, Cotmnentarius in Prophetas minores, Paris, 1886, t. ii, p. 1-2. — 2° D’autres, comme Hitzig et Knobel, croyant retrouver le nom du prophète dans celui de Capharnaùm (Kefar Nal.iûm, « village de Nahum » ), ont regardé ElqôS comme l’antique dénomination de cette ville bien connue dans le Nouveau Testament. Mais si elle est célèbre dans l’Évangile, elle est absolument inconnue dans l’Ancien Testament. Puis il n’est pas sur que le second élément du nom composé puisse se rapporter à Nahum. On peut rattacher à la même conjecture celle de R. J. Schwarz, Das heilige Land, Francfort-sur-le-Main, 1852, p. 149, plaçant le tombeau de Nahum à Kefar - Tanhûm ou KefarNahûm, au nord de Tibériade. — 3° Le pseudo-Épiphane, dans son De Vitis prophetarum, t. xliii, col. 409, met Elcési « au delà, c’est-à-dire à l’est du Jourdain, à Bégabar, Bïjfa6ap, de la tribu de Siméon », endroit où Nahum serait mort et aurait été inhumé. Il y a évidemment là une erreur, puisque la tribu de Siméon se trouvait à l’ouest du fleuve. Mais un autre manuscrit porte simplement « au delà de Bethabarem, B/iTa6apr, p., de la tribu de Siméon. » Cf. t. xliii, col. 417. On pense même qu’il faudrait lire Beth-Gabrê. Il s’agirait alors de Bethogabra, aujourd’hui Beit-Djibrin, l’ancienne Éleuthéropolis, sur les confins de l’ancien pays philistin. Pourraiton, dans ce cas, reconnaître Elcési dans le lieu ruiné de Qessiyéh, au sud-est de cette ville ? C’est une question difficile à trancher. Cf. E. Nestlé, Wo ist der Geburtsort des Propheten Nahum tu s « chen ? dans la Zeitschrift des deutschen Palàstina-Vereins, Leipzig, t. i, 1878, p. 222-225. — 4° La plus ancienne hypothèse et jusqu’ici encore la plus plausible est celle de saint Jérôme, Comment, in Nahum, t. xxv, col, 1232. D’après le saint docteur, Elcési était, de son

temps, un petit village do Galilée, connu des Juifs, et qui lui fut montré à lui-même par un de ses guides. Gesenius, Thésaurus, p. 1211, cherche sans raison à infirmer ce témoignage. Saint Jérôme ne dit pas qu’il demanda où se trouvait Elcési, question à laquelle un guide peu consciencieux eût pu répondre en indiquant n’importe quel site ; mais que celui qui le conduisait lui montra de lui-même l’emplacement traditionnel, d’ailleurs bien connu des fils d’Israël. On croit alors qu’Elqos pourrait être identifié avec El-Kôzah, non loin d’Er-Raméh, l’ancienne Ràmah (Vulgate : Arama) de Nephthali.

A. Legendbe.

1. ELCHANAN, Elhanan, guerrier dont la Vulgate a traduit le nom par Adeodatus. II Reg., xxi, 19 ; I Par., xx, 5. Voir Adéodat.

2. ELCHANAN (hébreu : ’Élhânân, « Dieu fait grâce » [cf. phénicien ]initi ] ; Septante : ’EXeavav), un des officiers supérieurs de l’armée de David, cité dans la liste de II Reg. T xxm, 24, et dans le passage parallèle de I Par., xi, 26. Il était de Bethléhem et fils de Dodo, nom propre que la Vulgate a pris pour un nom commun, patruus ejus, chaque fois qu’il se présente dans le 1 texte hébreu. Voir Dodo. Ce guerrier paraît différent de Elhanan, mentionné II Reg., xxi, 19 ; I Par., xx, 5 : ce dernier, que la Vulgate nomme Adeodatus (voir ce mot), est dit fils de Jaïr, tandis que le premier est fils de Dodo. On ne pourrait les identifier qu’à la condition de voir dans un des deux noms, Jaïr ou Dodo, le nom du grand-père ou d’un ancêtre. — Nos éditions de la Vulgate modifient légèrement le nom de notre guerrier dans II Reg., xxiii, 24 ; elles l’appellent Éléhanan, au lieu de Elchanan dans I Par., xi, 26.

E. Levesque.

    1. ELDAA##

ELDAA (hébreu : ’Éldà’âh, « appelé de Dieu( ?) ; » Septante : "EXSa-fâ ; Codex Alexandrinus, @£pya[i.<x ; Codex Cottonianus, [©]epita(i [a.] ; Codex Bodleianus, ’Apayâ, Gen., xxv, 4 ; ’EXSaêâ ; Codex Vaticanus, ’EXXaSâ ; Codex Alexandrinus, ’EXSaà, I Par., i, 33), un des fils de Madian, descendant d’Abraham par Céthura. Gen., xxv, 4 ; I Par., i, 33. Ce nom ethnique n’a pu jusqu’ici être identifié. On l’a rapproché d’un nom de personne, Yedi’a’il, qu’on trouve dans les inscriptions himyarites. Cf. Corpus inscriptionum semiticarum, part, iv, Paris, t. i, 1889, p. 15 ; Frz. Delitzsch, Genesis, Leipzig, 1887, p. 348. On a également tenté d’assimiler les deux derniers fils de Madian, Abida et Eldaa, aux deux tribus importantes, Abidah et Ouâda’ah, dans le voisinage des Asirs, population des montagnes de l’Hedjàz, sur les confins septentrionaux du Yémen. Cf. Keil, Genesis, Leipzig, 1878, p. 222.

A. Legendre.
    1. ELDAD##

ELDAD (hébreu : ’Èldâd, « Dieu aime ; » Septante : ’EX818), Israélite qui avait été désigné pour faire partie des soixante-dix anciens appelés à aider Moïse dans le gouvernement du peuple. Mais lorsque le serviteur de Dieu fit ranger ces anciens devant le Tabernacle pour que l’Esprit du Seigneur se répandit de lui sur eux, Eldad et Médad se trouvèrent absents. Cependant ils nelaissèrent pas d’être remplis alors de l’Esprit -Saint et deprophétiser au milieu du camp. Comme ils n’avaient pas reçu ce don par l’intermédiaire de Moïse, Josué, croyant l’autorité de son maître intéressée, voulut les empêcher de parler au nom de Dieu. Mais Moïse lui fit cette belle réponse : « Plût à Dieu que tout le peuple prophétisât et fût rempli de l’Esprit d’en haut. » Num., xi, 24-29.

E. Levesque.

    1. ÉLÉALÉ##

ÉLÉALÉ (hébreu : ’El’âlèh ; Septante : ’EXsïXtJ), ville de la tribu de Ruben, à l’est du Jourdain, dans une régioa riche en pâturages. Num., xxxii, 3, 37. Elle ne resta pas toujours dans la possession des Rubénites. Du temps d’Isaïe, xv, 4 ; xvi, 9, et de Jérémie, xlvhi, 34, elle appartenait aux Moabites. Ces deux prophètes annoncent les maux qui doivent fondre sur cette ville en même temps que sur ses voisines. Elle n’est aujourd’hui qu’un

vaste monceau de ruines, qui portent le nom arabe de et-'Al, « l'élevée. » C’est une transformation de son ancien nom d'Éléalé, qui faisait probablement aussi allusion à sa situation, sur une montagne de 334 mètres d’altitude, à larges gradins naturels, d’où l’on a une vue très étendue sur la plaine de toute la Belka méridionale. Elle était située à environ deux kilomètres d’Hésébon. Du temps d’Eusèbe, Onomasticon, Berlin, 1862, p. 182, Eléalé était encore une localité importante, mais quelques siècles après elle fut abandonnée ; car, si l’on y trouve les restes d’une église et d’une tour byzantine, on n’y découvre aucun reste de construction arabe. On y voit encore des pressoirs taillés dans le roc, cf. Is., xvi, 9 ; Jer., xlviii, 33-34 ; des murs de maisons hauts de trois à six mètres, de nombreuses savernes taillées dans le calcaire, dont plusieurs servent aujourd’hui d'étables pour les bestiaux, d’abondantes citernes, des débris de colonnes, etc. « Toute [la] montagne, ses flancs et sa base évasée, ainsi que la vallée [profonde] au-dessous sont couverts d’arbres et d’arbustes. L’humidité qui doit régner longtemps sur ces régions élevées y entretient une végétation abondante pour la contrée. » De Luynes, Voyage d’exploration à la mer Morte, t. i, p. 146. — Voir II. Tristram, The Land of Moab, in-12, Londres, 1873, p. 339-340 ; The Survey of Eastern Palestine, 1889, t. i, p. 16-19 ; F. Buhl, Géographie der allen Palàstina, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1896, p. 266.

F. Vigouroux. ÉLÉAZAR. Hébreu : 'Él'àzâr, « Dieu aide ; » Septante : 'EXsàÇap. Nom de onze Israélites.

1. ÉLÉAZAR, fils d’Aavon et son successeur comme souverain pontife. Aaron avait eu de sa femme Elisabeth quatre fils : Nadab, .Abiu, Éléazar et Ithâmar. Exod. vi, 23 ; Num., iii, 2. Par le fait de la mort de ses deux frères, Nadab et Abiu, qui ne laissaient point de fils, Num., iii, 4, il se trouva l’aîné des enfants d' Aaron et par conséquent l’héritier de sa dignité de grand prêtre. Il avait épousé une des filles de Phutiel, dont il eut Phinées, qui devait plus tard lui succéder dans la suprême sacrificature. Exod., vi, 25. Il reçut en même temps qu' Aaron la consécration sacerdotale des mains de Moïse, avec ses trois frères. Lev., vin ; Num., iii, 3. Nous le voyons, Num., iii, 32, honoré du titre de « prince des princes des Lévites, placé à la tête de ceux qui veillent à la garde du sanctuaire » ; et, Num., iv, 16, il est dit que les fils de Caath seront sous ses ordres, quand il faudra envelopper et transporter les vases et les ustensiles sacrés, et qu'à lui sera confié le soin d’entretenir l’huile des lampes, le parfum de composition, le sacrifice perpétuel, l’huile de l’onction, tout ce qui appartient au service du Tabernacle et tous les vases qu’il renferme. — Le nom d'Éléazar revient assez rarement dans le récit sacré jusqu'à son entrée en fonction comme grand prêtre. Après la mort tragique de Nadab et d’Abiu, il reçut de Moïse, ainsi qu’Aaron et Ithamar, la défense de pleurer sur les coupables et l’ordre d’achever le sacrifice interrompu par cet événement. Lev., x, 1-2, 8, 12-13. Il encourut dans cette circonstance, avec son père et son frère, les reproches de Moïse, parce que, dans le trouble où cette catastrophe les avait jetés, ils avaient mal exécuté les prescriptions du législateur d’Israël. Lev., x, 16-20. — Nous retrouvons plus tard Eléazar dans l'épisode de la révolte de Goré. Après le châtiment des révoltés, Dieu ordonna qu’il dispersât le feu de leurs encensoirs, dont l’airain, fondu et mis en forme de lames par ses soins, serait appliqué par lui à l’autel des holocaustes. Num., xvi, 36-40. Voir Coré, col. 971. Le Seigneur, après avoir confirmé d’une manière éclatante et terrible les droits généraux du sacerdoce aaronique, indiquait ainsi le droit spécial au souverain pontificat qu’il voulait conférer à Éléazar et à sa descendance. Cf. Num., xxv, 13. Bientôt après, il donna encore aux enfants d’Israël une autre marque de la prééminence du futur successeur

d’Aaron. Il régla que, pour mettre le grand prêtre à l’abri de la souillure légale résultant de l’immolation de la vache rousse, Num., XIX, 7, ce serait Éléazar qui immolerait cet animal, ferait avec son sang sept aspersions sur les portes du Tabernacle et enfin le livrerait aux flammes. Num., xix, 1-7. — Ce fut apparemment peu de temps après l’institution de ce rite qu’arriva la mort d’Aaron. Sur le sommet du mont Hor, où il était monté par ordre de Dieu, Aaron fut, avant d’expirer, dépouillé de ses vêtements sacerdotaux par Moïse, et celui-ci en revêtit aussitôt Éléazar en signe de l’investiture de la charge de grand prêtre, qu’il allait désormais exercer. Voir Aaron, t. i, col. 8.

Dans la seconde période de la vie d'Éléazar, qui commence ici, non plus d’ailleurs que dans la première, nous ne trouvons aucun trait personnel, comme on en rencontre dans l’histoire de son père Aaron ou de son fils Phinées. Tout ce que l'Écriture nous raconte de lui se rapporte exclusivement à ses fonctions et aux faits auxquels sa dignité l’appelait à prendre part. C’est d’abord l’ordre qu’il reçoit, conjointement avec Moïse, de procéder au recensement du peuple après le châtiment des Israélites prévaricateurs. Num., xxvi, 1-63. Plus tard, les filles de Salphaad adressent à Éléazar, à Moïse et aux anciens leur requête concernant l’héritage de leur père, mort sans enfants mâles. Num., xxv, 1-3. Peu après le règlement de cette affaire, Moïse, averti par Dieu de sa mort prochaine, amena, selon les prescriptions divines, Josué son successeur à Eléazar. Cette présentation eut lieu en présence de tout le peuple, que son nouveau chef devait conduire d’après les instructions que le Seigneur donnerait en réponse à la consultation faite par le grand prêtre. Num., xxvii, 12-23. Dans l’intervalle entre ce dernier fait et la mort de Moïse, Éléazar nous apparaît encore associé à celui-ci dans quelques circonstances mentionnées au livre des Nombres. La première est la répartition, après la défaite de Madian, du butin qui leur est amené, et dont une partie déterminée est prélevée comme prémices à offrir à Dieu. Num., xxxi, 12-54. La seconde est la demande des terres situées au delà du Jourdain par les tribus de Gad et de Ruben, xxxil, 1-2, au sujet de laquelle il reçoit avec Josué les instructions de Moïse. Num., xxxii, 28-33. Enfin en ce qui concerne le pays en deçà du Jourdain, dont le partage ne devait être fait que plus tard, Dieu désigna à Moïse Éléazar pour être placé avec Josué à la tête des répartiteurs, désignés aussi par leurs noms, et qui étaient les chefs de leurs tribus respectives. Num., xxxiv, 16-29. Ce partage eut lieu en conséquence, quand le moment fut venu, sous la direction du grand prêtre Éléazar et de Josué, et par la voie du sort, comme Dieu l’avait prescrit. Jos., xiv, 1-2, cf. xix, 51. — C’est le dernier renseignement que la Bible nous donne sur Éléazar. Sa mort est mentionnée à la fin du livre de Josué : « Éléazar, fils d’Aaron, dit l'écrivain sacré, mourut aussi, et on l’ensevelit à Gabaath, [ville] de Phinées, son (ils, qui lui fut donnée en la montagne d'Éphraïm. » Jos., xxiv, 33. Il eut pour successeur dans la charge de grand prêtre son fils Phinées. Num., xxv, 13.

E. Palis.

2. ÉLÉAZAR, fils d’Aminadab. Quand l’arche du Seigneur, renvoyée par les Philistins, fut portée dans la maison de son père, sur la colline (hag-gib'âh ; Septante : ev tù Pouvû ; Vulgate : Gabaa) de Cariathiarim, Éléazar fut chargé de la garder. I Reg., vii, 1. Le texte dit qu’il fut consacré, c’est-à-dire exclusivement appliqué à cette fonction. Probablement il était lévite, bien que le texte n’en dise rien : au moins rien ne s’y oppose, et Josèphe, Ant.jud., VI, I, 4, lui donne cette qualité.

3. ÉLÉAZAR, fils de Dodo l’Ahohite, c’est-à-dire descendant d’Ahoë, dans la tribu de Benjamin. II Reg., xxill, 9 ; I Par., viii, 4. Il est compté parmi les trois gibbôrini ou vaillants guerriers qui se trouvaient avec David à Éphesdammim, dans la guerre contre les Philis

tins. II Reg., xxiii, 9 ; I Par., xi, 12-13. Il tint longtemps tète à l’ennemi et en fit un tel carnage, que sa main se raidit par une contraction nerveuse et resta attachée à son épée. II Reg., xxiii, 10. Dans I Par., xi, 13, l’auteur racontait les mêmes exploits ; mais, par la faute d’un copiste, un verset et demi a été omis. Après le début qui concerne Éléazar, I Par., XI, 13*, et qui correspond au ꝟ. 9 de II Reg., xxiii, le texte des Paralipomènes passe aux exploits de Semma, ꝟ. I3 b, qui correspond à ll b de Il Reg., xxm. On pourrait croire d’après la Vulgate, II Reg., xxiii, 13, qu’Éléazar faisait aussi partie des trois braves qui allèrent puiser de l’eau pour David dans la citerne de Bethléhem, en passant parle camp des Philistins, et c’est aussi l’opinion de Josèphe, Ant. jud., VII, xii, 3 ; mais le texte original donne plutôt à entendre que ces trois braves, t- 13, sont différents des précédents, ꝟ. 8-12, et font partie des trente dont la suite du chapitre donne les noms. ꝟ. 23-39. Éléazar était chef de la garde royale pendant le second mois, comme le suppose I Par., xxvii, 4, restitué d’après xi, 12. Voir DODO 3.

4. ÉLÉAZAR, fils de Moholi et frère de Cis. Il n’eut pas de fils, mais seulement des filles, qui se marièrent selon la loi, Num., xxxvi, 6-9, à leurs cousins-germains, les fils de Cis. I Par., xxiii, 21, 22 ; xxiv, 28.

5. ÉLÉAZAR, fils de Phinées. Il fut un des lévites chargés par Esdras de vérifier le poids de l’or, de l’argent « t des vases apportés de Babylone. I Esdr., viii, 33.

6. ÉLÉAZAR, Israélite, fils de Pharos, qui répudia la femme étrangère qu’il avait prise pendant la captivité contre la loi. La Vulgate le nomme Éliézer. I Esdr., x, 25.

7. ÉLÉAZAR, prêtre qui prit part à la fête de la consécration solennelle des murs de Jérusalem sous Néhémie. II Esdr., xii, 42.

8. ÉLÉAZAR (’EXsâÇap, quelques manuscrits’EXsàîapo ; ), quatrième fils de Mathathias et frère de Judas Machabée. I Mach., ii, 5. La Vulgate lui donne le surnom d’Abaron, qui n’est que la transcription du grec, Aûapàv. I Mach., Il, 5 ; Josèphe, Ant. jud., XII, vi, 1 ; IX, 4, AOpiv. Dans I Mach., VI, 43, il est appelé dans le latin fdius Saura : c’est la traduction de la leçon des Septante, 6 Savatpiv, qu’on a interprété comme s’il y avait 4 tov Savapâv. Cette lecture dés Septante parait provenir d’une leçon’EXs<i£(xpo « Aùapàv, dans laquelle la terminaison o ; a été séparée du premier nom et prise pour l’article 6, avec la lettre ç rattachée au mot suivant. Aussi certains manuscrits ont simplement : ’EXeâÇap Aùapxv. Le sens de ce surnom (Aùapâv, Abaron) n’a pu encore être déterminé avec certitude : on l’a rattaché à la racine hâvar, guidé en cela par la version syriaque, qui porte ffavron ; ce qui donnerait pin, « celui qui

frappe un animal par derrière. » J. D. Michaëlis, Suppléments ad lexica hebraica, t. i, p. 696. C’est une allusion à l’exploit d’Éléazar. Pendant qu’Antiochus Eupator assiégeait Bethsur, dans une sortie, Éléazar, apercevant un éléphant plus grand que les autres et plus richement harnaché, crut qu’il devait être monté par le roi. Alors, dans le dessein de délivrer son peuple et de se faire un nom immortel, il se fit jour à travers les ennemis, se glissa sous l’animal et le frappa de son épée ; . mais l’énorme bête en tombant l’écrasa sous son poids. I Mach., vi, 43-46 : Josèphe, Ant. jud., XII, ix, 4 ; Bell, jud., i, I, 5. Dans ce dernier endroit, l’historien juif, regardant comme erronée l’idée d’Éléazar, s’efforce sans succès de montrer que cet éléphant n’appartenait pas au roi, mais à un simple particulier, et que l’acte de ce héros n’était qu’un acte de bravoure, qui ne pouvait en rien contribuer au salut de la Judée. Dans un combat antirieur, livré près d’Emmaus, contre Nicanor, Eléazar

(Vulgate : Esdras) fut chargé de lire avant le combat un passage des Livres Saints, afin d’enflammer les courages. Cf. Deut., xx, 6, et xxviii, 1. Puis on donna pour mot d’ordre « le secours de Dieu », c’est-à-dire le nom d’Éléazar. II Mach., viii, 23 ; cf. I Mach., iv, 3.

9. ÉLÉAZAR, père de Jason. I Mach., viii, 17. Ce dernier fut un des ambassadeurs que Judas Machabée envoya à Rome pour contracter alliance. On a prétendu, mais sans raison positive, que cet Éléazar était le même que le frère de Judas.

-10. ÉLÉAZAR, célèbre scribe ou docteur de la loi, qui souffrit le martyre dans la persécution d’Anliochus IV Épiphane, à l’âge de quatre-vingt-dix ans. II Mach., VI, 18-31 ; cf. I Mach., i, 57-63. On voulut le forcer de manger de la chair de porc, aliment impur défendu par la loi, Lev., xi, 7 ; mais le vieillard préféra la mort. Il cracha même le morceau de viande qu’on lui avait mis de force dans la bouche. ^. 20 (grec). On lui fit subir le supplice du tympanum. ꝟ. 19 (grec). Pour le sauver, ses amis lui proposèrent de faire apporter des viandes permises, pour feindre d’avoir mangé les viandes défendues. Mais il s’y refusa, protestant qu’il ne voulait pas par cette lâche simulation déshonorer sa longue vie et donner le mauvais exemple aux jeunes. Du reste, que gagnerait-il à sauver ainsi sa vie, puisqu’il n’échapperait pas au jugement de Dieu ? ꝟ. 21-28. Cette fermeté irrita ses bourreaux ; mais lui supporta tout dans la crainte d’offenser Dieu, laissant au peuple un grand exemple de courage et de vertu, y. 29-31. Josèphe, De Mach., 5-7, dit que ceci eut lieu en présence d’Anliochus lui-même, et il ajoute plusieurs circonstances sur la mort d’Éléazar, comme des détails sur les tourments du tympanum, le déchirement du corps avec des instruments de fer et le supplice du feu. D’après lui aussi. De Mach., 5, et d’après le IVe livre des Machabées, v, 3, Éléazar aurait été prêtre ; mais le texte du IIe livre des Machabées, VI, 18, qui en fait expressément un scribe, sans dire qu’il fût un prêtre, porte à croire que cette indication n’a pas une valeur historique. Encore moins peut-on dire avec Joseph Gorion, Hist. Judœor., iii, 2 et 4, in-4°, 1706, qu’il fut grand prêtre et qu’il fit parlie des soixante-dix interprètes de la version grecque, ce qui ne s’appuie sur aucun témoignage ancien. Lesauteurs sont partagés sur la question de savoir si ce fut à Jérusalem ou à Antioche qu’il souffrit le martyre. Plus généralement on le place au même lieu que les sept frères Machabées, par conséquent dans cette dernière ville.

11. ÉLÉAZAR, fils d’Éliud et père de Mathan, dans la généalogie de saint Joseph donnée par saint Matthieu, i, 15. Il est d’ailleurs inconnu. E. Levesque.

    1. ÉLECTA##

ÉLECTA (grec : ’ExXex-ri)), destinataire de la seconde Épitre de saint Jean. II Joa., 1. Dès l’antiquité on s’est demandé si ce nom désignait une personne ou une Église, et la question a été résolue en des sens très divers. 1° Pour ceux qui ont pensé qu’il s’agissait d’une personne, les uns, comme la Vulgate clémentine, probablement, et comme Nicolas de Lyre, dans Biblia cum g’.ossa ordinaria, in-f°, Anvers, 1634, t. VI, col. 1421 ; Wetstein, Novum Testamentum grxce, in-4°, Amsterdam, 1752, t. ii, p. 729, etc., croient qu’elle s’appelait’ExXsxtt) ; mais il n’est guère vraisemblable qu"ExXsxtT, soit un nom propre, puisque au ꝟ. 13 saint Jean donne le même nom à sa sœur. D’autres auteurs, comme l’auteur de la Synopsis Scripturee Sacræ, Patr. gr., t. xxviii, col. 409, et plusieurs modernes (H. Poggel, Der zweite und dritte Brief des Johannes, in-8°, Paderborn, 1896, p. 127-132), lui donnent le nom de Kupt’a (cf. araméen : wip, Marfà’, Domina). Sans doute on

trouve Kupia employé chez les Grecs comme nom propre,

mais il devrait y avoir dans l’adresse : Kupîa ri) èxXexTîj ; puis., au ꝟ. 5, ce nom paraît un titre plutôt qu’un nom. Aussi d’autres exégètes, comme Cornélius a Lapide, Comm. in Epist. canon., édit. Vives, t. XX, p. 633, pensent que le nom propre n’est pas exprimé, et que l’adresse porte seulement : » à la dame élue. » Cet exégète va même jusqu’à rapporter, d’après la Chronique de Lucius Dexter, une tradition qui lui donnait le nom de Drusia ou Drusiana. Il est bien difficile de croire qu’il s’agit d’une personne privée, quand on voit l’apôtre employer des expressions comme celles-ci : Tous ceux qui connaissent la vérité aiment ses enfants comme lui les aime ; « Je te prie, xjpîa, domina, que nous nous aimions les uns les autres, » jfr. 5 ; et « J’ai trouvé de tes fils qui marchent dans la vérité », j>. 4, quelques versets après s’être adressé à elle et à ses enfants. — 2° Ces difficultés ont amené de nombreux interprètes à penser que saint Jean avait désigné une Église. Saint Jérôme, Ep. cxxm ad Ageruchiam, t. xxii, col. 1053, semble avoir en vue l’Église universelle. Mais plus communément, et avec raison, on entend une Église particulière. Cassiodore, Complex. in Epist. Aposl., t. lxx, col. 1373 ; Serarius, Prolegomena biblica et comm. in Epist. canon., in-f°, 1704, p. 99. L’apôtre s’adresse à une Église qu’il appelle l’élue, et lui envoie en terminant des salutations de la part des membres d’une autre Église, qu’il nomme sa sœur l’élue. De plus.l’Église, comme épouse du Seigneur, Kupîo ; , peut bien porter le titre de Kupîa, domina. Quant au nom d’  « élue » donné à une Église, ne trouvons-nous pas dans saint Ignace, Ep. ad Trait., t. v, col. 673, la même expression ? On peut comparer aussi la façon dont saint Pierre, v, 13, nomme l’Église de Rome : y] èv BaëuXôm (TUvExXexT^. Cf. êxXextoi ; , I, 1. Tout porte à croire que « l’élue », èx^sxt^, dont parle saint Jean est « une Église personnifiée sous la figure d’une femme, avec les enfants qu’elle a mis au monde pour le Seigneur. Cette forme de langage est tout à fait en harmonie avec le style de saint Jean ». H. de Valroger, Introduction historique et critique au Nouveau Testament, in-8°, Paris, 1861, t. ii, p. 410. Quelle est cette Église ? On a mis en avant Corinthe, Borne, Jérusalem, sans raison valable ; la lettre de saint Jean s’adresse probablement à une des Églises de l’Asie Mineure. Cf. uornely, Introductio specialis in N. T. libros, in-8°, Paris, 1886, p. 682-683. E. Levesque.

    1. ÉLECTION##

ÉLECTION, choix qu’on fait de quelqu’un pour lui confier certaines fonctions importantes. En hébreu, le verbe bâhar, qui signifie « choisir » et « élire », désigne ordinairement la mise à part d’un homme ou d’un objet, à raison de leurs qualités émineiites. Aussi le substantif tnibhar, « élection, » se prend-il toujours dans le sens concret de « chose de choix, chose excellente. » Il faut distinguer l’élection divine et l’élection par le peuple. . I. Élection divine. — Comme les Hébreux sont soumis au régime théocratique, c’est Dieu qui élit directement les hommes qu’il veut mettre à la tête de son peuple, Moïse, Ps. cvi (cv), 23 ; Saùl, II Reg., xxr, 6 ; le Messie, Is., xlii, 1, etc. Chacun d’eux est alors un bâhir, èX^x-réç, electus. De même, sous la Loi nouvelle, Notre-Seigneur fait en personne l’élection de ses Apôtres. Luc, VI, 13 ; Joa., VI, 71 ; xiii, 18 ; xv, 16 ; Act., i, 2. L’appel à la vie surnaturelle et au salut est également appelé « élection », ixXoyri, electio. Rom., xi, 5, 7, 28 ; I Thess., i, 4 ; il Petr., i, 10. Le nom d’  « élus », èxXexroi, est donné à ceux qui obéissent sur la terre à cet appel, Matth., xx, 16 ; xxii, 14 ; xxiv, 22, 24, 31 ; Rom., viii, 33 ; Col., iii, 12 ; II Thess., ii, 12 ; II Tim., ii, 10 ; I Petr., i, 1 ; ii, ? ; Àpoc, xvii, 14, et à ceux qui, en conséquence de leur fidélité, parviennent à la gloire éternelle. Voir Élu. Saint Paul, Rom., viii, 28-34, justifie ce mot d’  « élection » en montrant que toute prédestination, comme toute glorification, vient de Dieu. Voir Prédestination.

II. Élection par le peuple. — 1° Dans l’Ancien Testament, on ne voit guère en usage l’élection populaire proprement dite. Saùl, le premier roi, est désigné directement par le Seigneur, I Reg., IX, 17, bien que les anciens du peuple aient pris l’initiative dé l’établissement de la royauté. I Reg., viii, 5, 18. Mais plus tard, même quand David a été choisi par le Seigneur, I Reg., XVI, 12> les tribus rassemblées à Hébron confirment son élection, II Reg., v, 1-3, et ensuite les anciens de Juda la ratifient de nouveau après la révolte d’Absalom. II Reg., xix, 11-14. Les rois suivants se succèdent ordinairement par voie d’hérédité ; mais assez souvent c’est la violence qui se substitue au droit, et dans le royaume d’Israël plusieurs rois ne sont que des usurpateurs. — 2° Dans le Nouveau Testament, les Apôtres préparent par voie d’élection la désignation du successeur de Judas. Joseph Barsabas et Mathias sont élus parmi les disciples ; mais c’est au Seigneur qu’est réservé le choix définitif entre ces deux candidats. Act., i, 23-26. — Les sept premiers diacres sont élus par l’assemblée des fidèles et présentés aux Apôtres, qui leur confèrent l’ordre et la mission en leur imposant les mains. Act., vi, 5, 6. — L’assemblée de Jérusalem, composée des Apôtres, des anciens et des fidèles, élit Judas Barsabas et Silas pour accompagner Paul et Barnabe à Antioche. Act., xv, 22, 25. Ces deux derniers exemples montrent l’élection en usage pour désigner des hommes auxquels doivent être confiées des missions spéciales. Mais on ne la voit jamais employée pour la désignation

des pasteurs de l’Église.
H. Lesêtre.
    1. ÉLECTRUM##

ÉLECTRUM (hébreu : haSmal ; Septante : fy.exxpov), expression latine, calquée sur le grec ?, Xexrpov, qui a servi à désigner l’ambre jaune, un alliage d’or et d’argent et même, dans la basse latinité, l’émail. Ce mot se lit dans les Septante et la Vulgate pour rendre le terme hébreu hasmal, qui se rencontre seulement dans deux chapitres d Ézéchiel. Dans la vision dite des chérubins, le prophète aperçoit d’abord dans le lointain s’avancer vers lui une nuée sombre, et, au milieu de la nuée et projetant son éclat sur elle, un globe de feu, au centre duquel brillait comme l’éclat du hasmal. Ezech., i, 4. Quand la vision, rapprochée de lui, se laissa voir dans ses détails, Ézéchiel remarqua comme une sorte de firmament d’un éclat éblouissant étendu sur la tête des chérubins, et au-dessus un trône de saphir, occupé par une apparence d’homme. J. 26. Au verset suivant et au chapitre vm, 2, il décrit ainsi ce personnage : Depuis les reins jusqu’en bas, on aurait dit l’aspect du feu, dont l’éclat rejaillissait tout autour, et depuis les reins jusqu’en haut, on apercevait quelque chose de plus éclatant encore, comme l’aspect du haSmal. Sur la nature de ce hasmal trois opinions ont été émises.

1° Quelques commentateurs ont pensé qu’il s’agissait de l’ambre jaune ou succin. Il est certain que les Grecs du Ve et iv « siècle avant J.-C. donnaient à l’ambre le nom d’i^ExTpov, et que c’était même alors la signification la plus usitée de ce mot. Cette substance était bien connue, car on a trouvé dans de nombreux tombeaux antiques de la Grèce et de l’Italie des colliers en grains d’ambre et divers objets ornés avec cette substance servant de matière incrustante. En particulier, on a rencontré en Étrurie l’ambre mêlé à des objets d’importation phénicienne ou carthaginoise. Saglio, . Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, in-4°, Paris, 1892, t. ii, p. 534. De plus, M. Oppert, L’ambre jaune chez les Assyriens, dans le Recueil de travaux relatifs à la philologie égyptienne et assyrienne, t. ii, 1880, p. 33, croit pouvoir lire le nom de l’ambre dans une inscription cunéiforme ; mais cette lecture a été contestée, et jusqu’ici les fouilles de Chaldée ou d’Assyrie n’ont jamais découvert le moindre morceau de cette substance. G. Perrot, Histoire de Vart, t. ii, p. 768-769. Cette raison ne permet guère d’identifier le haSnial avec l’ambre, bien

que le contexte ne s’y oppose pas : on dit, en effet, que le buste du personnage de la vision était non pas en ffaSmal, mais avait l’aspect, c’est-à-dire le reflet, la couleur du hasmal. Voir Ambre, t. i, col. 449.

2° La plupart des exégètes et des philologues voient dans le hasmal un alliage d’or et d’argent, bien connu des anciens. Il avait été remarqué à l’état natif en beaucoup de mines d’or, particulièrement en Lydie. Sophocle, Antigone, 1038 ; Pline, H. N., xxxiii, 23 ; F. Lenormant, La monnaie dans l’antiquité, t. i, p. 192. On l’obtenait aussi artificiellement, en mélangeant quatre parties d’or contre une d’argent. Sa couleur varie du jaune clair au blanc légèrement jaunâtre, selon que la proportion d’argent augmente. Son éclat est plus vif aux lumières que l’argent, dit Pline, H. N., xxxiii, 23, propriété que reconnaît saint Grégoire, Homil. in Ezech., 1. i, hom. ii, 14, t. lxxvi, col. 801. Dans les fouilles de Troie, Schliemann, Ilios, trad. franc., p. 594, a trouvé une petite coupe d’électrum d’un blanc étincelant à l’intérieur comme à l’extérieur. — L’électrum métallique était connu des Égyp , asem, asemu,

tiens ; il se nommait A* », T’nom qui a beaucoup d’analogie avec fyaSmal. « n (heth) se change souvent avec N (aleph), qui répond exactement

à l’a, I, des hiéroglyphes ; quant à S (lamed), c’est un

suffixe nominal assez employé à former, par exemple, des diminutifs. » Lepsius, Les métaux dans les inscriptions égyptiennes, trad. Berend, in-4°, Paris, 1877, p. 13. Comme l’or, l’électrum venait en grande partie de Syrie,

/SN

a

6a. — Ëlectrum on poudre et en anneaux. Tombeau de Rekhmara.

en briques, en anneaux (fig. 544) ; il servait entre autres usages à recouvrirles portes des temples, les pyramidions d’obélisques, etc. Les obélisques de la reine Hatasou, à Karnak, étaient bardés d’électrum. « On les apercevait des deux rives du Nil, et ils inondaient les deux Egyptes de leurs reflets éblouissants, quand le soleil se levait entre eux, comme il se lève à l’horizon du ciel. » G. Maspero, L’archéologie égyptienne, in-8°, Paris, 1887, p. 297 ; Histoire ancienne, in-i°, t. ii, 1897, p. 244. — La Chaldée et l’Assyrie n’ignoraient pas non plus cet alliage. Les annales de Thothmès, à Karnak, Lepsius, Denkmâler, Abth. iii, pi. 32, lig. 14, 33, signalent des chariots recouverts de ce métal, qu’il avait enlevés aux Assyriens. Le nom même paraît avoir été retrouvé. Après la prise de Suse, Assurbanipal emporta de cette ville de l’or, de l’argent et des eS-ma-ru-u êbbu. Le mot eSmarû, qui se rapproche beaucoup de halmal, d’après Frd. Delitzsch, Spécimen glossarii EzechielicoBabylonici, pi. xii, dans la Bible hébraïque de Bær, Liber Ezechielis ; in-8°, Leipzig, 1884, paraît être un métal d’une blancheur éclatante, l’emportant par cet éclat sur la lueur rougeâtre du feu.

— L’emploi de l’électrum en Egypte et en Assyrie est donc suffisamment établi. Et à ce titre les Septante n’ont pas eu tort de rendre le fyasmal d’Ézéchiel par TJXexTpov, qui avait certainement en grec, à l’époque où ils ont fait leur traduction, le sens d’alliage d’or et d’argent. Sans doute on a expliqué en des sens très divers l’îjXexTpov dont parle Homère, Odyss., iv, 71 ; cependant sa place entre l’or et l’argent s’explique tout naturellement dans l’hypothèse d’un alliage de ces deux métaux, plus estimé que l’argent. Pline, H. N., xxxiii, 23. En tout cas, Sophocle, par l’îîXexTpo ; de Sardes, entend bien un alliage nalif d’or et d’argent, qui existait.en grande abondance en Lydie, dans les sables du Pactole. De ce pays, Crésus

pouvait envoyer au temple de Delphes cent treize lingots d’électrum ou or blanc contre quatre seulement d’or pur. Hérodote, I, 50. On utilisait cet alliage dans les travaux de bijouterie, d’orfèvrerie, comme bracelets, colliers, vases, coupes ; ou simplement on ornait ces objets de reliefs dont la couleur plus blanche tranchait sur le jaune de l’or. — Tout se prête parfaitement à la signification d’alliage d’or et d’argent donnée au tfosmal d’Ézéchiel. Le personnage qui lui apparaît sur le trône de saphir a donc la partie inférieure du corps semblable à la flamme rougeâtre, et la partie supérieure comme la flamme blanche, comme l’aspect blanc jaunâtre de l’électrum. Cf. le personnage du disque ailé dans V. Place, Ninive et l’Assyrie, t. iii, pi. 21. — Bochart, Hierozoicon, Opéra, Leyde, 1692, t. iii, col. 870-888, dans sa longue et savante dissertation sur le htaSmal, montre bien que c’est un métal ; mais, sur une étymologie peu fondée, il s’arrête à un alliage de cuivre et d’or, l’aurichalcum. Cependant d’après Pline, H. N., xxxiii, 23 ; Pausanias, V, xii, 6, et de nombreuses autorités qu’il cite lui-même, l’électrum était certainement un alliage d’or et d’argent. 3° Plus récemment quelques auteurs ont cru pouvoir identifier le hasmal et rîjXEXTpov des Septante avec l’émail. On a plusieurs fois même rattaché comme étymologie le mot émail au nom hébreu. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. iv, p. 233, note 1. Quoi qu’il en soit de cette étymologie, il est certain qu’au moyen âge on s’est servi du mot ëlectrum pour désigner l’émail. Berthelot, Un chapitre de l’histoire des sciences, dans la Bévue des Deux Mondes, 1 er sept. 1892, p. 54. Mais en était-il de même du mot ëlectrum chez les Latins et surtout de l’ijXexTpov des Septante ? Dans ses Recherches sur la peinture en émail dans l’antiquité, in-4°, Paris, 1856, p. 77-92, J. Labarte le prétend. F. de Lasteyrie soutient le contraire : L’électrum des anciens était-il de l’émail ? Dissertation sous forme de réponse à M. Jules Labarte, in-S", Paris, 1857. Sans doute les Assyriens et les Chaldéens ont connu l’émail ; ils ont orné leurs palais d’émaux aux couleurs vives et éclatantes, représentant des personnages, des scènes diverses, qui ont dû vivement frapper les yeux des Hébreux captifs. Ézéchiel, au chapitre xxiii, , 14-16, paraît bien les avoir en vue. Voir Émail. C’est ce qui a incliné plusieurs exégètes à voir l’émail dans le #aS » iaî. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, t. iv, p. 233-237. On objecte que le contexte paraît difficilement permettre cette identification. Ézéchiel, viii, 2, indique une différence d’aspect entre la partie supérieure du personnage et la partie inférieure : celle-ci avait l’aspect rougeâtre du feu, celle-là l’aspect du haSmal. Or ce serait désigner cette différence d’une manière bien vague que de la comparer à l’émail, celui-ci n’ayant par lui-même aucune couleur spéciale. On ne pourrait voir l’émail dans le haSmal qu’à la condition que ce mot désigne un émail spécial, soit l’émail blanc, soit l’émail polychrome, ou bien encore si le prophète entendait l’éclat fixe de l’émail en opposition au mouvement de la flamme. E. Levesque.

    1. ÉLÉHANAN##

ÉLÉHANAN, guerrier, II Reg., xxiii, 24, dont le vrai nom est Elchanan. I Par., xi, 26. Voir Elchanan 2.

EL-ELOHÉ-ISRAEL (hébreu : ’El’Ëlohê-Jsrâ’êl, « Dieu, Dieu d’Israël » ; Septante : ô ©eôç’Iopai]X ; Vulgate : Fortissimus Deux Israël), nom donné par Jacob à l’autel qu’il érigea près de Sichem, dans le champ qu’il acheta aux fils d’Hémor. Gen., xxxiii, 20. « Et il éleva là un autel, dit le texte hébreu, et il l’appela (vayyiqrâ’) El-ÉlohéIsraël, » ce que la Vulgate traduit, en donnant un autre sens â vayyiqrâ : « Ayant érigé là un autel, il y invoqua le Dieu très fort d’Israël. » Jacob érigea sans doute cet autel et lui donna ce nom en mémoire de la lutte qu’il venait de soutenir contre l’ange et des paroles qu’il lui avait dites : « Ton nom ne sera plus Jacob, mais

Israël, parce que tu as été le plus fort en luttant avec Dieu et avec les hommes. » Gen., xxxii, 28.

    1. ÉLÉMENTS##

ÉLÉMENTS (grec : otor/et* ; Vulgate : elementa), principes d’où ont été formées toutes choses. Ce mot vient de <rrot x » ; , « ordre, série, » parce qu’il désigne ce qui sert à mettre en ordre. Les philosophes grecs, et, à leur suite, l’école juive d’Alexandrie, admettaient quatre éléments : la terre, l’eau, l’air et le feu. TeTrôcptov 6’vttov otoi^sîcov, dit Philon, sÇ wv à *6<t(j.o ; eruvéuTrptE,-fîi ; , ûSatoç, àépoç, icupâç. De Incorr. mundi, 21, Londres, 1742’, t. ii, p. 508. Cf. Josèphe, Ant. jud., III, vii, 7. L’auteur de la Sagesse, vii, 17 ; xix, 17, et S. Pierre, H Petr., iii, 10, 12, emploient le mot orotxsïa, elementa, dans ce sens. — S. Paul s’est servi du mot atot^eîa dans une acception différente et dont la signification précise a donné lieu à beaucoup de discussions, « Quand nous

jonction vav, « et, » n’existe pas entre les deux, on a pu supposer, en effet, qu’il n’y avait là qu’une seule ville ; mais alors le chiffre de « quatorze » ne serait plus juste pour les cités de ce second groupe, et puis l’omission du vav se remarque dans d’autres énumérations entre des localités parfaitement distinctes, par exemple, entre’Ên-Gannim et Tappûafy, Jos., xv, 31 ; ’Adullâm et Sôkôh, Jos., XV, 34, etc. Enfin la Peschito a mis ici, on ne sait pourquoi, Gebîro, au lieu de Hâ-’Éléf. — Dans l’énumération de Josué, xviii, 21-28, cette ville fait partie du groupe qui s’étend à l’ouest et au sud de la tribu. Elle précède immédiatement Jébus ou Jérusalem. C’est pour cela que les explorateurs anglais croient la reconnaître dans Lifta, à peu de distance au nord-ouest de cette dernière. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1883, t. III, p. 47 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and vlaces in the Old and New Testâ tes. — L’éléphant d’Asie.

étions enfants, dit-il, Gal., iv, 3, nous étions asservis aux éléments du monde », Creb zi aroixeîa toû xôafiou, Ces éléments, selon l’explication de Tertullien, Adv. Marcion. , v, 19, t. ii, col. 521, sont les premiers éléments, les principes des connaissances, l’enseignement élémentaire, rudimentaire : « Secundum elementa mundi, non secundum cælum et terram docens, sed secundum litteras sseculorum. » De même, Gal., iv, 9 et Col., ii, 8. Dans Ileb., v, 12, rudiments de l’enseignement divin. Voir E. Schaubach, Comment. quæxponiturquid<TTor%tïi.To : j xierfiou in Novo Testamento sibi velint, Meiningen, 1862.

    1. ÉLEPH##

ÉLEPH (hébreu : Hà-’Éléf, avec l’article ; Septante : Codex Alexandrinus, SeXaXÉip ; omis par le Codex Vaticanus), ville de la tribu de Benjamin, mentionnée une seule fois dans l’Écriture. Jos., xviii, 28. Le nom est diversement interprété et différemment rendu par les versions. Quelques auteurs le traduisent par « le bœuf », et j voient une allusion aux occupations pastorales des habitants. D’autres lui attribuent le sens numérique, « mille, » qui indiquerait une nombreuse population. Les Septante, d’après le manuscrit alexandrin, ont uni Éleph au mot précédent Se’fa, ’d’où SeXaXI ?. Comme la con ment, Londres, 1889, p. 56. Bien qu’il n’y ait que peu de rapport entre les deux noms, la position peut s’accorder avec les données du texte. Nous n’avons là cependant qu’une conjecture. Voir Benjamin 4, t. i, col. 1589.

A. Legendre.
    1. ÉLÉPHANT##

ÉLÉPHANT (Septante : êXéipaç ; Vulgate : elephas, elephantus).

I. Histoire naturelle. — L’éléphant est un grand mammifère terrestre, de l’ordre des proboscidiens (tig. 545). Il est caractérisé tout d’abord par sa masse, mais aussi par sa trompe et par ses défenses. La trompe n’est autre chose qu’un prolongement nasal, terminé par l’ouverture des narines. Elle sert à l’animal pour flairer les objets, les saisir et les porter à la bouche. Elle peut puiser l’eau, que deux valves cartilagineuses, placées à la base intérieure de l’appendice, empêchent de pénétrer dans les fosses nasales. Elle constitue aussi une puissante arme offensive et défensive, à l’aide de laquelle l’éléphant saisit ses ennemis, les projette en l’air ou les met sous ses larges pieds pour les écraser. Les défenses ne sont que des incisives qui peuvent atteindre jusqu’à deux mètres et demi de longueur et peser de cinquante à soixante kilogrammes. Elles protègent la trompe eu

l’abritant contre les arbustes épineux â traversles forêts, mais surtout assurent à l’animal une supériorité terrible dans la lutte contre ses ennemis. La matière dont elles sont formées est précieuse et recherchée. Voir Ivoire. Les molaires de l’éléphant sont appropriées au régime végétal. Elles se composent de lames osseuses enveloppées d’émail et reliées par une substance corticale. Au lieu de se remplacer verticalement, comme chez les autres mammifères, elles sont poussées en avant, à mesure qu’elles s’usent, par les molaires postérieures. L’éléphant a la tête énorme, le cou très court, les jambes de devant plus hautes que les deux autres, le corps revêtu dune peau calleuse et presque sans poils, l’aspect général lourd et informe. Les pieds ont cinq doigts, et, pour qu’ils ne fléchissent pas sous le poids du corps, ces doigts sont soutenus en dessous par une sorte de grosse pelote en tissu fibreux et élastique. Les éléphants vivent en troupes dans les forêts et les endroits marécageux. Ils se nourrissent d’herbes, de racines, de graines, et font parfois

646. — Éléphant d’Afrique. xxy « dynastie. Ouadi E’Sofra. D’après Lepsius, DenlemiUer, Abti. v, Bl. 75.

de grands ravages dans les champs cultivés. — On connaît une dizaine d’espèces d’éléphants fossiles, dont la principale est celle du mammouth ou eléphas primigenius. Deux espèces subsistent seules aujourd’hui. Velephas africanus a la tête simplement bombée, les oreilles longues et les défenses très fortes. Il habite l’Afrique, depuis l’extrême sud jusqu’à la Haute-Egypte. On le chasse surtout pour avoir la nourriture que fournit sa chair abondante et pour s’emparer de l’ivoire de ses défenses. L’elephas indicus habite le Siam, la Birmanie, le Bengale, l’IIin Joustan et quelques lies de l’Océanie. Il a la tète doublement bombée et les oreilles plus courtes que dans l’autre espèce. L’éléphant d’Asie est domesticable. Il met facilement son intelligence et sa force au service de l’homme et exécute pour le compte de son maître de rudes travaux. Sa force équivaut à environ cinq fois celle du chameau. On habitue aisément ce mammifère à boire du vin et des liqueurs spiritueuses.

II. Les éléphants dans l’antiquité. — Les anciens Égyptiens connaissaient l’éléphant, qu’ils nomment âb, àbu (fig. 546). Un officier de Thothmès III, Amanémeb, raconte dans son inscription funéraire qu’il a tué cent vingt éléphants dans l’Asie occidentale. Chabas, Etudes sur l’antiquité historique, 2e édit., p. 573-575. L’éléphant figure avec l’ours, sur le tombeau de Rakhmirî, parmi les tributs que les Syriens apportaient à l’Egypte, sous les rois de la XyiII" dynastie thébaine. Champollion, Monuments de l’Egypte et de la Nubie, pi. clxxvi, 1-2 ; Rosellini, Monumenti civili, pi. xxii, 3-5. Mais c’est surtout dans le Pouanît, région située entre la mer Rouge et le Haut-Nil, que les Egyptiens allaient chercher l’ivoire que leur apportaient les naturels du centre africain. L’île d’Éléphantine, située sur le Nil, près de la première cataracte, paraît avoir été longtemps un des principaux entrepots de ce commerce, comme d’ailleurs de tout le trafic avec le sud. — L’éléphant fréquentait primitivement les rc’gions du moyen Euphrate. II en disparut vers le XIIIe siècle I avant notre ère et ne devint plus dès lors, en Assyrie,

! qu’un objet de curiosité importé d’ailleurs. Fr. Lenorj

niant, Sur l’existence de l’éléphant dans la Mésopotamie I au xii" siècle avant l’ère chrétienne, dans les Comptes rendus de l’Académie des inscriptions, 2 8 série, t. i, p. 178-183. Il existait encore en Syrie, au moins à l’état sauvage, et c’est de là que les rois assyriens tiraient l’ivoire. Théglalhphalasar I" se vante d’avoir tué à la chasse dix éléphants et d’en avoir pris quatre vivants. Prisme de Théglahtphalasar I" ; vi, 70-75. Sur l’obélisque de Nimroud, qui raconte les hauts faits de Salmanasar II, un des registres représente un éléphant amené comme tribut au prince assyrien (fig. 547). Sur un autre registre, un groupe de quatre hommes portent des objets qui paraissent être des dents d’éléphants, que l’inscription fait venir du pays de Soukhou, à l’embouchure du Khabour dans l’Euphrate. — Le nom assyrien de l’éléphant est pîru. L’obélisque de Salmanasar nomme les pîrâti. Delattre, L’Asie occidentale dans les inscriptions assyriennes, et Encore un mot sur la géographie assyrienne, dans la Revue des, questions scientifiques, Bruxelles, 1881, octobre, p. 513-516 ; 1888, avril, p. 452-456. Ce nom devient phîl ou pîl en arabe, pîl en perse, pilu en sanscrit. L’hébreu n’a pas de nom pour désigner l’animal. C’est à tort que pendant longtemps les commentateurs ont cru trouver ce nom dans l’hébreu behêmôf, qui ne convient qu’à l’hippopotame. Voir t. i, col. 1551. Toutefois, parmi les produits que Salomon tire d’Ophir, on trouve les Sénhabbim, mot que les versions traduisent par oSôv-ca èUfàvTiva, dentés elephantorum, Targum : Sên dephîl. III Reg., x, 22 ; II Par., IX, 21. Pour les anciens traducteurs, habbim était donc un pluriel désignant. les éléphants. A l’époque de Salomon, l’éléphant, depuis longtemps traqué par les chasseurs, avait sans doute disparu de Syrie, et, en important de loin ses défenses, on importait également le nom étranger qui désignait l’animal. Un autre mot sanscrit, ibha, sert à nommer l’éléphant, et le grec èXéçaç ne serait autre que le mot ibha précédé de l’article sémitique. Max Miiller, La science du langage, 2e édit., Paris, 1867, p. 255. Bien que cette étymologie ne soit pas absolument certaine, elle est confirmée par les anciennes versions et semble beaucoup plus probable que toutes les autres conjectures imaginées pour rendre compte de l’hébreu habbim. Cf. Gesenius-Rœdiger, Thésaurus linguse hebrxx, p, 1453, et Addenda, p. 115. Tristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 81, assure que le mot habba se retrouve actuellement à Malabar et à Ceylan pour désigner l’éléphant.

III. Les éléphants a la guerre. — Les anciens savaient domestiquer les éléphants et se servir d’eux à la guerre. Ils employaient dans ce but les éléphants d’Asie, plus dociles et plus braves que ceux d’Afrique. Diodore de Sicile, ii, 16 ; Pline, H. N., vi, 24 ; Philostrate, Apollon. , n ; 12 ; Elien, Nat. animal., xvi, 15. Dès le temps d’Alexandre, les éléphants apparaissent dans les armée » d’Asie et même d’Occident. Tite-Live, xiv, 34 ; xxxi, 36 ; xxxviii, 39 ; Hirtius, Bell, afric., 48, 83, 86 ; Pline, H. N., vin, 5 ; Végèce, De re milit., iii, 24, etc. Les Séleucides en firent grand usage dans leurs armées de Syrie. Plutarque, Demert., 28 ; Appien, Syr., 46 ; Polybe, xi, 32. Cf. Winer, Biblisches Realwôrterbuch, Leipzig, 1833, 1. 1, p. 371. Ils leur venaient de l’Inde par la Perse (voir 1. 1, fig. 272, col. 999). Il n’est donc pas étonnant que les livres des Machabées fassent fréquemment mention de la présence de ces animaux dans les armées syriennes. — Antiochus III le Grand a des éléphants dans son armée. I Mach. i, 18. Quand il entreprend sa campagne contre la Perse, il laisse à Lysias la garde de la Syrie avec la moitié de son effectif de guerre et de ses éléphants. I Mach., iii, 34. Il fut vaincu par les Romains, malgré ses cent vingt éléphants. I Blaçh., vui, 6. — Sous Antio

chus V Eiipator, l’armée syrienne qui opère contre Judas Machabée compte trente-deux éléphants d’après I Mach., vi, 30, et quatre-vingts d’après II Mach., XI, 4. On ne doit pas s’étonner de la différence entre des chiffres qui ont eu à souffrir des copistes. Pour exciter ces éléphants au combat, on leur montra du jus de raisin et de mûres dont ils sont très friands. Cf. III Mach., v, 2. Le texte porte è’SôtÇav, « on montra » sans leur permettre de boire, comme pour leur faire espérer la récompense après la lutte. : — Sur chaque éléphant, entouré d’ailleurs de mille fantassins et de cinq cents cavaliers, se dressait une tour de bois contenant des machines de guerre, trente-deux hommes et en plus un Indien servant de cornac. I Mach., vi, 34-37. Ce nombre de trente-deux hommes parait constituer une charge excessive pour l’animal, sans parler de la difficulté pour tant de combattants de se mouvoir dans un étroit espace. Les auteurs profanes parlent aussi des tours de bois fixées sur le dos des éléphants à l’aide de courroies. Pline, H. N., viii, 7 ; Phi guerre contre les Juifs, Lysias, général d’Eupator, a vingt-deux éléphants ; Judas Machabée surprend le camp des Syriens et tue le plus grand de leurs éléphants.

II Mach., xiii, 2, 15. — Sous Démétrius I er apparaît un chef des éléphants, IXsçavroipxiC, Nicanor, chargé de faire la guerre contre les Juifs. II Mach., XIV, 12. Cf.

III Mach., v, 4 ; Plutarque, Demetr., 25. Ce genre de commandement s’appelait èXeçiivTap^îa. Elien, Tact., 23. Le conducteur de l’éléphant est appelé’lv80ç, « Indien, s II Mach., xiv, 2. — Voir P. Armandi, Histoire militaire des éléphants, in-8°, Paris, 1843 ; Ch. Frd. Holder, The lvory King, a popular Hislory of the Eléphant illustrated, in-12, Londres (1886) ; G. de Cherville, Les éléphants, in-8°, . Paris (sans date) ; N. S. Shaler, Domesticated Animais, in-8°, Londres, 1896, p. 127-139.

H. Lesêtre.
    1. ÉLÉPHANTIASIS##

ÉLÉPHANTIASIS, maladie des pays chauds ayant pour cause l’introduction dans l’organisme d’un ver parasite, la filaire, qui obstrue les vaisseaux lymphatiques et

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517. — Éléphant offert en tribut t Salmanasar II. Obélisque de NImroud. Britlsh Muséum.

lostrate, Apollon., ii, 6 ; Juvénal, Sat., xii, 110. Mais ils ne comptent dans ces tours qu’un bien moindre nombre de combattants, quatre dans les tours des armées syriennes, Tite-Live, xxxvii, 40 ; trois dans les tours des armées indiennes, Elien, Nat. animal., xiii, 9, et quelquefois de dix à quinze dans les premières d’après Philostrate, Apollon., ii, 12. Il est donc à croire que les trente-deux combattants du texte sacré se relayaient mutuellement et n’étaient pas tous à la fois dans la tour, ou bien que le traducteur aura lu selisîm ulenayim, « trente-deux, » au lieu de SâlôS Senayim, « trois ou deux. » Voir F. Vigoureux, Les Livres Saints et lacritique rationaliste, 4e édit., t. iv, p. 612-619. — Un guerrier juif, Éléàzar, frère de Judas Machabée, apercevant un de ces éléphants qui portait les insignes de la royauté (voir col. 1145), se glissa jusque sous lui, en pensant que le roi était dans la tour, frappa l’animal au ventre et périt lui-même écrasé dans sa chute. I Mach., vi, 43-46. Antiochus V Eupator n’était pas dans la tour, parce que son jeune âge ne lui permettait pas encore de prendre part au combat. Les marques distinctives de cet éléphant avaient avec raison attiré le regard d’Éléazar, quoi qu’en dise Josèphe, Bell, jud., 1, 1, 5. Plutarque, Alexand., 60, raconte aussi que le roi Porus était monté sur un éléphant plus grand que les autres. — Dans une nouvelle

entraîne toutes sortes de désordres : engorgement des vaisseaux, irritation de leurs tissus, intumescence de la peau et des parties sous - jacentes, résultant de l’inflammation générale de tout le système lymphatique. L’effet produit sur les membres est surtout sensible aux jambes et aux pieds, qui deviennent informes comme ceux de l’éléphant, d’où le nom d’éléphantiasis donné à la maladie (fig. 548). Ces altérations de l’organisme ne vont pas sans causer de cuisantes douleurs au patient. Le mal peut durer des années, mais parfois se termine par un étouffement qui amène subitement la mort. La maladie s’appelle « éléphantiasis des Arabes », à raison du pays où elle se fait le plus sentir, ou lepra nodosa, à cause de ses analogies avec la lèpre et des nœuds que produit à la surface des membres l’engorgement des vaisseaux. Cf. Heer ; De elephantiasi Grœcorum et Arabum, Breslau, 1842, Danielssen et Boek, Traité de la Spédalskhed ou éléphantiasis des Grecs, traduit du norvégien par Cosson, Paris, 1848 ; Hecker, Eléphantiasis, lepra arabica, Lahr, 1858 ; H. von Hebra, Die Eléphantiasis Arabum, in-8°, Vienne, 1885. — On s’accorde aujourd’hui à reconnaître I’éléphantiasis dans la maladie dont Job fut frappé. Hosenmûller, Iobus, Leipzig, 1806, t. i, p. 62 ; Frz. Delitzsch, Dos Buch lob, Leipzig, 1876, p. 61 ; Le Hir, Le livre de Job, Paris, 1873, p. 251 ; Knabenbaucr, In Job, Taris, 1885,

p. 54, etc. Parmi les anciens, Origène, Cont. CéU., yi, 43, t. xi, col. 1365, dit que Job fut atteint àypfta èXéçav-ri. Cette maladie était endémique en Egypte. Pline, H. N., xxvi, 5 ; Lucrèce, vi, 112. Un roi de ce pays en mourut, et Baudouin, roi de Jérusalem, eut à en souffrir. Cf. Frz. Delitzsch, DasBuch lob, p. 61. Le texte sacré appelle le mal de Job Sehîn ra’, êXxo ; uoviripôv, ulcus pessimum, « ulcère très malin. » Job, ii, 7. C’est le même mal qui est nommé dans le Deutéronome, xxviii, 27 : sehtn mitrayîm, « ulcère d’Egypte, » et dont il est dit : « Le Seigneur te frappera du mal d’Egypte, » et plus loin, t. 35 : « Le Seigneur te frappera d’une plaie très maligne, dans les genoux et les mollets, et dont tu ne pourras être guéri

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548. — Jambe atteinte d’élépbantlasls.

de la plante des pieds au sommet de la tête. » Cf. Schilling, De lepra, Leyde, 1778, p. 184. Les différents effets de la maladie sont décrits dans le courant du livre de Job. Le corps est tout couvert d’ulcères, conséquences de l’engorgement et de l’inflammation des vaisseaux, et ces ulcères sont pleins de pus et de vers, vii, 5. Le patient gratte ses ulcères avec un tesson, ii, 8, car ses mains boursouflées et rongées par le mal ne peuvent lui servir. La peau est noire, sèche, rugueuse comme celle de l’éléphant, et elle s’en va en pourriture, vii, 5 ; xix, 20 ; xxx, 15, 30. Les membres sont affreusement tuméfiés et en même temps sont rongés et se détachent, xvi, 8, 14, 17 ; xix, 20 ; xxx, 27. L’haleine devient fétide, xix, 17. Le sommeil est troublé par d’horribles cauchemars, ’vu, 14. Les entrailles sont endolories, xvi, 14 ; xxx, 27, et brûlées comme par un feu intérieur, xxx, 30. La voix ressemble à un rugissement d’animal, iii, 24. Enfin le patient est rendu méconnaissable parle mal. ii, 12. Dans Job, tous ces caractères se présentaient avec d’autant plus d’acuité que le démon lui - même était l’instigateur de la maladie, d’ailleurs d’ordre naturel, et la souffrance devait être d’autant plus cruelle que la mort ne pouvait intervenir pour y mettre un terme, ii, 5, 6. On

ne voit pas que Job ait employé des remèdes pour se guérir. Ceux auxquels on a recours aujourd’hui n’étaient guère à sa portée, et le Deutéronome, xxviii, 35, semble représenter la maladie comme incurable. L’éléphantiasis n’est pas contagieuse comme la lèpre ; on s’explique ainsi que les amis de Job aient pu demeurer auprès de

lui pendant plusieurs jours.
H. Lesêtre.
    1. ÉLEUTHÈRE##

ÉLEUTHÈRE (’EXeMegoç), fleuve de Phénicie. Jonathas livra bataille au roi d’Egypte Ptolémée VI Philométor aux environs du fleuve Éleuthère. I Mach., xi, 7 ; xii, 30. D’après Strabon, XVI, ii, 12, ce fleuve séparait la Syrie de la Phénicie. Cf. Pline, H. N., v, 17 ; ix, 12 ; Ptolémée, V, xv, 4. Josèphe, Ant. jud., XV, iv, 1 ; Bell, jud., I, xvill, 5, dit qu’Antoine donna à Cléopâtre toutes les contrées situées entre l’Éleuthère et l’Egypte, à l’exception de Tyr et de Sidon. On l’identifie généralement aujourd’hui avec le Nahr el-Kébir, « la grande Rivière. » Il prend sa source au nord-est du Liban, dans une sorte de cratère naturel formé de basalte noir, appelé el-Bukeia, et coule le long de la partie nord de cette chaîne de montagne, en se précipitant à travers la gorge appelée l’entrée d’Émath. Cf. Num., xxxiv, 8. Voir Amathite, t. z, col. 447, et Émath. Il se jette dans la Méditerranée à une trentaine de kilomètres au nord de Tripoli. L’Eleuthère est presque à sec en été ; mais en hiver son cours est large et rapide. E. Beurlier,

    1. ELHANAN##

ELHANAN, voir Adéodat, t. i, col. 215.

ÉLI. Saint Matthieu, xxvii, 46, et saint Marc, xv, 34, nous ont conservé en araméen quelques paroles que NotreSeigneur prononça sur la croix en cette langue et qui commencent par le mot Éli ou Éloï. Ces paroles sont empruntées au Psaume messianique xxii (Vulgale, xxi), 2. Comme c’est une phrase en langue étrangère, les copistes l’ont naturellement écrite de façons bien différentes. Notre Vulgate porte, Matth., xxvii, 46 : Eli, Eli, lamma sabachtani ? et Marc, xv, 34 : Eloi, Eloi, lamma sabachtani ? Le texlus receptus grec a : ’Exl t)>.î, Xoc|ià daSaxfloivî, dans le premier Évangile, et dans le second ; ’EXmt èXoi, >a[i|15 (jïëaxûavî. Les manuscrits écrivent chacun de ces mpts de manières différentes. Voir E. Kautsch, Grammatik des Biblisch-Aramâischen, in-8°, Leipzig, 1884, p. 11. Le texte hébreu du Ps. xxii, 1, est : ’Êli’Êlî lâmâh’azabtâni : « Mon Dieu (El), mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné ? » ce qui fait en araméen : 'jripauf NDb >nhn >nha, ’Elôhi, ’Elôhi, lemâ’iebaq(ânî. Les deux derniers mots sont en bon araméen ; mais, au lieu de’Elôhi, il faudrait’Ëldhi, car on ne rencontre point d’o pour l’a dans les autres mots araméens conservés dans le Nouveau Testament. Voir Vigouroux, Le Nouveau Testament et les découvertes archéologiques modernes, 2e édit.j p. 30-37. « Le (o, dit G. Dalman, Grammatik des jùdisch-palàstinenschen Aramâisch, in-8°, Leipzig, 1894, p. 123, doit s’expliquer comme un emprunt fait par mégarde à l’hébreu, comme dans le Targum du Ps. xxii, 3 (édit. Ven. 1518), ponctué in’1°  » au lieu de >n’")N. » Cependant, comme

ceux qui sont auprès de la croix s’imaginent que le Sauveur appelle le prophète Élie à son aide, il est possible que Notre-Seigneur ait invoqué son Père par le mot hébreu : ’Êlî, « mon Dieu, » comme dans le texte original du Psaume. F. VlGOUfiOUX.

ÉLIA. Hébreu : ’Êliyâh, « celui dont Yâh ou Jéhovah est le Dieu ». Nom de trois Israélites.

1. ÉLIA (Septante : ’Epia ; Codex Alexandrinus : ’H).(a), fils de Jéroham et frère de Jersia et de Zechri. Ce fut un des chefs de familles benjamites qui se fixèrent à Jérusalem. I Par., viii, 27.

2. ÉLIA (Septante : ’EXeio ; Codex Alexandrinus :

  • EXîa), prêtre, second fils de Harim, qui fut amené par

Esdras à répudier la femme étrangère qu’il avait prise contre la loi pendant la captivité. I Esdr., x, 21.

8. ÉLIA (Septante : ’HX(a), fils d’Élam, Israélite qui lui aussi renvoya la femme qu’il avait prise à Babylone contre la loi. I Esdr., x, 26.

    1. ÉLIAB##

ÉLIAB (hébreu : ’Éli’âb, « celui dont Dieu est le père ; » Septante : ’EXiâë), nom de sept Israélites.

1. ÉLIAB, père d’Hélon et chef de la tribu de Zabulon au temps du recensement opéré dans le désert du Sinaï, la seconde année après la sortie d’Egypte. Num., i, 9 ; II, 7 ; x, 16. Lorsque les chefs de tribu offrirent leurs présents au Seigneur, Éliab offrit deux vases d’argent remplis de farine arrosée d’huile pour le sacrifice non sanglant, un vase d’or plein d’encens, et divers animaux pour l’holocauste, le sacrifice du péché et le sacrifice d’action de grâces. Num., vii, 24-29.

2. ÉLIAB, fils de Phallu, de la tribu de Ruben, et père de Dathan et Abiron, chefs des révoltés contre l’autorité de Moïse, Num., xvi, 1 ; Deut, xi, 6 ; il avait encore pour fils Namuel. Num., xxvi, 8.

3. ÉLIAB, fils aîné d’Isaï, le père de David. Sa belle taille, ses qualités extérieures, avaient fait penser à Samuel qu’il était peut-être l’élu de Seigneur à la place de Saùl ; mais Dieu, qui sonde les cœurs, avait préféré son plus jeune frère, David. I Reg., xvi, 6 ; xvii, 13 ; I Par., ii, 13. Quelque temps après ce choix, avec un certain sentiment de jalousie ou d’égoïsme, Éliab reprocha à tort à David, qui avait été envoyé au camp par son père, d’avoir abandonné la garde des troupeaux afin d’aller jouir du spectacle de la guerre avec les Philistins, lorsque Goliath défiait Israël. I Reg., xvii, 28. — Une des filles, c’est-à-dire petites - filles, d’Éliab, Abihaïl, épousa Roboam. II Par., xi, 18. — Dans I Par., xxvii, 18, selon les Septante, Éliab, frère de David, était chef de la tribu de Juda. Au lieu d’Éliab, le texte hébreu et la Vulgate ont Éliu : ce qui doit être une faute de copiste, puisque David n’avait pas de frère de ce nom ; la vraie leçon du texte est Éliab, comme ont lu les Septante, bien que quelques critiques croient que « frère » dans ce texte aurait le sens large de parent, comme I Par., xii, 2, et qu’il faut conserver la leçon Éliu.

4. ÉLIAB, lévite dans la descendance de Coré, ancêtre de Samuel. I Par., vi, 27 (hébreu, 12). Dans la généalogie de Samuel donnée plus loin, ꝟ. 34 (hébreu, 19), il est appelé Éliel, et dans celle du premier livre des Rois, i, 1, il porte le nom d’Éliu, qui est plus généralement regardé comme le vrai. Les deux autres formes de son nom seraient dues à des fautes de copiste.

5. ÉLIAB, un des guerriers de la tribu de Gad, qui vinrent offrir leurs services à David, pendant qu’il était réfugié dans le désert pour fuir la persécution de Saûl.

I Par., xii, 9, 14.

6. ÉLIAB, lévite, musicien du second ordre, qui jouait du nébél au temps de David. I Par., xv, 18, 20 ; xvi, 5.

II n’était pas portier, comme il a semblé à quelques exégètes, d’après I Par., xv, 18 ; car le mot « portiers », qui termine la liste des lévites de ce verset, ne se rapporte d’après le ꝟ. 24 qu’aux deux derniers noms, Obédédom et Jéhiel ou Jéhias.

7. ÉLIAB, fils de Nalhanæl, un des ancêtres de Judith d’après les Septante, viii, 1. Dans la Vulgate, il est nommé Énan. Du reste, le nom varie même dans les dif

férents manuscrits des Septante : si le Codex Alexandrinus porte’EXiàë, le Vaticanus a’EXeiâë, et le Sinaiticus’Evâ6. E. Levesque.

    1. ÉLIABA##

ÉLIABA (hébreu : ’Élyafybâ’, « celui que Dieu cache ; » Septante : ’E|ia<roù i SaXagiovemi ;  ; Codex Alexandrinus : ’EXiâë, II Reg., xxiii, 32 ; Safiaêi 6’Ofi&i ; Codex Sinaiticus : ’Ea(mëi 6 Ewjjiïi ; Codex Alexandrinus : ’EXtaëa 6 SaXaë&m, I Par., xi, 33), un des trente braves de David, originaires de Sélébim, Jos., xix, 42, dans la tribu de Dan. II Reg., xxill, 32 ; I Par., xi, 33. ÉLIACHIM. Hébreu : ’Élyâgîm. Nom de deux Israélites. La Vulgate écrit ailleurs Eliacim. Voir Éliacijt.

1. ÉLIACHIM, prêtre qui à la dédicace des murs de Jérusalem, sous Néhémie, jouait de la trompette. II Esdr., xii, 40. Plusieurs manuscrits des Septante, V Alexandrinus, le Vaticanus, le Sinaiticus, omettent ce verset ; il a été inséré dans le Sinaiticus de seconde main.

2. ÉLIACHIM, grand prêtre du temps de Judith, iv, 5, 7, 11, que les Septante appellent constamment’Iwaxe : [i, et que la Vulgate, au chapitre xv, 9, nomme Joachim. Voir Joacim. E. Levesque.

ÉLIACIM. Hébreu : ’Élyâqîm, s celui que Dieu établit ; » Septante : ’E)iax([i et’EXiaxeifj.. Nom de quatre Israélites. Deux autres Israélites ont porté le même nom, mais la Vulgate les a appelés Éliachim. Voir ÉLIA-CHIM.

1. ÉLIACIM, fils d’Helcias, intendant de la’maison du roi Ézéchias. IV Reg., xviii, 18 ; Is., xxxvi, 3. L’intendant de la maison du roi était comme un préfet du palais, un lieutenant ou premier ministre du roi. III Reg., IV, 6 ; xviii, 3 ; II Par., xxvi, 21 ; Is., xxii, 15. Sobna, l’adversaire de la politique d’Isaïe, s’étant rendu indigne de cette charge importante par son orgueil et ses menées antithéocratiques, le prophète lui annonce que le Seigneur le déposera de ses fonctions et les confiera à son fidèle serviteur Éliacim. Is., xxii, 15-20. Il sera comme un père pour les habitants de Jérusalem, ꝟ. 21. Dieu le comblera de puissance et d’honneurs, qui rejailliront sur sa famille. Is., xxii, 21-24. Nous voyons, en effet, Éliacim agir comme maître du palais. Avec Sobna le scribe, différent du précédent, et Joahé le chancelier, il est chargé par Ézéchias d’aller sous les murs de Jérusalem, écouter les propositions du Rabsacès de Sennachérib. IV Reg., xviii, 18 ; Is., xxxvi, 3. Comme l’envoyé du roi d’Assyrie élevait la voix, Éliacim et ses deux collègues le prièrent de parler en araméen, pour que le peuple accouru sur les remparts n’entendit pas les propositions qu’il venait faire à Ézéchias. IV Reg., xviii, 26 ; Is., xxxvi, 11. Mais le Rabsacès, s’adressant à haute voix et en hébreu au peuple, l’engagea à faire sa soumission et blasphéma contre le Dieu d’Israël. Aussi les envoyés d’Ézéchias, sans rien lui répondre, s’en revinrent rapporter ses paroles au roi et se présentèrent devant lui les vêtements déchirés, en signe de l’horreur que leur avait causée le langage du Rabsacès. IV Reg., xviii, 37 ; Is., xxxvi, 21-22. Ézéchias les envoya trouver Isaïe, pour savoir ce qu’il avait à faire en ces circonstances. IV Reg., xrx, 2 ; Is., xxxvii, 2. D’après la fin de la prophétie qui concerne Éliacim, Is., xxii, 25, celui-ci, peut-être à cause de sa faiblesse envers les siens, ꝟ. 24, devait un jour perdre sa haute situation. Il faut dire cependant que nombre de commentateurs appliquent ce ꝟ. 25 à Sobna ; mais ce serait une redite peu naturelle, et il est préférable, avec Frz. Delitzsch, Commentary on Isaiah, 1857, t. i, p. 404, de rapporter à Éliacim cette image du clou, qui avait servi à le désigner deux versets plus haut, t- 23 — Les expressions dont Isaïe se sert, j>, 22, pour décrire

II. - 53

la puissance d’Éliacim, ont été employées par.l’auteur de l’Apocalypse, iii, 7, pour désigner Jésus-Christ lui-même, en sorte que le fils d’Helcias a été regardé par les Pères comme un type du Messie, fils de David. — C’est une erreur des anciens interprètes, trompés en cela par les Septante, d’avoir de la charge n’an-^y, ’al-habbàit, « intendant du palais, » cf. Gen., xli, 40 ; III Reg., iv, 6. fait un office de préfet du Temple, prxpositus templi, et d’avoir considéré Sobna et Éliacim comme des grands prêtres. S. Jérôme, Comment, in Is., 1. vii, c. xxil, t. xxiv, col. 272-274 ; Cornélius a Lapide, Comment, in Isaiam, édit. Vives, t. xi, p. 342. Tout indique une charge dans le palais du roi. Rosenmùller, Scholia in Isaiam, c. xxii, 15, 1823, t. ii, p. 135.

2. ÉLIACIM ou ÉL1AKIM, fils de Josias, roi de Juda.

II fut établi sur le trône par Néchao, roi d’Egypte, qui changea son nom en celui de Joakim, sous lequel il est plus connu. IV Reg., xxiii, 34 ; II Par., xxxvi, 4. Voir Joakim.

3. ÉLIACIM, nommé comme fils ou descendant d’Abiud et père ou ancêtre d’Azor, après la captivité de Babylone, dans la généalogie de Jésus-Christ donnée par saint Matthieu, i, 13.

4. ÉLIACIM ou ÉLIAKIM, placé entre Jona et Méléa dans la généalogie de Jésus-Christ donnée par saint Luc, m, 30, pour le temps qui s’écoula entre la captivité de Babylone et le règne de David. E. Levesque.

ÉLIADA. Hébreu : ’Élyddâh, « celui que Dieu connaît. » Nom d’un Araméen et de deux Israélites.

1. ÉLIADA (Septante : ’EXiaSocs), Araméen de Soba, père de Razon, célèbre aventurier du temps de Salomon.

III Reg., xi, 23.

2. ÉLIADA (Septante : ’EXstSi ; Codex Alexandrinus : ’EXisBâ), Un des plus jeunes fils de David, qui lui naquit après son établissement à Jérusalem. I Par., iii, 8. Il est appelé Élioda, II Reg., v, 16, et Baaliada, I Par., xiv, 7. Les critiques sont partagés sur le nom à adopter comme authentique, Éliada ou Baaliada. Si l’on attribue cette divergence de noms à une faute de copiste, il est plus vraisemblable d’admettre que l’erreur a eu lieu dans un seul endroit, c’est-à-dire dans I Par., xiv, 7. Et d’ailleurs l’erreur peut s’expliquer, puisque entre y-p’wn et y-p^ya il n’y a de différent que les deux premières lettres ; un manuscrit même a y-pbxa. Dathe, Libri historici Vet. Test., in-8°, Halle, 1784, p. 654. J.-B. de Rossi, Variée lectiones Vet. Testament., t. iv, in-4°, Parme, 1788, p. 179, en signale un autre qui porte y-pVsi, et la Peschito a Élidaa. Pour d’autres critiques, comme Driver, Notes on the Hebrew Text of the Books of Samuel, in-8°, Oxford, 1890, p. 201, la leçon Baaliada serait la primitive, et Éliada serait une correction postérieure de copistes, scandalisés de trouver le nom de Baal entrant comme élément dans l’appellation d’un fils de David. Il est à remarquer que les manuscrits du Vatican et du Sinaï ont BaXe-rSâs, et le Codex Alexandrinus, BaXXtaSa, dans I Par., xiv, 7 ; et dans II Reg., v, 16, les Septante ont aussi BaaXEijiiO.

3. ÉLIADA (Septante : ’EXeiSà ; Codex Alexandrinus : ’EXtaSà), vaillant homme de guerre de la tribu de Benjamin, qui dans l’armée de Josaphat était à la tête de deux cent mille de ses compatriotes, armés de l’arc et du bouclier. II Par., xvii, 17. E. Levesque.

ÉLIAM. Hébreu : ’Ëli’âm, « mon Dieu est parent, allié ; s cf. Ammî’êl, « Dieu est mon parent, allié ; » Septante : ’EXixô. Nom de deux Israélites.

1. ÉLIAM, père de Bethsabée, l’épouse de David après la mort d’Urie. II Reg., xi, 3. Dans I Par., iii, 5, le nom, par transposition des deux éléments qui le composent, est devenu Ammiel. Il est difficile de décider laquelle de ces deux formes est primitive.

2. ÉLIAM, fils d’Achitophel, de la ville de Gilo, un des trente vaillants guerriers de David. II Reg., xxiii, 34 ; cf. XV, 12. Dans la liste de I Par., xi, 36, le nom a été altéré par les copistes en À hia Phelonites. Dans la phrase San » ™ ubin p nyiba, les deux premiers mots devaient être effacés dans le manuscrit à copier, et la fin, sans doute difficile à lire, a été transformée en 'jbsn n>nn. D’après une tradition juive, l’auteur des Questiones hebraicx in libros Regum et Paralipomenon, t. xxiii, col. 1352, 1370, fait de cet Eliam et du précédent une seule et même personne. Voir Achitophel, t. i, col. 146.

E. Levesque.

ÉLIASAPH. Hébreu : ’Élyâsâf, « Dieu accroît ; » Septante : ’EXio-âç. Nom de deux Israélites.

1. ÉLIASAPH, fils de Duel et chef de la tribu de Gad, à l’époque où Moïse réunit les chefs des douze tribus pour l’aider dans le recensement d’Israël, et quand les Hébreux quittèrent le Sinaï. Num., i, 14 ; ii, 14. Quand ces chefs offrirent des présents pour le Tabernacle au nom de la tribu qu’ils représentaient, Éliasaph offrit comme les autres les vases d’argent et d’or et les victimes pour les sacrifices. Num., vii, 42, 47.

2. ÉLIASAPH, fils de Læl, lévite, chef de la famille de Gerson au temps de Moïse. Num., iii, 24.

ÉLIASIB. Hébreu : ’ÉlyâHb, « Dieu récompense. » Nom de cinq Israélites selon la Vulgate, et d’un sixième selon l’hébreu, appelé Éliasub par la version latine.

1. ÉLIASIB (Septante : ’EXia6ce( ; Codex Alexandrinus : ’EXiaTsE6), prêtre, chef de la onzième classe parmi les vingtquatre instituées par David. I Par., xxiv, 12.

2. ÉLIASIB (Septante : ’EXuaitf, Codex Alexandrinus et Sinaiticus : ’EXidâ ?), lévite, du nombre des chantres, qui, à l’instigation d’Esdras, renvoya la femme qu’il avait prise à Babylone contre la loi. I Esdr., x, 24.

3. ÉLIASIB (Septante : ’EXenroiiê ; Codex Alexandrinus : ’EXtdoijë ; Sinaiticus : ’EXtaoïi), Israélite, fils de Zéthua, qui obéit à la loi comme le précédent. I Esdr., x, 27.

4. ÉLIASIB (Septante : ’EXiottreîç ; Codex Alexandrinus : ’EXtadeië ; Sinaiticus : ’EXt’.aaziê), un des fils de Bani, qui accomplit le même acte que les deux précédents. I Esdr., x, 36.

5. ÉLIASIB (Septante : ’EXeuto-jÊ, ’EXiaæië, ’EXeta<T£Ê6 ; Codex Alexandrinus : ’EXtaoûë ; Sinaiticus : ’EXtadi’ë), grand prêtre à l’époque de la reconstruction dés murs de Jérusalem sous Néhémie. II Esdr., iii, 1. D’après la généalogie de II Esdr., xii, 10-11, il était fils de Joacim et père de Joïada ; au ^.23 selon la Vulgate, Jonathan est dit fils d’Ëliasib ; mais d’après l’hébreu et d’après le ^.22, il faut lire Johanan et prendre le mot « fils » dans le sens large de « petit-fils, descendant s. Très probablement c’est le même personnage que le prêtre Éliasib, chargé de la garde du trésor du Temple et allié à Tobie l’Ammonite. II Esdr., xiii, 4. Pendant l’absence de Néhémie, il aménagea pour cet étranger une chambre dans les parvis du Temple, profanation qui excita l’indignation de Néhémie. y. 5-9. Un des fils de Joïada, petit-fils par conséquent du grand prêtre Éliasih, avait épousé la fille de Sanaballat l’Horonite : pour avoir déshonoré

ainsi le sacerdoce, Néhémie l’exila. II Esdr., ira, 28-29. L’Éliasib père, c’est-à-dire grand - père de Johanan, qui est mentionné I Esdr., x, 6, est selon toute vraisemblance notre personnage. E. Levesque.

    1. ÉLIAS-LEVITA##

ÉLIAS-LEVITA (’Elyahu ben’aier hallevî), célèbre grammairien juif, né en 1471 à Neustadt en Bavière, mort à Venise en 1549. Il porte le surnom d’Achkenazi, >T33nm, à cause de son origine germaine ; mais il passa

la plus grande partie de sa vie en Italie, tour à tour à Venise, à Padoue, à Rome. Il se livra presque entièrement à l’étude et à l’enseignement de la langue hébraïque : de là le surnom d’Élie le Grammairien, et aussi de Bachur, "ima, « maître, » du titre d’une de ses grammaires. Il acquit sous ce rapport une vraie célébrité, reconnue par Richard Simon, Histoire critique du Vieux Testament, 1685, 1. i, c. xxxi, p. 177. Sans parler ici de ses œuvres grammaticales proprement dites, il est utile de signaler : 1° Metûrgemân, « Interprète, » dictionnaire des Targums et de la langue talmudique, in-f », Isny, -1541, et avec la préface traduite en latin par Paul Fagius, in-f°, Venise, 1560. Sous la racine ntfD, il avait réuni avec soin tous les passages où les targumistes ont employé le mot rwo, MaUah, « Messie ; » cette partie a été publiée séparément en latin par Génébrard, in - 8°, Paris, 1572. — 2° Sêfér zekarônôt, « Livre des souvenirs, » ou concordance hébraïque composée sur un plan différent de celle que rédigea Mardochée Nathan. Le manuscrit autographe, que l’auteur avait envoyé à Paris pour l’y faire imprimer, ne l’a pas encore été, sauf une première livraison publiée par M. Goldberg, en 1874. L’ouvrage inédit en deux volumes de 514 et 606 feuillets est conservé à la Bibliothèque Nationale de Paris, ancien fonds hébreu, n° s 479 et 480.

— 3° Tisbî, « le Tischbite, » ainsi appelé parce que ce mot hébreu, >awn, forme numériquement le nombre de 712, et que l’ouvrage donne l’explication de 712 mots hébreux, chaldéens, arabes, etc. Le mot Thischbi rappelle aussi le nom de l’auteur, Élyah ou Elias (III Reg., xvii, 1). L’ouvrage parut en in-4°, à Bâle, en 1527, et avec une traduction latine de Paul Fagius, in-4°, Isny, 1541.

— 4° Semôt debârim, « Noms de choses, » dictionnaire hébreu-allemand, avec une traduction latine de Paul Fagius, in-8°, Isny, 1542 ; avec un dictionnaire grec composé par les deux Drusius, in-8°, Francfort, 1652 et 1653.

— 5° Mdsôrép hammâsorét, « Tradition de la tradition, » pu, en d’autres termes, « Clef de la Massoie, » ouvrage de critique sur le texte hébreu. Le premier il soutient que les points-voyelles ne remontent pas au delà de l’an 500 après J.-C, thèse qui fut depuis l’objet de vifs débats. — Parmi ses travaux qui rentrent davantage dans l’exégèse, on doit citer : 1° Le Targum des Proverbes de Salomon, édition avec notes explicatives, in-4°, Isny, 1541 ; 2° les Psaumes avec le commentaire de Kimchi et des revisions et corrections de l’éditeur, in-f°, Isny, 1542 ; 3° une traduction littérale des Psaumes en allemand, in-8°, Venise, 1545 ; 4° le livre de Job en vers, in-8°, Venise, 1544 ; Cracovie, 1574. D’après Steinschneider, il ne serait que l’éditeur de ce dernier ouvrage, composé par Sarek Barfat. L. Wogue, Histoire de la Bible et de l’exégèse biblique, in-8°, Paris, 1881, p. 118, 198, 299-301 ; J. Fùrst, Bibliotheca judaica, in-8°, Leipzig, 1863, t. ii, p. 239-242 ; M. Steinschneider, Catalogus libr. hebr. in Bibl. Bodleiana, in-4°, Berlin, 1852-1860, col. 934-942 ; C. Œrtel, Vila Elise Levitæ Germani, in-4°, Altdorf, 1776. E. Levesque.

    1. ÉLIAS-MISRACHI##

ÉLIAS-MISRACHI (’Eliahu.ben Abraham, Mizrâhi, i l’Oriental » ), célèbre rabbin du XV 8 siècle, qui vécut à Constantinople, et mourut vers 1522 à 1527. Il composa un commentaire sur le Pentateuque. Ce n’est au fond qu’un supercommentaire de Raschi, édité en in-f°, Venise, 1527, et réédité en 1545, 1574 ; Cracovie, 1595, Amsterdam, 1718, etc.

    1. ÉLIASUB##

ÉLIASUB (hébreu : ’ÉlyaSîb ; Septante : ’Aoct’g ; Codex Alexandrinus : ’EXtatxetë), fils d’Élioénaï, dans la descendance de Zorobabel. I Par., iii, 24.

    1. ÉLIATHA##

ÉLIATHA (hébreu : ’Êli’âtàk et’Êliyyâtâh, « Dieu lui est venu ; » Septante : EXiaOâ), lévite, un des fils de Héman, chanteur et musicien du Temple. Il faisait partie de la vingtième classe de musiciens. I Par., xxv, 4, 27.

    1. ÉLICA##

ÉLICA (hébreu : ’Ëliqâ’; Septante : ’Evaxâ), un des trente braves de David, natif d’Harad (de Harodi). II Reg., xxiil, 25. Il paraît oublié dans la liste parallèle de I Par., xi.

    1. ÉLICIENS##

ÉLICIENS (Vulgate : Elici), peuple dont était roi Érioch. Judith, i, 7. Le mot Elici de la Vulgate doit être altéré. Le texte grec (i, 6) porte’EXunaïot, « les Élyméens » ou Élamites, habitants du pays d’Élam, leçon qui paraît être la véritable. Voir Élamites.

    1. ÉLIDAD##

ÉLIDAD (hébreu : ’Élîddd, « que Dieu aime ; » Septante : ’EXSàS), fils de Chaselon, de la tribu de Benjamin, choisi pour représenter sa tribu dans le partage de la terre de Chanaan. Num., xxxiv, 21.

ÉLIE (hébreu : ’Eliyâh ou’Eliyâkû ; Septante : ’HXiaç ; Vulgate : Elias, « Jéhovah est mon Dieu » ), surnommé « le Thesbite », du lieu de sa naissance, Thisbé, est le plus grand et le plus surprenant des prophètes d’action de l’Ancien Testament. Il apparut soudain dans l’histoire comme un éclair, sortant des nuages, et sa parole était enflammée comme une torche. Eccli., xlviii, 1. Les livres des Rois sont sobres de détails sur son origine et ne rapportent que des traits détachés de sa vie mouvementée. Les légendes juives le disent de race sacerdotale, et la tradition chrétienne prétend qu’il a gardé une virginité perpétuelle. S. Ambroise, De virginib., i, 3, 12, t. xvi, col. 192 ; S. Jérôme, Ad Jovinian., i, 25, t. xxiii, col. 255.

I. Premières actions d’Eue. — Il habitait la province de Galaad, quand il vint annoncer à Achab, sous le sceau d’un serment solennel, la sécheresse pour plusieurs années. III Reg., xvii, 1. Ce premier acte prophétique n’avait pas été préparé ; c’était le début d’une longue lutte contre l’idolâtrie qui avait été introduite par Achab en Israël. Saint Jacques, v, 17-18, attribue à la prière d’Élie le commencement et la fin du fléau. Le message accompli, Dieu ordonna à son prophète, pour le mettre à l’abri de la colère d’Achab, de se cacher sur le bord du torrent de Carith. Voir col. 285-288. Élie buvait l’eau du torrent et mangeait les aliments que des corbeaux lui apportaient. Voir col. 961. — Après six mois, quand le torrent fut desséché complètement, le prophète se rendit par l’ordre de Dieu à Sarepta, chez une veuve étrangère, Luc, iv, 25-26, qui devait pourvoir à son entretien. Elle ramassait du bois mort auprès de la porte de la ville. Élie lui demanda de l’eau et une bouchée de pain. La pauvre femme n’avait plus qu’une poignée de farine et quelques gouttes d’huile, avec lesquelles elle allait préparer son dernier repas. Afin de mettre sa foi à l’épreuve, Élie sollicita pour lui un petit gâteau cuit sous la cendre ; il lui laissait le reste, avec la promesse que la farine ne diminuerait pas dans la jarre ni l’huile dans le vase, tant que la pluie ne tomberait pas. Le miracle de la multiplication des provisions récompensa la confiance de la pieuse veuve, pendant les trois ans et demi que dura la sécheresse. — La présence d’Élie chez cette femme fut bienfaisante dans une autre circonstance, bien douloureuse pour le coeur d’une mère. Le fils unique de la veuve tomba malade et mourut. La mère désolée se plaignit amèrement au prophète de ce malheur, qu’elle regardait comme la punition de ses propres fautes. Afin de lui montrer que Dieu tenait pour agréable l’hospita

lifé qu’elle donnait à son prophète, celui-ci prit le cadavre dans ses bras, l’emporta à la chambre haute et le coucha sur son lit. Après une ardente prière, il s’étendit par trois fois sur l’enfant, se rapetissant à sa taille, et chaque fois il s’écriait : « Faites, Seigneur, que l’âme de cet enfant rentre dans son corps. » Ces vœux furent exaucés, et l’enfant revint à la vie. Élie le descendit dans la chambre inférieure de la maison et le remit vivant à sa mère. A ce signe, celle-ci reconnut de nouveau qu’elle avait reçu chez elle un ministre du vrai Dieu. III Reg., xvii, 1-24. Élie avait opéré une véritable résurrection, Eccli., XLVHI, 5, et son action pour réchauffer et ranimer le cadavre représentait symboliquement l’œuvre de Dieu, qui est le maître de la vie et de la mort.

II. Eue, Achab et les prêtres de Baal. — Trois ans après son arrivée à Sarepta, Élie reçut de Dieu l’ordre de se présenter devant Achab, pour lui prédire la cessation de la sécheresse. La famine était alors extrême dans le royaume d’Israël. III Reg., xviii, 1-2. Élie rencontra Abdias, l’intendant du roi, et l’envoya annoncer à son maître son arrivée prochaine. Abdias redoutait les suites de ce message. Mais Élie était résolu à paraître le jour même en présence d’Achab. Abdias s’enhardit et prévint le roi. Voir t. i, col. 23. Achab vint aussitôt à la rencontre d’Élie, et, dès qu’il l’aperçut, il lui dit avec colère : « N’est-ce pas toi qui troubles Israël ?

— Ce n’est pas moi, repartit le prophète avec intrépidité ; c’est vous-même et la maison de votre père, parce que vous avez abandonné les commandements de Jéhovah et suivi Baal. » Il faut choisir entre ces deux divinités. Dans ce dessein, Élie propose hardiment de réunir sur le mont Carmel tout le peuple, avec les quatre cent cinquante prophètes de Baal et les quatre cents d’Astarté, que Jézabel nourrissait de sa table. Voir col. 292-293. Quand la foule fut rassemblée, Élie la harangua avec vigueur : « t Jusques à quand serez-vous semblables à un homme qui boite des deux pieds ? Si Jéhovah est Dieu, suivez-le ; si c’est Baal, suivez-le. » La cause du monothéisme était en jeu. Élie mit au défi les prophètes de Baal et se plaça résolument seul en face de quatre cent cinquante adversaires. Les deux partis prendront chacun un bœuf, qu’on coupera par morceaux ; ils le couvriront de bois et prieront leur divinité de faire descendre le feu du ciel pour consumer la victime. Le Dieu qui exaucera les vœux de ses adorateurs sera reconnu pour le vrai Dieu. Celte proposition fut trouvée excellente. Les prêtres de Baal, qui étaient les plus nombreux, commencèrent l’épreuve. Jusqu’à midi ils invoquèrent Baal, en dansant autour de l’autel. Élie se raillait d’eux : « Criez plus haut, disait-il. Votre dieu converse, voyage ou dort ; éveillez-le. » Excités par cette mordante ironie, les prophètes de Baal poussèrent de plus grands cris et firent sur leurs membres de sanglantes incisions. Efforts inutiles ! Baal n’exauçait Cas leurs vœux. Quand vint l’heure du sacrifice ordinaire, Élie releva avec l’aide du peuple un autel de Jéhovah qui avait été détruit. Il le fit de douze pierres, conformément au nombre des tribus, el creusa une tranchée tout autour. Quand la victime fut coupée, il versa trois fois sur elle et sur le bois quatre cruches d’eau ; le liquide se répandit dans la tranchée. Tout étant ainsi disposé, le prophète adressa à Jéhovah une courte et fervente prière. Aussitôt le feu du ciel tomba et dévora l’holocauste, les bois, les pierres, la poussière et l’eau qui était dans la tranchée. Cet éclatant prodige convainquit tout le peuple que Jéhovah était le Dieu véritable. Afin de détruire le culte de Baal, Élie ordonna la mort de tous les prophètes de l’idole et les fit tuer sur le Cison. III Reg.. xviii, 1-40. L’emplacement présumé du sacrifice est nommé aujourd’hui encore El-Mouhraqa, et le lieu du massacre s’appelle Tell el-Qasîs ou Tell el-Qatl. Voir col. 785-786. Cf. V. Guérin, Description géographique, historique et archéologique de la Palestine, -2e partie, Samarie, t. ii, Paris, 1875, p. 245-247. Les Pères et les commentateurs

catholiques ont généralement justifie le prophète du reproche de cruauté relativement à cette sanglante exécution. S. Jean Chrysostome, In Matth., honi. lvi, ! i, t. lviii, col. 551 ; Tostat, In III Reg., xviii, q. xxxv, Opéra, Cologne, 1613, t. vii, p. 292-293 ; G. Sanchez, In quatuor libros Regum, Lyon, 1623, p. 1256-1257. Élie n’ordonna pas le massacre des prophètes de Baal par ressentiment et pour venger le meurtre des prophètes de Jéhovah ; il obéit à une inspiration divine et ne fit qu’appliquer les articles du code mosaïque qui prescrivent la peine de mort contre les idolâtres et notamment contre les faux prophètes. Deut., xiii, 15 ; xvii, 2-7.

Le massacre achevé, Élie invita Achab à remonter à sa tente et à prendre son repas, car déjà il entendait le bruit d’une grande pluie. Achab obéit. De son côté, le prophète gravit le sommet du Carmel. Prosterné à terre et le visage entre ses genoux, il demanda la cessation de la sécheresse. Sa confiance était si assurée, qu’il dit à son serviteur de regarder du côté de la mer si les nuages apparaissaient. Le serviteur ne vit d’abord rien. Élie lui dit : « Retournez-y sept fois. » À la septième fois, le serviteur aperçut un petit nuage qui s’élevait de la mer et qui n’était pas plus large que la main d’un homme. Reconnaissant les premiers signes de la pluie demandée, Élie fait dire à Achab d’atteler son char et de se hâter, de peur qu’il ne soit surpris par la pluie. Le ciel fut obscurci en un instant ; d’épaisses nuées turent poussées par le vent, et la pluie tomba fortement. Jac., v, 18. Achab retournait à Jezraël. Saisi par l’inspiration d’en haut, Élie, les reins ceints, courait comme un héraut devant le char du roi. III Reg., xviii, 41-46. Il voulait sans doute l’accompagner, l’aider à revenir au culte du vrai Dieu et le défendre contre les séductions de Jézabel. Dès qu’elle eut appris de la bouche d’Achab la mort des prophètes de Baal, la reine fit annoncer à Élie qu’elle avait fait le serment de lui donner le même sort dès le lendemain. Justement effrayé, Élie s’enfuit à Bersabée.

111. Élie au Sinaï. — Parvenu en ce lieu, le prophète renvoya son serviteur et s’enfonça dans le désert du Sinaï à la distance d’une journée de marche. Son espérance d’abolir d’un seul coup l’idolâtrie s’était évanouie. Il avait besoin de solitude pour ranimer son courage, et il ne se croyait pas en sûreté sur les terres de Josaphat, qui était l’allié d’Achab. Épuisé par un voyage long, rapide et pénible, Élie s’assit sous un genévrier, et cédant, non pas au désespoir, mais au découragement, il souhaita la mort. Dans son accablement, il s’étendit par terre et s’endormit. Un ange le toucha et lui dit : « Lève-toi et mange. » Élie éveillé regarda autour de lui, et vit auprès de sa tête un pain cuit sous la cendre et un vase d’eau. Il mangea et but et se rendormit. L’ange le toucha une seconde fois et lui réitéra l’ordre de manger, pour se préparer à un grand voyage. Le prophète obéit, et, fortifié par la nourriture qu’il avait prise, il marcha quarante jours et quarante nuits, jusqu’à la montagne d’Horeb. Il n’est pas certain que durant cet intervalle Élie ne prit aucune nourriture, quoiqu’on pense généralement que son jeûne égala Celui de Moïse. S’il mit quarante jours à faire un trajet qu’on peut parcourir en une dizaine de jours, c’est qu’il erra dans le désert à la manière des Israélites à l’époque de l’exode. Ce délai lui était donné pour éprouver et épurer sa foi et pour le préparer aux communications divines qu’il allait recevoir sur la montagne du Seigneur.

Élie entra pour la nuit dans une caverne de l’Horeb, probablement dans celle où Moïse vit passer la majesté divine. Exod., xxxiii, 22. Interpellé par le Seigneur, le prophète, qui était encore sous le coup de l’abattement, exhala ses plaintes sur la triste situation d’Israël, et il en appela à Jéhovah contre son peuple. Rom., XI, 2. L’alliance avec Dieu a été abandonnée, les autels ont été détruits, les prophètes tués ; Élie est resté seul, et on cherche à lui ôter la vie. Pour le réconforter, Dieu lui montra sa gloire et lui manifesta son esprit dans une

vision symbolique. Élie sortit de la caverne, et Jéhovah passa devant lui. Il s’éleva d’abord un vent fort et violent, qui fendait les montagnes et brisait les rochers ; mais Jéhovah n’était pas dans ce vent. Il y eut ensuite un tremblement de terre, dans lequel Jéhovah n’était pas encore. Parut du feu ; Jéhovah ne s’y manifestait pas. Élie entendit enfin le léger frémissement d’une douce brise, que Jéhovah accompagnait. III Reg., XIX, 1-12. Cette imposante théophanie signifiait que si l’ouragan, le tremblement de terre et l’incendie viennent du Seigneur, le précèdent et représentent sa justice irritée, ils ne font pas connaître son essence. Celle-ci est exprimée par la brise vivifiante. Assurément Jéhovah a la force et la puissance de châtier ses contempteurs ; mais dans sa bonté il préfère remplacer les châtiments sévères par les moyens de douceur et de miséricorde. Il donnait ainsi à son prophète une leçon de modération et de patience : Élie ne devait pas se décourager de l’insuccès de son zèle ni condamner tous les coupables. — Quand Jéhovah avait ainsi passé devant lui, Élie s’était couvert le visage de son manteau, par crainte et par respect. Comme il n’avait probablement pas saisi la signification complète de la théophanie, il entendit de nouveau la voix de Dieu, qui le pressait de continuer son ministère. Ses plaintes amères recommencèrent. Le Seigneur lui confia alors la mission d’oindre Hazaël comme roi de Syrie, Jéhu comme roi d’Israël, et Elisée comme prophète et son successeur. Élie ne remplit personnellement que la troisième de ces missions ; les deux premières furent accomplies plus tard par Elisée. IV Reg., viii, 19 ; ix, 1-6. Quoique ces trois personnages dussent être à des litres divers des ministres de ses vengeances, Dieu s’était réservé sept mille Israélites qui n’avaient ni fléchi le genou devant Baal ni baisé sa main. Israël n’était donc pas rejeté, et les restes de ce peuple devaient être sauvés par la grâce divine. Rom., xi, 4-5. Élie comprit enfin que Dieu ne voulait pas la perte d’Israël ; il quitta l’IIoreb et partit reprendre son ministère. Rencontrant Elisée, il le choisit pour son disciple. III Reg., xix, 13-21. Voir Elisée.

IV. Dernières actions d’Eue. — Il reparut bientôt devant Achab comme le justicier de Dieu. Le roi d’Israël avait spolié Nabolh de sa vigne. Voir t. i, col. 122. Au moment où il allait en prendre possession, Élie, sur l’ordre de Dieu, se dressa soudain sur le chemin, reprocha à Achab son crime et lui en annonça le juste châtiment. Le roi, surpris, brava la colère divine. Sans se laisser intimider, Élie répéta les plus terribles menaces. Achab, épouvanté, fit pénitence. Son repentir lui obtint une mitigation de la sentence. Élie lui prédit que les vengeances divines sur sa maison n’auraient leur plein accomplissement que sous le règne de son fils. III Reg., xxi, 17-29.

Élie eut encore à porter un message sévère à Ochozias, fils et successeur d’Achaz. Ayant fait une chute, ce roi impie envoya consulter Béelzébub, dieu d’Accaron. Voir t. i, col. 1547. Jéhovah prévint son prophète de cet acte d’idolâtrie et le chargea d’en annoncer au roi la punition. Élie alla à la rencontre des officiers royaux, et, se dressant à l’improviste devant eux, il leur reprocha le mépris qu’ils faisaient du Dieu d’Israël, et les chargea de dire à Ochozias qu’il ne guérirait pas et qu’il mourrait de sa chute. Sa mission remplie, il se retira rapidement. Les officiers ne connaissaient pas l’auteur de l’oracle. Ochozias s’enquit auprès d’eux de l’aspect et du vêtement de l’homme de Dieu. « C’est un homme, répondirent-ils, vêtu d’un tissu de poils, avec une ceinture de cuir sur les reins. » À cette description, le roi reconnut Élie le Thesbite, et il envoya un chef de cinquante hommes avec sa troupe pour l’arrêter. Celui-ci ayant trouvé l’homme de Dieu assis au sommet d’une montagne, il lui ordonna avec insolence et mépris, au nom du roi, de descendre. Élie répliqua : « Si je suis un homme de Dieu, que le feu du ciel te dévore, toi et les cinquante hommes. ».Et le feu du ciel les dévora à l’instant. Ce châtiment ne produisit chez

le roi que colère et obstination. Un second officier, qui se montra plus insolent encore que le premier, eut le même sort. On a accusé Élie de sévérité injuste et de cruauté. Mais il n’a pas agi par haine ou par vengeance personnelle ; il a voulu venger l’honneur de Dieu grossièrement outragé dans ses prophètes, et donner au roi et à son peuple une éclatante leçon de respect à l’égard des envoyés de Jéhovah. D’ailleurs, en condescendant si promptement aux vœux d’Élie, Dieu lui-même a justifié sa prière. Cependant Ochozias envoya une troisième troupe de cinquante hommes. Celte fois, le capitaine fut respectueux ; il se mit à genoux et demanda la vie sauve. Un ange encouragea Élie et lui dit de descendre sans crainte vers le roi. Élie obéit et répéta à Ochozias l’arrêt de mort qu’il lui avait fait transmettre précédemment. Il disparut aussitôt. TV Reg., i, 3-16.

Toutes les interventions publiques d’Élie dans le royaume d’Israël pour y détruire l’idolâtrie n’occupaient qu’une partie de sa vie. Le temps qui s’écoulait entre ses diverses comparutions devant les rois impies, il le passait dans la retraite et la solitude, au Carmel, si l’on en croit la tradition. Voir col. 294. Il joignait ainsi la vie contemplative à la vie active, et il formait des disciples voués à la pratique et à la diffusion du monothéisme. Il était le chef des écoles de prophètes qui existaient de son temps.

Voir ÉCOLES DE PROPHÈTES.

V. Enlèvement d’Eue. — Au moment où Dieu voulait ravir Élie à la terre, le prophète venait de quitter Galgala avec Elisée. Afin de ne pas avoir de témoin de son enlèvement, par humilité sans doute, il proposa durant le trajet à son disciple de le laisser aller seul à Béthel. Elisée refusa de l’abandonner. À Béthel, les fils des prophètes, qui connaissaient la prochaine disparition d’Élie, en prévinrent Elisée. Celui-ci, qui n’ignorait pas le sort réservé à son maître, leur imposa silence. Élie désirait continuer seul sa marche jusqu’à Jéricho. Elisée voulut encore l’accompagner. Les fils des prophètes de la communauté de Jéricho prévinrent en secret Elisée du prochain enlèvement d’Élie. Persévérant dans son dessein d’écarler tout témoin, celui-ci demanda de poursuivre seul jusqu’au Jourdain. Elisée s’attacha à ses pas, et les cinquante disciples de Jéricho les suivaient à distance. Parvenu au bord du fleuve, Élie frappa de son manteau les eaux, qui se divisèrent et laissèrent aux prophètes le passage à pied sec. Il offrit alors à son disciple le choix d’une dernière faveur. Elisée demanda le droit du fils aîné dans l’héritage paternel, c’est-à-dire une double part de l’esprit prophétique de son maître. Tout en ne se reconnaissant pas le pouvoir d’accorder l’objet de cette demande, Élie indiqua à Elisée un signe que son désir serait exaucé : si Elisée voit son maître au moment de son enlèvement, la double part demandée lui sera concédée. Or, tandis que les deux prophètes continuaient leur chemin et conversaient en marchant, un char et des chevaux de feu les séparèrent tout à coup, et Élie monta au ciel au milieu d’un tourbillon. Elisée surpris se mit à crier : « Mon père, mon père, char d’Israël et sa cavalerie ! » Quand il ne vit plus Elie, il déchira ses vêlements en signe de deuil. Il ramassa le manteau que son maître avait laissé tomber pour lui et en frappa les eaux du Jourdain, qui obéirent à la puissance miraculeuse dont il venait d’hériter et s’écartèrent pour lui livrer passage. IV Reg., ii, 1-14. Les fils des prophètes, qui avaient assisté de loin à l’enlèvement d’Élie, voulurent envoyer cinquante hommes robustes à la recherche de leur chef ; « car, disaient-ils, l’esprit du Seigneur l’a peut-être jeté sur une montagne ou dans une vallée. » Elisée, qui avait été témoin oculaire de la disparition d’Élie, déconseilla d’abord cette recherche et céda enfin aux instances de ses disciples. Les cinquante hommes, qui étaient allés de divers côtés, revinrent au bout de trois jours à Jéricho, après des démarches inutiles ; ils n’avaient pas re

C’est une tradition constante parmi les catholiques qu’Élie a été enlevé de terre corps et âme et qu’il n’a pas payé son tribut à la mort. Diverses opinions se sont produites relativement à la manière dont se fit son enlèvement et au lieu où il fut transporté. À la suite de saint Chrysostome, Hom. de Ascensione, n » 5, t. l, col. 450, certains commentateurs ont pensé que le char et les chevaux qui emportèrent Élie étaient réellement de feu. Cela ne ressort pas nécessairement du texte, qui, selon le sentiment le plus probable, décrit la vision telle qu’elle apparut aux yeux émerveillés d’Elisée, sans rien affirmer sur la nature desphénomènes. Aussi la plupart des exégètes pensent qu’un tourbillon lumineux et resplendissant a environné Elie et l’a ravi aux regards de son disciple. Quant au lieu où le prophète fut emporté, il est inconnu. Le texte hébreu dit simplement qu’Élie monta « au ciel » ; la version des Septante a traduit : mç et ? tot o-jpervôv, et les Pères latins ont admis la leçon correspondante de l’Italique : quasi in ceelum. L’auteur des Qusestiones et responsiones ad orlhodoxos, q. lxxxv, t. vi, col. 1323 ; saint Irénée, Cont. hser., v, 5, 1, t. vii, col. 1135 ; Terlullien, Adv. Marcion., v, 12, t. ii, col. 502, et saint Thomas, Sum. theol., 3° pars, q. xlix, a. v, ad 2*", pensent qu’Élie a été transporté à travers l’atmosphère au paradis terrestre. Saint Grégoire le Grand, Hom. xxix in Evangel., n" 5, t. lxxvi, col. 1216, et Rupert, De Trinit., iii, 23, t. clxvii, col. 321, placent son séjour dans une région terrestre ignorée. Il est plus sage avec Théodoret, Qussst. xlv in Gen., t. lxxx, col. 145, de ne pas décider en des matières sur lesquelles l’Écriture garde le silence. L’enlèvement d’Élie a été regardé par les premiers chrétiens comme une figure de la résurrection. Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, 2e édit., Paris, 1877, p. 272-273.

La date de l’enlèvement d’Élie est aussi inconnue. On le place généralement sous le règne de Josaphat. Quelques exégètes voudraient que le prophète fut encore vivant sur terre du temps de Joram, roi de Juda, parce qu’on apporta à ce roi un écrit d’Élie, qui lui annonçait la punition de son idolâtrie etde son fratricide. II Par., xxi, 12-15. Mais il est plus probable que Dieu avait révélé à Élie avant son enlèvement les crimes et le châtiment de Joram, et que le prophète avait consigné cette révélation dans un écrit, qu’il remit aux mains d’Elisée, en chargeant son disciple de le transmettre au roi de Juda. Clair, Les Paralipomènes, Paris, 1883, p. 318-319.

VI. ÉLIE DANS LES DERNIERS ÉCRITS DE L’ANCIEN TES-TAMENT et dams les Évangiles. — 1° En conservant Élie vivant, Dieu lui réservait pour la fin des temps une mission glorieuse, que le prophète Malachie, iv, 5-6, nous a fait connaître. Avant le grand et redoutable jour du Seigneur, c’est-à-dire avant le second avènement du Messie, Élie sera renvoyé sur terre. Sa nouvelle mission aura pour but de convertir le peuple juif. « Il rapprochera le cœur des pères de leurs enfants, et le cœur des enfants de leurs pères ; » il ramènera les Juifs, qui vivront alors aux sentiments et à la foi de leurs ancêtres. Saint Jérôme, In Malach., iv, 5-6, t. xxv, col. 1576-1577. C’est pourquoi le souvenir d’Élie est demeuré vivace dans la mémoire du peuple juif. Le premier livre des Machabées, ii, 58, loue son zèle pour la loi, qui lui a valu l’honneur d’être enlevé au ciel. L’auteur de l’Ecclésiastique, XL viii, 1-12, a fait de lui un magnifique éloge. Après avoir rappelé poétiquement ses actions merveilleuses, il mentionne et spécifie sa mission future. Élie reviendra un jour lv âÀeY|j.oî ; , « pour des avertissements, s afin de prêcher la pénitence ; il viendra « pour apaiser la colère du Seigneur, réconcilier le cœuidu père avec le fils et reconstituer les tribus de Jacob ». y. 10. H. Lesêtre, L’Ecclésiastique, Paris, 1884, p. 361. Celte mission sera remplie eï ; xaipo-jç, « aux temps » messianiques, non pas au début, mais à la fin de ces temps.

C’était l’annonce de la mission de saint Jean-Baptiste.

— 2° Au premier avènement du Sauveur, il y eut un homme qui devait marcher devant le Messie, « dans l’esprit et la puissance d’Élie, afin qu’il unisse les cœurs des pères et ceux des enfants », èv nv£-j|iaTt xal 6uvi|j.ei’HXtou, âm<rTpé’{iat xapic’on ; na-ipaiv èVi téxva. Luc, I, 17. Knabénbauer, Evangelium secundwn Lucam, Paris, 1896, p, 50-51. Saint Jean-Baptiste, qui est ainsi désigné, n’a l’esprit et la puissance d’Élie que parce qu’il remplira à ce premier avènement le rôle d’Élie au second avènement. Matth., xi, 14. Knabénbauer, Evangelium secundum Matlhseum, Paris, 1892, t.i, p. 440-441. C’est donc par une fausse interprétation de Malachie que les scribes contemporains de Jésus attendaient Élie comme le précurseur du Messie et regardaient sa venue comme un signe de la proximité des temps messianiques. Matth., xvii, 10 et 12 ; Marc, ix, 11. C’est dans la même persuasion qu’une partie du peuple juif prenait Jean-Baptiste d’abord, Joa., i, 21, Jésus ensuite, pour Élie, Matth., xvi, 14, Luc, ix, 8. Jésus cependant avait rectifié la pensée des scribes, en affirmant qu’Élie viendrait restaurer toutes choses à la fin des temps ; mais qu’un prophète semblable à Élie était déjà venu. Si Jean-Baptiste, en effet, n’était pas Élie en personne, il avait l’esprit d’Élie. Saint Grégoire le Grand, Hom. vil in Evangelium, t. lxxvi, col. 1100. Cf. Knabénbauer, Evangelium secundum Malthseum, t. ii, 1893, p. 87-88 ; Evangelium secundum Marcum, Paris, 1894, p. 236 237 ; Fillion, Évangile selon saint Matthieu, Paris, 1878, p. 340-341 ; Suarez, In 3 am part., q. 59, art. 6, disp. 55, sect. n (Opéra, édit. Vives, Paris, 1866, t. xix, p. 1050-1053) ; Noël Alexandre, Historia ecclesiastica V. T., Paris, 1699, t. ii, p. 185-187 ; L. Atzberger, Die christliche Eschatologie in den Stadien ihrer OJfenbarung im Alten und Neuen Teslamente, Fribourg-en-Brisgau, 1890, p. 160-161 et 306-307, et Geschichte der christlichen Eschatologie innerhalb der vornic&nischen Zeit, Fribourg-en-Brisgau, 1896, p. 148, 285, 293, 315-316, 430-431, 559-560, 568-569 et 603-404 ; [Alexis Desessarts], De l’avènement d’Elie, où l’on montre la certitude de cet avènement et ce qui doit le précéder, l’accompagner et le suivre, in-12, 1734 ; Traité de la venue d’Élie, in-12, Rotterdam, 1737. — 3° Quoique Élie n’ait pas été le précurseur du Messie, il eut cependant à remplir un office auprès de sa personne, lors de son premier avènement ; il fut témoin de sa transfiguration au Thabor. Il représentait l’ordre prophétique, et avec Moïse il rendait hommage au fondateur de la nouvelle alliance. Il apparut aux Apôtres brillant et transfiguré, lui aussi, dans son propre corps, et il s’entretint avec Jésus de sa passion et de sa mort. Matth., xvii, 3 ; Marc, ix, 3 ; Luc, ix, 30-31. — L’Église grecque et latine honore la mémoire d’Élie le 20 juillet. — Ce grand prophète a été l’objet de contes et de légendes ridicules. Voir d’Herbelot, Bibliothèque orientale, Paris, 1697, p. 491. On lui a attribué une Apocalypse apocryphe. Voir t. i, col, 763, et A. Harnack, Geschichte der altchristichen Litteratur bis Eusebius, t. i, Leipzig, 1893, p. 853-854 ; Die Chronologie der altchristlichen Litteratur bis Eusebius, t. i, Leipzig, 1897, p. 571-572. — Les rabbins croient qu’il exposera un jour les explications et les réponses qu’ils ont ajournées. Talmud de Jérusalem, Berakholh, i, 1, trad. Schwab, Paris, 1871, t. i, p. 5.

Bibliographie. — P. Dorothée de Saint-René, carme, Les grandeurs des saints prophètes Élie et Elisée, Paris, 1655 ; Acta sanctorum, t. xxxii, Paris, 1868, p. 4-22 ; P. Cassel, Der Prophet Elisa, Berlin, 1860, proleg. vuxvi ; Ms r Meignan, Les prophètes d’Israël. Quatre siècles de lutte contre l’idolâtrie, Paris, 1892, p. 179-248 ; Glaire, Les Livres Saints vengés, Paris, 1815, t. ii, p. 81-98 ; Clair, Les livres des Rois, Paris, 1884, t. i, p. 168-177 ; A. Clemen, Die Wunderberichte ûber Elia und Elisa in den Bûchern der Kônige, in-4°, Grimma, 1877, p. 13-31. E. Masgenqt.

ÉLIEL. Hébreu : ’Ëli’êl, « Dieu est ma force ; » Septante : ’E).£t7 ; X ; Codex Alexandrinus : ’EXtTJX. Nom de neuf Israélites.

1. ÉLIEL, un des chefs de la tribu de Manassé, à l’est du Jourdain, du temps de Jéroboam II, roi d’Israël. I Par., v, 21.

2. ÉLIEL, lévite de la branche de Caath, Bis de Thohu, ancêtre du prophète Samuel I Par., vi, 34 (hébreu, 19). Il paraît bien être le même personnage qu’Éliab de

I Par., vi, 27 (hébreu, 12), et Éliu de I Reg., i, 1.

3. ÉLIEL (Septante : ’EXi<]Xsf ; Codex Alexandrinus : ’EXitiXO, un des chefs de famille de la tribu de Benjamin qui habitèrent Jérusalem. Il était fils de Séméi. I Par., viii, 20.

4. ÉLIEL (Septante : ’EXerçX), autre chef de famille de la tribu de Benjamin, qui habita également Jérusalem.

II était fils de Sésac. I Par., viii, 22.

5. ÉLIEL (Septante : AsufjX ; Codex Alexandrinus : ’IeXiT|X), vaillant guerrier du temps de David. I Par., xi, 46. Il était Mahunite. Voir Mahunite, t. iv, col. 578.

6. ÉLIEL (Septante : AaXeiriX ; Codex Alexandrinus : ’AXiriX), autre vaillant guerrier du temps de David. Il était de Masobia. I Par., xi, 46 (hébreu, 47).

7. ÉLIEL (Septante : ’EX116 ; Codex Alexandrinus : ’EXiiîX), un des chefs de la tribu de Gad qui se joignirent à David pendant la persécution de Saûl. I Par., xil, 11.

8. ÉLIEL (Septante : ’Evïjp ; Codex Sinaiticus : ’Ev^X ; Alexandrinus : ’EXitjX), lévite, chef de la famille de Hébron, à l’époque du transport de l’arche de la maison d’Obédédom à Jérusalem. I Par., xv, 9. Il était du nombre des chefs de lévites chargés de porter l’arche, ꝟ. 11.

9. ÉLIEL (Septante : ’IeînjX ; Codex Alexandrinus : ’IeiiqX), un des lévites du temps d’Ézéchias, chargés en sous-ordre de l’inspection des dîmeset des dons sacrés. II Par., xxxi, 13.

ÉLIÉZER. Hébreu : ’ËlVézér, « mon Dieu est secours ; » Septante : ’EXtÉÇep. Nom de onze Israélites.

1. ÉLIÉZER, serviteur ou esclave d’Abraham. Il est nommé une seule fois par son nom, à l’occasion des promesses que Dieu renouvelle au patriarche après sa victoire sur Chodorlahomor : « Seigneur, mon Dieu, dit Abraham à Jéhovah, qui vient de lui promettre d’être sa récompense très grande, que me donnerez - vous ? Je mourrai sans enfants, et le. fils de l’intendant de ma maison, ce Damascus Éliézer… » Gen., xv, 2. Le texte primitif a dû subir ici quelque altération, car la phrase est inachevée et doit sans doute être complétée par la fin du verset suivant, lequel pourrait bien être une glose explicative du précédent : « …Et voilà que mon esclave sera mon héritier. » L’hébreu bén méSéq, que la Vulgate a traduit par « le fils de l’intendant », a été compris de diverses manières. Les Septante ont : « le fils de Mésec (ma servante). » D’autres lisent : « le fils de l’intendance, » c’est-à-dire l’intendant. — Ce verset offre encore une autre difficulté. Damascus, Aa|iâ<rxoç, est un substantif et non un adjectif signifiant Damascène. Plusieurs ont donc pensé qu’il fallait traduire : « Damascus, [fils d’] Éliézer. » D’autres voient dans ce mot la répétition du mot méSéq, employé immédiatement avant. La forme Damméséq, Damascus, proviendrait de la substitution du d initial au démonstratif hé, opérée conformément au goût des Araméens pour les dentales. Voir, sur cette tendance, F. Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste,

4e édit., t. v, p. 431. Nous aurions donc d’après eux : « Cet intendant Éliézer. » On pourrait encore admettre, selon d’autres, que le nom de Damas fut ajouté comme un surnom à celui d’Éliézer, en souvenir peut-être de l’origine de cet esclave, dont Abraham aurait fait l’acquisition en passant par Damas dans son voyage de Haran en Chanaan. Voir D. Calmet, Commentaire littéral sur la Genèse, Paris, 1707, p. 35-37 ; Cornélius a Lapide, In Genesim, Migne, t. v, col. 385 ; de Hummelauer, Comment, in Genesim, Paris, 1895, p. 387-388 ; Keil, The Pentateuch, Edimbourg, 1872, t. i, p. 211.

On s’accorde en général à reconnaître Éliézer dans le serviteur à qui Abraham confie, Gen., xxiv, 2-4, l’importante et délicate mission d’aller de sa part chercher en Mésopotamie une épouse pour son fils Isaac. La Vulgate l’appelle le plus ancien des serviteurs ; l’hébreu dit s l’ancien », expression qui paraîtrait indiquer le rang plutôt que l’âge, et qu’en conséquence Onkélos a rendue par « intendant ». Si cette traduction était la vraie, elle suffirait pour établir l’identité de ce serviteur d’Éliézer, communément admise. — Pour bien faire comprendre à son serviteur la gravité de l’affaire dont il allait le charger, le patriarche exigea de lui un serment solennel, qui n’a d’analogue dans l’histoire sainte que celui de Joseph prononcé auprès du lit de mort de Jacob. Gen., xlvii, 29-31. Place ta main sous ma cuisse, lui dit-il, afin que je t’adjure par le Seigneur, Dieu du ciel et de la terre. » Gen., xxiv, 2-3. Et Abraham lui fit jurer de ne choisir pour épouse d’Isaac aucune femme chananéenne, mais de lui en procurer une dans sa patrie, au delà de l’Euphrate, et dans sa famille. Le mariage d’Isaac étant un moyen d’assurer la conservation de la postérité choisie, dans laquelle devait se trouver un jour le Messie, les Pères ont pensé que le cérémonial employé par le saint patriarche était une action symbolique rappelant à la fois la grande promesse de Dieu et le sceau de la circoncision qui confirmait cette promesse. Gen., xvii, 1-19 ; xxii, 18 ; Rom., iv, 11-13. Voir Théodoret, Qusest. txxirin Gènes., Paris, 1642, p. 253. Éliézer prêta le serment exigé, après avoir reçu de son maître des éclaircissements que sa conscience lui inspirait de demander ; puis il partit, emmenant avec lui dix chameaux chargés de richesses, et se dirigea vers la ville de Haran en Mésopotamie, où Nachor habitait. Gen., xxiv, 5, 9-10.

Arrivé aux portes de Haran, il fit plier les genoux à ses chameaux (hébreu) auprès d’un puits, pour le repos de la nuit. C’était le soir, à l’heure où les femmes ont coutume de sortir de la ville pour aller puiser de l’eau. Éliézer connaissait cet usage, commun en Orient, cf. Exod., Il, 16 ; I Reg., iv, 11, et que nos voyageurs modernes ont trouvé encore en vigueur à Haran même. Voir F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6 8 édit., t. i, p. 449-450. Cf. Cruche, col. 1137. Aussi la coïncidence de l’arrivée d’Éliézer avec celle des jeunes Syriennes qu’il rencontra au puits n’a-t-elle rien de fortuit, comme on le voit d’ailleurs par la prière qu’il adresse à Dieu, et dans laquelle il commence par déclarer que les jeunes filles de la ville vont venir puiser de l’eau. Il dit ensuite à Dieu : « Que la jeune fille à laquelle je dirai : Inclinez votre urne afin que je boive, et me répondra : Buvez ; je donnerai aussi à boire à vos chameaux, soit celle que vous avez préparée pour être l’épouse de votre serviteur Isaac. Ce sera à ce signe que je connaîtrai que vous avez fait miséricorde à mon maître. » Gen., xxiv, 11-14.

Quelque étonnante que puisse paraître cette demande adressée au Seigneur par un homme, il n’y faut point voir une sorte de tentation de Dieu ; c’est un acte de foi profonde, tel qu’on en rencontre du reste plusieurs dans ; l’histoire des Hébreux. Cf. Jud., vi, 36 ; I Reg., xiv, 9. Dieu lui-même a justifié ces hardiesses de la foi par l’heureux succès accordé aux vœux de ses serviteurs. En ce qui regarde Éliézer, à peine avaitil formé dans son cœur la prière que lui dictait son zèle pour le bonheur

de son maître, qu’une jeune vierge d’une grande beauté, Rébecca, fille de Bathuel et petite-fille de Nachor, parut, remontant de la fontaine une cruche sur son épaule. Éliézer alla au-devant d’elle et lui demanda à boire. D’après la tradition juive conservée par Josèphe, Ant. jud., i, xvi, 2, Éliézer aurait déjà adressé la même prière aux compagnes de Rébecca, qui auraient refusé de lui rendre ce service. Tout autre fut l’accueil que lui fit la fille de Bathuel : « Buvez, seigneur, » lui dit-elle en faisant passer rapidement la cruche de l’épaule sur le bras ; et lorsqu’il eut bu, elle ajouta : « Je vais aussi puiser de l’eau pour vos chameaux jusqu’à ce qu’ils aient tous bu. » Elle se mit immédiatement à l’œuvre, tandis qu’Éliézer la considérait en silence pour voir si le signe qu’il avait proposé à Dieu se réaliserait jusqu’au bout. Il comprit alors que sa prière était exaucée et offrit des présents à Rébecca. Celle-ci lui assura qu’il trouverait une cordiale hospitalité dans la maison de son père et courut aussitôt dans la tente de sa mère raconter ce qui s’était passé. Pendant ce temps, Éliézer, resté auprès de la fontaine, bénissait le Seigneur et le remerciait. Laban, frère de Rébecca, vint le prendre et l’amener dans sa demeure, où il lui servit à manger. Voir Bathuel, t. i, col. 1508. Mais Éliézer déclara qu’il ne toucherait à aucun aliment avant d’avoir exposé l’objet de sa mission. Il commença donc, sur l’invitation de Laban, à raconter en détail tout ce qui s’était passé depuis l’ordre qu’il avait reçu de son maître de partir pour Haran jusqu’au moment présent. Il termina son récit en demandant pour Isaac la main de Rébecca. Laban et Bathuel reconnurent dans cette suite de faits la main de Dieu, qui dirige tous les événements, et agréèrent cette demande. Éliézer se prosterna pour adorer Dieu et fit ensuite à la fiancée de riches présents ; il en distribua aussi à sa mère et à ses frères (à son frère, disent l’hébreu et les Septante). On célébra par un joyeux festin l’heureux succès de la mission d’Éliézer. Il ne restait plus maintenant à ce fidèle serviteur qu’à ramener auprès d’Abraham l’épouse de son fils. C’est ce qu’il s’empressa de faire en repartant le lendemain, malgré l’insistance de ses hôtes pour le retenir. Au terme de son voyage, il rencontra Isaac au milieu des champs, et, après lui avoir rendu compte de sa mission, il lui présenta l’épouse souhaitée par Abraham. À partir de ce moment, il n’est plus question d’Éliézer dans le récit sacré. — Deux grandes vertus recommandent Éliézer : sa foi vive et son admirable dévouement à Abraham. Ce dévouement va jusqu’à la plus complète abnégation. Gen., xv, 2-3, comparé avec xxiv, 36. Le nom de son maître revient à chaque instant dans ses prières à Dieu et dans ses discours avec les hommes. Gen., xxiv, 12, 14, 27, etc. ; il parle de lui avec une sorte de fierté et une visible complaisance. Gen., xxiv, 34-35. E. Palis.

2. ÉLIÉZER, ^second fils de Moïse et de Séphora. Il naquit dans le pays de Madian, et son père lui donna ce nom parce que Dieu avait été son secours et l’avait délivré de l’épée du pharaon. Exod., xviii, 4 ; I Par., xxiii, 15. Quand Moïse rentra en Egypte, il voulut y amener ses deux fils ; mais, après la circoncision de l’aîné, il les renvoya à son beau-père Jéthro, qui les lui ramena après la sortie d’Egypte. Exod., iv, 20, 26 ; xviii, 2-6. Éliézer n’eut qu’un fils, Rohobia, dont la postérité fut très nombreuse. I Par., xxiii, 17. À l’époque de David, un de ses descendants, Sélémith, fut chargé de la garde des choses consacrées au Seigneur. I Par., xxvii, 25-26.

3. ÉLIÉZER, fils de Bechor, le fils de Benjamin, d’après le texte hébreu et les versions dans I Par., vii, 6. Voir Benjamin et Bechor.

4. ÉLIÉZER, prêtre, qui jouait de la trompette devant l’arche du Seigneur, quand David la fit transporter de la maison d’Obédédom à Jérusalem. I Par., xv, 21.

5. ÉLIÉZER, fils de Zéchri, et chef de la tribu de Ruben sous le règne de David. I Par., xxvii, 16.

6. ÉLIÉZER, prophète, fils de Dodaû de Marésa, dans la tribu de Juda. Quand Josaphat s’allia avec le roi d’Israël, Ochozias, pour construire des vaisseaux et faire une expédition à Ophir, le prophète Éliézer l’en reprit au nom du Seigneur ; et il lui prédit que les vaisseaux seraient brisés et que l’entreprise échouerait. II Par., xx, 35-37. Aussi quand Ochozias voulut tenter une autre expédition, Josaphat, se souvenant des paroles d’Éliézer, refusa d’y donner son concours. III Reg., xxii, 50.

7. ÉLIÉZER, un des chefs de familles qu’Esdras envoya du fleuve Ahava vers Eddo, chef des captifs résidant à Casphia, afin d’engager des Nathinéens et des Lévites vivant sous sa domination à se joindre aux enfants d’Israël qui profitaient de l’édit d’Artaxerxès pour se rendre à Jérusalem.

8. ÉLIÉZER, prêtre qui au retour de la captivité renvoya la femme étrangère qu’il avait prise contre la loi. I Esdr., x, 18.

9. ÉLIÉZER, lévite qui suivit l’exemple du précédent. I Esdr., x, 23.

10. ÉLIÉZER, Israélite qui eut aussi à répudier la femme étrangère qu’il avait épousée contre la loi pendant la captivité. I Esdr., x, 31.

11. ÉLIÉZER, fils de Jorim, un des ancêtres de Jésus-Christ dans la généalogie de saint Luc, iii, 29.

E. Levesque.

12. ÉLIÉZER, ben Eliyàhù, surnommé Aschkenazi ou l’Allemand, rabbin juif. Voir Aschkenazi, 1. 1, col. 1075.

    1. ÉLIHOREPH##

ÉLIHOREPH (hébreu : ’Ëlihôréf, t mon Dieu récompense ; » Septante : ’EXidtp ; Codex Alexandrinus : ’Evapécp), fils de Sisa, scribe à la cour de Salomon. III Beg., iv, 3.

. ÉLIM (hébreu : ’Êlim, Exod., xvi, 1 ; avec hé local, ’Êlirnâh, Exod., xv, 27 ; Num., xxxiii, 9 ; Septante : Alldy.), deuxième station des Israélites dans le désert, après le passage de la mer Rouge. Exod., xv, 27 ; xvi, 1 ; Num., xxxiii, 9. Ce nom dérive de la racine’ûl ou’il, « être fort ; » d’où « un arbre vigoureux », chêne ou térébinthe. Au pluriel, il indiquerait ici « les grands arbres » du désert, c’est-à-dire les soixante-dix palmiers mentionnés par l’Écriture. Exod., xy, 27 ; Num., xxxiii, 9. Une autre forme du pluriel est’Êlô( (’Êlaf), qui désigne le port septentrional du golfe Élanitique. Cf. Stanley, Sinaï and Palestine, in-8°, Londres, 1866, p. 519. — Élim est placée après Mara, généralement identifiée avec Aïn Haouarah, Exod., xv, 23, et elle est décrite en ces deux mots par la Bible : « Les enfants d’Israël vinrent à Élim, où il y avait douze sources {’ènôf) et soixante-dix palmiers, et ils y campèrent près des eaux. » Exod., xv, 27 ; Num., xxxm, &. C’était donc une oasis qui offrait naturellement aux Hébreux un lieu de repos. Mais où se trouvait-elle ? Les opinions se partagent entre les vallées qui se suivent, dans la direction du sud-est, à partir d’Ain Haouarah, c’est-à-dire les ouadis Gharandel, Ouseit, Schébéikék et Taiyibéh.

1° On s’accorde généralement aujourd’hui à placer Élim à l’ouadi Gharandel, situé à quatre-vingt-six kilomètres d’Aïoun Mouça, à deux heures d’Ain Haouarah (fig. 549). Un ruisseau perpétuel, où coule uneeau limpide, y entretient des palmiers sauvages (nakhl), des tamaris et d’autres plantes du désert. Au printemps, c’est-à-dire à l’époque où les Israélites passaient en cet endroit, le ruisseau se subdivise et forme des étangs entourés de joncs où abondent

les oiseaux. M. S. Bartlett, From Egypt to Palestine, in-8°, NewYork, 1879, p. 204-205, décrit ainsi Élim, qu’il visita le 10 février 1874 : « Notre camp était au milieu de tamaris, que dominaient cinq petits palmiers… Le ruisseau était à quelque distance. Dans le lit occidental de l’ouadi, l’eau jaillissait de terre à deux endroits peu éloignés l’un de l’autre ; un peu plus bas, elle sourdait aussi au bord du ruisseau ou dans son lit ; elle se divise en deux ou trois petits bras, où elle coule en murmurant. Les calculs que nous fîmes sur place nous firent tomber d’accord que la fontaine donnait au moins deux tonnes d’eau par minute, à cent quarante mètres de la source. Il est probable qu’un examen sérieux nous aurait

2° Cependant M. L. de Laborde, Commentaire géographique sur l’Exode et les Nombres, in-f°, Pa.ïs, 1841, p. 85, et J. Wilsori, The Lands of the Bible, 3 in-8°, Edimbourg, 1847, t. i, p. 174, placent Élim dans l’ouadi Ouseit ou Ossaita. Le premier en donne les raisons suivantes : 1. À partir de Haouarah, la route naturelle des Israélites traverse l’ouadi Gharandel dans sa partie supérieure ; mais elle ne descend pas vers la mer, à l’endroit où se trouvent les sources et les palmiers, ce serait donc un détour. 2. La distance de Haouarah à l’ouadi Gharandel n’est que de deux lieues, ce qui est trop peu pour une journée de marche. 3. Des sources de Gharandel à la station, près de la mer, il y a une journée de quatorze

M9. — Vue de l’ouadi Gharandel. D’après ira » photographie.

fait découvrir plus bas d’autres sources… A^ant traversé le ruisseau, pour me diriger au nord-ouest vers un autre bouquet d’arbres, j’y comptai environ trente jeunes palmiers et dix vieux troncs dont quelques-uns portaient encore des traces de feu. Bonar, en 1855, avait compté en cet endroit quatre-vingts palmiers et s’était arrêté après avoir atteint ce chiffre. Tout autour de ce large espace, l’eau se trouvait à une petite profondeur. Deux endroits ressemblaient à des puits qui auraient été comblés. Quelques petits oiseaux gazouillaient tout autour ; je cueillis deux espèces de fleurs à cette époque si peu avancée de l’année… Nous trouvâmes l’eau excellente, aussi bonne que celle du Nil. Nulle part, dans la péninsule, excepté à l’ouadi Feiran, elle n’est aussi abondante. s Cf. F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., Paris, 1896, t. ii, p. 456 ; E. H. Palmer, The désert of the Exodus, Cambridge, 1871, t. i, p. 273 ; E. Hull, Mount Seir, in-8°, Londres, 1889, p. 36 ; G. Ebers, Durch Gosem zum Sinai, in-8°, Leipzig, 1881, p. 128 ; Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres. 1856, t. i, p. 68, 69.

lieues, beaucoup trop forte pour les Israélites, et qu’une caravane de chameaux chargés pourrait difficilement parcourir. Ces trois objections, ajoute-t-il, ne se trouvent point dans la position d’Ossaita, et pendant le séjour des Israélites dans cette vallée, qui serait alors Elim, rien n’empêchait les bergers de pousser leurs troupeaux jusque dans les pâturages de l’ouadi Gharandel. — Ces arguments sont loin d’être péremptoires. On peut répondre, d’une manière générale, que les étapes des Hébreux n’étaient pas réglées comme celles d’une troupe régulière, et qu’elles étaient moins déterminées par la distance que par l’abondance des eaux et de la végétation, si nécessaires pour une immense multitude et assez rares dans le désert. Or l’ouadi Gharandel, de l’aveu de tous les voyageurs, est une des plus belles oasis de la péninsule, l’emportant sur l’ouadi Ouseit par sa largeur, le nombre de ses sources et de ses palmiers, la qualité de ses eaux. Si M. de Laborde admet que les bergers israélites pouvaient, pendant leur campement dans cette dernière vallée, mener leurs troupeaux dans la première, en rebroussant chemin, il est plus naturel de supposer

que, pendant le séjour dans l’ouadi Gharandcl, ils allèrent, par une marche en avant, utiliser les richesses de l’ouadi Ouseit, distant de l’autre de deux heures et demie seulement. Enfin, rien n’indique d’une manière précise où fut la station près de la mer, et l’auteur, en la plaçant à quatorze lieues, donne une assertion gratuite. L’étude des lieux permet de croire que le peuple, se dirigeant vers le Sinaï, suivit le chemin qui passe sur les hauteurs, au pied du Djebel Hammam -Fir’oun, pour descendre de là vers la côte par le premier sentier praticable, c’est-à-dire par l’ouadi Schebeikéh et par l’ouadi Taiyibéh. Il est probable que le quartier général de Moïse était aux sources et aux palmiers de celle dernière vallée, à trente kilomètres environ de l’ouadi Gharandel. La distance, on le voit, bien qu’assez considérable encore, est moitié moindre. Il est permis d’ailleurs de supposer qu’après le long repos qu’on avait pris à Élim, on ne recula pas devant une marche assez longue pour arriver à un campement commode. — M. L. de Laborde est plus dans le vrai quand il combat l’opinion de Thévenot, Shaw et Niebuhr, qui veulent chercher Élim à Tor, bien plus bas, sur les bords de la mer. Elle est tellement invraisemblable, qu’il nous paraît inutile de la discuter.

3° Lepsius, Briefe aus JEgypten, éthiopien und der Halbinsel des Sinai, Berlin, 1852, p. 343, a voulu identifier Élim avec l’ouadi Schebeikéh, et H. Ewald, Geschichle des Volkes Israël, Goettingue, 1865, t. ii, p. 142, avec l’ouadi Taiyibéh. Ces deux vallées communiquent entre elles, et leur point de jonction est éloigné de quatre heures de l’ouadi Ouseit. La principale raison de Lepsius est aussi fausse que singulière. D’après lui, les douze puits d’Élim auraient été des citernes ; il faudrait donc chercher la station dans un endroit sans eau de source, ce qui convient à Schebeikéh. L’hébreu porte formellement’énôt maîm, « des sources d’eau, » ce qui indique des fontaines et non de simples réservoirs. Cf. G. B.Winer, Biblisches Reàlwàilerbuch, Leipzig, 1847, t. i, p. 320.

— Reste donc toute probabilité pour ouadi Gharandel, que les voyageurs anciens regardaient déjà comme la station d’Élim. Tel e§t le sentiment de Breydenbach, cité par L. de Laborde, Comment, géogr. sur l’Exode, p. 85 : « La nuyt venue, appliquâmes à un torrent apele Orondem (Garandel), la ou nous tendimes nos tentes pour les eaux qui estaient la et demourames la pour la nuyt. Auquel lieu sont plusieurs fontaines vives ayant eau clere et bonne et plusieurs palmiers de quoy nous avions suspicion assez véhémente que ne fut le désert de Helym. »

A. Legendre.

2. ÉLIM (PUITS D’) (hébreu : Be’êr’ÊUm ; Septante : A’tXei|t), lieu mentionné dans Isaïe, xv, 8, dans un oracle contre Moab. Voir Béer-Éum, 1. 1, col. 1548.

    1. ÉLIMÉLECH##

ÉLIMÉLECH (hébreu : ’Èlimélék, « Dieu est roi » [cf. Humilku, messager du gouverneur de Tyr, dans les lettres de El-Amarna, Proceedings of the Society of Biblical Archœology, t. xv, 1893, p. 50(3-508] ; Septante : ’EitfiéXsx), homme de la tribu de Juda, originaire de Belhléhem, mari de Noémi et parent de Booz. Rulh, i, 2 ; ii, 1, 3 ; iv, 3, 9. Une grande famine l’obligea de s’éloigner de Betliléhem, avec sa femme et ses deux fils, Mahalon et Chélion, et de se retirer dans le pays de Moab. Mais il y mourut bientôt, et ses fils se marièrent à deux Moabites, Orpha et Ruth. Ruth, i, 1, 3.

    1. ÉLIODA##

ÉLIODA, nom d’un fils de David, II Reg., v, 16, nommé ailleurs Éliada. Voir Éluda 2.

ÉLIOÉNAÏ. Hébreu : ’Élyô’ênay, « vers Jahveh mes yeux. » Nom de sept Israélites.

1. ÉLIOÉNAl (Septante : ’E/.etôaydc ; Codex Alexandrinus : ’EUuirpai), fils de Naaria, dans la descendance de Zorobabel. Il eut sept fils. I Par., iii, 23, 24. Dans le

texte hébreu, il n’est pas dit clairement que ce soit dans la descendance directe de Zorobabel. P. de Broglie, Les généalogies bibliques, dans Congrès scientifique international des catholiques, de 1888, t. i, p. 139.

2. ÉLIOÉNAl (Septante : ’EXiwvat’; Codex Alexandrinus : ’EXturvr.i), chef de famille dans la tribu de Siméon. I Par., iv, 36.

3. ÉLIOÉNAl (Septante : ’EXetôatvâv ; Codex Alexandrinus : ’E), iwiriva()i un des fils de Béchor, fils de Benjamin, d’après I Par., vii, 8. Il était chef de famille.

4. ÉLIOÉNAl (hébreu : ’Elyehô" ênay ; Septante : ’EXiuvotk ; Codex Alexandrinus : ’Eltuntvai), lévite, septième fils de Mésélémia, dans la descendance de Coré, et portier du Temple. I Par., xxvi, 3, 12.

5. ÉLIOÉNAl (hébreu : ’ÊlyeUô’ênay ; Septante : ’EXiavi), fils de Zarehe, chef de la famille des Phahath-Moab, revint de Babylone avec Esdras, à la tête de deux cents hommes. I Esdr., viii, 4.

6. ÉLIOÉNAl (Septante : ’EXitova ; Codex Alexandrinus : ’EXi[tfii)vas)> prêtre, de la descendance de Pheshur, qui au retour de Babylone renvoya la femme étrangère qu’il avait prise contre la loi. I Esdr., x, 22. Probablement c’est le même Élioénaï qui accompagna Néhémie dans la dédicace des murs de Jérusalem et joua de la trompette. II Esdr., xii, 40.

7. ÉLIOÉNAl (Septante : ’EXtwvi ; Codex Alexandrinus : ’EXtwT)vai ; Sinaiticus : ’EXtwvâv), Israélite de la famille de Zéthua, qui se sépara de la femme étrangère qu’il avait prise pendant la captivité. I Esdr., x, 27.

E. Levesque.

    1. ÉLIPHAL##

ÉLIPHAL (hébreu : ’Ëlîfal, « Dieu juge ; » Septante : ’EXçixt ; Codex Alexandrinus : ’E).i<p » âX), fils d’Ur, un des trente braves de David. I Par., xi, 35. Dans le lieu parallèle, II Reg., xxiii, 31, on lilÊliphélet. Voir Éliphélet 1.

ÉLIPHALETH. Hébreu : ’Ëlifêlét, et à la pause’Ëlifêlét, « Dieu est refuge. » Nom de trois Israélites.

1. ÉLIPHALETH (Septante : ’EXeiçàaO ; Il Reg., v, 16 : ’E|/, <pâXer ; Codex Sinaiticus : ’ËvçiXer ; Alexandrinus : ’ËXiçâXer), le dernier fils de David, qui naquit à Jérusalem, II Reg., v, 16 ; I Par., xiv, 7 ; comme dans I Par., iii, 8, le nom ne se trouve pas à la pause, il est ponctué’Ëlifêlét : de là le nom Éliphéleth de la Vulgale dans cet endroit.

2. ÉLIPHALETH (Septante : ’EXsupctXot), autre fils de David, d’après 1 Par., iii, 7, et aussi d’après I Par., xiv, 5, où on lit la forme abrégée Elpâlet. Mais ce nom manque dans la liste de II Reg., v, 16. L’absence en cet endroit d’un nom porté par un autre fils de David rend son insertion suspecte dans les Paralipomènes. On dit néanmoins que cet Éliphaleth a pu mourir jeune et sans enfants, et qu’on a donné alors son nom à un autre enfant né plus iard, pour le conserver dans la famille. Cette hypothèse donne peut-être raison de la répétition du même nom dans cette énumération des fils de David, mais n’eSplique pas son absence dans la liste de II Reg., v, 14-16. Une répétition par erreur de copiste est aussi vraisemblable.

3. ÉLIPHALETH (Septante : ’EXi ?âXei « ; Codex Alexandrinus : ’EX(faXei), troisième fils d’Ésec, dans la descendance de Saül par Jonathas. I Par., viii, 39.

E. Levesque.

    1. ELIPHALU##

ELIPHALU (hébreu : ’Elifelêhû, « celui que Dieu distingue ; » Septante : ’EXstçEvi, ’Evçavat’ac ; Codex Alexandrinus : ’EXtfaXi), lévite, parmi les musiciens

du second ordre, qui accompagnèrent le transport de l’arche de la maison d’Obédédom à la cité de David. Il jouait du kinnor. I Par., xv, 18, 21.

ÉLIPHAZ. Hébreu : Êlifaz ; Septante : ’EX-.ipic. Nom de deux personnages, étrangers au peuple d’Israël.

1. ÉLIPHAZ, fils aîné d’Ésaû par Ada. Il eut cinq fils : Théman, Omar, Sépho, Gatham et Gênez ; et d’une concubine nommée Thamna il eut encore Amalech. Gen., xxxvi, 10, 11, 12, 15, 16 ; I Par., i, 35, 36.

2. ÉLIPHAZ, un des trois amis qui vinrent consoler Job dans son malheur et discutèrent avec lui sur les causes de la souffrance dans cette vie. Job, ii, 11. Le texte sacré l’appelle le Thémanite. Le nom de Théman, qui était peut-être également le nom d’une ville, désignait une région de l’Arabie Pétrée continant à l’Idumée méridionale. Jer., xlix, 20 ; Hab., iii, 3 (hébreu). Elle devait son nom à Théman, petit-fils d’Ésaii par son père Éliphaz. Gen., xxxvi, 4 ; I Par., i, 35-36. C’est ce qui a fait penser que l’ami de Job était un descendant de cet autre Éliphaz et de Théman, et par conséquent d’Ésaû. Les hommes de son pays jouissaient d’une grande renommée de sagesse dans l’antique Orient. Jer., xlix, 7, Cf. Bar., iii, 22-23 ; Abd., 8 (hébreu). Éliphaz justifie en sa personne cette bonne réputation, comme on peut en juger par la gravité et la calme dignité de ses discours. Il semble même avoir eu trop conscience de cette valeur personnelle, qui lui donnait, peut-être conjointement avec son âge, la prééminence sur ses deux compagnons, Baldad et Sophar. Job, xv, 9-10. — C’est lui qui dirige, peut-on dire, la discussion. II ouvre chacune des trois séries de discours échangés entre Job et ses « importuns consolateurs », Job, xvi, 2 ; Baldad et Sophar ne font guère que reproduire sous d’autres formes et sur un autre ton ses arguments ou plutôt son argument. Car il n’a guère qu’une idée, présentée sous différents aspects et délayée dans de longs développements : l’homme droit et innocent ne saurait périr, c’est le méchant seul qu’atteint la douleur, et l’on ne souffre en cette vie que ce que l’on a mérité. Job, IV, 7-9, etc. D’ailleurs nul n’est innocent devant Dieu, de qui la sainteté et la majesté sont incomparables. Job, IV, 17-19 ; xv, 12-16.— Éliphaz parle d’abord à Job comme un ami plein de compassion pour son malheur, et, quoique bien convaincu que ce malheur est mérité, il le lui insinue plutôt qu’il ne le lui reproche ; il ne le met en cause que d’une manière indirecte en discourant sur le châtiment inévitable du méchant, sur la sainteté et la justice de Dieu et aussi sur sa bonté ; car Dieu lui rendra sa prospérité passée, s’il sait profiter de la correction présente. Mais lorsque Job s’est justifié et a réfuté son raisonnement et celui de Baldad et de Sophar, Éliphaz change de ton ; son langage devient aigre et violent, et Job peut aisément se reconnaître dans le portrait de l’impie qui attaque Dieu et finit par être écrasé par cette toute - puissance qu’il a bravée. Job, XV. Enfin après que Job a clairement démontré qu’il n’est nullement coupable des fautes qu’on lui impute, Éliphaz, à bout de raisons, perd toute mesure et se répand contre son ami en reproches et en accusations aussi gratuites qu’injurieuses. Il termine cependant en l’exhortant à se convertir et en lui promettant de nouveau le retour de la prospérité en récompense de sa conversion. Job, XXII. — Dieu réservait à Éliphaz une leçon qui devait humilier sa sagesse trop présomptueuse. Le vieillard de Théman, déjà réduit au silence par Job, dut s’incliner sous la sévère réprimande de Dieu même l’interpellant par son nom pour lui manifester son courroux contre lui et ses deux amis. Pour comble d’humiliation, Dieu l’obligea de lui offrir, avec Baldad et Sophar, un sacrifice de sept taureaux et de sept béliers par les mains de ce Job, tout à l’heure objet de leur injuste dédain, et

maintenant leur intercesseur nécessaire pour apaiser la colère divine. Job, xlii, 7. E. Palis.

ÉLIPHÉLETH. Hébreu : ’Èlifélét (même nom que’Elifâlef, avec la seule différence de la voyelle â, demandée par la pause). Nom de quatre Israélites.

1. ÉLIPHÉLETH (Septante : ’AXi-tpiXeO ; Codex Alexandrinus : ’EXifàXEr), fils d’Aaasbaï, un des vaillants guerriers de David. II Reg., xxiii, 34. Dans le passage parallèle I Par., xi, 35, il est appelé Éliphal, fils de Ur. bs’bM, ’Elifal, est le même nom que obsÔN, ’Elîfélét, moins la dernière lettre, omise probablement par distraction. Et Aasbaï, >3cnN, le nom de son père d’après le récit des Rois, vient peut-être de l’union du nom de Ur avec le mot suivant du texte, isn tin, ’Ur héfér, mal lu. Voir Machati 2, t. iv, col. 505.

2. ÉLIPHÉLETH, nom du dernier fils de David, I Par., m, 8, appelé Éliphaleth II Reg., v, 16. Voir Éuphaleth 1.

3. ÉLIPHÉLETH (Septante : ’AX=t ?âr), un des chefs de famille, de la descendance d’Adonicam, qui revint avec Esdras. I Esdr., viii, 13.

4. ÉLIPHÉLETH (Septante : ’E^Eiçàveô ; Codex SinaiticHs : ’EXet$â>E9 ; AJexandrinus : ’EXtcpâXEx), Israélite, un des fils de Hasom, qui répudia la femme qu’il avait prise contre la loi. I Esdr., x, 33. E. Levesque.

    1. ÉLISA##

ÉLISA (hébreu : ’Ëlîsâh ; Septante : ’EXtirâ, Gen., X, 4 ; I Par., i, 7 ; ’EXeio-kî, Ezech., xxvil, 7) ; le premier des fils de Javan, descendant de Japheth. Gen., x, 4 ; I Par., i, 7. Javan, dans la Bible, représente les Ioniens ou les Grecs. À quelle peuplade correspond Élisa ? La question né manque pas d’une certaine difficulté, et a donné lieu à différentes opinions. — Consultons d’abord l’Écriture, les versions et la tradition. Outre les listes généalogiques de la Genèse et des Paralipomènes, Ézéchiel, xxvil, 7, parle des « îles d’Élisa » (hébreu : ’iyyë’EUsâfi ; Septante : v ?|<toi’EXEi<ra()> qui fournissaient à Tyr « l’hyacinthe et la pourpre » pour « ses tentures », c’est-à-dire probablement les tentes dressées sur le pont de ses navires. Le mot’iyyxm, état construit : ’iyyê, indique en général des côtes maritimes ou des îles. Le samaritain, Gen., x, 4, porte’Elis ; le syriaque, Gen., x, 4 ; I Par., i, 7, ’Elisa, et, Ezech., xxvii, 7, ’Eles. On lit dans le Targum du Pseudo -Jonathan, Gen., x, 4, ’Allas, et, dans le Targum de Jérusalem, la paraphrase suivante : « Et les fils de Javan, ’Éli$â% et le nom de leurs provinces, ’Alastàràsûm. » Enfin le Targum de Jonathan sur Ezech., xxvil, 7, explique’Elisà/i par medinat’Ilahjâ’. D’après Josèphe, Ant. jud., i, vi, 1, ’EXktôc ; (lèv’EXtaocsov ; È*à).E(75v ùv *ipx ev > A’toXeïî 81 vCv elo-i, « Élisa donna son nom aux Éliséens, dont il fut le chef, et qui sont maintenant les Éoliens. » Les Talmuds rendent ce [mot par Elias, suivant les uns ; par Elis ou Molis, suivant les autres. Cf. A. Neubauer, La géographie du Taimud, in-8°, Paris, 1868, p. 424. Saint Jérôme, Lib. heb. guœst. in Genesim, t. xxiii, col. 951, dit, comme Josèphe : a Des Ioniens, c’est-à-dire des Grecs, naissent les Éliséens, qui sont appelés Éoliens, Solides ; d’où la cinquième langue de la Grèce est nommée éolienne. »

C’est sur ces différentes interprétations que s’appuient plus ou moins les opinions suivantes. — 1° A. Dillmann, Die Genesis, Leipzig, 6e édit., 1892, p. 176, préfère l’explication targumique, medinat’Italyâ’, et la glose empruntée à Eusèbe par le Syncelle : ’EXurerà IÇ oy Eixe-Xoi, « Élissa, de qui viennent les Siciliens. » Le premier fils de Javan réprésenterait donc la Sicile et la Basse-Italie, bien connues des Phéniciens, et qu’il serait étonnant de ne pas voir mentionnées entre lTIellade (Javan) et l’Espagne (IViams). U est permis de regarder comme

bien fragile le fondement de cette hypothèse, « qu’aucune preuve et aucune tradition ne justifient, et où [les auteurs ] ont été guidés par l’idée fausse qu’Élischàh devait être en dehors de Yâvân, qui embrasse tous les Grecs. » Fr. Lenormant, Les origines de l’histoire, Paris, 1884, t. ii, 2e part., p. 35. — 2° Moins acceptable encore est celle qui veut voir Carthage dans Élisa, parce que la légendaire fondatrice de cette ville est appelée Élissa en même temps que Didon. C est la conjecture qu’émet, avec un point d’interrogation, Fried. Delitzsch, Wo lag das Parodies ? Leipzig, 1881, p. 250. « Quarth-Iladaschth ou Carthage, dit encore justement M. Fr. Lenormant, loc. cit., était une fille de Kéna’an. Jamais l’idée ne serait venue à un Phénicien ou à un Hébreu de la ranger parmi les enfants de Yâvân. » — 3° La majorité des commentateurs reconnaît ici la population de la Grèce européenne, ce qui est plus conforme à la tradition. Mais encore à quelle tribu spéciale faut-il remonter ?

Si l’on regarde’ElUâh comme un nom indigène, que les Phéniciens n’ont pas forgé, et dont il faut chercher la source dans la nomenclature géographique ou ethnographique de l’ancienne Grèce, on trouvera trois termes auxquels les exégètes l’ont comparé : ’EXXâ ; , "H).( ; et AioXeïc — J. D. Michælis, Spicilegium geogr. Hebrseorum, Goettingue, 17(38-1770, t. i, p. 79, prend le premier terme de comparaison ; mais les lois de la linguistique s’opposent à ce sentiment. La forme la plus ancienne de "EMr)vsç est EeXXof. Dans la forme postérieure Hellên, Vs initial primitif s’est changé en ii, et le thème s’est développé par l’addition d’un n final. Une transcription aussi vieille que celle de la Bible conserverait nécessairement la sifflante du début, qui appartenait à la racine originaire, sal ou sel. — S. Bochart, Phaleg., lib. iii, cap. iv, Cæn, 1646, p. 176, se reporte à’HXt ; du Péloponèse, mais la forme première de’HXeîoi est FaXeîFot, avec double digamma ; celle de FccXeIoi était si bien consacrée par la tradition dans l’usage local, que, jusqu’au milieu du i" siècle avant l’ère chrétienne, la légende des monnaies des Éléens reste FAAEIQN. La transcription sémitique devrait donc présenter un vau correspondant au digamma initial’, ce qui n’existe pas. — Il est donc plus conforme à la philologie de rapprocher’Elîsâh de AîoXieù ; , pluriel AloXtéeç, AioXiet ;  ; forme primitive : AîoXieFù ; , pluriel AtoXtéFe ; . La transcription phénicohébraïque est d’autant plus acceptable qu’elle a pu se faire sur une forme AÎXieFùc, AÎXieùç, où Yo était tombé, comme on l’observe dans aïXoupo ; , pour aî<SXoupoç, et dans la comparaison de aïva> avec aïovim. Cf. A. Knobel, Die Vôlkertafel der Genesis, Giessen, 1850, p. 81. La correspondance de’ElUâh avec AîXieFù ; est tout à fait analogue à celle de la transcription égyptienne du nom des Achéens, A-qa-y-va-sa, avec son prototype’Ax « iFb ; , devenu ensuite’A^aid ; .

Les Éoliens sont une des deux divisions des Hellènes proprement dits, opposés aux Ioniens, quand, dans les populations de la Grèce, on ne distingue que des Doriens, des Éoliens et des Ioniens. La tradition généalogique plus habituellement répandue compte chez lés Hellènes propres ou Grecs occidentaux trois branches : .Éoliens, Doriens et Achéens. Dans ce sens restreint, les Éoliens sont un peuple qui a eu pour berceau la Thessalie, où la légende fait régner leur père Aiolos. De là ils s’étendirent sur l’Eubée, sur la Béotie, et enfin sur l’Étolie, où ils trouvèrent déjà établis les Étoliens et les Éléens. Quelques tribus pénétrèrent également dans le Péloponèse. Les Phéniciens, qui ne durent avoir de relations qu’avec les côtes de la Grèce, et ne purent, en Macédoine et en Thessalie, connaître que la population du littoral, c’est-à-dire les Éoliens, en étendirent le nom, altéré dans leur propre langue, à toute race protohellénique ou dorienne qui s’était mêlée avec les Éoliens. Cette extension eut lieu d’ailleurs dans la bouche et les traditions des Grecs eux-mêmes, « Et l’auteur du tableau ethno graphique du chapitre x de la Genèse était ainsi autorisé à appliquer, comme il l’a manifestement fait, l’appellation de’ElUâh = AioXiiec à toutes les populations de la Grèce européenne, à l’ensemble des Hellènes proprement dits, à une époque où les Doriens n’étaient pas encore descendus de leurs montagnes sur le terrain où s’étendent ses connaissances géographiques, et peut-être n’avaient pas encore constitué leur individualité spéciale, distincte de celle des Éoliens. » F. Lenormant, Les origines de l’histoire, t. ii, 2e part., p. 43.

M. J. Halévy, Recherches bibliques, Paris, t. i, 1895, p. 260-264, précise davantage la question. Pour lui, ’Elisdh représente, en particulier, une contrée spéciale du Péloponèse, la Laconie. D’abord, le parallélisme, intentionnellement établi par l’auteur sacré entre les deux premiers fils de Javan, Élisa et Tharsis d’un côté, et Céthim (Chypre) et Dodanim ou Rodanim (Rhodes) de l’autre, montre qu’il ne faut pas chercher dans ceux-là de grands pays continentaux, mais des lies, tout au plus des péninsules, que les anciens englobaient d’ordinaire dans cette dénomination. Ensuite l’identité d’'EliSâh avec la Laconie résulte de l’abondance en coquilles de pourpre qui rendit ce pays célèbre dans toute l’antiquité, ce à quoi fait allusion Ézéchiel, xxvii, 7. Quant au nom lui-même, il doit être emprunté à une ville maritime importante de la Laconie propre. Il doit en outre représenter un dérivé ethnique du nom indigène de cette ville, ce qui résulte de la forme des deux dernières personnifications : Céthim (hébreu : Kittîm) et Dodanim (hébreu : Dôdânim et Rôdànim), qui sont les pluriels des noms ethniques Ki(tyi et Rôdâni, tirés l’un de K^-uov, et l’autre de’PiSSoç. Voir Céthim, col. 466, et Dodanim, col. 1456. Ainsi’ElUâh est un nom ethnique dérivé de la ville de "EXo ; en Laconie. Les fréquents rapports des Phéniciens avec cette cité maritime ont été constatés dans ces derniers temps par les inscriptions phéniciennes et grécochypriotes découvertes dans l’Ile de Chypre. On connaissait déjà des ex-voto voués par les Phéniciens à Apollon Amycléen. Des trouvailles récentes y ont ajouté le culte d’Apollon d’Hélos, ’AitiXXwv’EXsi-niç, nxSs *]un ou Dn>nbN *|W-|, en dialecte’AireiXov’EXd-criç ou 'AXa<ria>Tï]< ; . De ces deux formes ethniques dérivées d’Hélos, l’une, ’EXeiTTic, se rapproche beaucoup de la forme classique et est rendue en phénicien par whn, avec élision du sigma final ; la seconde, populaire, revêt la physionomie jadis entièrement inconnue de’AXaaiMTï] ; , dont la transcription littérale en caractères sémitiques serait DniDiN ou wivttrbN. Le fait que la transcription phénicienne le rend par Dirnbx, avec un ii, hé, au lieu de d, samech, montre seulement qu’au ive siècle avant notre ère la lettre s placée entre deux voyelles se réduisait, dans le dialecte chypriote, à une faible aspiration. Le nom hébreu niibb », ’ElUâh, anciennement rra’bN, ’ElUdf, s’est donc développé sur la base de’AXaffiwcfa :  ; ) — (w) n’itfbN, ’Alaèiôf(&).

L’altération consiste, d’une part, dans le rejet de la sifflante finale, ur, i, après la dentale, ii, t ; de l’autre, dans la métathèse subie par la voyelle i. — La discussion, on le voit, repose uniquement sur la comparaison des mots. C’est une base fragile assurément ; mais c’est la seule que possède la science actuelle, dont nous avons donné

les derniers résultats.
A. Legendre.
    1. ELISABETH##

ELISABETH, nom de deux femmes, une de l’Ancien, l’autre du Nouveau Testament.

1. ELISABETH (hébreu : ’ËlUéba’, « dont le serment est Dieu ; » Septante : ’EX « raêé8), épouse d’Aaron. Exod., vi, 23. Elle était fille d’Aminadab, de la tribu de Juda, et mère de Nadab, Abiu, Éléazar, Ilhamar. Elle était sœur de Naasson, chef de la tribu de Juda dans le désert du Sinaï. Exod., vi, 23 ; Num., ii, 3.

2. ELISABETH (grec : ’EWâêeT ou Ekaaiêzt), épouse de Zacharie et mère de Jean-Baptiste. Elle était de famille sacerdotale, « des filles d’Aaron. » Luc, i, 5. Cependant saint Luc, i, 36, la dit parente de Marie, mère du Seigneur, qui était de la tribu de Juda. Les lévites ayant le droit de prendre femme dans toutes les tribus, on conçoit facilement qu’Elisabeth, de la tribu de Lévi et de la descendance d’Aaron par son père, pouvait être du côté maternel parente de la Sainte Vierge. Saint Hippolyte, d’après Nicéphore Callixte, Hisl. Ecclesiast., ii, 3, t. cxlv, col. 760, prétend que la mère de la Sainte Vierge et celle de sainte Elisabeth étaient sœurs : il appelle la première Anne et la seconde Sobé. Le ménologe des Grecs, au 8 septembre, établit de la même façon la parenté. Ce système et les noms des personnages paraissent provenir des Evangiles apocryphes, qui au milieu des légendes peuvent avoir conservé quelques traits historiques. Elisabeth, comme Zacharie, était « juste » et fidèle à la loi. Déjà avancée en âge, elle n’avait pas eu d’enfant, étant stérile. Mais, touché de leurs désirs et de leurs prières, Dieu, par l’ange Gabriel, qui apparut dans le Temple à Zacharie, leur promit un fils. La promesse divine ne tarda pas à se réaliser après le retour de Zacharie. Elisabeth conçut, et, ne voulant plus être montrée comme la stérile et en butte aux opprobres de la part de gens qui ne connaissaient pas encore la grâce qu’elle avait reçue, elle se tint cachée dans sa demeure pendant cinq mois, par une légitime fierté et par respect pour le don de Dieu. Luc, i, 24-25. Quand Marie, après l’incarnation du Verbe, vint dans sa demeure, sous l’inspiration d’en haut, Elisabeth, avec joie et humilité, félicite sa parente de la grâce incomparable qu’elle a reçue. Luc, i, 40-45. Marie ne lui répond pas directement ; mais, recueillie en elle-même, elle exprime les sentiments de son cœur dans le cantique Magnificat. Quand Elisabeth donna naissance à un fils, ses amis et parents se réjouirent avec elle. Luc, I, 57-58. Le huitième jour vint la circoncision, et il s’agit de donner un nom à l’enfant. Contrairement aux prévisions et indications des assistants, Elisabeth voulut qu’il s’appelât Jean, se trouvant ainsi par une sorte d’inspiration d’accord avec la volonté de Zacharie : ce qui étonna les témoins du fait. L’Église latine célèbre sa fête en même temps que celle de Zacharie, le 5 novembre.

E. Levesque.

ÉLISAMA. Hébreu : ’Ëlî$âmâ’, <( Dieu écoute ; » Septante : ’EXeiuaiii ; Codex Alexandrinus : ’EXiffaiià. Nom de six Israélites.

1. ÉLISAMA, fils d’Ammiud et chef de la tribu d’Éphraïm à l’époque du dénombrement du peuple dans le désert du Sinaï. Num., i, 10 ; ii, 18 ; x, 22. Il vint avec lès autres chefs de tribu offrir les dons prescrits. Num., vii, "48. D’après la généalogie de I Par., xxvi, 27, il était grand-père de Josué.

2. ÉLISAMA (Septante : ’EXeiirapâ, ’EXenraiiâe ; Codex Alexandrinus : ’EXtuanâ), fils de David, né à Jérusalem. II Reg., v, 16 ; I Par., iii, 8 ; xiv, 7.

3. ÉLISAMA, père de Nathanias et grand-père d’Ismaël, le meurtrier de Godolias. IV Reg., xxv, 25 ; Jer., ai, 1. Il était de race royale. Pour l’explication de cette dernière expression, voir Ismaël, fils de Nathanias.

4. ÉLISAMA, un des descendants de Juda, dans la branche de Jéraméel. Il était fils d’Icamia. I Par., ii, 41.

5. ÉLISAMA (Septante : ’EXeicix ; Codex Alexandrinus : "EXHjaiiâ), nom donné dans I Par., iii, 6, à un fils de David, qui est ailleurs, II Reg., v, 15, et I Par., xiv, 5, nommé plus justement Élisua. Voir ce mot.

6. ÉLISAMA, prêtre, envoyé avec un autre prèlre et

plusieurs lévites par le roi Josaphat dans les villes de Juda, le livre de la Loi à la main, pour instruire le peuple. II Par., xvii, 8.

7. ÉLISAMA ( Septante : ’Eeiaap.i, ’EXeiai ; Codex Alexandrinus : ’EXurauà), scribe du roi Joakim. Il était dans la chambre du scribe ou chancellerie, avec quelques officiers de la cour, quand Michée, fils de Gamarias, vint rapporter la prophétie de Jérémie, que Baruch venait de lire. Les grands officiers de la cour, effrayés du contenu de cette prophétie, allèrent en avertir le roi, mais en laissant le rouleau qui contenait les avertissements divins dans la chambre d’Élisama. Joakim l’envoya chercher. Jer., xxxvi, 12, 20, 21 (Septante, xliii, 12, 20, 21). Quelques auteurs identifient ce scribe avec Élisama 3 ; il serait alors membre de la famille royale. E. Levesque/

ÉLISAPHANé Hébreu : ’Ëlîsâfân, « Dieu protège ; » Septante : ’Eliaaifâv, ’EXei<ja<pàv. Nom de deux Israélites.

1. ÉLISAPHAN, lévite, fils d’Osiel, Exod., vi, 22, chef de la famille de Caath, Num., iii, 30, au temps du dénombrement du peuple au Sinaï. Quand Nadab et Abiu furent punis de mort pour avoir brûlé des parfums devant le Seigneur avec du feu profane, Moïse commanda à Misaël et à Élisaphan d’emporter leurs corps hors du camp. Lev., x, 4. Au temps de David, la famille d’Élisaphan était représentée par deux cents lévites, avec Séméias pour chef. I Par., xv, 8. À l’époque des réformes d’Ézéchias, deux chefs de cette famille furent chargés de purifier le Temple. II Par., xxix, 13. Dans Exod., vi, 22, le nom est écrit sous la forme abrégée : ’Élsâfân.

2. ÉLISAPHAN, fils de Pharnach, chef de la tribu de Zabulon, un de ceux qui furent choisis par Moïse pour faire le partage de la Terre Promise. Num., xxxiv, 25..

E. Levesque.

    1. ÉLISAPHAT##

ÉLISAPHAT (hébreu : ’ËlUàfât, « Dieu juge ; » Septante : ’EXeiffaçiv ; Codex Alexandrinus : ’EXun^it), fils de Zéchri, un des centurions de la garde royale qui aidèrent le grand prêtre Joïada à placer sur le trône le jeune roi Joas. II Par., xxiii, 1-8.

1. ELISÉE (hébreu : ’Ëlîsâ’; Septante : ’El : aâ, ’EXicraié ; Nouveau Testament : ’EXiaaaXoc ; Vulgate : Elisœus, « Dieu est mon salut » ), prophète, fils de Saphat et riche habitant d’Abelméhula.

I. Sa. vocation. — Quelques commentateurs ont pensé qu’il avait été de bonne heure disciple d’Élie et qu’il avait vécu avec lui sur le Carmel, dans une école de prophètes. Mais la soudaineté de sa vocation rend plus vraisemblable qu’il n’avait pas fréquenté les écoles prophétiques et qu’il ne s’était pas préparé à son rôle futur. Dieu, après la vision de l’Horeb, avait chargé Élie de choisir Elisée comme son successeur. Elisée devait continuer l’œuvre réformatrice d’Élie et frapper les impies du glaive de sa parole, instrument des justices divines. III Reg., xix, 16-17. Élie le trouva occupé au labour. Douze paires de bœufs creusaient sous ses yeux le sillon, et lui - même dirigeait la douzième charrue. Voir col. 602-605. Élie alla droit à lui, et sans proférer une parole, sans lui adresser même le salut ordinaire, il jeta sur lui son manteau. Cette véture silencieuse signifiait clairement l’appel d’Elisée à la mission prophétique et symbolisait la transmission des pouvoirs. Elisée en comprit le sens, et, répondant sans tarder à la vocation divine, il courut après Élie, qui se retirait, et lui demanda seulement le temps d’aller embrasser son père et sa mère. Quelques exégètes pensent qu’Élie blâma l’attachement trop naturel d’Elisée pour ses parents ; mais le nouveau disciple interpréta la parole du maître comme une autorisation indirecte. S’éloignant donc, il tua la paire de bœufs qui conduisait sa charrue, en fit cuire la chair avec le bois de la charrue et des harnais, iC91

ELISÉE

1692

et il célébra un repas d’adieux avec ses parents et ses amis. Le repas achevé, il se leva, s’en alla, suivit Élie et le servit. Il se constitua ainsi son disciple, en attendant qu’il devînt son successeur. III Reg., xix, 19-21.

Tandis qu’Élie vécut, Elisée resta au second plan. Son activité commence à l’enlèvement d’Élie. Sa persistance à vouloir suivre ce jourlà son maître jusqu’au bout lui valut d’être le témoin attristé de la disparition du grand prophète et de recevoir une double part de son esprit et de sa puissance. Voir Eue. Il hérita aussi du manteau d’Élie, qui était le signe visible de la succession prophétique. Il en fit bientôt usage. Parvenu sur le. bord du Jourdain, il imita Élie et frappa les eaux du manteau qui lui avait été légué. La leçon de la Vulgate fait supposer que la confiance d’Elisée fut mise à l’épreuve, puisqu’il dût frapper deux fois les eaux avant qu’elles ne lui ouvrissent le passage. Mais le texte hébreu ne mentionne pas cette circonstance, et dit seulement qu’Elisée, plein de foi, agit au nom du Dieu d’Élie et renouvela le prodige qu’Élie avait opéré quelques instants auparavant. Ce prodige accrédita Elisée auprès des fils des prophètes, qui reconnurent en lui le successeur d’Élie, vinrent à sa rencontre et se prosternèrent à ses pieds jusqu’à terre. Ils lui demandèrent aussitôt l’autorisation de faire rechercher Elie. Bien qu’il n’eût pas d’espoir dans le succès des recherches, il les permit, vaincu par l’importunité de ses disciples et dans le dessein de les convaincre de la disparition complète de leur commun maître.

IL Sa mission. — 1° Elisée commença bientôt l’exercice de sa mission. Comme celle d’Élie, elle fut douce et bienfaisante à l’égard des humbles et des pauvres, menaçante et terrible envers les orgueilleux et les impies. Les habitants de Jéricho se plaignirent au prophète de l’insalubrité des eaux de leur ville et de leurs pernicieux effets. Elisée se fit apporter du sel dans un vase neuf, et il le jeta dans la fontaine. Ce sel, principe d’incorruptibilité, et symbole de la puissance curative du Seigneur, assainit, par la volonté de Jéhovah, que le prophète avait invoqué, les eaux de la fontaine appelée aujourd’hui Aïn-es-Soultan (voir col. 1696). Montant de Jéricho à Béthel, Elisée dut exercer sur ses contempteurs les effets de la vengeance divine. Comme il approchait de cette dernière ville, qui était un des centres du culte des veaux d’or, III Reg., xli, 29, de jeunes garçons qui en sortaient se moquèrent de lui et l’insultèrent. C’étaient sans doute des enfants d’Israélites, qui étaient devenus idolâtres. Reconnaissant un prophète du vrai Dieu, ils le tournèrent en ridicule, en raison de sa calvitie précoce. Voir col. 89. Elisée les maudit au nom de Jéhovah, et aussitôt deux ours sortirent de la forêt et déchirèrent en morceaux quarante-deux de ces enfants. Elisée n’avait pas cédé à un mouvement de vengeance personnelle ; il avait voulu faire respecter un prophète de Dieu. Aussi le Seigneur rendit-il efficace sa malédiction, afin d’imposer aux idolâtres une crainte salutaire à l’égard de ses envoyés. Cf. Quxstiones et responsiones ad orlhodoxos, q. lxxx, Pair, gr., t. VI, col. 1321. De Béthel, Elisée se retira sur le Carmel, probablement pour se recueillir et se préparer dans la solitude à sa mission publique. Il revint ensuite à Samarie, IV Reg., il, 1-25, où il avait une maison. IV Reg., vi, 32.

2° Il ne tarda pas à se mêler à la politique. Les rois d’Israël, de Juda et d’Édom s’étaient coalisés contre Mésa, roi de Moab. Dans le désert de l’Idumée, leurs troupes manquèrent d’eau. Dans cette extrémité, Josaphat, roi de Juda, demanda un prophète de Jéhovah qui pût prier pour eux. Un serviteur du roi d’Israël désigna Elisée, le disciple familier d’Élie, celui qui versait de l’eau sur ses mains. Elisée avait donc suivi l’armée. Josaphat, qui connaissait déjà sa réputation, alla avec les deux autres rois lui demander audience. Elisée dit à Joram des paroles sévères et le renvoya aux prophètes de son père et de sa mère, aux prophètes de Baal et d’Astarté, qu’Achab et Jézabel avaient introduits dans le royaume d’Israël.

Joram implora humblement son assistance en considération des rois alliés. Elisée attesta par serment qu’il ne remplirait son ministère prophétique que par égard pour Josaphat, qui était un fidèle adorateur de Jéhovah. Mais sa conversation avec Joram avait troublé son âme. Afin do calmer son émotion et de se disposer ainsi à recevoir l’inspiration prophétique, il demanda un harpiste. Tandis que le musicien jouait, l’esprit du Seigneur anima Elisée, qui au nom de Jéhovah promit l’eau pour les troupes et prédit la défaite des Moabites. Le lendemain matin, conformément à la prédiction, les eaux affluèrent du sud, du côté de l’Idumée, dans le lit du torrent. Elisée avait annoncé qu’elles ne tomberaient pas sur les troupes alliées, mais qu’elles viendraient d’ailleurs, à la suite d’un orage ou d’une trombe que l’on n’aurait pas entendu. Au lever du soleil, les Moabites aperçurent les eaux rouges comme du sang ; ils crurent qu’elles étaient rougies par le sang des alliés, versé par leur propre glaive, et qu’ils n’avaient plus qu’à courir au butin. Ils éprouvèrent, au contraire, selon la prophétie d’Elisée, une défaite complète. IV Reg., iii, 9-25.

3° L’historien sacré a groupé ensuite une série de miracles dans le but de montrer qu’Elisée avait réellement hérité dé la puissance d’Élie. 1. Le disciple réalise les mêmes prodiges que son maître. La veuve d’un prophète, poursuivie par un créancier impitoyable, recourt à Elisée. Pour lui procurer des ressources, celui-ci multiplie miraculeusement un peu d’huile et en remplit un grand nombre de vases vides. L’huile ainsi augmentée fut vendue, et le prix de la vente suffit non seulement à payer les dettes, mais encore à pourvoir aux besoins de la veuve et de ses fils. — 2. Une femme riche de Sunam donnait souvent l’hospitalité au prophète ; elle fit même construire pour lui un logement séparé, qu’elle meubla convenablement. Un jour, par reconnaissance, il lui offrit d’employer pour elle son crédit à la cour. Mais elle n’avait aucun procès, et toute intervention en sa faveur était inutile. Giézi, serviteur d’Elisée, fit alors remarquer à son maître que son hôtesse n’avait pas d’enfant et que son mari était vieux. Elisée promit à la Sunamite qu’en récompense de sa généreuse hospitalité elle aurait un fils l’année suivante. La promesse inespérée s’accomplit exactement. L’enfant, devenu grand, alla un jour voir son père, qui surveillait ses moissonneurs. Soudain il se plaignit de violentes douleurs de tête ; il venait probablement d’être frappé d’insolation. Revenu à la maison, il mourut sur les genoux de sa mère. Celle-ci, remplie de confiance en Dieu, porta le cadavre sur le lit du prophète et ferma la porte de la chambre. Elle tint secrète la mort de son fils, et demanda à son mari un serviteur et une ânesse pour aller trouver l’homme de Dieu. Le mari s’étonne de cette visite, faite en un jour ordinaire, en dehors de la néoménie et du sabbat. Sa femme insiste et part en toute hâte vers le Carmel. Dès que le prophète l’aperçoit, il envoie Giézi à sa rencontre. Elle se jette aux pieds d’Elisée, et par cette attitude suppliante lui révèle le malheur qu’il ignorait. Profondément ému du chagrin de cette mère, il commande à Giézi d’aller à la maison et de placer son bâton sur la tête de l’enfant. Mais la pauvre mère entraîne le prophète à sa suite. Giézi, qui les avait précédés, n’avait pas réussi à ressusciter l’enfant, qui restait sans voix ni sentiment. Entrant dans la chambre, Elisée recourut au procédé par lequel Élie avait ressuscité le fils de la veuve de Sarepta. Se couchant sur le cadavre, il se mit bouche sur bouche, yeux sur yeux, mains sur mains. Le retour à la vie eut lieu progressivement. La chair de l’enfant commença par se réchauffer au contact du prophète. La foi de celui-ci ne fléchit pas. Hebr., xi, 35. Pour calmer son émotion et attendre le résultat définitif de sa prière, il descendit et se promena dans la maison. Il remonta et se coucha de nouveau sur l’enfant, qui bâilla sept fois et ouvrit les yeux. Il fit appeler la mère et lui remit son fils vivant. Elle, se jetant à ses

pieds, se prosterna la face contre terre. — 3. Étant à Galgala à l’époque de la famine, IV Régi, viii, 1, Elisée çrdonna à son serviteur de préparer un potage aux fils des prophètes qui suivaient là sa direction. L’un d’eux alla dans les champs cueillir des plantes grimpantes ; il ramassa plein son manteau des coloquintes (voir col. 859) dont il ignorait la nature et les coupa dans la marmite. L’amertume dn potage fit croire aux disciples d’Elisée qu’on leur avait versé du poison. Ils refusèrent de manger. Le prophète prit de la farine et la jeta dans la marmite, et le potage perdit son amertume. La farine n’avait pas la propriété naturelle de détruire le goût amer des coloquintes ; elle fut un moyen symbolique de rendre par miracle le bouillon potable. — 4. Dans le même temps, un homme de Baal-Salisa apporta à Elisée des prémices, vingt pains d’orge et du blé nouveau dans un sac. Avec Ces provisions insuffisantes, le prophète nourrit les cent personnes qui faisaient partie de la communauté de Gaigala, et il y eut des restes, grâce seulement à une multiplication miraculeuse des pains. IV Reg., iv, 1-44. — 5. Un général syrien, nommé Naaman, était lépreux. Il connut par une jeune fille juive, qui était au service de sa femme, la puissance d’Elisée, et il obtint du roi l’autorisation d’aller dans le royaume d’Israël. Il présenta ses lettres de recommandation à Joram, qui fut très embarrassé, parce qu’il n’avait pas la puissance de guérir de la lèpre. Elisée fit dire au roi d’Israël de lui envoyer le général syrien, pour qu’il sût qu’il y avait en Israël un prophète du vrai Dieu. Naaman vint donc avec de grands équipages et s’arrêta à la porte d’Elisée. Celui-ci, sans se déranger, lui fit indiquer comme remède de se laver sept fois dans le Jourdain. Irrité de ce que le prophète n’était pas venu lui-même le guérir et lui avait donné, par dérision peut-être, un remède trop simple et inefficace, Naaman s’en retournait avec indignation. Ses serviteurs lui représentèrent qu’il ne devait pas mépriser le remède, parce qu’il était d’un emploi facile. Frappé de la justesse de ce raisonnement, Naaman se baigna sept fois dans le Jourdain et fut parfaitement guéri, lui étranger, alors qu’il y avait d’autres lépreux en Israël. Luc, iv, 27. La reconnaissance le ramena auprès d’Elisée. Il confessa que le Dieu d’Israël était le Dieu de toute la terre et présenta une riche offrande au prophète. Celui-ci refusa énergiquement le moindre cadeau. Il voulait montrer à un païen que le désintéressement distinguait les vrais prophètes des faux prophètes. Après quelque insistance, Naaman céda ; mais il demanda d’emporter de la terre d’Israël la charge de deux mulets, pour former une sorte de terre sainte sur laquelle il adorerait désormais Jéhovah. Il soumit ensuite au prophète un cas de conscience. Son emploi exigerait qu’il accompagnât son roi au temple de Remmon. Pourraitil le faire sans idolâtrie ? Elisée, sans donner une autorisation catégorique, accorda au inoins une permission tacite, en considérant la démarche de Naaman non comme une participation au culte idolâtrique, mais comme un office civil qu’il remplissait auprès du roi. Noël Alexandre, Historia ecclesiastica V. T., Paris, 1699, t. ii, p. 168 ; Calmet, Comment taire littéral, Paris, 1724, t. ii, p. 792-796. Giézi, moins désintéressé que son maître, courut après Naaman et lui demanda de l’argent. Le prophète connut par révélation l’indigne conduite de son serviteur, la lui reprocha sévèrement, et l’en punit en le couvrant de la lèpre dont Naaman avait été guéri. IV Reg., v, 27. — 6. Les fils des prophètes, resserrés dans leurs habitations, demandèrent à leur chef de bâtir sur le Jourdain un local plus vaste. Il les accompagna et fit surnager, en jetant dans l’eau un morceau de bois, la hache que l’un d’eux avait laissé tomber dans le fleuve. IV Reg., vi, 1-7.

4° Elisée se mêla de nouveau aux affaires politiques et acquit dans le royaume d’Israël une autorité grandissante. — 1. Le roi de Syrie avait attaqué les dix tribus. Instruit de ses desseins perfides par inspiration divine,

Elisée en avisa Joram et le prévint des embuscades qui lui étaient dressées. Joram occupa les lieux que le prophète lui avait indiqués, et déjoua ainsi à plusieurs reprises les projets de ses ennemis. Le roi de Syrie crut qu’un de ses officiers le trahissait ; mais un serviteur lui apprit qu’Elisée révélait à Joram tout ce qui se décidait dans la salle de son conseil. Bénadad, ayant appris que le coupable était à Dothan, envoya une armée pour le prendre. La ville fut investie de nuit. Le serviteur de l’homme de Dieu, s’en étant aperçu au point du jour, en avertit son maître. Comme il était très préoccupé, Elisée le rassura et lui dit qu’il y avait plus de monde autour d’eux que dans le camp ennemi. Il pria le Seigneur d’ouvrir les yeux du craintif serviteur, qui vit autour de lui des chevaux et des chars de feu. Les Syriens descendirent pour s’emparer d’Elisée, qui était sorti hors de la ville. Le prophète demanda à Dieu de les frapper de cécité. Puis, usant d’un stratagème bien légitime, il leur dit qu’ils se trompaient de chemin et s’offrit â leur montrer l’homme qu’ils cherchaient. Il les conduisit à Samarie. Lorsqu’ils y furent entrés, il pria Jéhovah de leur dessiller les yeux. Leur stupéfaction et leur effroi furent grands, quand ils se virent au milieu de la ville. Le roi d’Israël voulait lés tuer. Elisée s’y opposa, parce qu’ils n’avaient pas été pris de vive force ; il leur fit donner de la nourriture et les renvoya à leur roi. IV Reg., VI, 8-23.

— 2. Quelques années plus tard, Bénadad entreprit une nouvelle guerre contre le roi d’Israël et lit le siège de Samarie. Bientôt une horrible famine régna dans la ville. Joram s’en prit à Elisée et s’engagea par serment à le faire décapiter le jour même. Cependant le prophète tenait conseil dans sa maison avec les anciens. Il leur apprit que le roi venait de porter contre lui la sentence capitale et leur ordonna de fermer la porte au messager sanguinaire, parce que le roi regrettait déjà l’ordre donné et accourait sur les pas du bourreau pour empêcher l’exécution. Le roi, en effet, arriva, et Elisée lui prédit la prompte cessation de la famine. Un officier, qui se moquait de la prédiction, apprit qu’il verrait l’abondance des vivres, mais qu’il n’en jouirait pas. IV Reg., VI, 31vii, 2. Les Syriens abandonnèrent leur camp, dont le pillage remplit la ville de vivres. L’officier moqueur, qui avait été placé à la porte de Samarie, fut écrasé par la foule. La double prédiction d’Elisée s’était accomplie. IV Reg., vii, 17-20. — 3. Elisée avait annoncé à la Sunamite dont il avait ressuscité le fils la famine de sept ans, dont nous avons raconté précédemment un épisode. Cette femme s’était retirée avec sa maison au pays des Philistins. Quand elle revint, ses biens étaient occupés par des étrangers. Elle alla demander justice au roi. À ce moment même, celui-ci s’entretenait avec Giézi des merveilles opérées par Elisée et en particulier de la résurrection du fils de cette femme. Il l’interrogea elle-même et la réintégra dans ses biens. IV Reg., vii, 1-6. — 4. Elisée alla à Damas à l’époque où Bénadad était malade. Ayant appris l’arrivée de l’homme de Dieu, le roi de Syrie envoya Hazaël avec des présents consulter le prophète sur l’issue de sa maladie. Elisée prédit que le roi ne mourrait pas de maladie, mais périrait de mort violente. Puis, dévoilant les projets ambitieux et sinistres d’Hazaël, il le fixa d’un regard pénétrant au point de le faire rougir, et il se prit à pleurer. Il prévoyait les maux que Dieu infligerait à son peuple par la main d’Hazaël, devenu roi de Syrie. Hazaël à son retour apprit à Bénadad qu’il ne mourrait pas de la maladie dont il souffrait ; mais le lendemain il l’étouffa sous une couverture et régna à sa place. IV Reg., viii, 7-15. — 5. Élie avait reçu la mission de sacrer Jéhu, roi d’Israël, III Reg., xix, 16 ; mais la vengeance divine sur la maison d’Achab avait été retardée. Plus heureux que son maître, Elisée assista à la chute de la dynastie idolâtre et en fut même l’instrument. Il envoya un de ses disciples à Ramoth-Galaad, oindre en secret le futur roi. Le message fut 1695

ELISÉE — ELISÉE (FONTAINE D’)

1696

fidèlement rempli, et le disciple du prophète indiqua à l’élu que Dieu le chargeait de détruire la maison d’Achat et de venger dans le sang de Jézabel le sang des prophètes. IV Reg., ix, i-iO. Après l’avènement de Jéhu, Elisée disparut de la scène ; il se retira sans doute dans la solitude et ne joua aucun rôle politique sous la nouvelle dynastie. Il reparut seulement du temps de Joas, petit-fils de Jéhu. Il était atteint de la maladie dont il mourut, quand ce roi vint le voir. Tout impie qu’ait été Joas, il comprenait que le prophète moribond était encore un dos plus fermes soutiens du trône, et il était

de Samarie. V. Guérin, Samarie, 1875, t. ii, p. 203-204. L’année de la mort d’Elisée, des pillards moabites firent une incursion dans le royaume d’Israël. Des hommes qui étaient occupés à ensevelir un défunt furent effrayés par leur approche, et déposèrent précipitamment le cadavre dans le sépulcre d’Elisée. Dès que son corps eut touché les ossements du prophète, le défunt revint à la vie et se dressa sur ses pieds. IV Reg., xiv, 20-21. Dieu voulait honorer par ce miracle la mémoire du héraut de son culte et du grand thaumaturge. L’auteur de l’Ecclésiastique, xlvjii, 13-15, en faisant l’éloge d’Elisée, rap Fontalne d’Elisée. D’après une photographie.

désolé de le perdre. Répétant à dessein les paroles qu’Elisée avait prononcées à l’enlèvement d’Elie, il s’écriait en pleurant : « Mon père, mon père, char d’Israël et sa cavalerie ! » Pour consoler le roi, Elisée lui prédit par un acte symbolique ses succès futurs. Il lui dit de bander un arc et de tirer une flèche ; mais lui-même plaça ses mains sur celles du royal tireur, pour montrer que le fait symbolisé par le trait lancé serait l’œuvre de Dieu. La flèche, dirigée par la fenêtre vers l’est, était envoyée par Jéhovah contre la Syrie, pour sauver Israël. Joas devait être victorieux à Aphec. Elisée lui ordonna ensuite de frapper le sol de traits. Joas se borna à décocher trois flèches. Le prophète, tout affligé, lui reprocha son manque de persévérance, disant : « Si vous aviez frappé cinq, six ou sept coups, vous auriez exterminé la Syrie ; mais vous ne la battrez que trois fois. » IV Reg., xiii, 14-19. Elisée mourut bientôt après dans un âge avancé. Josèphe, Ant. jud., IX, viii, 6, dit qu’on lui fit de magnifiques funérailles. Son tombeau se voyait encore du temps de saint Jérôme, In Abdiam, t. xxv, col. 1099, auprès

pelle deux fois la résurrection opérée par le contact de ses ossements.

La fête d’Elisée est inscrite au martyrologe romain à la date du 14 juin. Les ossements du prophète furent arrachés à son tombeau sous Julien l’Apostat. Quelquesuns, que l’on conserva, furent donnés à saint Athanase et transportés, en 463, à Alexandrie et plus tard à Constantïnople. Sur le culte d’Elisée, voir Acta sanctorum, 14 junii, Paris, 1867, t. xxiii, p. 273-275. Cf. Gassel, Der Prophet Elisa, Berlin, 1860 ; Clair, Les livres des Rois, Paris, 1884, t. i, p. 177-187 ; Ma r Meignan, Les prophètes d’Israël. Quatre siècles de lutte contre l’idolâtrie, Paris, 1892, p. 249-323. E. Mangenot.

2. ELISÉE (FONTAINE D’). Nom donné à la fontaine de Jéricho dont l’eau, de mauvaise qualité, fut rendue potable par ce prophète, en y mettant du sel au nom du Seigneur. IV Reg., ii, 19-22 (fig. 550). Elle porte aujourd’hui le nom d’Aïn es-Soultân, « fontaine du Sultan. » Elle jaillit en abondance du pied d’un monticule qui se 4697

    1. ELISÉE##

ELISÉE (FONTAINE D’) — ÉLIU

1698

rattache à la montagne de la Quarantaine, dans un ancien réservoir semicirculaire, en pierres de taille, de douze mètres de long sur sept mètres et demi de large. Quoiqu’elle soit légèrement tiède (23 degrés), elle est douce et agréable ; on y voit une foule de petits poissons. La source forme un ruisseau, qui se dirige au sud-est vers le village actuel d’Ér-Riha. Les bords en sont couverts de tamaris et de zizyphus spina Christi, et animés par des oiseaux de toute espèce. Voir Jéricho.

F. Vigouroux.

3. ELISÉE QALLICO (ben Gabriel), rabbin du xvi « siècle, chef de la synagogue de Safed, en Galilée, mort entre 1578-1588. Il a laissé plusieurs commentaires : un commentaire sur le livre d’Estlier, in-4°, Venise, 1583 ; un commentaire cabalistique sur l’Ecclésiaste, in-4°, Venise, 1548, 1578 ; un commentaire sur le Cantique des cantiques, avec le texte, in-4°, Venise, 1587 ; un commentaire sur les cinq Megillot, in-4°, Venise, 1587.

E. Levesqle.

4. ELISÉE VARTABIED (ou Docteur), auteur arménien du v 8 siècle, mort en 480. On l’identifie généralement avec Elisée, évêque de la province des Amadounis, dont le nom figure au concile national d’Ardaschad (449), en tête de la lettre synodale du patriarche Joseph et des évêques arméniens au généralissime persan Mihrnerseh. Voir F. Nève, L’Arménie chrétienne et sa littérature, Louvain, 1886, p. 229-230. — On a de cet écrivain, outre une Histoire de Vartan Mamigonian et de la guerre des Arméniens contre les Perses (450-451), les ouvrages suivants : 1° un Commentaire sur le livre de Josué et

des Juges (rp^^f/ïi-^frl-Tf Qlrtint-UJj II c V%uitnuiL.npuiij

divisé en seize chapitres ; malgré sa concision, c’est un commentaire assez apprécié ; l’auteur fait plusieurs rapprochements entre les personnages illustres de l’Ancien Testament et Jésus-Christ et ses Apôtres : en général, les sens mystiques et allégoriques y abondent ; 2° une Explication de l’Oraison dominicale (Qinqo/îlu’b ap « ""t-i, "ijp Tbp apjlrplilîiiu^j, verset par verset, pleine d’onction et de piété ; 3° divers Sermons sur le baptême, la transfiguration, la résurrection de Notre -Seigneur, sur la prédication des Apôtres et le jugement dernier ; toutefois leur authenticité n’est pas démontrée. Tous ces écrits ont été publiés par les Pères Mékitharistes de Venise, au couvent de Saint-Lazare, en 1859, in-8°, sous ce titre : S. Patris nostri Elisei Opéra. J. MlSKGUN.

    1. ÉLISUA##

ÉLISUA (hébreu : ’Ëlisua’, « Dieu est secours ; » Septante : ’EXeiaoû ; , ’Exrâe ; Codex Aiexandrinus : ’EXi<xo-3{, EXiiraO), un des fils de David, le sixième de ceux qui lui naquirent à Jérusalem. II Reg., v, 15 ; I Par., XIV, 5. Dans I Par., iii, 6, il est nommé Élisama, par une faute évidente de copiste. Ce dernier nom est porté par un autre fils de David sur la même liste. Dans les Septante, I Par., iii, 6, on lit aussi’EUaaii dans le Codex Aiexandrinus ; mais le Vaticanus a’EXeisi.

    1. ÉLISUR##

ÉLISUR (hébreu : ’Ëlisûr, « Dieu est rocher, c’est-à-dire protection ; » Septante : ’EXeuroûp ; Codex Aiexandrinus : ’EXiaoûi ; , dans Num., 1, 5 ; partout ailleurs’EXi(joûp, dans tous les manuscrits), fils de Sédéûr, chef de la tribu de Ruben dans le désert du Sinaï. Num., i, 5 ; II, 10. Il offrit les dons prescrits, comme les autres chefs de la tribu. Num., vii, 35. Dans Num., x, 18, le nom est écrit différemment par la Vulgate : Helisur.

ÉLIU. Hébreu

d’un ami de Job.’Èlihû’. Nom de cinq Israélites et

1. ÉLIU (Septante : ’H).e(ou ; Codex Aiexandrinus : ’EXioû), ancêtre d’Elcana, le père de Samuel. I Reg., i, 1. Dans d’autres passages, le nom a été altéré par les

SICT. DE LA BIBLE.

copistes et transformé en Éliab dans I Par., vi, 27 (hébreu, 12), et en Éliel dans I Par., vi, 34 (hébreu, 19).

2. ÉLIU (Septante : "EXtjioûe ; Codex Aiexandrinus : "EXioOB), un des chefs de la tribu de Manassé, qui à Siceleg vinrent offrir leur concours à David avant le dernier combat livré par Saül aux Philistins. Ils commandaient à mille hommes. David en fit des chefs de son armée ; ils lui furent d’un grand secours contre les bandes d’Amalécites qui avaient fait irruption sur Siceleg. I Par., XII, 20.

3. ÉLIU (hébreu : ’Ëlihû, sans aleph final ; Septante : ’Ewoj ; Codex Aiexandrinus : ’EXioù), lévite de la descendance de Coré, fils de Séméias et un des portiers du Temple au temps de David. I Par., xxvi, 7.

4. ÉLIU (hébreu : ’Elihû, sans aleph final ; Septante : ’EXiàê), chef de la tribu de Juda et frère de David. I Par., xxvii, 18. Si le mot « frère » doit être pris ici dans le sens strict, ce serait une faute de transcription, pour Éliab. Voir Éliab 3.

5. ÉLIU (Septante : ’HXioû, ’HXetoii), ancêtre de Judith, de la tribu de Siméon. Judith, viii, 1. Il n’est pas nommé dans la Vulgate.

6. ÉLIU (Septante : ’EXtoO ?), un des interlocuteurs de Job. L’Écriture l’appelle fils de Barachel le Buzite, de la famille de Ram. Job, xxxil, 2. Buz est le nom du second des fils de Nachor, frère d’Abraham. Gen., xxii, 21. Ce mot désigne pareillement une région à laquelle sans doute Buz avait donné son nom et qui répond probablement au nord de l’Arabie Pétrée, vers la côle sud-est de la mer Morte et le nord-est de l’Idumée. Voir Buz 2 et 3, t. i, col. 1982. La qualification de Buzite indique donc la patrie d’Éliu et peut-être aussi sa généalogie. — L’auteur sacré ne nous dit pas s’il était venu comme Éliphaz, Baldad et Sophar, pour consoler Job, ou si quelque autre motif l’avait amené en même temps qu’eux auprès de leur ami afiligé. Il le fait entrer brusquement et inopinément en scène au moment où les trois amis de Job, voyant l’inutilité de leurs efforts pour lui prouver sa culpabilité, prennent le parti de garder le silence. Job, xxxil, 1. Éliu s’était tu jusque-là à cause de sa jeunesse et n’avait pas voulu émettre son avis tandis que de sages vieillards parlaient. Il va maintenant prendre la parole à son tour, après avoir d’abord manifesté son indignation tout ensemble et contre Job, qui se croit juste devant Dieu, et contre ses amis, qui n’avaient vu dans les peines de Job qu’un châtiment mérité de ses péchés, inlligé par la seule justice de Dieu, et avaient cru devoir le condamner sans opposer aucun argument solide à ses plaintes, Job, xxxil, 2-6. Les reproches qu’il adresse à Job ne tombent pas sur sa conduite, comme les leurs. Éliu s’applique surtout à combattre les fausses idées de Job sur la cause de ses maux et sur les desseins de Dieu qui l’afflige. Job, xxxiv, 35. Ses discours n’ont pas l’acrimonie de ceux qu’on a déjà entendus, et ses paroles de blâme sont tempérées par un certain ton de bienveillance ; il voudrait même que Job « put paraître juste ». Job, xxxiii, 32.

Le langage d’Éliu respire la présomption et laisse trop voir la haute idée qu’il a de sa science. Mais ses idées sont justes, et il apporte une solution au problème de la douleur bien supérieure à celle des trois premiers interlocuteurs. Il déclare que la souffrance sert à instruire l’homme, à le purifier et à l’éprouver ; le juste est souvent frappé afin qu’il apprenne à se juger lui-même avec plus de sévérité, qu’il se garde mieux contre le péché et montre plus de zèle à chercher Dieu. Dieu ne l’afflige donc pas seulement à cause de ses fautes ; il n’est pas un justicier implacable, comme le prétendent Éliphaz, Baldad et Sophar ; il est un bon père qui frappe rudement, mais pour son bien, son enfant, en punition de fautes légères ;

II. — 51

par conséquent, si Job se croit juste et s’il l’-est en réalité, il doit voir dans ses peines une bénédiction de Dieu.

— Ces vues sont développées en quatre discours, Job, xxxii, 6-xxxm, 33 ; xxxiv, 1-37 ; xxxv, 1-16 ; xxxvi, 1xxxvii-, 24, après chacun desquels Éliu semble attendre une réplique de Job ; mais celui-ci ne répond pas comme il l’avait fait à chacun des discours de ses amis. C’est qu’il reconnaît la justesse de cette doctrine, et qu’il avait promis de se taire si on lui apportait un enseignement conforme à la vérité. Job, vi, 24. Voilà pourquoi il garde le silence devant ce jeune homme, tandis qu’il avait protesté contre les appréciations et les accusations des autres. Éliu a justifié la providence divine aux yeux de Job et n’a plus laissé à celui-ci aucun sujet de plainte, quoiqu’il n’ait pu naturellement découvrir la vraie cause de son épreuve personnelle. Voir Job, i, 8-12 ; ii, 3-6. Dès lors les hommes n’ont plus rien à dire, et la parole est à Dieu, dont Éliu a ainsi préparé logiquement l’intervention directe. Dieu se manifeste, en effet, non pour continuer la discussion, mais pour instruire l’homme. Quelques-uns ont pensé que les paroles sévères que Dieu prononce d’abord s’adressent à Éliu, Job, xxxviii, 2 ; mais on croit avec plus de fondement que c’est Job qui est l’objet de cette réprimande. Le Seigneur, loin de blâmer Éliu, lui donne, au contraire, raison d’une manière indirecte, lorsqu’à la fin il ne reprend qu’Ëliphaz, Baldad et Sophar, ne se montre irrité que contre eux, et exige d’eux seuls un sacrifice d’expiation offert par Job en leur nom. Job, xlii, 7-14). — Pour l’authenticité des discours d’Éliu, voir Job (Livre de).

E. Palis.

    1. ÉLIUD##

ÉLIUD (grec : ’EXioiJS), fils d’Achim et père d’Éléazar, dans la généalogie de Notre -Seigneur JésusChrist selon saint Matthieu, i, 14, 15. "

    1. ELLASSAR##

ELLASSAR (hébreu : ’Ellâsdr ; Septante : ’ElXxaip ; Vulgate : Pontus), nom de la ville où régnait Arioch, un des rois confédérés qui firent campagne en Palestine sous le roi d’Élam Chodorlahomor, à l’époque d’Abraham. Gen., xiv, 1, 9. Voir Arioch, t. i, col. 901-962. La plupart des assyriologues voient aujourd’hui dans Ellassar la ville de Larsa (avec métathèse de r). Son nom apparaît souvent sur les monuments cunéiformes. C’est la Aapto-aa des Grecs. Elle était située en Chaldée, à peu près à moitié chemin entre Ur des Chaldéens (aujourd’hui Mughéir) et Érech (Vulgate : Arach, actuellement Warka ; voir t. i, col. 868). C’était une cité fort ancienne, qui s’élevait sur la rive gauche de l’Euphrate. On y adorait le dieu Soleil, SamaS, dans plusieurs temples consacrés à son culte et dont le principal, appelé Ê-barra, remontait à une très haute antiquité. Au milieu de ses ruines, connues aujourd’hui sous le nom de Senkéréh, on a trouvé un certain nombre de tablettes, de cylindres et de statuettes d’argile. Sur plusieurs documents, Éri-Aku (Arioch), fils de Kudur-Mabug, prend expressément le titre de roi de Larsa. Voir La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1. 1, p. 487-492. On ne saurait done confondre aujourd’hui, comme on le faisait autrefois, l’Ellassarde Gen., xiv, 1, 9, avec le Thélassar de IV Reg., xix, 12 ; Is., xxxvii, 12 (voir Thélassar), non plus qu’avec la ville d’Assur en Assyrie. Quant à la traduction d’EUassar dans la Vulgate par le Pont, elle est le résultat d’une fausse interprétation. Henry Rawlinson a identifié Ellassar avec Larsa dès 1851. Voir Journal of sacred Literature, octobre 1851, p. 152. Les ruines de Senkéréh ont été décrites par W. K. Loftus, Travels in Chaldxa and Susiana, in-8°, Londres, 1857, p. 240. Voir aussi J. Oppert, Expédition en Mésopotamie, 2 in-4°, t. i, Paris, 1863, p. 266-269 ; Frd. Delitzsch, Wo lag dos Paradies ? in-12, Leipzig, 1881, p. 223-224.

F. VlGOUROUX.

    1. ELMADAN##

ELMADAN (grec : ’EXu-aîâu.), fils de Her, dans la généalogie de Notre -Seigneur Jésus-Christ selon saint Lac, iii, 28.

    1. ELMÉLECH##

ELMÉLECH (hébreu : ’Allammélék ; Septante : *E).i|uX£x)> ville frontière de la tribu d’Aser. Jos., XIX, 26. Mentionnée entre Axaph (Kefr Yâsif) et Amaad (peut-être Oumm el-’Amed), elle faisait partie des cités méridionales. Elle n’a pu jusqu’ici être identifiée. On croit cependant, à la suite de R. J. Schwarz, Dos heilige Land, Francfort-sur-le-Main, 1852, p. 153, que le nom en a été conservé dans celui de Youadi el-Malek ou Nahr al Malchi, qui se jette dans le Cison [Nahr el-Mouqatta). Voir Aser 3, tribu et carte, 1. 1, col. 1084. L’hébreu’Allammélék est un mot composé de’al, pour’allâh, « chêne, » et de mélék, « roi, » c’est-à-dire « chêne du roi ». Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 104. L’ouadi el-Malek, ou « la rivière du roi », a sur sa rive méridionale une forêt de chênes, qui expliquerait le nom de l’ancienne cité, dont la dernière partie seule aurait subsisté.

A. Legendre.
    1. ELMODAD##

ELMODAD (hébreu : ’Almôddd ; Septante : ’EXpiw8<x5 ; omis par le Codex Vaticanus, I Par., i, 20), premier fils de Jectan, descendant de Sem. Gen., x, 26 ; IPar., i, 20. Ce nom, comme tous ceux des peuples issus de la même souche, représente une tribu de la péninsule arabique. Voir Jectan. S. Bochart, Phaleg, lib. ii, cap. xvi, Cæn, 1646, p. 112, l’assimile aux’AXXouuai&Tai de Ptolémée ; VI, vii, 24, qui habitaient vers le milieu de l’Arabie Heureuse, près des sources du fleuve Lar, qui se jette dans le golfe Persique. Ce sentiment n’est généralement pas accepté ; mais on ne sait rien d’ailleurs de certain ni sur la signification du nom ni sur son identification. Plusieurs regardent la première syllabe du mot, ’al, comme l’article arabe, et croient reconnaître ici les Djorhom, l’une des plus puissantes nations issues de Qahtan, forme que revêt Yaqtan ou Yoqtân dans la tradition arabe. Fixé primitivement dans le Yémen, ce peuple passa ensuite dans le Hedjâz, où il s’établit du côté de la Mecque et de Téhama. Ses rois sont presque tous désignés par l’appellation de Moddd ou al Moddd. Cf. A. Knobel, Die Vôlkertafel der Genesis, Giessen, 1850, p. 194 ; F. Lenormant, Histoire ancienne de l’Orient, Paris, 1881, t. i, p. 284. D’autres prennent’al pour le nom de Dieu, comme il arrive souvent en sabéen, et rattachent môdad à la racine yâdad, « aimer ; » d’oÏL la signification du mot : « El ou Dieu est aimable, » ou « Dieu aime ». Cf. llalévy, Études sabéennes, dans le Journal asiatique, Paris, octobre 1873, p. 364 ; A. Dillmann, Die Genesis, 6 a édit., Leipzig, 1892, p. 198. On a voulu voir aussi dans’Almodâd une faute de lecture pour Al-Modar ou Morad, à cause de la permutation ou de la confusion facile entre le daleth et le resch. On pourrait ainsi rapprocher Al-Morad des Beni-Morâd, tribu qui habitait une région montagneuse de l’Arabie Heureuse, près de Zabid. Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 93. Devant l’accord des versions anciennes les plus importantes, il nous semble difficile de recourir à cet argument. Enfin, suivant quelques suteurs, à Elmodad correspondrait Omdude ou Madudi, une des villes du territoire de l’Hadramaut. Cf. Schrader, dans Riehm, Handwôrterbuch des Biblischen Altertums,

Leipzig, 1884, 1. 1, p. 47.
A. Legendre.
    1. ELNAËM##

ELNAËM (hébreu : ’Élna’am, « Dieu est aménité ; » Septante : ’EXXioc|j. ; Codex Alexandrinus : ’EWaii), père de Jéribaï et Josaïa, I Par., xi, 46, donnés comme braves guerriers de David dans la partie de la liste des Paralipomènes, ^. 42-46, qui n’a point de parallèle dans la liste de II Reg., xxm. Dans les Septante, I Par., xi, 46, 47, ’Iuxjeiâ (Josaïa) est présenté comme fils de’Japt6s’i (Jéribaï), et Elnaam, au lieu d’être dit leur père, est compté comme un des guerriers de David.

ELNATHAN. Hébreu : ’Élndtdn, « que Dieu donne, c’est-à-dire Théodore. » Nom de quatre Israélites.

1. ELNATHAN, père de Nohesta, qui fut la mère de

Joakim, roi de Juda. IV Reg., xxiv, 8. Ce grand-père maternel de Joakim, appelé Elnathan de Jérusalem, est très vraisemblablement le même que l’Elnathan que Jérémie nous représente comme un des principaux personnages de l’entourage du même roi de Juda. Jer., xxvi, 22 ; xxxvi, 12, 25. Il fut un de ceux qui prièrent Joakim de ne pas brûler le rouleau des prophéties de Jérémie, lues auparavant par Baruch devant le peuple et les grands de la cour. Jer., xxxvi, 12-25. Joakim envoya Elnathan en Egypte avec quelques hommes afin d’en ramener le prophète Urie, qui s’y était enfui pour échapper à la colère du roi. Les Septante varient beaucoup dans la transcription de ce nom : dans IV Reg., xxiv, 8, ’EXX « vo6d|x ; Codex Alexandrinus, ’E).Xa|x « 8ô|x ; dans Jer., xxxvi, 12, ’IwvaOiv ; Codex Alexandrinus ; Nadâv, et’EXvaSàv dans le Codex Marchalianus ; au ꝟ. 25, ’ElvaSâv, et Codex Alexandrinus, Na9âv : sous ces modifications diverses, le nom conserve la même signification. Quant à" Jérémie, xxvi, 22, le nom propre est omis dans les manuscrits des Septante, mais on le lit dans les Hexaples.

2-4. ELNATHAN, nom de trois personnages nommés dans le même verset. I Esdr., viii, 16. Ils sont envoyés vers le lévite Eddo, chef des captifs résidant à Casphia, pour engager des lévites à se joindre à Esdras dans son premier voyage à Jérusalem. « J’envoyai, dit Esdras, Éliézer…, et Elnathan…, et un autre Elnathan…, chefs de famille, et les sages Joiarib et Elnathan. » I Esdr., vm, 16. Le texte hébreu n’a point « un autre » avant le second nom. Les Septante leur donnent trois noms différents : le premier est appelé’AXwvân, le second’EXv « 6â|x, le troisième’Eavafiâv (Codex Alexandrinus : ’EXva9ôv). E. Levesque.

    1. ÉLOHIM##

ÉLOHIM (hébreu : ’Ëlâhim [cf. chaldéen, vhn ; ara méen, JoJ^tJ ; arabe, iy, avec l’article <*JJ1, Allah ;

sabéen, nbx] ; Septante : ©e<5ç ; Vulgate : Deus), nom commun de Dieu en hébreu, de même que’El (voir El, col. 1627), pouvant s’appliquer au vrai Dieu comme aux faux dieux. — iilohim est une forme plurielle, quoiqu’elle désigne le plus souvent au singulier le Dieu unique. C’est ce que les grammairiens ont appelé « pluriel de majesté », et quelques philologues modernes plurale magnitudinis, dans un sens analogue. D’autres disent que le pluriel marque ici une abstraction, « la divinité. » Voir W. W. Baudissin, Studien zur semitischen Religionsgeschichte, Heft i, in-8°, Leipzig, 1876, p. 56-57 ; U. Cremer, Biblisch-theologisches Wôrterbuch, 5e édit., in-8°, Gotha, 1888, p. 404. La forme plurielle est aussi employée pour le singulier, plus de quarante fois, dans les tablettes assyriennes trouvées à Tell El-Amarna, ilâni pour ilu. A. Barton, À pecidiar use of « ilani » ira tlie tablets from El-Amarna, dans les Proceedings of the American Oriental Society, 21-23 avril 1892, p. cxcvi-cxcix ; Id., Native Isrælitish Deilies, dans Oriental Studies, in-8°, Boston, 1894, p. 96.

I. Élymologie d’Élohim. — L’étymologie de ce mot est incertaine. Les uns le font venir de la racine nba, ’âlah, « avoir peur, chercher un refuge, » de sorte qu’il signifierait Numen tremendum, « terreur, objet de terreur. » Cf. Gen., xxxi, 42 ; Ps. i.xxvi, 12 ; Is., viii, 12-13. Voir Crainte de Dieu, col. 1099. Les autres supposent que c’est une sorte d’augmentatif de’El ou une forme plurielle de ce dernier, d’où l’on aurait tiré plus tard le singulier Ëlôha, après avoir perdu le souvenir de son origine. Fr. Buhl, Gesenius’Hebrâisches Handwôrterbuch, 12e édit., 1895, p. 41-42. Les anciens Juifs et les écrivains ecclésiastiques à leur suite faisaient déjà dériver’Elôhîm de’El. « Les Hébreux, dit Eusèbe, Prsep. Ev., xi, 6, t. XXI, col. 857, affirment que le nom qui exprime Jd nature souveraine de Dieu est ineffable et inexpri mable et ne peut même être conçu par la pensée ; mais celui que nous appelons Dieu, ils le nomment Élohim (’EXoiji), de El (fa), à ce qu’il semble, et ils l’interprètent force et puissance (itsyyv %x Wvatuv), de sorte que le nom de Dieu dérive chez eux de sa puissance et de sa force. » Toutefois ces explications ne sont que des hypothèses. Les rapports d’origine et de signification étymologique d’El et d’Élohim ne sont pas encore nettement éclaircis. Cf. R. Smend, Lehrbuch der alttestamentlichen Religionsgeschichte, in-8, Leipzig, 1893, p. 26 ; Frd. Bæthgen, Beitrâge zur semitischen Religionsgeschichte, in-8°, Berlin, 1888, p. 271-273, 275. Ce qui est bien certain, c’est que les deux noms s’appliquent à Dieu par opposition à l’homme. Ose., xi, 9 ; Is., xxxi, 3 ; Ezech., xxviii, 2, 9.

II. Emploi du mot Élohim dans la Bible hébraïque.

— Les diverses langues sémitiques avaient simultanément ou séparément deux noms communs pour désigner Dieu, El et Élohim. Les Hébreux ont fait usage de l’un et de l’autre, soit en parlant du vrai Dieu, soit en parlant des dieux des polythéistes. Ils avaient de plus un nom propre pour nommer le Dieu véritable, Jéhovah ou Jahvéh, et c’est celui dont ils se servaient le plus souvent. (Il se lit à peu près six mille fois dans la Bible.) Des deux mots Élohim et El, le premier paraît moins ancien que le second. On peut le conclure de ce que l’on trouve au moins des traces du mot El (assyrien, ilu) dans toutes les branches de la famille sémitique (cf. Gen., IV, 18 ; xxv, 13 ; xxxvi, 43, etc.), tandis qu’Élohim (Élohâh, llâh) manque chez quelques peuples sémites, en particulier chez les Chaldéens, dont les monuments remontent à une si haute antiquité. Élohim par conséquent n’a dû commencer à être usité que lorsque les descendants de Sem, après s’être séparés les uns des autres, eurent formé des peuples divers. Bæthgen, Beitrâge, p. 271. Il se substitua peu à peu à l’antique’El (voir El, col. 1628), ou devint au moins d’un usage beaucoup plus fréquent. Il se lit 2570 fois dans les livres protocanoniques de l’Ancien Testament, d’après les calculs de M. Nestlé, dans les Theologische Studien aus Wurtemberg, t. iii, 1882, p. 243-258. Cf. S. Mendelkern, Concordantise hebraicse, 2 in-4°, Leipzig, 1896, t. i, p. 86-96. Le singulier Ëlôha, formé plus tard d’Élohim, est beaucoup plus rare. Il est employé cinquante-sept fois (quarante et une dans Job, quatre dans les Psaumes, quatre dans Daniel, deux dans Habacuc, deux dans le Cantique de Moïse inséré dans le Deutéronome, xxxii, une fois dans les Proverbes, dans Isaïe, dans les Chroniques ou Paralipomènes et dans Néhémie ou II Esdras). Cf. Frd. Bæthgen, Beitrâge, p. 297-298. — Les critiques donnent le nom d’élohistes aux passages de l’Écriture où Élohim est employé de préférence à Jéhovah, et ils appellent jéhovistes ceux où Dieu est désigné par son nom propre. Voir Pentateuque.

III. Significations diverses données au mot Élohim dans l’Écriture. — 1° II désigne le plus souvent le vrai Dieu, et dans ce cas le sens est précisé de diverses manières. 1. Par l’article : « Sache que Jéhovah, lui, est le Dieu (hâ-’Elôhîm), et qu’il n’y en a point d’autre excepté lui. » Deut., iv, 35. L’article (Septante : à ®c<5 ; )> ici et ailleurs, Gen., v, 22 ; vi, 9, 11 ; xvii, 18 ; xx, 6, etc. ; cf. Deut., vii, 9 ; I ( 111) Reg., xviii, 21, 37, etc., marque qu’il est le Dieu par excellence. ( Il est supprimé, lorsque aucune amphibologie n’est possible, comme Gen., 1, 1 ; ix, 27, etc. ; Am., iv, H ; dans les Psaumes élohistes, Ps. xlii-lxxxix, etc.) — 2. Dans d’autres passages, la signification d’Élohim est déterminée par des compléments : a le Dieu d’Abraham, » Gen., xxvi, 24, etc. ; « le Dieu d’Israël, » Exod., v, 1 ; « le Dieu de Jacob, » Ps. xx, 2 ; « le Dieu du ciel et de la terre, » Gen., xxiv, 3 ; « le Dieu d’élévation (ou du ciel), » Mich., vi, 6 ; « le Dieu de vérité, > Is., lxv, 16 ; « le Dieu d’antiquité, » Deut., xxxiii, 27 ; « le Dieu des siècles, » Is., xi., 28 ; « le Dieu de justice, » Ps. iv, 2 ; « le Dieu de salut, » Ps. xviii, 47 ; « le Dieu

de miséricorde, » Ps. lix, 18 ; « le Dieu des armées (§ebâ’ô(), » Am., iii, 13, etc. Voir La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. iv, p. 470-480,

— 2°’Èlôhîm se dit aussi des faux dieux, Éxod., XII, 12 ; xxxiv, 15, etc., et des simulacres ou idoles qui les représentent aux yeux de leurs adorateurs. Gen., xxxi, 30, 32 ; Exod., xx, 23 ; II Par., xxv, 14, etc.’Ëlôha, au singulier, s’emploie également dans le même sens. II Par., xxxii, 15, etc. — 3°’ÊlôhÎ7ti a même une fois le sens de « déesse », I (III) Reg., xi, 5, la langue hébraïque n’ayant ni mot ni forme particulière pour exprimer la divinité femelle, inconnue au monothéisme. — La signification polythéiste d’Élohim est déterminée par le contexte ou bien par des compléments ou des épithètes : « dieux de l’étranger, » Gen., xxxv, 2 ; « dieux d’argent, » Exod., xx, 23 ; « dieux des nations, » Deut., xxix, 17 ; « dieux des Égyptiens, » Gen., xii, 12 ; « dieux de l’Amorrhéen, » Jos., xxiv, 15 ; « dieu d’Accaron, » II (IV) Reg., 1, 2, etc. — 4° Il faut noter qu’Élohim se dit aussi métaphoriquement, quoique par exception : 1. des juges, considérés comme les représentants de la justice de Dieu. Exod., xxi, 6 ; xxii, 7, 8 (où les Septante rendent bien, Exod., xxi, 6, l’idée exprimée en traduisant : tô xpi-CTJp ; ov toù 0£oû). — 2. Les Septante, la Vulgate, la Pèschito, la version arabe, ont rendu Élohim par « anges », Ps. xcvii (xcvi), 7 ; cxxxviii (cxxxvii), 1, comme Ps. viii, 6 ; mais leur interprétation n’est pas certaine.

— 3. Les rois sont comparés à des Élohim dans le Ps. lxxxii (lxxxi), 1, 6. — 4. Xe nom d’Élohim ajouté comme complément à un substantif forme une sorte de superlatif : « Montagne d’Élohim, » désignant, Ps. lxviii (lxvii), 16, les montagnes de Basan, en marque la grandeur et la magnificence. Voir aussi Ps. lxv (lxiv), 11 ; Civ (cm), 16. — Sur la nature et les attributs de Dieu, d’après l’Écriture, voir Jéhovah. F. Vigouroux.

ÉLOHISTES. Voir Pentateuque.

ÉLOÏ. Voir Éli, col. 1664.

ÉLON. Hébreu : ’Ëlôn, « chêne, chênaie. » Nom d’un Héthéen, de deux Israélites et de trois villes de Palestine.

1. ÉLON (Septante : Atôs., ’EXtiji), Héthéen, père de Basemath ou Ada, une des femmes d’Ésaû. Gen., xxvi, 34 ; xxxvi, 2.

2. ÉLON (Septante : ’Aapûv ; Codex Cottonianus : "AUiov), fils de Zabulon, Gen., xi.vi, 14, et père de la famille des Élonites. Num., xxvi, 26.

3. ÉLON, nom (dans le texte hébreu) d’un juge d’Israël, que la Vulgate appelle Ahialon. Jud., xii, 11. « Et il (ꝟ. 11, Ahialon de Zabulon) mourut, et il fut enseveli dans Zabulon. » ꝟ. 12. L’hébreu est plus complet dans ce verset 12 : « Et’Êlon de Zabulon mourut, et il fut enterré à’Ayyâlôn, dans la terre de Zabulon. » Le nom du juge et celui de la ville ne diffèrent que par les points-voyelles. Voir t. i, col. 292, 297.

4. ÉLONjhébreu : ’Allôn ; dans bon nombre de manuscrits, ’Elôn ; Septante : Codex Vaticanus, Mm).â ; Codex Alexandrinus, Mt)Àù>v), ville frontière de la tribu de Nephthali. Jos., xix, 33. Il y a ici une foule de difficultés qu’il est utile d’exposer, mais dont on cherche encore la solution. Elles portent principalement sur le texte. Et d’abord le texte complet, Jos., xix, 33, est, en hébreu : tnê-’Allôn be-$a’ânannîm, « depuis Allon en Sa’anannim ; » Vulgate : Et Elon in Saananim. Les Septante ont uni les deux prépositions mé (pour min) et be aux mots eux-mêmes, en intercalant la conjonction vav, <l et, » d’où. McoXi xai B : <7equsfv, dans le Codex Vaticanus, et MtjXmv xii Biljsvavs’ii, dans YAlexanctrinus. D’ua autre côté, si

plusieurs manuscrits et éditions du texte massorétique présentent’Allôn, p’îN, avec palach, d’autres, et en assez

grand nombre, ont’Êlôn, rVn », avec tsêré. La première

leçon a été suivie par la Peschito, ’Alun ; mais la seconde a pour elle le Targum de Jonathan, mê-’Êlôn, les Septante, au moins d’après V Alexandrinus, Mt)Xwv, et la Vulgate, Elon. Aussi des critiques très compétents donnent-ils la préférence à cette dernière. Cf. J t -B. de Rossi, Scholia critica in V. T. libros, seu Supplementum in var. lect., Parme, 1798, p. 35-36. C’est du reste le mot qu’on trouve dans un autre passage de l’Écriture, Jud., IV, 11. En effet, la « vallée » dans laquelle Haber le Cinéen t avait dressé ses tentes » est appelée’Êlôn be - $a’annim. C’est donc en somme la même expression que dans le livre de Josué. Mais les anciennes versions ont prêté au premier mot ou même aux deux un sens commun. Ainsi le syriaque a traduit : « près du térébinthe qui est à Se’înîn ; » la Vulgate : « jusqu’à la vallée qui est appelée Sennim. » La paraphrase chaldaïque a mis : mîSar’agannayà’, « la plaine des étangs ou des bassins, » attribuant à’Êlôn la même signification que saint Jérôme, et rattachant besa’annîm au talmudique besa’. Cf. J. Levy, Chaldàisches Wôrterbuch, Leipzig, 1881, t. i, p. 8, au mot’âgànà’; G. Rosenmûller, Scliolia in Vet. Test., Josua, Leipzig, 1833, p. 378. Enfin on trouve dans les Septante : Codex Vaticanus, ëwç Spubç nXeovextoûvkiiv ; Codex Alexandrinus, icpoç Spùv àvanajoiiévcov, « jusqu’au chêne des ambitieux ou des avares, » ou « au chêne de ceux qui se reposent ». Le premier participe fait croire que les interprètes ont lu bôse’îm, de la racine basa’, qui indique « la recherche d’un gain injuste » ; le second laisse supposer, suivant quelques-uns, qu’ils ont lu sa’anannîm, de Sâ’an, « se reposer ; » d’autres pensent à une variante du mot grec et à une autre étymologie. Cf. J. F. Schleusner, Lexicon in LXX, Londres, 1829, t. i, p. 196 ; t. ii, p. 784.

Dans ces conditions, voici les deux questions qui se posent. — 1° Doit-on considérer’Êlôn comme un nom propre ou comme un nom commun ? Nous venons de voir que les versions anciennes ont adopté l’une et l’autre interprétation ; leur poids est donc nul ici dans la balance. Il est d’autres expressions semblables dans lesquelles elles ont pris le même mot pour un nom commun ; par exemple : ’Êlôn Tâbôr ; Septante : Spùç 00t6<ip ; Vulgate : quercus Tabor, I Reg., x, 3 ; ’Êlônê Mamrê’; Septante : 8pû ; Motjiêpij ; Vulgate : convallis Mambre, Gen., xiii, 18. etc. Les chênes ou les térébinthes remarquables par leurs dimensions ont souvent servi à désigner certaines localités bibliques. Il est donc permis de traduire ici par « le térébinthe » ou <i la vallée de Sa’annim (Besa’annim, suivant quelques-uns). Ce dernier mot vient de sa’ân, qui signifie « changer la tente », proprement « charger les montures (pour changer de campement) » ; il indique donc probablement un endroit où campaient d’ordinaire les caravanes ou les nomades comme Haber le Cinéen.

— 2° Où se trouvait cet endroit ? Le livre des Juges, iv, 11, le place près de Cadès, aujourd’hui Qadès, au nord-ouest du lac Houléh. Voir Cédés 1, col. 360. Il y a en effet, à l’ouest de ce lac, une plaine qui est encore actuellement habitée par des nomades dont on aperçoit çà et là les tentes noires. Elle pouvait également servir à déterminer de ce côté la frontière de Nephthali, Jos., xix, 33, comme Héleph (Beit Lif) la fixait sur la ligne occidentale opposée. Voir Saananim et Nephthali, tribu et carte.

A. Legendre.

5. ÉLON (hébreu : ’Êlôn ; Septante : ’E).ù>v ; Codex Vaticanus : AiXùv), ville de la tribu de Dan. Jos., xix, 43. Mentionnée entre Jéthéla (dont l’identification est incertaine ) et Themna (aujourd’hui Khirbet Tibnéh), elle faisait partie du groupe méridional des cités énumérées par Josué, xix, 40-47. Voir Dan 2, et la carte, col. 1232. On a proposé de la reconnaître dans le village actuel de

Beit Ello, au nord-ouest de Béthel, au nord de Béthoron. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1882, t. ii, p. 293 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 56. Mais il n’y a ici correspondance ni au point de vue philologique ni au point de vue topographique ; l’endroit désigné appartient plutôt à la tribu d’Éphraïm. D’autres ont pensé à’Ellîn [’Alîn, suivant la carte du Palestine Exploration Fund, Londres, 1890, feuille 14), au sud-est et tout près d’Ain Schenis, l’ancienne Bethsamès. Cf. Keil, Josua, Leipzig, 1874, p. 163. Sans être certaine, cette opinion nous semblerait plus acceptable. Le changement de Yaleph initial de lib »  », ’Êlôn, en ain, £ ?*)£, ’Alin, se retrouve dans d’autres noms, par exemple, jiSptf ii, ’ASqelôn (Ascalon) =, y^, a’.n*c, ’Asqalàn. Ensuite le voisinage de Khirbet Tibnéh { Themna) détermine une position conforme au texte sacré. Il en est de même du voisinage d’Aire Schems ou Betbsamès, près de laquelle Élon est citée dans un autre endroit de l’Écriture, III Reg., iv, 9. Si, en effet, avec la Vulgate, on regarde ce dernier nom comme indiquant une localité distincte de Béthanan, qui suit, on devra reconnaître dans le IIIe livre des Rois la même cité que dans le livre de Josué. Elle appartenait à la tribu de Dan comme Salebim (Selbil) et Bethsamès, qui la précèdent. Ici cependant, à cause du texte hébreu, qui porte’Êlôn Bê(-ffânân, nous trouvons la même difficulté que pour’Êlôn be-Sa’annim (voir Élon 1), et l’on pourrait se demander si’Êlôn est un nom propre ou un nom commun. Mais les versions anciennes donnent unanimement la première interprétation. Voir Béthanan, 1. 1, col. 1653 ;

Élon 6.
A. Legendre.

6. ÉLON (hébreu : ’Êlôn ; Septante : ’EXèav ; Codex Vaticanus : ’ÉXwu, ; Codex Alexandrinus : AiaXàu.), ville soumise à l’intendance de Bendécar, un des douze préfets chargés, sous Salomon, de fournir aux dépenses de la table royale. III Reg., iv, 9. Le plus grand nombre des manuscrits hébreux ne la distinguent pas par la conjonction vav, j. et, » du nom suivant, Bêt-Hànân, et portent : ve’Elôn Bêt-Hànân. Cf. B. Kennicott, Vêtus Testamenlum hebr., Oxford, 1776, t. i, p. 609 ; J.-B. de Rossi, Varies lecliones Vet. Test., Parme, 1785, t. ii, p. 205. Fautil traduire : « le chêne de Béthanan, » comme « le chêne de Thabor », I Reg., x, 3 ? Voir Élon 1. ^Nous croyons plutôt, avec les Septante et la Vulgate, qu’il s’agit ici d’un nom propre. Faut-il maintenant, avec la paraphrase chaldaïque, les versions syriaque et arabe, lire : « ’Êlôn de Bêt-Hànân, » ou « ’Êlôn qui est en Beit Hanan » ? Dans ce cas, Élon ne serait qu’une localité dépendante de Béthanan, qui a été identifiée d’une façon plausible avec le village actuel de Beit-’Anân, au nord-ouest de Jérusalem et à l’est de Selbît, et alors elle appartiendrait à la tribu de Benjamin ; Voir Béthanan, t. i, col. 1653. En somme, nous accepterions plus volontiers la leçon des versions grecque et latine, et, reconnaissant ici une ville distincte, nous l’assimilerions à la cité danite dont parle Josué, xix, 43. Voir Élon 5.

A. Legendbe.

    1. ÉLONITES##

ÉLONITES (hébreu : hâ’êlônî ; Septante : 6’AXXwvef ; Codex Alexandrinus : à’AXXwvf), famille descendant d’Élon, fils de Zabulon. Num., xxvi, 26 (Septante, 22), ,

    1. ELPHAAL##

ELPHAAL (hébreu : ’Élpa’al, « Dieu récompense » {cf. le nom phénicien bys’lx] ; Septante : ’AXfetaS et’EX-^âaS ; Codex Alexandrinus : ’EXfâaX), fils de Saharaïm, dans la tribu de Benjamin. I Par., viii, 11. La Vulgate porte : « Mehusim engendra… Elphaal ; » mais le texte hébreu a : « Et de Husim il (Saharaïm) engendra…. Elphaal. » Husim est la femme que Saharaïm avait renvoyée avant d’aller dans le pays de Moab. y. 8. Elphaal fut le père d’une nombreuse famille, y. 12, 17-18.

    1. ELSNER##

ELSNER (Jacques), théologien protestant allemand, né en mars 1692 à Saalfeld, petite ville de Prusse, mort le 8 octobre 1750 à Berlin. Fils d’un riche marchand, il se sentit fortement attiré vers l’étude ; aussi, au sortir de l’école de sa ville natale, se rendit-il à l’université de Kœnigsberg, où il étudia les langues orientales, et il devint, en 1715, correcteur de l’école des réformés de cette ville. Au bout de deux ans, il résigna cette charge et entreprit un voyage scientifique à Dantzig, à Berlin, à Clèves, en Hollande. Il prit à Dlrecht le grade de docteur en théologie. Au bout de ce voyage, qui dura quatre ans, il avait déjà acquis une telle renommée, que le roi de Prusse le chargea de professer à Lingen, en Westphalie, la théologie et la philologie sacrée. En 1722, il fut nommé recteur à Berlin, et en même temps premier professeur au Joachimsthaliches Gymnasium. Il fut ensuite second, puis premier prédicateur à l’église paroissiale. Enfin, en 1742 et en 1744, il occupa, à la Société royale, la place de directeur de la classe des Belles-Lettres. Parmi ses nombreux ouvrages, il faut citer : Observationes sacrse in Novi Fœderis libros : t. i, Libros historicos complexus, in-8°, Utrecht, 1720 ; t. ii, Epistolas Apostolorum et Apocalypsim complexus, in-8°, Utrecht, 1728 (ce livre fut l’origine de plusieurs controverses ; G. Stoer, entre autres, l’attaqua, et il fut défendu par un disciple d’Elsner) ; — Der Brief des hcil. Apostels Pauli an die Philipper, in Prediglen erklâret, durch und durch mit Anmerkungen versehen, nebst einer Einleitung, in-4°, Utrecht, 1741 ; — Diss. de lege Mosis per Angelos data, at illustranda Act., vu, 38 et 53 ; Gai, iii, 9 ; Ebr., ii, 2, 4 ; xii, 25, in-4°, Leyde, 1719. A. Régnier.

    1. ELTHÉCÉ##

ELTHÉCÉ (hébreu : ’Élleqêh, Jos.^ix, 44 ; ’Élfeqê’, Jos., XXI, 23 ; Septante : ’AXxaGà ; Codex Alexandrinus : ’EXŒxù, Jos., xix, 44 ; ’EXxwûat’u. ; Codex Alexandrinus : ’EXŒxùj, Jos., xxi, 23 ; Vulgate : Elthece, Jos., xix, 44 ; Eltheco, Jos., XXI, 23), ville de la tribu de Dan, Jos., xix, 44, donnée aux Lévites, fils de Caath. Jos., xxi, 23. Elle n’est pas mentionnée dans la liste parallèle de I Par., vi, 66-69, et n’a pu jusqu’ici être identifiée. On a proposé de la reconnaître dans Beit Liqia, au sud de Béthoron inférieur. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1882, t. iii, p. 16 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 57. Cette hypothèse manque de fondement tant au point de vue onomastique qu’au point de vue topographique. D’après l’énumération de Josué, xix, 41-47, Elthécé devait faire partie du groupe méridional des cités danites, avec Themna (Khirbet Tibnéh) et Acron ou Accaron (Agir). Voir Dan 2, et la carte, col. 1232. C’est d’ailleurs dans les environs de ces deux villes que la placent les inscriptions assyriennes. On la retrouve, en effet, exactement sous la même forme, ’Élfeqêh (le û final est mieux gardé par le grec’EX6exii et le latin Eltheco), dans le prisme hexagone de Taylor. Cf. Cuneiform Inscriptions of Western Asia, t. i, pi. 38-39, col. ii, ligne 76, 82 ; Frd. Delitzsch, Assyrische Lesestûcke, 2e édit., Leipzig, 1878, p. 101 ; E. Schrader, Die Keilinschriften und dos Alte Testament, Giessen, 1883, p. 171. Sennachérib y raconte sa campagne contre Ézéchias, roi de Juda. Après qu’il eut soumis les villes delà Séphélah, qui dépendaient alors d’Ascalon, c’est-à-dire Belh-Dagon, Joppé, Benêbàrak et Hazor, il ne restait plus désormais entre l’Euphrate et l’Egypte qu’Ézéchias et le royaume de Juda qui ne se fussent pas courbés sous le joug. Le roi de Jérusalem n’était pas précisément pour le monarque d’Assyrie un sujet rebelle comme les autres princes, mais le conquérant croyait avoir contre lui un grief suffisant pour justifier son agression : les magistrats, les grands et le peuple d’Accaron avaient

chargé de chaînes leur roi Padi, vassal de l’Assyrie, et l’avaient traîtreusement livré à Ézéchias. Avant d’attaquer le royaume de Juda, Sennachérib marcha d’abord contre les rebelles d’Accaron. Les Égyptiens étaient sortis de leurs frontières pour les défendre. Alors, dit le texte assyrien,

Col. ii, 1. 73., ..Les rois d’Egypte

74. rassemblèrent les archers, les chars et les

chevaux des rois de Miluhhi (Ethiopie),

75. troupes innombrables, et ils vinrent

76. à leur secours. Devant Altaqu

77. ils se rangèrent en bataille contre moi et

excitèrent leurs troupes [au combat]…

82. … La ville d’AJtaqu

83. j’attaquai et la ville de Timnath je les pris,

et j’en emmenai le butin.

Col. III, 1. 1. Contre la ville d’Amqaruna (Accaron) je marchai, etc.

Cf. F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., Paris, 1893, t. iv, p. 26, 27. Ce passage, on le voit, fixe très approximativement la position d’Elthécé dans les environs d’Accaron et de Thamnatha, ce qui correspond parfaitement au texte de Josué, xix, 43-44. Malheureusement, parmi les noms actuels, on n’en a retrouvé aucun qui rappelle l’antique cité. — Elthécé ne doit pas être confondue avec Elthécon, Jos., xv, 59. Voir

Elthécon.
A. Legendre.
    1. ELTHÉCON##

ELTHÉCON (hébreu : ’Élfeqôn ; Septante : Oéxou^ ; Codex Alexandrinus, ’EXÔsxév ; la Vulgate porte ordinairement Eltecon), ville de la tribu de Juda, mentionnée une seule fois dans l’Écriture. Jos., xv, 59. Elle fait partie du quatrième groupe des villes de « la montagne ». Jos., xv, 58, 59. Sur les six noms qui le composent, quatre sont bien identifiés : Halhul = Halhûl, à une heure et demie au nord d’Hébron ; Bessur (hébreu : Bêt-Sûr) = Beit Sour, à côté de la précédente, vers le nord-ouest ; Gédor = Khirbet Djédour, plus au nord ; Béthanoth == Beit’Ainoun, au nord-est d’Hébron. Voir Juda, tribu et carte. C’est donc dans cette région montagneuse que se trouvait Elthécon ; mais elle n’a pu encore être retrouvée. Saint Jérôme, Onomastica sacra, Gœttingue, 1870, p. 119, signale « Elthécé dans là tribu de Juda » et l’assimile à Thécua ou Thécué, la patrie d’Amos, aujourd’hui Khirbet Téqû’a, au sud de Bethléhem. Il ne s’agit pas évidemment d’Elthécé de Jos., xix, 44, puisque celle-ci se trouvait dans la tribu de Dan. Il faut donc plutôt voir ici Elthécon, dont la position pourrait répondre à celle de Thécué ; mais le nom de cette dernière, en hébreu : Teqô’a, a un’aïn qui le distingue complètement de celui dont nous parlons. Puis les Septante, au moins d’après le Codex Vaticanus, ont reconnu deux villes différentes, appelant la première 0sxoO|a et la seconde Qex. — Tous les détails qui concernent Elthécon empêchent de la confondre avec Elthécé, Jos., xix, 44 : l’une est de Juda, l’autre de Dan ; la dernière est dans la plaine, l’autre dans la montagne, où ne pouvaient se rencontrer les deux armées assyrienne et égyptienne. Voir Elthécé.

A. Legendre.
    1. ELTHOLAD##

ELTHOLAD (hébreu : ’Éltôlad, Jos., xv, 30 ; xix, 4 ; fôlad, I Par., iv, 29 ; Septante : ’EXêm-iSiS ; Codex Alexandrinus, ’E).8<j>ôà8, Jos., xv, 30 ; ’EX60uXâ ; Çod. Alex., ’EXÔouSâS, Jos., xix, 4 ; Codex Vaticanus, ©o-j-X « n ; Cod. Alex., BiaXiS, 1 Par., iv, 29 ; Vulgate : Eltholad, Jos., xv, 30 ; xix, 4 ; Tholad, I Par., iv, 29), ville de 1. » tribu de Juda, appartenant à l’extrémité méridionale de la Palestine, Jos., xv, 30, et assignée plus tard à la tribu de Siméon. Jos., XIX, 4 ; I Par. iv, 29. Elle fait partie d’un groupe qui ne renferme guère que des inconnues, à part Bersabée et quelques autres ; aussi a-t-elle été jusqu’ici rebelle à toute identification. Pour l’étymologie et la signification du mot, on peut voir : J. Simonis,

Onomasticum Vet. Testam., Halle, 1741, p. 302, 493 ; Gesenius, Thésaurus, p. 102 ; F. C. Rosenmûller, Scholiain Vet. Testant., Josua, Leipzig, 1833, p. 304.

A. Legendre.

ÉLUL (hébreu : ’ëlûl ; assyrien : ulûlu), nom, dont la signification est ignorée, du sixième mois de l’année civile des Juifs. Ce mois était de vingt-neuf jours et comprenait la fin d’août et le commencement de septembre. Il n’est mentionné que deux fois dans la Bible. C’est au vingtcinquième jour d’élul que les murs de Jérusalem furent achevés par les Juifs revenus de la captivité de Babylone. II Esdr., vi, 15. Le 18 de ce mois, en l’an 172 de l’ère des Séleucides (140 avant J.-C), Simon Machabée renouvela le traité d’alliance que son frère Judas avait conclu avec les Romains. I Mach., xiv, 27. Les rabbins rapportent au sixième mois la fondation du second Temple. Talmud de Jérusalem, Rosch ha-schana, trad. Schwab, Paris, 1883, t. vi, p. 54. E. Mangenot.

ÉLUS (hébreu : behîrîm ; grec : ÈxXex-ro :  ; Vulgate : electi), ceux qui sont choisis de Dieu pour être l’objet de ses faveurs surnaturelles, soit en cette vie, soit en l’autre. Il est à noter que, dans les trois langues, le mot qui désigne les élus vient d’un verbe qui signifie « choisir », bâhar, âxXÉYw, eligo, et qu’il implique le double sens de « choisi » et de « digne d’être choisi », par conséquent remarquable par ses qualités, beau, précieux, etc. Les participes bâhûr, êxXexToç, electus, ont ces deux significations, et l’adjectif verbal bâhîr s’applique à celui qui est choisi, élu de Dieu. II Reg., xxi, 6 ; Ps. cvi, 23 ; ls., xui, 1 ; xliii, 20 ; xlv, 4.

I. Dans l’Ancien Testament. — Le nom d’  « élus », behirîm, est donné aux descendants de Jacob, particulièrement aux Hébreux tirés d’Egypte, et à tout Israël en général, en tant que constituant une société que Dieu comble de biens temporels et spirituels. Ps. cv ( cvi), 6, 43 ; cvi (cv), 5. Isaïe, lxv, 9, 15, 23, donne le même nom aux Israélites qui se convertiront au Seigneur et formeront un peuple régénéré. Compares à la totalité de la nation, ils ne seront qu’une minorité, <> un grain dans une grappe, » dit le prophète. Is. lxv, 8. Tobie, xiii, 10, appelle « élus » la portion fidèle d’Israël durant la captivité. Dans la Sagesse, iii, 9 ; lv, 15, les élus sont identiques aux justes qui vivent dans la fidélité à Dieu. Enfin, dans l’Ecclésiastique, xxiv, 4, 13 ; xlvi, 2, les élus sont ceux de ces mêmes justes qui appartiennent au peuple d’Israël. En somme, dans l’Ancien Testament, on ne connaît sous le nom d’élus que les Israélites, en tant que choisis pour être le peuple de Jéhovah, ou surtout en tant que fidèles à cette destination religieuse.

II. Dans le Nouveau Testament. — Les élus sont : 1° Ceux qui font partie delà société spirituelle fondée par Notre -Seigneur. — Ainsi saint Pierre écrit « aux élus de la dispersion », c’est-à-dire à ceux, des Juifs dispersés par le monde qui ont embrassé la foi de Jésus-Christ. I Petr., i, 1. Voir col. 1441. Il leur dit qu’ils sont la « race élue », ce qu’il explique en les appelant encore la « nation sainte », le « peuple acquis » par le Rédempteur, qui les a « appelés des ténèbres à son admirable lumière ». I Petr., i, 9.

— Saint Paul se sert du mot « élus » dans le même sens. Il appelle « élus de Dieu », Rom., viii, 33, ceux qui sont sanctifiés par la grâce de Jésus-Christ et qui passent par ces cinq stades de la sanctification : la prescience de Dieu qui les connaît à l’avance, la prédestination de Dieu qui veut les faire ressembler à son divin Fils, la vocation qui leur notifie intérieurement le décret divin porté en leur faveur, la justification qui accomplit en eux l’œuvre du salut, la glorification qui couronnera l’effort combiné de la grâce et de la volonté humaine. Rom., viii, 29, 30. L’Apôtre ne considère cependant ici les « élus » qu’au troisième et au quatrième stade de leur transformation surnaturelle. Il écrit aux Thessaloniciens, II, ii, 13, que « . Dieu les a élus comme des prémices pour le salut ii,

c’est-à-dire que Dieu les a fait entrer dans la société nouvelle avant leurs frères encore restés juifs ou païens. Il recommande aux Colossiens, iii, 12, de se revêtir des vertus, comme il convient « à des élus de Dieu, à des saints, à des bien-aimés ». La pratique des vertus suppose nécessairement que les élus font partie de l’Église mili. tante. Saint Paul lui-même est apôtre « selon la foi des élus de Dieu », Tit., i, 1, c’est-à-dire pour prêcher cette foi qui fait les fidèles disciples de Jésus-Christ et implique « l’espérance de la vie éternelle ». Tit., i, 2. Ce titre d’  « élus » ou de membres de la société nouvelle n’est pas inamissible. Aussi saint Pierre recommande-t-il de s*en assurer la possession certaine au moyen de bonnes œuvres. II Petr., i, 10. — Saint Jean déclare aussi que le nom d’  « élus » et de « fidèles » n’appartient qu’à ceux qui combattent avec l’Agneau contre les puissances infernales. Apoc, xvii, 14. — Saint Paul « souffre tout pour les élus », Il Tim., ii, 10, c’est-à-dire pour les fidèles qu’il a engendrés à Jésus-Christ. — Dieu lui-même écoute la voix de ses élus qui crient vengeance, Luc, xviii, 7, c’est-à-dire de ses serviteurs persécutés sur la terre. « En faveur de ses élus, » il abrégera les calamités des derniers temps, de peur qu’ils ne soient déçus par les faux prophètes et qu’ils manquent leur salut. Matth., xxiv, 22, 24, 31 ; Marc, xiii, 20, 22, 27. — Ce nom d’  « élus » est donné aux fidèles de l’Eglise, d’abord parce qu’ils sont l’objet d’un libre choix de la bonté divine, Rom., xi, 5-7, 28 ; ensuite parce que, par leur conduite, ils doivent être des hommes à part, des hommes de choix. Ephes., IV, 17.

2° Ceux qui ont mérité de passer de la société spirituelle de la terre à la société glorieuse du ciel. — C’est à ces derniers que, dans le langage courant, nous réservons le nom d’  « élus ». Ce nom ne peut pourtant avoir le sens d’habitant du ciel que dans un seul texte, qui d’ailleurs est répété à la suite de deux paraboles : « Beaucoup sont appelés, mais peu sont élus. » Matth., xx, 16 ; xxii, 14. Que faut-il entendre ici par les élus ? La question est d’autant plus grave, que sur elle se greffe celle du nombre des élus. — 1. Dans la parabole des invités aux noces, Matth., xxii, 1-11, les premiers appelés refusent de venir et sont remplacés par des invités de rencontre qui prennent place dans la salle du festin. Parmi ces derniers, un seul est jeté dehors, parce qu’il n’a pas la robe nuptiale. Le contexte indique clairement que cette parabole s’adresse aux Juifs. Invités les premiers à entrer dans « le royaume des cieux », c’est-à-dire dans l’Église de Jésus-Christ, ils refusent et sont remplacés par d’autres hommes moins favorisés jusque - là. Ceux - ci cependant n’ont pas droit au royaume du ciel par le seul fait de leur entrée dans l’Église. Celui qui se comporte indignement dans la société spirituelle de la terre est exclu du royaume céleste. Rien d’ailleurs n’autorise à étendre l’application de la parabole à d’autres qu’à ceux de la maison d’Israël auxquels Jésus-Christ se déclare personnellement envoyé. Matth., xv, 24. Les appelés sont donc les Juifs qui se prennent pour la vraie race d’Abraham, docteurs, scribes, pharisiens, etc. Les élus sont ces publicains, ces courtisanes, etc., qui se convertissent et précèdent les premiers dans le royaume de Dieu. Matth., xxi, 31. En ce sens, il y a certainement moins d’élus que d’appelés. — Dans la parabole des ouvriers de la vigne, Matth., xx, 1-16, les ouvriers reçoivent le même salaire, malgré l’inégalité du temps employé au travail. Notre-Seigneur conclut la parabole en ces termes : « Ainsi les derniers seront les premiers, et les premiers les derniers ; car beaucoup sont appelés, mais, peu sont élus. » La seconde sentence est présentée comme une explication de la première. Le lien logique entre la dernière sentence et tout ce qui précède est peu apparent ; aussi cette sentence manque-t-elle dans plusieurs manuscrits importants [a, B, etc.) et dans plusieurs versions anciennes, telles que le copte, et des commentateurs pensent qu’elle est, en effet, à supprimer. Mais elle se lit dans trop d’autres

I manuscrits et est reproduite par trop d’auteurs anciens pour qu’on puisse admettre hardiment la légitimité de sa suppression. Il faut donc en chercher l’explication. — 2. Certains Pères de l’Église, prenant la sentence évangélique indépendamment de son contexte, en ont conclu que

; les élus, ceux qui se sauvent, ne sont que le petit nombre.

S. Augustin, Serm., xc, 4 ; t. xxxviii, col. 561. Pour justifier son affirmation, ce Père va même jusqu’à dire que l’homme qui n’a pas la robe nuptiale et qui est jeté dehors figure toute une multitude. Serm., xcv, 6, t. xxxviii, col. 583 ; S. Grégoire le Grand, Rom. in Evang., i, xix, 5 ; II, xxxviii, 14 ; t. xxiii, col. 1157, 1290 ; S. Thomas, Summ. theol., i, q. 23, a. 7, ad 3 am ; etc. Ils ont été suivis dans leur interprétation par un bon nombre de théologiens, de commentateurs et d’orateurs sacrés. Voir spécialement Bossuet, Méditations sur l’Évangile, dernière semaine, xxxive jour ; Bourdaloue, Pensées sur divers sujets de religion et de morale, x, petit nombre des élus ; et surtout Massillon, Grand carême, XLlll" sermon, sur le petit nombre des élus. — 3. Parmi les modernes, il y a tendance marquée à interpréter d’une manière plus large la sentence qui termine les deux paraboles évangéliques. Le mot « élus » désignerait ici, non pas ceux qui se sauvent, mais les âmes « de choix » qui servent le Seigneur avec plus d’ardeur que les âmes ordinaires. On remarquera que c’est le sens qui convient au mot IxXextoi, electi, dans la plupart des passages de la Sainte Écriture cités plus haut, tandis qu’en français le mot « élu » a une signification plus spéciale. Dans la parabole des noces, les âmes d’élite sont représentées par les invités dociles à l’appel du maître. Les premiers invités sont seulement des « appelés ». Peut-être en est-il parmi eux qui finiront par venir à fa dernière heure. Notre -Seigneur ne préjugj rien sur leur salut final. Il s’est même contenté de dire aux Juifs que les publicains et les courtisanes les précéderont dans le royaume des cieux, Matth., xxi, 31, ce qui suppose qu’eux-mêmes viendront plus tard. De fait, beaucoup de Juifs, d’abord rebelles à la prédication du divin Maître, se sont ensuite convertis à la voix des Apôtres. La seule condamnation qui soit portée tombe sur le malheureux qui a négligé de revêtir la robe nuptiale, c’est-à-dire de remplir les conditions requises pour passer de la société spirituelle de la terre à la société glorieuse du ciel. — Dans la parabole des ouvriers envoyés à la vigne, l’appel divin se fait entendre à tous, tous y répondent, tous reçoivent la récompense. Mais, parmi eux, les ouvriers de la première heure sont seuls des « élus », des âmes d’élite, représentant ces âmes chrétiennes, relativement peu nombreuses, qui se donnent à Dieu sans retard et lui restent dévouées et fidèles sans défaillance. Il ne faut pas négliger non plus le rapprochement que Notre -Seigneur établit entre les deux sentences : « Les derniers seront les premiers, et les premiers les derniers, » et : « Beaucoup sont appelés, mais peu sont élus. » Matth., xx, 16. L’étude des derniers versets du chapitre précédent de saint Matthieu, xix, 27-30, montre que les premiers et les derniers représentent deux catégories de fidèles, les uns fervents et généreux, tes autres moins détachés des choses de ce monde. Notre-Seigneur avertit ses Apôtres de prendre garde à ne pas déchoir de leur ferveur et à ne pas abandonner le premier rang pour le dernier. Si donc les premiers et les derniers sont des membres de la société spirituelle qui travaillent les uns et les autres à leur salut, il faut en dire autant des appefés et des élus. La formule évangélique reviendrait donc à ceci : Tous les hommes sont appelés au salut, puisque « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés », 1 Tim., H, 4 ; parmi tous ces appelés au salut, beaucoup sont appelés à une vie fervente et parfaite ; mais peu répondent à cet appel et deviennent des âmes d’élite. — Sur ce sens donné aux deux paraboles et à la sentence finale, voir Bergier, Traité de la vraie religion, nr> partie, IX, il, 7, Œuvres complètes, Paris, 1855, t. vii, col. 1285 ;

Lacordaire, lxx’Conférence de Notre-Dame, 1851 ; Faber, Le Créateur et la créature, iii, 2, trad. de Valette, Paris, -1858, p. 270-281 ; Progrès de l’âme, xxl, trad. de Bernhardt, Paris, 1856, p. 373-388 ; Méric, L’autre vie, Paris, 1880, t. ii, p. 181-194 ; Liagre, In SS. Malth. et Marc, Tournai, 1883, p. 339 ; Monsabré, Conférences de Notre-Dame, 1889, VIe confier. ; Knabenbauer, Evang. sec. Matth., Paris, 1893, t. ii, p. 178, 247 ; Mauran, Élus et sauvés, Marseille, 1896, p. 87-128. — 4. Si l’on a pu tirer des paraboles évangéliques des conclusions contraires ou favorables à la croyance au grand nombre des élus, il ne faut pas oublier que Notre -Seigneur a formellement évité de se prononcer sur ce sujet. À la question théorique qu’on lui posa un jour : « Seigneur, sont-ils rares ceux qui se sauvent ? » il répondit en donnant un conseil tout pratique : « Efforcezvous d’entrer par la porte étroite. » Luc, xiii, 23, 24. On ne peut du reste fonder aucune présomption, quant au nombre des élus, sur les paraboles évangéliques. Dans la parabole des ouvriers de la vigne, Matth., XX, 1-16, tous sont récompensés ; dans celle des vierges, Matth., xxv, 1-13, cinq vierges sont reçues et cinq sont rejetées ; dans celle des talents, Matth., xxv, 14-30, deux serviteurs sont récompensés et un troisième est puni, etc. La question du nombre relatif des élus paraît donc être une de celles dont Notre -Seigneur s’est réservé le secret. Toutefois les textes évangéliques sur lesquels on appuie d’ordinaire la théorie du petit nombre peuvent être entendus dans un sens beaucoup plus large qu’ils ne l’ont été par les anciens, tout au moins en ce qui concerne la proportion de ceux qui se sauvent parmi les chrétiens.

H. Lesêtre.
    1. ELUSAÏ##

ELUSAÏ (hébreu : ’Él’ûzay, « Dieu est mes louanges ; » Septante : ’AÇat ; Codex Alexandrinus : ’EXtwÇî), un des guerriers de la tribu de Benjamin qui se joignirent à David pendant son séjour à Siceleg. I Par., xii, 5.

    1. ÉLYMAÏDE##

ÉLYMAÏDE (Septante : ’EXu|i<xf ; ), province de Perse.

I. Description. — L’Élymaïde est ordinairement considérée comme une partie de la Susiane, mais ses limites sont très difficiles à établir. Strabon, XI, xiii, semble étendre ses limites au nord jusqu’à la Grande Médie ; ailleurs, XVI, 1, 8, il la nomme parmi les provinces situées à l’est de la Babylonie, et XVI, i, 18, il la place dans les régions montagneuses qui s’étendent au nord de la Susiane jusqu’au mont Zagros. D’après Pline, H. N., VI, xxvii, 111, 134, 135, et Plolémée, vi, 3, l’Élymaïde aurait eu pour limites l’Eulæus, l’Oroatis, sur la frontière de la Perside et le golfe Persique. Il est probable que l’Élymaïde varia d’étendue, suivant les succès et les revers du peuple belliqueux qui l’habitait. Dans sa plus grande étendue, elle comprit lès provinces de Gabiane et de Corbiane. Strabon, XVI, i, 18. Voir la carte d’ÉLAM. — Les montagnards de l’Élymaïde étaient des guerriers vaillants et d’habiles archers. Les habitants de la plaine se livraient à l’agriculture. Ils possédaient des temples dont les richesses tentèrent Antiochus III le Grand. Celui-ci essaya de piller le temple de Bélus, mais il fut massacré par la population. Strabon, XVI, i, 19 ; Diodore de Sicile, xxviii, 3 ; xxix, 18. Cf. II Mach., i, 1-16, et voir t. i, col. 692.

II. L’Élymaïde dans la Bible. — Le seul passage de la Sainte Écriture où se trouve le mot Élymaïs ou Élymaïde a donné lieu à de vives discussions. Dans le texte reçu et la tradition de la Vulgate de I Mach., vi, 1, il est dit qu’Antiochus IV Épiphane, ayant appris qu’Élymaïs possédait de grandes richesses, et en particulier des tissus d’or, des cuirasses et des boucliers, qu’Alexandre le Grand y avait laissés, en ex-voto, dans un temple, chercha à s’emparer de la ville pour la piller. Il ne put y réussir ; les habitants, instruits de ses desseins, firent une résistance énergique ; il dut s’enfuir et se réfugier à Babylone. Dans II Mach., ix, 2, la ville qu’il assiégea

ainsi est nommée Persépolis. La leçon du texte reçu de

I Mach., VI, 1, est fautive. Il faut lire selon les meilleurs manuscrits : ’Eo-tiv Èv’EX’JfidiSe, èv tfj IUp<rî51, n&Xic êvîoEoç. « Il y a en Élymaïde, en Perse, une ville célèbre. » La ville d’Élymaïs n’existe pas, et il s’agit ici de la province d’Élymaïde. Le nom de la ville n’est pas donné. Dans

II Mach., IX, 2, le sens est le même, Persépolis signifie simplement « une ville de Perse ». Le temple que voulut piller Antiochus IV Épiphane était le temple de la déesse Nanée. II Mach., ix, 2. Josèphe, Ant. jud., XII, ix, 1, appelle cette divinité Artémis, cf. S. Jérôme, In Dan., xi, 44, 45, t. xxv, col. 573 ; Pline, H. N., VI, xxvii, 134 ; c’est aussi le nom que lui donne Polybe, xxxi, 11 ; Appien, Syr., p. 66, l’appelle Aphrodite. On a trouvé dans cette région un grand nombre de petites statues de la déesse Anaïtis. U. K. Loftus, Travels and Besearches in Chaldœa and Susiana, in-8°, Londres, 1856, p. 379. C’est très probablement la même divinité qui est désignée sous ces noms divers. Voir Nanée et Antiochus 3, 1. 1, col. 698-700.

— La ville qui n’est pas nommée dans les Machabées peut être Suse, la ville la plus importante de la Médie, une des capitales des rois perses. Pline nous apprend, H. N, VI, xxvii, 135, qu’il y avait là un temple consacré à Artémis, c’est-à-dire, sans doute, à Nanée. Voir Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, 4e édit., t. iv, p. 626. E. Beurlier.

ÉLYMAÏS. Voir Élymaïde.

    1. ÉLYMAS##

ÉLYMAS, magicien appelé Barjésu (voir ce mot, 1. 1, col. 1461), que saint Paul frappa d’aveuglement en face du proconsul de Chypre. Act., xiii, 6-12.

ÉLYMÉENS. Voir Élicie.ns et Élamites.

    1. ELZABAD##

ELZABAD (hébreu : ’Élzâbâd, « Dieu donne » [Théodore ] ; Septante : ’EX^aSiO ; Codex Alexandrinus ; .*EXÇa6aS), fils de Séméias, lévite de la branche de Coré et de la famille d’Obédédom et portier du Temple. I Par., xxvi, 7.

    1. ELZÉBAD##

ELZÉBAD (hébreu : ’Élzâbâd, comme le précédent ; Septante : ’EXicxÇép ; Codex Alexandrinus : ’EXsÇiëàS), guerrier dé la tribu de Gad, qui se joignit à David pendant qu’il se cachait dans le désert, devant Saûl. I Par., XII, 12.

    1. ÉMAIL##

ÉMAIL, sorte de vernis, obtenu par la vitrification de certaines substances fusibles, dont on se sert pour recouvrir la brique, la poterie, la faïence, les métaux, et auxquelles on ajoute des oxydes métalliques pulvérisés, selon les couleurs qu’on veut obtenir. L’émail était connu et employé par les Assyriens, plus encore par les Chaldéens et ensuite par les Perses, qui l’empruntèrent à ces derniers.

1° En Assyrie, la décoration des murailles dans les palais a moins souvent fait usage de la brique émaillée que de basreliefs en pierre, ou de peintures à fresque sur une sorte de mastic ou stuc. On la trouve cependant formant le parement des murs au-dessus des sculptures, Layard, Monuments of Nineveh, t. ii, pi. 13, ou bien servant à l’ornementation des portes, comme on peut s’en faire une idée par la superbe archivolte émaillée, découverte dans les ruines de Khorsabad. Place, Ninive, t. iii, pi. 16 ; cf. t. i, p. 233.

2° Mais à Babylone, où l’on n’avait pas la ressource de la pierre, et où la peinture à fresque n’eût pas oûert assez de résistance à l’air humide, surtout pour les murs extérieurs, on employa de préférence la brique émaillée. Les moindres fouilles font apparaître de grandes quantités de ces briques ; malheureusement l’état des ruines de la Chaldée et surtout de Babylone n’a pas permis jusqu’ici de trouver des sujets entiers ou des fragments de déco

ration aussi considérables qu’en Assyrie. Ce qu’on a découvert toutefois montre la supériorité de la fabrication babylonienne : l’émail est plus épais, plus solide : contrairement à l’émail de Khorsabad ou de Nimroud, qui, exposé à l’air après les fouilles, s’est effrité et terni, celui de Babylone demeure inaltérable. Les scènes les plus variées ornaient les murs des palais ; Diodore de Sicile, II, viii, 4, nous en décrit quelques-unes d’après Ctésias, qui avait habité Babylone : « On voyait toute espèce d’animaux dont les images avaient été imprimées sur les briques encore crues ; ces figures imitaient la nature par l’emploi des couleurs… Sur les tours et sur les murailles, on voyait toutes sortes d’animaux, imités selon toutes les règles de l’art, tant pour la forme que pour la couleur. Le tout représentait une chasse de divers animaux, dont les proportions dépassaient quatre coudées. » Disons, en passant, qu’on se ferait une idée inexacte de ces images en prenant à la lettre les expressions de Diodore parlant d’imitation de la nature selon toutes les règles de l’art. Les sujets découverts jusqu’ici ont montré qu’hommes, animaux, arbres, sont dépouillés de leurs couleurs naturelles, pour en revêtir de conventionnelles ou d’arbitraires. Bérose, De rébus Babyl., i, § 4, dans Fragmenta historicor. grœcor. édit. Didot, t. ii, p. 497, a sans doute en vue des scènes semblables quand il parle des peintures du temple de Bel, où « toutes sortes de monstres merveilleux présentaient la plus grande variété dans leur forme ». Pour composer ces tableaux qui décoraient les murs, il fallait un grand nombre de briques ; et pour les disposer à leur place, il était nécessaire de les marquer auparavant d’un signe ou d’un numéro d’ordre. Mais un travail plus difficile encore, c’était de répartir sur chaque brique la partie exacte du dessin général, en sorte que la juxtaposition des diverses briques constituât un ensemble parfait. Le moyen, « c’était de préparer d’avance, comme nous dirions, un carton sur lequel des lignes tracées à la règle indiqueraient cette répartition. Les briques étaient ensuite façonnées, modelées et numérotées ; puis chacune d’elles recevait la portion du fond ou du motif qui lui était assignée par le numéro d’ordre qu’elle portait et qui correspondait aux chiffres inscrits sur le modèle. La couleur était appliquée sur chaque brique séparément ; ce qui le prouve, c’est que sur la tranche de beaucoup de ces fragments, on voit des bavures qui ont subi la cuisson. » Perrot, Histoire de l’art, t. ii, p. 301 ; cf. p. 295-310, 705-708 ; E. Babelon, Manuel d’archéologie orientale, in-8°, Paris, 1888, p. 127-131. Les briques émaillées étaient fixées à la muraille soit à l’aide de bitume, comme à Babylone, soit par le moyen d’un mortier bien moins tenace, comme à Ninive. — Il est difficile de ne pas voir une allusion à ces briques émaillées de la Chaldée dans la description que fait Ézéchiel, xxm, 14, 15. Ooliba, qui représente Jérusalem dans cette prophétie, s’est passionnée pour les enfants d’Assur au point de vouloir les imiter. « Elle a vu des hommes représentés sur la muraille, des images de Chaldéens peintes au vermillon, une ceinture autour des reins, la tête ornée d’amples tiares de diverses couleurs, tous semblables à des guerriers, des portraits de Babyloniens issus de Chaldée. » Rien ne devait, en effet, frapper d’admiration les captifs de Babylone comme ces scènes de guerre, de chasse, ces représentations de génies, de dieux, qui se déroulaient le long des murs en couleurs éclatantes ; presque toujours le fond est bleu, et lés personnages sont en jaune, en rouge, avec des détails en noir ou en blanc. Voir Couleurs, t. ii, col. 1068-1869. Dans les idoles de la maison d’Israël, que le prophète (Ezech., viii, 10, 11) aperçoit aussi en visions peintes sur les murs du Temple de Jérusalem, on a vu des figures représentées sur des briques émaillées. Ézéchiel est en Chaldée, dit-on, rien d’étonnant à ce qu’il conserve la couleur de ce pays dans ses visions. Cependant il serait peut-être plus juste, d’après Je contexte, d’y voir des emprunts au culte égyptien.

3° De Chaldée, sa vraie patrie, l’émail a passé en Perse. C’est dans ce pays que les fouilles ont mis à jour les plus beaux spécimens de cet art, tels que la frise des Archers et la frise des Lions. Il est curieux qu’aucun historien ancien n’y fasse allusion : plus d’un cependant a décrit les palais des Achéménides. Perrot, Histoire de l’art, t. v, p. 548-551 ; E. Babelon, Manuel d’archéologie orientale, p. 179-184. Ainsi l’auteur du livre d’Esther n’en fait aucune mention. De même l’écrivain grec qui a composé le Traité du monde sous le nom d’Aristote, IIep x^apiou, vi, parle des palais de Suse ou d’Ecbatane, « où étincelaient partout l’or, l’électrum et l’ivoire, » et il ne dit pas un mot des briques émaillées, qui formaient cependant une des plus remarquables décorations de la résidence royale. De même plusieurs auteurs, qui n’emploient pas le mot ï)XexTp6v, parlent également des revêtements de métal ou d’ivoire sans mentionner les émaux. Et il est à remarquer que le goût de ces applications de métaux précieux s’est conservé dans la Perse moderne. Perrot, Hist. de l’art, t. v, p. 550. D’autre part le mot ï|Xextp<5v avait certainement le sens d’alliage d’or et d’argent dès le vi « siècle avant J.-C. : les lingots d’électrum envoyés par Crésus au temple de Delphes, Hérodote, i, 50, désignent certainement cet alliage. C’est aussi avec cet alliage que furent frappées les plus anciennes monnaies de Lydie. De plus dans la description de la demeure de Ménélas, Odyss., iv, 73, mentionne les revêtements d’or, d’argent et d’électrum (qui ne peut guère être ici qu’un métal). Cf. Iliad., xiii, 21 ; xviu, 369. Quand Homère veut parler de frises émaillées, comme dans la description du palais du roi des Phéaciens, Odyss., vii, 84, 90, il emploie l’expression ôptyxèi ; xuâvoio, « frise de verre bleu. » C’est le xûavoc axeuctaTÔ ; , kyanos artificiel, ou xûavoç ~/yzô(, kyanos fondu, de Théophraste, De lapid., 39, 65, qui ne saurait être que de l’émail. Perrot, Hist. de l’art, t. vi, p. 558-560. Cependant quelques auteurs pensent que le mot îjXexTpôv a été appliqué quelquefois à l’émail, comme d’après eux ce serait également le sens du f/aSmal hébreu. Mais si certains auteurs du moyen âge ont employé le mot électrum dans le sens d’émail, c’est très probablement parce que les émaux dont ils parlent ont été exécutés sur un alliage d’or et d’argent. E. Molinier, ÏÉmaillerie, in-12, Paris, 1891, p. 13. Il faut noter’aussi que Suidas, Lexicon, édit. Gaisford, Halle, 1893, p. 833, définit Vélectrum une espèce d’or où l’on a mélangé le verre et la pierre, émail qui rappelle la table de sainte Sophie. C’est probablement de là qu’est venu a l’émail la dénomination d’électrum. Voir Électrum, col. 1656. E. Levesque.

    1. ÉMALCHUEL##

ÉMALCHUEL (Septante : Ec^Xxouat’; Codexvlexandrinus : 2tv(iaXxouifi ; Sinaiticus et Venetus : ’IpmXxoué), chef arabe, à qui Alexandre I er Balas, vaincu et réfugié dans ses États, confia son jeune fils Antiochus, encore en bas âge. Quand Tryphon, partisan d’Alexandre contre Démétrius, réclama le jeune prince pour l’élever sur le trône, Ëmalchuel le lui rendit, mais non sans difficulté, à cause des crainles qu’il avait sur son sort. I Mach., xi, 39 ; cf. Josèphe, Ant. jud., XIII, v, 1, qui l’appelle MiX^oç, et Diodore de Sicile, qui le nomme AioxXéç, dans C. Mûller, Fragmenta historicorum grxcorum, édit. Didot, 1848, t. ii, § xx, p. xvi. La forme Malkou, qui rappelle le MâX^o ; de Josèphe, esl fréquente dans les inscriptions de Palmyre. Voir Journal asiatique, septembre 1897, p. 311-317.

ÉMAN. Hébreu : Hémân. Nom, dans la Vulgate, de deux ou trois Israélites.

1. ÉMAN’(Septante : Alpiouàv ; Codex Alexandrinus : Alpuzv), troisième fils de Zara dans la descendance de Juda. I Par., ii, 6. Il est donné comme frère d’Éthan, Chalcal et Dara ou Darda ; or quatre personnages de même nom sont mentionnés dans III Reg., iv, 31 (hé

breu, v, 11), comme célèbres par leur sagesse, à laquelle on compare celle de Salomon. Sur l’identification du fils de Zara avec ce sage, que la Vulgate nomme Héman, véritable orthographe de ce nom, voir Héman 2 et Éthan 1.

2. ÉMAN (Septante : Al(j.ôv), lévite, descendant de Caath, chef des chanteurs du Temple au temps de Salomon, II Par., v, 12 ; il est nommé sous sa forme véritable, Héman, I Par., vi, 33 ; xv, 17, etc. Voir Héman 3.

3. ÉMAN (Septante : Aljiàv), Ezrahite, auteur du Ps, lxxxvii, 1, d’après le titre. Son nom, ainsi écrit dans la Vulgate, l’est ailleurs sous la forme Héman, qui est la véritable orthographe. L’identification de ce personnage n’est pas sans difficultés. Voir Héman 2 et 3 et Ezrahite.

1. ÉMATH (hébreu : Ifâmâf, « forteresse, citadelle ; » une fois, Jfàmâ{ rabbâh, « , Émath la grande, » Am., VI, 2 ; Septante : Aî[iâ8, Num., xiii, 22 ; xxxiv, 8 ; IVReg., xiv, 25, 28 ; xvii, 24, 30 ; xviii, 34 ; xix, 13 ; xxv, 21 ; II Par., vu, 8 ; Jer., xxxix, 5 ; lii, 27 ; Am., vi, 15 ; ’E(j.â6, Jos., xm, 5 ; IV Reg., xxiii, 33 ; Is., xxxvi, 19 ; xxxvii, 13 ; ’Hjjiàe, II Reg., viii, 9 ; III Reg., viii, 65 ; I Par., xiii, 5 ;

.xviii, 3, 9 ; II Par., viii, 4 ; Jer., xlix, 23 ; Ezech., xlvii, 20 ; xlviii, 1 ; Zach., ix, 2 ; Codex Vaticanus, Aaêw’E[i<16 ; Codex Alexandrinus, Aoëù’H[iâ6, Jud., iii, 3 ; ’Epiaipaêêi, Am., vi, 2 ; Vulgate : Hemalk, I Par., xviii, 3, 9 ; Emath partout ailleurs), une des plus anciennes et des plus importantes villes de la Syrie, située sur l’Oronte, et capitale d’un territoire appelé’ères Ifâmât, y/j’Ejjuiâ ou Aî|x19, « terre d’Émath, » IV Reg., xxiii, 33 ; xxv, 21 ; Jer., xxxix, 5 ; lii, 9 ; ^’A[ia8ÎTtç x^P") I Mach., xii, 25. Ce territoire, dans lequel se trouvait Rébla ou Réblatha, IV Reg., xxiii, 33 ; xxv, 21 ; Jer., xxxix, 5 ; lii, 9, 27, formait par sa partie méridionale, plusieurs fois mentionnée sous le nom d’  « entrée d’Émath », la frontière nord de la Terre Promise. Num., xiii, 22 ; xxxiv, 8 ; Jos., xiii, 5 ; Jud., iii, 3 ; III Reg : , viii, 65 ; I Par., xiii, 5 ; II Par., vu, 8 ; IV Reg., xiv, 25 ; Ezech., xlvii, 16, 17 ; xlviii, 1 ; Am., vi, 15. Le mot Aaëù ou Aoëù, qu’on rencontre dans les Septante, Jud., iii, 3, avant’Ejj.àO, n’est que la transcription littérale de l’hébreu : lebô’Ifâmât, jusqu’  « à l’entrée d’Émath ». Les premiers habitants de la contrée étaient des Chananéens, que la Bible appelle Ijàmâfî. Gen., x, 18 ; I Par., i, 16 ; Septante : ô’A(j.a6t ; Vulgate : Amathseus, Gen., x, 18 ; Hamathxus, I Par., i, 16. Émath est peut-être appelée aussi Émath Suba ( hébreu : Ifâmâf

_$ôbâh), II Par., viii, 3. Voir Émath Suba.

I. NOM. — Le nom de Ifâmât se rattache, suivant Gesenius, Thésaurus, p. 487, à la racine hâmâh, « entourer de murs ; » arabe : hamâ’, « défendre, protéger. » Il indique donc une « place forte » ; nous verrons, en effet, tout à l’heure l’importance de la ville. Ce nom s’est maintenu sans changement jusqu’à la domination grecque, et on le retrouve sous la même forme en égyptien et en assyrien. La transcription hiéroglyphique a gardé l’aspiration initiale : *|*. g ~ «  « ». Ifa-m-t(u) == nen,

Iftimât. Cf. W. Max Mùller, Asien und Europa achn altâgyptischen Denkmàlern, Leipzig, 1893, p. 256. L’écriture cunéiforme a parfois adouci cette aspiration et remplacé heth par aleph ; on lit, par exemple, dans les Fastes de Sargon, lignes 33, 36, 49, 56 : ^ ] ^J J^J » ~ « J<, A-ma-at-ti. Mais on rencontre aussi (mât) Ifa-mà(at)-ti, Ifa-am-ma-atti = Hamatti. Cf. E. Schrader, Die Keilinschriften und das Alte Testament, Giessen, 1883, p. 105, 323. Pour la distinction qu’on a voulu voir entre Amattu et Ifamaltu, cf. Fried. Delitzseh, Wo lag das Paradies ? Leipzig, 1881, p. 276, et E. Schrader, Keilinschriften, p. 106. — Sous les Séleucides, le nom de Ifâmât fut changé en celui d’Epiphania, ’Eiciçâveta, en l’honneur d’Antiochus IV Épiphane. Ct. Josèphe, Ant. jud., i, vi, 2. Le Talmud donne le même nom en l’écor chant un peu, n> : iss, Pafunya’. Cf. A. Neubauer, La géographie du Talmud, Paris, 1868, p. 30t. Mais, suivant une loi qu’on remarque pour la plupart des noms grécisés de la Palestine, la dénomination primitive a reparu en arabe et a subsisté jusqu’à nos jours. Abulféda, qui fut gouverneur de la ville, l’écrit SL » s »., Ifâmât, ct commence ainsi la courte description qu’il en fait dans sa Tabula Syrix, édit. B. Kœhler, Leipzig, 1766, p. 108 : « Hamat, cité antique, dont parlent les livres des Israélites. »

II. Identification et description. — C’est peut-être ce changement de nom qui a induit en erreur certains auteurs anciens, dont les uns ont confondu Émath avec Antioche, les autres avec Émése, Apamée, etc. On a même trouvé Épiphania trop éloignée de la Palestine pour représenter la cité dont nous nous occupons. Cf. Reland, Palxstina, Utrecht, 1714, t. i, p. 119-123. Il est permis de s’étonner de ces méprises, car tout concourt à justifier l’identification de l’ancienne Ifâmât avec la ville actuelle de Hamah (fig. 551), non seulement le nom, mais la position conforme aux données de l’Écriture. Celle-ci, en effet, ne dit pas que la cité des bords de l’Oronte ait été « dans les limites » de la Terre Promise ; elle se sert de son « territoire » pour déterminer la frontière septentrionale du pays assigné par Dieu à son peuple d’une manière durable. Si le royaume des Israélites s’étendit, sous David et Salomon, bien au delà de la Palestine, ce ne fut que d’une façon temporaire.

L’importance de l’Émath biblique, depuis les temps anciens jusqu’à la fin de l’époque prophétique, correspond à l’importance de sa situation. Placée dans la vallée de l’Oronte, à peu près à mi-chemin entre la source de celui-ci, près de Baalbek, et l’extrémité du coude qu’il fait vers la Méditerranée, elle commandait naturellement tout le pays arrosé par le fleuve, depuis les ondulations de terrain qui séparent son cours de celui du Léïtani jusqu’au défilé de Daphné, au-dessous d’Antioche. Le royaume touchait ainsi à ceux de Damas au sud, de Soba à l’est, et à la Phénicie à l’ouest. I Par., xviii, 3 ; Ezech., xlvii, 17 ; xlviii, 1 ; Zach., IX, 2. La ville actuelle, située à 46 kilomètres au nord de Homs, à l’est de la chaîne côtière du Djebel Ansariyéh, au pied occidental du Djebel’Ala, est bâtie en grande partie sur les pentes rapides de la rive gauche de l’Oronte ; elle s’annonce par deux monticules en pain de sucre, nommés les Cornes de Hamah. Elle occupe l’un des sites les plus pittoresques de la Syrie. Vue des hauteurs, elle semble divisée en plusieurs bourgs par des jardins et des vergers, qui serpentent en détroits verdoyants entre les maisons blanches. Des bords du fleuve elle apparaît plus curieuse encore, grâce aux terrasses fleuries du rivage et aux énormes roues des norias, dont on se sert pour élever l’eau. Le Nahr el-Asi coulant entre deux berges élevées, il a fallu recourir à ces lourdes machines, dont quelques-unes ont 68 mètres de circonférence, et qui, mises en mouvement par le courant du fleuve, tournent avec un bruit tout à fait bizarre. « En amont et en aval, la hauteur moyenne des rives au-dessus du lit fluvial est de 60 à 70 mètres ; aussi l’irrigation est-elle très difficile, et les riverains se bornent pour la plupart à cultiver les zhor ou « étroits », c’est-à-dire les lisières du sol bas qui longent le courant au-dessous des falaises, et qui ont en certains endroits jusqu’à 500 mètres de largeur ; ces terrains d’alluvion, d’une extrême fertilité, produisent des légumes de toute espèce, surtout des oignons, le cotonnier, le sésame ; les terrains de la haute plaine, jusqu’au désert, sont cultivés en orges et en froments, d’une excellente qualité et très recherchés pour l’exportation. L’industrie de Hamah, inférieure à celle de Homs, consiste principalement dans la fabrication d’étoffes de soie et de coton. » É. Reclus, L’Asie antérieure, Paris, 1884, p. 764.

L’Oronte traverse la ville du sud-est au nord-ouest, et on le franchit sur quatre ponls. Le quartier le plus élevé,

nommé el-’Aliyàt, « les Hauteurs, » est au sud-est, à 45 mètres au-dessus de la rivière. Les autres quartiers sont : la colline du château, au nord ; le quartier de Baschoûra, au nord-est ; le Hâret Scheikh Ambar el-’Abd, sur la rive gauche, et le Hâret Scheikh Mohammed el-Haourâni. Le quartier chrétien, au nord-ouest, est connu sous le nom de Hâret ed-Dahân. Les mosquées sont nombreuses, avec de gracieux minarets ; la plus grande est une ancienne église chrétienne. Du château situé sur la rive gauche, il ne reste guère que des amas de décombres et quelques pierres du talus. À l’angle nordouest de la ville, à l’endroit où le fleuve tourne au nord, se trouvent dans les rochers de la rive droite un

sous le règne de David qu’il est question de sa puissance. Le roi qui gouvernait alors son territoire s’appelait Thoû (hébreu : Tô’i). Ayant appris les nombreuses victoires du monarque israélite, surtout celle qu’il avait remportée sur son redoutable voisin, Adarézer, roi de Soba, il chercha à gagner les bonnes grâces du vainqueur, en lui députant une ambassade. « Il envoya Joram (Adoram. I Par., xviii, 10), son fils, le complimenter et lui rendre grâces de ce qu’il avait vaincu Adarézer et avait taillé son armée en pièces. Car Thoû était ennemi d’Adarézer. Joram apporta avec lui des vases.d’or, d’argent et d’airain, que le roi David consacra au Seigneur, avec ce qu’il lui avait déjà consacré d’argent et d’or pris sur toutes

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651. — Tuo de Hamah. D’après une photographies.

grand nombre de grottes. La population est très diversement estimée : les uns comptent 40 000, d’autres 60000 habitants, dont les trois quarts sont musulmans. Hamah possède une garnison et est la résidence d’un moutasserrif qui relève de Damas. — Cf. J. L. Durckhardt, Travels in Syria and tlie Holy Land, Londres, 1822, p. 146-148 ; E. Sachau, Reise in Syrien und Mesopotamien, Leipzig, 1883. p. 66-67 ; A. Chauvet et E. Isambert, Syrie, Palestine, Paris, 1887, p. 687.

III. Histoire. — Dès les temps les plus reculés, Émath fut fondée par une colonie de Chananéens. Gen., x, 18. Ces descendants de Cham, unis probablement plus tard aux Sémites environnants, furent surtout en rapport avec leurs frères les Héthéens, dont ils partagèrent les mœurs et la civilisation, comme le prouvent les inscriptions dont nous parlons plus bas. La mention qui est faite de cette ville dans les premiers livres de la Bible, Num., xiii, 22 ; xxxrv, 8 ; Jos., xiii, 5 ; Jud., iii, 3, pour déterminer les limites de la Terre Sainte, montre qu’elle était déjà bien connue pour son importance. Cependant c’est seulement

les nations qu’il s’était assujetties. » II Reg., viii, 9-11 ; I Par., xiii, 9-11. Il semble que plus tard Salomon s’empara du pays d’Émath, III Reg., iv, 21-24 ; Il Par., viii, 4. Les « villes de magasins » (hébreu : ’ârû Jiam-miskmôt) qu’il y bâtit étaient des entrepôts très importants pour le commerce, la vallée de l’Oronte ayant été de tout temps une grande ligne de trafic. Mais, à la mort du roi et au moment du schisme, le pays reprit sans doute son indépendance.

Le royaume d’Émath nous apparaît alors, avec son prince nommé Irkulini, allié aux Héthéens, à Benhadad de Damas, Achab d’Israël et à plusieurs autres, et vaincu par Salmanasar II (859-824). Cf. On Bulls, Layard, p. 15, lig. 32, 33, 36, 37 ; p. 16, lig. 44 ; Layard, Black Obelisk, p. 89-90, lig. C0 ; E. Schrader, Die Keilinschriften und das Alte Testament, p. 202-203 ; F. Vigoureux, La Bible et les dérouvertes modernes, 6 9 édit., Paris, 1896, t. iii, p. 476-477. Plus tard Jéroboam II « reconquit Émath, ainsi que Damas, pour Israël ». IV Reg., xiv, 28. À ce moment, le prophète Amos, vi, 2, vantait sa gloire et

l’appelait « Émalh la grande ». Théglathphalasar 111 (vers 730) nous raconte, dans le troisième fragment de ses Annales, comment « il ajouta aux frontières de l’Assyrie » et frappa de tribut « la ville de Hamath et les villes qui sont autour près du rivage de la mer du soleil couchant (la Méditerranée), qui en prévarication et en défection pour Az-ri-ya-a-u (Azariac de Juda) avaient pris parti ». Le roi d’Émath s’appelait alors’I-ni-ilu, ou Éniel. Cf. Layard, Inscriptions, pi. 50, 10 ; Schrader, Die Keilinschriften und dos A. T., p. 252-253 ; Cuneiform Inscriptions of Western Asia, t. iii, pi. 9, n° 3 ; F. Vigoureux, La Bible et les découvertes modernes, t. iii, p. 512, 514. Ce fut Sargon qui mit fin à l’indépendance et à la gloire de cette ville, dont il n’est plus question désormais dans les monuments assyriens. Il nous apprend, dans ses inscriptions, qu il lit, la seconde année de son règne, la guerre à Ilu-bi’di (variante : Yau-bi’di), son roi, qu’il le défit à la bataille de Karkar, et qu’il lui enleva, comme sa part personnelle de butin, 200 chars et 600 cavaliers. Il ne dit pas expressément qu’il transporta le reste des habitants à Samàrie ; mais on n’en saurait douter, car il raconte qu’il emmena 20033 captifs, et, dans d’autres inscriptions, le roi d’Assyrie, confirmant indirectement le récit biblique, nous dit qu’il transplanta des populations vaincues dans le territoire de Hamath, qu’il avait dépeuplé. Cf. F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, t. iii, p. 574. Nous savons, en effet, par l’Écriture, IV Reg., xvii, 24, 29, 30, que « le roi des Assyriens lit venir des habitants de Babylone, de Cutha, d’Avah, d’Êmath et de Sépharvaïm, et il les établit dans les villes de Samarie à la place des fils d’Israël. .. Chacun de ces peuples se fit son dieu… Les Babyloniens se firent Sochoth-Benoth ; les Cuthéens, Nergel ; ceux d’Émath, Asima ». Voir t. i, col. 1097. Quelques années après, le Rabsacès de Sennachérib, rappelant aux Juifs la chute de la cité de l’Oronte, disait superbement : « Où est le dieu d’Émath ? » IV Reg., xviii, 34 ; Is., xxxvi, 19. a Où est le roi d’Émath ? » IV Reg., xix, 13 ; Is., xxxvii, 13. Elle est ordinairement, dans la bouche des prophètes qui parlent de ses malheurs, associée à Arphad, une autreville de Syrie. Cf. Is., x, 9 ; xxxvi, 19 ; Jer., xlix, 23. — Restée dans l’oubli depuis l’époque prophétique jusqu’à la conquête macédonienne, où elle reçut le nom d’Epiphania, elle demeura toujours une cité florissante sous les Grecs et les Romains. Cf. Ptolémée, v, 15 ; Pline, H. N., v, 19. — C’est dans le pays d’Amalhis ou d’Émath que Jonalhas Machabée alla au-devant de l’armée de Démétrius, sans lui laisser le temps d’entrer sur les terres de Juda. I Mach., xii, 25. — Sur les inscriptions héthéennes trouvées à Émath, voir HÉ THEENS. A. LEGENDRE.

2. ÉMATH (ENTRÉE D’) (hébreu : Bô’Ifâmât ; Septante : AagwsnàO ; Vulgate : Introitus Emath). -^ Le fréquent usage de cette locution biblique, « l’entrée d’Émath, » non seulement au temps de Moïse, Num., xiii. 22, et de Josué, xiii, 5, mais de David, de Salomon et d’Amos, III Reg., viii, 05 ; IV Reg., xiv, 25 ; I Par., xm, 5 ; II Par., vii, 8 ; Am., vi, 15, montre que le royaume de ce nom fut longtemps le plus important de la Syrie du nord. Mais où faut-il placer cette entrée ? On l’a cherchée depuis l’extrémité méridionale de la plaine de Cœlésyrie jusqu’aux environs de Hamah, quand on n’est pas allé jusqu’à la partie septentrionale de la vallée de l’Oronte. Les principales opinions à retenir sont les suivantes. Les uns voient l’endroit en question dans l’ouverture qui sépare la chaîne du Liban de celle des Ansariyéh, et à travers laquelle coule le Nahr el - Kebir. Cf. J. L. Porter, dans Kitto’s Cyclopxdia of Biblical Literature, Edimbourg, 1869, t. ii, p. 215 ; Robinson, Biblical Besearches in Palestine, Londres, 1856, t. iii, p. 568. D’après d’autres, il se trouve près de Bestân, où commence la vallée de Hamah proprement dite. Cf.

K. Furrer, Die antiken Stâdte und Ortschaften im Libanongebiete, dans la Zeitschrift der Deutschen Palâstina-Vereins, Leipzig, t. viii, 1885, p. 27, 28. On le cherche également vers l’extrémité nord de la plaine de Cœlésyrie, du côté de Ribla. Cf. Stanley, Sinai and Palestine, Londres, 1866, p. 414 ꝟ. Pour d’autres enfin, c’est « la Merdj’Ayoun, la plaine qui sépare le Liban méridional des contreforts occidentaux de l’Hermon, et constitue par conséquent l’entrée de la Beqa’a, la route naturelle de la Galilée vers le pays de Hamah. Plus tard, quand Antioche était la capitale de la Syrie, on l’appelait au même titre le chemin d’Antioche et probablement encore le chemin de la Syrie ». J. P. vari Kasteren, La frontière septentrionale de la Terre Promise, dans la Revue biblique, Paris, t. iv, 1895, p. 29. Voir Chanaan, col. 535. Cette opinion nous semble plus conforme à l’ensemble des données scripturaires qui concernent

les limites de la Terre Sainte.
A. Legendre.

3. ÉMATH (hébreu : ffammaf ; Septante : Codex Vaticanus, ’Ûfia6a5axé6, mot qui repose sur une double confusion : union de Bïammaf avec le nom suivant, Baqqaf ; changement du resch en dalelh ; Codex Alexandrinus, ’AjictG), ville forte de Nephthali, mentionnée une seule fois dans l’Écriture. Jos., XIX, 35. Citée après Assedim, avant Reccalh et Cénereth, elle fait partie du groupe méridional des villes de la tribu, et devait se trouver sur le bord occidental du lac de Génésareth. Le nom lui-même peut nous servir dans la recherche de l’emplacement. Dérivé de hâmam, « être chaud, » il désigne des « thermes » ou sources d’eaux chaudes. Les Talmuds le rendent par ffamafa’, et ce nom indique, d’après eux, une petite ville, ou un bourg près de Tibériade. « Les habitants d’une grande ville, dit le Talmud de Jérusalem, Eroubin, v, 5, peuvent se rendre le jour du sabbat dans une petite ville. Précédemment les habitants de Tibériade avaient la faculté de se promener le jour du sabbat dans tout Hamatha, tandis que les habitants de ce bourg ne pouvaient aller que jusqu’à la côte ; mais à présent Hamatha et Tibériade ne font qu’une seule ville. » Hamath et Tibériade étaient, selon le Talmud de Babylone, Megillah, 2 b, à une distance d’un mille (1 kilomètre 481 mètres) l’un de l’autre. Cf. A. Neubauer, La géographie du Talmud, Paris, 1868, p. 208. Josèphe, de son côté, Ant. jud., XVIII, ii, 3, signale dès thermes « non loin [de Tibériade], dans un bourg appelé Emmaus », où Vespasien avait établi son camp « devant Tibériade ». Bell. jud., IV, i, 3. Dans ce dernier passage, l’historien juif donne l’interprétation du mot’AftjjLaoûç, et dit qu’il signifie « thermes » ; en effet, ajoute- 1- ii, « il y a là une source d’eaux chaudes propre à guérir certaines maladies du corps. » On peut se demander d’où il a tiré cette étymologie, qui ne correspond ni au grec ni à l’hébreu. Quelques-uns prétendent qu’il faut lire’A|ji|j.a80uç, Ammalhus, au lieu de’AfiiiaoO ; , Ammaùs. Cf. F. Buhl, Géographie des alten Palâstina, Fribourg - en-Brisgau, 1896, p. 114. Cette opinion nous paraît tout à fait acceptable. On comprend alors l’analogie du mot grec avec les noms talmudique et hébreu et l’explication de Josèphe. Dans ces conditions, il est facile d’identifier Émath avec une localité voisine de Tibériade, du côté du sud, appelée aujourd’hui El-Hammâm, et célèbre par ses eaux thermales. L’arabe f U-^-, Jfammâm, « bains chauds, » reproduit la racine hébraïque nan, hâmam, d’où viennent

nen, Hammàf, et xrcn, Biamata’. Les données topographiques, nous allons le voir, ne sont pas moins conformes à l’assimilation.

El -Hammam se trouve à une demi-heure au sud de Tibériade (fig. 552). Les ruines qui l’avoisinent confirment le récit de Josèphe et montrent comment autrefois cette bourgade faisait immédiatement suite à la ville, « Ces

ruines couvrent un espace assez étendu sur les bords du lac, jusqu’au pied des collines qui s'élèvent à l’ouest. Un épais mur d’enceinte, dont il subsiste quelques pans encore debout, construits en blocage, avec un parement de pierres volcaniques de moyenne dimension, environnait cette petite ville, qui, vers le nord, touchait à Tibériade et n'était séparée de cette grande cité que par une muraille mitoyenne. Les arasements d’une grande tour sur un monticule, ceux d’un édifice tourné de l’ouest à l’est, et qu’ornaient autrefois des colonnes de granit actuellement gisantes sur le sol, les vestiges de nombreuses maisons complètement renversées, plusieurs caveaux funéraires pratiqués dans les flancs des collines de l’ouest, les

se trouvent de petites cellules à l’usage des baigneurs. Les eaux, très chaudes, ont, au tuyau d’arrivée, soixantedeux degrés et peuvent facilement faire cuire un œuf ; il faut donc les laisser refroidir pendant plusieurs heures avant de s’y plonger. Sulfureuses et magnésiennes-chlorurées, elles sont considérées comme spécifiques contre les rhumatismes, la lèpre et les autres affections cutanées. Elles jouissent d’une grande réputation en Syrie. Elles jaillissent à la. base d’un calcaire dolomitique qui forme les escarpements voisins, traversés par des éruptions basaltiques considérables. Cf. Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, dans le Tour du monde, l, xliii, p. 212 ; E. Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres,

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652. — Vue d’ElHammam. D’après une photographie.

traces d’un aqueduc, au pied et le long de ces mêmes collines, qui amenait jadis à cette localité et à Tibériade les eaux de l’ouadi Fedjaz : tels sont les principaux restes qui attirent tour à tour l’attention. » V. Guérin, Galilée, t. i, p. 270. Les établissements de bains qui florissaient en cet endroit ont été détruits, et ceux qu’on y voit maintenant sont modernes. Deux bâtiments recouverts de coupoles aujourd’hui délabrées reçoivent les eaux thermales, qui se réunissent dans les piscines destinées aux baigneurs. L’une de ces constructions est entièrement ruinée, la voûte est effondrée, et ce n’est qu’en se traînant au milieu des éboulements intérieurs qu’on arrive à une petite cavité à moitié comblée par les décombres, remplie d’eau, et servant de bains aux pauvres. Un peu plus au nord, à quelques mètres de distance, se trouve un autre établissement élevé, en 1833, par Ibrahim pacha. Un vestibule obscur conduit dans une salle voûtée, éclairée par le haut, et dont le plafond, soutenu par de petites colonnes en marbre rougeàtre, recouvre un bassin circulaire dans lequel arrivent les eaux chaudes. Tout autour

1856, t. ii, p. 383-385 ; H. Dechent, Heilbàder und Badcleben in Palâstina, dans la Zeitschrift des deutschen Palâstina-Vereins, Leipzig, t. vii, 1884, p. 176-187 ; A. Frei, Beobachtungen vom See Genezareth, dans la Zeitschrift des deut. Pal-Ver., t. ix, 1886, p. 91-99.

Cette identification est admise, au moins comme très probable, par la plupart des auteurs. Cf. Survey of Western Palestine, Menioirs, Londres, 1881, 1. 1, p. 366 ; Van de Velde, Memoir to accompany the Map of the HolyLand, Gotha, 1858, p.318 ; G. Armstrong, W.Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 78, etc. Quelques-uns cependant cherchent Émath au nord de Tibériade, dans une petite plaine que traverse l’ouadi Abou el-'Antis ou simplement ouadi 'Ammâs, et dans laquelle se trouvent quelques sources thermales. Cf. K. Furrer, Die Ortschaften am See Genezareth, dans la Zeitschrift des deutschen Palâstina -Vereins, t. ii, 1879, p. 54 ; Noch einmal dos Emmaus des Josephus, etc., ibid., t. xiir, 1890, p. 194-198 ; R. von Riess, Bibel-Atlas, 2e édit.,

Fribourg-en-Brisgau, 1887, p. 13 ; F. Mûlhau et W. Volck, Gesenius’Handwôrlerbuch, Leipzig, 1890, p. 277. Cette opinion a été combattue par H. Dechent, dans la Zeilschrift des deut. Pal.-Ver., t. vii, 1884, p. 177-1778 ; J. B. van Kasteren, Am See Genezareth, dans la même revue, t. xi, 1888, p. 214, 215 ; F. Buhl, Bemerkungen z « einigen frûheren Aufsâtzen der Palâslina-Zeitschrift, ibid., t. xiii, 1890, p. 39-41. On pourrait, en effet, être séduit par la ressemblance qui existe entre Emmaùs et’Ammâs. Mais, répondent les opposants, en admettant que’Amis ou’Animas soit le nom exact de la vallée en question, ce qui pourrait être contesté, le mot a un atrt initial qui Féloigne du grec’EjitiaoO ; ou’A|ijjiaoû « . Ensuite la topographie ne permet guère de croire qu’une localité située en cet endroit ait jamais fait partie de Tibériade, comme le disent les Talmuds. Enfin les sources de l’ouadi’Ammâs sont loin de valoir, comme degré de chaleur et propriétés médicinales, celles d’El - Hammam. On trouve dans la liste géographique de Thotmès III, n » 16, et dans le Papyrus Anastasi, i, 21, 7, une ville palestinienne appelée Ifamtu et f[amâ(i. Cf. W. Max Mùller, Asien und Europa nach àltâgyptischen Denkmâlern, Leipzig, 1893, p. 87. A. Mariette, Les listes géographiques des pylônes de Karnak, Leipzig, 1875, p. 18, regarde Ifamtu comme l’ancienne Ifammat des bords du lac dé Tibériade. G. Maspero, Sur les noms géographiques de la Liste de Thoutmos III qu’on peut rapporter à la Galilée, extrait des Transactions of the Victoria Institate, or philosophical Society of Great Britain, 1886, p. 4, applique ce nom à l’Hamath de la Gadarène, au sud-est du lac. — On assimile généralement Emath de Nephthali à Hammoth Dor, Jos., xxi, 32, et à Hamon.

I Par., vi, 76. Voir Hammoth Dor et Hamon.

A. Legendre.

4. ÉMATH (TOUR D") (hébreu : [migdal] ham-Mê’âh,

II Esdr., iii, 1 ; xil, 39 ; Septante : TtOpyoj tùv sxoitôv, II Esdr., iii, 1 ; omis dans le Codex Vaticanus, II Esdr., xii, 38 ; Codex Sinaiticus, Kiipyo ; toû Mrji ; Vulgate : turris centum cubitorum, II Esdr., iii, 1 ; turris Emath, Il Esdr., xii, 39), une des tours de la muraille de Jérusalem, telle qu’elle fut rebâtie par Néhémie. II Esdr., m, 1 ; xii, 39. Le nom hébreu signifie « la tour de cent » ; mais s’agit-il de cent coudées, ou de cent héros dont elle aurait rappelé le souvenir ? Ni le texte ni les versions ne nous permettent une solution. Faut-il voir ici un nom propre, Méâh ou Hamméâh ? Nous nous trouvons dans la même incertitude. Tout ce que nous savons, c’est qu’elle était près de la tour d’Hananéel, entre la porte des Poissons et la porte des Brebis ou du Troupeau, c’est-à-dire dans la partie nord-est des murs. Voir Jérusalem. Ces deux tours n’avaient peut-être pas été détruites, ou avaient déjà été refaites par les Juifs revenus d’exil ; car le récit sacré ne parle pas de leur restauration, mais bien de la reconstruction du mur qui les reliait à la porte des Brebis. H Esdr., iii, 1. Elles se trouvaient sur la crête rocheuse qui a de tout temps porté une fortification, comme l’Antonia plus tard. L’importance de ce point et sa proximité du Temple l’assignaient tout naturellement à la sollicitude et à l’activité du grand prêtre Éliasib et de ses frères dans le sacerdoce. II Esdr., iii, 1. Cf. C. Schick, Nehemia’s Mauerbau in Jérusalem, dans la Zeitschrift des deutschen Palâstina-Vereins, Leipzig, t. xiv, 1891, p. 45, pi. 2.

A. Legendre.
    1. ÉMATH SUBA##

ÉMATH SUBA (hébreu : Ifâmat Sôbdh ; Septante : Codex Vaticanus, Baïauéi ; Codex Alexandrinus, A ! (j116 Jluêi), ville conquise par Salomon. H Par., viii, 3. On la regarde généralement comme identique à Émalh de Syrie, sur l’Oronte. Voir Émath 1. Les deux royaumes d’Émath et de Soba étaient limitrophes, et ont pu être plus d’une fois unis sous la domination d’un même roi ; de là des expressions comme celles-ci : Sôbâh ffâmfâh ; Septante : Éo’jëà’Hn19 ; Vulgate : Soba, dans le pays

d’Émath, I Par., xviii, 3, et ffâmat Sôbâh, Émalh de Sobah, II Par., viii, 3. Il est possible aussi cependant que cette dernière ville fût une autre Émath, ainsi nommée pour la distinguer d’  « Émath la grande », Am., vi, 2, comme Ramoth-Galaad était distinguée par le nom du pays d’autres cités appelées Ramolli, Ramah, Ramath.

A. Legendre.
    1. EMBAUMEMENT##

EMBAUMEMENT (hébreu : hânutîm, pluriel abstrait indiquant sans doute les préparations diverses ou les jours consacrés à l’embaumement, du verbe hânat, « embaumer ; » Septante :-caç^, « préparation du corps pour la sépulture, » et le verbe IvTaçtâaat, « préparer pour la sépulture ; » cf. S. Augustin, Quœst. in Hept-, t. xxxiv, col. 502 ; Vulgate : cadaverum conditorum, et le verbe condire), ensemble de préparations destinées à préserver un cadavre de la corruption, au moyen d’aromates et de diverses substances aux propriétés dessiccatives et antiseptiques. Le corps ainsi préparé, appelé sâhu en égyptien, se nomme momie, dérivé, par le bas latin mumia et le grec byzantin y.oviia, de l’arabe moumyâ, « bitume, » et onguent servant à l’embaumement.

1° Embaumement égyptien. — Lorsque par la mort l’âme se séparait du corps, d’après la croyance égyptienne elle s’envolait vers « l’autre terre ». Pour le corps, il ne restait pas seul au tombeau ; selon l’opinion généralement admise, il y avait avec lui le ka ou double, sorte d’ombre ou image aérienne, impalpable, du corps, l’etâoXov des Grecs. La tombe était vraiment « la demeure du double » £ on venait lui faire des sacrifices, lui présenter des offrandes. Mais, comme pendant l’existence terrestre il avait eu le corps pour s’appuyer, il avait besoin encore d’un support, momie où statue de la personne défunte. C’est pourquoi les Égyptiens cherchèrent à prolonger autant que possible la durée du corps ; grâce à l’embaumement, le ka ou « double » pouvait continuer de s’appuyer sur la momie, et jouir d’une existence semblable à celle qui venait de se briser par la mort. Dans ces conditions, le ba ou âme avait la faculté de revenir de l’autre mondé visiter chaque jour son corps et son ka, et de revivre d’une certaine façon sa vie terrestre, avant de la reprendre un jour peut-être complètement. De là la coutume de meubler le tombeau de tous les objets nécessaires ou utiles dont le ka pouvait se servir. La découverte du procédé qui transformait ainsi le cadavre en momie était attribuée à Anubis, « le maître de l’ensevelissement. » On l’employait depuis une époque très reculée ; les dernières découvertes de Négadéh et d’Abydos ont montré cependant qu’avant ou pendant l’époque de Menés les morts n’étaient pas momifiés. Ce fut peu de temps après que ce système s’introduisit ; une stèle d’Oxford parle de la momie d’un dignitaire qui vivait sous le règne de Senda, le cinquième roi de la seconde dynastie. W. Budge, The Mummy, in-8°, Cambridge, 1893, p. 176. Depuis il se perpétua en Egypte avec des modifications suivant les temps et avec des degrés de perfectionnement, suivant aussi les dépenses plus ou moins grandes qu’on pouvait y consacrer. Les procédés employés, nous les connaissons par les descriptions d’Hérodote, ii, 86, et de Diodore de Sicile, I, 91, corrigées ou complétées par les documents égyptiens. G. Wilkinson, The ancient Egyptians, édit. Birch, t. iii, p. 470-486. Sous l’Ancien Empire, - les moyens adoptés paraissent avoir été en général très rudimentaires. Aussi les momies de cette époque ne sont souvent plus guère que des squelettes, presque comme si les cadavres n’avaient pas subi de préparation. Il est curieux de constater que les corps ainsi sommairement préparés étaient ensevelis primitivement dans une peau de bête, sans doute pour qu’enveloppé de la peau de la victime immolée, le défunt s’appropriât la vertu du sacrifice : , usage qui est rappelé par des pratiques équivalentes dans lu liturgie funèbre des époques plus récentes. E. Lefébure, L’office des morts à Abydos, dans les Proceedings of the Society e[ Biblicalvrchxology, t. xv, 1893, p. 432-139.

1725

EMBAUMEMENT

1726

Sous le Nouvel Empire, les procédés sont perfectionnés. Dès que la mort a fait son entrée dans une maison, les parents du défunt s’entendent avec les embaumeurs sur le genre et le prix de l’embaumement ; car il y en avait de différentes classes. D’après Diodore, i, 91-, la première classe coûtait un talent d’argent, environ 5325 francs de notre monnaie, et la seconde vingt mines ou 1 500 francs. Pour les pauvres, la momification, très simplifiée, revenait à un bas prix, à la charge du reste des embaumeurs. Les conditions arrêtées, ceux-ci emportaient le cadavre dans les bâtiments de leur corporation : là il était livré aux mains de « paraschistes », de « taricheutes », de "prêtres, chargés chacun d’une fonction spéciale. Un des T<tpsvx eUTa '> a taricheutes » ou embaumeurs proprement dits, commençait par extraire du crâne la cervelle, au moyen d’une espèce de crochet en cuivre ou en bronze, introduit par la narine gauche. Et à la place de ce qu’on retirait, on injectait au moyen d’un instrument spécial des aromates, des résines ou encore du bitume liquide (fig. 553). Pendant cette opération, et également à chacune des suivantes, des prêtres, appelés l’un heiheb, l’autre

elles conservent aux momies ainsi préparées une peau élastique, une couleur olivâtre ou de parchemin, comme on peut le voir par les momies de Séti I er et de Rainsès II, exposées au musée de Ghizéh. Dans les embaumements moins soignés et moins coûteux, on se contentait de bitume répandu à l’intérieur du corps et appliqué également à l’extérieur : aussi la peau de ces momies est-elle noire et cassante. Quant aux viscères, ils étaient lavés séparément et embaumés. Puis, ou bien on les replaçait dans l’intérieur du corps avant le bain de natron : c’était le cas d’embaumements moins parfaits. Ou bien on mettait ces viscères dans des sacs remplis de substances aromatiques, et on disposait ces sacs sur la momie même, entre les jambes, sous les bras, etc. Au lieu de cette seconde façon de procéder, qu’on rencontre dans des embaumements très soignés, on préférait souvent déposer les viscères dans quatre vases de terre cuite, de pierre dure ou d’albâtre, appelés canopes : l’estomac et le gros intestin dans le vase surmonté de la tête humaine d’Amset ; le petit intestin dans le vase à la tête de cynocéphale Hapi ; Is cœur et les poumons dans le vase à la tête de chacal,

563. — Instrumenta de momification. — 1, Crochet pour extraire la cervelle. — 2. Instrument pour insuffler des aromates dans le cerveau, vu de profil. — 3. Le même, vu de face. — D’après Champollion, Monuments de l’Egypte, t. ii, pi. 188.

totem, récitent des prières, exécutent diverses cérémonies. Un des embaumeurs, appelé le grammate ou « scribe », trace alors à l’encre, sur le flanc gauche du cadavre, couché à terre, une ligne de dix à quinze centimètres, et un opérateur spécial, que les Grecs désignent sous le nom de mapai/iar ?) ; , « paraschisle » (dissecteur), prenant un couteau de pierre, ordinairement en obsidienne d’Ethiopie (Rawlinson, Herodotus, Londres, 1862, t. ii, p. 141), pratique l’incision de la grandeur déterminée. A peine a-t-il ainsi violé l’intégrité du cadavre, que les assistants le chargent d’imprécations et le poursuivent à coups de pierre : bien entendu, c’est pure cérémonie, et l’on a soin de ne point lui faire sérieusement mal ; cependant les individus qui avaient cette fonction formaient une caste méprisée, exécrée, avec laquelle l’Egyptien ne voulait pas avoir de rapports. Par l’ouverture ainsi pratiquée, un des embaumeurs introduit la main, extrait du corps tous les viscères ; un autre lave l’intérieur avec du vin de palme et le saupoudre d’aromates. Les taricheutes déposent ^ensuite le corps dans une cuve de nation ou carbonate de soude liquide ; ils le laissent s’imprégner de sel, plus de trente jours d’après Diodore (quarante dans quelques manuscrits), soixante-dix selon Hérodote. Cf. Gen., L, 2-3. Mais ces soixante-dix jours doivent peut-être s’entendre de la durée de toutes les préparations. Le corps sèche ensuite, exposé à l’action d’un courant d’air chaud. On bourre le ventre et la poitrine de sciure de bois, de linges imbibés d’essences parfumées ou saupoudrés d’aromates. Enfin la peau est enduite de résines odorantes, d’huile de cèdre, de myrrhe, de cinnamome, etc. Ces substances précieuses n’étaient employées que dans les embaumements les plus soignés

Duaumautef ; enfin le foie et le fiel dans le vase à tèle d’épervier, Kebahsennuf. Ces quatre génies avaient la garde des viscères, qu’ils personnifiaient ; mais chacun des vases eux-mêmes était mis sous la protection d’une des quatre déesses, dont le nom se trouve inscrit sur le côté du récipient : Isis, Nephthys, Neith (fig. 293, t. i, col. 1083) et Selk. On plaçait ces vases canopes dans les tombeaux, près des momies, ou bien on les renfermait dans des coffrets spéciaux, surmontés d’un Anubis.

Un procédé plus sommaire consistait à ne point faire d’incision au corps, mais à répandre à l’intérieur, par les ouvertures naturelles, de l’huile de cèdre ; puis, sans plus de préparations, à déposer le cadavre dans le bain de natron, après quoi on l’enduisait de bitume. Pour les pauvres gens, on utilisait l’huile de raifort, uup(j. « îri, moins coûteuse, ou même on se bornait souvent à déposer simplement le corps dans le natron et à le dessécher ensuite au soleil. Évidemment dans ces cas, surtout le dernier, la conservation est moins parfaite.

Après ces préparations venait la toilette funèbre ; on enveloppait le corps de bandelettes imbibées de diverses compositions odorantes. Le Rituel de l’embaumement, publié par G. Maspero, dans Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque Nationale, t. xxiv, 1™ part., 1883, p. 14-101, expose en détail cette seconde partie de la momification. Après avoir oint le corps d’un parfum « qui rend les membres parfaits », puis la tête, on enveloppe chaque partie du corps et la face de bandelettes nombreuses, consacrées chacune à une divinité, portant un nom spécial, et dont « les particularités et les dessins ont été examinés en présence du Supérieur des mystères ». Elles ont toutes une signification mystique, et c’est

en récitant certaines prières qu’on les enroulait autour des membres (fig. 554). Et ces bandelettes, imprégnées d’aromates ou de bitume, enduites de gomme d’acacia pour fixer les couleurs et les rendre plus brillantes, recevaient encore dans leurs enroulements des herbes ou fleurs parfumées, des substances odoriférantes, comme la résine de Phénicie ou de Pount, la myrrhe de Tonouter ; à des places déterminées, on y enfermait aussi des amulettes, destinées à protéger le mort dans son voyage d’outre-tombe. La momie ainsi emmaillotée d’une épaisse couche de bandelettes et enveloppée d’un linceul ou drap de liii, fortement serré et cousu de façon à laisser voir la forme générale du corps, on peut dire que l’embaumement est achevé. Pour les pauvres, les préparatifs funèbres se bornaient là ; encore l’emmaillotement était-il plus simple, et le bitume remplaçait les parfums précieux. Dans ce cas, après avoir mis au cou delà momie une étiquette de bois avec le nom du défunt, on la déposait dans un des trous de la montagne : c’est par milliers qu’on les trouve à certains endroits, empilées les unes

en Egypte, » l, 25, en attendant le jour où les enfants d’Israël devaient, selon son désir, le transporter dans la Terre Promise. Exod., xiii, 19 ; Jos., xxiv, 32. Il est à remarquer que les soins de l’embaumement sont confiés par Joseph à des médecins attachés à sa maison : ce n’est pas aux médecins cependant que ces opérations étaient remises. Serait-ce pour éviter les prières et cérémonies du culte égyptien, étroitement unies aux diverses parties de l’embaumement, comme nous l’avons vu plus haut ? Ou bien les grandes maisons, comme celle d’un premier ministre, avaient-elles des serviteurs chargés spécialement des embaumements, qui par leurs fonctions pouvaient être rangés à la dernière place dans la catégorie des hârôfîm, « médecins ? » Ceux-ci sans doute étaient nombreux dans le palais des rois d’Egypte : ainsi dans Lepsius, Denkmâler, Abth. ii, Bl. 92, d, e, on voit un s Nesmenau, surintendant des médecins du pharaon », Mais les documents égyptiens n’ont pas permis jusqu’ici d’élucider ce point encore obscur.

Une seconde difficulté est relative au nombre de jours

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554. — Emmalllotement de la momie et recitation de prières. D’après Champollion, Monuments de VÉgyptc, t. iv, pi. 415.

sur les autres. Pour les gens plus aisés, la toilette de la momie n’était pas complète sans le scarabée mystique suspendu au cou à la place du cœur, sans les anneaux ou talismans aux doigts dont les ongles ont été dorés, sans le masque doré sur la face et sans les cartonnages peints ou dorés dont on recouvrait tout le corps. On déposait enfin la momie dans un ou deux cercueils de bois d’if ou de sycomore, reproduisant les formes du cartonnage, et le tout était souvent enfermé dans un grand sarcophage de bois ou de pierre. Voir Cercueil, col. 435. Cf. G. Maspero, Lectures historiques, in-12, Paris, 1892, p. 133-139 ; Une enquête judiciaire à Thèbes, étude sur le papyrus Abbott, dans les Mémoires présentés à l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 1™ série, t. viii, 2 1 partie, 1874, p. 274-279 ; S. Birch, On a mummy opened at Staff ord house, dans Transactions of the Society of Biblical archseology, t. v, 1876, p. 122-126, avec un spécimen de bandelette imprégnée d’aromates et de bitume ; Champollion-Figeac, Egypte ancienne, in-8°, 1839, p. 260-261 ; Th. J. Pettigrew, History of Egyptian Mummies, ïn-4°, Londres, 1840 ; Rouger, Notice sur les embaumements des anciens Égyptiens, dans la Description de l’Egypte, 2e édit., t. vi, p. 461-489 ; W. Budge, The Mummy, 1893. Dans la Genèse, l, 2-3 et 25, il est fait mention de deux embaumements à la façon des Égyptiens. Quand Jacob mourut, Joseph « ordonna à ses serviteurs médecins d’embaumer son père ; et les médecins embaumèrent Israël. Ils le firent en quarante jours ; c’est, en effet, le temps fixé pour les embaumements. Et les Égyptiens le pleurèrent soixante-dix jours ». L, 2-3. De même quand Joseph mourut, « on l’embauma, et on le mit dans un sarcophage

que durait l’embaumement. D’après le texte sacré, le temps ordinaire consacré à ces préparations était de quarante jours. Gen., L, 3. Diodore de Sicile parle de trente jours (une variante donne, il est vrai, quarante) ; mais selon Hérodote ce serait soixante-dix jours. Les textes égyptiens, étant muets sur cette durée, ne donnent aucun moyen de trancher le différend. Peut-être les divers soins de l’embaumement proprement dit prenaient-ils trente ou quarante jours, selon les lieux et les époques, et le deuil tout entier, y compris ce temps, durait-il soixante-dix jours, comme le remarque la Genèse, L, 3. F. Vigoureux, Bible et découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. ii, p. 190-195.

2° Embaumement juif. — Quand le roi de Juda Asa mourut, on plaça son corps sur un lit funèbre, garni d’aromates préparés selon l’art des parfumeurs, et on en brûla en son honneur une quantité considérable. II Par., xvi, 14 ; cf. II Par., xxi, 19 ; Jer., xxxiv, 5 ; Josèphe, Bell, jud., i, xxxiii, 9. Mais ces parfums brûlés autour du corps ne constituent guère un embaumement proprement dit. Dans les derniers temps qui précédèrent l’ère chrétienne, les Juifs ont employé le miel pour conserver les corps au moins pendant un certain temps : c’est ce qui eut lieu pour Aristobule, au témoignage de Josèphe, Ant. jud., XIV, vil, 4. Ce serait une coutume babylonienne. Strabony XVI, i, 20 ; cf. Pline, H. N., xxii, 50. — Nous n’avons que peu de renseignements sur la façon dont les Juifs embaumaient leurs morts au début de notre ère. Maimonide, Tract. Ebel., c. iv, § 1, dit qu’après avoir fermé les yeux et la bouche du mort on lavait le corps, on l’oignait d’essences parfumées, et on l’enroulait ensuite 1729

EMBAUMEMENT -^ ÉMERAUDE

1730

dans an drap de toile blanche, dans lequel on enfermait en même temps des aromates. Le texte sacré est un peu plus explicite sur cette coutume juive. L’Évangile se tait sur la première cérémonie funèbre, consistant à laver le corps ; mais on a tout lieu de supposer qu’elle n’a pas été omise pour Jésus-Christ. Cf. Act., ix, 37. Joseph d’Arimathie et Nicodème, dit saint Jean, xix, 40, « prirent le corps de Jésus et l’enveloppèrent dans des linges avec les aromates, selon que les Juifs ont coutume de faire les préparatifs funèbres, èvtoKpiâÇeiv. » Ces linges comprenaient : des bandelettes, ô86via, dont on entourait chacun des membres à part, Luc, xxiv, 12, Joa., ix, 40 ; xx, 6, 7 ; voir t. i, col. 1427 (ainsi fit-on pour Lazare, Joa., xi, 44) ; le aouSoipiov, suaire destiné à voiler la tête, Joa., xx, 6 ; enfin le uivStiv ou linceul dont on enveloppait tout le corps. Matth., xxvii, 59 ; Marc, xv, 16 ; Luc, xxiii, 53. Dans les enroulements des bandelettes et les plis du linceul, on répandait des aromates. Saint Luc, xxm, 56, dislingue les substances solides, ipiiu.aTa, des parfums à l’état liquide, p-ûpoi. Nicodème avait apporté cent livres d’un mélange, ii ! f|j.a, de myrrhe et d’aloès. Joa., XIX, 39. Les saintes femmes, qui avaient vu les premiers préparatifs de cet embaumement, se proposent, pour le compléter, de rapporter d’autres parfums après le sabbat. Marc, xvi, 1 ; Luc, xxiii, 56 ; xxiv, 1 ; Fr. Martin, Archéologie de la Passion, in-8°, Paris, 1897, p. 215-217. E. Levesque.

    1. EMBRASEMENT##

EMBRASEMENT, traduction du mot hébreu Tab-’êrâh, que la Vulgate a rendu par Incensio, et les Septante par’E[iirupi<j|jLi{. Num., xi, 3. Ce nom fut donné à une localité du désert du Sinaï, parce que les Israélites y ayant murmuré contre Dieu, le Seigneur en fit périr un certain nombre par le feu, à une des extrémités du camp. Num., xi, 1 ; cf. Deut., IX, 22. Cet événement est raconté d’une manière sommaire et assez obscure, et il est impossible de déterminer en quel endroit précis il se produisit. Il résulte de la comparaison du chapitre XI, 3, 34-35, et du chapitre xxxiii, 15-17, qu’il eut lieu trois jours après que les Israélites eurent quitté le mont Sinaï, Num., x, 33, avant d’arriver à Qibbrôt hat-ta’âvâk (Sépulcres de Concupiscence) et à Haséroth.

ÉMER (hébreu : ’Immer ; Septante : ’E|jltJp), localité d’où étaient parties avec la première caravane qui retourna de captivité à Jérusalem un certain nombre de personnes qui ne purent établir leur origine israélite. I Esdr., ii, 59 ; II Esdr., vii, 61. Dans ce dernier passage, la Vulgate écrit Etnmer. La même variété se remarque dans les Septante. Le Codex Vaticanus écrit’Efiirip, I Esdr., ii, 59, et’Uu.ï)p, H Esdr., vii, 61 ; YAlexandrinus a’Ep.u.T|p dans le premier passage et’E^p dans le second. — Certains interprètes pensent qu’Émer est un nom d’homme, mais c’est à tort : il s’agit d’une localité de Babylonie, d’ailleurs tout à fait inconnue jusqu’à présent. Il est, de plus, possible qu’Émer ne soit qu’une partie du nom et que la localité s’appelât Cherub-Addanlmmer. Voir Chérub, col. 658.

    1. ÉMERAUDE##

ÉMERAUDE (hébreu : bâréqét ; Septante : <x|iâpaY80 « ; Vulgate : smaragdus), pierre précieuse.

I. Description. — L’émeraude, variété verte du béryl, est un silicate d’alumine et de glucine (GI 3 AI 2 Si 6 18) qui cristallise dans le système hexagonal. Les plus belles émeraudes se trouvent actuellement dans le gisement de Muso (près de Bogota, capitale de la Colombie), « où ces gemmes accompagnent la parisite dans un calcaire bitumeux de l’étage néocomien. » A. Lacroix, dans la Grande Encyclopédie, Paris (sans date), t. vi, p. 477. Si les minéralogistes appliquent aujourd’hui le nom d’  « émeràude » à une pierre bien déterminée, les anciens donnaient le nom de smaragdus aux minéraux les plus divers, depuis le jade veitdes gisements de l’ouest du Mogoung (Birmanie), dont

les moindres cristaux sont d’un prix inestimable, jusqu’aux morceaux les plus gros de jaspe vert, tel que le pilier du temple d’Hercule à Tyr, confondant ainsi sous un nom unique les pierres vertes qu’on pouvait polir. — Cependant ils surent la distinguer de la malachite, le dhanedj arabe. De cette indétermination on a conclu que l’antiquité n’avait pas connu la véritable émeràude. Dutens, Des pierres précieuses et des pierres fines, in-8°, Florence (sans date), p. 54. Mais le voyageur français Caillaud a retrouvé dans la Haute-Egypte, sur le revers sudest du mont Zabara, dans des couches de micachiste, les mines antiques d’émeraude et la ville des mineurs dont Volney avait vainement recherché les traces du côté d’Assouan. Il en rapporta cinq kilos de précieux cristaux découverts à cet endroit dans les profondeurs de la terre. Le texte de Théophraste, De lapid., iv (24), semble d’ailleurs bien précis à cet égard, lorsqu’il écrit que l’émeraude est c< une pierre qui est rare et fort petite », et qu’il n’ajoute « aucune créance aux émeraudes de quatre coudées, envoyées aux rois d’Egypte par le roi de Babylone ». Il signale plus loin, iv (25), l’émeraude commune, bâtarde, tirée des mines de cuivre de Chypre et d’une lie en face de Carthage ; il la nomme « J’evSriç apiâpaySo ; . Ce sont probablement les cristallisations, colorées en vert, qui portent le nom de primes d’émeraude. Strabon se contente d’indiquer comme gisements d’émeraudes les bords de la mer Rouge, l’isthme compris entre Coptos et Bérénice, xvi, 20 ; xvii, 45. Il signale aussi l’Inde, xv, 69. Les lapidaires sanscrits (Finot, Les lapidaires indiens, in-8°, Paris, 1896, p. xliv) indiquent aussi l’Egypte, quoique en termes assez vagues. Parmi les pierres précieuses, Pline, H. N., xxxvii, 16, attribue le troisième rang à l’émeraude, parce qu’il n’est point de couleur plus agréable à l’œil que son vert incomparable. Signalant l’étroite parenté de l’émeraude et du béryl, sans l’admettre cependant, H. N., xxxvii, 20, il distingue douze sortes d’émeraudes, 17, dont les principales sont les scythiques, les bactriennes, les égyptiennes. On trouvait cette dernière aux environs de Coptos, ville de la Thébaïde. Les autres espèces, qui provenaient de mines de cuivre, ne sont pas de véritables émeraudes, mais d’autres substances cristallisées et colorées en vert par l’oxyde de cuivre. Les Arabes distinguent aussi plusieurs espèces d’émeraudes ou iomorred : c’est la debaby, la meilleure. Viennent ensuite la rihany, la selky et la sabouriy, qui tirent leur nom de leurs différentes nuances. Comme on le voit, nombreux furent les noms qui, tirés soit de ses aspects divers, soit de ses lieux d’origine, désignaient l’émeraude dans les textes anciens. On attribuait à ces pierres des propriétés merveilleuses, par exemple, de conserver ou de guérir la vue, comme on peut voir dans Théophraste, De lapid., - ii, (23), (24) ; dans Ibn El-Beithar, Traité des simples, 1123 ; dans Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque Nationale, t. xxv, l r « partie, 1881, p. 216 ; dans Cyranides, éditées par F. de Mély, dans les Lapidaires de l’antiquité et du moyen âge, t. ii, Les lapidaires grecs, in-4°, Paris, 1898. Voir aussi de Rozière, Observations minéralogiques sur l’émeraude d’Egypte, dans la Description de l’Egypte, Histoire naturelle, in-4°, t. ii, p. 635-639.

F. de Mély.

II. Exégèse. — 1° Identification. — La troisième pierre du premier rang sur le pectoral ou rational du grand prêtre est appelée bâréqét. Exod., xxviii, 17 ; xxxix, 10. Ézéchiel, xxviii, 13, décrivant le vêtement du prince de Tyr, nomme la bâréqét parmi les pierres précieuses qui en relevaient la beauté : il est à remarquer, du reste, que ce sont les mêmes pierres que pour le rational ; l’hébreu, il est vrai, n’en nomme que neuf, mais les Septante ont complété le nombre de douze. Or la bâréqét est l’émeraude : c’est ainsi que traduisent les Septante, la Vulgate et aussi Josèphe, Ant. jud., III, vii, 5 ; Bell, jud., V, v, 7. La racine du mot hébreu signifie « jeter des feux,

II. - 55

1731

ÉMERAUDE — EMMANUEL

1732

étincelert ; ce qui serait une allusion à une’particularité frappante de la vraie émeraude : quand la gemme est assez grosse et que la lumière la frappe dans une position déterminée, elle renvoie la lumière comme un brillant miroir. On peut encore rapprocher de l’hébreu bârégéf le nom sanscrit marakata, qui désigne certainement i’émeraude : le nom avec la chose elle-même a pu venir de l’Inde en Palestine par le commerce. Enfin le n. « paf 80c, forme sous laquelle le nom grec de I’émeraude se présente parfois, n’est pas bien éloigné de bâréqét. — Quant au dnâpafSo ; des livres deutérocanouiques, Tob., xiii, 21 ; Judith, x, 19 ; Eccli., xxxii, 8, et de l’Apocalypse, xxi, 19, il a bien le sens d’  « émeraude », en n’oubliant pas toutefois que les anciens réunissaient sous le même nom, avec la véritable émeraude, plusieurs pierres de même couleur, comme des jaspes, des verres colorés, quelquefois même la malachite. Ainsi, au temps de Pline, on appelait émeraudes toutes les pierres d’un beau vert pré. Jannettaz et Fontenay, Diamant et pierres précieuses, in-8°, Paris, 188t, p. 162. L’indication du lieu de provenance et certaines particularités peuvent servir à distinguer les vraies émeraudes. Celles-ci arrivaient en Palestine soit de l’Inde, soit surtout de l’Egypte, où les gisements en contiennent encore. Dans ce dernier pays, le nom mafek comprenait diverses substances vertes ; mais avec Tépithète ma, « vrai, » il s’entendait seulement de I’émeraude véritable. Lepsius, Les métaux dans les inscriptions égyptiennes, trad. Berend, in-4°, Paris, 1877, p. 35-45. — Quelques auteurs veulent identifier I’émeraude avec le nôfék, la quatrième pierre du rational ; ils y sont portés par le Targum d’Onkélos, qui, dans Exod., xxviii, 18, traduit nôfék par’izmargedîn, où il est facile de reconnaître le mot grec u[iiipay80 « . Maisc’est une erreur ; le nôfék est l’escarboucle.

2° Usages et comparaisons. — L’Écriture nous montre I’émeraude servant par son éclat à rehausser les : étoffes précieuses et les ornements d’or. Exod., xxviii, ’17 ; Ezech., xxviii, 13 ; Judith, x, 19. Théophraste, De lapid., viii, 23, signale I’émeraude en même temps que l’escarboucle et le saphir parmi les pierres précieuses dont on faisait des sceaux. Or, dans une comparaison, l’Ecclésiastique, xxxii, 7, 8, en parallèle avec un cachet en escarbouele, nous parle d’un sceau d’émeraude monté sur or. Le saphir et I’émeraude sont souvent mentionnés ensemble dans les auteurs anciens, comme types de pierres précieuses aux belles couleurs. Ainsi Tobie, xiii, 21, transporté de reconnaissance pour les bienfaits de Dieu, célèbre dans un cantique inspiré la beauté et la gloire de la Jérusalem nouvelle, dont les portes seront bâties de saphirs et d’émeraudes. De même saint Jean, Apoc, xxi, 19, dans les fondements de la sainte cité, pla^e en quatrième lieu I’émeraude, après le saphir et l’escarboucle. L’émeraude, troisième pierre du premier rang sur le pectoral ou rational du grand prêtre, portait vraisemblablement le nom de Lévi. J. Braun, De vestitu sacerd. Hebrseorum, in-8°, Leyde, 1680, p. 765. — Dans la seconde vision de saint Jean, Apoc., IV, 3, le Seigneur se montre à lui sur un trône, et autour du trône était un arc-en-ciel qui semblait une émeraude. Quelques exëgètes croient qu’il s’agit ici de la malachite, dont certaines variétés aux teintes bleues mêlées au vert rappellent l’arc-en-ciel. Mais l’apôtre veut sans doute dire qu’on voyait autour du trône une auréole ayant la forme d’un arc-en-ciel, et au lieu de diverses couleurs, celui-ci n’en avait qu’une, la belle nuance verte de I’émeraude ; couleur si agréable aux yeux, dit Pline, H. N., XXXVII, 5, et qui à cause de cela était regardée comme symbolisant la grâce, la miséricorde divine. — Dans la description de la salle du festin d’Assuérus, Esther, i, 6, il est question de lits d’or et d’argent disposés sur un pavé de bahat et de marbre blanc. Le bahat est rendu par ufnxpay&irr^i dans les Septante, et par smaragdinus dans la Vulgate. Mais le mot hébreu identique à l’égyptien beliel, behiti, désigne le por phyre. Fr. Wendel, Veber die in altâgijptischen Texten. envâlinten Bau-und Edelsteine, in-8°, Leipzig, 1888, p. 7.7. Le ay.âpaf So « des Septante signifiant toujours une substance verte, on peut conjecturer qu’ils ont voulu indiquer ici le porphyre vert. E. Levesque.

ÉMIM (hébreu : ’Êmipi ; Septante : ’0[i(iaîov, Gen., xiv, 5 ; ’0|i[i£v, Deut., ii, 10-11), tribu nommée seulement dans la Genèse, xiv, 5-7, et le Deutéronome, ii, 10-11. C’était une race de géants. Gen., xiv, 5. Leur nom, en hébreu, signifie « les terribles ». Ils habitaient à l’est de la mer Morte, dans la région qui devint depuis le pays de Moab. Deut., ii, 10. Leur ville principale s’appelait Savé Cariathaïm. Ils furent battus, du temps d’Abraham, par Chodorlahomor et ses alliés. Gen., xiv, 5. Du temps de Moïse, ils avaient complètement disparu et il n’en restait plus que le souvenir. Deut., ii, 10-11, 20-23. C’est tout ce qu’on sait d’eux. Cf. H. Sayce, Patriarchal Palestine, in-12, Londres, 1895, p. 36-38.

1. EMMANUEL ( hébreu : ’Immânû’El ; Septante : ’E[i|Jiavour|X ; Matth., i, 23 : 8 è<ttiv (iE9ï)p[xr)vEu6|j.evov « Me6’f, |iS)v 6 ÛEtSç, » ce qui se traduit : « Dieu avec nous » ), un des noms symboliques par lesquels le prophète Isaïe a désigné le Messie.

I. Emmanuel est le Messie. — Cette dénomination est répétée plusieurs fois dans un groupe de prophéties, Is., vi-xii, qu’on a justement nommé « le livre d’Emmanuel ». Elles ont toutes été prononcées à l’occasion de la guerre de Phacée et de Rasin contre Juda, sous le règne d’Achaz. Ce roi impie n’ayant pas cru à une première prédiction, vii, 1-9, Isaïe reparut devant lui pour le détourner de son projet d’alliance avec les Assyriens et lui inspirer une juste confiance en la protection de Jéhovah. Il lui proposa le choix d’un miracle qui entraînerait sa conviction. Sous le faux prétexte de ne pas tenter le Seigneur, Achaz refusa de demander un prodige. Isaïe donna néanmoins un signe de la protection divine sur Juda. Ce signe, choisi par Dieu même, dépassait tout ce que le roi aurait pu imaginer de plus extraordinaire dans la hauteur des cieux ou dans la profondeur de la terre : « Voici que la Vierge {’almâh) conçoit et enfante un fils, et elle lui donnera le nom d’Emmanuel. Il se nourrira de beurre et de miel jusqu’à ce qu’il sache rejeter le mal et choisir le bien ; car, avant que l’enfant sache rejeter le mal et choisir le bien, la terre dont tu redoutes les deux rois sera désolée. » vii, 14-16. Emmanuel sera donc le dis d’une’almâh ou « vierge » parfaite, qui le concevra et l’enfantera sans lésion de sa virginité. Voir 1. 1, col. 390-397. Son nom est un symbole expressif de la protection divine ^ Puisque sa nourriture sera celle des autres enfants, Tertullien, Adv. Judseos, ix, t. ii, col. 619, il ne sera pas un enfant idéal, mais un enfant réel. Sa naissance semble, à première vue, devoir être prochaine, puisque avant qu’il soit sorti de l’enfance, c’est-à-dire avant deux ou trois ans, les royaumes de Syrie et d’Israël, ennemis de Juda, seront dépeuplés par le roi d’Assyrie. Il ne sera pas toutefois un fils d’Isaîe, car l’enfant qui va naître du prophète, viii, 1-4, portera un antre nom. D’ailleurs, d’après les caractères décrits plus loin, Emmanuel sera roi de Juda. Il ne sera pas non plus un fils d’Achaz, car Ézéchias n’a pas réalisé les traits les plus caractéristiques du portrait d’Emmanuel. D’après les autres prophéties d’Isaîe concernant Emmanuel, d’après l’application expresse que saint Matthieu, i, 23, a faite de ce passage à Jésus de Nazareth, d’après l’interprétation unanime de la tradition catholique, Emmanuel ne peut être que le Messie, fils de David et roi de Juda. Cette explication soulève une difficulté qu’on a résolue de bien des manières : Si Emmanuel est le Messie, il reste à déterminer comment sa n ?issance, qui n’eut lieu que 750 ans plus tard, fut pour Achaz et la maison de David un signe de la prochaine délivrance de Juda. Des exégètes sérieux

ont essayé de tourner la difficulté en appliquant vii, 14-16 à deux enfants distincts. Selon eux, le t- 14 se rapporterait seul au Messie, et les }}. 15e * 16, ou au moins le ꝟ. 16, désigneraient un autre enfant, soit l’un des fils d’Isaïe, Se’âr-Yâëûb (Drach, De l’harmonie entre l’Église et la Synagogue, Paris, 1844, t. ii, p. 185-186) ou Maher-éàlal-haé-bai, soit un enfant indéterminé. (Trochon, Les prophètes, haïe, Paris, 1883, p. 61.) Mais rien dans le texte ne laisse soupçonner ce changement de personne, qui serait choquant, s’il existait. D’ailleurs, dans l’original, le terme na’ar, « l’enfant, » est précédé de l’article, ha-na’ar, et signifie « cet enfant », celui dont il vient d’être parlé. Les $ꝟ. 15 et 16 conviennent donc à Emmanuel. L’annonce de la naissance tardive de cet enfant divin a néanmoins un rapport réel avec l’époque d’Achaz et d’Isaïe. Le prophète, en effet, a vu dans un même tableau la naissance virginale d’Emmanuel et la délivrance prochaine de son peuple. V’almdh et son fils étaient présents à son esprit d’une présence idéale. Dès lors il a pu par anticipation se servir de leur existence pour fixer une date, celle à laquelle ses compatriotes seront délivrés du danger qui les menace ; il a dit : Avant que se soit écoulé le temps qu’il faudrait à Emmanuel, s’il naissait de nos jours, pour sortir de l’enfance, Israël et la Syrie seront dévastés. Vigouroux, Manuel biblique, 9e édit., 1896, t. ii, p. 639 ; Fillion, Essais d’exégèse, Lyon et Paris, 1884, p. 89-99 ; Corluy, Spicilegium dogmatico-biblicum, Gand, 1884, t. i, p. 418-419. Cependant le P. Knabenbauer, qui avait accepté cette explication, Erklârung des Propheten Isaias, Fribourg-en-Brisgau, 1881, p. 125, l’a abandonnée et en a proposé une autre, Commentarius in Isaiam prophetam, Paris, 1887, t. i, p. 185-190. Il estime que dans la pensée du prophète Emmanuel n’est pas lié au temps actuel, et que sa naissance n’est pas un signe de la délivrance prochaine de Juda. Ce signe est donné plus loin. Is. viii, 1-4. Le prophète annonce simplement qu’Emmanuel, quoique fils de David, naîtra dans une humble condition et sera privé du royaume temporel de sa race. Il mènera une vie pauvre, afin d’apprendre ainsi à pratiquer la vertu et la souffrance, et sera doué d’une piété et d’une sainteté insignes. Mais auparavant, et dans ce but, la terre de Juda sera dévastée et abandonnée. De fait, Jésus, le véritable Messie, a mené une vie pauvre et sainte sur la terre de Juda, privée de son autonomie et soumise au joug de l’étranger.

La seconde fois qu’Isaïe parle d’Emmanuel, il indique d’un mot ses glorieuses destinées, viii, 8 et 10. Après avoir annoncé la dévastation d’Israël et de Juda par les Assyriens, il interpelle directement Emmanuel et s’écrie dans sa détresse : « Les armées ennemies couvrent de leurs ailes toute ta terre, ô Emmanuel ! » Cette terre envahie, c’est sa terre, celle dont il est le roi, puisqu’elle lui appartient ; qu’il vienne lui-même à son secours, pour qu’elle ne périsse pas. À cette pensée, la confiance renaît dans le cœur du prophète, et, s’adressant à tous les ennemis de Juda, il leur prédit que vaines sont leurs coalitions, vains leurs projets et leurs discours. Une seule raison, signifiée par le nom d’Emmanuel, justifie sa confiance, ki’Immânû-’El, « parce que Dieu est avec nous » et nous protège. Emmanuel sera donc un roi de Juda, un roi puissant, qui sauvera son peuple. Knabenbauer, Comment, in Isaiam prophetam, 1887, t. i, p. 204-207.

— Les caractères de sa royauté sont décrits plus loin. IX, 6-7. Les tribus de Zabulon et de Nephthali et les habitants de la Galilée des gentils, qui avaient particulièrement souffert’de l’invasion assyrienne, recevront les premiers la lumière de l’Évangile, apportée au monde par un enfant royal, qui n’est pas nommé, mais qui ne peut être qu’Emmanuel, le roi-Messie. Or cet enfant sera le Conseiller divin, le Dieu fort, le Père de l’éternité et le Prince de la paix ; il sera réellement’Immânù’El, t. Dieu avec nous ; » ’El gibbôr, « Dieu fort, s un héros Dieu,

Dieu par nature. Knabenbauer, In Isaiam, p. 223-229.

— Enfin tout le chapitre xi est consacré à dépeindre Emmanuel et les biens qu’il apportera à la terre. Ce roi sortira de la race presque éteinte de David ; il sera rempli de l’esprit de Dieu et gouvernera avec justice, sans erreur ni acception des personnes. Sous son sceptre, le peuple de Jéhovah, délivré du joug des oppresseurs, goûtera la paix la plus profonde. Cette paix est symbolisée par les images les plus riantes : le mal aura disparu de la sainte montagne du Seigneur ; les nations idolâtres se convertiront en masse et viendront partager avec les Juifs le bonheur de vivre sous des lois douces et parfaites. De l’aveu de tous les commentateurs, ces caractères du règne d’Emmanuel sont évidemment messianiques. Emmanuel désignait donc, dans la pensée d’Isaïe, le Messie attendu des Juifs et venu en la personne de Jésus-Christ. Knabenbauer, / »  » Isaiam, p. 265-291. II. Signification du nom. — Emmanuel est un nom composé dans la composition duquel entre le nom de’El, « Dieu. » Par lui-même, il présage la protection divine sur Juda ; il est un gage assuré que Dieu se portera au secours de son peuple menacé. Or l’enfant à qui ce nom est donné est le Messie, et en fait, d’après l’interprétation de saint Matthieu, i, 23, le Messie est Jésus, le Fils de Dieu incarné dans le sein de la Vierge Marie. Le nom d’Emmanuel n’est donc pas seulement un gracieux emblème de la protection divine, une consolante promesse d’avenir. Voir Érasme, Apologia de tribus locis quos ut recte taxatos a Stunica defenderat Sanctius Caranza theologus, Opéra, Leyde, 1706, t. IX, col. 401-404. Suivant l’explication des Pères, saint Irénée, Adv. hsereses, 1. iii, c. xxi, n° 4, t. vii, col. 950, et 1. iv, c. xxxiii, n° 11, col. 1080 ; Lactance, Divin. Instit., 1. iv, c. xii, t. vi, col. 479 ; saint Épiphane, Hseres. tir, n° 3, t. xli, col. 965 ; saint Chrysostome, In Isaiam, i, n° 9, t. lvi, col. 25 ; Théodoret, In Isaiam, vii, 14, t. lxxxi, col. 275, ce nom avait une signification plus profonde, qu’Isaïe n’avait peut-être pas vue. Il prédisait la nature divine du Messie, qui est véritablement Dieu avec nous, Dieu fait homme, venant dans le monde et y vivant humble, pauvre et doux. Cf. S. Thomas, Sum. th., iii, 37, a. 2, ad i nm, et Bossuet, Explication de la prophétie d’Isaïe, 3e lettre, Œuvres, Besançon, 1836, t. vi, p. 462. — Pour la bibliographie, voir’Almah, t. i, col. 397. E. Mangenot.

2. EMMANUEL, fils de Salomon (’Immanuel ben Selomo), exégète grammairien et poète juif, né à Rome vers 1272, mort dans la première moitié du XIVe siècle. Après avoir vécu un certain temps à Rome, il se fixa à Fermo, dans la Marche d’Ancône. On a de lui un commentaire sur les Proverbes de Salomon, qui a été publié, in-f°, à Naples, en 1486, avec plusieurs commentaires de divers auteurs, comme de Kimchi sur le Psautier, de Raschi sur l’Ecclésiaste, etc. Les autres commentaires d’Emmanuel sont restés manuscrits : ainsi un commentaire sur le Pentateuque (Codex de Rossi 404) ; un commentaire sur les Psaumes, dont de Rossi a publié des fragments sous ce titre : R. Immanuelis, ꝟ. Salom., scholia in selecta loca Psalmorum, in-8°, Parme, 1806. La Bibliothèque Nationale possède un manuscrit incomplet de ce commentaire au n » 233, et aussi un commentaire sur Job, sur le Cantique des cantiques (235). Outra d’autres copies de ces deux derniers ouvrages, de Rossi signale encore des commentaires manuscrits de Ruth, des Lamentations, d’Esther, et un ouvrage manuscrit sur la grammaire et la critique biblique, intitulé’Êbén bôhan. Il a paru du même auteur nn traité sur l’état des âmes après la mort, intitulé Haffôfép vehâ’êdén, « L’enfer et le ciel, » in-#°, Prague, 1613. Voir M. Steinschneider, Immanuel, Biographische und iiteraturhistorische Skizze, in-8°, Berlin, 1843 ; J. Fûrst, Bibliotheca judaica, in-8, . 1863, t. ii, p. 92-93. E. Levesque.

1735

EMMAUS

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    1. EMMAUS##

EMMAUS, nom de localité cité I Mach., iii, 40, 57 ; IV, 3 ; IX, 50, et Luc, xxiv, 13. Selon plusieurs palestinologues, ce nom, dans l’Ancien Testament et dans le Nouveau, désigne une seule et même ville ; selon d’autres, il est attribué à deux localités différentes. Après avoir parlé d’abord de la ville nommée I Mach., point sur lequel l’accord est à peu près général, nous exposerons en second lieu la question, sur laquelle porte la controverse, de l’Emmaûs évangélique, en résumant aussi fidèlement que possible les arguments pour et contre la distinclion et en faisant connaître les diverses identifications proposées.

1. EMMAUS (selon le texte reçu : ’Eunocoûp. ; Codex Alexandrinus : ’A(i|xaoOv et’A|i(i « oiJ(jt ; Codex Sinaiticus : ’A(i|xaoii, ’A|x(i.aoii ; , ’Appao-Jv et’E|x|xaoûv ; Vulgate : Emmaum ; I Mach., IX, 50, Ammaum ; version syriaque : ’Ama’us ; les anciennes versions arabes et presque toutes les modernes : ’Amu’âs ou’Ammu’ds), ville de Judée.

I. Nom. — Dans Josèphe, ce nom est écrit’E|ji, |ji, ao0 ?, °A[t|j.cxoij{ et quelquefois’A|/, aoOç. Dans les Talmuds, l’orthographe en est très variée ; on lit tantôt’Emma’ûs ou’Amma’ûs, avec’(y) ; tantôt’Emma’ûs ou’Amma’ûs, avec’(n), et aussi’Emis, ’Ema’îtn et’Ema’ûm. Cf. A. Neubauer, Géographie du Talmud, in-8°, Paris, 1868, p. 100. Les Grseca fragmenta libri nomina hebraicorum, Patr. lat., t. xxill, col. 1162, en traduisant’E|i|iaoù ?, Xaôv àvroppi^avcoç, populis abjicientis, supposent la forme’Am-mo’ês, des deux racines’am, « peuple, » et ma’âs, « rejeter ; » la traduction de saint Jérôme, populus abjectus, indique la forme’Am-ma’ôs. Si cette étymologie est grammaticalement acceptable, sa signification la fait paraître peu vraisemblable. Conder propose le nom Ikhma (68J de la liste de Karnak comme pouvant être Emmaûs. Tentwork in Palestine, in-8°, Londres, 1879, t. ii, p. 345.

— Un grand nombre d’entre les commentateurs ont vu dans ce nom une transcription de l’hébreu ffammàh ou Hammât, araméen Hamta’, ou de Bammi, ffarnma’i ou Hamma’im, « chaleur » ou « lieu chaud », ou encore « eaux chaudes », de la racine h.àmam, « être chaud. » Cf. Polus, Synopsis criticorum, Francfort-surle-Mein, 1712, t. iv, col. 1065 ; Reland, Palsestina, in-4°, Utrecht, 1714, t. î, p. 428 ; Bonfrère, Onomasticon, édit. J. Clerc, in-f°, Amsterdam, 1707, p. 68, note 4 ; Christ. Cellarius, Notitix orbis antiqui, in-4°, Leipzig, 1706, t. ii, p. 558. Cette opinion est fondée principalement sur l’interprétation 6ép|xa, « bains chauds, thermes, » donnée par Josèphe à une localité située près de Tibériade, dont le nom est écrit’A|i|iaoO ; et’Ancxoûç dans la plupart des éditions de cet historien. Ant. jud., XVIII, ii, 3 ; Bell, jud., IV, i, 3. Mais, dans ces mêmes passages, Niese, en ses deux éditions des œuvres de Josèphe, rejette ces leçons pour adopter celle d’'A |xii.a, 80ùç, qui se lit dans tous les manuscrits collationnés par lui, sauf un : ce résultat infirme les leçons’A(t(iaoO ; ou’Ajiaoû ; et l’étymologie basée sur elles. — Quelques écrivains ont pensé qu’Emmaùs n’est pas différente d’Amosa. Jos., xviii, 27. Cf. V. Guérin, Description de la Judée, t. i, p. 294 ; de Saulcy, Dictionnaire topographique abrégé de la Terre Sainte, in-8°, Paris, 1877, p. 131 ; J.-B. Guillemot, Emmaûs -Nicopolis, in-4°, Paris, 1886, p. 11. Cette étymologie pourrait ne pas paraître invraisemblable, si les indications topographiques du livre des Machabées et celles de l’histoire ne fixaient point, comme nous le verrons, la position d’Emmaûs dans le territoire de la tribu de Dan, tandis qu’Amosa doit être cherchée dans les limites de Benjamin. Voir Amosa, 1. 1, col. 518-520 ; Benjamin (tribu de), t. i, col. 1589-1593. — Le R. P. van Kasteren propose comme plus probable le nom de’Ammaôn. Il dériverait de’am et maôn, et la signification de « divinité qui unit les familles » aurait une analogie frappante avec Baal-Méon, ville de Moab, dont les Grecs ont fait BesXliaoïi ; , comme ils ont fait’E<t80û ; de Hésébon, ’AXouç (AîuXoûç [ ?]) de Aïalon. Le nom d’Emma, par lequel

Josèphe, Ant. jud., VI, un, 6, transcrit celui de Maonj le nom d’Ammaon ou Araaon donné par saint Ambroise, Comment, in Lucam, 1. x, 173, t. xv, col. 1847, et en plusieurs autres passages, au deuxième disciple d’Emmaûs, et la forme du génitif’E(i[tao0vTo ; et Emtnauntis, confirmeraient cette opinion. Le même écrivain ajoute qu’il ne serait peut-être pas impossible qu’une forme Hammon ou Ammon eût été allongée en’Amiaoûc, comme Mégiddon (Mégiddo) en Mey-feSaoù ?. Revue biblique, Paris, 1892, p. 648-649. — L’opinion commune chez les habitants de la Palestine tient qu’Emmaùs est le nom ancien et primitif, du moins dans ses trois radicales’M S, quelle que soit d’ailleurs sa signification, difficile à déterminer, à cause du grand nombre de racines dont il peut dériver. Cette opinion est fondée sur des considérations historiques. L’usage simultané, en Palestine, pour la désignation des localités, de deux onomastiques différentes, est incontestable : l’une employée par la colonie grécoromaine, l’autre par la population sémito-chamite du pays. On rencontre peu ou point d’exemples de noms nouveaux donnés par les Gréco -Romains à des localités anciennes ou simplement modifiés par eux et acceptés par les indigènes.’Ammôn, Sippori, Bêtsan, Bêtgabra’, Lud, Emmaûs, appelés par les étrangers Philadelphie, Diocésarée, Scythopolis, Éleuthéropolis, Diospolis, Nicopolis, sont demeurés pour les indigènes’Amman, Safouriéh, Bessân, Beit-djebrîn, Lyd, ’Amo’as ; Hésébon et Ma’ôn sont restés Hesbàn et Ma’in. L’usage a laissé se perdre quelquefois la consonne finale des noms, et Kesàlon devenir Kesla’, Aïalon ou Yalôn devenir Yâlô, ’Anatôt, ’Anâta’; mais il ne paraît pas s’être conformé jamais au génie des langues grecques et latines pour accepter le s final, si ordinaire à celles-ci. Pour Emmaûs en particulier, sa première radicale, ’(y), n’a pu venir des Occidentaux, qui n’ont point ce son ; son usage constaté dès le IVe siècle et même auparavant par les Fragmenta grseca, la traduction de saint Jérôme et les versions syriaques, permet de croire qu’elle s’est transmise traditionnellement depuis les temps anciens. Elle n’a pu se transmettre qu’avec le nom lui-même, et ainsi les indigènes n’avaient pas à prendre ce nom des étrangers ni en totalité ni en partie. Il a pu en être autrement des Juifs. Les variations du Talmud ne pourraient guère s’expliquer si ses auteurs eussent trouvé le nom d’Emmaûs en usage chez eux par une tradition constante, ou s’il se fût trouvé dans leurs livres sacrés ou leurs autres écrits. Ne l’ayant point conservé, et placés entre deux onomastiques, ils l’auront emprunté tantôt de l’une, tantôt del’autre. — Quoi qu’il en soit de la probabilité respective plus ou moins grande de ces opinions et conjectures, il est besoin de documents nouveaux pour fixer d’une manière certaine l’étymologie d’Emmaûs.

II. Situation. — 1° D’après la Bible. — Emmaûs, d’après I Mach., se trouvait « dans la plaine », âv tî yt tti ireStvîj, iii, 40, et iv, 6 ; au seuil des montagnes, iv, 16-21 ; elle appartenait à la Judée, iv, 39 ; elle était vers ; l’ouest de Gazer, puisque les soldats de Gorgias, vaincus à Emmaûs, s’enfuirent vers Gazer, pour gagner ensuite Azot et Yamnia, iv, 15. — 2° D’après les écrivains profanes. — Les anciens auteurs ajoutent divers renseignements à ces indications bibliques. Josèphe, Ant. jud. r XII, vii, 3-4, reproduit le récit de la Bible sans y rien ajouter ; mais, Bell, jud., II, XX, 4, et IV, viii, 1, il indiquele territoire d’Emmaûs comme uni et faisant suite, vers l’est, aux territoires de Lydda et de Jaffa. Les Talmuds disent qu’Emmaùs est un lieu abondant en eau, situé à la fin des montagnes et au commencement de la Séphéla, la yt| 7teotvT|, le ireSiov ou campus, « la plaine » de nos versions. « Depuis Béthoron jusqu’à Emmaûs c’est le pays des montagnes, dit R. Johauan, Talmud de Jérusalem, Schebiit, ix, 2 ; de là jusqu’à Lod c’est la Sefèlâh. » Cf. A. Neubauer, Géographie du Talmud, p. 61 et 100 ; Reland, Palsestina, 1. 1, p. 309. Pline, H. N., v, 14, signale, .

pour caractériser Emmaûs, la pluralité des fontaines à eau courante : fontibus irriguam Emmaum, et la nomme avec Lydda et Joppé. La table de Peutinger nomme Emmaûs à dix-huit milles à l’occident d’jElia ou Jérusalem, à l’est de Joppé, Yamnia et Lydda, à douze milles de cette dernière. Dans Reland, Palœstina, t. i, en face la page 420. Le pèlerin juif Ishâq rjelô (1334) va de Sara’à Gimzo, en passant par Emmaûs. Les chemins de Jérusalem, dans Carmoly, Itinéraires de la Terre Sainte, in-8°, Bruxelles, 1847, p. 245. — 3° D’après les écrivains chrétiens. — Les témoignages des anciens écrivains ecclésiastiques sont encore plus nombreux et plus précis ; toutefois, avant de les citer, deux observations sont à faire : 1. pour eux la localité d’abord appelée Emmaûs est la même qui a été nommée, au m » siècle, Nicopolis par les Grecs et les Romains ; 2. il n’y a pour eux qu’une seule Emmaûs, et l’Emmaùs des Machabées est aussi l’Emmaûs de l’Évangile : Nicopolis désigne l’une et l’autre. Tous les documents et toute l’histoire sont constants et unanimes à affirmer cette double identification. — Faisant allusion aux faits racontés £ Mach., m et iv, saint Jérôme s’exprime ainsi : « [Daniel] veut parler de l’époque de Judas Machabée, qui, sorti du bourg de Modin, assisté de ses frères, de ses parents et d’un grand nombre d’entre le peuple juif, vainquit les généraux d’Antiochus près tV Emmaûs, qui est maintenant appelée Nicopolis. » Commentin Dan., viii, 14, t. xxv, col. 537. La Chronique d’Eusèbe, traduite par saint Jérôme, constate ce changement de nom à l’année chr. 224 : « En Palestine, y lit-on, la ville de Nicopolis, appelée auparavant Emmaûs, a été fondée par Jules Africain, auteur d’une Chronique, qui avait accepté d’être député à cet effet. » Patr. lat. t t. xxvii, col. 641-642. Saint Jérôme ne cesse d’attester ce changement de nom toutes les fois qu’il nomme Emmaûs ou Nicopolis. Voir De viris illustribus, cap. lxiii, t. xxii, col. 675 ; In Ezech., xlvui, 21 et 22, t. xxv, col. 488 ; In Dan., xi, 4 et 5, ibid., col. 574 ; In Abdiam, ꝟ. 19, ibid., col. 1113. Tous les historiens, chronographes et pèlerins, tant latins que grecs, répèlent cette assertion en termes identiques. Ainsi le Chronicon paschale, ann. chr. 223, t. xcii, col. 657 ; Jean Moschus, Prat. spiritual., ch. xlv, t. lxxxvii, col. 3032 ; Georges Syncelle, Chronographia, in-f°, Venise, 1729, p. 286 ; Théophane, Chronograph., année C. 354, t. cviii, col. 160 ; Anastase le Bibliothécaire, Histoire eccl., à l’année du monde 5715, Patr. gr., t. cviii, col. 1200 ; M. Aur. Cassiodore, Chronique, t. lxix, col. 1236 ; S. Adon, arch. de Vienne, Chronique, t. cxxiii, -col. 86 ; Id., De festivitalibus sanctorum Apostolorum, ibid., col. 193 ; Cedrenus, Historiarum compendium,

: t. cxxi, col. 582 ; Nicéphore Calixte, Hist. eccl., 1. x, c. 31, 

t. cxlvi, col. 536.

L’identité de l’Emmaûs de saint Luc et de Nicopolis n’est pas moins formellement affirmée. « Emmaûs, dit Eusèbe, d’où était Cléophas, qui est [nommée] dans l’Évangile selon Luc ; c’est maintenant Nicopolis, ville célèbre de Palestine. » Onomasticon, édit. Larsow et Parthey, in-12, Berlin, 1862, p. 186 ; traduction équivalente de saint Jérôme, De situ et nominibus locorum hebraicorum, t. xxiii, col. 896. « Reprenant le même chemin, dit personnellement saint Jérôme racontant le pèlerinage de sainte Paule romaine, elle vint à Nicopolis, qui s’appelait d’abord Emmaûs, près de laquelle le Seigneur fut reconnu à la fraction du pain, et où il consacra la maison de Cléophas en église. » Epist. cviii, ad Eustochium, t. xxii, col. 883. « Il y a une ville de Palestine nommée aujourd’hui Nicopolis, dit Sozomène ; il en est fait mention dans le livre divin des Évangiles comme d’un village, car c’en était un alors, sous le nom d’Emmaùs. » H. E., v, 21, X. lxvii, col. 1280-1281. Le pèlerin Théodosius (vers 530) cite : « Emmaûm, qui est maintenant appelée Nicopolis, où saint Cléophas reconnut le Seigneur à la fraction du pain. » De Terra Sancta, édit. de l’Orient latin, in-8°, Genève, 1877, p. 71. L’auteur de la Vie de saint Willibald

raconte comment le saint voyageur « vint à Emaûs, bourg de Palestine que les Romains… appelèrent Nicopolis, où il vint prier dans la maison de Cléophas, changée en église. » Act. sanct. Boll., édit. Palmé, t. ii, juill., p. 515. Guillaume deTyr, Historia, 1. vii, c. 24, dans Bongars, p. 743 ; Id., 1. viii, c. 1, ibid., p. 746 ; Nicéphore Callixte, H. E., x, 31, t. cxlvi, col. 536, et un grand nombre d’autres attestent la même identité. — Il résulte de cette double identification, quelle qu’en soit du reste la valeur, que les indications données par les anciens écrivains chrétiens sur Nicopolis ou sur l’Emmaûs évangélique s’appliquent en même temps à l’Emmaûs des Machabées dont nous parlons, et réciproquement.

Nicopolis, selon Eusèbe, est au nord de Bethsamès, d’Esthaol et de Saraa, puisque la route venant d’Éleuthéropolis à Nicopolis passe près de ces villes, dix milles au nord d’Éleuthéropolis. De situ et nominibus locorum hebraicorum, t. xxiii, col. 883, 895, 921. Nicopolis, lorsqu’on s’y rend d’/Elia, est au delà de Béthoron, qui est lui-même à douze milles environ d’iElia. Ibid., col. 880. Elle est à quatre milles de Gazer, qui est plus au nord. Ibid., col. 900. Elle se trouve non loin d’Aïalon de la tribu de Dan. Ibid., col. 874. Saint Jérôme ajoute que « le village d’Aïalon est près de Nicopolis, au deuxième mille en allant à jElia ». Ibid., col. 868. Le même docteur place, In Ezech., loc. cit., Nicopolis avec Aïalon et Sélébi dans la tribu de Dan. Comme Lydda, elle appartient à « la Séphéla, c’est-à-dire la plaine ». In Abdiam, loc. cil. Elle est aux confins de cette plaine, « là où commencent à s’élever les montagnes de la province de Judée. » In Dan., xi, 44 et 45, loc. cit. Sainte Paule, montant de Nicopolis à Jérusalem, peut saluer de loin Aïalon, qu’elle laisse à sa droite, et passe par les deux Béthoron, l’inférieure et la supérieure. S. Jérôme, Epist. ad Eustoch., t. xxii, col. 883. Le pèlerin de Bordeaux (333), prenant sans doute cette même voie par Béthoron, généralement suivie alors, compte « de Jérusalem à Nicopolis xxii milles ; de Nicopolis à Diospolis ( Lydda) x milles ». Itinerarium a Burdigala Hier-usalem usque, t. viii, col. 792. Virgilius, pèlerin vers le commencement du VIe siècle, estime la distance « de Jérusalem à Sinoda ( pour Cidona, hébreu : Kidôn, nom de l’aire, près de Cariathiarim, où fut frappé Aza, I Par., xiii, 9), où fut l’arche du Testament…, vm milles ; de Sinoda à Amaùs…, vm milles ». Itinera hierosol., dans Analecta sacra du card. Pitra, in-4°, Rome, 1888, t. v, p. 119. Théodosius, Genève, 1877, p. 71, porte ces deux demi-distances chacune à neuf milles, en tout dix-huit milles, comme porte la table de Peutinger. Ces deux dernières indications étant d’accord, Eusèbe donnant aussi neuf milles pour la distance de Jérusalem à Cariathiarim, et les itinéraires de Virgilius et de Théodosius n’étant que deux copies d’un même itinéraire, la leçon nu milles de Virgilius sera très probablement une erreur de copiste pour viui milles. D’après ces deux pèlerins, il y a « d’Emmaùs à Diospolis XII milles ». Le moine hagiopolite Épiphane place « à l’occident de la ville sainte, à environ six milles, le mont Carmélion, patrie du Précurseur ; vers l’occident du mont Carmélion, à environ dix-huit milles, est Emmaûs ; de là, à environ huit autre milles est Ramblé (Ramléh), et près de Ramblé est la ville de Diopolis (Diospolis) ». Descriptio Terrse Sanctse, t. cxx, col. 264. La carte en mosaïques découverte à Màdaba, en 1897, place Nicopolis dans la plaine et dans la tribu de Dan, à l’ouest de Jérusalem, plus au sud qu’elle ne devrait être, mais au sud-ouest de Béthoron. Méditha (Modin) est au nord-nord-ouest, BaTa-Avvaëï), xa’t vùv By]to-Anvaëa, non loin, au nord-ouest, TviSoup (Gazer), à l’ouest un peu nord ; AtoS est plus loin, aussi au nord-ouest. Les témoignages postérieurs sont identiques pour le fond. — Dans ces diverses indications, on constate des différences dans les chiffres déterminant les distances. Ces différences pourraient paraître des contradictions ou des indications désignant des lieux différents, si l’on n’obseivait

pas qu’elles s’expliquent d’elles-mêmes par leur contexte. Ces chiffres sont différents parce qu’ils donnent les mesures de voies d’inégale longueur menant à Emmaûs, et plusieurs d’entre eux n’ont point la prétention d’être des mesures précises et rigoureuses, mais seulement approximatives, à un on deux milles près. Cette remarque faite, il est impossible de ne pas reconnaître que ces données nombreuses, provenant des sources les plus diverses et dispersées à travers les siècles, amènent toutes à un même point ou à une même localité.

III. Identification. — Les historiens et les géographes arabes citent souvent, depuis le ix « siècle, une localité de Palestine appelée’Atnu’ds. Ce nom est évidemment une forme équivalente de 1’'E|i(iao’j{ ou’A(i|iaoOç de la Bible. Cette localité est ordinairement nommée avec Loud, Ramléh ou les autres villes de la plaine. Elle est indiquée à la limite des montagnes, à six milles de Ramléh, sur la route de Jérusalem, et à douze milles de la ville sainte ; elle est à peu près à la même distance de cette dernière que l’est le Ghôr, c’est-à-dire la vallée du Jourdain. Voir Van Kasteren, ’Amu’âs qarîât Felasfin, dans la revue’El Kenîset-’el Katûlîkiéh, 2° année, n° 13, Beyrouth, 1889, p. 421-423 ; ld., Êmmaûs-Nicopolis et les auteurs arabes, dans la Revue biblique, 1892, p. 80-99. Ces indications des écrivains arabes sont identiques à celles des anciens, et les unes et les autres se rapportent évidemment à la même localité. En prenant le nom de’Âmu’âs pour désigner dans leur version l’Emmaûs des Machabées, les traducteurs arabes de la Bible témoignent de leur persuasion de l’identité et des noms et des lieux. Le nom de’Amo’às ou Amouas existe encore aujourd’hui, porté par un village de la Palestine. Cette localité réalise aussi exactement que possible et de tous points les données de l’histoire et de la Bible, comme il est facile de s’en assurer en comparant sa situation réelle à la situation que lui tracent les documents et en lisant la description. Aussi les palestinologues s’accordent, presque à l’unanimité, à reconnaître dans l"Amo’âs actuel T’Amo’âs des auteurs arabes et de la Bible arabe, l’Emmaûs des écrivains anciens, chrétiens ou autres, et l’Emmaûs du livre I des Machabées. Voir Van Kasteren, études citées ; V. Guérin, Judée, 1868, t. i, p. 293-296 ; de Saulcy, Dictionnaire topographique abrégé de la Terre Sainte, Paris, 1877, p. 131 ; Von Riess, Biblische Géographie, in-f », Fribourg-en-Brisgau, 1872, p. 21 ; ld., Bibel-Atlas, 2e édit., in-f », ibid., 1881, p. 10 ; L. C. Gratz, Schauplatz der heiligen Schriften, nouv. édit., in-8°, Ratisbonne, p. 308 ; Robinson, Biblical Hesearches in Palestine, in-8°, Boston, 1841, p. 363 ; G. Armstrong, Wilson et Conder, Names and Places in the Old Testament and apocrypha, Londres, 1881, p. 55 ; C. R. Conder, Tentwork in Palestine, in-8°, Londres, 1879, t. i, p. 14-18 ; Th. Dalfi, Viaggio biblico in Oriente, in-8°, Turin, 1873, t. iii, p. 286 ; Seetzen, Reisen durch Syrien, Palâstina, in-8°, Berlin, 1859, t. iv, p. 271.

Il faut signaler toutefois une opinion différente. Ceux qui la défendent admettent un seul Emmaûs biblique, parce que telle est l’assertion bien certaine des Pères et de la tradition locale de Terre Sainte ; mais, suivant eux, cet Emmaûs ne peut être’Amo’às ; il faut le chercher à soixante stades de Jérusalem, c’est-à-dire à sept milles romains et demi ou onze kilomètres deux cent vingt mètres. S’il y a des arguments pour soutenir la distinction entre l’Emmaûs de saint Luc et l’Emmaûs des Machabées, il n’y en a point pour contester l’identité d" Amo’às avec l’Emmaûs des Machabées et de l’histoire. Les indications sont trop nombreuses, trop claires et trop précises. S’il n’y a qu’un Emmaûs, il faut le reconnaître dans’Amo’às. Voir Emmaûs 2.

IV. Description.— i"Les routes. —’Amo’às est situé 0° 12* 2° ouest 0° 3’nord de Jérusalem ( fig. 555). La voie la plus courte qui y mène en partant de Jérusalem se dirige d’abord vers le couchant, incline ensuite au nord-ouest,

passe au-dessus de Liftah du côté sud, descend près de Qolouniéh, où elle laisse, à environ quatre kilomètres à gauche (sud), le grand et beau village de’Aïn-Kârem, la patrie traditionnelle de saint Jean-Baptiste, gravit la montagne de Qastal, touche à Qariat-’el-’Anéb, puis à Beitoûl et à Ydlô, l’antique Aïalon, situé à trois kilomètres et demi, un peu plus de deux milles romains, en deçà (est) de’Amo’às, qu’elle atteint du côté nord. La longueur totale de ce chemin est de vingt-six à vingt-sept kilomètres, c’est-à-dire dix-sept à dix-huit milles romains, selon l’expression des anciens. Cette voie, dont les vestiges sont visibles sur la plus grande partie de son parcours et où la route moderne ne les a pas fait disparaître, parait la plus ancienne de toutes. Les Romains, sans doute pour éviter les pentes raides et difficiles et aussi les vallées profondes par où elle passe, tracèrent une autre voie. Partant de la porte nord de Jérusalem, elle suivait le chemin de la Samarie et de la Galilée jusqu’au quatrième milliaire ou sixième kilomètre, un peu au delà de Tell-el-Foûl. S’ëcartant alors dans la direction du nord-ouest, elle passait sous El-Gîb, par les deux Beit-’Our (Béthoron), le haut et le bas, non loin de là tournait au sud près de Beit-Sira’, pour arriver à’Amo’às après un parcours de trente-trois kilomètres. Ce sont exactement les vingt-deux milles romains de Yltinéraire de Bordeaux. Cette voie est reconnaissable dans toute son étendue. Elle est la plus longue, et son tracé parait fait en vue de faciliter le parcours aux chariots en usage chez les anciens. Une autre voie romaine, dont on peut suivre les tronçons sur divers points, partait comme la précédente de la porte nord, mais pour obliquer à peu de distance vers le nord-ouest. Elle passait aux villages actuels de Beit-’Jksa’et de Beddû, laissait à sa droite Qobeibéh, venait rejoindre Qariat-’el-’Anéb, longeait ensuite, du côté sud, l’ouadi’el-Rût, s’en écartait près du Khirbet-’el-Gérâbéh, pour contourner le Râs-’el-’Aqed et gagner’Amo’às par le sud. L’étendue de ce tracé est de vingt-neuf à trente kilomètres, c’est-à-dire environ vingt milles romains ou cent soixante stades. La route carrossable actuelle suit d’abord d’assez près la direction de la première voie, avec laquelle elle se confond quelquefois jusqu’à Qariat, ou, s’inclinant vers le sud, elle va prendre près de Sâris l’ouadi’Aly, qu’elle parcourt dans toute sa longueur jusqu’à Lafrûn, près duquel elle passe au vingt-neuvième kilomètre.’Amo’às est au nord de Lafrûn, à un kilomètre. Ce sont encore trente kilomètres, vingt milles ou cent soixante stades.

2° Les confins. — Le village d" Amo’às est bâti sur un monticule s’appuyant à l’ouest contre le Râs-’el-’Aqed, dont l’altitude, d’après la grande carte de la Société anglaise d’exploration, 1880, fol. xvii, est de 1 250 pieds (405 mètres). En face, au nord du Râs-’el-’Aqed, se dresse le Râs-el-’Abed, avec une hauteur de 1258 pieds (407 mètres 59). Au sud, de l’autre côté de la vallée de Lafrûn, qui termine l’ouadi’Aly, se remarque une colline haute de 1180 pieds (382 mètres 32), avec une ruine au sommet, appelée Khirbet Khâtouléh ; à côté, à l’ouest, le Râs-Khâter, et au sud-ouest le sommet appelé Ma’aser-el-Khamîs, s’élevant encore de 1 026 pieds (331 mètres 32)> au-dessus du niveau de la mer. Ces sommets (ras), aux formes rocailleuses et abruptes, sont les derniers contreforts des montagnes de la Judée. Avec le monticule d" Amo’às, dont l’altitude n’est plus que de 738 pieds (238 mètres 75), commence cette suite de collines ou de mamelons aux contours plus doux, couverts d’oliviers ou de moissons, qui vont se développant vers l’ouest jusqu’à la mer. Leur altitude s’abaisse insensiblement de 200 et quelques mètres à 65. C’est la région connue dans la Bible sous le nom de Èefèlâh ou « plaine des Philistins ». Le regard l’embrasse tout entière de la hauteur où est assis’Amo’às. À un kilomètre au midi, sur sa colline de 260 pieds, qui commande la vallée, avec ses antiques assises taillées en bossage, les ruines de ses murailles à tours et de son

château, servant aujourd’hui d’étable, le village de Lafroùn parait vouloir justifier l’opinion des palestinologues assez nombreux qui la considèrent comme l’Emmaûs primitive ou son acropole. Cf. Guérin, Guillemot, Van Kasteren, loc. cit. À ses pieds on distingue la voie antique d’Éleuthéropolis (Beit-Djébrîn), dessinant son sillon bordé de pierres grosses et brutes à travers les collines du sud, derrière lesquelles se dissimulent, non loin de cette voie, les villages d"ESoua’, probablement l’ancien Eslhaol ; ’AïnSemés, jadis Bethsémés, et Sara’, dont le nom

et des Septante. Au nord-ouest, par delà la colline où nous voyons le village de Qûbâb, nous apercevons de blancs minarets émergeant d’un lac de verdure : c’est Ramlèh la musulmane, au milieu de ses jardins d’arbres de toutes sortes. Elle est à treize kilomètres et demi ou neuf milles romains d"Amo’âs et à quarante-trois de Jérusalem. L’œil cherche en vain Lydda ; elle est à quatre kilomètres, environ trois milles, au nord de Bamlêh, mais disparaît derrière les collines qui s’étendent au nord de Qûbâb. Le chemin direct d"Amo’âs à Lydda le tra .ItZMf. SELEBÏW"

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685. — Carte d’Emmaûs-Nicopolis et ses environs. D’après M. L. HeldeC

demeure le même, tous trois célèbres au temps des Juges d’Israël. À l’ouest, au sommet d’une colline allongée qui cache le village d"Abû-èu&éh, une ferme moderne, ayant de loin l’apparence d’un castel antique, marque la place d’une cité judaïque, dont les fouilles ont découvert les ruines ; Tell-Gézer est le nom de la colline. Une inscription bilingue, hébraïque et grecque, gravée sur un rocher, pour marquer la « limite [sabbatique] de Gazera, et découverte par M. Clermont-Ganneau, atteste que ces ruines sont bien celles de la Gazer ou Gézeron biblique. Elles se trouvent à six kilomètres (quatre milles), ainsi que le dit Eusèbe, à 0°9’au nord d"Amo’âs, dans la position exacte que lui donne la carte de Mâdaba. Au delà du Tell-Gézer, dans la direction de l’ouest, deux Ilots de verdure indiquent les sites d"Aqer =’Accaron des Philistins et de Yabné = Yamnia ou Yabnah ; un troisième, plus au sud, désigne Esdûd = Xiol de la Yulgate

verse et mesure quinze kilomètres ou dix milles ; c’est peut-être celui que suivit le pèlerin de Bordeaux. À huit kilomètres d’'Amo’âs, ce chemin atteint le village d’'Annàbèh, très probablement le Bata-Annabà de la carte de Mâdaba. Au nord, sur la première colline qui borde l’ouadi Selmdn, à trois kilomètres d"Amo’às, sont les ruines de Selbit = Selbin, hébreu : Èa’alàbin, ville de Dan, Jos., xix, 42 ; Médieh = Meditha de la carte de Mâdaba, l’ancienne Modin, patrie des Machabées, située sept kilomètres plus au nord dans le même massif de collines, ne se laisse pas voir, non plus que Gimzo, sa voisine, jadis visitée des pèlerins juifs qui se rendaient d’Emmaiis à Lydda. A’Amo’âs, environnée par Selbît au nord, Yàlô = Aïalon à l’est, ’ESua’= Esthaol vers le sud-est, Sara’et Min-Sémés^Bêt-SéméS au sud, nous nous trouvons nécessairement en plein territoire de Dan. Cf. Jos., xix, 40-42.

1743

EMMAUS

1744

3° Les ruines. —’Amo’âs (fig. 556) est aujourd’hui un village de près de cinq cents habitants, tous musulmans. Formé de maisons bâties avec de grossiers matériaux, il ne diffère point par son aspect des villages les plus chétifs du pays. Ça et là cependant le visiteur peut remarquer, dans les murs des habitations, des pierres taillées avec soin, de grand et bel appareil ; elles ont été recueillies dans les décombres qui couvrent le plateau et les pentes de la colline sur laquelle s’élève le village. Partout la pioche rencontre des pierres régulièrement travaillées, de soixante à quatre-vingts centimètres de largeur ou même plus grandes, dispersées sur le sol, des fûts de colonnes, des chapiteaux de marbre, et des arasements de constructions

l’enceinte, existant encore sur une hauteur de trois à quatre mètres, d’une église aux dimensions plus restreintes, embrassant la largeur de la grande nef de la basilique primitive et vingt et un mètres de sa longueur, non compris l’abside. Au fond d’un parvis se rattachant à l’église, au nord, et dont le pavement de marbre subsiste en partie, un petit édicule servait de baptistère. La cuve, creusée en forme de croix, demeure à sa place. Elle était alimentée par les eaux conservées dans une petite piscine préparée non loin, à côté de laquelle se trouve un sépulcre vide, de forme judaïque, entièrement taillé dans le roc. Divers autres tombeaux, également creusés dans le rocher de la montagne, se voient au chevet

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556. — Àmoas. D’après nne photographie do If. L. Hcldet.

spacieuses. Des citernes nombreuses sont remplies de débris. Naguère les paysans ont découvert les restes d’un établissement de bains romains. Des inscriptions grecques, latines et hébraïques, en caractères samaritains, ont été recueillies ; plusieurs ont été publiées yarlaRevuebiblique, 1893, p. 114-H6 ; 1894, p. 253-256 ; 1896, .p. 433-434 ; 1897, p. 131-132. Le pourtour des ruines mesure plus de deux kilomètres ; le village actuel en occupe à peine la sixième partie ; le reste de l’espace est recouvert de plantations de figuiers, de grenadiers et de cactus. Un ancien capitaine français du génie, M. J.-B. Guillemot, croit avoir reconnu les traces d’un mur d’enceinte. À cinq cents pas au sud de ces ruines se voient, au pied de la montagne, les restes d’une basilique romaine. Les trois absides, tournées vers l’orient, sont debout ; l’une a encore sa voûte. Leurs assises sont en blocs magnifiques, dont plusieurs ont de trois à quatre mètres de longueur. Les nefs ont disparu ; mais les fouilles exécutées par le capitaine Guillemot en ont découvert les arasements. L’église avait quarante mètres de longueur et vingtdeux et demi de largeur, dans œuvre. Les matériaux des murs ruinés forment

de l’église. Plusieurs renfermaient, lorsqu’on les découvrit, en ces dernières années, de ces ossuaires à forme de petits sarcophages, si communs dans les tombeaux judaïques pratiqués vers le commencement de l’ère chrétienne. Sur les dernières pentes de la montagne, dont le flanc entaillé a fait place à la basilique, sont dispersées de nombreuses pierres travaillées par la main de l’homme ; on y rencontre encore des arasements d’habitations, et aux alentours des pressoirs à huile et à vin : ce sont des témoins de l’existence en ce lieu d’un village sans doute contemporain des tombeaux dont nous venons de parler. 4° Les eaux. — Sur le trivium formé devant l’église par la jonction des trois voies antiques d’Éleuthéropolis, de Gazer et de Jérusalem par Cariathiarim, aboutit un canal dont le tracé contourne Latroûn et vient se perdre, après trois mille sept cents mètres de circuit, non loin de la voie de Jérusalem, au pied du Ràs-’el-’Aqed, au sud. La source qui l’alimentait a disparu. L’exécution de ce canal pourrait paraître étrange, si l’histoire n’en insinuait pas les motifs. À deux cent cinquante pas, en effet, de l’église et au sud du village sont deux grands puits d’eau

vive intarissables, d’une très grande abondance, distants de cinquante pas l’un de l’autre. Vers la fin de l’été, lorsque les eaux font défaut presque partout, les bergers viennent encore de toutes parts y abreuver leurs nombreux troupeaux de chèvres, de moutons, de bœufs et de vaches. A peu de distance au-dessous, les habitants montrent un troisième puits comblé ; ils l’appellent Bîr-’e(-Tà’ûn, « le puits de la peste, » parce que de ce puits, disent-ils, est une fois sortie la peste pour ravager le pays. Au nord, deux sources limpides sortent des deux côtés du vallon qui passe sous les ruines de la ville, et réunissent leurs eaux pour former un ruisseau qui va se perdre assez loin dans la campagne. L’une d’elles est appelée’Aïn-’eltfammâm, « la source des bains, » peut-être parce qu’elle alimentait jadis ceux de la ville. Un canal passait tout à côté, semblant dédaigner ses eaux pour aller en prendre d’autres plus à l’est. Étaient-ce celles de 1’'Aïn-’el-’Aqed, qui sont abondantes, au pied du sommet du même nom, à un kilomètre de l"Aïn-’el-Hammam, ou celles d’une quatrième source aujourd’hui desséchée ? Ce canal, qui se perd, ne nous conduit plus à son origine. À cinq cents pas au sud de l’église, un marais où s’élèvent toute l’année de grandes herbes révèle l’existence, en cet endroit, d’une ou plusieurs sources ensevelies sous les terres entraînées des collines voisines. Un peu plus au midi, deux norias, dont l’une construite sur une ancienne fontaine, versent tout le long du jour des torrents d’eau, avec lesquels les Trappistes établis au bas de la colline de Latroùn arrosent leur vaste jardin de légumes et leurs plantations de bananiers et autres arbres fruitiers. Vers l’est, le Bir-’el-Ifélû, le Bîr-’el-Qasab et le Bîr-’Ayûb s’échelonnent à partir de Latrùn le long de la route moderne, à trois ou quatre cents pas de distance l’un de l’autre, pour offrir aux passants et aux innombrables caravanes de chameaux venant de la plaine des Philistins le secours de leurs eaux. Quoique, au témoignage de l’histoire et au dire des habitants du pays, plusieurs sources aient disparu, ’Amo’âs ne demeure pas moins dans tout le territoire de l’ancienne Judée, auquel on pourrait joindre celui de la Samarie, une localité unique pour le nombre de ses fontaines et pour l’abondance des eaux.

V. Histoire. — Si les conjectures de Reland et du major Conder étaient fondées, l’histoire d’Emmaûs commencerait vers l’époque de l’Exode ou dès la conquête de la terre de Chanaan par les Hébreux ; l’histoire certaine de cette ville ne remonte pas au delà du temps des Machabées. Le premier fait qui la révèle est le brillant triomphe de Judas et de ses frères contre l’armée grécosyrienne, remporté sur son territoire. Après les défaites successives des généraux Apollonius et Séron, Lysias, administrateur du royaume de Syrie au nom c’Antiochus IV Épiphane, avait envoyé en Judée les généraux Ptolémée, Nicanor et Gorgias, avec une armée de quarante mille hommes, pour en finir avec les Juifs et leur religion. Ils étaient venus camper à Emmaûs, dans la plaine. Prenant cinq mille hommes avec lui, Gorgias s’était avancé dans les montagnes, où il espérait surprendre les Juifs. Judas, leur chef, prévenu, se leva avec la petite troupe de trois mille hommes mal équipés qu’il avait avec lui, et vint, pour attaquer l’armée gréco-syrienne, se placer au sud d’Emmaûs. Le matin, il s’avança dans la plaine en face du camp ennemi. Les Syriens, voyant les Juifs arriver, sortirent du camp pour soutenir la lutte ; ils ne purent résister à l’ardeur des hommes de Judas ; ils s’enfuirent du côté de la plaine, dans la direction de Gazer, de l’Idumée ou du sud, de Jamnia et d’Azot. Trois mille hommes tombèrent sous les coups des Juifs, qui s’étaient mis à la poursuite des fuyards. Au moment où Judas regagnait Emmaiis, Gorgias apparaissait sur la montagne voisine, revenant déçu de son expédition. Voyant leur armée en fuite, leur camp incendié et Judas avec les siens, dans la plaine, prêts au combat, les soldats de Gorgias ne songèrent qu’à s’échapper à travers la plaine. Les Juifs recueillirent les dépouilles et

éclatèrent en hymnes de louanges, bénissant le Seigneur de ce qu’avait été opéré magnifiquement le salut d’Israël en ce jour (166-165 avant J.-C). I Mach., m-rv, 25. — Quelques années plus tard, pendant la lutte contre Jonathas Machabée, le général syrien Bacchide occupa Emmaûs, la fortifia et y mit une garnison. Josèphe, Ani. jud., XIII, i, 3. Elle était l’une des villes les plus florissantes de la’Judée, en l’an 43, quand Cassius, dont les Juifs ne pouvaient assouvir la cupidité, la réduisit en servitude. Josèphe, Ani. jud., XIV, xi, "2. Hérode, se préparant à conquérir le royaume que lui avaient donné les Romains, vint s’établir à Emmaûs ; il y fut rejoint par Mâcheras, envoyé à son secours par Ventidius (38 avant J.-C). Josèphe, Ant. jud., XIV, xv, 7 ; Bell, jud., i, xvi, 6. L’année qui suivit la mort de ce prince (4 de J.-C), et tandis qu’Archélaûs était à Rome pour réclamer la couronne de son père, le chef de bande Athrong, profitant des troubles de la Judée, attaqua près d’Emmaûs un convoi romain de ravitaillement, enveloppa la cohorte qui l’accompagnait, tua le centurion Arius, et avec lui quarante de ses meilleurs soldats. Les habitants d’Emmaûs, craignant des représailles de la part des Romains, abandonnèrent la ville. Lorsque Varus arriva pour venger ses compatriotes, il dut se contenter de livrer la ville aux flammes. Ant. jud., XV11, x, 7, 9 ; Bell, jud., II, iv, 3. On a pensé que le nom de Latrùn ou El-’Atrûn est le nom d’Athrong, attaché par le souvenir populaire à la forteresse d’Emmaûs. J.-B. Guillemot, EmmaûSr Nicopolis, p. 12. S’il faut accepter les témoignages des Pères, échos de la tradition locale chrétienne, Emmaûs n’aurait pas tardé à voir revenir ses habitants et à se transformer en une modeste bourgade (xwftri). Cléophas y avait sa demeure. Le jour même de la résurrection, elle fut honorée de la présence du Sauveur, reconnu par ses disciples à la fraction du pain. Trois ou quatre années plus tard, Cléophas aurait été mis à mort, dans sa maison même, par les Juifs persécuteurs, et aurait été enseveli dans l’endroit. Cf. Acta Sanctorum Rolland., 25 sept., édit. Palmé, t. vii, p. 4-5. — L’histoire de la Judée suppose le relèvement d’Emmaûs vers cette époque : cette localité est comptée, en effet, parmi les dix ou onze toparchies du pays. Josèphe, Bell, jud., III, iii, 5 ; Pline, H. N., v, 14. Lorsque les Juifs tentèrent de secouer le joug de Rome, la toparchie d’Emmaûs fut administrée, avec les toparchies de Lydda, Joppé et Tamna, par Jean l’Essénien. Bell, jud., II, xx, 4. Au commencement de la guerre, Vespasien, après avoir soumis Antipatris, Lydda et Jamnia, vint à Emmaûs pour occuper les passages qui conduisent à la métropole ; il y établit un camp retranché, qu’il confia à la garde de la cinquième légion, et alla de là soumettre les régions du sud. Il revint à Emmaûs avant de marcher contre la Samarie. Bell, jud., IV.vni, 1. Deux inscriptions latines, découvertes à’Amo’âs, sont les épitaphes de deux légionnaires de la cinquième. Voir Revue biblique, 1897, p. 131. L’emplacement du camp romain d’Emmaûs, parfaitement reconnaissable, sur une colline attachée à Latrùn, à moins de cinq minutes nordouest, peut être un argument pour appuyer l’opinion que Latrùn n’était pas distinct d’Emmaûs. Après la guerre, Emmaûs ne cessa point d’être occupée par les Romains, et c’est alors, selon Sozomène, qu’elle reçut le nom de Nicopolis, « en souvenir du grand triomphe qu’ils venaient de rempoiier. » Cette appellation de « ville de la victoire », d’après Eusèbe et saint Jérôme, lui aurait été attribuée seulement en 223. Jules Africain, alors préfet d’Emmaûs, fut député à Rome près de l’empereur, pour solliciter le rétablissement d’Emmaûs, sans doute en tant que ville forte. Il y fut autorisé par Marcus Aurelius Antoninus [Élagabal ]. Les ruines indiquent la position delà ville nouvelle, distincte de Latrùn et de la bourgade judaïque, sur la colline située non loin, où est le village actuel d’'Araou’âs. Le nom de Nicopolis fut alors du moins officiellement reconnu et appliqué à là ville nouvelle. Cf. Eusèbe, C/ironic, Patr. lai., t. xxvii, col. 641 ; S. Jérôme, De viris

illustribus, lxiii, t. xxiii, p. 675 ; Chronique pascale, t. xcii, col. 657 ; Anastase, t. cviii, col. 1200. Jules Africain était chrétien, et il fut, prétendent quelques-uns, le premier évêque d’Emmaûs. Hébed Jesu, Calai, libr. Chaldœorum, 15, et Catena Corderiana, In Joa., cités par Fabricius, Patr. gr., t. x, col. 42-43. Cf. Le Quien, Oriens christianus, in-f°, Paris, 1740, t. iii, p. 594. Faut-il lui attribuer la construction de la basilique et du baptistère ? Leurs ruines peuvent se réclamer de cette époque, mais aucun document écrit ne les lui attribue. — Tandis que la persécution sévissait ailleurs, on ne voit pas que Nicopolis ait été troublée dans la pratique paisible du christianisme. On connaît quatre évéques de Nicopolis, après l’Africain : Longinus, qui souscrivit, en 325, les actes du concile de Nicée ; Rufus, ceux du deuxième concile général de Constantinople, en 381, et Zénobius, dont le nom se trouve au bas du décret synodal de Jérusalem, porté contre Anthime, Sévère et d’autres hérétiques, en 536. L’évêque Jules, que l’on aurait confondu à tort, selon Le Quien, avec Jules Africain, mourut sur le siège de Nicopolis, en 913. Ibid., Les pèlerinages durent fleurir à Nicopolis dès le m" siècle. Peut-être est-ce à l’occasion du sien qu’Origène fit connaissance avec Jules Africain et entra avec lui en relation épistolaire. On disait que le Seigneur, après sa résurrection, était venu avec Cléophas jusqu’au carrefour de trois routes qui est devant la ville, et que là il avait feint de vouloir aller plus loin. Sur ce carrefour était une fontaine, et l’on ajoutait que le Sauveur, passant un jour, [pendant le temps de ses courses évangéliques, ] à Emmaûs avec ses disciples, s’était écarté de la route pour aller laver ses pieds à la source, dont les eaux à partir de ce moment avaient contracté la vertu de guérir les maladies. Sozomène, H. E., v, 21, t. lxvii, col. 1281. L’afiluence de pèlerins que ces souvenirs devaient attirer ne pouvait plaire à l’empereur Julien ; il fit obstruer la source en la recouvrant de terre. Théophane, Chronogr., t. cviii, col. 160, et Nicéphore Callixte, H. E., x, 31, t. cxlvi, col. 536. Cet acte d’impiété n’étouffa pas la dévotion des fidèles. Vingt ans après la mort de l’Apostat, sainte Paule romaine, avec sainte Eustochium sa fille et probablement saint Jérôme, s’arrêtait à Nicopolis, « près de laquelle le Seigneur, reconnu à la fraction du pain, avait consacré la maison de Cléophas en église. » S. Jérôme, EpUtola ad Eustochium, t. xxii, col. 883. Les relations du prêtre Virgilius (vers 500) et de Théodosius l’archidiacre (vers 530) témoignent que les pèlerins ne négligeaient pas la visite de Nicopolis. L’année 614, les Perses envahirent la Terre Sainte. La ville sainte, les églises et les monastères furent saccagés et brûlés ; la basilique d’Emmaûs dut subir le sort des autres sanctuaires. Vingt-trois ans après (637), la Palestine passait sous la domination des Arabes. La troisième année de la conquête, la 18* de l’hégire, la peste éclatait à’Amo’âs et faisait fuir tous ses habitants, « à cause des puits, » disent les anciens écrivains arabes El-Moqaddassi et Yàqoùt, cités par Van Easteren, ’Amou’âs, p. 414, 415. Saint Willibald, disciple de saint Boniface et depuis évéque d’Eichstadt, voulut aussi, selon le récit d’un de ses anciens historiens, pendant son pèlerinage (723-726), vénérer à Emmaûs la maison de Cléophas changée’en église et boire à la source miraculeuse. Vita, dans les Acta sanctorum, édit. Palmé, juillet (7), t. ii, p. 515. L’église d’alors devait être l’église amoindrie qui remplaça la basilique du ni" siècle. Le Comniemoratorium de Casis Dei ou Catalogue des monuments religieux de la Terre Sainte, adressé à Charlemagne vers l’an 803, ne la mentionne plus. Le souvenir d’Emmaûs n’était cependant pas éteint. Le moine franc Bernard, dit le Sage, évoque son nom sur son chemin de Ramléh à Jérusalem, en 870. Itinerarium, 10, t. jcxxi, col. 571. Le moine hiérosolymitain Épiphane, t. cxx, col. 264, rappelle, vers la même époque, son nom et la tradition évangélique qui s’y rattache.’Amo’às était de venu, pendant cette période de la domination arabe, une des belles et grandes bourgades de l’islam. Moqadassi, Yaqoùt et d’autres, dans’El-Keniset-’el-kâtûlikîéh, Beyrouth, 1889, p. 414, 415, 416. La dernière station des croisés avant de monter à Jérusalem pour en faire le siège, fut au « castel d’Emmaûs ». L’armée y fut conduite par le guide sarrasin, qui avait indiqué là « des puits et des fontaines d’eau courante », où les soldats de la croix pourraient étancher leur soif. C’était le 15 juin 1099. Ils y trouvèrent « non seulement une grande abondance d’eau, mais du fourrage pour les chevaux et grande provision de vivre ». Albert d’Aix, liv. v, 23, dans Bongars, Gesta Dei per Francos, in-f>, Hanau, 1611, p. 273 ; Guillaume de Tyr, liv. vii, ibid., p. 743. D’après ces récits, l’Emmaûs où campèrent les croisés semble identique à l’Emmaûs du livre des Machabées, à’Amou’âs. Lés Francs ne paraissent pas s’en être occupés dans la suite ; ils n’ont laissé aucune trace de leur passage ni sur les ruines de l’église ni dans celles de la ville. Si le nom d’Emmaûs se rencontre dans les chartes et les relations des pèlerins des xii « et xm « siècles, il est parfois difficile de se rendre compte s’il se rapporte à la localité dont nous parlons. À partir du xiv » siècle, les pèlerins de l’Occident en oublient le chemin, et c’est â peine si quelque drogman l’indique de loin aux voyageurs montant de Ramléh à Jérusalem. Un vague souvenir rappelle encore le nom des Machabées, mais pour donner le change, et l’église aurait été élevée sur le tombeau des sept frères, martyrisés près de l’endroit. Lâtrùn, à cause de son analogie avec le nom latin latro, est devenu le Château du bon Larron. Cf. Sebast. Paoli, Codice diplomatico dei sacro militare ordine Gerosolymitano, n 0J xx, xxi, xuv, in-f », Lucques, 1733, t. i, p. 21, 22, 45 ; Boniface Stephani (1562), De perenni cultù T. S., Venise, 1875, p. 99 ; Quaresmius, Elucidatio Terne Sanctee, lib. vi, peregr. v, cap. i-iii, in-f", Venise, 1639, t.ii, p. 718-721, et la plupart des relations du xvi c siècle à nos jours. — En 1889, une noble Française, M" 8 de SaintCriq d’Artigaux, fit l’acquisition des ruines de l’église et de l’emplacement du village judaïque, pour les soustraire à la profanation. Les Trappistes sont venus, en 1890, s’établir sur les pentes ouest de la colline de Lâtrùn et y fonder un prieuré.

L. Heidet.

2. EMMAÛS (’Eppaoû ;  ; Codex Bezæ Cantabr. : OùXaji(i « oû{ et Oulanvmaus ; Codex ital. Vercell. : Ammaus ; version syriaque : ’Amma’us ; un codex syriaque du mont Sinaï : ’Ammu’as ; version arabe : ’Ammu’âs et’Amma’us), bourgade de la Judée où le Sauveur, le jour même de sa résurrection, vint avec Cléophas et un autre disciple, qui le reconnurent à la fraction du pain. Luc, xxiv, 13-35.

Les Pères de l’Église et les anciens commentateurs n’ont jamais distingué cette localité de la ville d’Emmaûs dont il est parlé I Mach., iii, 40, etc. Les pèlerins et les géographes des siècles passés ne connaissent également qu’un seul Emmaûs, quoique depuis le xme siècle ils lui attribuent ordinairement une position autre que les anciens. Le célèbre palestinologue Adrien Reland est le premier qui ait distingué l’Emmaûs dont parle saint Luc de l’Emmaûs des Machabées. Il donne deux raisons de cette distinction. 1° L’Emmaûs des Machabées, d’après les témoignages unanimes, authentiques et formels de la Bible et de l’histoire, était située où finissent les montagnes de la Judée et où commence la plaine des Philistins, à la distance de dix-huit milles romains au moins ou cent quarante-quatre stades de Jérusalem ; l’Emmaûs de saint Luc, au contraire, d’après le témoignage de l’évangéliste lui-même, était à « soixante stades » seulement de la ville sainte ou sept milles et demi, donc au cœur même des monts de Judée. — 2° L’Emmaûs des Machabées était une ville, k6U ; , qui fut appelée dans la suite Nicopolis, tandis que l’Emmaûs de saint Luc était un simple village, nwjiT). Il s’agit doue, dans les deux passages, de deux Emmaûs

différents. PaUestina, in-4°, Utrecht, 1714, 1. 1, p. 426-430. Les commentateurs et les géographes contemporains se sont divisés : les uns adoptent la conclusion de Reland et estiment authentique le nombre de « soixante stades », pour la distance de Jérusalem à Emmaûs ; les autres s’en rapportent au témoignage de l’antiquité et défendent la distance de « cent soixante stades », que portent plusieurs manuscrits de l’Évangile selon saint Luc, ignorés de Reland.

Les arguments pour et contre se fondent sur trois chefs : 1° sur le texte ou le nombre lui-même ; 2° sur le contexte ou l’ensemble des récits de saint Luc et des autres évangélistes ; 3° sur la tradition locale ou l’histoire. Mous les résumerons aussi fidèlement que possible, commençant par les arguments en faveur de la distinction, que suivront les arguments contradictoires, et nous laisserons le lecteur apprécier la valeur des uns et des autres. La lettre À désignera les premiers, et la lettre B les seconds.

I. Le texte ou le chiffre de saint Luc. — 1° Les documents. — A). Selon Tischendorf, Novum Testamentum grsecum, editio octava critica major, in-8°, Leipzig, 1872, p. 724, les manuscrits et les versions ayant y>rxivca, « soixante, » sont les suivants : « A, B, D, K 2, L, N 1, X, T, A, A, une 8, al, pler, itP’° r, vg (exe fu), sah, cop, syr 811, et p (certe apudWhitae excedd plurib), arm"", aeth (sed milliaria pro axaS.) ; c’est-à-dire : 1. Manuscrits grecs :

A, le codex Alexandrin, au Musée Britannique, du Ve siècle ;

B, le codex du Vatican, du iv « siècle ; D, le codex greclatin de Bèze, à la bibliothèque de l’université de Cambridge du vie siècle ; K 2, le codex de Chypre, à la Bibliothèque Nationale de Paris, du ix 8 siècle, mais où « soixante » est une correction de seconde main ; L, le codex 62 de la Bibliothèque Nationale de Paris, du-vm 8 siècle ; N 2, un codex du VIe siècle dont la partie de saint Luc est à Vienne, où la leçon « soixante » est une correction de deuxième main ; X, un codex de la bibliothèque de Munich, de la fin du IXe siècle ou du x 8 ; T, un codex de la bibliothèque Bodléienne d’Oxford, du ixe ou du x 8 siècle ; A, un codex grec-latin interlinéaire de Saint-Gall, de la fin du IX 8 siècle ; A, un autre codex de la bibliothèque Bodléienne, à Oxford, du ix 8 siècle. Tous ces manuscrits sont en caractères onciaux. De plus, les huit autres onciaux E, F, G, ii, M, S, U, V, dont le premier est du vin » siècle, les autres du ix° ou du x 8, et la plupart des manuscrits écrits en caractères cursifs. — 2. Les versions ayant « soixante » sont : l’Italique, dans la plupart des manuscrits ; laVulgate, excepté le manuscrit de Fulda ; la version sahidique, la copte, la syriaque de Cureton et la syriaque philoxénienne, du moins dans l’édition deWhite, d’après la plupart des manuscrits ; quelques manuscrits de la version arménienne et l’éthiopienne, dans laquelle on lit « milles » pour « stades ». Il faut ajouter la version Peschito.

B).Les manuscrits ayant ÉxiTt>vêÇiQxovTo, « cent soixante. » sont, d’après le même critique (ibid) : « w, I, K*, N*, n, 158, 175-9, 223% 237*, 240*, g 1, fu, syn ? (ut codi « >), vel pt (ut codd œ' et b " rt> ; item apud Barhebrseum), syrir arm (sed variant codd unus CL) ; » c’est-à-dire : 1. Manuscrits grecs : ii, le codex sinaïtique, aujourd’hui à Pétersbourg, du iv 8 siècle, « le plus ancien de tous les manuscrits ; » I, un codex palimpseste de la Bibliothèque impériale de Pétersbourg, du v « siècle ; K*, le codex de Chypre, à Paris, où la leçon « cent soixante » est du premier scribe ; N% un codex de Vienne, du vi » siècle, où elle est également du premier scribe ; II, un codex de la Bibliothèque de Pétersbourg, du ix » siècle. Ces manuscrits sont onciaux. Le nombre 158 désigne un manuscrit cursif du Vatican, du xi 8 siècle ; 175, on autre du Vatican, du x* ou du xi 8 siècle, a la leçon à la marge ; 223*, un manuscrit de la Bibliothèque impériale devienne, du x a siècle, où la leçon est de la main du premier copiste ; 237*, manuscrit de Moscou, du x* siècle, provenant du mont Athos,

a la leçon écrite de la première main ; 240*, manuscrit de l’université de Messine, du x 8 siècle, de même. — 2. Les manuscrits des versions portant « cent soixante » sont, pour l’Italique ou ancienne latine : g 1, manuscrit de Saint-Germain, aujourd’hui à la Bibliothèque Nationale de Paris (lat. 11553), du vme siècle ; le manuscrit de Fulda, qui semble le plus ancien de la Vulgate ; le manuscrit de la version syriaque héracléenne de Barsaliba ; les manuscrits de la philoxénienne d’Assemani et de la bibliothèque Barberini, en marge ; de même dans Barhebncus ; les manuscrits de la version syriaque hiérosolymitaine ; la version arménienne, dont quelques manuscrits cependant varient : l’un d’eux a CL. Cf. Gregory, Prolegomena Novum Testanientum de Tischendorꝟ. 3 in-8°, Leipzig, 1884-1891, p. 345-408, etc. Il faut ajouter, d’après Wordsworth, trois manuscrits de la Vulgate. Un manuscrit arabe, provenant du Caire, aujourd’hui au couvent copte de Jérusalem, a « cent soixante » en marge, « d’après les manuscrits grecs et syriaques. »

2° Les conclusions. — A). L’évidence diplomatique, d’après le R. P. Lagrange, est en faveur de la leçon « soixante » stades. Les grands onciaux B, D, A, représentent un texte neutre, le texte dit occidental et le texte byzantin, sous une forme très ancienne. Quelque reproche que l’on puisse faire à chacun de ces manuscrits en particulier, ils représentent certainement des recensions complètement indépendantes ; leur accord est pleinement décisif. L’immense majorité des autres est avec eux. Toutes les versions antérieures à la fin du rv 8 siècle, versions latines, coptes (bohaïrique et sahidique), syriennes (Peschito et Cureton), sont d’accord sur « soixante ». Les manuscrits ayant « cent soixante » portent la marque d’une tradition locale et d’une recension savante. L’étroite parenté de I et de N a été constatée, et I a été rapporté du couvent de Sahit-Saba, près de Jérusalem. K et n forment une autre paire ; ils ont conservé des formes rares semblables. L’influence de Tite de Bosra, un disciple d’Origène, parait s’être exercée parmi les cursifs par les Catense. Les versions syriaques héracléenne et hiérosolymitaine, le Sinaïtique lui-même, ont eu des affinités incontestables avec la bibliothèque de Césarée, c’est-à-dire avec Eusèbe et Origène. La version arménienne est une traduction savante, fréquemment d’accord avec Origène. Le Codex Fuldensis de la Vulgate ne peut garantir que telle était la traduction de saint Jérôme, et il porte la trace d’une main savante. La tradition ancienne des manuscrits, la tradition universelle, la tradition inconsciente et sincère, sont en faveur de « soixante ». La leçon « cent soixante » est une leçon critique inspirée par l’autorité d’un maître, très probablement Origène, influencé lui-même par une tradition locale née d’une confusion et de la disparition du véritable Emmaûs. Origène, la critique textuelle et la tradition topographique, dans la Revue biblique, 1896, p. 87-92 ; cꝟ. 1895, p. 501-524.

B). Après avoir recensé les documents et les témoignages en faveur de la leçon « cent soixante », Tischen* dorf, dont la compétence critique n’est pas à établir, conclut, au contraire, Novum Testamentum, t. i, p. 725 : « Les choses étant ainsi, il n’est pas douteux que l’écriture éxâ-rov Uïjxovto ne soit d’une insigne autorité, à cause de sa suprême antiquité dans le monde chrétien. » L’existence de la leçon « cent soixante » est constatée dès le m 8 siècle. Les scholies des cursifs du x 8 siècle et du xi 8, désignés dans les listes par les n M 34 et 194, attestent que cette leçon est la meilleure, parce qu’  « ainsi portent les manuscrits les plus exacts, dont la vérité est confirmée par Origène ». Ibid., p. 724. Origène est le témoin de la leçon et ne peut être accusé d’en être l’auteur. (Voir plus loin.) Le codex du Vatican, le premier témoin de la leçon « soixante », et l’unique pour le texte grec au iv 8 siècle, est postérieur au Codex Sinaiticus. Le manuscrit de l’Italique de Verceil est pour toutes les versions le seul témoin du iv* siècle pouvant être cité avec le Vati

cattus. Le manuscrit syriaque de Cureton, les manuscrits de l’Italique du ve au vie siècle, de la Vulgate du VIIe au VIIIe, de la Peschito du VIe au IXe, des versions égyptiennes, dont les plus anciennes, pour le passage de saint Luc, sont du xiie siècle, du XVe ou du xviie seulement pour la sahidique, et du xviie pour l’éthiopienne, ne peuvent être appelés, alors qu’ils n’existaient pas, comme témoins de l’état de ces versions au IVe siècle ni garantir que telle était la leçon primitive. Le codex du Sinaï et la leçon « cent soixante » ont avec eux Tite de Bosra, vers 360, cité par la Chaîne d’Oxford ( Tischendorf, p. 731) ; Kusèbe de Césarée, lorsqu’il indique Emmaûs à Nicopolis, qui est à cent soixante stades, et saint Jérôme de même à dix reprises différentes. Si le Fuldensis, le plus ancien manuscrit de la Vulgate ayant le passage en question, ne garantit pas que telle était la traduction de ce Père, appuyé de ses témoignages en faveur de Nicopolis et des trois manuscrits cités dans l’édition de Wordsworth, il est du moins le motif d’une forte présomption pour la leçon « cent soixante ». Au Ve siècle, l’Alexandrin, le syriaque de Cureton et trois ou quatre manuscrits de l’Italique sont favorables à « soixante ». Le Pétropolitain est pour « cent soixante » ; il a avec lui les témoignages externes d’Hésychius, t. xciii, col. 1444, florissant, selon Théophane, en 412 ; de Sozomène et de Virgilius, cités Emmaûs 1. C’est le témoignage de l’Église de Jérusalem. Ce témoignage confirme la leçon « cent soixante » pour la version syriaque hiérosolymitaine, très probablement en usage au ive siècle, certainement avant 600. Gregory, Prolegomena, p. 812-813. Les "formes aramaïques de la langue de cette version, voisine de la langue des Targums, permettent de croire qu’elle est, sinon la traduction primitive de l’Eglise judaïcochrétienne du I er siècle, du moins une recension de cette version. La plus haute ancienneté témoigne évidemment, soit par les documents, soit par les témoignages des Pères, en faveur de « cent soixante ». — Cette leçon réclame aussi pour elle l’universalité à cette époque. L’origine des manuscrits N, I, N, est indiquée par les « formes alexandrines qui les caractérisent ». La note marginale du manuscrit arabe de Jérusalem atteste que la leçon a été fort répandue en Egypte. Le codex K constate sa présence en Chypre, et le texte de Constantinople qu’il reproduit, le lieu d’où la leçon est venue en cette île. Le texte n est également le Constantinopolitain, semblable à celui des onciaux E, F, G, II, K, M, S, U, V, T, À ; le manuscrit est sorti de l’Asie Mineure et de Smyrne. Les cursifs du mont Athos confirment sa diffusion à travers l’empire de Byzance. Avec Tite de Bosra, cité par la Chaîne d’Oxford, on trouve la leçon dans le Hauran et dans l’Arabie. Les manuscrits de Bar-Saliba, les notes des Codex Assemani et Barberini, la montrent couvrant par la version philoxénienne ou héracléenne la Syrie supérieure et la Mésopotamie ; par la version arménienne du Ve siècle, elle occupe les régions orientales les plus extrêmes du monde chrétien. Le Fuldensis, les autres manuscrits de la Vulgate et le Sangertnanensis témoignent qu’elle n’était pas ignorée en Occident. La leçon « cent soixante » était donc partout. — « Cent soixante » semble la seule leçon connue des Pères ; ils désignent Emmaûs à cette distance sans paraître se douter de l’existence de la leçon ce soixante ». Si elle eût été en leur connaissance et commune, la contradiction était trop évidente, et le silence de saint Jérôme serait bien étrange ; celui d’Hésychius, dans l’exposé de ses Difficultés, lac. cit., serait plus inexplicable encore. Ils avaient cependant entre les mains des manuscrits nombreux du texte et des versions, et la lecture reçue dans les diverses Églises ne pouvait leur être cachée. En ce même temps, le Vaticanus devait être exécuté en Egypte et probablement à Alexandrie, d’une des mains qui avaient achevé le Sinaïtique. C’est de ià que sort le codex Alexandrin, comme son nom l’indique ; c’est en Egypte qu’a été trouvé le codex syriaque de Cureton. Le manuscrit de l’Italique

de Verceil existait en Occident. Il n’était peut-être pas l’unique où la variante se rencontrait. Les relations étaient fréquentes entre l’Italie et Alexandrie, et l’influence réciproque se manifeste dans une multitude de formes communes entre les manuscrits alexandrins et occidentaux. « Les formes dites alexandrines abondent plus dans le manuscrit D que dans les autres, » et la version latine qui l’accompagne indique qu’il fut fait par l’ordre d’une personne du monde latin et pour son usage privé. Le même motif, la destination particulière de ces manuscrits, doit sans doute expliquer pourquoi eux et leur leçon sont ignorés des Pères. « Cent soixante » apparaît ainsi, aux IVe et Ve siècles, comme la seule leçon généralement connue et officiellement adoptée pour Tusage des Églises, tandis que « soixante » semble une leçon égarée dans quatre ou cinq manuscrits réservés à l’usage de quelques personnes privées, probablement d’origine occidentale. Dans les siècles suivants, il est vrai, la situation respective des deux leçons se modifie. « Soixante, » qui à travers tout le VIe siècle, parmi les manuscrits grecs, ne trouve encore pour lui que le seul oncial D (la correction de N est postérieure), commence, aux VIIe et vin » siècles, à compter plusieurs évangéliaires, qui se multiplient au IXe et au Xe, et auxquels s’ajoutent, à partir du Xe, un grand nombre de manuscrits cursifs des Évangiles et plusieurs onciaux. Les versions italique et syriaque peschilo avaient commencé à lui donner la prépondérance numérique dès le vie siècle. Au xme, « soixante » est généralement adopté ; seules les notes marginales protestent que d’innombrables manuscrits, les meilleurs et les plus anciens, ont « cent soixante ». Aux XVe et xvi 6 siècles, cette leçon est seule admise partout, excepté dans l’Église arménienne, qui jusqu’aujourd’hui, chez les catholiques comme chez les grégoriens, continue à recevoir seulement la leçon « cent soixante ». Voir Gregory, Prolegomena, p. 359, 360, 369, 809, etc. La majorité des documents plus récents est pour « soixante », mais la majorité ancienne et primitive des témoins est pour « cent soixante » ; quoique numériquement moins considérable, la deuxième offre incontestablement une garantie plus grande. — Toutefois le plus grand nombre n’est pas le critérium suprême pour reconnaître l’authenticité d’une leçon ou d’un chiffre. Il peut varier et se tourner vers l’erreur. Plus d’un chiffre, dans la Bible, a pour lui le grand nombre, quelquefois l’unanimité absolue des manuscrits, des versions, des recensions, des éditions, qui est généralement reconnu de tous pour erroné. La valeur intrinsèque des témoignages et l’autorité des témoins doivent être appréciées plus que le nombre. À ce titre, la leçon « cent soixante » se recommande indubitablement plus que « soixante ». Le premier et principal témoin en faveur de « soixante », le Vaticanus, se distingue par des erreurs et des omissions très nombreuses de mots entiers, et doit être tenu pour suspect d’avoir omis parmi eux le chiffre « cent ». Elles ne sont pas rares dans le codex de Bèze, D, et, ce qui est plus grave, son auteur ne s’est point fait scrupule de modifier son texte en y introduisant de fréquentes interpolations. L’Alexandrin, soupçonné par Hort et Ceriani d’avoir été exécuté à Rome, à cause des influences occidentales qu’il accuse avoir subies, ne doit pas être moins suspect que la version Italique. Cette version, après le Vaticanus le plus ancien et le plus important témoin pour « soixante », pullule d’erreurs les plus grossières en tout genre. Saint Jérôme l’atteste, Epist. xxru, ad Marcellam, t. xxii, col. 431-432, et ad Damasum, t. xxix, col. 525-530, et son témoignage est trop confirmé par l’examen du codex de Verceil, le plus ancien document de cette version, et par les autres. C’est ce qui obligea le pape Damase à recourir au saint docteur pour lui demander une recension plus exacte. Tels sont les plus anciens et les plus solides fondements de la leçon « soixante ». Les manuscrits ayant « cent soixante », sans être exempts d’erreurs, sont certainement plus exacts. Le

Sinaiticm en renferme beaucoup moins que le Vaticanus i et a très peu d’omissions. Le Cyprius K se fait remarquer | € parmi la plupart des manuscrits ayant le texte constantinopolitain pour être de bonne note ». Le texte de II est j ordinairement meilleur que celui de la plupart de ses congénères E, F, G, ii, K, M, S, U, V, V, A. Le texte du i Sinaïtique est en grande partie formé de leçons appelées par Westcott et Hort pré- syriaques, pour leur caractère spécial d’antiquité ; les mêmes leçons se retrouvent nombreuses dans le Cyprius. Cf. Gregory, p. 300, 346, 357, 359, 370, 380. La version arménienne, exécutée après de grandes recherches, pour trouver le texte le plus pur et le plus sûr, a pu être appelée par La Croze « la reine des versions », comme rendant la mieux le texte grec. Gregory, p. 912. Les traducteurs de la version hiérosolymitaine et ses copistes se trouvaient dans la meilleure situation pour éviter toute erreur sur une leçon topographique. Les témoins externes, copistes ou docteurs, qui nous transmettent ou recommandent la leçon « cent soixante », Victor de Capoue, Tite de Bosra, saint Jérôme, Eusèbe, Hésychius, les auteurs des Chaînes, Origène, étaient certes des hommes éclairés, instruits, sincères, attentifs ; ils avaient entre les mains, plus que nous, des documents leur permettant de fonder un jugement sur ; ils sont les plus compétents pour nous garantir l’authenticité d’une leçon. Si nous trouvons « cent soixante » dans les exemplaires d’Origène et des anciens, c’est que les manuscrits ! qu’ils copiaient avaient déjà « cent » et que sa lecture était’la plus sûre, nous devons en être moralement certains. Plus tard, quand déjà le courant pour « soixante » prévalait, les rédacteurs des Chaînes et les copistes favorables j à « cent soixante » ne se sont pas permis d’introduire « cent », qu’ils croyaient la leçon vraie ; ils l’ont indiquée , en marge. Les critiques pour « soixante » ont été moins

; scrupuleux : sur les dix manuscrits ayant < cent soixante » 

que nous possédons, cinq, K, N et trois minuscules, ont été corrigés, non par une note marginale, mais par la suppression de « cent » dans le texte même. Il ne serait pas téméraire de les accuser d’avoir supprimé volontairement « cent » dans les copies exécutées par leurs soins. Si « cent » n’est pas une interpolation volontaire d’Origène ou de quelque autre critique, rien dans le contexte ne pouvait amener « cent » sous la main du copiste, et ce chiffre ne peut être une addition voulue. Il en est autrement de « soixante ». Si le scribe du Vaticanus, qui a pu lire « cent soixante » dans le Sinaitieus, auquel il avait mis précédemment la main, n’a pas supprimé volontairement « cent », il a dû l’omettre inconsciemment, comme tant d’autres mots. La même omission pouvait se reproduire spontanément sur divers points. Une fois la variante introduite, « soixante » avait toutes les chances, excepté en Palestine, de se faire recevoir partout, « cent soixante stades » devant paraître à tous, comme elle le paraît à la plupart de nos critiques modernes, une distance impossible. La leçon « soixante » paraît une leçon ou fondée sur cette fausse critique ou née d’une omission inconsciente, à Rome ou à Alexandrie ; et « cent soixante » la leçon offrant les meilleurs gages, ou même les seuls, de vérité et d’authenticité. Ce sont les conclusions qu’une critique impartiale peut tirer de l’examen des documents et du .texte. Pour accuser Origène, il faut le faire à priori. Les manuscrits protestent, et l’histoire avec eux.

3° L’autorité de la Vulgate. — A). Saint Jérôme, en adoptant la leçon « soixante » pour la Vulgate, s’est dédoublé et a déclaré comme critique quel est son sentiment sur la valeur des deux leçons ; le concile de Trente, en déclarant, session IV, Decretum de éditions et usu Sacrorum Librorum, la Vulgate de saint Jérôme « authentique » dans son ensemble et toutes ses parties, a approuvé la leçon, et elle doit être reçue pour authentique par toute l’Église.

B). Que la leçon « soixante » soit la leçon adoptée par saint Jérôme, c’est fort douteux ; il est plus probable

qu’elle est une des erreurs des scribes postérieurs, influencés probablement par la leçon de l’ancienne Latine. Serait-elle certainement de saint Jérôme, il ne résulte pas de là qu’il la reconnaît pour la leçon authentique ni même pour la plus sûre. Il affirme lui-même n’avoir corrigé dans l’ancienne version que le sens des phrases corrompues, et avoir laissé subsister tout le reste. Prsef. ad Damasum, t. xxix, col. 528. Le concile de Trente n’a pas entendu consacrer comme authentique chaque leçon de la Vulgate, ni les inexactitudes que son auteur lui-même reconnaît avoir laissées, encore moins celles des copistes postérieurs ; il n’a pas voulu non plus préférer la Vulgate aux textes originaux ; il a approuvé l’œuvre de saint Jérôme en général et a décrété que l’Église latine en ferait usage plutôt que des autres versions de cette langue, rien de plus. C’est ce que professent les éditeurs de l’édition Vaticane de 1592, dans la Prsefatio ad lectorem ; c’est ce que reconnaissent les commentateurs, les théologiens et les historiens ecclésiastiques. Voir F. Vigouroux, Manuel biblique, 10e édit., Paris, 1897, 1. 1, p. 223-234, et les auteurs qui traitent de la question. Chacune des deux leçons demeure, après le décret du concile comme avant, avec la valeur que lui confèrent et les documents et l’histoire.

II. Le contexte de saint Luc et des autres évangélistes. — A). Les récits comparés des Évangiles, Luc, xxiv, 13-36 ; Joa., xx, 19 ; Marc, xvi, 12, ne comportent pas, disent un grand nombre de commentateurs et de palestinologues, le nombre de « cent soixante stades » pour la distance d’Emmaùs à Jérusalem, et demandent « soixante ». — 1° Il n’est pas possible que Cléophas et son compagnon aient pu parcourir en une même journée deux fois un chemin d’environ sept heures, c’est-à-dire près de quatorze heures. Tischendorf, Novum Testant., p. 725. — 2° D’après saint Jean, « comme c’était le soir du même jour, le premier de la semaine, et que les portes où étaient les disciples étaient closes par crainte des Juifs, Jésus vint et, se tenant au milieu d’eux, leur dit : La paix soit avec vous ! » Cette apparition eut lieu après le retour des disciples d’Emmaùs. Cf. Luc, xxiv, 30. Les Juifs comptaient leurs jours d’un coucher du soleil à l’autre. Le soir du même jour ne peut s’entendre que du moment assez court qui avoisine le coucher du soleil, qui a lieu vers six heures au temps de la Pàque. Les disciples étaient arrivés à Emmaùs m sur le soir », quand m le jour inclinait déjà vers son déclin ». Luc, xxiv, 29. Si les disciples avaient dû parcourir cent soixante stades, ils n’auraient

! pu être de retour pour le moment déterminé par saint

Jean. — 3° Les disciples étaient sortis, selon saint Marc, pour une promenade à la campagne, rapmaToOo-iv ètpavEpw 9r|… ?iopeiJoijivoi ; eï ; àyp° v ; un chemin de cent soixante stades n’est plus une promenade, mais une marche forcée.

— 4° Si cette distance était exacte, elle ne pourrait convenir qu’à Emmaùs, qui fut plus tard appelé Nicopolis ; mais cet Emmaùs était une ville et non un village, comme était celui où se rendait Cléophas. Même une ville détruite conserve le nom de ville. Il faut donc reconnaître que le chiffre « cent » a été ajouté à tort. Emmaùs doit être cherché à soixante stades.

B). Non seulement, disent d’autres commentateurs, la distance de cent soixante stades n’est pas en contradiction avec les récits évangéliques, elle est même la seule qui s’adapte à la narration de saint Luc, qui la réclame.

— 1° Le double trajet de deux fois cent soixante stades ou soixante kilomètres pour l’aller et le retour en un jour est assurément une marche qui n’est pas ordinaire. Elle demeurera une marche forcée même en supposant, ce qui est probable, que le nombre cent soixante est un nombre rond et que les disciples ont pris des raccourcis réduisant la route à cinquante-trois ou cinquante - quatre kilomètres. Des vieillards, des personnes faibles, sont incapables de faire pareilles étapes ; mais un homme de force ordinaire peut le tenter dans un cas urgent et extraordinaire. Il n’est pas de semaine que des habitants

<T’Amo’às n’accomplissent ce voyage pour leurs affaires. Douze ou treize heures, y compris un arrêt de deux ou trois heures, leur suffisent. Cléophas, si le disciple dont parle saint Luc est le même que l’histoire dit être le père de saint Siméon, successeur de saint Jacques sur le siège épiscopal de Jérusalem, était d’une famille de constitution robuste. Siméon mourut vers l’an 106, à l’âge de cent vingt ans, crucifié par les Romains, comme parent du Christ. Ses bourreaux étaient étonnés de la force de ce vieillard pour soutenir son supplice. Le second disciple d’Emmaùs, appelé Simon par Origène, Comment, in Joa., i, 7, t. xiv, col. 33 ; 10, col. 40, est peut-être Siméon lui-même, ces noms en hébreu ne sont pas différents. À l’époque de la résurrection du Seigneur, Siméon avait environ quarante-deux ans, Cléophas son père pouvait avoir de soixante-cinq à soixante-dix ans ; c’était le milieu de sa carrière, le temps de la vigueur. Reposés, fortifiés par le pain consacré par le Maître, remplis d’allégresse, brûlant de porter l’heureuse nouvelle à leurs frères, il ne pouvait y avoir ni distance ni fatigue pour eux. Pour hâter leur retour, rien ne les empêchait de recourir à quelqu’une des montures alors en usage en Palestine ; mais elles n’étaient point nécessaires. — 2° Saint Jean, comme saint Luc, leur laisse la latitude de temps convenable pour franchir les vingt-six ou vingt-sept kilomètres qui, en ligne directe, séparent’Amo’às de Jérusalem. « Il n’y a pas lieu de s’étonner, dit Hésychius, qu’ils soient allés en un même jour de Jérusalem à Emmaùs et d’Emmaùs à Jérusalem. Il n’est pas écrit que c’était le soir, éunépoc, quand ils arrivèrent près du.bourg d’Emmaùs ; mais « vers le soir », 7tpb « è<rrclp « v, « alors que le jour penchait vers son déclin », xéxXixev ijôv] -< ïijiipa ; de sorte qu’il était à peu près huit ou neuf heures (deux ou trois heures après midi), parce qu’à partir de la septième heure (une heure après midi), le soleil penche déjà vers le soir. Les disciples durent, dans l’excès de leur joie, plutôt courir que marcher^ pour annoncer le miracle, et durent arriver très tard ; car notre usage est d’appeler è^t’a, « soir, » le temps jusqu’à une heure très avancée de la nuit, tô [ « ixP 1 itoXXoO trti vuxto ; nocpKTei’vopievav (jipo ; . » Collectio difficultatum et solutionum, lvii, t. xciii, col. 1444-1445. L’interprétation d’Hésychius est confirmée par un passage des Juges, xix, 8-14. On y constate la coutume chez les Juifs d’appeler « déclin du jour » tout le temps à partir du midi, et « soir, heure très avancée », les premières heures de l’après-midi.’Eù> ; xXïvai rf|v Yipiépav, « jusqu’à ce que le jour incline, » Vulgate : donec succrescat dies, y désigne clairement l’heure de midi ; xéxXixev (al. j) ! tMvy)<tev, « baisse » ) » j|iépa cîç Éaitépav, dies ad occasum declivior sit et propinquor ad vesperam, s’y rapporte à environ deux heures après midi (et selon Josèphe, Ant. jud., V, II, 8, s à peu près à midi, » ra pi Seîàtjv) ; t, r, [iépa icpo6e6f, xei (al. xcxXîÎxok) ufôSpoc, dies mutabatur in noctem, veut dire « une heure avant le coucher du soleil ». Les distances de Bethléhem à Jérusalem et à Gabaa, ainsi que les circonstances du voyage, ne laissent pas de doute à cet égard. Les disciples, arrivés à Emmaùs à deux ou trois heures au plus tard, étaient prêts à repartir à quatre heures, et à neuf ou dix heures au plus pouvaient être de retour au cénacle. La remarque de saint Luc : « ils trouvèrent les onze réunis, » semble indiquer que l’heure d’être réunis était passée. — L’expression de saint Jean : oûo7|{ o+îa ; tt) ifiiispoc Ixetvr) ttj (iià oo66aTùv, cum sero esset die Mo una sabbatorum, doit signifier : c le soir, » ou : « la nuit qui suivait ce jour, le premier de la semaine, » et ne détermine nullement l’heure du coucher du soleil. Saint Jérôme, interprétant les paroles de saint Matthieu, xxviii, 1, dit : id est SERO, non incipiente nocle, sedjam prefunda et ex magna parte transacta ; c’est-à-dire : « le soir, non au commencement de la nuit, mais alors qu’elle était en grande partie passée. » Epist. cxx, ad Hedibiam, c. iv, t. xxii, col. 987-988. Saint Matthieu était Juif, parlait à des Juifs, et entend très certainement la

nuit qui suit le samedi..Saint Jean, écrivant pour les gentils, n’avait pas d’ailleurs à observer la distinction des jours d’après l’Usage de la synagogue. — Le récit de saint Luc, comparé aux récits des autres évangélistes. suppose la distance de cent soixante stades. Cléophas et son compagnon étaient du nombre des disciples résidant au cénacle avec les Apôtres. Ils étaient là quand les saintes femmes étaient venues annoncer l’apparition des anges, et ils s’y trouvaient encore quand Pierre et Jean étaient retournés du sépulcre. Madeleine était demeurée au tombeau après le départ de Pierre et Jean ; c’est alors que le Seigneur lui était apparu. Joa., xx, 10-18. Elle s’était empressée de courir l’annoncer aux disciples. Cléophas et son compagnon étaient alors partis, car ils ignoraient cette apparition. Cf. Luc, xxiv, 10-Il et 22-24. Ces démarches demandèrent au plus une heure et demie ; à sept et demie, peut - être plus tôt, Madeleine devait être de retour pour annoncer la résurrection. Selon saint Marc, xvi, 9, l’apparition à Madeleine fut la première et dut avoir lieu de grand matin. Cf. S. Jérôme, Epist. cxx, t. xxii, col. 987. Les deux disciples étaient donc partis de fort bonne heure, entre sept heures ou sept et demie au plus tard. Il est inadmissible que ces hommes craintifs, qui s’étaient enfuis et cachés les jours précédents, qui le soir fermeront solidement leur porte « par crainte des Juifs », en apprenant la disparition du corps de Jésus, soient allés, avant leur départ de la ville, s’exposer à la rencontre des magistrats ou des prêtres. Ils marchaient « tristes » et fuyaient les hommes. Luc, xxiv, 17. Arrivés à Emmaùs certainement après midi, ils avaient marché environ six heures. Le Seigneur avait eu le loisir de leur expliquer en marchant, « en commençant par Moïse, tous les prophètes et toutes les Écritures qui le concernaient. » Luc, xxiv, 27. Six heures, c’est exactement le temps nécessaire pour parcourir cent soixante stades ou trente kilomètres. — 3° Il ne s’agissait guère en ces circonstances, à la suite des événements des jours précédents, d’une promenade de fête ; il s’agissait de s’éloigner de la ville, et ; iypov. — 4° Emmaùs n’était plus une ville ; ruiné et devenu un simple village, il ne pouvait être appelé autrement, non plus que ne l’est’Amo’às aujourd’hui, que ne l’est Jéricho et tant d’autres localités de la Palestine.

III. La tradition locale et l’histoire. — A). Un grand nombre de palestinologues se sont d’abord adressés à la tradition onomastique, lui demandant si elle ne connaissait pas un Emmaùs à soixante stades de Jérusalem. — 1° Mrs Finn et quelques autres ont pensé que la localité appelée aujourd’hui Ortâs (voir fig. 557) devait avoir été appelée Emmaùs. Ortâs est un petit village de cent cinquante habitants, situé dans la vallée où sont les célèbres vasques dites de Salomon, à l’est de ces dernières. Une source assez abondante jaillit près du village, au milieu de ruines ancienes désignées sous le nom d’El-ffammâm ; c’est la reproduction arabe de l’hébreu Jlammi ou Jf animât, dont Emmaùs serait la transcription grecque. Ortâs est à douze kilomètres = soixante stades au sud de Jérusalem. Voir les indications bibliographiques à la fin. — 2° M. Conder propose de reconnaître Emmaùs dans Khamséh ou Ifamasgh, ruine d’un petit village près de laquelle on voit une source abondante et les restes assez bien conservés d’une église de l’époque des croisés. Ce khirbet est à dix-sept ou dix-huit kilomètres sud-ouest de Jérusalem, ou de quatre-vingt-cinq à quatre-vingt-dix stades. — 3° Sepp, Reischl, Gaspari, Weiss, Schûrer et plusieurs autres apportent divers arguments pour prouver que Qolouniéh est Emmaùs. Les Talmuds, Sukkah, iv, 5, attestent que < Kolonia, c’est Môsa’». C’est probablement la localité appelée par Josèphe, Bell, jud., VII, vi, 6, Emmaùs, située à « soixante stades » de Jérusalem, comme dit saint Luc. Des manuscrits disent « trente stades ». « Trente » est à peu près la distance exacte. « Soixante, » chiffre rond, a pu être rattaché par l’évangéliste à quelqu’une des loca

lités plus éloignées, qui sont comme les faubourgs de Qolouniéh, à Beit-Mizzéh, dont le nom est identique à Mosa’ou Ha-Môsa (Vulgate : Amosa), ou à Qastal, le château de Qolouniéh, ou encore à quelque autre endroit plus éloigné. — 4° M. Mauss croit que la tradition historique désigne Qariat-’el-’Anéb, le village ^’Abû-Ghoi, situé à environ treize kilomètres à l’ouest de Jérusalem. Les croisés l’ont reçu pour Emmaûs. Tous les documents des xir 3 et XIII’siècles indiquent Emmaûs à trois lieues à l’occident de Jérusalem et à deux de la patrie de saint Jean-Baptiste. H y avait là une fontaine vénérée. « A.iij. liuz de lheru Démaus » à un quart de lieue vers le nord de la fontaine et de l’église de Saint-Jérémie : c’est le nom que les pèlerins donnaient, au xvii » siècle, à l’église d’Abou-Ghosch. Sa relation manuscrite est à la bibliothèque de la ville de Marseille. Ce pèlerin désigne sans doute le village de Beil-Naqûba’, dont il aura pris le nom, ainsi que plusieurs autres pèlerins, pour une corruption de Nicopolis, prononcé par eux Nicopol et Nicopo. Beit-Naqoùba* est à un kilomètre est d’Abou-Ghosch, à douze kilomètres ouest de Jérusalem, au nord de la route de Jaffa. — 6° Les relations d’autres pèlerins du xiv » siècle au xviie désignent

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567. — Sites divers attribua h l’EmmaOs de l’Évangile.

salem, dit une description de l’époque, par devers soleil Vespasien établit une colonie de huit cents vétérans, et couchant, avait une fontaine que l’on apelait la fontaine des Emauz. Le chastel des Emauz est de lez. On disait qu’à celé fontaine s’assit Nostre-Sire avec ses.ij. disciples, quant ils le connurent à la fraction du pain. » Pèlerinages français des xii’et xiw siècles, in-8°, Genève, 1882, p. 159. Cf. ibid., p. 47, 99, 104, 170, 186 ; Fretellus, Loca Sancla, t. clv, col. 1050 ; Jean de Vurzbourg, Descriptio T. S., ibid., col. 1079 ; Burkard, Descriptio T. S., 2e édit. Laurent, in-4° Leipzig, 1872, p. 77-84 ; Ricoldi, ibid., p. 113. Plusieurs autres donnent les mêmes renseignements. La source d’Abou-Ghosch, renfermée dans la crypte de l’église, est la confirmation authentique et indubitable de la tradition mentionnée par les documents. — 5° Le P. Borelly, dominicain (1668), signale les chasteau

les ruines de Beit-’Vlma’, situées à six kilomètres à l’ouest de Jérusalem et à un kilomètre environ en deçà de Qolouniéh et de Beit-Mizzéh. Ils auront pensé reconnaître dans ce nom celui d’Oulammaûs, donné à Emmaûs par le Codex Bezse, D. De nombreuses indications peu précises paraissent désigner encore divers autres endroits. — 7° D’après le Fr. Liévin de Hamme, Guide-indicateur de la Terre Sainte, 4e édit., 3 in- 12, Jérusalem, 1897, t. ii, p. 248, l’Emmaûs évangélique de la tradition c’est Qobeibéh ( fig, 558), petit village musulman de trois cents habitants, situé à douze kilomètres et demi (environ 60 stades) au nord-ouest de Jérusalem. Un grand nombre d’écrivains ont aujourd’hui accepté cette opinion, et Qobeibéh est, à ce titre, généralement visité par les pèlerins. Près du village, à l’ouest, se trouve un couvent des Franciscains, avec un hospice pour les pèlerins et une cha

pelle bâtis sur les raines d’un ancien monastère. Près du couvent, à l’est, se voient les ruines d’une belle église de l’époque des croisades, de trente mètres de longueur sur vingt-deux et demi de largeur. La nef de gauche enclavait les restes d’une construction plus ancienne, de dix-huit mètres vingtcinq centimètres de longueur sur neuf mètres de largeur. Des bâtiments accessoires dépendant du couvent primitif avoisinaient l’église ; ils n’ont pas été relevés. Selon les Pères Buselli et Domenichelli, 0. M., le nom de Qobeibéh serait une transformation du nom Nicopolis, donné constamment par les chrétiens anciens à Emmaiis. Les premiers témoins de cette tradition sont sainte Sylvie, citée, d’après le professeur Gamurrini, par

témoignent de la vénération des fidèles pour ce sanctuaire. A cette distance quel pourrait-il être, sinon Emmaûs ? et cette maison antique, précieusement conservée dans l’église, quelle serait-elle, sinon, comme l’attestent une multitude de pèlerins, la maison de Cléophas transformée en église dont parlent les anciens ?

B). Un grand nombre de palestinologues, dont les études seront indiquées plus loin, contestent que les traditions locales authentiques, onomastique et historique, aient jamais connu et indiqué d’autre Emmaûs que’Amo’âs. Toutes les indications précédentes sont, suivant eux, des identifications forcées, pour justifier la leçon « soixante stades » admise à priori. — 1° Les conjectures faites pour

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558. — Qobeibéh. D’après une photographie de M. L. Heidot.

Pierre Diacre, dans son Liber de Lotis Sanclis, édit. Gamurrini, in-4°, Rome, 1887, à la suite de S. Hilarii tractatusde mysteriis, p. 129, où Emmaiis est indiquée à soixante stades de Jérusalem. Le Vén. Bède, In Lucam Expositio, 1. vi, c. 24, t. xcii, col. 625, indiqne Emmaûs-Nicopolis à la même distance ; saint Jérôme, dans la Vu 1gate, et la plupart des Pères l’indiquent à la même distance, ainsi que la plupart des historiens postérieurs et les pèlerins. Le P. Francesco Soriano, 0. M., en 1562, cité par le P. Domenichelli (voir plus loin), atteste que les indigènes appellent l’Emmaus de la tradition Kubébé. Depuis ce temps d’innombrables relations relatent le même fait. Les R.R. PP. Franciscains, institués par le saintsiège gardiens des Lieux Saints, n’ont cessé de conduire les pèlerins vénérer le site d’Emmaûs à Qobeibéh. Leur mission et leur fidélité à la remplir ne permettent pas de croire qu’ils se sont trompés. Une source abondante jaillit à un kilomètre de l’église. Son nom, ’Aïn-’el-’Agéb, « la fontaine merveilleuse, » rappelle la fontaine miraculeuse dont parlent Sozoméne, saint Willibald et plusieurs historiens. L’église et le monastère

rattacher à Oitàs un nom ayant quelque rapport avec Emmaûs sont antihistoriques et sans fondement étymologique. La vallée d’Ortâs et les ruines peu importantes d’un bain annexé à quelque maison de plaisance ont jadis porté le nom de la ville de’Etâm, dont les ruines sont voisines (voir ÉTA.M). Cf. Josèphe, Ant. jud., VIII, vii, 3. Il n’y a jamaiseu d’eaux thermales dans l’endroit. Voir Emmaûs 1.

— 2° Khamséh est le nom de nombre arabe « cinq », et saint Luc n’a pu indiquer à soixante stades un endroit qui est à plus de quatre-vingt-dix. — 3° Beit-Mizzéh = Môsa’ou Ha-Mofâh en est à moins de quarante, comme Qastal. — 4° Qolouniéh, à trente et quelques stades seulement, et 5° Beit-’Oulma’, à moins encore. Le nom de Ha-Mosâh n’a guère qu’une ressemblance lointaine avec Emmaiis. Si c’est lui, comme plusieurs le croient, que Josèphe a transcrit par Emmaûs, c’est une transcription personnelle ; il est peu vraisemblable que saint Luc, qui a paru avant l’historien, ait précisément adopté cette transcription si peu régulière. Cet évangéliste conserve ordinairement aux noms de localités leur forme hébraïque : ’Afiûffa était la forme régulière, et elle existait déjà dans

la Bible des Septante. — 6° Si les auteurs sacrés eussent connu deux Emmaûs voisins l’un de l’autre dans une même province, ils les eussent distingués. L’étymologie de Qobeibéh et de Naqùba’, outre son peu de probabilité, est contredite par l’histoire, qui place certainement Nicopolis ailleurs. Les Pères et les historiens anciens connaissent un seul Ernmaùs. Les pèlerins se fussent ralliés autour d’un nom, à soixante stades, ayant quelque ressemblance avec Ernmaùs, s’il y en eût eu un. Gamur-Tini a attribué à sainte Sylvie une citation de Pierre Diacre, empruntée aux exemplaires de la Vulgate en cours au xil" siècle. Bède et tous les commentateurs que l’on peut nommer ont fait de même ; nul d’entre eux ne cite la tradition locale, que la plupart ne connaissent pas. "Le seul nom en Terre Sainte incontestablement identique à Ernmaùs, c’est’Amo’às. La localité qu’il désigne est la seule que les anciens et les indigènes aient indiquée pour l’Emmaùs de saint Luc, depuis le IVe siècle jusqu’au xue. Les documents sont clairs, formels et unanimes. Voir Emmaûs 1. Au XIIe siècle, les chrétiens de la Palestine ne connaissaient pas encore d’autre Ernmaùs, leurs évangéliaires en font foi. Plus tard, lorsque les pèlerins sont seuls avec les guides du pays, ils trouvent toujours Ernmaùs à l’extrémité de la plaine de Ramléh, près de Lafrùn ; mais ils le trouvent dans les montagnes, quand ils sont avec des guides occidentaux. Comparer le Voyage (anonyme) de la saincte cité de Hierusalem fait l’an 1480, édit. Schefer, in-8°, Paris, 1882, p. 68 et 98 ; Christ. Fùrrer von Haimendorf (15651567), Itinerarium JEgypti, Arabise, Palestine, Syrise, in-4°, Nuremberg, 1621, p. 50 et 88. Au xvii « siècle encore, le P. Michel Nau, S. J., venant de Ramléh à’Amu’às et visitant son église, constate que les « chrétiens du pays croient que c’est là Emails, et que cette église est le lieu où les deux disciples reçurent le Sauveur le jour de la résurrection » ; puis il cherche à persuader que c’est une erreur provenant de ce que Ernmaùs est traduit dans l’Évangile arabe par Amoas, nom de ce village, et que la distance de soixante stades, indiquée dans ce même Evangile, devrait les désabuser, s’ils savaient ce que c’est qu’un stade. Le voyage nouveau de la Terre Sainte, in-12, Paris, 1679, p. 45-46. Le raisonnement du P. Nau a dû être celui des croisés. En arrivant, ils acceptèrent simplement la tradition des chrétiens du pays ; les récits d’Albert d’Aix et de Guillaume de Tyr l’insinuent. Les relations de l’higoumène russe (1106) et de Phocas (1185) montrent que la tradition n’avait point changé. Après quelque temps, les clercs, ceux que l’abbé de Nogent Guibert, dans Bongars, p. 532, appelle scientiores curiosioresque locorum, et qui identifient Ramléh avec Ramoth de Galaad, lisant « soixante stades » dans les exemplaires de leur évangile et voyant’Amo’as à une distance beaucoup plus grande, rejetèrent celui-ci et voulurent trouver un Emmaûs à la distance correspondant à la seule leçon connue d’eux. Ne trouvant point de tradition ni de nom omophone, guidés seulement par le souvenir de la fontaine miraculeuse et des eaux d’Emmaùs, ils firent choix de Qariat, qui a une source abondante et dont la distauce n’est pas bien éloignée de soixante stades. Les croisés partis, le souvenir de leur Emmaûs disparut avec eux. Ceux qui vinrent ensuite durent chercher de nouveau. Les Occidentaux ne faisant que passer et se renouvelant sans cesse, chaque nouveau venu avait à recommencer. De là toutes les variations constatées dans les relations. Qobeibéh fut choisi aussi, comme aurait pu l’être toute localité répondant à peu près à la distance voulue. Son église et toutes les ruines qui l’entourent sont l’œuvre des chevaliers hospitaliers de Saint-Jean ; les signes des tâcherons que portent les pierres et la double croix dont est marquée une pierre sépulcrale le déclarent. La construction enclavée dans l’église est une chapelle de forme grecque, où se reconnaissent le sanctuaire, la place de l’autel et celle de l’iconostase. Cet oratoire rappelait-il quelque souvenir ? Les

BICT. DE LA BIBLE.

croisés paraissent l’avoir cru ; mais aucun document connu ne le dit, ni n’indique lequel parmi les nombreux souvenirs de la Terre Sainte il pouvait être. En tout cela on constate la préoccupation d’accommoder l’histoire à la leçon connue. — Il n’existe aucun motif de soupçonner la tradition d" Amo’às d’avoir été au principe une identification fondée sur la similitude du nom, après la disparition du véritable Emmaûs. Aucune tradition n’est affirmée plus catégoriquement comme telle. Lorsque saint Jérôme parle d’Emmaùs dans sa Lettre à Eustochium, c’est comme un lieu saint qu’il a vénéré avec sainte Paule et avec tous les chrétiens du pays. Peut-être tous se sont-ils laissé induire en erreur par Eusèbe, qui n’avait proposé d’abord qu’une conjecture. Ce n’est pas Eusèbe qui a désigné les lieux saints aux fidèles, lui les a pris d’eux. Lorsque, dans son Onomasticon, il les désigne comme tels, c’est que déjà le peuple y va prier. Il l’atteste lorsqu’il indique le lieu de l’agonie du Sauveur à Gethsémani, celui de son baptême à Béthabara, de la résidence de Job à Astaroth-Carnaïm, du puits de Jacob à Sichetn. Il ne le dit pas positivement au mot Emmaûs ; Sozomène s’en chargera dans son Histoire ecclésiastique, loc. cit. Peut-être a-t-il confondu à ce sujet, et le peuple avec lui, deux faits bien différents : le passage du Seigneur avec ses disciples à une des fontaines d’Emmaùs, et le fait de l’apparition à Cléophas le jour de la résurrection ? Les détails de la tradition, l’église construite devant et à distance de la ville, près du trivium, dans un endroit peu favorable, au milieu de tombeaux très probablement judaïques, où l’on montrait une maison que l’on disait celle de Cléophas, où il avait été mis à mort par les Juifs en haine du Christ, disent qu’il y avait là plus qu’un vague souvenir d’un passage du Sauveur. Ces détails sont attestés d’une manière un peu mystérieuse par saint Jérôme, par Virgilius, par Théodosius, par saint Adon et la plupart des martyrologes. L’église d’'Amo’às a-des caractères tout particuliers d’antiquité. Les hommes les plus compétents la tiennent pour antérieure aux constructions constantiniennes, et l’on ne voit pas qui aurait pu l’élever, sinon Jules Africain, lorsqu’il construisit Nicopolis. Il fallait donc que lui-même, pour la bâtir dans la situation où elle est, fût persuadé que là fut réellement le lieu où vint le Seigneur. Il ne pouvait y avoir alors d’autre Emmaûs connu pour celui de l’Évangile. S’il n’y en avait pas alors, au commencement du uie siècle, il n’y en avait jamais eu. Le passage de Jésus à Emmaûs, le jour de la résurrection, était assurément un fait mémorable entre tous ; la place que saint Luc lui fait dans son Évangile prouve qu’il était bien considéré comme tel. Gardé par Cléophas, un des principaux d’entre les disciples, par Siméon son fils, lui-même peut-être un des deux témoins et l’auteur du récit (le silence sur le nom du second disciple et la couleur hébraïque de la narration permettent de le conjecturer), comment le souvenir du lieu témoin de cet événement auraitil pu être effacé si vite, tandis que d’autres bien moins grands et bien plus loin du centre de l’Église primitive se sont conservés à travers les temps ? Parmi toutes les traditions de Terre Sainte, déjà elles-mêmes d’une nature à part entre toutes les traditions historiques locales pour la sécurité, la tradition d’Emmaùs a encore pour elle des gages particuliers de véracité et d’authenticité. Si cette tradition est authentique, elle est le témoignage des disciples témoins du fait et acteurs ; saint Luc n’a pu puiser son récit à une autre source ni le donner différent : il n’a pu désigner qu" Amo’às, et, s’il l’a eu en vue, il a écrit cent soixante stades et non soixante. Manuscrits, récits évangéliques et histoire s’accordent pour le proclamer. IV. Bibliographie. — A. Mrs. Finn, Emmaûs identified, dans Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, 1883, p. 53-64 ; Henderson, On the Site of Emmaûs, ibid., 1879, p. 105-107 ; Arch. Henderson et R. F. Hutchinson, Emmaûs, ibid., 1884, p. 243-248 ;

II. — 56

Conder, The Survey of Western Palestine, Memoirs, in-4°, Londres, 1883, t. iii, p. 36 ; Id., Quarterïy Statement, 1876, p. 172-175 ; Emmaus, ibid., 1881, p. 46 et 237-238 ; Mearns, The Site of Emmaus, ibid., 1885, p. 116-12-1 ; D r Sepp, Emmaus-Colonia, dans Jérusalem und dos heilige Land, in-8°, Schaffhouse. 1863, p. 52-57 ; Id., dans Neue hochwichtige Entdeckungen auf der zweiten Palàstitiafarht, in-8°, Munich, 1896, p. 228-244 ; Mauss, L’église de Saint-Jérémie à Abou-Gosch (Emmaïis de saint Luc et castellum de Yespasien), avec une étude sur le stade au temps de saint Luc et de Flavius Josèphe, in-8°, Paris, 1892, et dans la Revue acliéologique, même année ; Robinson, Biblical Researches in Palestine, in-8°, Boston. 1841, t. iii, p. 65-66 ; Tit. Tobler, Topographie von Jérusalem und seinen Umgebungen, in-8°, Berlin, 1854, t. ii, p. 538-545 ; N*, Notice historique sur la cité et le sanctuaire d’Emmaùs, à soixante stades nord-ouest de Jérusalem, in-8°, Paris, 1862 ; C. LqucianoJ, Quale sia l’Emmaus del Vangelo, in-8°, Borne, 1882 ; P. Rem. Buselli, 0. M., L’Emmaus dimostrato et difeso sessanto stadi distante di Gerusalemme, in-S°, Livourne, 1882 ; Id., L’Emmaus evangelico, 3 in-8°, Milan, 1885-1886 ; Id., Illustratione del Santuario d’Emmaùs, in-8°, Livourne, 1888 ; T. Domenichelli, L’Emmaus délia Palestina, in-8°, Livourne, 1889 ; Id., Appendice ail’Emmaus délia Palestina, in-8°, Prato, 1889 ; D r Zchokke, Das neutestamentliche Emmaus, in-12, Schaffhouse, 1865 ; D r Rùkkert, Amwas, was es ist und was es nicht ist, dans la revue Theologische Quartalschrift, Tubingue, 1892, p. 550-616 ; D r Belser, ZurEmmausfrage, ibid., 1896, p. 193-223 ; Fr. Liévin de Hamine, Emmaus (Qobeibéh), dans le Guide-indicateur de la Terre Sainte, in-12, Jérusalem, 1897, t. ii, p. 248-262 ; T. Domenichelli, VItimi discussioni intorno ail’Emmaus del Vangelo, in-8°, Florence, 1898.

B. Th. Dalfi, Emmaus -Nicopolis, dans Viaggio biblico in Oriente, in-8°, Turin, 1873, t. iii, p. 284-300 ; E. Z [accaria ], L’Emmaus evangélica et l’attuale villagio d’Ammuas, in-8°, Turin, 1883 ; V. Guérin, Amouas-Latroun, dans Description de la Palestine, Judée, in-4°, Paris, 1883, t. i, p. 293-313 ; El-Koubeibéh, ibid., t. i, p. 348-361, dans Description de la Galilée, 1. 1, p. 64-72 ; Kolouniéh, dans Description de la Judée, t. i, p. 257-262 ; A. Bassi, 0. M., Emmaus cilla délia Palestina, 2e édit., in-8°, Turin, 1888 ; M. J. Schiffers, Amwâs das Emmaus des lieil. Lucas, 160 Stadien von Jérusalem, in-12, Fribourg-en-Brisgau, 1890 ; Id., Die Emmausfrage und der context des lieil. Lucas, dans la revue Der Katholïk, Mayence, 1893, p. 337-349 et 398-407 ; Id., La question d’Emmaùs, dans la Revue biblique, 1893, p. 26-40 ; J.-B. Guillemot, Emmaus -Nicopolis, in-4°, Paris, 1886 ; J. Knabenbauer, dans Evangelium secundum Lucam, Duo discipuli in Emmaus, in-8°, Paris, 1890, p. 630-634.

L. Heidet.

EMMER. Hébreu : ’Immêr ; Septante : ’E^p^f. Nom d’un ou deux prêtres et d’une localité de Chaldée.

1. EMMER, 61s de Mosollamith, I Par., IV, 12, ou Mosollamoth, II Esdr., xi, 13, et chef d’une famille sacerdotale, qui occupait le seizième rang dans la distribution des prêtres en vingt-quatre classes par David. I Par., IX, 12 ; xxiv, 13. Ses descendants revinrent de Babylone avec Zorobabel au nombre de mille cinquante-deux.

I Esdr., ii, 37 ; II Ësdr., vii, 40. Un des membres de cette famille, nommé Sadoc, bâtit une partie des murs de Jérusalem, vis-à-vis de sa maison, sous Néhémie.

II Esdr., iii, 29. D’autres prêtres de la même famille, Hanani et Zébédia, renvoyèrent les femmes étrangères qu’ils avaient prises pendant la captivité. I Esdr., x, 20.

2. EMMER, père du prêtre Phassur, principal gardien du Temple et ennemi de Jérémie. Jer., xx, 1. « Fils d’Emmer » pourrait bien être pris ici dans le sens large

de « descendant », de sorte que cet Emmer ne serait pas différent du précédent.

3. EMMER (Septante : ’E(i|iïjp, I Esd., ii, 59 ; ’hji’ip, II Esd., vii, 61), localité inconnue de Chaldée d’où partirent, pour retourner à Jérusalem, avec la première caravane conduite par Zorobabel, un certain nombre de Juifs qui ne purent pas établir exactement leur généalogie. Ce nom, écrit Emmer, II Esd., vii, 61, se lit sous la forme Émer, I Esd., ii, 59. Voir Émer, col. 1759.

    1. ÉMONA##

ÉMONA (VILLAGE D) (hébreu : Kefar hâ’Ammônâi ; Septante : Codex Vaticanus, Keçsipà xoù Movei ; Codex Alexandrinus, Kaçupatiiiiv ; Vulgate : Villa Emana), lieu mentionné parmi les villes de Benjamin. Jos., xviii, 24. Cité entre Ophéra, généralement identifiée avec Taiyibéhj au nord-est de Béthel, et Ophni, peut-être Djifnéh, au nord du même point, il faisait partie du groupe septentrional des villes de la tribu. Mais il est resté inconnu. Quelques auteurs ont proposé de l’identifier avec Khirbet Kefr’Ana, à quatre ou cinq kilomètres au nord de Beitin. Cf. G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 42 ; Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881-1883, t. ii, p. 299. L’assimilation est douteuse, bien que la position soit conforme à l’énumération de Josué.Voir Benjamin, tribu et carte, t. i, col. 1589. — Le nom, qui signifie « village de l’Ammonite », se rattache peut-être à quelque invasion des Ammonites, comme celle qui est racontée Jud., x, 9.

A. Legendre.
    1. ÉMONDAGE##

ÉMONDAGE, opération par laquelle on coupe les branches inutiles d’une plante, pour augmenter sa vigueur et sa fécondité. La vigne a particulièrement besoin de cette opération ; autrement la sève se dépense inutilement à pousser du bois et des feuilles et n’a plus de force pour former les fruits et les conduire à maturité. Cf. Horace, Epod., ii, 9-12 ; Columelle, De re rust., IV, 24. — Notre-Seigneur fait allusion à l’émondage de la vigne lorsqu’il dit de son Père, qu’il représente sous l’image d’un vigneron : « Tout rameau qui porte du fruit, il l’émondera (xa8ai’ps’.)> afin qu’il porte plus de fruit. » Joa., XV, 2. Au point de vue moral, cet émondage des disciples porte tout d’abord sur leurs péchés et sur leurs vices, comme l’indique le verset suivant : « Déjà vous êtes purs (xa8apoî). » Il porte aussi sur les inutilités de la vie, dont débarrassent les persécutions, les épreuves, les souffrances de tout ordre. L’âme produit alors d’abondants fruits de patience et d’amour de Dieu. Luc, viii, 15 ; Hebr., xii, 11 ; Rom., v, 3. H. LeSêtre.

ÉMOR, père de Sichem, Jud., ix, 18. Voir Hémor.

    1. ÉMOUCHET##

ÉMOUCHET, nom que donnent les oiseliers tantôt à la femelle de la crécerelle, tantôt au mâle de l’épervier, et même aux autres oiseaux de proie qui ne dépassent pas la taille de ce dernier. Ce mot vient du baslatin muscelus, tiré lui-même de musca, et fait allusion aux mouchetures que l’on remarque sur le plumage de ces oiseaux. Voir Crécerelle, Êpervier.

H. Lesêtre.

EMPAN. Voir Palme 2, t. iv, col. 2058.

EMPEREURS romains mentionnés dans le Nouveau Testament. Voir César, col. 449.

EMPLÂTRE. Voir Figue, col. 2241.

    1. EMPRUNT##

EMPRUNT, action d’emprunter et objet prêté pour qu’on s’en serve durant un temps déterminé ou non, à la condition qu’on le rendra ensuite à son propriétaire.

— 1° Les emprunts ordinaires. — La loi mosaïque prévoit qu’on pourra emprunter, lâvâh, une bête de somme 1765

EMPRUNT — ËNAÏM

Î766

à son voisin. Si la bête est détériorée on périt en l’absence du propriétaire, l’emprunteur est tenu d’en rendre une autre. Exod., xxil, 14. — Le Seigneur promet aux Hébreux que, s’ils sont fidèles, ils pourront prêter aux autres sans avoir à emprunter. Deut., xxviii, 12. Emprunter constitue presque toujours une assez mauvaise opération. Prov., xxil, 7 ; Eccli., xxi, 9. Le méchant emprunte et ne rend pas. Ps. xxxvi, 21. Dans le désastre de la nation, l’emprunteur et le prêteur en seront réduits à la même extrémité. Is., xxiv, 2. Au retour de la captivité, les Juife parlent d’emprunter de l’argent pour payer les impôts. II Esdr., v, 4. Dans une parabole de l’Evangile, un père de famille recevant des hôtes assez tard emprunte trois pains à son voisin. Luc, xi, 5. — 2° L’emprunt des Hébreux aux Egyptiens avant leur départ de Gessen. — A la veille de la sortie d’Egypte, les femmes des Hébreux reçoivent l’ordre de demander aux Égyptiennes des vases d’or et d’argent et des vêtements. Ces objets sont accordés et les Hébreux les emportent avec eux dans le désert, dépouillant ainsi les Égyptiens. Exod., iii, 22 ; xi, 2 ; xii, 35, 36. Cet acte se justifie aisément par cette double considération, que Dieu, maître de toutes choses, peut transférer une propriété d’un peuple à un autre, et que, d’autre part, les Hébreux ne faisaient que récupérer par ce moyen le salaire des. rudes travaux accomplis au profit des Égyptiens. Cf. Guénée, Lettres de quelques Juifs, Paris, 1821, t. ii, p. 294-295. — Mais, semble-t-il à quelques-uns, il y a mauvaise foi à « emprunter » ainsi des objets que Ton se propose de ne pas rendre. À cette difficulté, on est en droit de répondre qu’en fait l’emprunt supposé n’existe pas. Le texte sacré emploie ici, non plus le verbe làvâh, « emprunter, » mais le verbe Sâ’al, « demander. » Il est vrai que, pour les trois passages de l’Exode, Gesenius-Rœdiger, Thésaurus linguse hebrmse, Leipzig, 1853, p. 1347, prête à Sâ’al le sens d’  « emprunter », alors que dans tous les autres passages de la Bible ce mot signifie soit « interroger », soit « demander ». Dans un seul cas, le participe Sâ’ûl peut avoir le sens de chose « empruntée ». IV Reg., vi, 5. Dans l’autre cas cité par Rœdiger, I Reg., i, 28, ce sens ne s’impose nullement. Toujours est-il que rien n’oblige à prendre sâ’al dans le sens d’  « emprunter », alors que partout il a celui de « demander ». Cf. F. von Hummelauer, In Exodum et Leviticum, Paris, 1897, p. 125-126. Les femmes des Hébreux demandèrent donc aux Égyptiennes les objets indiqués. Les Égyptiennes ont-elles considéré cette demande comme un emprunt ? Rien ne le prouve. Après la dixième plaie, nous voyons le pharaon appeler Moïse et Aaroïi en pleine nuit et leur dire : « Levez-vous et éloignez - vous de mon peuple, vous et les fils d’Israël ! » Exod., XII, 31. Le roi regardait donc le départ des Hébreux comme une délivrance. Chaque famille égyptienne partageait ce sentiment et devait être heureuse de se débarrasser d’hôtes devenus si terribles, en leur abandonnant ce qu’ils demandaient. Le texte sacré dit d’ailleurs que le Seigneur inclina les cœurs dans ce sens. Exod., xii, 36. Le texte ajoute que les Égyptiens yaS’ilûm ce qu’on leur demandait. Le verbe Sâ’al à l’hiphil signifie simplement « accorder » ce qu’on demande et non pas « prêter ». Cf. I Reg., i, 28, où Samuel n’est pas « prêté » au Seigneur, mais vraiment « donné ». Josèphe, Ant. jud., II, xiv, 6, dit qu’après la dixième plaie, les courtisans « persuadèrent au pharaon de laisser partir les Hébreux. II appela donc Moïse et ordonna leur départ, dans la pensée que, quand ils seraient éloignés du pays, l’Egypte serait délivrée des fléaux. Ils honorèrent ( It^kov) les Hébreux de présents, les uns pour qu’ils partissent plus vite, les autres à cause de leurs relations de voisinage ». On ne peut pas accuser ici Josèphe d’avoir cherché à atténuer une faute commise par ses ancêtres, puisque rien dans le texte n’autorise à parler d’emprunt ni de prêt. L’écrivain juif interprète donc bien la pensée de fauteur sacré. Il est de toute évidence d’ailleurs que les

Égyptiens ont prétendu faire de véritables cadeaux aux Hébreux. Ils savaient que ceux-ci ne reviendraient plus, et, en somme, ne demandaient qu’à être débarrassés d’eux, coûte que coûte. — Pour le prêt de l’argent, voir Prêt.

H. Lesêtre.

ÉNAC (hébreu : ’Ânâq ; Septante : ’Evdtx), géant, fils d’Arbé et père des Énacites. Jos., xv, 13. D’après Gesenius, Thésaurus, p. 1054, ’Anâq signifie « au long cou », géant. Ce personnage n’est nommé dans l’Écriture que comme ancêtre des Enacites. Voir Énacites.

    1. ÉNACITES##

ÉNACITES (hébreu : ’Ânâqim, de’ânaq, m cou ; » Septante : ’Evaxc’iI. ; Vulgate : Enacim), famille et tribu de géants. Deut., ii, 10-11. Voir Géants. Ils descendaient d’Arbé (voir t. i, col. 883) et habitaient le sud de la terre de Chanaan lorsque Abraham y arriva et lors de la conquête du pays par Josué. Hébron était une de leurs résidences principales, et on l’appelait du nom de leur ancêtre Qiryaf’Arba’(Vulgate : Cariatharbé, t. i, col. 884). Eux-mêmes sont appelés Benê-’Anâq (filii Enac), Num., xiii, 33 (Vulgate, 34) ; Benê-’Anâqîm (Vulgate : filii Enacim), Deut., i, 28 ; IX, 2 ; yelîdë Hâ-’Anâq, « descendants d’Énac, » Jos., xv, 14 (Vulgate : stirps Enac) ; Num., xiii, 22, 82 (Vulgate, 23, 29 : filii Enac) ; ’Anâqim (Vulgate : Enacim), Deut., ii, 10, 11, 21 ; Jos., xi, 21, 22 ; xiv, 12, 15. Les Enacim d’Hébron se subdivisaient en trois familles principales, celles d’Achiman, de Sisaï et de Tholmaï (voir ces mots). Num., xiii, 23 ; Jos., xv, 14 ; Jud., i, 20. — La haute stature et la force des Énacites avaient vivement impressionné les Israélites. Les espions que Moïse envoya du désert du Sinaï pour explorer la Terre Promise rapportèrent qu’ils avaient vu là des géants, parmi lesquels les fils d’Enac tenaient la première place ; « auprès d’eux, disaientils, ils n’étaient que comme des sauterelles. » Num., xiii, 33-34. La terreur qu’inspira ce récit fut cause de la révolte du peuple contre Moïse et du châtiment divin qui condamna Israël à errer dans le désert pendant quarante ans. Num., xiv, 1-35. Plus tard, néanmoins, Josué et Caleb réussirent à vaincre les Énacites. Ils les battirent à Hébron, à Dabir, à Anab et dans les montagnes de Juda, Jos., xi, 21 ; xv, 14 ; Jud., i, 20 ; ceux qui parvinrent à échapper aux coups des Israélites se réfugièrent sur le rivage de la mer Méditerranée, à Gaza, à Geth et à Azot, Jos., xi, 22, et depuis lors il n’est plus question d’eux dans l’Écriture. Ils durent se fondre avec les Philistins qui occupaient le pays. Quelques-uns ont pensé que le géant Goliath, originaire de Geth, était un de leurs descendants, cf. I Reg., xvii, 4 ; . de même que Jesbibénob, II Reg., xxi, 16, et d’autres Géthéens. II Reg., xxi, 18-22 ; I Par., xx, 4-7. F. Vigourocx.

    1. ÉNADAD##

ÉNADAD, père de Bavaï. II Esdr., irt, 28. Il est appelé ailleurs Hénadad, ce qui correspond mieux à l’orthographe hébraïque. Voir Hénadad.

    1. ÉNAIM##

ÉNAIM (hébreu : ’Ênaïm, « les deux sources ; » Septante : Codex Vaticanus, Maiavef ; Alexandrinus, ’Hvoei’ii), ville de la tribu de Juda. Le livre de Josué, xv, 34-35, la nomme parmi les villes de la Séphélah ou de la plaine, entre Taphua et Jérimoth, dans une énumération qui commence par Estaol. C’est probablement à la porte de cette ville que Thamar, veuve d’Her, attendit Juda son beaupère. Gen., xxxviii, 14. L’hébreu porte : be-pétah’Ênaïm, ce que les Septante rendent par taXi itùXaiç Aivàv, « aux portes d’Enaïm, » traduction préférable à celle de la Vulgate, qui porte : in bivio itineris, « à un carrefour. » Le texte sacré nous dit que la localité où se trouvait Thamar était dans le voisinage de Thamria, Gen., xxxviii, 12-14, et le Talmud de Babylone, Sotah, ꝟ. 10 a, qu’elle était près d’Adullam, ce qui s’applique fort bien à Énaîm, mentionnée dans Josué, xvi, 34-35, avec Adullam et d’autres villes voisines de

Thamna. — Toutefois, malgré les indications générales fournies par le livre de Josué, le. site d’Énaïm n’a pu être encore identifié. Eusèbe et saint Jérôme, Onomaslica, édit. Larsow et Parthey, p. 204, 205, disent qu’Énaîm existait encore de leur temps et s’appelait Bethénim, près du Térébinlhe, c’est-à-dire probablement dé Mambré, à côté d’Hébron ; mais Énaïm ne devait pas être près d’Hébron. Et rien n’a été trouvé dans la partie de la Séphélah dont parle Josué, xv, 33-36, qui rappelle le nom de la ville aux deux sources. _ F. Vigouroux.

ENAN. Nom de deux Israélites et d’une localité de Palestine.

1. ÉNAN (hébreu : ’Ênân ; Septante : Aïviv), père de Ahira, qui était chef de la tribu de Nephthali au temps de Moïse. Num., i, 15 ; ii, 29 ; vii, 78, 83 ; x, 27.

2. ÉNAN, ancêtre de Judith, viii, 1. Dans la Vulgate, il est dit fils de Nathanias et père de Melchias. Dans les Septante, il est appelé’EXetcfê (Codex Alexandrinus : ’Ekiàë ; Codex Sinaiticus : ’Evo6) et dit fils de Nathaniel et père de Chelchias. E. Levesque.

3. ÉNAN (hébreu : Hâiar -’Ênân, Septante : ’Apacvssîja). point qui devait marquer la limite nord-est de la Terre Promise, entre Zéphrona et Séphama. Num., xxxrv, 9-10. Il n’est nommé qu’à cette occasion dans le Pentateuque. Ézéchiel, xlvii, 17 ; xlviii, 1, est le seul écrivain sacré qui en fasse mention en dehors de Moïse, et c’est aussi pour marquer les frontières de la Terre Promise restaurée. — Le premier élément du nom hébreu d’Enan, Ifâsar, désigne ici un village ou campement de nomades entouré d’une clôture ou défense. Voir Aser-GADDA, t. i, col. 1090. Saint Jérôme a rendu ce mot par villa, dans Num., xxxiv, 9 et 10, et par atrium, « vestibule, cour, » dans Ezech., xlvii, 17 ; xlviii, 1. Nos éditions de la Vulgate portent Enan, Num., xxxiv, 9, 10 et Ezech., xlviii, 1 ; elles ont Enon, Ezech., xlvii, 17, conformément au texte massorétique qui porte ici’Ênôn.

— Ézéchiel, dans les deux passages où il nomme Ifâsar’Ênân, le détermine en disant que c’est gebûl Damméséq, « la frontière de Damas ; » mais ce renseignement est insuffisant pour en fixer la position avec certitude. Le second élément du nom, ’ê » d », indique qu’il y avait là des sources remarquables. À cause de cette circonstance, Knobel, Die Bûcher Numeri, Deuteronomium, 1861, p. 193, et à sa suite Kneucker, dans le Bibel-Lexicon de Schenkel, t. ii, p. 610, pensent que Ifàiar’Ênân pourrait être la station désignée par la Table de Peutinger, x, e, sur la route d’Apamée à Palmyre, sous le nom de Centum Pulea, « Cent Puits » (MoviTEa de Ptolémée, v, 15, 24), à vingt-sept milles ou environ onze heures de marche au nord-ouest de Palmyre. Cette opinion est généralement abandonnée. — J. L. Porter identifie Énan avec Kuryetein, gros village à près de cent kilomètres à l’est-nord-est de Damas. « Ses sources abondantes, les seules qui existent dans cette vaste région, amènent, dit-il, à supposer que là pouvait être Ifâsar’Ênân, le Village des Fontaines. » Handbook for travellers in Syria and Palestine, 1868, p. 511. Voir aussi Id., Five years in Damascus, 2 in-12, Londres, 1855, t. i, p. 253 ; t. ii, p. 358. L’inconvénient de cette opinion est de placer Énan trop loin de Damas. — D’après Keil, Leviticus, Numeri, 1870, p. 389 ; Ezéchiel, 1868, p. 484, il faut chercher Ifâsar’Ênân au nord de Baalbek, à Lebonéh, où les sources abondent, dans la Cœlésyrie (El-Bekâa), à la ligne de faite qui sépare le bassin de l’Oronte ( Nahr-el-Asi), au nord, du bassin du Léontès (Nahr-el-Leïtani), au sud. — Le P. Van Kasteren rejette cette opinion (voir col. 536) et place Enan à El-lfadr, au nord-est de, Banias, sur la route qui conduit de cette dernière ville à Damas. Voir Chakaak,

col. 535, et Revue biblique, 1895, p. 32. — M. F. Buhl, Géographie des alten Palâstina, 1896, p. 67, 110, 240, propose d’identifier Jfâiar’Ênân avec la Banias actuelle, la Césarée de Philippe des Evangiles. Là se trouve une des principales sources du Jourdain, qui pouvait mériter le nom de’Ênân, mais la frontière septentrionale de la Palestine devait remonter plus haut que Banias.

F. Vigouroux.

    1. ENCAUSTIQUE##

ENCAUSTIQUE (PEINTURE À L’), II Mach., ii, 30. Voir Peinture.

    1. ENOÉNIES##

ENOÉNIES, mot grec, ’Eyxaïvia, par lequel la fête de la Dédicace du Temple de Jérusalem est désignée en saint Jean, x, 22 (Vulgate : Encxiiia). Voir Dédicace, col. 1339.

    1. ENCENS##

ENCENS (hébreu : lebônâh ; Septante : Xtêavo ; , X16avetvroç ; Vulgate : thus), sorte’de résine aromatique.

I. Description. — L’encens est une gomme-résine obtenue du tronc de divers arbres de la région subtropicale par incision ou même s’en écoulant spontanément. Il prend la forme de larmes jaunâtres, faiblement translucides, fragiles, d’une saveur amère et répandant, quand

559.

Boswellia sacra.

on les brûle, une odeur balsamique. — L’encens asiatique, qui vient surtout de l’Arabie, est fourni par le Boswellia sacra (fig. 559), de la famille des Térébinthacées-Burséracées. Celui d’Afrique est dû à plusieurs espèces congénères, telles que le Boswellia papyriferâ (fig. 560) d’Abyssinie. Ces arbres, dont l’écorce s’exfolie en lames minces comme des feuilles de papier, sont riches en canaux résineux. Leurs feuilles, rapprochées en bouquets vers l’extrémité des rameaux et caduques au moment de la floraison, sont alternes et imparipennées, avec folioles dentées et opposées le long du rachis. Leurs fleurs ont un calice persistant à cinq dents, une corolle blanche à cinq pétales pourvus d’onglet, dix étamines sur deux rangs et alternativement inégales. L’ovaire, sessile à deux ou trois loges, devient une drupe dont l’enveloppe charnue se rompt en autant de valves en se séparant des noyaux, qui restent quelque temps attachés à un axe central trigone. — On a longtemps attribué le véritable encens au Boswellia serrata, qui croit sur les montagnes de l’Inde, mais les produits de cet arbre sont de qualité très infe

rieure et n’arrivent pas en Europe ni même dans l’Asie antérieure. Tout ce que le commerce y importe comme encens de l’Inde n’a pas réellement cette origine. Enfin plusieurs arbres appartenant à d’autres familles, spécialement aux Conifères, donnent des résines aromatiques souvent prises pour le véritable encens ou employées à le sophistiquer (Juniperus phœnicea et thurifera, Pinus Tœda, etc.). F. Hy.

II. Exégèse. — 1° Identification. — Il n’y a pas de doute que lebônâh ne désigne l’encens. On retrouve le même mot, avec de légères modifications dialectales, dans les langues congénères : lebûnfà’, lebôntâ’en araméen, lebûntô" en syriaque, lobdn en arabe ( cꝟ. 1123b en phénicien ) ; et il s’entend certainement de cette espèce de gomme odorante. Du sémitique le mot est passé en grec sous la forme Àfêavo ; , et invariablement les Septante en font la traduction du lebônâh hébreu, que la Vulgate rend également par thus. La racine du nom est pb, lâban, « être blanc ; » sans doute c’est à l’encens de couleur blanchâtre, à l’encens le plus pur, qu’il fut d’abord appliqué. Cf. Pline, H. N., xii, 32 ; Théophraste, Hist. plant., ix, 4. — Certains grammairiens ont prétendu que

5C0. — Boswellia papyHfera.

Hameau fleuri après la chute des feuilles. — À droite, fleur,

bouton et fruit. — À gauche, goutte de résine.

X18avo ; désignait l’arbre, et), 16ava)TÔ ; l’encens. Mais les anciens auteurs ont employé le mot Xiëavo ; et pour l’arbre et pour la gomme, et >16xvù>t<5 ; exclusivement pour cette dernière. J. F. Schleusner, Novus thésaurus philologico-criticus, in-8°, Leipzig, 1820, t. iii, p. 453. Dans le texte sacré, lebônâh n’a que le sens d’encens ; il en est de même du Wëavoc des Septante, qui n’emploient qu’une fois X16av(aT<5 ; . II Par., ix, 29. Sans doute il est question de l’arbre dans Gant., iv, 14 ; mais on emploie l’expression’âsê lebônâh, « arbres d’encens, » c’est-à-dire arbres qui produisent le lebônâh, l’encens.

— Si les anciens connaissaient bien l’encens, ils n’avaient sur l’arbre qui le produisait que des renseignements vagues et en partie erronés. Théophraste, Hist. plant., ix, 4 ; Diodore de Sicile, v, 41 ; Pline, H. N., xii, 31. Ce dernier avoue qu’on n’est pas d’accord sur la forme de l’arbre, et que les Grecs en ont donné les descriptions les plus variées. Également sur des relations plus ou

moins sûres, Théophraste, H. P., ix, 14, et Pline, H. N., xii, 32, expliquent la façon dont on le récoltait. À l’époque des plus grandes chaleurs, s’il faut en croire le naturaliste romain, on pratiquait des incisions sur les arbres, là où l’écorce est le plus mince et le plus tendue. « On dilate la plaie, sans rien enlever. Il en jaillit une écume onctueuse, qui s’épaissit et se coagule ; on la reçoit sur des nattes de palmier ou sur une aire battue. On fait tomber avec un instrument de fer ce qui est resté attaché à l’arbre. » Des voyageurs plus modernes ont découvert et décrit les véritables arbres à encens : ce sont diverses espèces du Boswellia.

2° Provenance. — C’est de Saba, Sebâ", que le texte sacré fait venir l’encens. D’après lsaïe, lx, 6, les caravanes venant de Saba doivent apporter à Jérusalem l’or et l’encens. « Qu’ai-je besoin de l’encens qui vient de Saba ? » dit le Seigneur dans Jérémie, VI, 20. Aussi dans la quantité d’aromates apportés à Salomon par la reine de Saba, il est naturel d’y ranger l’encens. III Reg., x, 2, 10 ; II Par., ix, 1, 9. Dans son chapitre sur le commerce de Tyr, Ézéchiel, xxvil, 22, ne nomme pas non plus l’encens en particulier ; mais il le comprend évidemment sous l’expression générale : « Les marchands de Saba et de Réema trafiquaient avec toi ; de tous les aromates les plus exquis ils pourvoyaient tes marchés. » L’encens apporté à la grande Babylone, Apoc, xviii, 13, venait sans doute du même pays, bien qu’il ne soit pas désigné : ce passage sur le commerce de Rome offre les plus grandes analogies avec la description d’Ézéchiel, xxvii. En parlant des mages qui apportent de l’encens à l’enfant Jésus, saint Matthieu, 11, 1, 11, ne désigne leur pays que par l’expression vague d’Orient.

D’après l’Écriture c’est donc d’Orient, du pays de Saba, que venait l’encens. Le pays de Saba et la région limitrophe, l’Hadramaut, c’est-à-dire la partie de l’Arabie méridionale ou l’Arabie Heureuse qui s’étend sur le littoral du golfe Arabique et sur la côte du sud, étaient renommés dans l’antiquité comme le pays de l’encens. « Les Sabéens, les plus connus des Arabes à cause de l’encens, » dit Pline, H. N., vi, 32. Et encore : « La région thurifère, c’est Saba, » Pline, H. N., su, 30 ; Théophraste, Hist. plant., ix, 4 ; Strabon, xvi, 19, parlent de même ; enfin Virgile dit, Georg., 1, 58 :

Solis est thurea virga Sabæis.

On peut voir dans Celsius, Hierobotanicon, in-8°, Amsterdam, 1748, t. 1, p. 240, 241, de nombreuses citations où des auteurs anciens vantent l’encens de Saba.

Mais était-ce vraiment la patrie de l’encens, ou bien n’était-ce que le principal entrepôt de ce commerce ? Il est certain que pour plusieurs espèces d’aromates les Arabes n’étaient que les entremetteurs : c’est de l’Inde et de l’Afrique qu’ils tiraient ces produits ; ils cachaient soigneusement le pays d’origine, laissant croire qu’ils venaient de chez eux, afin de conserver le monopole de la vente sur les marchés de l’Asie occidentale. Pour ce qui regarde l’encens, il est certain qu’une espèce d’arbre thurifère a été reconnue indigène dans l’Hadramaut, le Boswellia sacra, F. A. Flûckiger et D. Hanbury, Histoire des drogues d’origine végétale, trad. Lanessan, in-8°, Paris, 1878, t. 1, p. 260, 266-268, et il est possible que quelques autres variétés aient crû anciennement dans ce pays ou dans la région voisine des Sabéens. C’était donc bien une région thurifère. Toutefois l’encens ne parait pas y avoir été récolté en quantité suffisante pour pourvoir tous les marchés antiques. Les Arabes devaient s’approvisionner ailleurs. Niebuhr, Description de l’Arabie, in-4°, Paris, 1779, t. 1, p. 202-203, etTristram, The nalural history of the Bible, in-12, Londres, 1889, p. 355, croient que la plus grande quantité leur venait de l’Inde. De fait, le lobân, « encens, » était appelé aussi kondor, kundur, par les Arabes : ce qui serait le nom indien de la gomme aromatique du Salaï, que Cole

brooke, On Olïbanum or Frankincense, ’dans Asiatic Researches, Calcutta, t. ix, p. 377, identifiait avec le Boswellia thurifera, le Boswellia serrata de Roxbnrg, Flor. Ind., Sérampore, 1832, ii, 388. Cependant on ne croit pas généralement que l’encens de l’Inde ait été exporté en grande quantité, pas plus qu’aujourd’hui, dans l’Asie orientale et dans le monde grec et romain. Les anciens auteurs, qui font venir de l’Inde un certain nombre de parfums, ne parlent pas de l’importation de l’encens indien.

Du reste, les habitants du sud-ouest de l’Arabie pouvaient s’approvisionner moins loin. Ils n’avaient qu’à traverser la mer Rouge, et en Abyssinie et surtout un peu plus bas, dans le pays des Somalis, ils trouvaient de nombreuses espèces de Boswellia, le Boswellia papyrifera, le Boswellia Frereana, Boswellia Carterii, etc. Ch. Joret, Les plantes dans l’antiquité, in-8°, Paris, 1897,

— Quelques auteurs ont pensé que les arbres à encens avaient aussi été importés et cultivés en Palestine. Ils s’appuient sur Cant., iv, 6, 14, où l’Épouse exprime le désir de se retirer sur la colline de l’encens, et où parmi les plants de son jardin on compte les arbres à encens. Mais ce sont là des comparaisons poétiques, pour exprimer un lieu délicieux, tout embaumé des plus suaves parfums. Comme nous l’avons vii, pour les contemporains de Salomon, d’Isaïe ou de Jërémie, le pays d’où vient l’encens, c’est Saba. — C’est par erreur également que saint Cyrille d’Alexandrie, In Isaiam, ch. lx, 13, lib. v, t. lxx, col. 1336, dit que l’arbre à encens croissait sur le mont Liban ; très probablement cela est dû à la ressemblance qu’a avec le nom de la montagne le nom grec de l’encens, >(6avQ(, qui du reste se rencontre sept versets plus haut dans Isaïe, lx, 6. Cette confusion des deux noms a été faite par la Vulgate elle-même, Cant., iv, 14 :

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561. — Transport des arbres à encens du pays do Pount en Egypte. D’après Dttmlciïen, Die Flotte einer âgyptischen Kônigin, pi. 3

t. i, p. 356, 499. Par delà le Pount était la région du Tonouter, ces terres en terrasse ou échelles de l’encens,

où les Égyptiens allaient chercher le meilleur i~~+,

? ! , SOUS

ânti, « encens. » (A remarquer la forme, ’,

laquelle ce nom se trouve écrit. Le déterminatif m in dique quelque chose de brillant et rend bien le mot latin candidum, « pur. » On trouve employée en hébreu l’expression équivalente : lebônâh zakkâh, roî ruib,

thus candidum, purissimum.) Sous la reine Hatespou (XVIIIe dynastie), on équipa une flotte de cinq navires pour aller recueillir les richesses de ce pays fortuné. L’expédition, qui réussit à merveille, a été représentée en détail sur les murailles du temple de Deir-el-Bahari : on y voit le transport des « sycomores à encens », nehetu ânti ( fig. 561), leur embarquement dans les vaisseaux. Trente et un arbres à encens furent déracinés avec leur motte et transportés dans des couffes. Au retour on les planta dans des fosses remplies de terre végétale, qui ont été retrouvées par M. Naville. Egypt Exploration Fund, archseological Report, 1894-1895, p. 36-37. Les murailles de l’édifice montrent encore quelques-uns de ces arbres transplantés en pleine terre dans le jardin du temple (fig. 562). G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, t. ii, 1897, p, 247-253 ; V. Loret, La flore pharaonique, 2e édit., 1892, p. 96. « les arbres du Liban, » au lieu de « les arbres à encens » (grec : Xiëâvou ; hébreu : lebônâh). Celsius, Hierobotanicon, t. i, p. 242-243, cite plusieurs auteurs qui ont fuit la même confusion. Cependant Pline, H. N., xii, 31 ; xvi, 59, prétend que les rois d’Asie firent planter à Sardes des arbres à encens. Cf. Théophraste, Hist. plant., IX, 4. Il ne paraît guère probable qu’il s’agisse du véritable arbre à encens, d’une espèce de Boswellia, apportée de TInde, d’Arabie ou d’Afrique : comme il règne une certaine confusion dans les descriptions que Pline fait de cet arbre, ce pourrait bien être tout simplement quelque Juniperus phœnicea ou thurifera, arbre du Liban ou de l’Amanus, dont la résine, après une certaine préparation, était vendue pour de l’encens.

3° Usages et comparaisons. — De tout temps l’encens a été brûlé en l’honneur de la divinité. Cf. Hérodote, I, 183 ; Ovide, Trist., v, 5, 11, Metamorph., vi, 164 ; Virgile, Mneid., i, 146 ; Arnobe, Adv. Gentes, vi, 3 ; vu, 26, t.v, col. 1164, 1253, etc. En Egypte, sur les murs des temples ou des hypogées, on voit fréquemment l’officiant jetant le ânti ou encens sous forme de grains ou de pastilles dans le brùle-parfum et l’offrant à un dieu. Wilkinson, The manners, 1. 1, p. 183 ; t. iii, pi. lx, lxv, 8, et lxvii, p. 398-399. Ainsi, dans le rituel mosaïque, on prescrit assez souvent l’usage de l’encens. — 1. C’est d’abord pour accompagner les oblations ou sacrifices non sanglants. Sur l’offrande de fleur de farine arrosée d’huile, on devait répandre des grains d’encens. Le prêtre rece

vait cette offrande et la taisait brûler sur l’autel. Lev., I, 1, 2 ; cf. VI, 15. Dans l’offrande des fruits nouveaux, les épis encore tendres, après avoir été grillés et broyés, étaient arrosés d’huile, puis saupoudrés d’encens, comme dans le cas précédent. Lev., ii, 15, 16. Au contraire, dans le sacriBce pour le péché, Lev., v, 11, il est recommandé de ne pas employer l’encens ; de même dans le cas de la loi de jalousie, le sacrifice offert alors étant assimilé à une offrande pour le péché. Num., v, 15. On se servait d’encens très pur, lebôndh zakkâh, pour les pains de proposition ou d’offrande, disposés en deux piles sur la table du Saint : sur chaque pile, d’après.Tosèphe, Ânt. jud., III, x, 7, on plaçait un pelit plateau ou coupe

Traité Yoma, 5, le Talmud de Jérusalem, trad. Schwab, t. v, 1882, p. 208-209. Ce parfum à brûler, Oupu’aiia, dont l’Exode, xxx, 34-38, donne la recette, rappelle les compositions d’aromates, que les Égyptiens étaient très habiles à confectionner. Ordinairement aussi réservés au culte, ils se fabriquaient dans les laboratoires des temples, et leur préparation était très compliquée, comme celle du kyphi, par exemple. Les Hébreux purent leur emprunter leurs procédés ou leurs recettes, comme le firent plus tard les Grecs et les Romains. V. Loret, L’Egypte au temps des pharaons, in-12, Paris, 1889, p. 199-200 ; D. Mallet, Les premiers établissements des Grecs en Egypte, dans Mémoires de la mission archéologique

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662. — Arbroi il encens transplantés a Doir el-Bahari. D’après N’avilie, The Temple of Deir el-Baharl, pi. ix.

d’or, rempli d’encens ; il y demeurait une semaine ; le sabbat suivant, on remplaçait les pains, et l’encens était brûlé dans le feu des holocaustes, et on en plaçait une autre poignée dans les deux plateaux. Talmud de Jérusalem, trad. Schwab, tr. Scheqalim, p. 309. — 2° On employait aussi l’encens dans la confection de parfums mélangés. Ainsi le parfum sacré qu’on devait brûler chaque jour sur l’autel dans le Saint, Exod., xxx, 7-8, et dont la composition était réservée exclusivement au sanctuaire, contenait comme un de ses quatre ingrédients l’encens très pur ou blanc : les quatre éléments devaient être mêlés en proportions égales, broyés ensemble, puis réduits en poudre. Exod., xxx, 34-38. On l’offrait deux fois par jour sur l’autel des parfums, vers neuf heures du matin et trois heures du soir. C’est en offrant ce parfum que Zacharie eut sa vision de l’ange Gabriel. Luc, 1, 10. Plus tard, aux quatre ingrédients du parfum sacré, les rabbins en ajoutèrent d’autres, onze ou treize en tout, -qu’ils regardaient comme obligatoires ; si bien qu’en omettant, par exemple, l’herbe qui rend la fumée de l’encens verticale, on était passible de la peine de mort.

française au Caire, t. xii, fasc. 1, in-4, 1893, p. 306-308. Préparer l’encens pour qu’il s'élève en colonne droite était très difficile : c'était le secret de la famille d’Abtinos, dit le Talmud de Jérusalem, tr. Yoma, 9, trad. Schwab, p. 199. On connaissait autrefois ce procédé ; le Cantique, iii, 6, y fait allusion : « Quelle est celle qui monte du désert comme une colonne de fumée, formée de myrrhe et d’encens ? » — 3° Des lévites étaient chargés du soin des matières destinées aux sacrifices non sanglants, parmi lesquelles entrait l’encens. I Par., ix, 29. Après la captivité, Éliasib avait fait préparer pour Tobie l’Ammonite la chambre où on les conservait ; mais Néhémie remit les choses en leur premier état et rapporta l’encens avec les autres offrandes dans cette chambre. II Esdr., xiii, 5, 9. Dans le parvis d’Israël, des troncs étaient placés pour recevoir les offrandes destinées au culte ; un d’entre eux portait cette inscription : Encens ; on y déposait l’argent pour acheter l’encens. Cette offrande était volontaire ; mais, si l’on donnait pour Vencens, il fallait donner au moins ce qui était nécessaire pour une poignée. Scheqalim, l, 1, 5. « Nous avons envoyé de l’argent pour acheter des holocaustes et

de l’encens, » disent les captifs de Babylone aux Juifs restés à Jérusalem. Bar., 1, 10. A. l’époque messianique, on apportera l’encens en abondance de Juda et des nations. Jer., xvii, 26 ; Is., lx, 6. — 4° L’encens brûlant seul ou mêlé à d’autres aromates, et s’élevant vers le ciel, est devenu naturellement le symbole de la prière. Cf. Ps. cxl, 2 ; Luc, I, 10. C’est pourquoi l’Apocalypse nous montre la fumée des parfums montant avec les prières dés saints, vin, 3, 4 ; et les vingt-quatre vieillards tenant des vases d’or remplis de parfums, qui sont les prières des saints, v, 8. Aussi faut-il que les dispositions du cœur accompagnent l’offrande de l’encens ; autrement ce n’est pas un culte vrai, sincère, mais une pure formalité extérieure, que Dieu réprouve, ls., xliii, 23 ; lxvi, 3 ; Jer., VI, 20.

— 5° Si l’offrande de l’encens est un hommage à Dieu, l’offrir à des idoles est une marque d’idolâtrie. Quand Antiochus, 1 Mach., 1, 58, profana le Temple, il ordonna de brûler de l’encens devant les portes des maisons et sur les places. Il y eut des apostats, mais aussi d’héroïques résistances, à Modin surtout. Le tyran y envoya des émissaires pour contraindre les habitants à brûler de l’encens. I Mach., ii, 15. Plusieurs obéirent ; mais Mathathias et ses fils demeurèrent inébranlables. — 6° On offre l’encens, comme d’autres parfums ou des objets précieux, à des personnages qu’on veut honorer. En Orient, il n’y a pas de visite sans présent. Aussi les mages apportent-ils de l’or, de l’encens et de la myrrhe. Les Pères ont vu de plus une signification symbolique dans ces dons ; mais les interprétations sont bien variées : pour les uns, c’est la dignité sacerdotale ; pour d’autres, la divinité que les mages auraient voulu reconnaître par l’offrande de l’encens. L’encens sert de comparaison dans l’éloge de Simon fils d’Onias. Eccli., L, 9. Dans sa sollicitude pour le Temple, il est, d’après la Vulgate, « comme la flamme qui étincelle, comme l’encens qui brûle dans le feu, » et, selon le grec, « comme le feu et l’encens dans l’encensoir, » c’est-à-dire comme l’encens qui brûle sur le feu de l’çncensoir. Dans le verset précédent, ^.8, la Vulgate le compare aussi à « l’encens qui répand son parfum aux jours de l’été » ; mais le grec porte : pxatrràç Xiêàva-j, « comme un plant odoriférant du Liban ; » sens plus naturel, l’encens étant d’ailleurs nommé au vers, suivant.

— 7° Il est à remarquer qu’en plusieurs endroits où le mot lebônâh manque en hébreu, et 3u6àvoç dans les Septante, la Vulgate a cependant le mot thus : c’est que le traducteur latin a rendu par ce mot particulier des mots de sens général, comme qdtar, qetoréf, miqtdr, etc., « répandre une odeur agréable, fumigation. » 1Il Reg., xi, 8 ; xiii, 1, 2 ; II Par., xxviii, 25 ; Ezech., viii, 11 ; de même Ezech., vi, 13, pour rêah nil/ôah, pour « odeur suave », etc. — Dans d’autres passages, la Vulgate a rendu exactement ces mots de sens général, qetoret, qatâr, par incensum, adolere incensum ; mot à mot : « ce qu’on brûle, offrir ce qui est à brûler, » Num., xvi, 17 ; I Par., vi, 49, etc. ; mais il faut se garder de traduire incensum par « encens », parce que « ce qu’on brûlait a comprenait aussi bien les victimes qu’on brûlait sur l’autel des holocaustes, comme Exod., xxix, 13 ; Lev., iv, 35 ; Ps. lxv, 15, que les divers parfums offerts à Dieu sur l’autel des parfums, par exemple, I Mach., iv, 49 ; Luc, i, 9, et par conséquent beaucoup d’autres choses que l’encens.

E. Levesque.

    1. ENCENSOIR##

ENCENSOIR (hébreu : mahtâh et miqtéréf ; Septante : mipeîov et 6u|uaTiipiov > Vulgate : igniutn receptacula, thunbulum, thymiamateria ; Apocalypse : >, têavutôc ; Vulgate : thuribulum), proprement « vase où l’on brûle de l’encens » ; comme cet instrument servait non seulement pour l’encens, mais pour d’autres aromates ou des compositions de parfums, il serait plus justement nommé b>-ûleparfums.

1° Nom. — D’après l’étymologiej nnn, hatâh, s prendre

des charbons ardenls à un brasier, » Is., xxx, 14, le mah tâh est une sorte de pelle à feu, qui servait à prendredes charbons sur l’autel des holocaustes. Exod., xxvii, 3 ; . xxxvin, 3 ; Num., iv, 14. Dans ces trois endroits, la Vulgate rend bien le sens : receptacula ignium ; les Septante traduisent par le mot grec équivalent, irupeîov. Mais comme, après avoir pris du feu à l’autel des holocaustes, le prêtre, dans certaines cérémonies, jetait des grains d’encens ou d’autres aromates sur cette sorte de pelle ou réchaud, le même instrument devenait un brûle-parfums. Lev., x, 1 ; xvi, 12 ; Num., xvi, 6, 17, 37 (hébreu, xvii, 2), 39 (hébreu, xvii, 4), 46 (hébreu, xvilj 11). Les Septante continuent à rendre le mot hébreu par itupâov, et la Vulgate traduit alors habituellement par thuribulum. Le sens de « brûle - parfums » donné à mipeîov est particulièrement évident dans Eccli-, L, 9 : « comme le feu et l’encens dans l’encensoir, » àrà wupeîou. Cette pelle à feu, servant ainsi aux fumigations de parfums, reçoit de cette seconde fonction le nom spécial de miqtéréf, deqâtar, a fumer, exhaler des parfums. » II Par., xxvi, 19 ; ,

563. — Batillum romain, servant de brûle-parfums. Vue de face et vue de profil.

Ezech., viii, 11. Les Septante traduisent alors par ôujiairiïpiov, et la Vulgate par thuribulum. Le même instrument avait donc deux dénominations, provenant de ses deux usages. G. F. Rogal, Thuribulum, 1, dans Ugolini, Thésaurus antiquitatum sacrarum, in-f », Venise, 1750, t. xi, col. DCCLI. — Dans l’Apocalypse, viii, 3, 5, le brûleparfums est appelé X16avwT61 ; , proprement « encensoir ». 2° Forme. — L’Écriture ne décrit nulle part le mahtâh ; d’après les auteurs juifs, malgré les obscurités et lescontradictions d’un bon nombre d’entre eux sur ce sujet, et en s’attachant au sens précis du rcupeîov des Septante r on peut arriver à s’en faire très vraisemblablement une idée assez exacte. Le mahtâh est une sorte de large pelle à trois rebords peu élevés et munie d’un manche assez court. Il n’y a pas de rebord à la partie antérieure, pour permettre de prendre facilement les charbons ardents. Le Tcupeïov, par lequel les Septante ont Iraduit régulièrement le mahtâh hébreu, rappelle le batillum romain r pelle ou brasier rectangulaire, dont on se servait pour brûler de l’encens ou des herbes odoriférantes. Horace, Sat., i, 5, 36. Un exemplaire en bronze, trouvé à Pompéi, se conserve au musée de Naples (fig. 563). Cette description du mafytâh se trouve confirmée par une remarque du livre des Nombres, xvi, 37, 38 (hébreu, xvii, 3, 4). Dieu ordonne que les brûle-parfums de Coré r de Dathan et de leurs partisans seront réduits en lames : ce qui était très facile dans l’hypothèse de la forme que nous venons de décrire ; rien de plus simple que de rabattre les bords : ce qui, au contraire, eût été impossible sans les briser, s’ils avaient eu la forme d’un vase rond, sorte de coupe avec ou sans couvercle, comme on les représente quelquefois. Ces brûle - parfums, durant le temps du Tabernacle, furent fabriqués en cuivre. Num., . xvi, 39 (hébreu, xvii, 4) ; mais Salomon, pour le service du Temple, les fit faire en or. III Reg., vii, 50 ; II Par., iv, 22. Comme les autres vases du Temple, ils furent enlevés par les Chaldéens à la prise de Jérusalem. IV Reg., xxv, 15 ; Jer., lii, 19. Le brûle-parfums hébreu ainsi

entendu offre la plus grande analogie avec les encensoirs égyptiens. Comme on peut s’en rendre compte facilement par les nombreux spécimens représentés sur les monuments ou conservés dans les musées, c’était une main avec un bras ou manche (fig. 564). La main tient ordinairement un vase destiné à retenir les charbons ; sur le milieu du bras est souvent fixé un autre vase, sorte de navette à encens ou parfums, et la poignée prend diverses formes, comme, par exemple, celle d’une tête d’épervier. On voit aussi assez fréquemment des vases avec un pied au lieu de manche, et des vases en forme de bol ou de tasse sans anse, reposant directement sur le creux de la main, et ces vases sont surmontés d’une flamme et de

tous ces textes, où il est question d’offrandes de parfums à Dieu ou à des idoles, se trouve dans les monuments égyptiens. Des personnages, rois ou prêtres, y sont représentés tenant le brùle-parfums d’une main, de l’autre jetant des grains d’encens ou des pastilles odorantes ;

564. — Brûle-parfums égyptien. xix « dynastie. Thèbes. D’après Lepsius, Denlemdler, Abth. iii, BU 150.

grains d’encens ou d’autres aromates (fig. 565). Cf. Wilkinson, The Manners, t. iii, p. 414, 498. Un spécimen moins orné et en fer, trouvé dans les ruines de Naukratis, se rapproche davantage de la main de fer, ou petit tisonnier à feu. D. Mallet, Les premiers établissements des Grecs en Egypte, dans Mémoires de la mission archéologique française au Caire, t. xii, 1 er fasc, 1893, p. 230. — Dans l’Apocalypse, v, 8, il est dit que les vingt-quatre vieillards ont à la main des çiâXaj, phialas, pleines de parfums. Or l’équivalent lalin de y.&Xri est souvent patera, vase avec manche, qui a une assez grande ressemblance avec le batillum ; ce pourrait donc être un brùle-parfums ou encensoir.

3° Usage. — La façon de se servir du mahtâh ou brûle-parfums est clairement marquée dans le Lévitique, xvi, 12. À la fête de l’Expiation, le grand prêtre prenait le makfâh, le remplissait de charbons ardents à l’autel des holocaustes ; puis, tenant l’instrument de la main gauche, il entrait dans le Saint, prenait dans un vase spécial appelé kaf, Num., vii, 14, une pleine poignée du parfum sacré, réduit en poudre ou en pastilles (composition de divers aromates, selon la formule donnée Exod., xxx, 7-8), et, après avoir pénétré dans le Saint des saints, il en jetait de la main droite sur son brasero. Il s’approchait ainsi de l’arche, qui se trouvait bientôt enveloppée d’un nuage de parfums. Cf. Lev., x, 1 ; Num., XVI, 6, 17. En dehors de la fête de l’Expiation, l’offrande de l’encens se faisait dans le Saint, par les simples prêtres. La mission d’offrir l’encens était réservée au sacerdoce ; pour avoir voulu l’usurper, les lévites Coré, Dathan et Abiron furent châtiés d’une manière terrible. Num., xvi, 7-50. De même Ozias, roi de Juda, voulut offrir des parfums sur l’autel dans le Saint. II Par., xxvi, 16-20. Mais les prêtres s’y opposèrent ; et Ozias, tenant à la main l’encensoir, fut frappé de la lèpre. — Le prêtre qui offrait l’encens au Seigneur devait prendre le feu à l’autel des holocaustes. Nadab et Abiu, fils d’Aaron, sont punis de mort par le Seigneur pour avoir employé du feu profane contre l’ordre divin. Lev., x, 1, 2. C’est bien à l’autel des holocaustes, fhjffsaoTTipfov, que l’ange prende feu dont il remplit son encensoir. Apoc, viii, 3-5.

— Dans une de ses visions, Ézéchiel, viii, 10, 11, voit soixantedix anciens de la maison d’Israël, représentant le peuple, réunis dans une cour du Temple ; ils portaient chacun un encensoir à la main, et par les parfums qui y brûlaient honoraient les images d’animaux et d’idoles peintes sur les murs. Le commentaire le plus clair de

565. — Brûle-parfums en forme de vase sans manche. Temple de Ranisès III. D’après Lepsius, Denkmdler, Abth. iii, Bl. 167,

ils présentent à la divinité l’encensoir ainsi fumant pour lui faire respirer en quelque sorte l’odeur de ces parfums (fig. 566).

4° Applications douteuses ou erronées. — Les exégètes sont très partagés sur la question de savoir si le 6up.tariipiov d’or dont parle l’Épitre aux Hébreux, ix, 4, est un. encensoir ou l’autel des parfums. En elle-même l’expression peut s’appliquer et s’applique de fait soit à un encensoir, II Par., xxvi, 19 ; Ezech., viii, 11, soit à l’autel des.

560. — P*oi d’Egypte offrant de l’encens à un dieu. D’après WiUdnson, The Manners, t. iii, p. 415.

parfums. Josèphe, Ant. jud., III, vi, 8 ; viii, 2, 3 ; Bell, jud., V, v, 5 ; Philon, De vita Mosis, iii, 7, édition de 1742, t. ii, p. 149. Selon les uns, le 6up. ! « Tinptov de l’Épitre, étant mis dans le Saint des saints, ne peut désigner l’autel des parfums, qui de l’aveu de tous était dans le Saint. Ce serait plutôt l’encensoir dont se servait le grand prêtre le jour de la fête de l’Expiation. Lev.,

xvi, 12. Sans doute du temps du Tabernacle il était d’airain ; mais Salomon, comme nous l’avons vii, le fit fabriquer en or. Il faut avouer que cet encensoir n’était . pas à demeure dans le Saint des saints, il y était porté seulement pendant la durée de la cérémonie expiatoire ; d’un autre côté, il serait étrange que l’auteur de l’Épitre aux Hébreux, dans son énumération des objets du culte placés dans le Temple, eût omis l’autel des parfums. Aussi bon nombre d’exégètes, et avec raison, il nous semble, entendent par le Ou(it « Triptov de l’Épître l’autel des parfums. C’est ainsi du reste que traduisait la version italique : allare. La solution de la seule difficulté opposée à ce sentiment se trouve dans les paroles mêmes de l’Apôtre, rapprochées d’expressions identiques employées dans l’Ancien Testament. Il est à remarquer que l’auteur ne dit pas expressément que l’autel était dans le Saint des saints, il ne pouvait se tromper sur une chose si notoire ; il ne se sert pas de èv tj, comme au ꝟ. 2, pour les objets renfermés dans le Saint ; mais il dit èxoiina : ce qui est la traduction exacte de l’expression hébraïque de 1[[ Reg., vi, 22: hammizbêal.i âsér laddebir, « l’autel qui est à l’oracle ; » altare oraculi, d’après la Vulgate. De plus, on parle de cet autel au milieu de la description même de l’oracle ou Saint des saints. III Reg., VI, 20. L’Épitre n’affirme pas autre chose, sinon que l’autel des parfums était en relation étroite avec le Saint des saints. — Il ne faut pas confondre avec le mah(âh, « brûle - parfums, » un instrument de même nom, de forme sans doute analogue, mais plus petit et en or, qui servait à recevoir ce qui avait été mouché dés lampes. Exod., xxv, 38 ; xxxvii, 23 ; Num., iv, 9. Les Septante rendent justement ce mot par ÈnapuirTpiSaç, et par le terme plus général ÙTroOÉtiata ; la Vulgate se sert d’une périphrase : vasa ubi ea quss eniuncta sunt extinguantw, et une fois du mot emxtnctoria. — Il est à remarquer que le traducteur de la Vulgate rend d’une façon très variable et assez souvent erronée les noms des différents vases ou instruments servant au culte du Temple : on sent qu’il s’agit d’un état de choses qui n’existe plus de son temps. Les Septante, au contraire, sont en général plus exacts et-plus constants dans la façon dont ils traduisent ces différents noms. Ainsi la Vulgate rend par thuribula le mot qe&àvôf dans deux textes parallèles où il est question des quatre espèces de vases formant le mobilier de la table des pains de proposition. Exod., xxv, 29 ; xxxvii, 16. Les traducteurs grecs ont mis ijTtivSia, « vase à libation. » Dans un autre passage, Num., iv, 7, parallèle aux deux derniers, la version latine a crateras pour ce même nom qeiot, et c’est le mot qe’àrôt qu’elle rend par thuribula, lorsque les Septante mettent pour ce dernier nom hébreu TpvoXi’a. Or les qesof sont certainement des vases à libation, comme le dit expressément le texte lui-même, Exod., xxxvii, 16, et comme l’ont compris les Septante en écrivant <j71<5vôia. — Quant aux qe’àrôt, ce ne sont pas des brûle-parfums, mais des TpuëAi’a, vases semblables au catinus des Latins. Un passage du Lévitique, XXIV, 7, nous dit qu’on plaçait de l’encens très pur sur chacune des deux piles de pains d’offrande ou de proposition. Josèphe, Ant. jud., 111, x, 7, rapporte que cet encens était déposé dans deux petits vases appelés tccvccxe ; . C’est le catinus latin ; or ce vase était une sorte de soucoupe dans laquelle on portait des pastilles d’encens poulie sacrifice. — Les kafôf, Outoxoci, dont il est aussi parlé dans les passages cités de l’Exode, xxv, 29 ; xxxvii, 16, et des Nombres, iv, 7, étaient semblables à Vacerra des Latins, sorte de boite à encens, équivalente pour le service à ce que nous appelons la navette. Ces quatre vases du mobilier de la table d’offrande ne désignent donc pas irn encensoir. — Dans I Par., xxviii, 17, le mot qeèof, vase à libation, est également rendu par thuribula ; dans IV Reg., xii, 13 (hébreu, 14), le mot mizrâqôt, qui signifie un vase destiné à répandre le sang des victimes, est aussi traduit par thuribula. E. Levesque.

I ENCHANTEMENT, action de charmer par des opé| rations, appelées magiques. Voir Magie, Divination.

    1. ENCHANTEUR##

ENCHANTEUR, celui qui charme et opère des choses merveilleuses par des moyens magiques. Voir Charmeur.

    1. ENCLUME##

ENCLUME, Job, xii, 15 ; Eccli., xxjtvm, 29. Voir j Forgeron, col. 2310.

    1. ENCRE##

ENCRE (hébreu : der/ô ; Nouveau Testament : piXav ; I Vulgate : atramenlum), liquide servant à écrire. L’encre i dont les anciens se servaient ordinairement était une sorte | d’encre de Chine, c’est-à-dire une matière noire dessc-I chée, qui, délayée dans l’eau et répandue par le calame I du scribe, traçait sur le papyrus ou le parchemin les’caractères de l’écriture. Elle n’est mentionnée qu’une

; fois dans l’Ancien Testament. Jérémie dictait ses prophéties, 

et Baruch, son secrétaire, écrirait sur un rouleau avec de l’encre. Jer., xxxvi, 18. Le mot deyô, qui désigne ici l’encre, n’a pas été traduit par les Septante. Gesenius, Thésaurus, Leipzig, 1829, t. ii, p. 335, le rattache à la racine inusitée et incertaine dâyâh, « qui est de couleur sombre. » D’autres le font dériver de dàvàh, « couler lentement. » Fr. Buhl, Gesenius’Wôrterbuch, 12e édit., 1895, p. 169. L’emploi de l’encre est supposé par Ézéchiel, ix, 2, 3, 11, qui parle du qéséf hassôfêr ou encrier du scribe. Voir Écritoire. Mais l’usage de l’encre, quoiqu’il ne soit pas signalé dans les temps antérieurs, devait être plus ancien chez les Hébreux et remonter à l’époque où ils ont connu l’écriture sur papyrus. La législation mosaïque fournit un indice de son ancienneté. Les malédictions prononcées contre la femme infidèle à son mari devaient être écrites sur un billet, puis effacées avec des eaux amères, qu’on faisait boire à la coupable. Num., v, 23. L’écriture fraîche s’efface facilement par un lavage à l’eau, qui enlève l’encre. Les Hébreux ont pu apprendre à se servir de l’encre durant leur séjour en Egypte, où, dès les temps les plus reculés et avant l’exode, les scribes en faisaient un usage journalier, ainsi que l’attestent les papyrus qui nous sont parvenus. — Dans le Nouveau Testament, l’encre est mentionnée trois fois. Les lettres de recommandation que saint Paul présente aux Corinthiens ne sont pas écrites avec de l’encre sur des tablettes de pierre, elles ont été tracées par l’Esprit du Dieu vivant dans leurs propres cœurs. II Cor. f iii, 3. Saint Jean, écrivant à Électa, II Joa., 12, et à Caius, III Joa., 13, ne veut pas écrire au moyen de papyrus et d’encre tout ce qu’il a à leur dire, soit par défaut de ces matériaux, soit par prudence ; il espère aller les voir et leur parler.

L’encre des Hébreux devait être la même que celle des Égyptiens et des Grecs. Elle était ordinairement composée de noir de fumée, mêlé à une solution de gomme. Pline, H. N., xxxv, 25. Selon Dioscoride, v, 182, le mélange était formé dans les proportions de 75 pour 100 de noir de fumée et de 25 pour 100 de gomme. Vitruve, vii, 10, décrit ainsi la préparation du noir de fumée destiné à la fabrication de l’encre : « On bâtissait une chambre voûtée comme une étuve ; les murs et la voûte étaient revêtus de marbre poli. Au-devant de la chambre, on construisait un four qui communiquait avec elle par un double conduit. On brûlait dans ce four de la résine ou de la poix, en ayant bien soin de fermer la bouche du four, afin que la

! flamme ne put s’échapper au dehors, et se répandît

| ainsi, par le double conduit, dans la chambre voûtée ; elle s’attachait aux parois et y formait une suie très fine, qu’on ramassait ensuite. » Cf. H. Giraud, Essai sur les livres dans l’antiquité, Paris, 1840, p. 48-49. Le noir de fumée ainsi obtenu était mélangé avec une solution de gomme dans l’eau, puis soumis à l’action du soleil pour le dessécher. L’encre séchëe et solidifiée se débitait en forme de pains, pareils à nos bâtons d’encre de Chine. Quand le scribe voulait s’en servir, il la délayait dans

l’eau avec sa paletle. Voir Écritoire. Celte encre était facile à effacer. Pour la rendre indélébile il fallait simplement, selon Pline, H. N., xxxv, 25, se servir de vinaigre au lieu d’eau pour la délayer. — Dès la plus haute antiquité, les Égyptiens se sont servi d’encre rouge aussi bien que d’encre noire, comme le prouvent les papyrus où les titres et les indications liturgiques sont écrites à l’encre rouge. Les Grecs et les Latins reçurent des Égyptiens, avec le papyrus, l’usage des deux espèces d’encre, et c’est par leur intermédiaire que nous est venue l’habitude d'écrire en rouge les rubriques dans nos Bréviaires et dans nos Missels. On a trouvé dans un grand nombre de tombeaux égyptiens des palettes de scribes contenant de

'Ae).î(ip ; Codex - Alexandrin » *, Nr, vB(ip, I Reg., xxvtn, 7 ; 'AevBûp, Ps. lxxxii [ hébreu, lxxxiii], 11 ; omis, Jos., xvii, 11), ville comprise dans le territoire d’Issachar, mais donnée « avec ses villages » à la demi-tribu de Manassé occidental. Jos., xvii, 11. C’est là que Saül alla consulter la pythonisse avant la bataille de Gelboé, I Reg., xxvill, 7, et près de là que Débora et Barac défirent les troupes chananéennes de Jabin et de Sisara. Ps. lxxxii (hébreu, lxxxiii), 11. Eusèbe et saint Jérôme, Ononiaslica sacra, Gcellingue, 1870, p. 96, 121, 226, 259, aux mots Aendor, Endor, 'Asvôwp, 'HvSiip, la mentionnent comme étant encore de leur temps un gros village situé à quatre milles (près de six kilomètres) au sud du mont

[[File: [Image à insérer]|300px]]
567. — Endor. D’après une photographie.

l’encre rouge desséchée aussi bien que de l’encre noire. Les inscriptions à l’encre rouge ne sont pas très rares. Le P. Delatlre a trouvé à Carthage plusieurs inscriptions où les deuxespècesd’encre sont employées. Le musée de SaintLouis, à Carthage, possède, parmi beaucoup d’autres, une -amphore sur laquelle se lisent en lettres rouges les noms de C. Pansa et A. Hirtius, les consuls de l’an 43 avant notre ère. Cf. Delattre, Le mur à amphores de la colline Saint -Louis, Paris, 1894. On fabriquait l’encre rouge avec du cinabre. Euthalius, Act. Apost. edit., Patr. gr., t. lxxxv, col. 637. — Cf. F. Lenormant, Histoire ancienne de l’Orient, 9e édit., Paris, 1883, t. iii, p. 107 ; Pierret, Dictionnaire d’archéologie égyptienne, 1875, p. 205206 ; Trochon, Introduction générale, Paris, 1887, t. ii, p. 667-668 ; Daremberg et Saglio, Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, Paris, 1875, t. i, p. 529.

E. Makgekot. ENCRIER. Voir Écrjtoire, col. 1571.

    1. ENDOR##

ENDOR (hébreu : 'Ën-Dôr, e source de Dor » ou « source de l’habitation » ; Septante : Codex Vaticanus,

Thabor, et près de Naïm. Si elle a aujourd’hui perdu do son importance, elle existe cependant sous le même nom, dans la situation exacte indiquée par le texte sacré et les auteurs que nous venons de citer. Le mot hébreu Dôr est écrit-ni, I Reg., xxviii, 7 ; avec cholem défectif,-n, Jos., xvii, 11, et avec aleph, -'ni, Dûy, Ps. lxxxiii, 11 ; mais la forme complète-ri-jiy, 'Ên-Dôr, se trouve

bien reproduite par le nom arabe actuel, . jj, 'Éndûr

ou Endour. Il arrive en effet, parfois, que le mot l aïn, « source, » s’abrège, aussi bien que bèt, « maison, » en s’unissant à l’autre élément du composé. On sait, d’autre part, que la lettre 7, 'aîn, se change quelquefois en, aleph, comme jadis les Galiléens confondaient entre elles les gutturales. Cf. G. Kampffmeyer, Aile Namen im heutigen Palâstina und Syrien, dans la Zeitschrift des Deutschen Palàstina-Vereins, Leipzig, t. xv, 1892, p. 111 ; t. xvi, 1893, p. 55 ; A. Neubauer, La géographie du TaU mud, Paris, 1868, p. 181.

Le village actuel d’Endour (fig. 567), situé sur les dernières pentes septentrionales d’une petite montagne vol

canique dont les deux sommets s’appellent Tell-’Adjoul, au pied du Djebel Dâhy ou Petit-Hermon, est en grande partie renversé. Beaucoup de cavernes, de silos et de citernes creusés dans le roc attestent l’antique importance de cette localité. On y observe aussi un certain nombre d’anciens tombeaux renfermant intérieurement des auges sépulcrales surmontées d’un arcosolium cintré. Unesource, appelée’Aïn Endour, coule au fond d’une caverne, d’où elle sort par un petit canal, pour aller arroser plusieurs jardins qu’entourent des haies de cactus. C’est peut-être dans l’une des cavernes qui se trouvent là que la pythonisse évoqua devant Saül l’ombre de Samuel. Cf. V. Guérin, Galilée, t. i, p. 118 ; Van de Velde, Reise durch Syrien und Pal&stina, Leipzig, 1856, t. ii, p. 330 ; Survey of Western. Palestine, Memoirs, Londres, 1881-1883, t. ii, p. 84. — On a de. là une vue splendide. En avant se dresse le mont Thabor, qu’une large plaine sépare du village, et qui élève son dôme arrondi, absolument isolé, au milieu d’un plateau verdoyant. Plus loin, à l’est, de l’autre côté du Jourdain, on aperçoit les cônes volcaniques du Djolan, et, tout à l’horizon, la tête blanche du Grand Ilermon. Les ondulations du terrain s’abaissent insensiblement et amènent au niveau de la plaine d’Endor, très fertile et marécageuse dans les basfonds. Les sources du Nahr esch-Scherar la traversent, pour former un peu plus loin un fort ruisseau, qui va se précipiter dans le Jourdain. La terre est noire et volcanique, avec de nombreux fragments de basalte. On voit çà et là quelques champs cultivés, mais la plus grande partie est abandonnée. La végétation cependant est des plus remarquables ; de hautes herbes, des joncées vigoureuses, des carex aux feuilles rigides et tranchantes y forment des fourrés d’un vert sombre ; ailleurs ce sont des chardons gigantesques (Notobasis Syriaca et Silybum Marianum), au milieu desquels cavaliers et montures disparaissent presque complètement. D’autres endroits sont émaillés des fleurs superbes de lupins bleus, de liserons à fleurs roses, etc. Quelques tentes rayées d’Arabes Sakkar s’élèvent çà et là dans cette plaine entièrement dépouillée d’arbres. Cf. Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, dans le Tour du monde, t. xliii, p. 196.

A. Legendre.
    1. ENDUIT##

ENDUIT (hébreu : tûâh, « enduire ; » Septante : âXeiçstv ; Vulgate : linire), matière molle dont on recouvre certains objets, et qui, une fois séchée, rend ces objets plus résistants, plus visibles, etc. La Sainte Écriture parle en ce sens du bitume, voir t. i, col. 1804, et de la chaux, voir t. ii, col. 642-643. — Moïse prescrit à son peuple, dans le Lévitique, xiv, 42, 43, 48, que lorsqu’une maison sera atteinte de « la lèpre » (voir Lèpre), on devra, entre autres choses, racler avec soin les parois intérieures de la maison, porter hors de la ville les produits de cette Opération, et « enduire » (tâh ; Vulgate : linire) le mur d’un enduit nouveau. — Isaïe, XLrv, 18, dit au figuré que les yeux qui ne voient pas sont couverts d’un enduit. — Ézéchiel, xiii, 10-15 ; xxii, 28, compare les faux prophètes à des maçons qui couvrent leurs murs d’un mauvais enduit. — La main qui écrivit, pendant le festin de Baltassar, les mots mystérieux Mané Thécel Phares, les écrivit « sur l’enduit du mur du palais royal ». Dan., v, 5. Le mot chaldéen girâ’, qu’emploie l’écrivain sacré, signifie proprejnent « la chaux » (cf. Is., xxvii, 9 ; Amos, h, 1, dans le Targum) ; mais il désigne ici l’enduit de chaux avec lequel on avait recouvert les briques d’argile dont on s’était servi pour faire la muraille. La Vulgate traduit le sens, non la lettre : in superficie parietis, « sur la surface du mur. » Tandis qu’à Ninive les murs étaient couverts de plaques d’albâtre, à Babylone, où la pierre fait défaut et devait être apportée de loin à grands frais, oa ornait les murs au moyen d’un enduit de ciment et de peintures. Voir Diodore de Sicile, ii, 8 ; A. Layard, Niniveh and Babylon, in-8°, Londres, 1853, p. 529.

H. Lesêtre.

ÉNÉE (grec : Aiv&xç ; Vulgate : Mneas), homme de Lydda, que la paralysie tenait depuis huit ans couché sur un grabat, et que Pierre guérit subitement au nom de Jésus-Christ. Act., ix, 33, 34. À en juger par son nom grec, d’une forme bien connue, il devait être Juif helléniste. Quant à la question s’il était déjà chrétien, les auteurs ne sont pas d’accord. Il semble, disent les uns, , que, dans le cas de l’affirmative, saint Luc l’aurait désigné, non pas par l’expression vague s un homme a, mais sous le nom de disciple, comme un peu plus loin, ꝟ. 36, pour Tabithe. Mais il le fait équivalemment, répondent justement les autres ; car il est dit, ꝟ. 32, que saint Pierre se rendit chez les saints (fidèles) qui habitaient Lydda, et que là il trouva un homme. C’est comme s’il disait : un homme d’enlre les fidèles. Aussi l’apôtre lui suppose la connaissance du nom de Jésus et de sa vertu, ꝟ. 34. E. Levesque.

    1. ENFANCE DU SAUVEUR##

ENFANCE DU SAUVEUR (ÉVANGILES DE L’). Voir Évangiles apocryphes.

ENFANT. Il a différents noms dans la Bible.

I. Noms. — 1° Dans l’Ancien Testament, — 1. Na’ar r qui désigne tantôt un nouveau-né, Exod., ii, 6 ; rcatStov, parvulus ; Jud., xiii, 5 et 7 ; I Reg., i, 24 ; ii, 21 ; Iv, 21, itaiSâpiov, puer ; tantôt un jeune enfant, Gen., xxi, 16 ; xxii, 16 ; IV Reg., iv, 31 ; Is., vii, 16 ; viii, 4, irotStov, m » -Sdtpiov, puer, parfois avec le qualificatif qâlôn, « petit, »

I Reg., xx, 35 ; IV Reg., ii, 23 ; v, 14 ; Is., xi, 6, îraîSiov umtpôv, puer parvulus ou parvus, quoiqu’il soit dit de Salomon déjà roi, III Reg., iii, 7, et d’Adad, 1Il Reg., xi, 17, parfois avec une répétition emphatique, I Reg., i, 24, puer infantulus, ou avec l’indication du jeune âge, Jud., viii, 20, vewTepoç, puer ; IV Reg., îx, 4 ; iraiSâpiov, adolescens ; I Par., xxii, 5 ; xxix, 1, vioç ; tantôt un jeune homme, I Reg., xvii, 42 ; xxx, 17 ; Eccl., x, 16 ; Is., lxv, 20, TtatSâpiov, vetotepoç, véoç, parfois approchant de la vingtième année, Gen., xxxiv, 19 ; xli, 12, vsavi<7xoç ; Gen., xliii, 8, rottSâpiov ; Gen., xliv, 22, tiouSsov ;

II Reg., xviii, 5, 12, 29 et 32, naiBipiov ; II Par., xiii, 7, vîiiTepo ?. — 2. Yéléd, qui désigne soit un nouveau-né, Gen., xxi, 8 ; Ruth, iv, 16 ; II Reg., xii, 15 ; III Reg., m, 25, 7ta18(ov, puer ; soit un enfant de quelques années, IV Reg., ii, 24, Ttaïç ; Gen., xxxiii, 13 ; Job, xxi, 11, TtaiSs’ov ; Zach., viii, 5, itaiSapiov ; Is., lxvii, 5, tixvov ; soit enfin un adolescent, Gen., IV, 23, veavtmtoç ; Gen., xxxvii, 30 ; xlii, 22 ; III Reg., xii, 8, 10, 14 ; II Par., x, 8, 10, 14, 7tat8âpiov ; Dan., i, 4, 10, 13, 15, vsavfoxo ; et ita’.ôipiov ; Eccl., iv, 13, raxîç. — 3. Yônêq, 6r)XâÇ(ov, lactens, « s’allaitant, » Num., xi, 12 ; Deut., xxxii, 25 ; I Reg., xv, 3 ; xxii, 19 ; Ps. viii, 3 ; Jer., xliv, 7 ; Joël, n, 16 ; vrjiriov, Job, iii, 16 ; Is., xi, 8 ; Jer., vi, 11 ; ix, 21 ; Lam., i, 5 ; ii, 11, 20 ; iv, 4. — 4.’VI, enfant à la mamelle, ita1510v, infans, Is., xux, 15 ; vioç, infans, Is., lxv, 20. — 5.’OUI, vrjmov, téxvov, Is., xui, 16, ûhoti’tÛiqv, Ose., xiv, 1, puer, infans, infantulus, dont la signification étymologique est discutée, mais à qui on attribue plus généralement le sens d’enfant d’un certain âge, « qui a déjà sa liberté d’allure, joue, va et vient, » Jer., vi, 11 ; IX, 20 ; Lam., i, 5 ; iv, 4. Ce mot au pluriel est souvent opposé à yônqim, pluriel de yônêq, Ps. viii, 3 ; Joël, ii, 16 ; Jer., xliv, 7 ; Lam., ii, 11 ; I Reg., xxii, 19 ; xv, 3. Il est employé une fois, Job, iii, 16, pour désigner des enfants qui n’ont pas encore vu le jour, et ailleurs, IVReg., viii, 12 ; Nah., iii, 10 ; Ps. cxxxvii, 9 ; Lam., ii, 20, pour désigner de tout jeunes enfants. — 6. Taf, Ttot’êiov, mxiSipiov, Gen., xlv, 19 ; Deut., i, 39 ; iii, 6 ; Jos., i, 14 ; Gen., xliii, 8 ; veavHreoç, Ezech., IX, 6, etc. — 7. Ben, « fils, » 7taï{, puer, juvenis, toxiSi’ov, Gen., xvii, 12 ; xxi, 7, 8 ; Deut., xi, 2 ; Is., xlvi, 3 ; tsxvov, Prov., vii, 7, etc. — 8.’Êlêrn, enfant parvenu à l’âge de la puberté, naiSâpiov, vsavûrxo ; , I Reg., xvii, 56 ; xx, 22/

2° Dans le Nouveau Testament. — 1. Bp ! ?oc, infans, ff « nourrisson, n désigne l’enfant encore dans le sein de sa mère, Luc, i, 41, ou le nouveau-né, Luc, ii, 12, 16 ; Act., vii, 19 ; I Petr., ii, 2, ou un enfant déjà grand, Luc, xviu, 15. — 2. Niîirto ; , infans, qui ne parle pas, avec cette signification stricte, Matth., xxi, 16 ; 1 Cor., xiii, 11 ; mais il désigne un enfant en tutelle, Gal., iv, 1. — 3. Nio ; , nouveau, qui est entré récemment dans l’existence, TH., u, 4 ; plus souvent vecJtepo ; , juvenis, Act., v, 6 ; I Tim., v, 1, 2, 11, 14 ; TU., ii, 6 ; I Petr., v, 5. — 4. Néavi « , adolescens, Act., xx, 9 ; xxiii, 17, 18, 22, ou veavt’o-xo ?, adolescens, juvenis, Matth., xix, 20, 22 ; Marc, xiv, 51 ; xvi, 5 ; Luc, vii, 14 ; Act., Il, 17 ; v, 10 ; I Joa., II, 13, 14.

— 5. liât ; , puer, puella, Matth., ii, 16 ; xxi, 15 ; Luc, ii, 43 ; viii, 51 ; ix, 42 ; Act., xx, 12, ou ses diminutifs, icaiSipiov, puer, Matth., xi, 16 ; Joa., vi, 9 ; naiêiov, puer, Matth., ii, 8 ; v, 9, 11, 13, 14, 20, 21 ; xiv, 21 ; xv, 38 ; xviii, 2, 3 ; xix, 13, 14 ; Marc, v, 39, 40, 41 ; puella, JUarc, vii, 28 ; ix, 24, 36 ; x, 13, 14, 15 ; Luc, i, 59, ’76, 80 ; ii, 17, 21, 27, 40 ; vii, 32 ; ix, 47 ; xi, 7 ; xviii, 16, 17 ; Joa., iv, 49 ; xvi, 21 ; Hebr., xi, 23 ; I Joa., ii, 13. IL Condition physique et sociale de l’enfant. — -1° L’enfant fruit de la bénédiction céleste. — Ce fruit désiré et aimé d’une union féconde forme le troisième membre de la famille ; il sert de lien vivant entre le père et la mère et fait la joie et la consolation du foyer domestique. Aussi, chez les Orientaux en général et chez les Israélites en particulier, la naissance des enfants est regardée comme un effet de la bénédiction divine. Les frères de Rébecca souhaitaient à leur sœur avant son départ une nombreuse postérité. Gen., xxiv, 00. Chez le peuple .juif, des motifs religieux se joignaient aux raisons de la nature pour accroître les familles. Dieu avait promis à Abraham que ses descendants égaleraient en nombre la poussière de la terre, le sable de la mer et les étoiles du ciel. Gen., xii, 2 ; xiii, 16 ; xv, 5 ; xvii, 2, 4-6 ; xxii, 17. Dès lors, dans sa race, de nombreux enfants étaient un bienfait de Dieu et un litre de gloire, Gen., xlviii, 16 ; Deut., xxviii, 4 ; Ps. cxxvii, 3 ; Tob., vi, 22, tandis que la privation de postérité passait pour un châtiment céleste et un opprobre, Gen., xxx, 1 ; I Reg., i, 6 et 11 ; II Reg., xviii, 18 ; Is., liv, 1 ; Jer., xxii, 30 ; Ps. cxii, 9 ; Luc, i, 25, et Dieu l’infligeait comme punition aux unions incestueuses. Lev., xx, 21. Chaque famille se continuait dans les descendants et conservait avec le nom de son chef un héritage inaliénable et souvent de glorieux souvenirs. Si un homme mourait sans enfant, la loi donnait à ses proches le moyen et leur faisait le devoir de lui en susciter après sa mort. Deut., xxv, 5-10. VoirLÉviRAT. La naissance d’un enfant, surtout celle d’un garçon, était pour le père de famille israélite un joyeux événement, Jer., xx, 15 ; celle d’une fille était accueillie avec moins de satisfaction, à cause des sollicitudes particulières de l’éducation des filles. Eccli., xlii, 9 et 10.

2° Dieu auteur de la vie. — Dès sa conception, l’enfant appartenait à son père et à sa mère, même dans les unions illicites. Gen., xxxviii, 24-26 ; II Reg., xi, 5 ; Job, m, 3-9. Salomon ignorait les lois physiologiques de la formation de l’enfant dans le sein maternel. Eccle., xi, 5. La mère des sept frères Machabées ne savait comment ses l fils avaient apparu eu elle, et elle attribuait leur origine â l’action toute-puissante du Créateur. II Mach., vii, 22-23. Job cependant, par des comparaisons très justes, décrit cette action réelle et souveraine de Dieu dans la génération des hommes et aussi les phases principales de la constitution de l’embryon. Quand le fœtus est formé, Dieu lui donne la vie, en lui unissant, au moment que lui seul connaît, une âme qu’il a créée. Le petit être est dés lors l’objet de sa bonté ; il veille sur lui et s’en constitue le gardien. Ps. cxxxviii, 13-16 ; Job, x, 8-12. Cf. Lesêtre, Le livre de Job, Paris, 1886, p. 81 ; J. Knabenbauer, Gomment, in lib. Job, Paris, 1886, p. 148-149. L’auteur de la Sagesse, vii, 1 et 2, connaissait les lois générales de la formation de l’enfant. Le Psalmiste, Ps. lxx, 6, et

Jérémie, i, 5, ont célébré aussi la providence divine s’étendant sur eux dès avant leur naissance. Cf. Ps. xxi, 10-11 ; Is., xlix, 1 ; Luc, i, 42 ; ix, 27. Les rabbins ont continué d’enseigner que Dieu s’associait aux parents dans la génération des enfants. Talmud de Jérusalem, Péa, i, et Kilaim, viii, 4, trad. Schwab, t. ii, Paris, 1878, p. Il et 305-306.

3° Naissance de l’enfant. — Pendant les neuf mois de la grossesse, II Mach., vii, 27 (ou dix mois lunaires, Sap., vu, 2), l’enfant est vivant dans le sein de sa mère, et parfois il s’agite et tressaille. Gen., xxv, 22-24 ; Luc, i, 41. Il peut y périr et en être rejeté comme un avorton. Job, m, Il et 16. Voir t. i, col. 1294. Sur l’embryologie biblique, voir L. Low, Die Lebensalter in der jûdiscken Literatur, in-8°, Szegedin, 1875, p. 42-45. — L’enfantement est douloureux, Gen., iii, 16 ; Eccli., xix, 11 ; Joa., xvi, 21, et il exige ordinairement le ministère d’une sage-femme. Gen., xxxv, 17 ; xxxviii, 27-30 ; cf. Exod., i, 15-21. L’enfant tombe à terre, s’il n’est personne po^r le recevoir, et c’est par des pleurs qu’il fait entendre sa voix. Sap., vii, 3 ; cf. Eccli., XL, 1. On coupe le cordon ombilical et l’on donne à l’enfant les premiers soins, le lavant dans l’eau pour le purifier, le frottant avec du sel pour sécher la peau et le fortifier, et l’enveloppant de langes. Ezech., xvi, 4. Cf. S. Jérôme, Comment, in Ezech., xvi, 4, t. xxv, col. 127-128, et Knabenbauer, Comment, in Ezechielem prophetam, Paris, 1890, p. 147-148 ; Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, 1881, p. 301. Pour les langes, Job, xxxviii, 9 ; Sap., vii, 4 ; Luc, ii, 7 et 12. Celui qui annonçait au père la naissance d’un fils était accueilli avec joie et recevait quelque présent, comme c’est encore la coutume dans diverses parties de l’Orient. Cf. Jer., xx, 15. Le père ou le grand-père prenait ensuite le nouveau-né sur ses genoux, probablement en signe de reconnaissance et d’adoption. Gen., L, 22 ; Job, iii, 12 ; Ps. xxi, 11. À leur défaut, la grand’mère remplissait ce devoir. Ruth, iv, 16. Les fils de la servante étaient adoptés de la même manière par l’épouse principale, qui lui avait cédé ses droits auprès de son mari. Gen., xxx, 3. Voir Enfantement.

4° Fêtes de la naissance. — Le jour de la naissance d’un enfant, surtout si c’était un garçon, était un jour de joie, et les riches en fêtaient l’anniversaire, Job, i, 4 ; Matth., xiv, 6 ; Marc, vi, 21, selon une coutume qui existait aussi dans d’autres pays. Gen., xi., 20 ; II Mach., vi, 7 ; Hérodote, i, 133 ; Xénopbon, Cyrop., i, 3, 9. Voir t. i, col. 648-649. En Orient, les parents et les amis font souvent des présents au nouveau-né, comme le firent les mages à l’enfant Jésus. Matth., ii, 11. Dans les premiers temps, on donnait un nom à l’enfant aussitôt après sa naissance. Gen., iv, 1 ; xvi, 15 ; xxv, 25 ; xxxv, 18. Après l’institution de la circoncision, les fils des Hébreux reçurent leur nom le huitième jour de leur existence ; les parents le leur donnaient, tantôt le père, tantôt la mère. Luc, i, 31, 60, 62 et 63. L’enfant mâle devait être circoncis le huitième jour. Gen., xvii, 12 ; xxi, 4 ; Lev., xii, 3 ; Luc, ii, 21. Voir Circoncision, col. 774. Quarante jours après leur naissance, on était tenu d’offrir à Dieu un sacrifice pour le rachat des premiers-nés mâles. Lev., xii, 6 ; Luc, ii, 22-24. Voir Purification.

5° Allaitement. — L’enfant était ordinairement allaité par sa mère, Job, iii, 12 ; Ps. cxxx, 2 ; Is., xi, 8, et les femmes juives ne se dispensaient pas de cette loi de la nature. Gen., xxi, 8 ; I Reg., i, 22-23 ; III Reg., iii, 21 ; Ose., i, 8. Cf. I Thess., ii, 7. On ne donnait l’enfant à une nourrice que si la mère était morte ou malade. Cf. Exod., ii, 7-9. Rébecca avait une nourrice, qui l’accompagna auprès d’Isaac, et dont la mort fut pleurée comme celle d’un membre de la famille. Gen., xxiv, 59 ; xxxv, 8. Voir Débora 1, col. 1331. Deux princes, Miphiboseth, fils de Jonathas, II Reg., iv, 7, et Joas, IVReg., xi, 2 ; II Par., xxii, 11, eurent eussi des nourrices. Calmet,

Dictionnaire de la Bible, édit. Migne, Paris, -1845, t. i, au mot Allaitement, p. 304, pense que ces " nourrices étaient seulement des esclaves ou des gouvernantes, à qui était confié le soin d’élever ces enfants. Il appuie son sentiment principalement sur le fait de Noémi, "qui dans sa vieillesse fut la nourrice du fils de Booz. Rufh, iv, 16. La durée de l’allaitement était relativement longue. La mère de Moïse rendit à la fille de Pharaon l’enfant déjà grand. Exod., ii, 0. Anne, mère de Samuel, nourrit son fils deux ans. I Reg., i, 23 et 24. La mère des Machabées allaita le plus jeune de ses fils pendant trois ans. II Mach., vii, 27. On peut penser que ce n’était pas la règle ordinaire, et que c’est par l’effet d’une tendresse spéciale que cette femme avait prolongé le temps de

508. — Égyptienne portant son enfant sur les épaules. D’après une photographie. Cf. fig. 133, col. 2189.

l’allaitement de son dernier enfant. Cependant le scribe Ani, parlant à son fils du respect et de l’amour filial qu’il doit à sa mère, lui dit : « Elle t’a porté comme un véritable joug, sa mamelle dans ta bouche pendant trois années. » F. Lenormant, Histoire ancienne de l’Orient, 9° édit., t. iii, Paris, 1883, p. 142. Il en résulterait que la durée de l’allaitement aurait été de trois ans chez les Égyptiens. Aujourd’hui encore, en Orient, les enfants sont allaités par leurs mères pendant trois années. Selon les rabbins, la durée nécessaire de l’allaitement était de deux ans ou de dixhuit mois. Talmud de Jérusalem, Guitin, vii, 7, trad. Schwab, t. ix, Paris, 1887, p. 55-56. La mère ou sa servante porte l’enfant, non pas ordinairement dans ses bras, mais, comme on le fait encore aujourd’hui en Palestine, sur ses épaules (fig. 568), ou suspendu à son dos (fig. 569), ou sur son sein (fig. 570). Num., xi, 12 ; Is., xlix, 22 ; Lam., ii, 12. Le père le porte aussi exceptionnellement. Deut., i, 31. Cf. Ose., xi, 2.

6° Sevrage. — Le festin qu’Abraham donna, lorsque Isaac fut sevré, Gen., xxi, 8, autorise à penser que le sevrage des enfants était célébré dans la famille par une fête et

des réjouissances. Une fois sevré, l’enfant, ne demandant plus constamment le sein de sa mère, est calme et garde une attitude paisible et résignée. Ps. cxxx, 2. On ne lui donnait pas l’instruction aussitôt après le sevrage, Is., xviii, 9, et il restait encore avec sa mère, la fille habituellement jusqu’à son mariage, le fils probablement jusqu’à l’âge de cinq ans. Cf. Prov., xxxi, 1 ; Hérodote, i, 136 ; Strabon, XV, iii, 17. Son éducation physique et morale exigeait beaucoup de soins et causait aux parents une grande sollicitude. Sap., vil, 4. Dans les familles opulentes, il était placé sous la direction d’un ou plusieurs gouverneurs (’ômnîm). IV Reg., x, 1, 5 ; cf. Is., xi.ix, 23 ; Gal., iii, 24. L’enfant, abandonné à lui-même, ne pouvait attirer que de la confusion à sa mère. Prov., xxix, 15. Voir

a-f

569. — Enfant porté suspendu au dos de sa mèrel D’après une photographie.

Éducation et Écoles. Simon, L’éducation et l’instruction des enfants chez les anciens Juifs, 1879.

7° Droits du père sur l’enfant, — Le père, qui était le chef naturel de la famille, jouissait de droits très étendus sur ses enfants. Ceux-ci travaillaient pour son compte et lui obéissaient en serviteurs soumis. Les jeunes filles gardaient les troupeaux dans les familles ordinaires, Gen., xxix, 9 ; Exod., ii, 16 ; elles allaient chercher l’eau à la fontaine, comme elles le font encore aujourd’hui, Gen., xxiv, 15-20 ; elles s’occupaient de cuisine. II Reg., irai, 8-9. Voir Cuisinier, col. 1151. Cf. Palestine Exploration-Fund, Quarterly Stalement, 1881, p. 301. La loi accordait au père le droit d’annuler les vœux de sa fille, Num., xxx, 4-6 ; elle lui permettait même de la vendre pour un temps comme esclave. Exod., xxi, 7. Mais elle lui enlevait le droit de vie et de mort sur ses enfants. Le père dont l’autorité était méprisée devait accuser le rebelle devant les anciens, qui jugeaient la cause, et le peuple était chargé d’exécuter la sentence et de lapider le coupable. Deut., xxi, 18-21. i. D. Michælis, Mosaisches Recht, 3e édit., Francfort-sur-le-Mein, 1793, t.ii, p. 103-108. Le pouvoir paternel cessait pour les filles au moment de leur mariage ; pour les fils, il durait jusqu’à la mort du.

père. Les enfants héritaient des biens de leurs parents. Voir HÉRITAGE. Cf. J.-B. Glaire, Introduction historique et critique aux livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, 2e édit., Paris, 1843, t. ii, p. 356-365 ; S. Munk, Palestine, Paris, 1881, p. 376-377 ; Trochon, Introduction générale, Paris, 1887, t. ii, p. 358-362 ; card. Meignan, De Moïse à David, Paris, 1896, p. 132-135.

III. Condition morale de l’enfant. — Par une conséquence rigoureuse de sa descendance d’Adam, l’enfant est pécheur ; il a été conçu dans le péché, Ps. l, 7, et lvh, 4, et il est impur. Job, xiv, £. Ses sentiments sont charnels, et il a besoin d’une régénération spirituelle. Joa., m, 9. Voir Péché originel et Baptême. Il a apporté en naissant de mauvaises tendances, que l’éducation peut et

670. — Mère portant un de ses enfants suspendu sur son dos et l’autre sur son sein. D’après une photographie.

doit réprimer. Prov. xxil, 15. On peut juger d’après ses inclinations quelles seront l’innocence et la rectitude des actes de toute sa vie, Prov., xx, 11, et c’est dans le bas âge qu’il contracte des habitudes dont il lui est difficile de se défaire. Prov., xxil, ’6. Toutefois, avant qu’il n’ait fait usage de sa raison, il est exempt de toute faute personnelle ; il est innocent, pur et confiant. Son âme, à la vue des merveilles de la création, s’élève naturellement vers Dieu, qui tire des enfants encore à la mamelle une louange parfaite à la confusion des impies. Ps. viii, 3. Au jour des Rameaux, les enfants acclament Jésus au Temple de Jérusalem, alors que les prêtres se taisent et ne reconnaissent pas l’envoyé de Jéhovah. Matlh., xxi, 16. Jésus, du reste, avait eu pour les enfants une prédilection marquée, en raison de leur simplicité, de leur humilité et de leur candeur. Quand ses disciples discutaient sur la première place dans l’Église, il appela un petit enfant, le plaça au milieu d’eux et, le caressant, le leur proposa pour modèle. Celui qui ressemblera à l’enfant, qui en aura la simplicité et l’humilité, sera le premier et le plus grand dans le royaume des cieux. Jésus tire ensuite les conséquences pratiques de ce principe et dé clare que recevoir un de ces petits, le bien traiter pour l’amour de lui, c’est le recevoir lui-même, et que scandaliser une de ces âmes innocentes et pures, c’est un crime digne d’une sévère punition. Il faut donc avoir soin de ne pas mépriser une seule de ces faibles créatures, que Dieu a confiées à la garde spéciale de ses anges. Matth., xviii, 2-6, 10, Marc, ix, 35, 36 et 41. Aussi quand les mères lui apportaient leurs petits enfants pour les bénir et prier pour eux, Jésus s’indignait contre ses disciples, qui les écartaient de lui, et il déclarait hautement que pour entrer dans le royaume des cieux il fallait leur ressembler. Puis il les caressait et leur imposait les mains. Matth., xix, 13-15 ; Marc, x, 13-16 ; Luc, xviii, 15-17. L’enfant, dont la sensibilité est plus développée que l’intelligence, juge les objets d’après les apparences, leur beauté et leur agrément. C’est pourquoi, au sujet de la glossolalie ou du don de parler les langues, saint Paul recommande aux Corinthiens de n’être pas des enfants par le jugement et l’appréciation, mais seulement par la malice. Si l’enfant se trompe, il n’a pas l’intention de nuire. Le chrétien doit être parfait dans son jugement, qui est porté avec réflexion et prudence ; qu’il ait seulement la malice de l’enfant, c’est-à-dire qu’il n’en ait pas. I Cor., xiv, 20. Dans le même ordre d’idées, saint Pierre exhorte ses lecteurs à dépouiller toute malice et toute fraude et à désirer comme les nouveaunés le lait spirituel de la doctrine évangélique, qui les fera croître en JésusChrist pour le salut. I Petr., ii, 1 et 2.

IV. Devoirs de l’enfant. — 1° En vertu de la loi naturelle. — Les liens d’étroite dépendance que la nature a établis entre les parents et les enfants servirent dès l’origine à régler les devoirs des uns à l’égard des autres, et notamment l’amour et le respect que les enfants devaient porter à leurs parents. Cham fut maudit parce qu’il avait manqué à cette loi ; Sem et Japhet furent bénis parce qu’ils l’avaient observée. Gen., IX, 20-27. Isaac obéit à son père Abraham, qui va l’immoler, Gen., xxil, 9 ; plus tard il reçoit l’épouse que le choix paternel lui destine, et seul son mariage avec Rébecca est capable de tempérer la douleur que lui avait causée la mort de sa mère. Gen., xxiv, 67. Moins soumis, Ésaù prend des femmes qui déplaisent à ses parents. Gen., xxvi, 34-35 ; mais Jacob se rend au désir de sa mère et va en Mésopotamie pour s’unir avec une fille de sa famille. Gen., xxviii, 7. Joseph, comblé d’honneurs en Egypte, honore son père, qu’il aimait tendrement. Gen, , xlv, 3, 9, 13 ; xlvi, 29.

2° D’après la loi mosaïque. — Quand Dieu promulgua la loi morale aux Israélites sur le mont Sinaï, il inscrivit au Décalogue les devoirs des enfants envers leurs parents, et il les plaça à la suite des commandements qui se rapportent immédiatement à lui : « Honore ton père et ta mère, afin que tu vives longtemps sur la terre. » Exod., xx, 12. Cf. Deut., v, 16. L’honneur dû aux parents comprend l’amour, l’obéissance, l’assistance ; en un mot, tous les devoirs que la nature impose aux enfants. La crainte filiale et respectueuse est spécialement commandée. Lev., xix, 3. Le quatrième précepte du Décalogue est le premier à qui Dieu ait attaché une récompense spéciale. Eph., vi, 2. Une longue vie sur terre est promise aux enfants qui honorent leurs parents. Cette promesse divine est bien appropriée à l’obligation qu’elle sanctionne : il convient de prolonger la vie de ceux qui respectent les auteurs de leurs jours. Les anciens Égyptiens connaissaient aussi cette promesse, car on lit sur le papyrus Prisse cet adage : « Le fils qui reçoit bien les ordres de son père vivra longtemps. » F. de HummeJauer, Comment, in Exod. et Levil., Paris, 1897, p. 204. Ce précepte divin fut renouvelé plusieurs fois, et des peines sévères furent infligées aux enfants qui ne l’observaient pas. « Maudit soit celui qui n’honore pas son père et sa mère, s Deut., xxvii, 16. Le fils qui maudit son père et sa mère, Exod., XXI, 17 ; Lev., xx, 9 ; celui qui les frappe, Exod., XXI, 15,

sont dignes de mort. Le code assyrien punissait aussi très sévèrement les fils qui ne voulaient pas reconnaître leurs père et mère. Lenormant-Babelon, Histoire ancienne de l’Orient, 9e édit., t. v, Paris, 1887, p. 87. Cf. J. D. Michælis, Mosaisches Recht, 3e édit., Francfort-sur-le-Mein, 1793, t. vi, p. 101-1(6.

3° D’après les livres sapientiaux. — Cette loi a été généralement observée en Israël. — 1. Salomon, qui honorait sa mère et se prosternait à ses pieds, III Reg., ii, 19, recommande aux enfants d’écouter les instructions de leurs parents et de suivre leurs conseils. Il compare l’obéissance filiale à une couronne de grâce sur la tête et à un collier précieux autour du cou. Prov., i, 8 et 9. Les enfants doivent attacher à leur cœur, lier à leur cou et pratiquer jour et nuit les ordres de leurs parents. Prov., vi, 20-22 ; ils doivent écouter aussi leurs réprimandes, Prov., xiii, 1 ; car l’enfant sage est le fruit de la discipline paternelle. Les enfants sages font le bonheur de leurs parents, les insensés causent leur malheur. Prov., x, 1 ; xv, 20 ; xix, 13 ; xxiii, 24 et 25. Salomon rappelle en particulier que l’enfant ne doit rien dérober à ses parents, Prov., xxviii, 24, et qu’il ne doit pas mépriser sa vieille mère. Prov., xxiii, 22. Il répète les terribles sanctions de la loi mosaïque. Si un fils maudit son père ou sa mère, son flambeau s’éteindra au milieu des ténèbres. Prov., XX, 20. Celui qui afflige son père et fait fuir sa mère est infâme et malheureux ; son crime entraîne à sa suite la honte et le malheur. Prov., xix, 26. Celui qui soustrait quelque chose à son père ou à sa mère, sous prétexte que ce n’est pas un péché, est aussi coupable que l’homicide. Prov., xxviii", 24. Que l’œil du fils qui insulte son père et méprise celle qui lui a donné le jour soit arraché par les corbeaux du torrent et dévoré par les petits de l’aigle. Prov., xxx, 17. — Si Israël a été puni et emmené en captivité, c’est qu’il avait violé les préceptes divins, notamment celui qui ordonne aux enfants de respecter leurs parents. Ézech., xxii, 7. Les Réchabites sont loués d’avoir observé fidèlement les ordonnances particulières et les engagements de leur père. Jer., xxxv, 16. — 2. L’auteur de l’Ecclésiastique a renouvelé les recommandations de Salomon. Il a décrit en termes précis les devoirs des enfants envers leurs parents et les bénédictions que leur accomplissement attire sur les enfants. Le principe de ces devoirs, c’est l’autorité de Dieu, qui a rendu le père digne d’honneur aux yeux de ses enfants et qui a donné à la mère le droit de commander à ses fils. Les avantages que procurent aux enfants l’obéissance et le respect envers leurs parents sont nombreux : l’observation du quatrième précepte procure le salut de l’àmè, l’expiation du péché, l’acquisition de mérites, la bénédiction paternelle, la joie dans les enfants et une longue vie sur terre. La pratique du devoir filial consiste à honorer et à respecter les parents eu actes et en paroles, à leur obéir, à les supporter patiemment et à les assister, surtout dans la vieillesse. Il est infâme celui qui abandonne son père, et Dieu maudit celui qui irrite sa mère. Eccli., iii, 2-18. « Honore ton père et n’oublie pas les douleurs de ta mère. Souviens-toi que sans eux tu ne serais pas né, et rendsleur les soins dont ils t’ont entouré. » Eccli., vii, 29 et 30. C’est surtout au milieu des grands qu’il ne faut pas oublier ses parents, de peur d’être humilié. Eccli., xxiii, 18 et 19. Un fils ne doit rien faire sans consulter ses parents. Eccli., xxxii, 24. Qu’heureux est l’homme qui trouve sa joie et sa consolation dans ses enfants ! Eccli., xxv, 10.

4° D’après le Nouveau Testament. — La loi chrétienne, loin d’abroger le quatrième commandement du Décalogue, l’a confirmé et perfectionné. — 1. Jésus, qui fut toujours soumis à Marie et à Joseph, Luc, ii, 51, a joint le précepte à l’exemple. Il a blâmé fortement les pharisiens, qui, par un faux attachement à leurs traditions, transgressaient les ordres de Dieu et se soustrayaient

à l’obligation de venir en aide à leurs parents en promettant ou en offrant au Seigneur ce qu’ils auraient dû employer à l’entretien de leurs père et mère. Voir Corban, col. 958. Une pareille coutume annulait le quatrième précepte. Matth., xv, 3-6. Au jeune homme qui l’interrogeait, Jésus répondit que pour gagner la vie éternelle il fallait observer les commandements de Dieu, et il cita le quatrième, qui ordonne aux enfants d’honorer leurs père et mère. Matth., xix, 19 ; Marc, x, 19 ; Luc, xviii, 20.

— 2. Saint Paul, rappelant aux chrétiens d’Éphèse et de Colosses leurs devoirs moraux, recommandait aux enfants d’obéir à leurs parents selon l’esprit de Jésus-Christ, non pas extérieurement comme les esclaves, mais intérieurement et en tout ce qui n’est pas contraire à la volonté divine. Cette obéissance filiale est juste et légitime, puisqu’elle est commandée par le quatrième précepte du Décalogue et qu’elle est sanctionnée par une promesse de félicité temporelle et de longévité. Eph., vi, 1-3. Il agrée au Seigneur qu’elle soit entière, xatà juàvra, Col., ni, 20.

5° D’après le Talmud. — Les Juifs sont demeurés fidèles à la loi divine du respect envers les parents. La Mischna range la piété filiale au nombre des « devoirs qui donnent à l’homme une puissance dans ce monde et dont la récompense principale est réservée pour la vie future », et la Ghémara du Talmud de Jérusalem, Péa, i, 1, trad. Schwab, t. ii, Paris, 1878, p. 9-13, cite de beaux exemples de cette vertu de la part des rabbins.

E. Mangenot.

    1. ENFANTEMENT##

ENFANTEMENT (Septante : tôxo ;  ; Vulgate : partus ; l’hébreu n’emploie que des verbes : yâlad, lïôlêl, n’xreiv, parère, parturire), mise au monde d’un enfant. Voir Enfant. — 1° L’enfantement est devenu douloureux, en punition de la faute originelle. Gen., iii, 16. Rachel meurt en enfantant Benjamin. Gen., xxxv, 16-19. Les écrivains sacrés comparent souvent les grandes douleurs à celles de l’enfantement, quoiqu’elles soient moins vives dans les pays d’Orient qu’en Occident. Exod., i, 19 ; Burckhardt, Notes on Bédouins, 2 in-8°, Londres, 1830, t. i, p. 96 ; Deut., ii, 25 ; Ps. xlvti, 7 ; Eccli., xix, H ; xlviii, 21 ; Is., xiii, 8 ; xxi, 3 ; Jer., vi, 24 ; xiii, 21 ; xxii, 23 ; xlviii, 41 ; xlix, 22, , 24 ; l, 43 ; Ezech., xxx, 16 ; Os., xiii, 13 ; Mich., iv, 9, 10. — 2° La douleur de l’enfantement est suivie de la joie que cause la naissance de l’enfant. Joa., xvi, 21. — 3° L’enfantement est attribué au Seigneur, Rulh, iv, 13 ; cf. Is., lvi, 9 ; particulièrement quand il s’agit d’un enfantement extraordinaire ou miraculeux, comme ceux de Sara, Gen., xvii, 17, 19 ; xxi, 2 ; d’Anne, mère de Samuel, I Reg., i, 19, 20 ; d’Elisabeth, Luc, i, 13 ; et surtout de la Vierge Marie, Is., vu, 14 ; Matth., i, 20, 21. Cf. pour les animaux Job, xxxix, 1-3 ; Ps. xxviii, 9. Voir Cerf, col. 446-447. — 4° Métaphoriquement, enfanter s’emploie dans le sens de produire : IV Reg.jXix, 3 ; le méchant enfante l’iniquité, Job, xv, 35 ; Ps. vii, 15 ; Is., lix, 4 ; Jac, i, 15 ; la bouche du sage enfante la sagesse. Prov., x, 31. — Saint Paul dit qu’il enfante de nouveau les Galates, pour signifier qu’il apporte à leur formation spirituelle tout le dévouement d’une mère. Gai. iv, 19. C’est aussi saint Paul qui compare à l’enfantement l’effort de la création pour échapper à la servitude du péché. Rom., viii, 20-22. — La production des fruits par la terre et par les arbres est comparée à un enfantement. Is., lvi, 8 ; Cant., vii, 12.

H. Lesêtre.

ENFER. Ce terme désigne dans l’Ancien Testament le séjour des morts en général. Il désigne dans le Nouveau Testament le séjour des morts qui ne possèdent point la béatitude du ciel. Il faut donc distinguer entre les enseignements de l’Ancien et ceux du Nouveau Testament. Sur les croyances des anciens Hébreux et des premiers chrétiens relatives à l’autre vie, voir Ame, t. i, col. 461.

I. L’ekfer suivant l’Ancien Testament. — L’Ancien

Testament attribue une habitation commune à tous les morts. Cette habitation est appelée en hébreu se’ôl, terme qui dérive de Sâ’al, soit qu’on prenne ce mot dans le sens de « creuser », car l’enfer est une caverne souterraine ; soit qu’on entende ce mot dans le sens de « demander », car c’est un lieu insatiable, qui réclame toujours de nouvelles victimes. Les Septante ont traduit se’ôl par le terme Sôr) ; , qui désignait chez les Grecs le lieu où se rendaient les âmes après la séparation du corps. Deux fois cependant, II Reg., xxii, 6, et Prov., xxiii, 14, ils l’ont traduit par OôcvaTo ; , « mort. » Ils ont omis de le rendre dans deux autres passages. Job, xxiv, 19 ; Ezech., xxxii, 21. Les Livres Saints écrits en grec se sont servi du mot âôiriç dans le même sens que les Septante. La Yulgate a traduit les termes se’ôl et £Si] « par infemus, inferi, inferus, que nous rendons ordinairement en français par le mot « enfer ».

Les croyances des anciens Israélites sur l’enfer n’ont pas varié pour le fond ; mais elles se sont développées dans la suite des temps. — 1° Le pentateuque considère surtout les choses communes à tous les morts dans ce séjour ; 2° sans modifier cette conception, le livre de Job, xix, 23-27, célèbre le libérateur qui arrachera les justes au Se’ôl et à l’empire de la mort ; 3° les prophètes s’arrêtent à décrire les châtiments qui sont spécialement réservés aux grands criminels ; 4° les livres deutérocanoniques, écrits dans les derniers siècles qui précédèrent la venue du Christ, font ressortir de leur côté une sorte de récompense que les justes recevaient déjà dans le se’ôl ; ils parlent de la puriScation de certaines âmes en enfer et même de la gloire et de la puissance qu’y possèdent ceux qui ont vécu saintement.

1° Pentateuque. — Il représente l’enfer comme un lieu souterrain, Gen., xxxvii, 35 ; Num., xvi, 30, plus ou moins profond, Deut., xxxii, 22, où les défunts se trouvent ensemble. Aussi ditil de ceux qui meurent, qu’ils sont réunis à leurs pères, Gen., xv, 15 ; Deut., xxxi, 16, ou à leur peuple. Gen., xxv, 8, 17 ; xxxv, 29 ; xlix, 29, 32 ; Num., xx, 24 ; xxvii, 13 ; xxxi, 2 ; Deut., xxxii, 50. On en a conclu que le rédacteur du Pentateuque ne distinguait pas entre le tombeau et l’enfer. Mais plusieurs passages prouvent qu’il ne confondait pas ces deux choses. Ainsi Jacob croit que son fils Joseph a été dévoré par une bête féroce, et par conséquent qu’il n’est pas dans un tombeau. Il s’écrie néanmoins dans sa douleur : « Je descendrai, plein de désolation, auprès de mon fils dans lese’ôï. » Gen., xxxvii, 35 ; cf. Gen., xxv, 8, 17 ; xlix, 32 ; Num., xx, 21 ; Deut., xxxii, 50 ; xxxiv, 6. — Cette réunion aux ancêtres dans le se’ôl était un sujet d’appréhension pour tous les hommes. N’en soyons point surpris, puisque la mort était pour tous les fils d’Adam un châtiment du péché, Gen., iii, 3, 19, et qu’avant leur libération par le Christ aucun des justes de l’Ancien Testament ne devait entrer dans le ciel. Cependant la vie d’outre - tombe paraissait moins redoutable à ceux qui avaient servi Dieu sur la terre. Ils finissent leurs jours en paix. Gen., xv, 15. Ils espéraient d’ailleurs le salut, qui devait venir à leur peuple du Seigneur. Gen., xlix, 18. Aussi désirait-on mourir de la mort des justes. Num., xxiii, 10. — La conception de l’enfer, qui se manifeste dans le Pentateuque, est la même, sans changement appréciable, dans le livre des Juges et dans ceux des Rois.

2° Livres moraux hébreux. — Elle se retrouve aussi, mais sous des traits plus accentués, dans les Psaumes, les Proverbes, l’Ecclésiaste et Job. D’après la description poétique que ces livres nous en font, le se’ôl s’enfonce dans les profondeurs de la terre, Ps. xlviii, 18 ; Liv, 16 ; lxii, 10 ; lxxxv, 13 ; lxxxvii, 7 ; cxxxviii, 8 ; Job, xvii, 16 ; Prov., ix, 18 ; c’est un lieu ténébreux, où la lumière ne pénètre jamais, Job, x, 21, 22 ; Ps. xlviii, 20 ; lxxxvii, 13 ; c’est une demeure dont l’entrée est fermée par des portes. Ps. ix, 15 ; cvi, 18 ; Job, xxxviii, 17. Une fois qu’on y a

été introduit, il est impossible d’en sortir pour revenir à la vie. Job, vii, 9, 10. L’enfer est insatiable. Prov., xxvii, 20 ; xxx, 15, 16. C’est la maison où se rendent tous les vivants. Job, xxx, 23. Ceux qui l’habitent sont appelés refa’îm, es les faibles, » de la racine râfâh, « défaillir. » Prov., ix, 18 ; xxi, 16 ; Job, xxvi, 5. Ils ne sont point complètement privés de sentiment, Job, xiv, 22 ; mais ils sont faibles et sans voix, comme des êtres qui dorment, Job, m, 13, 17, 18 ; ils ne savent plus rien de ce qui se passe sur la terre, Job, xiv, 21 ; Eccl., ix, 5, 6, 10 ; ils ne louent plus leur Dieu. Ps. vi, 6 ; xxix, 10 ; lxxxvii, 11 ; cxiii, 17. Le se’ôl est aussi appelé la perdition, Job, xxi, 30 ; le puits de la destruction, Ps. liv, 24 ; le lieu des ténèbres, Ps. evi, 10 ; la terre de l’oubli. Ps. lxxxvii, 13. Mais la différence du sort des bons et des méchants qui y sont réunis n’est pas encore exprimée beaucoup plus clairement dans les livres qui nous occupent que dans le Pentateuque. Seulement ces livres expriment d’une manière plus nette et avec plus d’assurance l’espérance d’un libérateur. C’est sur ce point que les croyances se sont développées. Le Psalmiste sait que Dieu connaît la voie des justes, Ps. I, 3-6 ; il célèbre sa miséricorde éternelle, Ps. cxxxv ; il espère être arraché au se’ôl, obtenir la vie bienheureuse et l’union à Dieu. Ps. xvi, 15 ; xlviii, 15-16 ; lxxii, 24-25 ; xv, 9, 10. Néanmoins, en dehors de cette espérance, il ne fait pas ressortir que dans le se’ôl même il y ait un sort particulier pour les pécheurs et un sort différent pour les hommes justes. Il semble faire consister tout son espoir à être arraché à ce séjour des morts. Le même sentiment anime Job. Son cœur est rempli de confiance en la résurrection, qui le délivrera de la mort et lui permettra de voir Dieu. Job, xix, 25. Ainsi c’est uniquement une attente plus précise de la délivrance des morts par le Messie rédempteur, qui s’ajoute dans ces écrits à la notion que le Pentateuque nous avait donnée de l’enfer où ils habitent.

3° Les prophètes. — Ils continuèrent à voir dans le Se’ôl la demeure souterraine commune à tous les morts. Les refa’îm sont là, Is., xiv, 9 ; xxvi, 14, 19, endormis, Is., xiv, 8 ; Ezech., xxxi, 18 ; xxxii, 21, 28, 30, impuissants en général à connaître ce qui se passe parmi les vivants. Is., lxiii, 16. Cependant un écho des grands événements de la terre arrive parfois jusqu’à eux ; ils s’éveillent pour s’en entretenir, dit Isaïe, xiv, 9-15. Cf. Jer., xxxi, 15, 16. Mais ce qui est plus caractéristique dans les écrits des prophètes, c’est qu’ils insistent sur les châtiments dont les crimes des impies seront punis dans le Se’ôl. Ces malheureux, suivant Isaïe, sont au fond de l’abîme, Is., xiv, 15, enfermés ensemble comme dans une prison. Is., xxiv, 21, 22. Ézéchiel fait aussi ressortir l’horreur du sort réservé aux ennemis de Dieu. Ezech., xxxii, 18-32. Cependant, lorsqu’ils parlent des temps qui suivront la venue du Messie libérateur, ils annoncent aux pécheurs des peines plus terribles. Suivant Daniel, le même jugement de Dieu qui donnera aux justes les joies et la gloire d’une vie éternelle, précipitera les impies dans la damnation sans fin. Dan., xii, 2, 3. En parlant de ces derniers temps où s’exercera la justice de Dieu, Isaïe ne représente plus seulement l’enfer sous l’image d’une dure prison, mais sous celle d’un bûcher. Les pêcheurs habiteront au milieu d’un feu dévorant et de llammes éternelles, Is., xxxiii, 14 ; leur ver ne mourra point, et leur feu ne s’éteindra pas. Is., lxvi, 24. Tous périront comme un vêtement usé ; la teigne les dévorera. « Vous tous, dit le prophète, qui avez allumé le feu, qui êtes entourés de llammes, marchez à la lumière de votre feu et dans les flammes que vous avez excitées, les douleurs seront votre couche. C’est ma main qui vous a ainsi traités. Vous dormirez dans les douleurs. » Is., L, 9, 11 ; cf. Is., ix, 17-21 ; Jer., vii, 32 ; xv, 14 ; xvii, 4 ; Zach., xiv, 2-5. On reconnaît là les traits sous lesquels l’enfer devait être dépeint dans l’Évangile.

4° Les livres deutérocanoniques de l’Ancien Testa*

H. - 57

1795

ENFER — ENGADDI

1796

ment. — Ils reproduisent les enseignements que nous venons de signaler dans les livres antérieurs. Ils menacent les impies d’affreux châtiments ; le feu et le ver dévoreront leur chair. Eccli., vii, 19. Mais ce qui nous frappe, c’est qu’ils font ressortir les récompenses que les saintes âmes trouveront déjà dans le se’ôl. L’Ecclésiastique assure que le juste sera bien traité, qu’il sera béni de Dieu au jour de sa mort. Eccli., i, 13. La Sagesse va même jusqu’à dire que la mort prématurée du juste est une grâce de la miséricorde de Dieu, qui l’aimait et l’a retiré du milieu des méchants. Sap., iv, 7-17. Le second livre des Machabées ajoute sur l’état des morts avant la résurrection deux traits importants, où apparaît la bonté de Dieu vis-à-vis de ses amis défunts et les rapports de ceux-ci avec les vivants. Judas Machabée voit, dans un songe, Jérémie entouré de gloire, qui prie pour le peuple d’Israël avec un autre défunt, le grand prêtre Onias. II Mach., xv, 12-14. Le même Judas Machabée, plein d’espérance en la résurrection, fait offrir un sacrifice pour plusieurs de ses soldats, qui étaient tombés sur le champ de bataille après avoir violé la loi de Dieu. Le texte sacré en conclut que c’est une sainte et salutaire pensée de prier pour les morts, afin qu’ils soient délivrés de leurs péchés. II Mach., xii, 42-46.

Les Juifs de cette époque distinguaient donc trois classes de trépassés, qui tous habitaient l’enfer : des justes qui, comme Jérémie, étaient dans un état heureux et pouvaient secourir les vivants par leurs prières ; d’autres justes, comme les soldats de Judas Machabée, coupables de fautes légères qui ne les empêcheraient pas de prendre part à la résurrection glorieuse, et dont ils pouvaient être délivrés par les prières des vivants ; enfin des criminels qui ont mérité la peine du feu. Les textes ne disent pas qu’ils la souffrent aussitôt après leur mort ; mais ils donnent lieu de le supposer, puisqu’ils accordent un sort si heureux aux justes dès avant la résurrection. — On voit donc que les croyances exprimées dans l’Ancien Testament relativement au séjour des morts se sont développées d’une façon sensible à mesure qu’approchaient les temps messianiques. Les anciens Hébreux n’entrevoyaient guère dans l’enfer que son côté redoutable, parce qu’à leurs yeux la mort était toujours le châtiment du péché. Les Juifs des derniers temps, mieux instruits des règles de la justice de Dieu, apprirent que même avant la résurrection il y avait une différence profonde entre l’état des méchants et celui des saints. Cependant, malgré les obscurités de la conception que les contemporains de Moïse et de David se formaient de l’autre vie, ils n’y mêlèrent aucun des éléments mythologiques qui entrèrent dans les croyances de tous les peuples païens. Aux yeux des enfants d’Israël, l’enfer ne fut jamais autre chose que le lieu où la justice de Jéhovah s’exerçait vis-à-vis des défunts.

II. L’ENFER SUIVANT LE NOUVEAU TESTAMENT. — Il y a

une notable différence entre le sens que prit le terme « enfer » dans le Nouveau Testament, et le sens qu’il avait antérieurement à la venue du Christ. L’Ancien Testament appelait « enfer » le séjour commun à tous les morts. Les chrétiens croient que le Christ a tiré les justes de l’enfer et qu’il leur a ouvert les portes du ciel. Voir Ciel. Par suite, l’enfer ne sert plus d’habitation qu’aux défunts qui ne sont pas au ciel. C’est ainsi qu’il est représenté par les Évangiles, par les Épîtres des Apôtres et par l’Apocalypse. Néanmoins, dans la parabole du bon et du mauvais riche, Luc, xvi, 19-31, le Christ s’exprime encore conformément à la croyance des Juifs de son temps, qui resta d’ailleurs vraie jusqu’à sa mort. Il place donc le juste Lazare dans le sein d’Abraham, c’est-à-dire dans la partie du Se’ôl qui était habitée par les âmes saintes et que nous nommons les « limbes ». Voir Abraham (Sein d’). Les Actes et les Épltres des Apôtres parlent aussi de l’ancien Se’ôl, lorsqu’ils font allusion à la descente de Jésus dans les profondeurs de la terre, Ephes.. iv, 9 ; à son séjour passager dans l’iJSr, ; , Act., - ii, 24, dans la prison

f où étaient les âmes de ceux qui avaient péri dans le déluge. I Petr., ii, 19. Mais les autres passages du Nouveau

! Testament considèrent l’enfer comme le séjour des dam : nés. Ce lieu, nommé 56r, ; dans la parabole du mauvais

riche, Luc, xvj, 22, 23, est appelé le plus souvent « géhenne », yéevva, "^>ar le Sauveur. Matth., v, 29, 30 ; x, 28 ; Luc, XII, 5 ; cf. Jac, iii, 6. Ce nom était celui d’une vallée proche de Jérusalem, où les Juifs avaient autrefois brûlé leurs enfants en l’honneur de Moloch, et que le roi Josias avait fait souiller pour empêcher ces pratiques idolâtriques. IV Reg., xxiii, 10 ; cf. Jer., vii, 32 ; xix, 11-14. C’était, semble-t-il, un terme usité en Palestine, au temps de Notre - Seigneur, pour désigner l’enfer des impies. Saint Pierre appelle cet enfer « Tartare ». II Petr., ii, 4. Il est aussi nommé « l’abîme », Luc, viii, 31 ; Apoc, , . ix, 11 ; xx, 1, 3 ; « la fournaise de feu, » Matth., xiii, 42, 50 ; s l’étang de feu et de soufre, » Apoc, xix, 20 ; xx, 9 ; xxi, 8, et « la seconde mort », Apoc, ii, 11 ; xx, 6, 14 ; xxi, 8, c’est-à-dire la mort sur laquelle il n’y a point de délivrance.

Les écrits du Nouveau Testament répètent en plusieurs endroits les mêmes enseignements sur l’enfer. C’est le lieu de supplice des démons et des réprouvés. Matth., xxv, 41. Les pécheurs y descendent aussitôt après leur mort. Luc, xvi, 22. Ils y souffrent dans leur corps et dans leur âme, Matth., x, 28, au milieu d’épaisses ténèbres, Matth., xiii, 12 ; xxii, 13 ; xxv, 30, des tortures affreuses, Matth., viii, 12 ; xiii, 50 ; xxii, 13 ; xxiv, 51 ; xxv, 30 ; Luc, viii, 28, du ver qui ne meurt point et du feu qui ne s’éteint jamais. Marc, ix, 43, 45, 47. Les textes sacrés insistent sur ce supplice du feu et’sur l’éternité de l’enfer. Matth., xviii, 8 ; xxv, 41 ; Jude, 7 ; Apoc, XIX, 3, etc. Le Christ déclare cependant que le châtiment ne sera pas égal pour tous, mais qu’il sera proportionné aux fautes de chacun. Matth., x, 15 ; xi, 21-24 ; Luc, x, 12-15 ; xii, 47, 48 ; Apoc, xviii, 6, 7.

Lorsque le Sauveur a laissé entendre que certaines fautes seraient remises en l’autre monde, Matth., xii, 32 ; Marc, iii, 29, il ne parlait pas des péchés punis par le feu de l’enfer ; autrement il n’aurait pu enseigner ailleurs que ce feu serait éternel. Les péchés dont il a admis la rémissibilité après la mort sont les mêmes fautes légères dont les prières des vivants peuvent délivrer les trépassés, suivant le second livre des Machabées, xii, 42-46. Ceux qui n’ont pas commis d’autres fautes évitent donc la géhenne éternelle ; ils vont dans le lieu d’expiation que l’Église nomme purgatoire. — Voir Stentrup, Prselectiones dogmaticx, Soteriologia, in-8°, Inspruck, 1889, t. i, p. 568-622 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 5e édit., in-12, Paris, 1889, t. iii, p. 151-158 ; Atzberger, Die Christliche Eschatologie in den stadien ihrer Offenbarung, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1890 ; Henri Martin, La vie future, 3 a édit., in-12, Paris, 1870.

A. Vacant.

    1. ENGADDI##

ENGADDI (hébreu : ’En Gédî, « source du chevreau ; » Septante : Codex Vaticanus, ’AvxdiSï) ? ; Codex Alexandrinus, ’HvyaSS : , Jos., xv, 62 ; ’EvyàSSEt, I Reg., xxiv, 1, 2 ; II Par., xx, 2 ; Cant., i, 13 ; Cod. Vat., ’Ivya-Set’v, Cod. Alex., ’Ev-jiSSetv, Ezech., xlvii, 10), ville du désert de Juda, Jos., xv, 62, entourée de rochers d’un accès difficile, I Reg., xxiv, 1, 2, et renommée pour ses vignes. Cant., i, 13. Elle était située sur le bord occidental de la mer Morte, Ezech., xlvii, 10, presque à mi-chemin entre les deux extrémités nord et sud.

I. Nom et identification. — Son nom primitif était Asasonthamar (hébreu : ffasàfôn et tfâsesôn tumeur, « coupe des palmiers ; » Septante : ’Ao-a<rov8a(j.(xp et’A<rao-ov @a(iip). Gen., xii’, 7 ; Il Par., xx, 2. Josèphe, qui l’appelle’Effaô : , Ant.jud., IX, i, 2 ; Bell, jud., IV, vu, 2 ; ’EvysSiiv, Ant.jud., Wl, xiii, 1, et son territoire, ? ! ’EvyeâTivT, , Ant. jud., VI, xiii, 4, la place à trois cents stades (plus de cinquante-cinq kilomètres) de Jérusalem, Ant. jud., IX, i, 2. Eusébe et saint Jérôme, Onomastica

sacra, Gœttingue, 1870, p. 119, 254, nous disent que de leur temps il y avait encore « près de la mer Morte un gros bourg des Juifs appelé Engaddi, d’où venait le baume ». Le nom a subsisté jusqu’à nos jours exactement sous la même forme et avec la même signification : l’arabe ^Jj ». çrs ?, ’Aïn Djedi, « la fontaine

du chevreau, » n’est que la traduction ou la transcription littérale de l’hébreu m J’7, ’En Gèdî. On croit aussi

retrouver le premier élément d’Asasonthamar, Hasâsôn, l’ïïn, dans le nom d’une vallée située au nord d"Aïn

Djedi, Vouadi Hasâsâ, Lo Lo^..

II. Description. — Aïn Djédi est actuellement une

degrés ; elles sont très chargées de carbonate de chaux, malgré leur grande limpidité. Primitivement plus abondantes et plus calcarifères qu’aujourd’hui, elles ont déposé sur tout leur parcours de grandes masses de travertins ou de tufs concrétionnés, qui ont comblé les bassins artificiels destinés à les recevoir dans l’antiquité. Les pierres des bords et du fond sont toutes noires par la présence d’une grande quantité de mollusques : Neritina Michonii, Melanopsis proemorsa, M. Saulcyi, M. rubripun data. De nombreux crabes d’eau douce habitent sous les pierres et au milieu des racines. Ces sources ne renferment point de poissons. Elles forment un ruisseau qui, à sa sortie de terre, coule au milieu d’un épais fourré d’arbustes et de plantes à l’aspect tropical, de

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571. — Fontaine d’Engaddi. D’après une photographie.

oasis située entre Vouadi Sideir au nord et Vouadi e-Areidjéh au sud. Elle occupe un plateau étroit, espèce de terrasse suspendue à plus de 120 mètres au-dessus du rivage de la mer Morte (fig. 571). Ce plateau est entouré à l’ouest et au nord par un immense cirque formé de hauts escarpements crétacés, dont nous donnons ici (fig. 572) les différentes assises géologiques, d’après M. Lartet (dans de Luynes, Voyage d’exploration à la mer Morte, Paris [sans date], t. iii, p. 78, pi. v, fig. 3). Les rochers, qui ressemblent beaucoup à ceux de la Gemmi, dans le Valais, sont formés par un calcaire rose, très dur et très poli, reposant sur de puissantes couches dolomitiques. Le chemin de Bethléhem, qui se déroule en lacets le long de ces falaises, descend par une pente effrayante, dangereuse même pour les bêtes de somme ; du plateau à la mer, il faut encore une demi-heure. La source naît sous un rocher presque plat et peu épais, comme la dalle d’un dolmen celtique. Les eaux, très pures, ont une température assez élevée, vingtsept

roseaux gigantesques (Arundo donax). Ce qui donne au paysage un caractère particulier, ce sont les acacias seyâls, qui produisent la gomme arabique et dont le bois a la dureté du fer ; cette espèce se rencontre au Sinaï, en Arabie et dans certaines parties de la Tunisie. Voir Acacia, t. i, p. 101. On trouve encore, comme dans la plaine du Jourdain, le Zizyphus spina Christi, hérissé d’épines aiguës comme de fines pointes, qui rendent les fourrés absolument impénétrables. Le long du ruisseau on voit des lauriers-roses (Nerium oleander), des malvacées très vigoureuses (Sida niutica) et de très beaux tamaris (Tamarix tenuifolius). À côté s’élève le henné (Lawsonia alba), le kôfér du Cantique des cantiques, i, 13 (hébreu, 14). Voir Henné. — Les palmiers étaient autrefois très nombreux à Engaddi, comme l’indique le nom primitif d’Asasonthamar, et comme l’attestent Josèphe, Ant. jud., IX, i, 2, et Pline, H. N., v, 17. Il n’en reste rien aujourd’hui, pas plus que des vignes qui firent autrefois sa célébrité. Cant., i, 13. Des murs en

pierres sèches, régulièrement alignés sur les flancs des collines méridionales, rappellent seuls l’existence antérieure de ces vignobles. Près de la source croit une plante qui ne se rencontre qu’à Engaddi, en Nubie et dans l’Arabie du sud ; c’est une asclépiadée appelée Calotropis procera, nommée orange de Sodome par les pèlerins. Presque arborescente, elle a des rameaux verts, gorgés de sucs, des feuilles grandes, ovales, lancéolées, opposées deux à deux. Un suc laiteux, blanc et sans goût, s’en dégage abondamment, lorsqu’on fait quelque incision. Le fruit, gros comme une petite orange, est d’une couleur jaune pâle. Lorsqu’il est mûr, l’enveloppe

Ras-el-Aïn

(Source tiède J

Bassins

arfi

Mer

Morte

Ouest

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572. — Coupe de la (alaise d’Aïn-Djédi.

a. Calcaire compact gris.

b. Marnes blanchâtres.

c. Calcaire marneux.

d. Marnes blanches.

e. Calcaire marneux blanchâtre.

I. Marnes à Ostrea Olisiponensis, flabellata grand cardinm, etc., avec un banc d’O. Olisiponensis à la partie supérieure.

g. Calcaire et marnes.

h. Marnes crayeuses bigarrées de jaune et de rouge, avec vésicules de gypse parcourant la masse dans tous les sens, écailles de poissons et quelques foraminifères.

i. Calcaire gris blanchâtre, avec Ostrea Mermeti, var., Mlnor, petites 0. Vesicularia, var., Judaica, Janira œquicoslâta, et nombreux foraminifères.

j. Calcaire compact, avec les mêmes fossiles.

k. Calcaire dolomitique gris foncé, avec quelques silex gris et des empreintes de janires et d’exogyres.

A. Dépôts récents de la mer Morte.

B. Dépôts d’incrustation, avec empreintes végétales. D. Brèches calcaires.

papyracée se brise et laisse échapper des graines soyeuses, dont se servent les Bédouins pour faire des mèches de fusils, ou que les femmes filent avec le coton pour en tresser les cordes destinées à retenir le kouffiéh des hommes sur le front. On trouve de même à Ain Djédi la pomme de Sodome (Solarium melongena), dont le fruit, de la grosseur d’une pomme d’api, laisse échapper, lorsqu’on l’écrase, une quantité innombrable de fines graines, qu’on a quelquefois prises pour de la cendre. Enfin, sur les hauteurs désertes du nord, on trouve la célèbre crucifère appelée à tort rose de Jéricho (Anastatica hierochuntia). Cf. Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, dans le Tour du monde, t. xliii, p. 156-159.

Les seules ruines que l’on rencontre aujourd’hui en cet endroit sont celles d’un moulin et de deux bassins antiques assez profonds, situés entre le plateau et la plage. La plaine, qui s’étend un peu au sud, est cultivée par les Arabes Rscheidé, qui y sèment un peu de blé, de doura et une assez grande quantité de concombres. Les montagnes environnantes sont percées de nombreuses grottes ; on sait comment David y vint un jour chercher

un refuge, et coupa un pan du manteau de Saùl. I Iteg., xxiv, 1, 2-5. Cf. W. M. Thomson, The Land and the Book, Londres, 1881, t. i, p. 313. De nos jours comme à cette époque, ces rochers escarpés sont habités par de nombreux troupeaux de bouquetins bedens, d’une admirable agilité, et dont les cornes noueuses servent à faire des manches de poignards. Cf. I Reg., xxiv, 3. Voir Bouquetin, t. i, col. 1893. Ces montagnes dénudées, longue série de roches blanchâtres et calcaires, déchirées çà et là par des bandes de silex noirs, constituent le désert d’Engaddi. I Reg., xxiv, 2. Des herbes à la teinte grise, des genêts rabougris, animent seuls le paysage.

Du plateau d’Aïn Djédi la vue est splendide. Au pied des falaises s’étend la mer Morte, que l’on aperçoit à peu près dans toute son étendue ; au nord, c’est le promontoire de Râs Feschkhah et l’embouchure du Jourdain ; à l’est se dressent les monts de Moab avec la ville et le château fort de Kérak, puis la presqu’île basse et marécageuse de la Lisdn. Vers le sud, la vue est bornée par la sombre montagne de Sebbéh, sur laquelle était bâtie la ville forte de Masada. Enfin, à l’ouest, les hauts escarpements déchirés et arides rappellent certains passages des Alpes. Cette région, sur laquelle plane le silence du désert, a, sotis les feux du soleil couchant ou les rayons argentés de la lune, quelque chose de très impressionnant. — Cf. U. J. Seetzen, Reisèn durch Syrien, Palàstina, édit. Fr. Kruse, Berlin, 1854, t. ii, p. 220-239 ; Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres, 1856, t. i, p. 504-509 ; duc de Luynes, Voyage d’exploration à la mer Morte, t. i, p. 83-86 ; Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881-1883, t. iii, p. 384-386 ; W. M. Thomson, The Land and the Book, t. i, p. 312-320.

III. Histoire. — Engaddi apparaît pour la première fois dans la Bible sous son nom d’Asasonthamar, à propos de l’expédition de Chodorlahomor. Gen., xiv, 7. Elle était alors au pouvoir des Amorrhéens, qui furent battus par le roi d’Elam et ses alliés. Au moment de la conquête de la Terre Promise par les Hébreux, elle tomba dans le lot de Juda. Jos., xv, 62. Son désert servit de retraite à David, pendant qu’il subissait la persécution de Saùl. I Rég., xxiv, 1, 2. À l’époque de Salomon, elle était renommée pour ses vignobles, Cant., i, 13, qui existaient encore aux xile, xve siècles, et même au commencement du siècle dernier. « Un passage fort intéressant de Ludolphe de Suchen relate que les Templiers transportèrent des cépages provenant d’Engaddi dans leur domaine de Chypre, situé près de la ville de Baphe, et le pèlerin allemand dit qu’il ne compta pas moins de dix espèces de raisins cultivés dans cet enclos. » E. Rey, Les colonies franques de Syrie aux XIIe et xm* siècles, Paris, 1883, p. 250, 251. Les Moabites et les Ammonites avec leurs alliés, marchant contre Josaphat, roi de Juda, vinrent camper à Asasonthamar ou Engaddi, suivant la coutume des bandes pillardes qui envahissent la Palestine du sud en venant de Moab. Elles sont sures de trouver là de l’eau et des pâturages. Elles peuvent en même temps choisir les routes les plus propices à l’attaque. Le prophète Ézéchiel, xlvii, 10, pour montrer les changements merveilleux que l’Évangile apportera au monde, représente les eaux du lac Asphallite comme adoucies, remplies de poissons, et « les pêcheurs se tenant sur ces eaux, séchant leurs filets, depuis Engaddi jusqu’à Engallim ». Josèphe, Bell, jud., III, vii, 5, la cite parmi les onze toparchies de Judée, et plus loin, IV, ut, 2, il raconte que les sicaires réfugiés à Masada s’emparèrent un jour de cette petite ville, peu de temps avant la prise de leur forteresse par Flavius Silva, préfet de Judée sous Vespasien (an 73). Josèphe, Bell, jud., VII, viii, 1-7. — Pline, H. N., v, 17, mentionne les ermites esséniens qui y vivaient. Les Talmuds parlent du baume qu’on cueillait depuis Engaddi jusqu’à Ramatha. Cf. 1801

ENGALLIM

ENGANNIM

-1802

A. Neubauer, La géographie du Talmud, Paris, 18(58, p. 160. Le nom de l’antique cité biblique tombe ensuite

peu à peu dans l’oubli.
A. Legendre.
    1. ENGALLIM##

ENGALLIM (hébreu : ’Ên-’Églaim, « source des deux veaux ; » Septante : ’EvayaXXsi’ijL), localité mentionnée une seule fois dans l’Écriture, Ezech., XL vii, 10. Le prophète, voulant faire saisir par des images frappantes les merveilleux changements que produira dans le monde l’âge messianique, représente un torrent qui s’échappe du Temple de Jérusalem et vient assainir, adoucir la mer Morte. Alors, dit-il, « il y aura de nombreux poissons là où viendront ces eaux, et là où viendra le torrent tout sera sain et vivra. Les pêcheurs se tiendront sur ces eaux ; depuis Ertgaddi jusqu’à Engallim on séchera les filets. » Saint Jérôme, Comment, in Ezech., t. xxv, col. 473, commentant ce passage, dit : « Engallim est, en effet, à l’entrée de la mer Morte, là où le Jourdain a son embouchure, tandis qu’Engaddi se trouve où finit le lac. » Cette dernière assertion est certainement erronée, puisque Engaddi est située, non pas à l’extrémité méridionale de la mer, mais au milieu de la rive occidentale. Voir Engaddi. La première perd par là même quelque peu d’autorité. Bon nombre d’auteurs cependant s’en servent pour chercher l’emplacement d’Engallim. Les uns pensent à’Ain Feschkhah, source assez importante, qu’on rencontre vers la pointe nord - ouest du lac Asphaltite. Cf. Riehm, Handwôrterbuch des Biblischen Altertums, Leipzig, 1881, t. i, p. 378 ; C. F. K’eil, Der Prophet Ezechiel, Leipzig, 1882, p. 493. D’autres proposent Ain Hadjlah, au-dessus de l’embouchure du Jourdain, dans la plaine qui monte vers Jéricho. Cf. R. von Riess, Bibel-Atlas, 2e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1887, p. 10. Engallim serait ainsi identique à Bethhagla (hébreu : Bêt Hoglâh). Jos., xv, 6 ; xviii, 19, 21. Il y a un certain rapprochement entre les deux noms, bien qu’ils différent au point de vue de l’orthographe et de la signification. Voir Bethhagla, t. i, col. 1685. — Quelques-uns cherchent plutôt la localité en question à l’est de la mer Morte, dans le pays de Moab. Ils l’assimilent à V’Eglaim (Septante : ’Afa).£’4L ; Vulgate : Gallim) d’Isaïe, xv, 8, qu’Eusèbe et saint Jérôme, Onomastica sacra, Gcettingue, 1870, p. 98, 228, aux mots Agallim, ’A-yaMeifi, placent à huit milles (près de douze kilomètres) à l’est d’Aréopolis. Ils supposent qu’il pouvait y avoir sur le bord oriental du lac un endroit empruntant son nom à cette ville, et qu’Ézéchiel aurait opposé à Engaddi, sur l’autre bord. Cf. Reland, Palœstina, Utrecht, 1714, t. ii, p. 762 ; Hengstenberg, The prophecies of Ezekiel, Edimbourg, 1809, p. 474. Mais les deux noms diffèrent aussi d’orthographe et de signification, _ bien qu’ils soient moins éloignés l’un de l’autre que’Églaîm et Hôglàh.Voir Gallim. En somme, nous ne pouvons jusqu’ici que faire des conjectures plus ou moins plausibles, puisque nous manquons

de bases solides pour les appuyer.
A. Legendre.
    1. ENGANNIM##

ENGANNIM (hébreu : ’Ên-Gannîm, « source y jardins » ), nom de deux villes de Palestine.

1. ENGANNIM (omis ou méconnaissable dai tante ; Vulgate : Mngannim), ville de la tri ! Jos., xv, 34. Mentionnée entre Zanoé et^ fait partie du premier groupe des cités on de la Séphélah. R. J. Schwarz Francfort-sur-le-Main, 1852, p. 7j après lui l’identifient avec un b situé à une heure au sud-est d’" inconvénient, c’est qu’on ne trouve dai qués aucune localité de ce nom. Cf. Hï mer, Beilràge zur Géographie Palâstina’s, p. 72. Un second, c’est que l’antique ville donf Ions est placée ailleurs par l’énumération de iosaè. du même groupe, en effet, comme Estaol (Eschù

Saréa (Sarâ’a), Zanoé (Khirbet Zanuâ), Jérimoth (Khirbet el-Yarmuq), indiquent nettement sa position : C’est pour cela que M. Guérin, Judée, t. ii, p. 26, la cherche à Beit el-Djemâl, tout près de Khirbet Zanuâ. La proximité de ce dernier endroit et l’existence, au bas du village, d’une excellente source qui coule dans la vallée, seraient pour lui deux raisons suffisantes de cette assimilation. Cependant la correspondance onomastique manque totalement. On la trouve d’une manière satisfaisante un peu plus haut dans Khirbet Umm Djîna, près d’Aïn Schems, l’ancienne Bethsamès. Aussi cette hypothèse, proposée par Clermont-Ganneau et les explorateurs anglais, nous semble - 1 - elle préférable. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881-1883, t. iii, p. 42 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 58. Oumm Djina est un petit village situé sur un monticule, et dont les maisons sont aux trois quarts renversées. Parmi les matériaux avec lesquels elles avaient été bâties, on remarque un assez grand nombre de pierres de taille très certainement antiques, ce qui prouve que ce pauvre hameau, qui compte à peine aujourd’hui une quarantaine d’habitants, avait autrefois beaucoup plus d’importance. Cf.V. Guérin, Judée,

t. ii, p. 28.
A. Legendre.

2. ENGANNIM (hébreu : ’Ên-Gannîm ; Septante/ Codex Vaticanus, ’Iewv xai Tofifiàv ; Codex Alexanâ nus, ’Hvfawi’tj., Jos., xix, 21 ; IL-i-pn ifo-V-y-àitviy xxi, 29), ville de la tribu d’Issachar, Jos., xix, 21 ^ ce avec ses faubourgs » aux Lévites fils de Gej xxi, 29. Dans I Par., vi, 73 (hébreu, 58), pîj lèle à Jos., xxi, 29, on lit Anenx au lieu et la plupart des auteurs regardent le prêt) une contraction du dernier. Voir Anem, ^ probablement aussi la même localité ( IX, 27, sous le nom de Bêt haggây Septante : BatOfâv ; Vulgate : Dof de Juda, étant venu à Jezraëly à Joram, souffrant des ble » siège de Ramoth-Galaad. Jéhu dans le champ

même un sort semblât/^ n tout de suite le chen/ «  « J*’qui, passant par Dj/ ^

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Histoire ancienne des II. — 58

Thoulmos III qu’on peut rapporter à la Galilée, extrait des Transactions of the Victoria Institute, or philosophical Society of Great Britain, 1886, p. 9.

Djénin, par son nom, sa position, ses eaux abondantes et ses beaux jardins, rappelle bien l’ancienne Engannim (fig. 573). Elle se trouve à l’entrée d’une vallée qui vient déboucher dans la grande plaine d’Esdrelon. Elle couvre les pentes douces d’une colline qui se relie à d’autres un peu plus élevées, lesquelles se rattachent elles-mêmes, vers l’est, en décrivant un quart de cercle, au Djebel Fouqou’ah. Les montagnes voisines sont couvertes de plantations d’oliviers et de figuiers ; les maisons sont entourées de jardins séparés les uns des autres par des haies

collines qui s’élèvent vers l’est sont percées de nombreuses cavernes creusées dans le roc ; les unes sont d’anciennes carrières ; les autres ont dû servir de tombeaux. La population actuelle est à peu prés de trois mille habitants, presque tous musulmans. Cf. V. Guérin, Samarie, t. i, p. 328 ; Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, dans le Tour du monde, t. xli, p. 60 ; Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres, 1856, t. ii, p. 315 ; Van de Velde, Reise durch Syrien und Palàstina, Leipzig, 1855, t. i, p. 271 ; Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881-1883, t. ii, p. 44.

A. Legendre.
    1. ENGOULEVENT##

ENGOULEVENT, oiseau de l’ordre des passereaux

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573. — Djéntn. D’aprts une photographie.

de cactus. La ville elle-même est protégée par une muraille de ces végétaux dont les tiges sont si énormes et les feuilles tellement entrecroisées, que tout passage serait absolument impossible, si l’on n’avait taillé de véritables portes dans ce rempart vivant. Les maisons sont en pierre et assez bien construites ; un certain nombre sont en ruine. Au-dessus d’elles deux mosquées élèvent leur minaret et leurs coupoles, et quelques beaux palmiers, qui s’aperçoivent de loin, dressent leur tête gracieuse. Une belle source, véritable torrent, jaillit au milieu des oliviers sur les hauteurs qui dominent la ville ; divisée en mille petits ruisselets, elle répand une agréable fraîcheur dans les jardins et les champs. Ces eaux, très limpides, sont amenées par un aqueduc, que cache souvent un fouillis de plantes grimpantes. Une quinzaine de petites boutiques forment ce qu’on appelle le souq ou marché. Les restes d’une puissante construction en pierres plus considérables et plus régulières que celles qui ont servi à bâtir la plupart des maisons sont regardés par les habitants comme les vestiges d’une forteresse. Ailleurs on montre les traces d’une petite église chrétienne. Les

flssirostres, c’est-à-dire à bec crochu mais très largement fendu, d’où le nom français de l’oiseau qui « engoule » le « vent ». Ce bec est garni de moustaches à sa base. Le plumage est gris - roussâtre tacheté de noir (fig. 574). L’engoulevent est à peu près de la taille d’une grive ou d’un merle. Il ne niche pas, mais se contente de déposer ses œufs à terre ou sur les feuilles sèches. Blotti tout le jour, il se met à chasser à partir du crépuscule, et se nourrit d’insectes, particulièrement de ceux qui incommodent les troupeaux. Comme il fréquente en conséquence le voisinage de ces derniers, la croyance populaire lui a fait donner le nom de caprimulgus, en français « tettechèvre ». Cf. Pline, H. N., x, 40, 56. On l’appelle aussi quelquefois « crapaud volant ». Le caprimulgus européens se trouve dans la plus grande partie de l’Europe. On le rencontre aussi assez abondamment en Palestine. À l’automne, l’oiseau est très gras ; il constitue alors un mets délicat.

— Plusieurs auteurs ont pensé que l’engoulevent est désigné dans la Bible par le mot (al.imâs, nom d’un oiseau rangé parmi ceux qui sont considérés comme impurs. Lev., xi, 16 ; Deut., xiv, 15 ; Tristram, The -1805

ENGOULEVENT — ENHASOR

1806

natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 191. Gesenius, Thésaurus, p. 492, croit, au contraire, que le tahrnâs est l’autruche. Mais les anciennes versions y ont vu un oiseau de nuit, Septante : f).aOÇ ; Vulgate : noctua ; Gr. Venet. : vvxTixdpa ?, et les rabbins juifs une hirondelle. Le lahmds est presque certainement le hibou, et il n’est guère probable que l’engoulevent ait été compris sous ce nom. Comme cet oiseau devait être bien connu des Hébreux, il est fort à croire qu’ils l’ont désigné sans

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574. — L’engoulevent.

plus de précision par le mot sippôr, qui convient à tous les passereaux et autres petits oiseaux du même genre. Ils n’ont pas dû le confondre avec l’hirondelle, dont il se distingue par des caractères assez tranchés, notamment par son habitude de se passer de nid.

H. Lesêtre.
    1. ENHADDA##

ENHADDA (hébreu : ’Ên-fladdâh, <i fontaine rapide ; » Septante : Codex Vaticanus, Aîjiocpéx ; Codex Alexandrinus, ’HvaSSà), ville de la tribu d’Issachar, mentionnée une seule fois dans l’Écriture, Jos., XIX, 21. Sa position est fixée approximativement par la place qu’elle occupe dans l’énumération de Josué, où elle est citée après Engannim, aujourd’hui Djénîn, à l’entrée de la plaine d’Esdrelon, vers le sud. Elle n’est cependant pas encore identifiée d’une manière certaine. Van de Velde, Reise durch Syrien und Palàstina, Leipzig, 1855, 1. 1, p. 237238, a voulu la reconnaître dans’Ain Haoûd, au pied occidental du mont Carmel, à l’est d’Athlît. Mais, outre que ce point n’appartenait pas à Issachar, il est trop éloigné de Djénîn pour représenter l’antique cité dont nous parlons. — On l’a cherchée à l’extrémité opposée, au nord-est d’Enrannim. Il y a dans le massif montagneux du Djebel Dahy, au sud-est d’Endor, un village appelé Umm et-Thaybéh ou simplement Et-Taiyibéh, qui n’est plus aujourd’hui que le triste reste d’une ville importante, située sur les pentes d’une colline dont la plate-forme supérieure était occupée par une forteresse. Au bas, au milieu d’une vallée, coule une source dont les eaux sont recueillies dans un bassin très dégradé ; elle fertilisait, il y a peu d’années encore, des jardins qui ont cessé d’être entretenus. Au delà de cette vallée, vers l’est, des ruines peu étendues, sur une colline voisine, sont indiquées sous le nom de Kkirbet el-Haddâd. C’était comme un petit faubourg de la ville. La dénomination de Umm et-Thaybéh, « mère de la bonté, de l’agrément, » donnée actuellement à cette localité, est tout arabe, et ne nous met point sur la voie de celle qu’elle portait autrefois, s Mais, ajoute M.V. Guérin, Galilée, t. i, p. 127, dans le nom de Khirbet el-Haddâd, que conservent les ruines qui jadis en dépendaient, j’incline à reconnaître celui de Haddâh… Si cette conjecture est fondée, nous devons identifier les ruines elles-mêmes de Oumm et-Thaybéh avec cette antique cité, vainement cherchée jusqu’ici. » Cette hypothèse, au point de vue onomastique, est assez plausible. Elle l’est moins, si l’on considère le principe basé sur l’ordre des énumérations dans le texte sacré. Nous savons bien qu’il ne faut point exagérer cette règle, qui peut avoir son élasticité et ses exceptions. On peut se demander cependant pourquoi Josué n’aurait pas, dans ce cas, mis Enhadda près d’Anaharath, aujourd’hui En-Na’urah, non loin au nordouest d’EtTaiy ibéh. Et puis il est probable que ce der nier nom représente son correspondant, Tôb, bien connu dans les langues sémitiques, et qui désignait peut-être l’ancienne ville. On croit, en effet, le retrouver sur les pylônes de Karnak (n° 22), sous la forme Toubi. Cf. G. Maspero, Sur les noms géographiques de la Liste de Thoutmos III qu’on peut rapporter à la Galilée, extrait des Transactions of the Victoria Institute or philosophical Society of Great Britain, 1886, p. 5. Malgré cela, la dénomination’Ên-Ifaddâh l’aurait-elle emporté plus tard, ou se serait-elle appliquée à une localité distincte, quoique voisine ? Nous ne pouvons le savoir. — Une troisième opinion répond mieux à la situation que la Bible semble assigner à Enhadda ; c’est celle qui place la ville à Kefr’Adân, au nord-ouest et tout près de Djénîn. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881-1883 ; t. ii, p. 45 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Nantes and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 58. C’est un village de trois cents habitants, qui s’élève sur une colline, avec des jardins plantés principalement de figuiers, d’oliviers, et entourés d’une ceinture de gigantesques cactus. On y remarque un tronçon de colonne et un certain nombre de pierres de taille d’apparence antique. Si l’analogie est parfaite au point de vue topographique, elle l’est moins pour le rapprochement onomastique. Le nom est écrit Kefr’Adân, avec i, dal (th anglais doux), dans le Survey of Western Palestine, Name Lists, Londres, 1881, p. 147, et Kefr’Adân, avec >, dal, dans V. Guérin, Samarie, t. ii, p. 225.

A. LEGEiNDRE.

    1. ENHASOR##

ENHASOR (hébreu : ’En Hâsôr ; Septante : itrjyîj’A<rôp), une des villes fortes de Nephthali, mentionnée une seule fois dans l’Écriture, Jos., xix, 37. Citée entre Édraï, probablement Ya’ter, sur la ligne frontière qui sépare Aser de Nephthali, et Jéron, aujourd’hui Yaroun, au sud-est de cette dernière localité, elle fait partie du groupe septentrional. Or entre ces deux points se trouve un village, Khirbet Haztréh, qui, par son nom et sa position, semble bien répondre à l’antique cité. L’arabe S— yaz>-, Basîréh, ou X-ïJa., Hazîréh, est la reproduction de l’hébreu "lisn, Ifasôr. D’un autre côté, l’emplacement ne saurait être plus conforme à l’énumération de l’auteur sacré. Aussi cette identification est-elle acceptée par bon nombre d’auteurs : Renan, Mission de Phénicie, Paris, 1864, p. 674 ; les explorateurs anglais, Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881, p. 204 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 58, etc. Les ruines que renferme cet endroit sont en partie cachées par un épais fourré de hautes broussailles. « En s’ouvrant un passage à travers d’énormes touffes de lentisques, auxquels se mêlent des térébinthes et des chênes verts, on distingue çà et là les arasements de nombreuses maisons démolies, plusieurs tronçons de colonnes déplacées, restes d’un édifice détruit, l’un des jambages d’une belle porte ayant peut-être appartenu également à ce monument, et les assises inférieures d’une sorte de tour carrée, mesurant neuf mètres sur chaque. face et construite avec des blocs gigantesques qu’aucun ciment n’unit entre eux. Des citernes et une piscine longue de vingt-deux pas sur onze de large fournissaient jadis de l’eau aux habitants de cette localité. Sur les premières pentes d’une colline voisine, une belle voûte cintrée en magnifiques pierres de taille jonche de ses débris une construction rectangulaire, très régulièrement bâtie, qu’elle couronnait autrefois et par laquelle on descendait, comme par une espèce de puits, dans une chambre sépulcrale dont l’entrée est actuellement obstruée par un amas de grosses pierres. Ce tombeau est désigné sous le nom de Oualy Néby Hazour. À en juger par les restes de la voûte, il paraît d’époque romaine. La chambre funéraire néanmoins est peut-être plus ancienne. » V. Guérin, Galilée, t. ii, p. 117. L’auteur de cette description,

tout en reconnaissant que Haziréh est, selon toute apparence, la reproduction d’un nom antique analogue, fait cependant à l’identification proposée une objection qui lui semble capitale : c’est qu’aucune source n’existe au milieu ou près des ruines dont nous venons de parler, et par conséquent Enhasor, qui devait la première partie de son nom à l’existence d’une source, sans doute considérable, sur l’emplacement qu’elle occupait, ne peut avoir été situé en cet endroit. Il est sur que cet argument enlève quelque chose de leur force aux deux premiers. — D’autres auteurs cherchent cette ville plus bas, au sudest d’Er-Raméh, l’ancienne Arama de Nephthali. Jos., xix, 36. Il y a là un site ruiné appelé Khirbet Hazour, occupant le plateau inférieur d’une colline nommée Tell Hazour. Certaines cartes même, comme celle de Van de Velde, signalent un’Aïn Hazour. On pourrait donc y voir V’En-Ifasôr de Josué. Cf. Keil, Josua, Leipzig, 1874, p. 161 ; W. M. Thomson, The Land and the Book, Londres 1, 1890, in-12, p. 333. Il est clair que le nom actuel, , « ; » -, Hazur, représente très bien la dénomination hébraïque. Mais cette hypothèse prête aussi le liane à plusieurs objections. D’abord les cartes les plus complètes, comme celle du Palestine Exploration Fund, Londres, 1880, feuille 6, ne mentionnent pas d’'Aïn Hazour, et c’est là le point important. Ensuite ni le tell ni le khirbet ne renferment de vestiges d’antiquité. Cf. Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres, 1856, t. iii, p. 81 ; V. Guérin, Galilée, t. ii, p. 458. Enfin, bien que paraissant plutôt appartenir à la tribu de Zabulon, ils peuvent à la rigueur rentrer dans la frontière de Nephthali ; mais ils s’éloignent alors des villes qui accompagnent Enhasor dans le texte de Josué. — Les deux localités avec lesquelles on a cherché à identifier Enhasor ne sauraient représenter la vieille cité chananéenne d’Asor, que quelques auteurs ont à, tort confondue avec celle-ci. Voir Asor 1, t. i, col. 1105.

A. Legendre.
’ÊN-HAQQORÊ’, nom donné par Samson à la

fontaine que Dieu fit jaillir, à sa prière, pour le désaltérer. Septante : irrflT toû lmxaXou|j.évoj ; Vulgate : Fons invocantis, « source de celui qui invoque ». Jud., xv, 19. Voir Samson et Ramathlechi.

    1. ÉNIGME##

ÉNIGME (hébreu : hîddh, de hûd, n. s’écarter, » parler par détours ; melîsâh, de lus, « parler obscurément ; » Septante : cuvtY ! « .a, rcp<5ë) l r]u.a ; Vulgate : enigma, problema), pensée proposée sous une forme obscure et allégorique et dont le sens est à deviner. — 1° Les anciens Orientaux avaient une propension marquée à exprimer énigmatiquement leurs pensées. Cf. Rosenmùller, Dos aile und neue Morgenland, Leipzig, 1818, t. iii, p. 68 ; Herder, Histoire de la poésie des Hébreux, trad. Carlowitz, Paris, 1851, p. 454. Ce goût des énigmes passa chez les Grecs et les Romains. Athénée, x, 457 ; Pollux, x, 107 ; Aulu-Gelle, Noct. attic, xviii, 2. Voir Konrad Ohlert, Râtsel und Gesellschaftspiele der alten Griechen, in-8°, Berlin, 1886. Aulu-Gelle, xii, 6, fait la remarque suivante : « Nous laissons l’énigme sans réponse, pour que les lecteurs s’affinent l’esprit par les conjectures et les recherches. » Ce jeu d’esprit plaisait aux anciens, et ils s’en servaient parfois pour donner plus de piquant à certaines idées morales et les graver d’autant plus profondément dans l’intelligence que celle-ci avait fait un plus grand effort pour les découvrir. — 2° Les Hébreux aimaient à poser et à résoudre des énigmes dans les réunions publiques, et surtout dans les festins. Cf. K. Ohlert, Râtsel, p. 60-67, 208-218. Au livre des Juges, xiv, 12-18, nous lisons que Samson en proposa une aux Philistins, en leur accordant sept jours pour la deviner. L’enjeu était de trente tuniques et de trente vêtements de rechange. Or Samson, quelques jours auparavant, avait trouvé dans la gueule d’un lion tué par lui précédemment, et laissé sur

le sol, un essaim d’abeilles avec un rayon de miel. Il proposa donc cette énigme : « Du dévorant est sorti l’aliment, et du fort est sortie la douceur. » Au bout de trois jours, les Philistins n’avaient encore rien trouvé. L’énigme supposait, en effet, la connaissance d’un fait assez peu commun. Us s’adressèrent alors à leur compatriote, l’épouse de Samson, qui se fit livrer le secret et le transmit aux intéressés. Le septième jour, avant le coucher du soleil, ceux-ci apportèrent leur réponse ; « Quoi de plus doux que le miel et de plus fort que le lion ? » À quoi Samson répliqua finement : « Vous n’auriez pas deviné mon énigme, si vous n’aviez pas labouré avec ma génisse. » Cet exemple nous montre la manière dont on procédait, et comment l’appât du prix à gagner s’ajoutait à l’intérêt du problème à résoudre. Cf. Joséphe, Ant. jud., V, viii, 6 ; Strauchius, De senigmate Simsonis, dans le Thésaurus de Hasée et Iken, Leyde, 1732, 1. 1, p. 545-552. — Salomon s’était acquis une grande réputation par son habileté à poser et à résoudre des énigmes. Eccli., xlvii, 17. La reine de Saba, qui en entendit parler, vint le trouver, tout d’abord « pour le mettre à l’épreuve au sujet des énigmes ». III Reg., x, 1 ; II Par., IX, 1. Le roi s’en tira à son honneur, et la royale visiteuse le jugea encore supérieur à sa réputation. III Reg., x, 7. A en croire Josèphe, Ant. jud., VIII, V, 3, Hiram, roi de Tyr, envoyait à Salomon des énigmes à résoudre. Le roi phénicien avait du reste parmi ses sujets un jeune homme, fils d’Abdémon, qui était fort habile à trouver les réponses. Josèphe, ibid. et Cont. Apion., i, 18. — Au livre des Proverbes, xxx, 1-33, plusieurs pensées sont proposées sous forme énigmatique ; la réponse suit d’ailleurs la demande : ꝟ. 15 : « Trois qui sont insatiables, un quatrième qui jamais ne dit : Assez ! » — ꝟ. 18 : « Trois qui me sont difficiles, un quatrième où je ne vois rien ; » — ꝟ. 21 : « Trois choses ébranlent la terre, elle ne peut souffrir la quatrième ; » — ꝟ. 24 : « Quatre les plus petits de la terre, et pourtant plus sages que les sages, » etc. Aussi n’est-il pas étonnant que le même livre, dès le début, i, 6, promette au disciple du sage l’art de résoudre les énigmes.

— Dans Isaïe, xxi, 11, 12, la prophétie sur Dumah prend le tour d’une énigme : « Un cri vient de Séir à mes oreilles : Sentinelles, quoi de la nuit ? quoi de la nuit ? — La sentinelle répond : Le matin est venu et de nouveau la nuit ; si vous voulez interroger, interrogez ; retournez - vous, venez ! » — Ézéchiel, xvii, 2-10, écrit aussi une prophétie sous cette forme : « Fils de l’homme, propose une énigme, raconte une parabole à la maison d’Israël et parlé ainsi : Voici ce que dit le Seigneur Dieu : Un grand aigle, à grandes ailes, à longues plumes, plein de plumes et de toutes couleurs, vint au Liban, prit la cime d’un cèdre, brisa la tête de ses branches, les transporta dans la terre des marchands, et les plaça dans la ville des commerçants. Ensuite il prit de la semence de la terre, pour la mettre dans un champ de culture ; il la prit et la mit dans un champ en plaine, auprès des eaux abondantes. Quand elle eut germé, elle devint une vigne luxuriante, , mais de petite taille, avec des rameaux qui la regardaient, et elle eut sous elle ses racines. Elle devint donc une vigne, , produisit des branches et poussa des surgeons. Or il y avait un [autre] grand aigle, aux grandes ailes, aux plumes abondantes, et voici que vers lui cette vigne inclina ses racines, tendit ses branches, pour qu’il l’arrosât hors des. parterres où elle était plantée, alors qu’elle était dans un bon terrain, plantée auprès des eaux abondantes, pour pousser des pampres, porter du fruit et être une belle vjgne. Dis donc : Voici ce que dit le Seigneur Dieu : S’en trouvera-telle bien ? Ne va-t-il pas (le premier aigle) arracher ses racines et ravager son fruit, pour qu’elle devienne stérile quand les pousses de ses branches seront desséchées ? » Dans ce passage, la parabole se mêle à l’énigme. — L’inscription tracée sur la muraille pendant le festin de Baltassar, Dan., v, 25, constitue une énigmeindéchiffrable pour tout autre que Daniel. Voir col. 1250..

— 3° Quelquefois l’énigme ne porte que sur un mot. Ainsi 1809

ÉNIGME ~ ENNON

1810

le Seigneur dit à Jérémie, i, 11, 12 : « Que vois-tu, Jérémie ? Je répondis : Je vois un bâton d’amandier (sâqêd). Et le Seigneur reprit : Tu as bien vii, car je vais veiller (Soqêd) sur ma parole pour qu’elle s’accomplisse. » Il y a là un jeu de mots en même temps qu’une énigme. — Sur le Sisach de Jérémie, xxv, 26, voir Athbasch, t. i, col. 1210. — Dans l’Apocalypse, xiii, 18, saint Jean propose une autre énigme, qui n’a pas encore été déchiffrée d’une manière certaine : « Que celui qui a de l’intelligence suppute le nombre de la bête. C’est un nombre d’homme, et son nombre est six cent soixantesix. » Voir Bête, t. i, col. 1645. — 4° La locution « voir en énigme », signifie « voir d’une manière confuse ». Il est dit de Moïse qu’il voyait le Seigneur « à découvert, et non pas par énigmes (behidôt) et figures ». Num., xii, 8. Cette manière de parler a pour but de donner une idée de l’intimité à laquelle le Seigneur admettait son serviteur, et des révélations qu’il lui faisait. — Parlant de la condition de l’homme sur la terre et de celle qui lui succédera dans l’autre vie, saint Paul écrit : « Nous voyons maintenant au moyen d’un miroir en énigme (èv aivi-f^ot’O ; alors ce sera face à face. Maintenant je ne connais que partiellement ; alors je connaîtrai comme je suis connu. » I Cor., xm, 12. Ce miroir et cette énigme au moyen desquels nous atteignons Dieu et les choses de la foi, c’est d’abord la nature elle-même, qui parle du Créateur : « Ce qui est invisible en lui est devenu, depuis la création du monde, intelligible et visible, même sa puissance éternelle et sa divinité. » Rom., i, 20. C’est ensuite la révélation, qui nous fournit des notions plus claires et plus précises, mais encore énigmatiques et voilées, puisque les choses que démontre la foi restent toujours invisibles. Hebr., xi, 1.

— Voir Bellermann, De Hebrseorum enigmatibus, Erfurt, 1796 ; Aug. Wùnsche, Vie Ràihselweisheit bei den Hebràern,

in-8°, Leipzig, 1883, p. 10-30.
H. Lesêtre.

ENNEMI. Voir Guerre.

    1. ENNOM##

ENNOM (VALLÉE DU FILS D’). La Vulgate traduit par Vallis (ilii Ennom, Jer., vii, 31, 32 ; xix, 2, 6 ; xxxii, 35, ou bien par Vallis filiorum Ennom, Jos., xviii, 16, ou encore par Convallis filii Ennom, Jos., xv, 8 ; IV Reg., xxiii, 10, ou enfin par Vallis Ennom (Jos., xvill, 16), II Esdr., xi, 30, le nom hébreu Gê bén Hinnôm, « vallée du fils d’Hinnom, » qui désigne une vallée au sud de Jérusalem, et qu’elle appelle aussi ailleurs Bénennum, II Par., xxxiii, 6, et Géennom. Jos., xv, 8 ; xviii, 16. Voir Géennom.

    1. ENNON##

ENNON (A’tv(ôv ; Vulgate : Mnnon), lieu où baptisait saint Jean. Joa., iii, 23. Pour en déterminer la position, l’évangéliste nous dit qu’il était situé « près de Salim (SocîiEÏji.) », localité qui devait être par là même plus considérable et plus connue. Il ajoute que le Précurseur avait choisi cet endroit « parce qu’il y avait là beaucoup d’eau (ûSotTct itoXXi) ». C’est, en effet, ce qu’indique le mot lui - même : le grec Aîvwv n’est que la traduction du pluriel araméen pj’y, ’Ênâvân, « les sources, » ou un adjectif, ’ênôn, dérivé de’aïn et signifiant « un lieu abondant en sources ». Voir Aïn 1, t. i, col. 315. Ennon se trouvait en deçà du Jourdain, d’après les paroles que les disciples de Jean viennent lui adresser : « Maître, celui qui était avec vous au delà du Jourdain, » Joa., iii, 26, c’est-à-dire à Béthanie, au delà du fleuve. Joa., i, 28. Il devait être également à une certaine distance et non sur les rives mêmes de ce dernier, sans quoi la remarque de l’auteur sacré n’aurait pas de sens. Tels sont les seuls renseignements que nous fournit l’Écriture. Aussi sommes-nous en face d’un problème géographique dont on cherche encore la solution. Les hypothèses auxquelles il a donné lieu sont les suivantes.

1° Une tradition qui semble avoir été bien en faveur au iv a siècle place Ennon dans le Ghôr ou vallée du

Jourdain, au sud de Béisàn, l’ancienne Bethsan des Hébreux, la Scythopolis des Grecs. Eusèbe et saint Jérôme, en effet, Onomastica sacra, Gœttingue, 1870, p. 99, 229, parlant d’  « Mnon près de Salim, où Jean baptisait », ajoutent : « On montre encore aujourd’hui l’endroit (5 tôtioç) à huit milles (presque douze kilomètres) de Scythopolis, vers le midi, près de Salim et du Jourdain. » Plus loin, au mot Salem, p. 149, saint Jérôme signale « à huit milles de Scythopolis, dans la plaine, un bourg appelé Salumias », et, dans une de ses épltres, Epist. lxxiii, ad Evangelum, t. xxii, col. 680, il dit que Salem n’est pas Jérusalem, « mais un village près de Scythopolis, qui jusqu’à présent se nomme Salem, et où l’on montre le palais de Melchisédech, dont les ruines, par leur grandeur, attestent l’antique magnificence. » De sou côté, sainte Silvie raconte qu’elle vit sur le bord du Jourdain une belle et agréable vallée, bien plantée d’arbres et de vignes, arrosée d’eaux abondantes et excellentes. Dans cette vallée était un gros bourg appelé alors Sedima, placé au milieu de la plaine. Comme elle demandait le nom de ce site charmant, il lui fut répondu : « C’est la cité du roi Melchis ; appelée autrefois Salem, elle porte aujourd’hui par corruption le nom de Sédima. » On lui montra également les fondements du palais de Melchisédech. Se rappelant alors que saint Jean baptisait à Enon près de Salim, elle s’informa de la distance qui la séparait de ce lieu : Il est à deux cents pas, lui dit le prêtre qui la conduisait. Et elle vint à un jardin délicieux, au milieu duquel coulait une fontaine très limpide, et qu’on appelait en grec copostu agiu iohanni (xîiiro ; toû àfim’Ioiwou) ou « jardin de saint Jean ». Cf. J. F. Gamurrini, Sanctse Silvix Aquitanse peregrinalio ad Loca Sancla, 2e édit., Rome, 1888, p. 27-29. Aucun site aux environs de Béisàn ne répond actuellement d’une manière exacte à Salem. La colline nommée Tell es-Sârem pourrait en rappeler le nom, mais elle est plus rapprochée de la ville que ne le marque ÏOnotnasticon. Cependant, à la distance voulue, dans la vallée du Jourdain, on rencontre un remarquable groupe de sept sources, réunies dans un rayon assez restreint, et qui pourraient représenter les « eaux abondantes » du texte sacré. Non loin sont les ruines assez considérables dtVmm el-’Amddn, au nord desquelles s’élève le Tell Bidhghah, dont le sommet est couronné par le tombeau de Scheikh Salim, peut-être le scheikh de Sâlim. Cf. Van de Velde, Reise durch Syrien und Palâslina, Leipzig, 1856, t. ii, p. 302-303 ; Memoir to accompany the Map of the Holy Land, Gotha, 1858, p. 345. — Tels sont les arguments de la première opinion. On objecte que, d’après le contexte évangélique, saint Jean paraît avoir été alors en Judée, comme Notre -Seigneur. Le contexte n’a rien de clair sous ce rapport. On dit ensuite que le Précurseur ne pouvait guère fixer dans la Samarie, hostile aux Juifs, le lieu de son séjour et de son ministère. L’endroit indiqué était sur la limite de la Samarie et de la Galilée, non loin du passage fréquenté qui donnait accès d’une rive à l’autre du Jourdain ; les Galiléens qui ne voulaient pas traverser la province ennemie par Sichem, pour aller à Jérusalem, descendaient par Béisàn dans la vallée du Jourdain et prenaient la route de Jéricho. Le site n’était peut-être pas si mal choisi. En somme, si rien aujourd’hui ne montre avec certitude l’emplacement de Salim, il n’en reste pas moins une tradition qu’il est impossible de négliger et des conditions topographiques, qui peuvent cadrer avec le récit sacré.

2° Une deuxième hypothèse cherche Ennon dans les environs de Naplouse. Il y a à l’est de cette ville une localité dont le nom, Sâlim, rappelle exactement celui de la cité biblique dont nous parlons, et près de laquelle sont deux sources. Cf. Robinson, Biblical Besearches in Palestine, Londres, 1856, t. iii, p. 298, 333. Plus haut, vers le nord-est, le village d’Ainun représenterait peut-être l’Aîvwv de saint Jean. Mais, comme ce dernier en

droit ne renferme aucune source, on a pensé à celles qu’on rencontre dans Vouadi Far’ah, entre Ainoun et Salim. Cf. Conder, On the identification of JEnon, dans le Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, Londres, 1874, p. 191-192 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Nomes and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 2 (New Testament sites). — Nous trouvons là aussi plus d’une difficulté. D’abord Ainoun et Salim sont trop loin l’une de l’autre. Les sources elles-mêmes sont situées dans une profonde vallée, à six kilomètres de Sâlim, et séparées de ce village par les hauteurs de Nébi Bélàn, en sorte qu’on ne peut guère les regarder comme en étant proches. Elles sont d’ailleurs aussi près de Naplouse, à laquelle les unit la voie romaine qui allait de cette ville à Scythopolis. Pourquoi alors saint Jean n’auraitil pas plutôt dit : « jEnnon près de Sichem ? » Enfin et surtout, le plus grand inconvénient de cette opinion, c’est qu’elle place le ministère du Précurseur au cœur même de la Samarie, aux portes de la cité qui concentrait toute la haine du peuple samaritain contre les Juifs. La difficulté, sous ce rapport, est, on le voit, beaucoup plus grande que pour la première hypothèse.

3° J. Th. Barclay, The city of the great King, New-York, 1858, p. 558-570, a cru retrouver Ennon dans les sources de Vouadi Fârah, vallée profonde et ravinée qu’on rencontre à plusieurs kilomètres au nord-est de Jérusalem. Le nom de Salim serait représenté par l’antique appellation de Jérusalem, Salem, ou par celui d’un ouadi nommé actuellement Salim, plus exactement Souléim. Cette conjecture, qu’aucune tradition n’appuie, repose uniquement sur l’existence de certaines sources plus ou moins abondantes et sur un rapprochement assez problématique. On peut ensuite faire remarquer que l’ouadi Fârah est un ravin qui, par sa nature et son éloigneraient de toute ligne de communication, n’était guère fait pour attirer et réunir une grande multitude.

4° Enfin une dernière opinion cherche Ennon à l’extrémité méridionale de la Palestine. Parmi les villes assignées à la tribu de Juda et plus tard à celle de Siméon, le livre deJosué, xv, 32, en mentionne deux, Sélim (hébreu : Silhim ; Septante : Codex Vaticanus, SaX-rj ; Codex Aleœandrinus, SeXeei’n) et Aen (hébreu : ’Ain), dont les noms semblent rappeler ceux de Joa., iii, 23. ". Dans cette hypothèse, Ennon est réellement, selon les indications évangéliques, de l’autre côté du Jourdain (Joa., iii, 26), en Judée, où Jésus baptise (jfr. 22). Le lecteur comprend qu’on y entre en discussion avec des Juifs (^. 25) et qu’on y soit dans un pays où les eaux devaient être rares. » E. Le Camus r La Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ, Paris, 1887, in-12, t. i, p. 296, note 1. Tel est aussi le sentiment de J. N. Sepp, Jésus-Christ, études sur sa vie et sa doctrine, trad. Ch. Sainte-Foi, 2 in-8°, Louvain, 1869, t. i, p. 334, et de Mùhlau, dans Riehm, Handwôrterbuch des Biblischen Altertums, Leipzig, 1884, t. i, p. 33, au mot Mnon. Cette conjecture ne nous semble pas non plus reposer sur des bases bien solides. Ain n’est certainement pas Beitvinoun, distante d’Hébron d’une lieue et demie vers le nordest. Elle appartient à un groupe de villes situées plus bas. Si, avec le texte original de II Esdr., xi, 29, on ne l’unit pas à Remmon, qui suit, pour en faire’En-B.imm.cm, et la placer à Khirbet Oumm erRoumâmim, à trois heures au nord de Bersabée, c’est certainement dans les environs de cette localité qu’il faut la chercher. Voir Aîn 2, 1. 1, col. 315. Or le pays est très pauvre en sources, et nous ne trouvons aucun endroit qui puisse répondre au texte évangéliqae par la richesse de ses eaux. On ne voit guère aussi pourquoi saint Jean aurait porté si loin, en dehors des voies les plus fréquentées, sa parole et son

ministère.
A. Legendre.

t. ENOCH. Voir Hénoch 2 et 4, t. iii, col. 593, 594.

2. ENOCH (LIVRE APOCRYPHE D’). Voir APOCA-LYPSES APOCRYPHES, t. i, col. 757-759.

ÉNON (hébreu : Hâsar’Ênôn ; Septante : r aiXïi toO Aîvâv ; Vulgate : atrium Enon), point qui devait marquer la limite nord-est de la Terre Promise. Ezech., xlvii, 17. Ce nom est écrit ailleurs Énan. Voir Énan.

ÉNOS (hébreu : ’ËnôS ; Septante : ’Evw ?), fils de Seth. Gen., iv, 26 ; v, 6, 7, 9-11 ; I Par., i, 1 ; Luc, iii, 38. Il avait quatre-vingt-dix ans à la naissance de son fils Caïnan, et il vécut encore huit cent quinze ans, ce qui donne, pour sa vie entière, un total de neuf cent cinq ans. Gen., v, 9-11. Énos est, avec Hénoch et Lamech, le seul des patriarches antédiluviens dont l’auteur de la Genèse nous donne autre chose que le nom et l’âge : « Alors, dit le texte hébreu, on commença à invoquer (qârâ’) au nom de Jéhovah. » Ce que la Vulgate traduit : « Celui-ci (Énos) commença d’invoquer le nom du Seigneur. » Gen., iv, 26. Cf. Gen. xii, 8 ; Exod., xxxiii, 19 ; Ps. lxxix, 6 ; cv, 1, etc. Cette phrase est obscure et a été, par suite, diversement expliquée. La paraphrase chaldaïque la rend ainsi : « On commença à profaner le nom de Dieu, » c’est-à-dire : « On commença alors à adorer de faux dieux, des idoles. » Cette interprétation est universellement rejetée. Tout le monde reconnaît que, d’après ce verset, l’époque d’Énos vit le commencement, dans l’ordre religieux, d’un certain état de choses nouveau ; mais on ne s’accorde pas pour déterminer à quoi se rapporte ce commencement. 1° Les uns considèrent de préférence le dernier mot, celui de Seigneur (Jéhovah), et ils expliquent à tort ce verset en ce sens que, du temps d’Énos, on commença de connaître le nom de Jéhovah et de pratiquer son culte. — 2° La plupart pensent que l’auteur de la Genèse a voulu nous faire connaître par ces paroles quelque innovation notable dans le culte divin, par exemple, l’organisation du culte public : rites plus solennels, réunions régulières, inconnues jusqu’alors, certaines conventions acceptées dans la société sur le temps, le lieu, la nature des offrandes ou des sacrifices, etc. — 3° Quelques-uns attribuent au verbe hébreu la signification d’  « être appelé du nom » [de Jéhovah], et ils rapportent divers textes bibliques qui semblent confirmer leur sentiment. Exod., xxxi, 2 ; Num., xxxii, 38, etc. Le sens de Geni, iv, 26, serait, d’après eux, qu’à l’époque d’Énos on commença, sans doute pour les distinguer de la race impie de Caïn, de donner aux descendants de Seth le nom d’  « enfants de Dieu ». Leur opinion parait bien peu probable. Cf. Fr. de Hummelauer, Comment, in Genesim, Paris, 1895, p. 195. E. Palis.

ENSEIGNE GUERRIERE. Voir Étendard.

    1. ENSEIGNEMENT##

ENSEIGNEMENT (Nouveau Testament : SiSxtTxotXfo, SiSaxri ; Vulgate : doctrina) désigne l’instruction elle-même ou l’art de donner l’instruction. L’enseignement dont il est parlé dans la Bible est exclusivement religieux ; mais son objet et ses organes ne sont pas les mêmes dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament.

I. Dans l’Ancien Testament. — L’enseignement religieux était donné par les parents, les prêtres et les lévites, les prophètes, les docteurs et les scribes.

1° Enseignement des parents. — Dieu lui-même, par la bouche de Moïse, avait prescrit aux parents d’instruire leurs enfants des devoirs de la religion. Ils devaient leur enseigner « la crainte de Dieu s, c’est-à-dire la religion (voir Crainte de Dieu, col. 1099-1100), leur inculquer les préceptes de la Loi ou le Décalogue, Deut., vi, 7, et tous les autres commandements de Jéhovah, Deut., xxxii, 46, et leur apprendre toutes les merveilles que le Seigneur a opérées en faveur d’Israël. Deut., iv, 9-10. Cf. Exod., xii, 26 et 27 ; xiii, 8 et 14 ; Deut., vi, 20-25. Ils étaient tenus de remplir cette fonction d’instituteurs

en toute occasion, quand ils étaient assis dans leurs mai- | sons, quand ils marchaient sur le chemin, quand ils se couchaient ou se levaient. Deut., xi, 19. — Salomon rapporte les leçons que son père lui avait données sur les avantages de la sagesse, Prov., IV, 3-9 ; il indique clairement que l’enseignement de la sagesse était traditionnel dans les familles, Prov., i, 8 ; VI, 20, et il affirme enfin que l’enfant sage est le fruit de la doctrine de son père. Prov., xui, 1. — L’auteur de l’Ecclésiastique, xxx, 13, recommande au père d’instruire son fils, et il rappelle les heureux fruits de cette instruction, xxx, 2-3.

2° Enseignement des prêtres et des lévites. — Moïse remit le Livre de la Loi, le Pentateuque ou au moins le Deutéronome, aux prêtres et aux vieillards d’Israël, et il leur ordonna de le lire à tout le peuple rassemblé devant le Seigneur, chaque sept ans, durant l’année jubilaire, à la fête des Tabernacles, « afin qu’en entendant cette lecture les Israélites apprennent à connaître et à craindre le Seigneur, à garder et à observer tous ses commandements, et pour que leurs enfants qui l’ignorent maintenant puissent l’entendre et craignent le Seigneur tous les jours de leur vie. » Deut., xxxi, 9-13. Le cantique de Moïse devait être retenu de mémoire, pour être chanté et servir de témoignage contre le peuple apostat. Deut., xxxi, 19 et 22. Josué accomplit l’ordre de Moïse et lut aux Israélites réunis au pied des monts Hébal et Garizim ce qui était écrit dans le volume de la Loi. Jos., vin, 34. Pendant longtemps il n’est pas fait mention de cette ordonnance dans l’Écriture. On ne peut conclure de ce silence ni que la loi n’existait pas ni même qu’elle n’était pas pratiquée. L’usage ordinaire n’était pas signalé et n’avait pas besoin de l’être. Il est permis cependant de penser que sous les rois impies la lecture régulière du Pentateuque était omise. Les princes pieux faisaient observer la pratique ancienne ou la rétablissaient. Ainsi Josaphat envoya, la troisième année de son règne, des princes et des lévites dans toutes les villes de Juda, pour instruire le peuple et lire le livre de la Loi du Seigneur. H Par., xvii, 7-9. Quand le grand prêtre Helcias eut retrouvé dans le Temple un exemplaire ancien de ce livre, peut-être même l’autographe de Moïse, le roi Josias en lut toutes les paroles dans le Temple de Jérusalem, devant tous les hommes de son royaume. IV Reg., xxii, 8-20, et xxiii, 1-3 ; II Par., xxxiv, 14-33. La vingtième année d’Artaxerxès, les sept premiers jours du septième mois, Esdras fit au peuple la lecture de la Loi et le décida à y conformer parfaitement sa conduite. II Esdr., viii, 1-8. D’après l’usage juif postérieur à Esdras, on se bornait à lire, le premier jour de la fête des Tabernacles seulement, quelques parties du Deutéronome. Selon Josèphe, Ant.jud., X, iv, 2, et les rabbins, c’était le grand prêtre ou le roi qui devait s’acquitter de ce devoir dans le Temple.

3° Enseignement des prophètes. — Les prophètes d’Israël n’avaient pas seulement pour mission de prédire l’avenir ; ils étaient chargés de communiquer aux hommes toutes les volontés de Dieu, de maintenir la religion mosaïque dans son intégrité et de veiller par leurs enseignements, leurs avertissements, leurs reproches et leurs menaces, à la conservation de la pureté des mœurs et de la doctrine. Leur principale fonction était d’instruire le peuple, de conserver l’alliance conclue entre lui et Jéhovah, et de revendiquer les droits contestés ou méconnus de celui qui les envoyait et les animait de son esprit. Ces hommes inspirés n’apparaissaient pas seulement de loin en loin, dans les temps difficiles, aux moments de crise. Us forment une série presque ininterrompue dans le cours de la plus grande partie de l’histoire d’Israël, de telle sorte que le prophétisme peut être regardé comme une institution régulière et en quelque sorte normale en Israël. La série commence à Moïse lui-même et se termine par Malachie. On en trouve l’institution divine dans la prophétie de Moïse, Deut., xviii, 15-19 ; de sorte que

le ministère prophétique, qui était extraordinaire quant au choix des prophètes et à l’exercice de leur mission, était le magistère ordinaire, suprême et infaillible, parmi le peuple d’Israël. Cf. J.-P.-P. Martin, Introduction à U critique générale de l’Ancien Testament. De l’origini du Pentateuque, t. iii, Paris, 1888-1889, p. 641-650 ; R. Cornely, Historica et critica introductio in utriusque Testamenti libros sacros, t. ii, 2, Paris, 1887, p. 271-280 ; Mo’Meignan, Les prophètes d’Israël. Quatre siècles de lutte contre l’idolâtrie, Paris, 1892, p. 10-24 ; J. Brucker, L’enseignement des prophètes, dans les Études religieuses, août 1892, p. 554-580 ; Fontaine, Le monothéisme prophétique, dans la Revue du monde catholique, novembre 1895, p. 193-204, et janvier 1896, p. 5-25.

4° Enseignement des scribes ou des docteurs. — Quand la prophétie eut cessé en Israël, une autre institution, d’origine humaine, celle des scribes ou des docteurs de la loi, la remplaça pour l’instruction du peuple Le sôfêr ou scribe avait eu pour première fonction d’écrire sur les rouleaux sacrés le texte de la loi et de veiller à sa conservation. Mais plus tard les scribes, tout en copiant le texte, l’étudiaient et l’expliquaient. C’est après le retour de la captivité de Babylone qu’ils devinrent plus nombreux et prirent de l’influence, en expliquant dans leurs écoles et dans les synagogues la loi et les traditions. Ils étaient assis sur la chaire de Moïse, et il fallait écouter leurs enseignements. Matth., xx.ni, 2 et 3. L’explication de l’Écriture dans les réunions des synagogues (voir Synagogue) devait plus tard donner naissance à la prédication chrétienne, qui en fut la continuation et le perfectionnement. Voir École et Scribe.

II. Dans le Nouveau Testament. — L’enseignement doctrinal de la nouvelle alliance fut dispensé successivement par Jésus, les Apôtres, les évêques et les docteurs.

1° Enseignement de Jésus. — Il n’était pas destiné au peuple juif seulement, mais au monde entier, dont Jésus devait être la lumière. Joa., viii, 12 ; ix, 5 ; xii, 46 ; Tit., H, Il et 12. Son objet, tout en restant exclusivement religieux, était plus vaste que celui de l’enseignement de Moïse et des prophètes. Il portait sur le nouveau royaume de Dieu, que Jésus était venu établir sur la terre. Voir Jésus-Christ. Cf. Bacuez, Manuel biblique, t. iii, 7e édit., Paris, 1891, p. 503-515 ; Fillion, Évangile selon saint Matthieu, Paris, 1878, p. 96-97 ; de Pressensé, Jésus-Christ, son temps, sa vie, son œuvre, 2e édit., Paris, 1866, p. 350-372.

2° Enseignement des Apôtres. — Jésus ressuscité conféra aux Apôtres, qui devaient être comme lui la lumière du monde, Matth., v, 14, la mission de prêcher l’Évangile à toute créature et d’enseigner toutes les nations. Ils devaient apprendre à tous les hommes à observer tous les commandements du Maître, qui leur promettait son assistance constante et perpétuelle dans l’accomplissement de leur mission. Matth., xxviii, 19 et 20 ; Marc, xvi, 15 ; Luc, xxiv, 47. Ils étaient chargés de prêcher aussi la pénitence et la rémission des péchés, et de rapporter les faits dont ils avaient été les témoins. Luc, xxrv, 48 ; Act., i, 8. Le Saint-Esprit devait être envoyé pour leur enseigner toutes choses et leur suggérer le souvenir de tout ce que Jésus leur avait dit. Joa., xiv, 26 ; xvi, 13. Aussitôt après la venue de l’Esprit révélateur, saint Pierre prêche Jésus ressuscité, Act., ii, 14-41 ; iii, 12-26, et il continue ses prédications malgré la défense du sanhédrin et sans craindre la persécution. Act., iv, 17-20 ; v, 20, 21, 25, 28 et 42. Le livre des Actes est rempli du récit des prédications de saint Paul et de saint Barnabe. Act., xi, 26 ; xiii, 5, 16-41 ; xiv, 20 ; xv, 1, 35, 41 ; xvi, 4 ; xvii, 2-4, 17 ; xviii, 11 ; xix, 8 ; xx, 20 ; xxi, 28 ; xxii, 1-21 ; xxviii, 31. Cf. I Cor., iv, 17 ; vii, 17 ; xiv, 33 ; Col., i, 28 ; iii, 16.

3° Enseignement des docteurs. — À côté des Apôtres

et des prophètes, il est fait mention des docteurs, SiSâo-xoc-Xot, Act., xiii, 1 ; I Cor., xii, 28 et 29, dont le ministère consistait à donner exactement, avec la science convenable, l’enseignement ordinaire aux fidèles. Selon quelques critiques, les docteurs formaient une classe à part dans la hiérarchie de l’apostolat, qui aurait persévéré distincte jusqu’à la mort du dernier apôtre. Apollo aurait été un de ces docteurs. Voir t. i, col. 774-776. Cf. Duchesne, Les origines chrétiennes, p. 60. Comme saint Paul, Eph., IV, 11, donne une autre énumération des ministères ecclésiastiques, et qu’aux Apôtres et aux prophètes il joint des évangélistes, eùayTEXiarctt, des pasteurs et des docteurs, jroiijiveç xaï êiSâuxaXoi, la plupart des commentateurs reconnaissent sous ces diverses désignations les évêques, les prêtres et les diacres, chargés soit de porter partout la bonne nouvelle de l’Évangile, soit de gouverner le troupeau et de l’instruire, Drach, Les hpilres dé saint Paul, Paris, 1871, p. 407-408. Quoi qu’il en soit, il est certain que dans l’Église primitive il y avait à côté des Apôtres des hommes chargés de l’enseignement public. Rom., xii, 7 ; I Cor., xiv, 26 ; Gal., vi, 6.

4° Enseignement des évêques. — Les Apôtres se préparèrent des successeurs, à qui ils confièrent le soin d’annoncer l’Évangile et de répandre la bonne doctrine. Saint Paul recommande à ses disciples Timothée et Tite de se livrer à l’enseignement et de donner l’exemple dans ce ministère. I ïim., iv, 13 et 16 ; Tit., ii, 7. Timothée doit garder fidèlement le dépôt de la foi, qui lui a. été confié, et répandre la saine doctrine, qu’il a reçue de la bouche de saint Paul. I Tim., - vi, 2, 3, 20 ; II Tim., i, 13 et 14 ; iii, 10 et 14. Il doit transmettre l’enseignement qu’il a entendu à des hommes capables de le communiquer à d’autres. II Tim., ii, 2. C’est la fonction des évêques de parler et d’annoncer la vérité. I Tim., iv, 17 ; Tit., i, 9. Voir K. A. Schmid, Geschichte der Erziehung, Stuttgart, 1884, t. i, p. 294-333. E. Mangenot.

    1. ENSÉMÈS##

ENSÉMÈS (hébreu : ’Ên-Sémés, « fontaine du soleil ; » Septante : rj it/iyn to0 f, Xiou, Jos., XV, 7 ; miyri Ba16dâtiuc, Jos., xviii, 17 ; Vulgate : Fons solis, Jos., xv, 7 ; Ensemes, id est, Fons solis, Jos., xviii, 17), fontaine qui formait un des points de la frontière nord de Juda, Jos., xv, 7, et de la frontière sud de Benjamin. Jos., xviii, 17. Elle se trouvait entre « la montée d’Adommim » ( Tal’at ed-Demm) à l’est et « la fontaine deRogel » (Bir’Ëyoub) à l’ouest, au nord de celle-ci. Voir Benjamin, tribu et carte, t. i, col. 1589. Sa position est donc bien indiquée à l’est de Jérusalem et de la montagne des Oliviers. Or, dans cette direction, sur la route actuelle de la ville sainte à Jéricho, à environ 1600 mètres au-dessous de Béthanie, on rencontre une fontaine qui semble bien, par son emplacement, répondre à celle que mentionne le texte sacré. Elle s’appelle’A in el-IJaoud, « la source de l’auge ; » les chrétiens la désignent sous le nom de fontaine des Apôtres, parce que ceux-ci, devant nécessairement passer par là pour aller de Jérusalem à Jéricho ou revenir vers la cité sainte, ont dû s’y désaltérer. L’eau s’écoule sous une arcade ogivale (fig. 575) par un conduit pratiqué à travers une construction d’apparence arabe et à moitié ruinée, et elle tombe dans un petit bassin oblong, en forme d’auge ; de là le nom que les indigènes donnent aujourd’hui à la source. À côté est un birket ou réservoir carré, mesurant six pas sur chaque face, et qu’elle remplit seulement à l’époque des grandes pluies. Cf. V. Guérin, Samarie, t. i, p. 159. L’eau est assez fraîche et bonne, mais il ne faut en boire à l’auge qu’avec beaucoup de précautions, car elle est pleine de sangsues fines comme des cheveux, presque incolores, et que l’on est exposé à avaler avec la plus grande facilité. Ces annélides (Hxrnopis Sanguisuga) se fixent alors dans l’arrière -gorge, où elles amènent en se gonflant, et par la perte du sang qu’el’es occasionnent, les accidents les plus graves. Cf. Loriet, La Syrie d’aujourd’hui, dans

le Tour du monde, t. xlhi, p. 192. — Cette identification est généralement acceptée par les voyageurs et les exégètes. Cf. Van de Velde, Memoir to accompany the Map of the Holy Land, Gotha, 1858, p. 310 ; V. Guérin, Samarie, t. i, p. 160 ; W. M. Thomson, The Land and the Book, Londres, 1881, p. 405-408 ; Survey of Western Palestine, Memoirs, Londres, 1881-1883, t. iii, p. 42 ; Keil, Josua, Leipzig, 1874, p. 120, etc. — Cependant le P. van Kasteren placerait plutôt Ensémès sur l’ancienne route de Jéricho, au nord de la nouvelle, dans

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575. — La Fontaine des Apôtres. D’après une photographie.

l’ouadi er-Raouâbéh, où il a découvert une source, ’aïn er-Raouâbéh, qui a dû être autrefois plus importante que maintenant. Cf. Zeitschrift des deutschen Palàstina-Vereins, Leipzig, t. xiii, 1890, p. 116 ; F. Buhl, Géographie des Alten Palàstina, Fribourg-en-Brisgau et Leipzig, 1896, p. 98. A. Legenore.

    1. ENSEVELISSEMENT##

ENSEVELISSEMENT, derniers soins qu’on donne à un mort, avant de l’enfermer dans son tombeau. — On ignore de quelle manière procédaient les anciens Hébreux pour l’ensevelissement de leurs morts. Jacob et Joseph furent embaumés et ensevelis selon le cérémonial compliqué des Égyptiens. Gen., l, 2, 3, 25. Mais ce sont là des cas exceptionnels. D’ordinaire, c’étaient les enfants et les proches qui, de leurs propres mains, rendaient les derniers devoirs à leurs parents. Gen., xxv, 9 ; xxxv, 29 ; Jud., xvi, 31 ; Am., vi, 10 ; Tob., xiv, 16 ; I Mach., ii, 70 ; Matth., viii, 22. Dans ce dernier passage, Notre -Seigneur dit à un jeune homme de ses disciples qui demande à aller ensevelir son père : « Suis-moi, et laisse les morts ensevelir leurs morts. » En parlant ainsi, Notre-Seigneur n’entend pas blâmer en général cet acte de suprême piété filiale. Il veut indiquer seulement que certains devoirs sociaux doivent céder le pas à une vocation spéciale. A défaut de parents, ce sont les amis ou les disciples qui procèdent à l’ensevelissement. III Reg., xiii, 29 ; Marc, vi, 29. L’ensevelissement par des étrangers est comme un signe de malédiction. Act., v, 6, 9, 10. — On commençait par fermer les yeux au défunt, et on le baisait. Gen., xlvi, 4 ; l, 1 ; Tob., xiy, 15. Ce double usage était familier aux anciens, et les auteurs profanes en font souvent mention. Homère, Iliad., xi, 452 ; Odys., xxiv, 294 ; Virgile, JEneid., ix, 487 ; Ovide, Trist., iii, 3, 43 ; Pline,

H. N., xi, 55, etc. On portait ensuite le corps, après l’avoir lavé, dans un lieu convenable, la chambre haute, par exemple. Act., ix, 37. On entourait les pieds et les mains avec des bandelettes. Joa., xi, 44. Des aromates, de la myrrhe et de l’aloès étaient disposés autour du corps. Joa., Xix, 39, 40 ; cf. Joa., xii, 3, 7. Enfin le cadavre était enveloppé dans une grande pièce d’étoffe servant de linceul. Matth., xxvii, 59 ; Marc, xv, 46 ; Luc, xxiii, 53 ; Joa., xix, 40. Le visage restait ordinairement à découvert, et, comme le défunt était conduit à son tombeau quelques heures seulement après sa mort, c’est là qu’on lui enveloppait la tête avec un autre morceau d’étoffe, le suaire.

^ K

676. — Ensevelissement d’un mort. Peinture d’un vase grec provenant d’Érétrie, conservé aujourd’hui au British Muséum. Va jeune homme mort, auquel on vient de faire la dernière toilette, est étendu sur sa couche funèbre. Trois personnes sont autoui 1 de lui, faisant des gestes de douleur. D’après A. S. Miirray et A. H. Smtth, White Athenlan Vases in the British Muséum, in-f°, Londres, 1896, pi. vu.

Joa., xl, 44 ; xx, 7. — Ces quelques détails fournis par la Sainte Écriture se rapportent à des défunts de marque. Il n’est pas dit qu’on prît autant de soin des morts de condition plus modeste. Cependant l’essentiel devait subsister pour tous. « Aujourd’hui les indigènes de Palestine observent les mêmes coutumes au pied de la lettre. Après la mort, ils ferment les yeux du défunt ; ils attachent les pieds et les mains avec des bandelettes et enveloppent le corps dans un linceul. Tous les assistants baisent le mort une dernière fois. Puis il est déposé dans une bière ouverte par en haut, pour qu’on puisse voir encore son visage. L’ensevelissement se fait huit heures au plus après le décès. Il en était certainement ainsi autrefois ; dans les pays chauds, on est obligé de hâter l’enterrement. » Stapfer, La Palestine au temps de Jésus-Christ, Paris,

1885, p. 161.
H. Lesêtre.

ENTERREMENT. Voir Funérailles.

    1. ENTRAILLES##

ENTRAILLES (hébreu : rahâmîm, de la racine râham, « être mou et tendre ; » mê’im ; chaldéen : rahamîn, Dan., ii, 18 ; Septante : onXdtY^va, Ya<jT>jp, xotXîa ; Vulgate : viscera, intestina, utérus, venter), organes renfermés dans le corps de l’homme, spécialement ceux qui sont contenus dans la cavité abdominale.

I. Dans le sens littéral. — C’est toujours le mot mê’im qui est employé en pareil cas. Il désigne alors « es intestins proprement dits, II Reg., xx, 10 ; II Par., xxi, 15, 19 ; l’estomac, Num., v, 22 ; Job, xx, 14 ; Ezech., vii, 19 ; le sein de la mère, Gen., xxv, 23 ; Ruth, i, 11 ; Ps. lxx (lxxi), 6 ; Is., xlix, 1 ; le sein du père, Gen., xv, 4 ; Il Reg., vii, 12 ; xvi, 11 ; les entrailles, (rr, ).âfX v0C) en tant

que renfermant les organes de la respiration. Bar., ii, 17. — Antiochus IV Épiphane périt dans d’atroces douleurs d’entrailles. II Mach., ix, 5, 6. Plutôt que de tomber vivant aux mains de Nicanor, ennemi de son peuple, un des anciens de Jérusalem, Razias, se perce d’un glaive, se jette ensuite du haut de sa maison, se relève et, saisissant ses entrailles des deux mains, les lance à la foule qui le poursuit. II Mach., xiv, 46. — Quand Judas Iscariote se pend, son ventre crève et ses entrailles se répandent à terre. Act., i, 18.

11. Dans le sens métaphorique. — Ainsi que le cœur (voir col. 824), les entrailles sont considérées habituellement comme le siège des sentiments de l’âme. — 1° Sentiments divers, la joie, Cant., v, 4 ; la douleur, Job, xxx, 27 ; Jer., IV, 19 ; Is., xvi, 11 ; la peur, Eccli., xxx, 7 ; le trouble, Lam., i, 20 ; ii, 11 ; Philem., 7 ; l’amour du devoir. Ps. xxxix (xl), 9. — 2° La tendresse affectueuse envers les siens, Gen., xliii, 30 ; III Reg., iii, 26 ; envers les malheureux, les affligés de toute nature, Am., i, 11 ; Zach., vii, 9 ; Philem., 12, 20 ; envers le prochain en général, Phil., ii, 1 ; Col., iii, 12 ; envers les disciples qu’on a évangélisés. II Cor., vii, 15. C’est pourquoi il est dit que « les entrailles du méchant sont dures ». Prov., xii, 10. Saint Paul reproche aux Corinthiens d’avoir les entrailles étroites, II Cor., vi, 12, et saint Jean se sert de l’expression « fermer ses entrailles », I Joa., iii, 17, pour indiquer que l’on manque de compassion envers le prochain. A ce point de vue, la terrible mort de Judas est symbolique ; le malheureux perd ses entrailles pour signifier qu’il a abdiqué tout sentiment de tendresse, de miséricorde et de compassion. Cf. Ps. cviii, 16, 17. — 3° La faveur obtenue auprès de quelqu’un. Geri., xliii, 14 ;

II Esdr., i, 11 ; Dan., i, 9. — 4° Le mot rahâmîm (deux fois seulement le mot mê’im, Is., lxiii, 15 ; Jer., xxxi, 20) est souvent appliqué à Dieu lui-même, pour désigner sa miséricorde envers les hommes. Les versions traduisent alors par éXeo ; , o ! xTipu.<5ç, misericordia, miseratio.

III Reg., viii, 50 ; Ps. xxiv, 6 ; xxxix, 12 ; l, 3 ; lxviii, 17 ; lxxviii, 8 ; en, 4 ; cv, 46 ; cxviii, 156 ; Is., xlvii, 6 ; liv, 7 ; Jer., xlii, 12 ; Dan., ix, 18 ; Ose., ii, 21. Zacharie, père de saint Jean-Baptiste, évoque la même idée quand il parle des « entrailles de la miséricorde de notre Dieu ». Luc, i, 78. Saint Paul emploie l’expression « dans les entrailles de Jésus-Christ », Phil., i, 8, pour dire dans son amour, en union avec lui. — Le verbe anXaY^MiCojiat, misereor, & j’ai les entrailles émues, » marque la profonde compassion de Notre - Seigneur envers les hommes. Matth., ix, 36 ; xiv, 14 ; xx, 34 ; Marc, viii, 2. Cf. Andr. Buttig, De emphasi verbi cma.yx'& Val > dans le Thésaurus novus, de Hase et Iken, Leyde, 1732, t. ii, p. 413-417.

H. Lesêtre.
    1. ENTRAVES##

ENTRAVES, chaînes et anneaux de métal qui sont fixés aux pieds et empêchent de faire de grands pas, de courir et par conséquent de s’échapper (fig. 577). Ils diffèrent des ceps, qui fixent au sol le prisonnier et lui interdisent absolument la marche. Voir col. 431. — Les entraves, appelées par les Septante itéBai, et par la Vulgate

[[File: [Image à insérer]|300px]]
877. — Entraves antiques.

D’après Saglio et Daremberg, Dictionnaire des antiquités,

t. i, p. 1428.

compedes, ont différents noms en hébreu : 1° mastêmdh, Os., IX, 7, 8, le faux prophète est une entrave pour le peuple (sens douteux. Vulgate : amentia, insania) ; — 2° kébél, l’entrave de Joseph, prisonnier en Egypte, Ps. civ (cv), 18, et celles qui seront imposées aux rois des

nations idolâtres (^etpoîtlSai, manicx), Ps. cxux, 8 ; — 3° ziqqlm, les entraves mises aux pieds des prisonniers, Job, xxxvi, 8 ; des rois idolâtres, Ps. cxlix, 8 ; des princes africains soumis à Cyrus, Is., xlv, 14 ; des princes de Ninive vaincue, Nah., iii, 10 ; — 4° nel.iusfaîm, la double chaine d’airain qui relie les pieds des prisonniers, II Reg.,

III, 34 ; du roi Manassé,

conduit à Babylone, II Par.,

xm, 11 ; du roi Sédë cias, emmené prisonnier

dans les mêmes conditions,

IV Reg., xxv, 7 ; Jer., xxxix,

7 ; lii, 11 (voir Chaînes,

fig. 166, col. 480) ; —

5°’ékés, entrave (Vulgate :

agnus ; Septante : xû<ov),

pour « celui qui a une

entrave », qui ne sait pas

échapper aux séductions.

Prov., vii, 22. Au pluriel,

les’âkâsim sont les chaî nettes que les femmes élé gantes s’attachaient aux

pieds. Is., iii, 16, 18. Voir

col. 180 et Périscélide. —

On mettait les entraves

S78.

Esclave, figuré

par Saturne, travaillant enchaîné. a. lx pieds des esclaves re-D’après une pierre gravée. bel]eSj Eccli ^ xxxm> 28j 30

( fig. 578) ; des hommes

dangereux, tels que certains possédés. Marc, v, 4 ; Luc, vin, 29. — La sagesse est une entrave qui règle les pas de l’homme, Eccli., VI, 25, 30 ; mais la science est pour le sot une entrave qui ne fait que le gêner. Eccli.,

xxi, 22.
H. Lesêtre.
    1. ÉPAPHRAS##

ÉPAPHRAS (’Eratçpât). chrétien de l’Église de Colosses, que saint Paul appelle « son cher co-serviteur », o-uv6011Xoç, « le fidèle ministre (Sioexôvot) du Christ. » Col., i, 7. Ce nom est une contraction de celui d’Epaphroditus. On le rencontre dans plusieurs inscriptions grecques (Corpus inscript, grsec, 268, 1732, 1820, 1963, 2248, 6301, 6926, etc.), et latines (Corpus inscript, lat., t. ii, 1896 ; V. De Vit, Totius latinitatis onomastieon, t. ii, 1868, p. 729). D’après Col., iv, 12, le chrétien Epaphras était originaire de Colosses même, et sans doute païen de naissance. Cf. Col., IV, 11. D’après un récit que saint Jérôme, Comment, in Epist. ad Philem. , 23-24, t. xxvi, col. 617, rapporte en le qualiliant de fabula, Epaphras aurait été d’origine juive et compatriote de saint Paul. Quoi qu’il en soit, rempli du zèle apostolique, Col., IV, 12-13, c’est lui qui avait fondé l’Église de Colosses et probablement aussi d’autres Églises du bassin du Lycus, Laodicée et Hiérapolis, cf. Col., iv, 13, que saint Paul n’avait’pas visitées en personne. Col., Il, 1. L’hérésie chercha à s’y glisser, et Epaphras, pour mettre à l’abri de l’erreur ceux qu’il avait amenés à la vraie foi, leur fit écrire par saint Paul, afin qu’ils restassent fidèles à l’enseignement qu’il leur avait donné. Col., Il, 6-7. Voir col. 866. Comment Epaphras se trouvait-il avec saint Paul quand ce dernier écrivit son Épllre, Col., iv, 12, on ne le sait pas exactement. Nous apprenons par la lettre à Philémon, J. 23, où Epaphras est aussi nommé, qu’il était « le compagnon de captivité », <TJvai-/|iâX<oTo ; , concaptivus, de l’Apôtre à Rome (d’après d’autres, avec moins de probabilité, à Césarée, voir col. 867). Le reste de son histoire nous est inconnu. Les martyrologes font de lui le premier évêque de Colosses et disent qu’il souffrit le martyre dans cette ville. Baronius, Martyrol. rom., in-f°, Rome, 1600, au 19 juillet, dit que ses reliques sont conservées à Rome, à Sainte-Marie-Majeure.

— Le texte reçu grec et la Vulgate, Col., i, 7, portent : « Epaphras, … fidèle ministre du Christ Jésus ûjcsp ù[iwv, pro vobis, auprès de vous. » Quelques manuscrits, au

contraire, ont ûitèp ^iuôv, « pour nous. » De sorte que le sens serait qu’Épaphras était le ministre de Jésus-Christ auprès des Colossiens à la place de l’Apôtre ; mais cette leçon est douteuse. Voir Ch. J. Ellicolt, St Paul’s Epislles to tlte Philippians, the Colossians, 4e édit., Londres, 1875, p. 117. — D’après certains critiques, tels que Grotius, In Col., ii, 7, Opéra, Amsterdam, 1679, t. ii, part, ii, p. 922, le nom d’Épaphras étant une contraction d’Épaphrodite, le personnage qui porte ce dernier nom, ’Phil., ii, 15 ; IV, 18, ne serait pas différent d’Épaphras. Cette identification ne repose que sur l’identité possible du nom et est peu vraisemblable. On célèbre sa fête dans l’Église latine le 19 juillet. Voir Épaphrodite. Cf. J. D. Strohbach, De Epaphra Colossensi, in-4°, Leipzig, 1710 ; Acta sanctorum, t. iv julii (1725). p. 581-582.

F. ViGOimoux.

    1. ÉPAPHRODITE##

ÉPAPHRODITE (’Eitaçp68tTo « , « d’Aphrodite, » nom correspondant au latin Venustus), chrétien de Philippes, « coopérateur et compagnon de lutte, -> cruvepfôç xoel (TudTpaTiciTTît, de saint Paul. Phil., ii, 25 ; IV, 18. Nous ne savons de lui que ce que nous en apprend l’Apôtre dans son Épître aux Philippiens. Ses compatriotes le chargèrent de porter à Rome des aumônes à saint Paul, qui y était prisonnier. Là il fut gravement malade, et, après sa guérison, saint Paul le chargea de rapporter à l’Église de Philippes ses lettres de remerciements. Phil., Il, 25-30. A cause de la similitude de nom d’Épaphras et d’Épaphrodite (voir Epaphras), quelques commentateurs ont supposé que le messager des Philippiens auprès de saint Paul était le même que le fondateur de l’Église de Colosses, Col., 1, 7 ; mais leur opinion est sans vraisemblance. Le nom d’Épaphrodite était très répandu. Suétone, Nero, 49 ; Domit., 14 ; Josèphe, Cont. Apion., i, 1 ; n, 41, etc. ; Tacite, Ann., 15, 55, etc. On le rencontre souvent dans les inscriptions. Bôckh, Corp. inscript, grsec., 1811, 2562, Voir W. Pape, Wdrterbuch der griechischen Eigennamen, 3e édit., Brunswick, 1863, t. i, p. 363. Il n’est donc pas étonnant qu’il y ait dans les Épltres de saint Paul un Epaphras et un Épaphrodite. On ne s’expliquerait pas d’ailleurs pourquoi l’Apôtre nomme toujours, sous la forme Epaphras, le Colossien qui était son compagnon de captivité, et toujours, sous la formé Épaphrodite l’envoyé des Philippiens, si c’était le même personnage. De plus, la ville macédonienne de Philippes était si éloignée de Colosses en Phrygie, qu’on ne voit pas comment elle aurait pu charger Epaphras de porter ses aumônes à Rome. Enfin Epaphras était compagnon de captivité de saint Paul, et rien n’indique que l’Apôtre ait pu lui faire porter son Épître à Philippes. Phil., ii, 20.

Les Grecs qualifient saint Épaphrodite d’apôtre. Quoique l’expression de saint Paul, ûp.ûv àîtédToXov, aposlolum vestrum, qui est suivie de ministrum necessitatis mesc, « mon aide dans mes nécessités, » Phil., ii, 25, doive se prendre dans le sens général de « votre messager, qui a subvenu à mes nécessités » (en m’apportant vos aumônes), ce Philippien mérita assurément le titre d’apôtre comme les autres prédicateurs de la foi à cette époque. Le Pseudc-Dorothée, De septuaginta discipul., 54, Patr. gr., t. xcii, col. 1065, le compte parmi les soixante-dix disciples du Sauveur et le fait évêque d’Andriaque, ville de Lycie, à l’embouchure de la rivière qui passe à Myra : c’est la ville où saint Paul, conduit de Césarée à Rome, dut s’embarquer sur le navire d’Alexandrie. Act., xxvii, 5-6. Mais le témoignage du PseudoDorothée est très contestable. Théodoret, In Phil., ii, 25, t. lxxxii, col. 576, pense qu’il était évêque de Philippes. Voir Tillemont, Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique, 2e édit., Paris, 1701, t. i, note 65, p. 574 ; Acta sanctorum, 22 martii, t. m (1668), p. 370 ; J. A. Siep, De Epaphrodito Philippensium apostoloex Sacra Scriptura, in-4°, Leipzig, 1741.

F. Vigouroux.

    1. ÉPAULE##

ÉPAULE (hébreu : kâfêf ; Septante : ù|ioc ; Vulgate : humérus, scapula), partie supérieure du bras par laquelle

celui-ci se rattache au tronc du corps humain. I B.eg., ix, 2 ; x, 23 ; Job, xxxi, 32 ; II Mach., xii, 30 ; xv, 30. — L’épaule sert à porter les fardeaux. Num., vii, 9 ; Jud., XVI, 3 ; I Par., xv, 15 ; Is., x, 23 ; xlvi, 7 ; xlix, 22 ; Ezech., xii, 6, 7, 12 ; Eccli., vi, 26 ; Bar., vi, 3, 25 ; Matth., xxiii, 4 ; Luc, xv, 5 ; etc. — Les épaules du guerrier sont couvertes par la cuirasse. LReg., xvii, 6. Quand elles ne l’ont pas, elles Font exposées aux coups pendant le combat. II Mach., xii, 35 ; xv, 30. — L’épaule rebelle est celle qui se refuse à porter le joug. II Esdr., ix, 29 ; Zach., vii, 11. — « Tourner l’épaule » signifie « s’en retourner », parce qu’on exécute ce mouvement pour s’en aller et revenir là d’où l’on était parti. Les Septante et la Vulgate ont conservé cette locution dans leur version. I Reg., x, 9. — La jonction des deux épaules s’appelle Sekém. C’est sur le sekém, sur les épaules, que se place l’insigne du commandement. Is., ix, 4 ; xxii, 22. Agir d’un même sekém ou d’une même épaule, Soph., iii, 9, c’est être d’accord pour accomplir un devoir. Voir Dos. — Métaphoriquement, on donne le nom de kàtêf au flanc d’une montagne, Deut., xxxiii, 12 ; aux côtés d’un édifice, Exod., xxvii, 15, etc. ; au bord de la mer, Num., xxxiv, 11 ; au point par où l’on tombe sur un ennemi. Is., xi, 4 ; Ezech.,

xxv, 9.
H. Lesêtre.

EPEAUTRE. Hébreu : kussémêf ; Septante : Skipa, Ç=a ; Vulgate : far, vicia.

I. Description. — On donne le nom vulgaire d’épeautre à plusieurs froments dont les grains, à maturité, sont étroitement enveloppés par les glumelles ou balles, et ne peuvent en être séparés par le simple battage sur l’aire ; il faut pour cela une opération spéciale. Deux principales espèces ou races sont à distinguer. — 1° Le grand épeautre (Triticum Spelta L.), qui possède deux grains dans chaque épillet. Les expériences de Vilmorin ont montré que cette plante est très voisine du vrai blé, car on peut obtenir entre eux des métis dont la fertilité est complète. En outre, parmi la descendance croisée de variétés appartenant au véritable Triticum sativum, cet habile expérimentateur a obtenu des formes qui rentrent absolument dans les épeaulres : on peut donc conclure de ces faits à l’unité spécifique du groupe entier. Comme d’ailleurs l’origine de l’épeautre reste des plus problématiques, que sa spontanéité est fort douteuse dans les régions d’Asie Mineure et de Perse où on l’a signalée, il est permis d’y voir une simple race artificielle obtenue par la culture à une époque qu’il est impossible de préciser. C’est à cette race qu’il convient de rattacher le Triticum dicoccum Schrank ( Tr. amijleum Seringe) ; dont la différence tient seulement à sa rusticité plus grande, lui permettant de résister aus hivers les plus rigoureux de la Suisse et de l’Allemagne, et à la richesse de sa graine en réserves amylacées. — 2° Le petit épeautre {Triticum monococcum L.). Cette espèce, bien distincte par son grain solitaire dans chaque épillet (fig. 579), a une origine incontestablement sauvage dans la Grèce, l’Asie Mineure et la Mésopotamie. Elle s’éloigne davaiy tage du froment, avec lequel elle n’a produit jusqu aucun hybride. Cf. Vilmorin, Bulletin de la Société t nique de France, t. xxvii (1880), p. 356 ; A. de Ca^ Origine des plantes cultivées, p. 291. F. » "

II. Exégèse. — Le kussémêf est mentionna dans la Bible, deux fois au singulier, Exod. xxviii, 25, et une fois au pluriel, kussemim Les Septante traduisent par ô’îiypo dans r Ezech., iv, 9, et par Çéa dans Is., xxv met far pour Exod., ix, 32, et vicia r passages. En rendant kussémêf paitraducteur de cette dernière version. doute le mot hébreu de l’arabe kirsenna, ^ cette signification et non pas celle d’épeautre, c. cru quelques exégètes. Zeilsclirift des deutsche, . tinaVereins, t. ix, 1880, p. 11. Quant au mot far, eu. L

dans Exod., ix, 32, comme il est placé à côté (le triticum, il peut désigner particulièrement la seconde espèce de froment, cultivé chez les anciens, c’est-à-dire l’épeautre. Saglio, Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, in-4°, t. ii, 2° part., 1896, p. 1343-1341. Il est très difficile de savoir au juste ce que les Septante entendaient par oXupa et Çéa, parce que les anciens auteurs, comme Hérodote, ii, 36 ; Théophraste, Hist. plant., ii, 4 ; viii, 4 ; Dioscoride, De materia medic, ii, cap. iii, 113 ; Pline, H. N., xviii, 19, 20, etc., tantôt identifient, tantôt distinguent les céréales désignées par ces deux noms, et,

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"% *^50l. 1142, fig. 421, etc. Cf.

< ! ^-n, Histoire ancienne des

II. - 58

plus l’épeautre, Triticum spélta, n’est pas une plante des pays chauds ; jamais on n’en a trouvé lès graines dans les tombeaux de l’Egypte ; on ne le voit pas non plus indiqué sur les monuments, et les voyageurs modernes ne l’ont jamais rencontré dans les cultures de la vallée du Nil. Delile, Histoire des plantes cultivées en Egypte, dans Description de l’Egypte, Histoire naturelle, in-4°, 1812, t. ii, p. 15 ; Alph. de Candolle, Origine des plantes cultivées, 3e édit., in-8°, Paris, 1886, p. 291 ; Ch. Joret, Les plantes dans l’antiquité, p. 30. Mais Schweinfurth, Bulletin de l’Institut égyptien, 1886, n° 7, p. 420, 424, a reconnu des épis et des graines du Triticum dicoccum ou amidonnier au milieu d’offrandes provenant d’une tombe de Gébéleïn, et il regarde cette plante, variété de l’épeautre proprement dit, comme répondant assez bien au boti copte, équivalent de l’hébreu kussémél et du grec S>upa, non seulement dans Exod., ix, 32, mais encore dans Is., xxviii, 25, et Ezech., iv, 9. Il faut dire cependant que, dans une scala copte (nomenclature de noms coptes expliqués en arabe), le mot boti est rendu par al-dourâ, le doura ou sorgho. V. Loret, La flore pharaonique, 2e édit., 1892, p. 23. D’ailleurs la découverte de Schweinfurth est restée isolée, et il est bon de remarquer avec Delile, cité plus haut, qu’aucune espèce d’épeautre ne se retrouve cultivée dans toute l’étendue de l’Egypte.

2° Pour la Palestine, qui a des régions plus froides, la présence de l’épeautre serait à priori plus croyable. Th. Kotschy, Zeitschrift fur Ethnologie, 1891, p. 655, aurait trouvé le Triticum dicoccum à l’état sauvage sur les pentes de l’Hermon. Serait-ce là le kussémét que nous voyons dans une comparaison où Isaïe, xxviii, 25, parle de la sagesse du laboureur ? « N’est-ce pas après avoir aplani la surface du terrain que le laboureur répand de la nielle et sème du cumin, qu’il met le froment par rangées, l’orge à une place marquée, et le kussémét sur les bords du champ. » Ou bien faut-il plutôt identifier la céréale hébraïque avec le Triticum monococcum, ou engrain ? Celui-ci conviendrait mieux que le premier ; car, étant plus différent du blé ordinaire, on comprend facilement que dans l’énumération d’Isaïe il ne vienne qu’au troisième rang, ’séparé du blé par l’orge. Cependant il doit peut-être ce rang, non pas à sa différence plus marquée d’avec le blé, mais à la place du champ où il était semé. Comme cette plante s’accommode des sols les plus mauvais, il est naturel qu’on lui réservât les bords du champ, donnant au blé et à l’orge de meilleurs terrains. Alph. de Candolle, Origine des plantes cultivées, p. 294, ne croit pas néanmoins qu’on puisse reconnaître la culture habituelle de ces divers épeautres chez les Hébreux, et il rejette leur identification avec le kussémét. Le sorgho, au contraire, était et est encore largement cultivé, non seulement en Egypte, mais dans les contrées de l’Asie orientale, et pourrait plus justement s’identifier avec le kussémét’c’est ce qui résulte aussi du troisième texte, relatif à la Babylonie.

3° Ézéchiel, iv, 9, captif en Chaldée, dans une prophétie en action dirigée contre Jérusalem, reçoit l’ordre de prendre du froment, de l’orge, des fèves, des lentilles, du millet et des kussemim, de les mélanger dans un vase et d’en faire du pain. Remarquons, en passant, qu’on trouve des mélanges analogues de céréales et de légumes secs assez souvent employés chez les anciens. Pline, H. N., xviii, 30. Cf. E. Fournïer, art. Cibaria, dans Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, t. i, 2e partie, 1887, p. 1144. L’épeautre exislait-il en Chaldée ? Olivier, Voyage, 1807, t. iii, p. 460, prétend l’avoir trouvé à l’état spontané en Mésopotamie, en particulier dans une localité impropre à la culture, au nord d’Anah, sur la rive droite de l’Euphrate. Mais Alph. de Candolle, Origine des plantes cultivées, p. 292, en doute, et pour lui la patrie des épeautres ce sont les régions moins chaudes de l’Asie Mineure et de l’Europe orientale.

Aucun auteur ne constate avec certitude leur culture en Babylonie. D’ailleurs, s’il s’agissait d’une espèce quelconque d’épeautre, il serait plus naturel, dans l’énumération d’Ézéchiel, iv, 9, de voir les kussemim placés à côté du blé et de l’orge, avec lesquels l’épeautre a plus d’analogie, qu’après les fèves, les lentilles et le millet. De plus les grains mentionnés ici sont comme associés deux à deux : le froment et l’orge, les fèves et les lentilles, le millet et les kussemim. Ce doit donc être vraisemblablement une plante assez semblable au millet ; ne serait-ce pas le sorgho, comme nous l’avons insinué déjà pour les deux autres textes ? Voir Sorgho.

E. Levesque.

ÉPÉE (hébreu : héréb, Deut., xiii, 15 ; Jos., vi, 21 ; vu, 24 ; x, 28, etc. ; mekêrâh, pluriel mekêrôf, Gen., xlix, 5 ; pefihâh, Ps. LV, 22 [ Vulgate, lv, 21] ; grec : (jia-xaipa, Gen., xxii, 6, 10 ; xxxi, 26 ; Exod., xv, 9 ; Jud., iii, 16 ; Matth., xxvi, 47-55 ; Marc, xiv, 43-48, etc. ; poficpaia, Gen., iii, 24 ; Exod., v, 21 ; Jos., v, 13 ; Jud., i, 8 ; Apoc, h, 16 ; vi, 8, etc. ; Ç( ?o ; , Jos., x, 28 ; Ezech., xvi, 39 ; xxiii, 47, etc. ; latin : ensis, I Reg., xiii, 22 ; xxv, 13 ; II Reg., xxi, 16 ; I Par., x, 4 ; Cant., iii, 8 ; gladius, Gen., m, 24 ; xxii, 6 ; Exod., v, 3, etc. ; mucro, Jer., xlvii, 6). La poignée de l’épée se dit en hébreu nisâb, en grec Xaëri, en latin capulus, Jud., iii, 22 ; lahab signifie l’éclat ou la flamme de la lame ; les Septante traduisent ce mot par çWÇ, et la Vulgate simplement par ferrum. Jud., m, 22. On trouve ailleurs le mot beraq pour désigner l’éclair lancé par la lame, Deut., xxxii, 41 ; les Septante traduisent par à<rrpam), et la Vulgate par fulgur. Ezech., XXI, 15, les Septante traduisent par (rçàyia, et la Vulgate par gladii limati ad fulgendum. Le fourreau est désigné en hébreu par les mots nâddn, I Par., xxi, |27, nidenéh (chaldéen), Dan., vii, 15, et ta’o.r, I Sam. (Reg.), xvil, 15 ; II Sam. (Reg.), xx, 8 ; Jer., xlvii, 6 ; Ezech., xxt, 8, 10, 35, etc. ; dans les Septante par le mot xoX^v, II Reg., xx, 8 ; I Par., xxi, 27, etc., et la Vulgate par vaginu. Dans Joa., xviii, 11, le texte grec emploie le mot BtJxt). Dans I Reg., xvii, 51, les Septante omettent les mots : « tira hors du fourreau. » Dans la traduction des Septante, Ezech., xxi, 9 et 11 (hébreu, 8 et 9), il n’est pas question du fourreau dont parle le texte original. La Vulgate traduit le mot hébreu ta’ar par vagina, Ezech., XXI, 3, 4 (hébreu, 8 et 9). Les Septante, Ezech., xxi, 30 (hébreu, 35), omettent aussi le mot « fourreau », qui est également traduit dans la Vulgate par vagina, Ezech., xxi, 30 (hébreu, 35). Dans Gen., xlix, 5, le texte original porte : « Siméon et Lévi, leurs glaives sont des instruments de violence : » kelê hâmas mekrotêham ; les Septante traduisent par : ouvetéXeirav ÈÇaipéo-eo ; aOiûv, et la Vulgate par : vasa iniquilatis bellantia.

I. L’ÉPÉE DE FEU DES CHÉRUBINS AU PARADIS TER-RESTRE. — La première mention de l’épée dans la Bible se trouve dans le récit de la chute d’Adam. Les chérubins placés par Dieu à la porte du paradis terrestre, pour empêcher l’homme coupable d’y rentrer, étaient armés d’une épée flamboyante. Gen., iii, 24. Les interprètes ont donné les explications les plus variées sur la question de savoir ce qu’était cette épée enflammée ou flamboyante. Il est probable qu’il s’agit ici dé la foudre, représentée sur les monuments assyriens sous l’image d’éclairs placés entre les mains du dieu Bel (voir 1. 1, fjg. 474, col. 1559) et appelés c glaive de feu ». F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., in-12, 1896, t. i, p. 289. Cf. A. Layard, Monuments of Niniveh, t. ii, pi. VI.

H. L’ÉPÉE CHEZ LES ISRAÉLITES ET LES PEUPLES VOISINS.

— 1° Israélites. — L’épée apparaît comme arme de guerre dès l’époque de Jacob. Gen., xxxi, 26 ; xxxiv, 25 ; xlviii, 22. Les Hébreux en étaient armés au moment de la sortie d’Egypte. Exod., v, 3, 21 ; xxii, 24 ; Lev., xxvi, 6, 8 ; Deut., xiii, 15 ; Jos, v, 13, etc. Il en est souvent question au temps des Juges. Jud., i, 8 ; vil, 14, 20 ; viii, 10, etc.

Aod tue Êglon, roi de Moab, avec un glaive à deux tranchants, long d’une coudée. Jud., iii, 16. Un des signes de la servitude imposée aux Juifs par les Philistins fut la défense de fabriquer des épées. I Reg. (Sam.), xiii, 19. Les Israélites furent obligés de faire aiguiser leurs instruments de labour chez les Philistins, si bien qu’au moment où ils essayèrent de secouer le joug, Saül et Jonathas étaient les seuls qui possédassent une épée. I Reg. (Sam.), xiii, 20-22. Saül veut donner son arme à David pour combattre Goliath. Mais celui-ci se contenta d’une fronde, et c’est à l’aide de l’épée même de son ennemi qu’il lui trancha la tête après l’avoir terrassé. I Reg. (Sam.), xvii, 51. Depuis lors l’épée figure parmi les armes habituelles des Israélites. II Reg. (Sam.), xxi, 16 ; 1Il Reg., x, 14, 17 ; IV Reg., iii, 20 ; I Par., v, 18 ; xxi, 5 ; Il Esdr., iv, 13, 17, etc. L’épée servait à la fois à la guerre comme arme tranchante, III Reg., iii, 24, et comme arme de pointe. I Reg. (Sam.), xxxi, 4 ; II Reg. (Sam.), ii, 16 ;

I Par., x, 4 ; Is., xiv, 19, etc. La Bible mentionne souvent l’épée à deux tranchants. Jud., iii, 16 ; Ps. cxlix, 6 ; Prov., v, 4. C’est le glaive qui est la plupart du temps indiqué comme l’instrument de la mort ou du massacre. Deut., xiii, 15 ; xx, 13, 26 ; Jos., x, 11, 28, 30 ; Jud., i, 25 ;

II Reg. (Sam.), ii, 16 ; III Reg., i, 51 ; xix, 1 ; IV Reg., xi, 20 ; Is., i, 20 ; xxii, 2 ; Jer., v, 17 ; xi, 22 ; Ezech., v, 12, etc. L’épée était renfermée dans un fourreau. Jos., v, 13 ; Jud., x, 54 ; I Par., x, 4 ; xxi, 16. Les Israélites la portaient au côté droit, Jud., iii, 16 ; Cant., iii, 8, passée à travers la ceinture et non suspendue à un baudrier. Ps. xviii, 40 ; xliv (hébreu, xlv), 4 ; IV Reg., iii, 21, Ezech., xxiii, 15 ; II Esdr., iv, 18. Voir Baudrier, t. i, col. 1514-1515. On ignore la forme de l’épée des Hébreux. Elle n’est décrite nulle part dans la Bible et n’est représentée sur aucun monument. Cette arme devait ressembler à celle dont faisaient usage les peuples avec lesquels les Israélites furent en relations aux diverses époques de leur histoire. Dans Il Mach., xv, 15 et 16, le prophète Jérémie apparaît à Judas et lui donne un glaive doré en lui disant : « c Reçois ce glaive saint, à l’aide duquel tu extermineras les ennemis d’Israël. » Les Juifs portaient souvent une épée même sans être à l’armée. On le voit en particulier dans le récit de la passion de Notre -Seigneur. Saint Pierre était armé d’un glaive, comme l’étaient les gens du grand prêtre qui vinrent pour arrêter le Sauveur. Malth., xxvi, 47-55 ; Marc, xiv, 43-48 ; Luc, xxii, 36-38 ; Joa., xviii, 10, 11.

2° L’épée chez les Égyptiens. — Il est question plusieurs fois dans le Pentateuque de l’épée des pharaons. Exod., v, 21 ; xv, 9 ; xviii, 4. L’épée des Égyptiens avait un peu moins d’un mètre ; elle était droite, à double tranchant et terminée par une pointe. On s’en servait à la fois comme d’une arme tranchante et comme d’une arme de pointe. Parfois on frappait de haut en bas, comme avec un poignard, pour égorger les prisonniers. Cf. t. i, col. 993, fig. 269. La poignée était pleine, de moindre épaisseur au milieu et grossissant vers chaque extrémité. Des pierres et des métaux précieux ornaient cette poignée. Le pommeau de l’épée du roi était souvent surmonté de deux têtes d’épervier, symbole de Ra ou du Soleil, dont les pharaons étaient les incarnations successives. Il y avait aussi des épées plus courtes, qu’on peut considérer comme de véritables poignards. On en a trouvé dans les ruines de Thèbes. Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, t. ii, 1897, p. 97 et 204. Leur poignée est également incrustée ; la lame de bronze, d’un métal très bien travaillé, flexible et élastique comme l’acier. Plusieurs de ces courtes épées sont actuellement conservées au British. Muséum et au musée de Berlin. Sur la poignée de quelques-unes on voit des clous d’or, comme sur les épées dont parle Homère, lliad., xi, 29. Les épées égyptiennes étaient enfermées dans un fourreau et passées à la ceinture. Cf. t. i, fig. 465, col. 1514. Les étrangers de la garde du roi portaient les épées

longues dont nous avons parlé plus haut. Cf. t. r, fig. 592, col. 1896. Voir aussi t. ibid., fig. 269, 583 ; col. 993, 1883 ; t. ii, fig. 55, col. 130. Cf. G. Wilkinson, Manners and customs of the ancient Egyptians, 2e édit., 1. 1, p. 211-212 et 267, fig. 45, 92, 7 et 8. On rencontre aussi en Egypte des sabres recourbés, G. Maspero, Histoire ancienne, l. ri, p. 76, et un sabre de forme particulière, appelé khopesck, qu’on trouve encore chez les peuplades de l’Afrique. Celte arme se voit entre les mains des rois (fig. 580) et même

580. Roi d’Egypte armé du sabre recourbé appelé khopésch. D’après Lepaius, Denkmàler, Abth. iii, Bl. 209.

des soldats (voir t. i, fig. 267, col. 991). Cf. G. Wilkinson, Manners, t. i, p. 358 ; F. Lenormant, Histoire ancienne de l’Orient, 9e édit., 1882, t. ii, p. 170, 240, 342 ; G. Maspero, Histoire ancienne, t. ii, p. 217 ; G. Perrot, Histoire de l’art, in-8°, 1882, t. i, p. 23, fig. 13 ; p. 127, fig. 85 ; p. 395, fig. 225 ; p. 442, fig. 254.

3° Épée des Philistins. — La Bible signale l’épée parmi les armes des Philistins. I Reg. (Sam.), xiii, 9 ; xxii, 10 ; mais nous ignorons quelle en était la forme.

4° Épées assyriennes et babyloniennes. — Il est question des épées des Assyriens dans Judith, vi, 3 ; ix, 11, 12, et de celles des Babyloniens dans Éïéchiel, xxi, 19, 20 (hébreu, 24). Le livre de Judith, xiii, 8, mentionne aussi le poignard d’Holopherne, qui devait être une épée courte, puisque la libératrice d’Israël peut s’en servir pour trancher la tête du général assyrien. Les épées assyriennes et babyloniennes étaient de deux sortes. Les unes, plus courtes, figurent parmi les armes ordinaires des soldats (fig. 581). Elles se portaient suspendues au côté gauche par un baudrier passé par-dessus l’épaule droite. Voir t. i, col. 303, fig. 37 ; col. 898, fig. 215 ; col. 905, fig. 230 ; col. 898, fig. 262 ; col. 1566, fig. 479, etc. ; t. ii, col. 569, fig. 195 ; col. 571, fig. 196 ; col. 1142, fig. 421, etc. Cf. F. Lenormant et £. Babelon, Histoire ancienne des

II. - 58 1827 ÉPËE — ÉPÉNÈTE

1828

peuples de l’Orient, t. iv, p. 143, 222, 225, 427 ; t. v, p. 53, 57, 332, etc. Parfois aussi l’épée est passée à la ceinture, t. ii, col. 1143, fïg. 422. Botta, Monument de Ninive, t. ii, pi. 99 ; G. Perrot, Histoire de l’art, t. ii, p. 46, fig. 5 ; E. Lenormant, Histoire ancienne, t. iv, p. 262, 367. Voir t. i, col. 1514, fig. 465, t. ii, p. 389, fig. 124. Ces épées courtes ont une poignée très simple et sans garde. D’autres épées,

représentées sur des mo numents plus anciens, sont

longues ; leur poignée est

munie d’une garde. L’extré mité inférieure du fourreau

est renforcée par des orne ments recourbés en dehors

et qui ont aussi l’apparence

d’une garde (fig. 581).

G. Maspero, Histoire an cienne, t. ii, p. 621, 623,

625, 626, 629, 631, 632 ;

F. Lenormant, Histoire an cienne, t. iv, p. 413 ; t. v,

p. 32, 64, 66, 94, 196 ;

G. Perrot, Histoire de Vart

dans l’antiquité, t, ii,

p. 625-620, fig. 307. Voir

t. ii, ûg. 421, col. 1142.

Quelques épées, en parti culier celles qui sont por . tées parles rois, sont ornées de têtes d’animaux, surtout

de lions, soit à la garde,

soit au bas du fourreau

(fig. 581). F. Lenormant,

Histoire ancienne, t. iv,

p. 249, 417 ; t. v, p. 16 ;

G. Perrot, Histoire de l’art

dans l’antiquité, t. ii, p. 99,

fig. 22 ; p. 754, fig. 412, 413 ; p. 576, fig. 272 ; Layard,

Monuments of Nineveh,

1. 1, pi. 52. On trouve aussi

en Assyrie des sabres re courbés en forme de cime terre. G. Smith, The Chal dsean account of Genesis,

in-8°, Londres, 1880, p. 62,

95 ; G. Rawlinson, The fwe

great monarchies in the

Eastern world, 4e édit.,

Londres, 1879, t. i, p. 457458 ; Boscawen, Notes on an

ancient Assyrian bronze

sword, dans les Transac tions of the Society of biblical Archeeology, t. IV ( 1876), p. 347 ; G. Maspero, Histoire ancienne, t. ii, p. 607. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., in-12, 1896, t. iii, p. 410, n. 4 et fig. 67. Les épées assyriennes étaient en bronze. On s’en servait plutôt pour transpercer que pour trancher. Il n’y a aucune différence entre les épées des fantassins et celles des cavaliers.

III. L’ÉPÉE MARQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE. —

Chez les Romains, l’épée était le signe de la puissance publique. Ulpien, Big., II, i, 3. Les gouverneurs de province avaient le jus gladii, c’est-à-dire le droit de vie et de mort. Dig., i, xviii, 6 ; Lampride, Alexand. Sever. , 49 ; Corpus inscriptionum latinarum, t. ii, n°484 ; t. iii, n » 1919 ; t. iv, n° 5439, t. viii, n" 9367 ; etc. Cf. 0. Hirschfeld, Silzungsberichte der kônigl. Akademie tu Berlin, 1889, p. 438 ; E. Schûrer, Geschischte des Jûdischen Volkes in Zeitalter Jesu Çhristi, t. i, in-8°, Leipzig, 1890, p. 389. C’est pourquoi saint Paul, Rom., xiu, 14, dit en parlant du magistrat : « Ce n’est pas en

[[File: [Image à insérer]|300px]]
581. — Epées assyrienne.

D’après Botta, Monument de

Ninive, pi. 150.

vain qu’il porte l’épée, étant serviteur de Dieu pour exercer sa vengeance et punir celui qui fait le mal. » Le gardien de la prison où sont enfermés saint Paul et Silas, àPhilippes, est également armé d’un glaive. Act., xvi, 27.

IV. Epée instrument de supplice. — Dans le Nouveau Testament, l’épée est plusieurs fois signalée comme instrument de supplice. Jacques, frère de Jean, est mis à mort par le glaive. Act., xii, 2. Par suite, il signifie la persécution sous sa forme la plus violente. Rom., viii, 35 ; Hebr., xi, 37. Le glaive servait, en effet, chez les Romains, à trancher la tête des criminels condamnés à la décapitation, Dig., XLVIII, xix, 8, 1. Les citoyens ne pouvaient périr d’une autre manière. Ce fut le supplice infligé à saint Paul. Chez les Hébreux, on ne faisait mourir personne par l’épée.

V. Sens métaphoriques du mot épée. — Le mot épée est souvent pris comme synonyme de guerre, parce qu’elle est l’instrument du massacre, comme nous l’avons dit plus haut. I Mach., ix, 73 ; Matth., x, 34. Il sert à désigner la puissance divine. Sap., xviii, 16 ; Ps. vii, 13 ; Is., xxvii, 1 ; xxxiv, 56 ; lxvi, 16 ; Jer., xii, 12 ; Ezech., xxi, 9 ; xxxii, 10 ; Apoc, i, 16 ; ii, 16 ; xix, 15, 21. Dieu met son épée dans la main du roi de Babylone. Ezech., xxx, 25. Le glaive que porte l’ange du Seigneur signifie les fléaux dont il frappe la terre au nom de Dieu, par exemple, la peste. I Par., xxi, 12, 16, 30 ; Dan., xiii, 59 ; Apoc, vi, 4, 8 ; xiii, 14. L’épée est également synonyme de la force en général. Dieu est le glaive de la gloire d’Israël. Deut., xxiii, 29. La parole divine est comparée à une épée à deux tranchants, qui pénètre j usqu’à la division de l’âme et du corps. Hebr., iv, 12. Dans d’autres passages, l’épée désigne la puissance de l’éloquence. Dieu a rendu la bouche de son serviteur semblable à un glaive tranchant Is., lxix, 2. C’est pour cela que l’iconographie chrétienne emploie, le glaive comme symbole de la puissance de la parole. Saint Paul, par exemple, est souvent représenté armé d’un glaive. D’autre part, l’épée étant un instrument de mort, ce mot est employé pour signifier la douleur. Le vieillard Siméon annonce à Marie qu’un glaive transpercera son âme. Luc, ii, 15. Il signifie également le mal que font les méchants, surtout avec la langue. La langue des méchants est un glaive pointu. Ps. lvi ( hébreu, lvii), 5 ; lvh (hébreu, lviii), 8 ; lxiii (hébreu, lxiv), 4. L’étrangère devient aiguë comme un glaive à deux tranchants. Prov., v, 4. Celui qui parle légèrement blesse comme un glaive. Prov., xii, 18. Les dents des méchants sont comme des glaives. Prov., xxx, 14. L’épée est aussi comparée à l’éclair qui brille, Deut., xxii, 41, et à l’animal féroce qui dévore. Deut., xxxii, 42 ; II Reg. (Sam.), xviii, 8 ; Is., i, 20 ; xxxi, 8 ; Jer., ii, 30 ; xii, 12 ; xlvi, 10, 14, etc. C’est pourquoi il est parlé de la bouche de l’épée. Exod., xvii, 13 ; Num., xxi, 24 ; Deut., xiii, 15 ; xx, 13, 16 ; Jos., vi, 21 ; x, 28, 30, 32, etc.

E. Beurlier.

    1. ÉPÉNÈTE##

ÉPÉNÈTE (’EmxfvsTo ; , « louable, recommandable ; » Vulgate : Epsenetus), nom d’un chrétien qui résidait à Rome lorsque saint Paul écrivit aux fidèles de cette ville. Rom., xvi, 5. Ce nom se trouve dans les inscriptions de l’Asie Mineure, à Ephèse, Corpus inscriptionum grsecarum, 2953 ; en Phrygie, ibid., 3903 ; à Rome, Corpus inscriptionum latinarum, t. vi, 17171. L’Apôtre, dans son Épître, envoie ses salutations à Épénète et le nomme en troisième lieu, après Prisca et Aquila. Il dit qu’il lui est « cher » et l’appelle « les prémices », ànap-/^j de son apostolat « en Asie », c’est-à-dire dans la province romaine d’Asie, dont Ephèse était la capitale. Le textus receptus grec, en opposition avec la Vulgate et les meilleurs manuscrits, porte « Achaîe », au lieu d’  « Asie » ; mais c’est une erreur manifeste, car Épénète n’était pas le premier converti de saint Paul en Achaîe ; « les prémices, s àitap^T), de la mission de l’Apôtre en Achaîe furent la maison de Stéphanas, de Fortunat et d’Achaïque, ainsi qu’il nous l’apprend lui-même. I Cor., xvi, 15. Il est

probable qu’Épénète était un Éphésien, qui avait des relations avec Âquila et Prisca (Priscille). Quand ces derniers allèrent d’Épbèse à Rome (cf. Rom., xvi, 3), il les y accompagna peut-être. Le Pseudo-Dorothée, De septuaginta discipul., 19, Patr. gr., t. xcii, col. "1061, dit que ce disciple de saint Paul devint le premier évêque de Carthage ; mais l’église de cette ville ne le reconnaît pas comme son fondateur. Les Grecs célèbrent sa fête le 30 juillet, avec celle de saint Crescent et de saint Andronique. Dans TÉglise latine, sa fête est placée au 15 juillet. Voir Acta sanctorum, julii t. îv (1725), p. 2. F. Vigouroux.

    1. ÉPERVIER##

ÉPERVIER, oiseau de proie diurne, de la famille des falconidés et du genre autour. Ce genre se divise lui-même en trois sous-genres : l’autour proprement dit, l’épervier et la harpie. L’épervier commun, falco nisus ou accipiter nisus (fig. 582), a le plumage d’un bleu cendré avec une tache blanche à la nuque ; la queue est de même couleur bleuâtre avec des

bandes transversales plus

noirâtres ; la partie infé rieure du corps tire sur le

blanc, avec des stries fon cées également transver sales, mais longitudinales

sur la gorge. Le bec est

noirâtre et les pieds jaunes.

La femelle a à peu près la

grosseur d’un chapon ; le

mâle n’est pas tout à fait

aussi gros. L’épervier est un

rapace très hardi ; il vient

enlever sa proie, perdreaux,

mésanges, etc., dans le voi sinage même de l’homme.

Le vol de cet oiseau n’est

pas très élevé, mais il est

rapide. Outre l’épervier

commun d’Europe, on con naît en Afrique l’épervier

minulle, dont la taille ne

dépasse pas celle du rnerle,

et l’épervier chanteur, le

seul oiseau qui chante par mi les rapaces. L’épervier

était un objet de vénération

en Egypte, et l’on prétait une

tête d’épervier à certaines

divinités, spécialement à

Horus, le dieu-soleil. Mas pero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. i, 1895, p. 100. L’épervier commun, accipiter nisus, abonde en Palestine. Une autre espèce orientale se rencontre également dans ce pays, celle de Vaccipiter brevipes, bien moins abondante que la précédente. Dans les plaines et les terrains humides se voient encore un grand nombre d’autres rapaces voisins de l’épervier, le circus œruginosus et le circtis cyaneus, qui sont des espèces de busards et que les Arabes ne distinguent pas de ces derniers. Tristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 190. — Les éperviers sont désignés dans la Bible par le mot nés, qui se rapporte d’ailleurs à d’autres rapaces. Leur chair est proscrite de l’alimentation. Lev., xi, 16 ; Deut., xiv, 15. — Job, xxxix, 26, parle de leur vol vers le midi, expression qui indique leurs habitudes de migration. Voir Crécerelle.

H. Lesêtre.

ËPHA (hébreu : ’Êfâh), nom d’un fils de Madian-(et de la région habitée par ce dernier) et de deux Israélites.

1. ÉPHA. Septante : Vi ?ip, Gen., xxv, 4 ; Codex Vaticanus, Taifép ; Codex Alexandrinus, Tatçâp, I Par., I, 33 ; Taiyi, Is., lx, 6), le premier des fils de Ma 688. — L’épervier.

dian, descendant d’Abraham par Céthura. Gen., xxv, 4 ; I Par., i, 33. C’est un nom ethnique indiquant une branche des tribus madianites, auxquelles du reste elle est associée dans Isaîe, lx, 6, où elle est représentée avec elles comme possédant un grand nombre de chameaux et de dromadaires, et apportant de Saba à Jérusalem de l’or et de l’encens. Où faut-il la placer ? Comme pour toutes les tribus nomades, la question est difficile, et jusqu’ici l’on n’a rien de certain. On a voulu comparer

l’hébreu ns>y, ’Êfâh, à l’arabe <*- » ^c, Gheyféh, qui

désigne « un endroit près de Péluse », au nord-est de l’Egypte. Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 1003. C’est un rapprochement purement nominal. Si les Madianites habitèrent primitivement la péninsule du Sinaï, dans les parages occidentaux du golfe d’Akabah, Exod., Il, 15, ils remontèrent ensuite vers le nord, à l’est de la Palestine, pour redescendre au sud, mais sur le bord oriental du golfe Élanitique. Voir Arabie, t. i, col. 859 ; On est généralement porté aujourd’hui à assimiler les descendants d’Épha à la tribu mentionnée dans les textes assyriens sous le nom de Hayapaa, qui, avec celles de Tamud, les ©ajuiSiTat de Ptolémée, vi, 7, 4, et de Marsiman, les Mat<T « ! [ia[iEiç, habitait le nord de l’Arabie. Cf. Fried. Delitzsch, Wo lag dos Parodies ? Leipzig, 1881, p. 304 ; E. Schrader, Die Keilinschriften und das Alte Testament, Giessen, 1883, p. 146, 277, 613 ; A. Dillmann, Die Genesis, 6e édit., Leipzig, 1892, p. 310.’Êfâh apparaît comme nom de personne dans les inscriptions du Safa. Cf. J. Halévy, Essai sur les inscriptions du Safa, dans le Journal asiatique, Paris, vne série, t. x, 1877, p. 394, 418 ;

t. xvii, 1881, p. 186, 208.
A. Legendre.

2. ÉPHA (Septante : TaiçaTiX ; Codex Alexandrinus : Taiipix), concubine de Caleb, mère de Haran, de Mosa et de Gézez dans la descendance de Juda. I Par., ii, 46.

3. ÉPHA (Septante : Taiçi), un des fils de Johaddaï, dans la descendance de Juda. I Par., ii, 47. On ne voit pas dans le texte le lien qui unit cette famille à la précédente.

    1. ÉPHAH##

ÉPHAH, nom hébreu (’éfàh) d’une mesure de capacité, appelée éphi dans la Vulgate. Voir Éphi.

ÉPHÉBÉE. On lit dans le texte grec de II Mach., iv, 9, le mot : iyrfiia, et dans la Vulgate : ephebia, ce qui signifie « adolescence » ; mais le contexte montre qu’il est question dans ce passage d’un IçTjëeiov, ephebeum, c’est-à-dire de la partie du gymnase grec destinée aux exercices des jeunes gens (5915601). C’était une vaste salle, plus longue que large, avec des sièges disposés au milieu et où les éphèbes s’exerçaient en présence de leurs maîtres. Vitruve, v, 11 ; Strabon, V, IV, 7. Voir, à l’article Gymnase, le plan du gymnase, d’après Vitruve, et la place qu’y occupait l’éphébée. Cf. W. Smith, Dictionary of Greek and Roman antiquities, 3e édit., 1890, t. 1, p. 927. L’impie Jason, au commencement du règne d’Antiochus IV Épiphane, fit construire à Jérusalem un gymnase avec un éphébée, pour y introduire les mœurs et les coutumes des Grecs. II Mach., iv, 9, 12. Cf. Josèphe, Ant. jud., XII, v, 1. Voir Jason et Gymnase.

    1. ÉPHER##

ÉPHER (hébreu : ’Êfér), nom de deux Israélites, d’un fils de Madian et d’une région.

1. ÉPHER (hébreu : ’Êfér ; Septante : "Açep, Gen., xxv, 4 ; ’Oyèp, I Par., 1, 33 ; Vulgate : Opher, Gen., xxv, 4 ; Epher, I Par., i, 33), le second des fils de Madian, mentionné seulement dans les listes généalogiques de Gen., xxv, 4 ; I Par., 1, 33. Il s’agit ici d’une des nombreuses tribus issues d’Abraham ; mais il n’est pas facile de déterminer avec certitude le pays qu’elle habitait.

1831

ËPHER — ÉPHÈSE

1832

Quelques-uns l’identifient avec les BenouGhifâr du Hedjâz. Cf. Keil, Genesis, Leipzig, 1878, p. 222. D’autres, après Wetzslein, rapprochent’Êfér de l’arabe’Ofr, qui indique une localité située entre la montagne du Tihâma et Abdn. Cf. Frz. Delitzsch, Neuer Commentar ûber die Genesis, Leipzijg, 1887, p. 347. On a aussi assimilé les descendants d’Epher aux Apparu des inscriptions d’Assurbanipal. Cf. A. Dillmann, Die Genesis, Leipzig, 1892,

P- 310.
A. Legendre.

2. ÉPHER (Septante : "Açsp ; Codex Alexandrinus : Tayép), troisième fils d’Ezra, peut-être dans la famille de Caleb. I Par., iv, 17.

3. ÉPHER (Septante : ’Oqplp), un des chefs de famille de la tribu de Manassé, àl’est du Jourdain. I Par., v, 24.

4. ÉPHER (#êfér), nom de pays, III Reg., iv, 10, et de ville que la Vulgate écrit Opher dans Josué, XII, 17. Voir Opher 2, t. iv, col. 1828.

    1. ÉPHÈS DAMMIM##

ÉPHÈS DAMMIM, nom hébreu (’Éfés Dammlm), I Sam. (I Reg.), xvii, 1, d’une localité appelée Dommim dans la Vulgate. Voir Dommim.

    1. ÉPHÈSE##

ÉPHÈSE ( w E T ri(Toç), ville d’Asie Mineure (fig. 583). Elle occupait à l’embouchure du Caystre, sur la côte de l’Ionie, presque en face de l’Ile de Samos, un des sites les plus heureusement trouvés, comme point de transit,

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583. — Monnaie dTÏphèse.

NEPÛN KAISAP. Buste de Néron, diadème, a droite. — %. AIXMOKAH AOYIOTAA ANQTIIATQ. An bas : NEûKOPQN. Dans le champ : E*. Temple de Diane, vu de côté.

entre l’Orient et l’Occident. Particulièrement célèbre et ilorissante parmi les villes de la confédération Ionique, elle a joué un rôle important dans l’histoire de nos origines chrétiennes.

I. Histoire. — Les Cariens paraissent avoir habité les premiers la vallée du Caystre. Les Phéniciens, y ayant abordé pour y créer un de ces innombrables marchés qu’ils semèrent de bonne heure sur les côtes méditerranéennes, y établirent un sanctuaire en l’honneur d’une divinité féminine adorée sous le symbole de la lune. Pausanias, Vil, ii, 7, nous dit qu’autour de ce sanctuaire se groupèrent les gens du pays, Cariens, Lélèges, Lydiens, le droit d’asile y attirant sans cesse de nouveaux venus. Des prêtresses courageuses et guerrières, les Amazones, achevèrent de constituer la cité naissante. C’est alors que survient avec Androclès, fils de Codrus, l’invasion ionienne. Ephèse sera la principale des douze villes organisées en confédération par les Ioniens. Après avoir successivement subi le joug des Lydiens sous Crésus, des Perses avant et après les guerres médiques, elle renaît pleinement à la vie hellénique sous Alexandre et Lysimaque, celui des successeurs du grand conquérant à qui elle échut en partage. Les Attales de Pergame, en la recevant comme don de la république romaine (190 avant J.-C), se réservent de la rendre aux donateurs après l’avoir agrandie et embellie, et, en 129, elle devient, en effet, la métropole de la province d’Asie, définitivement organisée. Tout gouverneur arrivant de Rome

pour administrer cette riche contrée devait débarquer à Ephèse et y faire son entrée solennelle.

C’est non pas seulement à l’importance de son commerce ou à son goût pour les lettres et les arts qu’Éphèse, alterum lumen Asise, dit Pline, H. N., v, 31, dut de survivre aux nombreuses catastrophes dont elle fut témoin ; c’est surtout à son temple, si hautement vénéré dans le monde entier qu’on se disputait, comme un suprême honneur, d’en être le balayeur ou le gardien, vewxopdç. La ville était essentiellement une ville religieuse, où l’on n’adorait pas seulement la Grande Artémis, mais où sevendaient force amulettes, statues sacrées et combinaisons de lettres magiques, ’Eç£<j « x fpimi.a’cx. Nous en avons retrouvé encore quelques types dans les bazars de Smyrne. Voir Amulette, t. i, fig. 129, col. 528.

Bien que soumise, comme les autres cités de la province, à l’autorité souveraine du proconsul envoyé par Rome, Ephèse s’administrait elle - même selon des traditions toutes grecques, où se révélait sa vieille origine ionienne. Sa constitution civile rappelait, en effet, celle d’Athènes, avec assemblées de notables, (JouXïi, et du peuple, 8-î)[ioç, et un président ou prytane, irpÛTaviç, pour en exécuter les décisions, comme on peut le voir dans un décret cité par Josèphe, Anl. jud., XIX, x, 25. Mais tous ces représentants de l’autorité civile, auxquels il faut joindre le greffier ou l’archiviste, ypay.(iaTeûç, étaient soumis au proconsul, comme celui-ci l’était à l’empereur. Voir l’inscription reproduite par Boeckh, Corpus inscript, grsec, 2966, où l’organisation civile d’Éphèse est encore plus complètement indiquée. En somme, on paraît avoir, de tout temps, joui à Ephèse d’une large indépendance, et si les scélérats venaient s’y abriter dans le péribole du temple, qui avait droit d’asile, d’illustres exilés tels qu’Annibal (Appien, De reb. Syr., iv, 2, 87), et des hommes d’action tels que Cimon, Alcibiade, Lysandre, Agésilas, Alexandre le Grand, les deux Scipion, Lucullus, Sylla, Marc -Antoine, aimèrent à y séjourner.

Dès les premiers siècles avant Jésus-Christ les Juifs s’y étaient établis, et Josèphe, Ant. jud., XIV, x, 11-13, nous a conservé les décrets qu’Hyrcan obtint de Dolabella, pour les dispenser de servir dans les armées romaines et leur laisser toute liberté de suivre leur religion. Il est tout naturel que ce centre populeux, ce milieu très riche à exploiter, ait attiré de très bonne heure l’attention des fils d’Israël, toujours empressés à s’établir partout où ils pouvaient entreprendre quelque commerce lucratif. Généralement les dominateurs des peuples leur faisaient un accueil bienveillant, parce qu’ils trouvaient en eux des sujets très soumis aux pouvoirs publics, et peut-être aussi parce qu’ils s’en servaient pour organiser une police secrète, dont nos gouvernements modernes n’ont pas été les inventeurs. Quoi qu’il en soit, par ces Juifs cosmopolites, Ephèse se trouvait en relations suivies avec Jérusalem. On sait que les fils de la Loi, à certaines dates sacrées, étaient tenus de retourner dans la mère patrie, où ils avaient leurs synagogues spéciales, des parents et souvent de riches propriétés. Voir Act., ii, 9, et vi, 9.

II. Ephèse et l’Évangile. — De là à devenir un des champs les plus directement ouverts, en dehors de la Palestine, aux semeurs de la bonne nouvelle, il n’y avait pour Ephèse qu’un pas. Déjà quelques disciples de Jean-Baptiste, Act., xix, 3, avaient trouvé le moyen d’y recruter des prosélytes du Précurseur. Combien devait-il être plus facile d’y trouver des croyants au Messie lui-même ! H n’est pas impossible que des Juifs de la province d’Asie, ayant entendu, au jour de la Pentecôte, à Jérusalem, les Apôtres parler les langues miraculeuses, et ayant peut-être reçu le baptême, soient passés à Ephèse ou même s’y soient établis, préparant les origines de la petite Église que Paul devait plus tard si heureusement fonder. En tout cas, c’est à propos du second voyage du grand Apôtre qu’Éphèse se trouve pour la première fois nommée dans

le livre des Actes. Paul, parti de Cenchrées avec Priscille et Aquila, aborde dans la métropole de la province d’Asie, va dans la synagogue conférer en passant avec les Juifs établis en cette ville, mais refuse de s’y arrêter longuement cette fois, promettant de revenir sous peu, après être allé à Jérusalem et à Antioche, qu’il était pressé de revoir. Act., xviii, 19-21.

L’historien sacré nous dit que, pendant ce temps, un Juif nommé Apollo (voir t. i, col. 774), et originaire d’Alexandrie, homme parlant fort bien et très versé dans les Écritures, avait commencé à prêcher avec zèle, dans la synagogue d’Éphèse, ce qui regardait Jésus, tout en n’ayant connaissance que du baptême de Jean. Priscille et Aquila, comprenant l’importance qu’il y avait à faire de cet homme éloquent un prédicateur plus correct de l’Évangile, le reçurent chez eux et l’instruisirent soigneusement de la voie du Seigneur. Ils lui racontèrent sans doute ce que Paul avait fait à Corinthe, et Apollo, témoignant le désir d’aller y continuer cet apostolat si fécond, partit d’Éphèse muni de lettres de recommandation. Act., xviii, 27.

C’est pendant son absence que Paul, venant de Galatie par la Phrygie et la vallée du Méandre, Act., xviii, 23, arriva lui-même à Éphèse, Act., xix, 1, où il devait passer trois ans, Act., xx, 31, ce qui nous révèle l’importance donnée par lui à la fondation de ce nouveau centre de la bonne Nouvelle. N’y ayant trouvé que des disciples très incomplètement formés et qui s’en tenaient encore au baptême de Jean, il les instruisit et les baptisa au nom de Jésus. Act., xix, 1-5. Gomme il leur imposait les mains, l’Esprit -Saint descendit sur eux, et ils se mirent soit à parler diverses langues, soit à prophétiser. Durant trois mois, il prêcha dans la synagogue devant ses frères les Juifs ; mais, comme il trouvait parmi eux des incrédules obstinés qui rejetaient et même décriaient l’Évangile, il rompit avec eux, et, entraînant ceux qui voulurent le suivre, il s’établit, pour enseigner plus librement, dans l’école d’un certain rhéteur ou philosophe nommé Tyrannus. Là, il consacra deux ans à donner des conférences qui ne furent pas sans fruit pour tout le monde, Gentils et Juifs, habitant non seulement Éphèse, mais la province d’Asie. Dans les. maisons des particuliers, Act., xx, 20, son zèle cherchait également des auditoires et en trouvait de sympathiques. Aussi écrivait-il aux Corinthiens : « Une grande porte m’est ici ouverte, avec espoir de succès, bien que les adversaires soient nombreux. » ICor., xvi, 9. A Éphèse, Dieu permit que Paul exerçât avec éclat sa puissance de thaumaturge. De simples linges qui avaient touché son corps guérissaient les malades et chassaient les mauvais esprits. Les fils d’un Juif, Scéva, prince des prêtres, transformés en exorcistes ambulants, ayant essayé d’expulser le démon au nom de Jésus que prêchait Paul, furent gravement maltraités par le possédé lui-même, et l’Apôtre eut la consolation de voir les Éphésiens se convertir en masse après cet événement significatif. Plusieurs d’entre les convertis se déterminèrent même à brûler publiquement les livres de magie dont ils étaient propriétaires. Act., xix, 10-20. Toutefois ces progrès consolants de l’Évangile n’excluaient pas de rudes et peut-être sanglantes luttes. Dans sa première Épitre . aux Corinthiens, xv, 32, écrite vers la fin de la seconde année de séjour à Éphèse, Paul dit : « Si je n’ai fait qu’une action humaine en combattant contre les bêtes à Éphèse, quel avantage m’en revient-il ? » On sait comment une autre sédition, celle qui fut soulevée par l’orfèvre Démétrius (voir col. 1364), Act., xix, 24, et provisoirement câlinée au théâtre par le grammateus ou greffier de la cité, motiva le départ de Paul pour la Macédoine.

Il n’est pas dit, dans le livre des Actes, que cet Apôtre ait reparu dans la métropole de la province d’Asie. Quand il revint d’Europe pour aller à Jérusalem, il fit escale à Milet, ne voulant pas être retenu par l’Église d’Éphèse, alors qu’il avait décidé de se trouver pour la Pentecôte

à Jérusalem. Toutefois il manda les Anciens de la florissante communauté créée et organisée par lui, et leur adressa cet émouvant discours d’adieu, Act., xx, 17-35, qui, mieux encore que son Épître, nous met au courant des conditions de son apostolat parmi les Éphésiens. La première Épitre à Timothée, i, 3, nous apprend que Paul avait confié à ce cher disciple, originaire du pays, la direction de l’Église d’Éphèse. Cf. II Tim., i, 18 ; iv, 12.

De la venue de l’apôtre Jean et de son action dans la métropole de la province d’Asie, les Livres Saints ne disent rien. Toutefois le fait que l’Apocalypse est datée de Pathmos, Apoc, i, 9, île voisine d’Éphèse, autoriserait à lui seul la supposition que Jean vit de près les sept Églises auxquelles il adresse les divines remontrances. On sait que parmi elles Éphèse est la première à mériter des félicitations pour son attitude vis-à-vis des faux apôtres, et des reproches pour sa charité qui s’est amoindrie. Apoc, i, 11 ; ii, 1-7. L’étrange lacune est comblée par des témoignages explicites de la tradition primitive. Voir Eusèbe, H. E., iv, 14 ; v, 24, t. xx, col. 337, 496 ; S. Irénée, Hæres., IN, i, 1, t. vii, col. 845 ; Clément d’Alexandrie, Quis divcs salvetur ? c. xlii, t. ix, col. 648. Pour tous, il est hors de doute que l’apôtre Jean mourut à Éphèse, où, pendant de longs siècles, on a vénéré son tombeau. Au reste, le nom même du misérable village, Ayassoulouk, qui a remplacé la grande ville d’Éphèse, n’est autre que celui du saint Théologien, « yioç ©eoJuSyoi ; . Cherchons à reconstituer, d’après les ruines que nous y avons visitées, en 1888 et en 1894, la ville qui fut un des centres chrétiens les plus importants de la primitive Église.

III. Topographie. — Lorsqu’on quitte la voie ferrée pour se diriger, à l’ouest, vers le site occupé jadis par Éphèse (fig. 584), on longe un moment les restes d’un aqueduc construit à l’époque byzantine, avec des débris de monuments grecs et romains, et destiné à conduire les eaux du Pactyas au château jadis fortifié d’Ayassoulouk. Ce château s’élève à droite, vers le nord-est, et doit servir de point de repère à qui veut comprendre la topographie de l’ancienne ville. Devant soi on a, se dressant en deux sommets pittoresques, derrière lesquels la mer dessine dans le lointain sa croupe de flots bleus, violets ou dorés selon l’heure du jour, le mont central, autour duquel s’étendit, en se déplaçant, la ville primitive. A gauche, et par conséquent au sud-ouest, se dresse une montagne plus élevée, au haut de laquelle courent, avec leurs capricieuses dentelures, les ruines des vieux murs de Lysimaque. Ils rappellent ce genre de fortifications helléniques que nous avions admirées à Antioche, et dont on trouve aussi des fragments à Smyrne sur le Pagus. Là fut l’acropole de la ville à l’époque macédonienne et même romaine. C’est à tort qu’on a donné à ces hauteurs le nom de Coressus. Nous les appellerons tout simplement les monts de l’Acropole, et nous serons sûrs de ne pas nous tromper. À notre premier voyage à Éphèse, nous avions accepté, sans les discuter, les théories topographiques de M. Weber, savant archéologue de Smyrne. Des réflexions subséquentes et l’étude des textes de Strabon et de Pausanias nous portèrent à croire qu’après Curtius, Wood et les autres, M. Weber se trompait. Le fait définitivement acquis, que le temple d’Artémis était réellement là où M. Wood en avait exhumé la plate-forme avec quelques colonnes, nous persuada qu’il fallait chercher le site d’Éphèse primitive, non pas vers la Prison de saint Paul et au pied de l’Acropole, où le plaçait M. Weber, mais à côté même du fameux temple, et sur la hauteur que venait baigner la mer à l’époque où ce temple avait été bâti. Or cette hauteur n’est ni celle de l’Acropole ni celle du Prion, mais bien celle où se trouvent aujourd’hui le village et le château d’Ayassoulouk. En dehors même des indications topographiques que pouvaient fournir les auteurs anciens, la simple ins

pection des lieux me confirma, en 1894, dans la pensée que mon hypothèse était absolument fondée ! Voir Les sept Églises de F Apocalypse, Paris, 1896. Les fouilles commencées par M. Humann et continuées par M. Benndorf en ont établi la justesse : la ville primitive était sur les pentes d’Ayassoulouk.

Le témoignage de PaUsanias, VII, ii, 7, semble d’ailleurs explicite. D’après lui, un autochtone, Coressus, et un fis du fleuve, c’est-à-dire quelque Phénicien arrivant par la mer et le Caystre, Ephesus, érigèrent d’abord un temple à Artémis, et la ville qui se forma autour du temple s’appela Éphèse. Elle fut d’abord peuplée, dans sa partie haute, de Lélèges Càriens et de Lydiens ; dans sa partie basse, autour du temple, d’Amazones, groupées en ce lieu pour y honorer Artémis, la grande déesse. Quand les Ioniens

de la mer fuyant sans cesse devant l’ensablement progressif du Caystre) le nom de sa femme Arsinoé, l’ancien nom d’Éphèse lui fut maintenu. »

Complétant ailleurs ses indications, le même géographe, XIV, I, 4, nous dit qu’un quartier d’Éphèse s’appelait Smyrne (du nom d’une des Amazones qui avaient vécu auprès du temple d’Artémis), que ce quartier était derrière la ville du temps du poète satirique Hipponax, 540 avant J.-C, entre les hauteurs de Trachée et de Leprée. « La hauteur appelée alors Leprée, ajoute-t-il, était le Prion, qui domine la ville actuelle (la gréco-romaine), et sur lequel court une partie des remparts ( ceux-ci, descendant et remontant, en zig-zag et à crémaillère, sur la montagne centrale, lui avaient fait donner sans doute ce nom de Prion ou de « Scie », comme à une partie ana daprès £.Le Canms.

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684. — Ruines d’Épn6se.

survinrent, sous la conduite d’Androclus, fils de Codais, ils chassèrent les Cariens et les Lydiens en masse, et ils s’établirent, dit Strabon, XIV, i, 21, autour de l’Athénéum et de PHypéléon, en occupant en même temps une partie des flancs du Coressus. S’il peut y avoir quelque difficulté à identifier chacune de ces collines, il n’en demeure pas moins vrai qu’il faut les chercher toutes dans le voisinage immédiat du temple. Songer à la montagne de l’Acropole serait absolument sortir de la donnée de nos deux géographes grecs. « On habita ainsi sur ces hauteurs, poursuit Strabon, jusqu’au temps de Crésus ; après quoi la population en descendit peu à peu et se fixa autour du temple, jusqu’à Alexandre. Lysimaque bâtit une enceinte de murs pour la ville actuelle (la ville grécoromaine), et, voyant que les habitants étaient longs à se déplacer et à s’installer dans la nouvelle cité, il profita de la première pluie d’orage pour faire fermer toutes les bouches d’égout et laisser la vieille ville dans une immense flaque -d’eau, où on ne pouvait plus circuler. Toutefois c’est en vain qu’il voulut donner à la nouvelle cité (celle qui se bâtit au pied du mont de l’Acropole-et plus à proximité

logue des remparts de Sardes, Polybe, VII, iv, 15), en sorta que les propriétés qui se trouvent derrière le Prion sont encore désignées comme situées à l’Opistholépré, ou derrière le Leprée. La Trachée, ou la Côte rocailleuse, était la partie qui est aux flancs du Coressus. La ville fut primitivement autour de l’Athénéum, aujourd’hui hors des remparts, au lieu dit de PHypélée, et le quartier de Smyrne commençait au gymnase, au delà de la villeactuelle, pour s’étendre entre Trachée et Leprée. »

Ces indications ne sont intelligibles qu’à la condition, de ne pas tenir compte du mont de l’Acropole, qui, vu son éloignement du temple, point central de la ville primitive, n’a pu être ni le Prion ni le Coressus, et n’a eu ni Leprée ni Trachée. Restent donc seules en cause la hauteur à deux sommets dont nous avons parlé et que nous avons appelée Prion, et la colline à deux étages du château d’Ayassoulouk. Or, seule celle-ci semble se prêter à une manœuvre stratégique racontée par Xénophon, Hist. gr., i, ii, 7. Thrasyllus, d’après cet historien, vient du nord, de Colophon, et, pour s’emparer d’Éphèse, il divise sa petite armée en deux sections, dirigeant les 1837

EPHESE

-1838

hoplites, par les terres fermes, vers le Coressus, et les cavaliers avec tout ce qui était légèrement armé par les lieux marécageux, vers le reste de la ville, ênl xà ëxepat xîj ; iréXeoç. Donc le Coressus faisait partie de la ville, et cela en 4M avant J.-C, c’est-à-dire avant Lysimaque, ^quand Éphèse était encore groupée autour de l’Artémisium. Le double mouvement que concertait Thrasyllus et que Diodore, xiii, 64, précise : xaxà 8yo xénou ; npoaêo>. « ç licoi-^aizo, est tout naturel dans mon hypothèse : une partie de l’armée marche sur la ville vers l’ouest, le long des marais Sélinusiens, et l’autre arrive par le nord, cherchant à surprendre les hauteurs du Coressus, château actuel d’Ayassoulouk. Un texte d’Hérodote, v, 100, suppose que le Coressus touchait au port primitif d’Éphèse. C’est là que, en 502 avant J.-C, les Ioniens laissent leurs vaisseaux pour aller assiéger et incendier Sardes : èv Kop^ffo-w xîjî’Efta(ri. La mer, d’après ce même auteur, II, 10, arrivait alors au temple de Diane. Cf. Pline, ii, 87. Enfin, toujours d’après le même historien, la vieille ville, Hérodote, ii, 26, du temps de Crésus, était à sept stades du temple, ce qui est exact si on la place sur les hauteurs d’Ayassoulouk.

Cette première difficulté de la topographie générale d’Éphèse étant élucidée, il faut se rappeler que Lysimaque déplaça la ville, ainsi qu’il a été dit plus haut, en la séparant du temple, pour la maintenir au bord de la mer qui fuyait. Dès lors’on cherchera l’Éphèse grécoromaine, celle où vécurent saint Paul, saint Jean et les hommes de l’époque apostolique, au versant septentrional des monts de l’Acropole et au versant occidental du Prion. Les ruines y sont assez considérables pour permettre une reconstitution sérieuse de la grande cité, et les récentes fouilles, dont M. Benndorf et M. Weber nous ont transmis les résultats, donneront un intérêt particulier à ce travail.

Après avoir franchi un petit cours d’eau, probablement l’un des deux bras du Sélinus, qui touchait jadis au péribole du temple, Strabon, VIII, vii, 25, on atteint une chaussée qui contourne la partie orientale du Prion et fut jadis une voie de tombeaux. Parmi les sarcophages qui la bordent des deux côtés, il en est un plus important dont la situation, correspondant assez bien à l’indication de Pausanias, VII, Il, 9, fait songer à celui d’Androclus. La base, mesurant cinq mètres sur cinq, et en belles pierres taillées, subsiste seule. Ni le temps ni les hommes n’ont fait grâce soit au monument soit à la statue du guerrier en armes qui en était la décoration principale. Si l’on se dirige au sud, vers la porte dite de Magnésie, on rencontre de grands blocs carrés, ayant servi, à droite et à gauche, de supports à de puissantes colonnes : ce sont les restes du Portique couvert que le rhéteur Damianos avait fait bâtir pour abriter à l’occasion les théories venant de l’Artémisium ou s’y rendant. Quant à la porte de Magnésie, qui par ses dispositions rappelait assez bien le Dipylum d’Athènes, elle avait trois ouvertures, une de chaque côté pour les chars, et celle du milieu pour les piétons. Des tours fortifiées la défendaient. Les deux routes, celle de Magnésie et celle de l’Artémisium, auxquelles elle livrait passage, se séparaient à cinquante mètres des murs de la ville. Franchissons les arasements de cette porte, par où Paul et tant d’autres personnages apostoliques sont passés, et pénétrons dans la ville gréco - romaine, celle qui a pour nous le principal intérêt.

La première ruine qui se dresse à notre droite est un jjymnase, celui qu’on appelait de l’Opistholépré, et qui, abrité au nord par le Prion et présentant ses cours et ses terrasses au midi, devait être particulièrement recherché en hiver. On peut constater, en outre, que des calorifères y étaient disposés pour entretenir à l’intérieur une température au gré de ceux qui le fréquentaient. Saint Paul s’est certainement promené et a discouru sous les portiques à moitié ruinés qu’on y voit encore. Ces vieilles

briques et les blocs de pierre qui les supportent ont entendu les appels énergiques qu’il adressait aux âmes au nom de Jésus-Christ. Deux édifices que l’on voit à quelques pas de là, sur la gauche, en prenant la route vers le couchant, entre le Prion et le mont de l’Acropole, ont été peut-être, l’un une basilique païenne transformée plus tard en église, l’autre un héroon de forme circulaire, devenu baptistère de la basilique dans sa partie haute, et crypte funéraire dans sa partie basse. Rien de moins fondé que sa dénomination de tombeau de saint Luc, cet évangéliste étant mort en Achaïe et ayant été enseveli à Patras. Suivent de près quelques piédestaux de l’époque romaine avec inscriptions, puis le marché aux Laines, au delà duquel un mausolée rappelle par son architecture celui de Cëcilia Métella sur la voie Appienne.

A l’issue du petit col formé par les deux montagnes et avant d’entrer dans la vallée qui s’ouvre sur la mer, on trouve vers la droite et adossé au Prion un Odéon ou petit théâtre, rappelant celui d’Hérode Atticus à Athènes. Il était de marbre blanc, avec une colonnade de granit rouge dans sa partie haute. Vis-à-vis, sur la gauche, élevé sur un soubassement de neuf couches de grandes pierres taillées, un temple dominait l’agora et semblait vouloir rivaliser avec un autre monument suspendu à la pente du mont de l’Acropole et communément appelé le Temple de Claude. Les quatre colonnes monolithes et cannelées ornant la façade de celui-ci mesuraient quinze mètres trente de hauteur. La frise et le fronton étaient du meilleur travail.

Mais revenons à l’agora, qui, au premier aspect, ne présente qu’un amas informe de ruines envahies par les ronces et les orties gigantesques. Là fut le centre de la vie politique et sociale d’Éphèse. Il faut savoir gré au comité autrichien d’avoir porté sur ce point l’effort récent de ses recherches. Les découvertes déjà faites dictent des modifications importantes à la topographie d’Éphèse gréco - romaine adoptée jusqu’à ce jour. (Cf. Les Pays bibliques, t. iii, p. 138 et suiv., et Les sept Églises de l’Apocalypse, p. 127 et suiv.) C’est par une rampe rapide, où dut être jadis un escalier, qu’on descend à l’ancienne agora, visiblement délimitée par une série de portiques détruits. À première vue, cette place publique rectangulaire, avec son puits au milieu, semble d’assez mesquines proportions. Il est vrai qu’une avenue se dirigeant vers le port romain lui servait de prolongement. Sous les colonnades, entre les boutiques des marchands et enchâssées dans le mur, des plaques de marbre apprenaient aux promeneurs les lois de l’Ionie. C’est probablement sur cette place publique qu’après l’incident des fils de Scéva, battus par les démons, Act., xix, 19, on brûla les livres de magie et de sortilèges qui, depuis longtemps, servaient à tromper la crédulité des Éphésiens. C’est de là que dut partir l’agitation, se transformant bientôt en émeute populaire, des ouvriers excités par l’orfèvre Démétrius, qui voyait son commerce de statuettes représentant soit le temple, soit Diane elle-même, et d’amulettes diverses péricliter sérieusement depuis que Paul battait en brèche le culte des faux dieux. Voir Diane, col. 1405. De l’agora au théâtre il y avait environ deux cents mètres. Les émeutiers s’y rendirent en tumulte, entraînant avec eux deux Macédoniens, Gaïus et Aristarque, compagnons de saint Paul. Ils entendaient probablement déterminer le peuple à en faire une exécution sommaire. Paul, apprenant le danger que couraient ses amis, voulut aller seul affronter l’orage et parler au peuple. Ses disciples le retinrent de vive force. Quelques Asiarques même, de ses amis, se sentant incapables de le protéger, le supplièrent de ne pas paraître au théâtre, où la foule, comme il arrive souvent, furieuse sans savoir exactement pourquoi, passa deux heures à crier obstinément : « Diane, la grande déesse des Éphésiens ! »

La cavea du fameux théâtre (fig : 585) Fe dessine toujours grandiose et profonde au flanc occidental du Prion ; mais

les gradins ont achevé de disparaître depuis notre première visite, en 1888. Une des ouvertures latérales, donnant accès aux précinctions, la seule qui soit encore debout, commence à s’ébranler et tombera bientôt, comme tout le reste, d’une irrémédiable ruine. Le portique s’est abattu sur la scène qu’il protégeait, et l’a couverte entièrement d’un amalgame confus de colonnes, de frises, de statues, d’inscriptions morcelées, s’élevant jusqu’à cinq mètres au-dessus de l’orchestre. C’est sur cette scène que le grammateus ou greffier public se présenta pour haranguer l’émeute. On sait par quel discours il parvint à ramener la foule à des idées plus sages et à la congédier. À et., xix, 35-40. Le théâtre d’Éphèse pouvait contenir vingtcinq

Caystrc. Envahissant aussitôt l’espace devenu libre par la suppression du port hellénique, la ville s’étendit vers le nord, entre le port romain et le Prion. C’était sur des terres rapprtées qu’il fallait établir les nouvelles constructions ; nais on s’y résigna en recourant à des travaux souterains, à des terrasses superficielles, telles que celle di Grand Gymnase. Cet édifice, qui par ses proportions gigantesques rappelle ce que les Romains ont érigé di plus grandiose, mesurait cent cinquante-cinq mètre du nord au sud. Sa salle centrale, dite TÉphébéion avait trente-sept mètres de long sur vingt de large, a^c voûtes d’arête reposant sur huit colonnes de granit rage, dont quatre ont été utilisées pour cons D85. — Ruines du théâtre d’Éphèse avant les fouilles autrichiennes. D’après une ihotographie de M. Henri Cambournac, en 1893.

mille spectateurs. Des gradins, même les moins élevés, on dominait toute la ville basse, et, par delà les édifices publics, la vue s’étendait jusqu’à la mer.

Au reste, du moins à l’époque grecque, où fut construit le théâtre, celle-ci était très rapprochée, et on a retrouvé le port du temps de Lysimaque à deux cents mètres seulement, en arriére d’une grande construction désignée par les uns comme le Prytanée, et par d’autres comme un gymnase (fig. 586), mais que la découverte de quelque inscription permettra seule d’identifier sûrement. Deux’énormes piliers de briques sont encore debout, conservant les arrachements des voûtes. Le jour où on soulèvera les ruines amoncelées qui couvrent le sol, une reconstitution de l’édifice deviendra facile. En moins d’un siècle, le port de Lysimaque se trouva à peu près ensablé. Il était d’ailleurs de proportions très réduites, n’ayant pas à recevoir les grands navires, qui stationnaient dans le grand port (Panormos). A l’époque romaine, on se détermina à le combler pour en établir un autre plus grand, toujours rattaché par un long canal au Panormos, qui, lui aussi, était obligé de s’en aller peu à peu vers la mer, sous les ensablements du

truire la graide mosquée d’Ayassoulouk. C’est peut-être dans l’une d6 dépendances de ce gymnase que le rhéteur Tyrannis avait la salle où il donnait ses leçons, et que Paul emprunta pour y prêcher l’Évangile. Act., xix, 9.

Les fouilleirs autrichiens, sans aborder encore le Grand Gymnase, or, commencé de planter la pioche dans les monceaux de débris qui Favoisinent au levant. Us ont supposé, à bn droit, que la ville romaine s’étendait de là au Prion, ; t ils l’ont, en effet, retrouvée un peu partout, couchéesous les ruines de constructions byzantines, et gardant les traces de l’incendie qui l’avait détruite lors de l’invasion les Goths, en 202. Une rue entière, longue de cent trent mètres, a été complètement déblayée, à cent vingt pa : environ à l’est du Grand Gymnase. Sa direction est dusud au nord. De chaque côté, elle est bordée de maisons et de magasins. Les débris utilisés pour ces constructions témoignent qu’elles furent élevées au lendemain d’unegrande catastrophe. Très certainement cette rue exhumée par les fouilleurs a vu passer, en 431, les Pères du conile général d’Éphèse, et a retenti de leurs

acclamations en l’honneur de la Vierge Marie mère de Dieu ou Théolocos.

C’est entre cette rue et le Grand Gymnase qu’ont été mis à jour, en 1896-1897, plusieurs grands monuments de l’époque romaine. Voici ce que nous écrit M. Weber à ce sujet : « On a d’abord trouvé un grand portique en forme de propylées, formé par deux rangs de cinq colonnes en marbre corallin. Devant ces colonnes, des piédestaux portaient des statues de marbre et de bronze, renversées et enlevées ou brisées par les barbares. Ce portique conduisait à une place carrée, entourée d’une colonnade. À cette place se rattache, du côté du midi, une vaste salle longue de trente-deux mètres

une énorme construction en bois dont on voit encore les restes carbonisés et qui n’avait pas de supports intérieurs, puisque le parquet, merveilleusement conservé, n’a pas gardé trace de colonnes. » Rien de précis n’est venu encore indiquer la destination et l’origine de ce superbe édifice. D’une inscription en lettres colossales ornant l’architrave extérieure, il ne reste que trois fragments, EIII nPTTANEQï ; KATTOY TOT APISTIÙ-NOS, indiquant peut-être une restauration de l’édifice à l’époque d’Adrien, mais très probablement ne visant pas la date réelle de sa construction, qu’il faut, vu la magnificence et le goût parfait de l’ornementation intérieure, faire remonter au temps des premiers Césars.

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686. — Ruines du Prytanée ou l’un gymnase. D’après une photographie de M. Henri Cambournac.

et large de seize, d’une richesse incomparable. Fermée sur trois côtés, elle communiquait avec la colonnade, à travers une grille dont on voit la trace, par huit ouvertures, formées de sept pilastres hauts de huit mètres, flanqués de demi - colonnes d’ordre corinthien et reposant sur d’immenses piédestaux. Le parquet de la salle est formé d’un placage de marbre aux dessins et couleurs les plus variés. On y compte jusqu’à treize espèces de marbres différents, parmi lesquels le vert antique a une belle place. Le revêtement des parois, également en marbre, rivalisait d’élégance avec le parquet. Ces parois étaient décorées de deux rangées de colonnes superposées, portant sur un socle continu encore en place et revêtu de plaques de marbre polychrome. Des niches rentrantes, des tabernacles saillants, la décoration variée de statues et statuettes, les tableaux en relief, les frises admirablement traitées, tout rappelle, par les formes et les couleurs, le genre d’architecture particulièrement riche qui a servi de modèle aux peintures murales scénographiques de Pompéi. La salle entière était couverte par

Devant les sept pilastres formant l’entrée de la salle, du côté de la grille, au nord, se dressaient des statues dont il ne reste que les piédestaux et quelques inscriptions insignifiantes, datées d’après la série des gymnasiarques. Trois statues brisées, véritables œuvres d’art, ont été retrouvées sous les restes de la charpente brûlée. L’une, de bronze, représente probablement un jeune athlète qui se frotte d’huile avant la lutte. Le profil très pur rappelle le Dionysos de Praxitèle. Un fragment d’inscripiion, mentionnant L. Claudius Frugianus, porte à croire, d’après la forme des lettres, qu’elle fut érigée à l’époque d’Auguste. L’autre, joli groupe de marbre blanc, représente, plus grand que nature, un jeune garçon assis, pressant du bras gauche un canard contre terre, et lançant le bras droit en l’air comme pour se défendre. Ce sujet, que l’on trouve reproduit en petits modèles aux musées du Vatican et de Florence, est d’une exécution remarquable. Le petit garçon charmant, qui ouvre la bouche et semble crier, rappelle l’Enfant à l’oie deBoétos. Enfin un groupe en basalte noir, soigneusement travaillé,

représente un sphinx à corps de lionne et aux ailes déployées, qui s’est abattu sur un jeune homme nu, renversé sur une roche, et le déchire de ses griffes ; peut-être un symbole de la volupté tuant la vigueur et l’avenir de la jeunesse, comme sur le tombeau de la courtisane Laïs, à Corinthe. Paul, Timothée, Jean et tous les hommes de l’époque apostolique ont certainement vu ces œuvres remarquables. Des fragments de marbre épars autorisent à croire qu’il y eut aussi dans cette enceinte la statue colossale de quelque empereur. Un peu au sud-est, et plus près du port romain, a été mise à jour une double colonnade, que M. Benndorf appelle une bourse, et enfin, vers Pâques, à l’ouest de la belle salle romaine décrite tout à l’heure, on a exhumé les restes d’une basilique chrétienne à trois nefs, formées par deux rangées de colonnes à chapiteaux corinthiens. Quels souvenirs faut-il rattacher à ce sanctuaire ? on l’ignore. En tout cas, le quai du port, avec nombreuses salles pour conserver le blé et mesures sur stylobates, a vu débarquer les Apôtres, Priscille, Aquila, Jean, et peut-être Marie Madeleine ou même, d’après quelques-uns, la mère de Jésus (voir Jean, Marie) ; il a vu partir Paul, Apollo et les autres prédicateurs de l’Évangile se dirigeant vers l’Europe..

A peu de distance, vers le nord-est, signalons les ruines d’un édifice peut-être très important dans l’histoire de nos origines chrétiennes, et qu’on désigne sous le nom de la Double-Église. Il se compose, en effet, de deux églises faisant suite l’une à l’autre et circonscrites par un même mur extérieur. De forme rectangulaire, le monument mesurait dans son ensemble quatre-vingt-huit mètres de long sur trente-trois de large. Dans la première de ces deux églises, celle qui est vers le couchant, on voit les restes des quatre pilastres qui supportèrent une coupole centrale. L’abside, formée par un arc de cercle inscrit dans l’espacement de ces colonnes, laissait libres deux passages latéraux par lesquels on pénétrait dans la seconde église. Celle-ci fut une petite basilique partagée en trois nefs par une double rangée de colonnes. Elle avait, comme l’autre, une abside avec ses dépendances. Il est assez probable que la Double-Église fut la cathédrale où se réunit, le 22 juin 431, le Concile œcuménique d’Éphèse. Le principal des deux sanctuaires aurait été consacré à Marie, mère de Dieu, et l’autre à saint Jean, et ainsi s’expliquerait le passage assez embarrassant puisque le verbe y est supprimé, où, dans leur lettre au clergé et au peuple de Constantinople, les Pères du Concile disent : « ’EvOa ô 6eoX6yo ; ’Iwâvvii ; xal-fi ©eofôxoç napOévo ; tj àyîa Mapt’a. » Ils se trouvent réunis dans l’église où Jean et Marie sont honorés. Voir Les sept églises de l’Apocalypse, p. 132.

Si nous continuons notre marche vers le levant, nous trouvons le stade appuyé au midi sur le Prion et au nord sur des constructions solidement voûtées. Un portique de l’époque romaine, qu’il est aisé de reconstituer dans son ensemble, puisque les bases des colonnes sont encore en place, donne l’idée des constructions monumentales servant régulièrement d’avant-corps à de tels édifices. On retrouve dans les soubassements quelques-unes des fosses où étaient tenues en réserve les bêtes pour les jeux publics. On sait que les Romains se plaisaient à établir dans les centres importants des provinces conquises, ce qui faisait le charme principal, la grande attraction des fêtes publiques à Rome, les combats de bêtes et de gladiateurs. Il y en eut à Éphèse, et peut-être Paul, qui avait entrevu ces sanguinaires amusements, pensait-il aux malheureuses victimes qu’on y vouait régulièrement à la mort pour clore le spectacle, ëff^a™’àroîavBTioi, quand, du voisinage même de ce stade, il écrivait aux Corinthiens : « Je crois que Dieu nous traite, nous Apôtres, comme les infortunés qui sont destinés à mourir les derniers dans l’amphithéâtre, nous donnant en spectacle au mande, aux anges et aux" hommes ? » I Cor., iv, 9. En tout cas, ces luttes hor ribles avaient fortement frappé son imagination, et, voulant caractériser ses propres efforts contre les adversaires de l’Évangile, il disait qu’il avait combattu contre les bêtes, s6r l pio[i.oi-/T]<ra. I Cor., xv, 32. Évidemment c’est au sens figuré qu’il faut prendre ces paroles. Cf. Appien, B. C, où Pompée s’écrie : oîoiç 67)pt’oic [ia%(5[ie8a ; S. Ignace ad Rom., v : (ft)pio|j.a-/ù> Sià y^s * t.).., t. v, col. 809, et la légende consignée dans les Acta Pauli (voir Nicéphore, H. E., ii, 25, t. cxlv, col. 821), d’après laquelle l’Apôtre aurait élé exposé à un lion et à d’autres bêtes féroces, est absolument apocryphe.

Aussi peu fondée nous semble la tradition qui montre sur un monticule, vers l’occident, au delà du port romain, la prison de saint Paul, dans une tour carrée qui se rattache aux fortifications élevées par Lysimaque. Deux murs, se croisant au dedans, y forment quatre petits appartements. On l’aborde par une porte tournée au levant, vers l’intérieur de la ville. Une inscription que les explorateurs autrichiens viennent d’y découvrir donne le nom de cette tour et de la colline sur laquelle elle était bâtie : irûpYOS toO kam&iov ni-(t>>, ainsi que de la montagne à laquelle elle se rattache, et qui s’appelait l’Hermaion et non le Coressus. — Près du mur méridional du stade, mais sans en faire partie, une porte cintrée (fig. 587), construite avec des débris où figurent des sculptures et des inscriptions aussi incomplètes que disparates, s’est mieux conservée que le reste des monuments avoisinants. On n’en connaît pas la destination. Peut-être marquait-elle l’entrée d’une voie conduisant au Prion ?

Sur cette montagne courent encore en zigzag et descendent en forme de scie, — de là son nom de Ilpiiiv, — pour remonter et redescendre encore, les arasements des vieux remparls. Sur la pointe méridionale, à cent cinquante mètres de hauteur, cinq blocs de pierre marquent la place d’un temple probablement consacré à Jupiter Pluvius et que l’on trouve figuré sur une très intéressante médaille d’Éphèse, conservée au British Muséum. À la jonction des deux collines, les Arméniens vénèrent annuellement le souvenir de saint Jean. Est-ce le lieu où il aurait habité ? En tout cas, il ne faut pas chercher là son tombeau, qui se trouvait, comme nous le dirons tout à l’heure, sur la colline d’Ayassoulouk. On sait que la tradition de l’Église orientale, remontant au moins à saint Modeste, patriarche de Jérusalem, en 632 (voir dans Photius la première des homélies de ce saint, Cod. cclxxv, t. civ, col. 243), tradition confirmée par Grégoire de Tours, De gloria martyr., 30, t. lxxi, col. 731 ; par le moine Cédrénus, édit. de Bonn, t. ii, p. 200, et par les Menées, suppose que Marie Madeleine mourut et fut ensevelie à Éphèse. L’itinéraire de Willibald, dans Itinera Hieros., Genève, 1880, fasc. ii, p. 288, dit que le pieux pèlerin, passant à Éphèse, alla admirer, en l’arrosant de ses larmes, la poussière en forme de manne qui sortait du tombeau de saint Jean, et se recommanda à Marie Madeleine, ensevelie en cette ville. Sa sépulture se trouvait dans une église portant son nom et située sur une montagne nommée Quiléon. Le sarcophage était tout ouvert. C’est là que l’empereur Léon le Philosophe fit prendre ses restes pour les transporter à Constantinople. Voir Bollandistes, Acta sanct., 22 julii. On montre encore aujourd’hui sur les hauteurs septentrionales du Prion, à l’aquilon de la ville byzantine, près de la grotte des SeptDormants, un tombeau qui aurait été celui de Madeleine ; mais on n’y voit pas trace d’église. Plus près du théâtre et sur l’autre colline aurait été, diton encore, celui de Timothée. En réalité, tout cela semble surtout très fantaisiste, et le fait que saint Jean fut enseveli sur le mont d’Ayassoulouk rend peu probable l’authenticité des sépultures de la même époque sur le Prion.

Au nord du stade, d’importantes ruines dont les substructions voûtées subsistent encore et servent d’abri aux troupeaux, furent, d’aprèsjes uns, un gymnase ; d’après les autres, le Prétoire de l’époque romaine. D’un coté il

touchait au mur de la ville, que l’on franchissait ici par la porte de Colophon, et de l’autre il n’était séparé du stade que par une grande rue à colonnades, aboutissant à la porte qui, d’après mes hypothèses topographiques, aurait été celle du Coressus. Elle regardait, en effet, cette colline, aujourd’hui dite d’Ayassoulouk, et s’ouvrait sur la voie conduisant au Coressus, en touchant au temple île Diane.

Le péribole de ce temple ayant été retrouvé, avec une inscription qui rapportait à Auguste, vers l’an 6 avant J.-C, sa reconstruction, M. Wood poursuivit énergiquement ses sondages, sur d’arriver à un heureux résultat. Il atteignit, en effet, à six mètres sous le limon, le parvis du

avait déjà été reconstruit plusieurs fois à la même place, avant que Chersiphon donnât le plan de celui qui, après deux cent vingt ans de travaux et grâce aux dons volontaires des villes d’Asie, était devenu une des merveilles de l’antiquité. Érostrate, pour s’immortaliser, l’incendia en 356 avant J.-C, le jour même de la naissance d’Alexandre. Mais les adorateurs de Diane décrétèrent qu’on en relèverait un septième encore plus beau que le sixième, et, en effet, Dinocrate, utilisant tous les perfectionnements successifs de l’art architectural, réussit à faire une œuvre plus admirable, semblet-il, que celle qui avait péri. Les plus grands artistes, Praxitèle, Parrhasius, Apelle et bien d’autres, y apportèrent un large contingent

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587. — Ruines de la porte dite de Lysimaque. D’après une photographie do M. Henri Camboumac.

fameux Artémisium, tout encombré de débris de colonnes, de frises et de chapiteaux. Le mur de la cella fut retrouvé, et l’ensemble de la reconstitution allait devenir facile. Malheureusement, comme nous le disait le regretté M. Humann, les fouilles de M. Wood eurent pour but plutôt la recherche de beaux morceaux antiques qu’une exploration des ruines, en sorte que le chercheur anglais se tint pour satisfait quand il put rapporter à Londres quelques superbes fragments, la base sculptée et trois tambours d’une des colonnes du temple, avec une tête de lion de la corniche. Cessant tout à coup de déblayer le terrain, il renonça à faire une œuvre archéologique sérieuse. Avec quelques mois de plus de travail, on aurait pu constater l’exactitude des indications architectoniques données par Pline, H. N., xxxvi, 21. Depuis vingt-cinq ans, les terres ont en partie envahi la fosse informe où coassent d’innombrables grenouilles, et où poussent les saules pleureurs ; mais les archéologues autrichiens reprendront et mèneront à bon terme ce travail important. On sait que le fameux temple de Diane ou Artémisium

de leur génie. On a parlé ailleurs (voir col. 1404) de la célèbre statue de Diane d’Éphèse, vénérée dans ce temple dont les dépendances étaient très considérables. Il fut pillé et détruit par les Goths, en 262. Une partie de ses marbres alla à Constantinople orner les palais, les cirques, les monuments impériaux et les églises. Ce qu’on laissa en place servit plus tard à ériger une belle mosquée au pied de la colline d’Ayassoulouk.

Celte mosquée, qui tombe elle - même en ruines, n’a, quoi qu’on en ait dit, rien de commun avec les traditions chrétiennes. Ce n’est ni l’église ancienne de saint Jean, ni celle de la sainte Vierge ; mais elle a été bâtie de toutes pièces par les musulmans, qui voulurent avoir ici une belle maison de prière. S’il y avait eu des hésitations dans l’esprit de quelques-uns, en raison même de l’obstination que les rares chrétiens d’Éphèse mettaient à y supposer un vieux sanctuaire chrétien, elles doivent cesser après les constatations qui viennent d’avoir lieu. Sur le grand portail occidental se trouve une inscription en relief, qui, grâce à un estampage, a été récemment déchiffrée par la

professeur Joseph Karabacek, de Vienne. Il s’ensuit que la mosquée fut bâtie, ainsi que l’avait déjà supposé M. Weber, sur les ordres du sultan Isa I er d’Aïdin. L’inscription est datée du 13 janvier 1375.

Quant à l'église de saint Jean, qu’on appelait YAposlolicon, elle fut là où était son tombeau, non pas au bas de la colline d’Ayassoulouk, mais sur la première terrasse, qu’on appelait en ce temps-là le Libate. Voir Procope, De sedif., v, 1, édit. de Bonn, t. iii, p. 310. On y arrive en franchissant le mur d’enceinte de la citadelle par une porte flanquée de tours carrées, et bâtie avec les débris des sièges soit du théâtre, soit du stade. Ces débris sont couverts d’inscriptions et de sculptures. Trois

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688. — Plan des ruines de l'église de Saint-Jean, relevé par M. G. Weber.

de celles-ci représentent des sujets homériques : Hector pleuré par les siens, la mort de Patrocle, des enfants se roulant sur des outres de vin. Le peuple y vit des scènes de martyre, et l’arceau byzantin fut appelé la porte de la Persécution.

A soixante mètres de là environ, on trouve, en montant vers le nord, un amas de ruines qui proviennent d’immenses voûtes écroulées. Les bases de quatre énormes pilastres y sont encore en place. Ces pilastres soutenaient sans doute au levant, du côté de l’abside, un dôme ou sorte de confession. Parmi les énormes débris de maçonnerie en briques qui jonchent le sol, des chapiteaux marqués d’une croix grecque ont été retrouvés. Ce sont là les restes de la grande basilique élevée par justinien, au milieu du vi » siècle, et qui demeura jusque vers la fin du moyen âge un des pèlerinages célèbres de l’Orient. On serait naturellement porté à croire qu’elle abritait le tombeau de saint Jean. Cependant M. Weber est persuadé qu’il faut chercher celui-ci un peu en dehors, au sud, dans la petite église que j’avais trouvée, en 1888, détruite par un incendie, et qu’on a restaurée assez grossièrement depuis mon dernier voyage, en 1893. Ce professeur a eu l’occasion de constater que cette chapelle était bâlie sur une église antique, et, en 1870, il y a vu une excavation profonde, où l’on avait recueilli divers débris intéressants, colonnes ouvragées, trône d'évêque, chapiteaux admirablement ciselés. Les habitants de Kirkindjé, qui sont les vrais descendants des .anciens Éphésiens et demeurent attachés à la religion

chrétienne, se hâtèrent de tout enfouir, quand ils virent comment M. Wood pillait l’Artémisium. Depuis, tout est resté sous terre, là où M. Weber l’avait vu. En explorant cette cachette trouverait-on le tombeau de l' Apôtre ? C’est possible. Dans ce cas, je serais porté à croire que le petit sanctuaire lui-même était rattaché à la basilique. Pourquoi des fouilles ne sont-elles pas entreprises par un comité chrétien sur cette hauteur ? Retrouver la fameuse sépulture du disciple bien-aimé, ne serait-ce pas une des meilleures fortunes de l’archéologie ?

L’authenticité du site est certifiée par les ruines mêmes de la basilique construite par Justinien. Procope, De ssdific, v, 1, édit. de Bonn, 1838, t. iii, p. 310, dit de cet empereur : « Sur la colline rocailleuse et inculte, en face de la ville, il édifia à la place de l’ancienne, qui tombait en ruine, une nouvelle église, si grande et si belle, qu’elle peut être comparée à celle qu’il avait bâtie à Constantinople en l’honneur des saints Apôtres, m Évidemment on éleva le superbe monument là même où la tradition montrait le tombeau. Or cette tradition était demeurée toujours vivante. Eusèbe ne dit pas seulement, H. E., v, 24, t. xx, col. 496, que Jean mourut à Éphèse, mais il attesle, E. E., iii, 39, t. xx, col. 297, qu’il y avait dans cette ville deux tombeaux d’hommes vénérables ayant porté le nom de Jean, l’un de Jean l’Apôtre et l’autre de Jean le Presbytre. Il fait répéter par Denys d’Alexandrie, H. E., vii, 25, col. 701, la même affirmation, et à Polycrate, évêque d'Éphèse, il attribue cette parole, H. E., iii, 31, t. xx, col. 280 : oOtoc èv 'Eçlo-w xexoiu.ï1t « i. Le pape Célestin, dans Mansi, t. iv, p. 1286, écrit aux Pères du concile d'Éphèse : « Selon la voix de Jean l’Apôtre, dont vous vénérez les reliques présentes. » Enfin dans la collection du même auteur, t. iv, p. 1276, nous voyons les évêques de Syrie se plaindre « qu'étant venus de très loin, il ne leur soit pas permis de vénérer les tombeaux, Xapvaxa ; , des saints et glorieux martyrs, surtout, oùy Teinta, celui du trois fois heureux Jean le théologien et évangéliste, qui avait vécu si familièrement avec le Seigneur ».

Ce tombeau avait une réputation universelle dans l'Église, et saint Augustin, Tract, cxxiy, 2, In Joa., t. xxxv, col. 1970, mentionne la tradition répandue de son temps, d’après laquelle la terre semblait y bouillonner sous le souffle de celui qui y était couché. Éphrem, patriarche d’Antioche, en 530, dans Photius, Cod. 229, édit. Bekker, p. 252-254, parle d’un parfum qu’on allait y recueillir comme à une source, et Grégoire de Tours, De glor. mart., 30, t. lxxi, col. 730, appelle cette poussière miraculeuse qui sortait du tombeau « une sorte de manne, semblable à de la farine, qui, transportée au loin dans les communautés chrétiennes, y faisait de nombreux miracles ». Le Ménologe de Basile Porphyrogénète, iii, 8 mai, t. cxvii, col. 441, raconte le même prodige. Cf. Simon Métaphraste, Patr. gr., t. cxvi, col. 704-705. Rien de plus naturel que de voir les pèlerins venir en grand nombre au célèbre tombeau. Cette affiuence avait fini par être l’occasion de transactions considérables, dans une foire célèbre, qui produisait jusqu'à cent livres d’or, soit quatre cent cinquante mille francs de droits de douane pour les marchandises importées ou exportées, ce qui était d’un gros revenu pour l'Église d'Éphèse. L’empereur Constantin VI réduisit considérablement ces droits, et ce fut une première cause de déchéance pour la basilique et les autres monuments de la cité. La seconde fut l’invasion turque, au xiie siècle. Nous avons dans les lettres inédites de Georges le Tornique, métropolitain d'Éphèse ( voir Parnassos, 1878, cité par M. Weber, Guide à Éphèse, p. 39), une indication sur l'état lamentable de l'égiise Saint-Jean à la fin de ce xiie siècle : « Les terrasses, dit-il, sont transformées en marais, parce que l’eau y séjourne ; la chaux tombe de tous côtés ; les images en mosaïque sont détruites ; les serpents et les sirènes s"y réfugient, mais les pasteurs ne peuvent y habiter. » Ce Ô

cri douloureux ne fut entendu de personne, et la basilique s’effondra sur le glorieux tombeau. Chose digne de remarque, la seule population qui habite encore Éphèse, huit ou dix familles, s’est, après bien des péripéties, instinctivement groupée aux flancs de la colline même où l'Éphèse primitive des Lélèges avait jadis été fondée.

Voir Guhl, Ephesiaca, Berlin, 1843 ; Falkener, Ephesus and the temple of Diana, Londres, 1862 ; Wood, Discoveries in Ephesus, Londres, 1877 ; E. Le Camus, Voyage aux pays bibliques, Paris, 1890, t. iii, p. 132 et suiv. ; Les sept Églises de l’Apocalypse, Paris, 1896, p. 120 et suiv, : on y trouvera la reproduction phototypique des principaux sites d'Éphèse ; F. V..1. Arundell, Discoveries in Asia Minor, 2 in-8°, Londres, 1834, t. ii, p. 247-272 ; E. Curtius, Ephesos, Berlin, 1874, et surtout G. Weber, Le guide du voyageur à Éphèse, Smyrne, 1891.

E. Le Camus.

    1. ÉPHÉSIEN##

ÉPHÉSIEN ('EçÉdtoç, Ephesius), originaire d'Éphèse, comme Trophime, Act. xxi, 29, ou habitant de cette ville. Act. xix, 28, 34, 35. Dans le texte grec ordinaire, Apoc, II, 1, l'église d'Éphèse est appelée 'Eçectévti èxxviriaîa.

    1. ÉPHÉSIENS##

ÉPHÉSIENS (ÉPlTRE AUX). Les plus anciens manuscrits ont en tête de cette Épitre : itpo « Eçsmouç ; les autres manuscrits et les versions ont le même titre, mais plus développé. Pour le détail de l’appareil critique, voir Tischendorf, Novum Testamentum grssce, editio octava major, t. ii, p. 663. Seul Marcion et des hérétiques, au dire de Tertullien, Adv. Marcionem, v, 11, 17, t. ii, col. 500, 502, lisaient en tête de cette Épitre : ad Laodicenos. Le reproche que Tertullien fait à Marcion d’avoir interpolé le titre : ad Ephesios, prouve l’unanimité de la tradition en faveur de ce titre.

I. Destinataires de l'Épître. — La lettre a-t-elle été écrite aux Éphésiens, et, si elle ne l’a pas été aux Éphésiens seuls, à qui était-elle adressée ? Cette question a reçu des réponses très diverses. Établissons d’abord les faits. — 1° Examen externe. — Chap. 1, ^.1, nous lisons : Paul, apôtre de Jésus-Christ par la volonté de Dieu, tôt ; àfcoiç toïç ouatv [èv 'Eçé<T(o] xal tucttoï ; èv Xpiarw 'ItietoO. La lettre primitive contenait-elle ces deux mots : iv 'Eçéffw ? Si l’on excepte le Sinaiticus, le Vaticanus et le Codex 67, tous les manuscrits grecs ont Iv 'Eçéuw. A remarquer en outre que ces mots ont été ajoutés dans le Vaticanus et le Sinaiticus par une seconde main, et que dans le Codex 67 ils avaient été écrits par le copiste, puis effacés par le correcteur. Le canon de Muratori ( voir Canon, col. 170), toutes les anciennes versions, ainsi que les Pères de l'Église, lisent aussi èv 'Eçécro). Cependant l’argumentation d’Origène, Commentaire perdu sur l'Épître aux Éphésiens, dans la Catena de Cramer, p. 102, suppose qu’il n’avait pas èM 'Eçéum dans son texte. Saint Jérôme fait allusion probablement à ce passage d’Origène lorsqu’il dit : Alii vero simpliciter non « ad eos qui sintv, sed « ad eos qui Ephesi sancti et fidèles sint ». In Ephes., t. xxvi, col. 443. Tertullien, pas plus que Marcion, n’avait dans son exemplaire èv 'Eçéutij ; autrement Tertullien, t. ii, col. 500, aurait accusé Marcion d’avoir interpolé non seulement la suscription de l'Épître, mais aussi le texte. Saint Basile le Grand, Contra Eunom., ii, 19, t. xxix, col. 612, cite l’adresse de l'Épître sans y intercaler èv 'Eipé<xm, et déclare que ses prédécesseurs ont ainsi transmis le texte et qu’il l’a trouvé lui-même en cet état dans les anciens manuscrits. Cf. Épiphane, Her., xiii, 9, t. xii, col. 708, et t. xlvii, col. 721. — 2° Examen, interne. — Saint Paul avait fondé l'Église d'Éphèse, et, sauf une absence de quelques mois, il passa dans cette ville trois ans, de l'été de 54 à la Pentecôte de l’année 57, ne cessant pendant ces trois ans, comme il le dit aux anciens d'Éphèse, de les exhorter avec larmes, jour et nuit. Act., xx, 31. Le récit des Actes des Apôtres, xviii, 19, et six, 1-xx,

prouve que la prédication de saint Paul fut écoutée avec faveur, et que beaucoup de Juifs et de païens devinrent chrétiens. Le discours, Act., xx, 18-35, que saint Paul adresse aux anciens de l'Église d'Éphèse, qu’il avait appelés auprès de lui, montre bien l’affection réciproque qui unissait Paul et cette Église. Au moment du départ tous fondirent en larmes, et, se jetant au cou de Paul, ils l’embrassèrent. Act., xx, 37. On voit d’ailleurs, dans le discours de l’Apôtre, nettement exprimées des inquiétudes au sujet des erreurs qui pourraient se glisser dans cette Église. Act., xx, 29, 30. Si nous considérons les rapports familiers qui existaient entre Paul et les Ephésiens, les liens d’affection qui les unissaient, les périls et les dangers de toute nature qu’ils ont courus ensemble, comment expliquer le ton grave, froid, didactique, de cette lettre, où l’on ne retrouve aucun souvenir personnel, aucune allusion au séjour de Paul à Éphèse, aucune des effusions que l’Apôtre prodiguait d’ordinaire dans ses Épîtres à ses fils dans la foi ? L'Épître aux Colossiens, écrite en même temps que celle aux Éphésiens, et adressée à une Église que l’Apôtre n’avait pas fondée et qu’il ne connaissait pas, est beaucoup plus affectueuse. Col., i, 8, 9, 24 ; ii, 1, etc. Il envoie ses salutations aux fidèles de Colosses et à ceux de Laodicée, qu’il n’avait jamais vus, Col., IV, 15, 18, et pour les Éphésiens, qu’il avait évangélisés pendant trois ans, il n’a au commencement de la lettre, I, 1-2, que des bénédictions générales à leur adresser, et à la fin, VI, 23-24, que des souhaits qui pouvaient être faits à tous les chrétiens. Il ne parle pas de ces pasteurs d'Éphèse à qui il avait fait récemment de si touchants adieux ; il n’envoie aucune salutation de la part de ceux qui l’entourent. Timothée, bien connu des Éphésiens, et qui est auprès de lui, n’est pas associé à l’Apôtre pour l’envoi de la lettre, tandis qu’il l’est pour les lettres à Philémon et aux Colossiens. En outre, certains passages s’expliquent difficilement, s’ils s’appliquent uniquement aux Éphésiens, 1, 15 : « C’est pourquoi, moi aussi, ayant entendu parler de votre foi au Seigneur Jésus…, je ne cesse de rendre grâces pour vous. » Et plus loin, iii, 1, 2, saint Paul rappelle qu’il est, par vocation spéciale, l’Apôtre des Gentils, et il ajoute, iii, 1 : « Si du moins vous avez entendu parler, efye tjxoûwxte, de la dispensation de la grâce de Dieu, qui m’a été donnée pour vous. » Enfin, après avoir décrit les désordres des païens, Paul dit à ses lecteurs, iv, 21 : « Pour vous, ce n’est point ainsi que vous avez appris le Christ, si du moins vous l’avez entendu, eïye aû-rôv TjxoûdaTs, et si vous avez été instruits en lui… » Quoique la conjonction et-ys ait plutôt un sens emphatique qu’un sens négatif, et qu’elle ne suppose chez l'écrivain aucun doute au sujet de l’idée qu’il exprime (Hort, Prolegomena to the Ephesians, p. 95), il n’en reste pas moins difficile à comprendre que saint Paul ait pu adresser de semblables paroles à une Église qui lui devait toute la connaissance qu’elle avait de JésusChrist et de son Évangile. Quelques critiques ont conclu de ces observations que cette Épitre n'était pas de saint Paul. Faisons remarquer que, au contraire, si elle était d’un faussaire, celui-ci aurait eu soin, pour lui donner un cachet d’authenticité, d’y intercaler des détails rappelant les rapports de Paul avec l'Église d'Éphèse, et qu’il aurait évité tout ce qui pouvait faire mettre en doute que saint Paul fût l’auteur de l'écrit. — 1. Un grand nombre de critiques, Usher le premier, et à sa suite, parmi les catholiques, Garnier, Dupin, Vallarsi, Hug, Glaire, Reithmayr, Valroger, Lamy, Bisping, Duchesne, Fouard, et parmi les non-catholiques, Bengel, Olshausen, Reuss, Oltramare, Ellicott, Lightfoot, Hort, Weiss, Haupt, Abbott, Zahn, etc., expliquent les faits en supposant que l'Épître aux Éphésiens est une lettre encyclique. Elle était adressée aux Églises d’Asie Mineure, et Tychique, porteur aussi des lettres à Philémon et aux Colossiens, écrites à la même époque, devait la remettre aux destinataires. En avait-on fait plusieurs copies, ou bien Tychique avait-il une seule

lettre, qui était lue à chaque communauté chrétienne, et dont celle-ci prenait copie en y insérant son-nom au premier verset : IlaCiXoç…, toîç &y(o'. ; toï ; owtiv Èv…? C’est ce qu’on ne peut préciser, quoique la seconde hypothèse paraisse plus probable. Cette lettre est celle que les Colossiens devaient recevoir de Laodicée, Col., iv, 16 ; car la lettre de Laodicée n'était pas une lettre spécialement adressée aux Laodicéens, autrement saint Paul n’aurait pas chargé les Colossiens, Col., IV, 15, de ses salutations pour les frères de Laodicée ; il les leur aurait envoyées dans la lettre dont il parle, iv, 16. Toute la tradition la tenait unanimement pour adressée aux Éphésiens, parce que probablement la copie qui a subsisté et qui a fait foi était celle de l'Église d’Ephèse, métropole de l’Asie. Que des copies avec une autre adresse aient existé, le fait est prouvé par Marcion. Si cette Épître est une lettre-circu-laire, on comprend très bien que Paul, s’adressant aux Églises ethnico - chrétiennes d’Asie et de Phrygie, que pour la plupart il n’avait pas évangélisées, l’ait écrite en son seul nom, sans y joindre celui de Timothée ; qu’il fasse ressortir sa vocation d’Apôtre des Gentils, ainsi que la révélation par laquelle il a connu le plan de Dieu pour la rédemption du genre humain, iii, 2-12 ; qu’il n’y ait introduit rien de spécial à qui que ce soit, aucune salutation particulière, et que d’ailleurs Tychique ait été chargé de transmettre à chacun ce qui lui était particulier et les détails sur les actes de l’Apôtre. Eph., VI, 21. — 2. D’autres critiques, Goldhagen, Danko, Drach, Bacuez, Cornely, maintiennent que la lettre a été écrite aux seuls Ephésiens. On fait remarquer, que les preuves externes sont pour la destination exclusivement éphésienne, ainsi qu’il ressort de ce qui a été dit plus haut. Les arguments internes, qui paraissent s’y opposer, peuvent être expliqués. Les paroles de saint Paul, i, 15 ; iii, 2 ; iv, 20, n’ont pas le sens qu’on leur attribue. Voir Cornely, Introd. in Novi Testamenti libros, p. 497. Les Épîtres aux Thessaloniciens et la seconde aux Corinthiens sont privées aussi de salutations, ainsi que l'Épitre aux Galates ; il est vrai que celle-ci était circulaire. Le P. Cornely ne peut expliquer pourquoi Paul s’est abstenu dans cette lettre des allusions personnelles, si fréquentes dans les autres ; mais cette difficulté nelui paraît pas suffisante pour abandonner la tradition, qui unanimement l’a crue adressée aux Éphésiens. Elle n’a en outre aucun des caractères d’une let’re - circulaire, comme celle qu'écrivit l’Apôtre aux Églises de Galatie ou celle à l'Église de Corinthe, qui devait être communiquée aux fidèles de l’Achaïe. Il est ridicule enfin de supposer que Paul avait laissé dans l’adresse de sa lettre un espace, en blanc qui devait être rempli par le nom de ceux à qui Tychique remettait l'Épitre. L’occasion et le but de cette Épître peuvent s’expliquer de la même manière, quelle que soit l’opinion que l’on adopte au sujet des destinataires.

II. Occasion et but de l'Épître aux Éphésiens. — Il est impossible de dire avec certitude à quelle occasion et dans quel but saint Paul écrivit l'Épitre aux Éphésiens. Cette lettre semble être simplement une exposition dogmatique et morale du christianisme. Aussi plusieurs critiques soutiennentils que saint Paul n’a pas eu en l'écrivant de but déterminé, mais qu’il voulait communiquer aux chrétiens d’Asie un don spirituel, ^âpuri** 7rvEu(iaTtxôv, comme il fit autrefois pour les Romains. Rom., i, 11. Cependant, étant donné les relations entre cette lettre et l'Épitre aux Colossiens, il est possible de faire sur les intentions de l’Apôtre quelques conjectures plausibles. Saint Paul, prisonnier à Rome, avait appris d'Épaphras, son disciple, quelle était la situation religieuse et morale de l'Église de Colosses et probablement aussi celle des autres Églises d’Asie. Il écrivit donc à Colosses, pour prémunir les chrétiens de cette ville contre les erreurs qui se faisaient jour spécialement chez eux^ et en même temps il écrivit une seconde lettre, où il traitait la question à un point de vue plus général. Ce fut la lettre

aux Éphésiens. Il y enseigne l’unité de l'Église en JésusChrist ; mais il semble ressortir de divers passages que cet enseignement général a pour but de prémunir ses lecteurs contre certaines erreurs, qui tendaient à se répandre dans les Églises d’Asie. L’Apôtre ne combat pas directement les erreurs, mais il les détruit en enseignant les vérités chrétiennes qui leur sont opposées.

1° En effet, le christianisme avait fait de rapides progrès dans les villes de l’Asie ; les nouveaux convertis étaient des Juifs, fort nombreux dans ce pays, et des Gentils adonnés aux désordres moraux, ainsi qu’aux superstitions et aux spéculations transcendantes, originaires de l’Orient, Probablement les Juifs méprisaient les païens, qui n’avaient pas eu part à l’ancienne alliance ; de là nécessité pour l’Apôtre de leur enseigner à tous le mystère qui lui avait été révélé, l'Évangile, pour lequel il avait été appelé à l’apostolat. Il fallait donc établir la position des païens dans l'Église en face des Juifs, et montrer que les païens n'étaient plus des étrangers, mais des concitoyens des saints, Eph., Il, 19, qu’ils faisaient partie d’un même corps et qu’ils étaient participants à la môme promesse en Jésus-Christ par l'Évangile, iii, 6, et qu’ainsi le mur de séparation étant abattu, ii, 14, tous, païens et Juifs, devaient, ainsi qu’il les exhorte, avoir « un seul corps et un seul Esprit (comme aussi vous avez été appelés dans une seule espérance de votre vocation), un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous ». IV, 4-6.

2° Ces païens, et peut-être aussi les Juifs, étaient imbus des spéculations orientales, qui s'étaient fait jour à Colosses. Saint Paul y fait allusion quand il dit que les Apôtres ont été établis pour l'édification du corps du Christ, jusqu'à ce que nous soyons tous parvenus à l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu…, « afin que nous ne soyons plus des enfants, flottants et emportés çà et là par tout vent de doctrine, par la tromperie des hommes, par leur ruse dans les artifices de l'égarement. » Eph., IV, 12-14. Pour mettre ses lecteurs en garde contre ces erreurs, l’Apôtre leur rappelle que la grâce a été répandue sur eux avec toute sorte de sagesse et de jugement, I, 8 ; que l'Évangile du salut est parole de vérité, I, 13, et enfin lorsqu’il établit dans tout ce paragraphe, I, 3-14, la dignité suréminente de Jésus-Christ. Plus loin, 15-23, en opposition aux théories des faux docteurs sur les anges, il affirme la souveraineté duChrist sur tous les êtres créés, célestes et terrestres ; et pour combattre le faux ascétisme, il montre comment jles bonnes œuvres sont le fruit de la foi. ii, 9, 10. Ce' point de vue ressort bien davantage dans la deuxième partie de l'Épitre, où saint Paul a voulu établir que la famille était d’institution divine, que l’union des époux devait être sainte ; c’est un avertissement de ne pas écouter ceux qui, sous prétexte d’atteindre à une sainteté supérieure, prétendaient que le mariage est une souillure.

3° Enfin ces païens, ainsi que le leur dit saint Paul, étaient morts par leurs offenses et leurs péchés, dans lesquels ils ont marché autrefois, et tous, les Juifs aussi bien, vivant dans les convoitises de la chair, faisant les volontés de la chair et de leurs pensées, ii, 1-3, devaient être instruits de leurs devoirs moraux, pour être purs et sans tache en présence de Dieu. I, 4. — Le but de saint Paul, en écrivant sa lettre aux Éphésiens, a donc été de dévoiler le plan éternel de Dieu pour le salut de l’humanité par la rédemption de Jésus-Christ, et d'établir que Juifs et païens formaient un seul corps, l'Église chrétienne, et ensuite d'édicter les préceptes moraux de la vie chrétienne, suite nécessaire du salut en Jésus-Christ.

III. Lieu de composition et date de l'ÉpItre. — Elle a été écrite par saint Paul, prisonnier, Eph., iii, 1 ; iv, 1, et a été portée à sa destination par Tychique, en même temps que l'Épitre aux Colossiens. Eph., vi, 21 ; Col., iv, 7, 8. Elle a donc été composée probablement à Rome, vers la fin de l’an 61 ou au commencement de l’an 62,

où, suivant Cornely, à la fin de l’an 63. Voir les preuves, Colossiens (ÉpItre aux), t. ii, col. 867-869. Harnack, Die Chronologie der altchr. Literatur, t I, p. 717, place les Épîtres de la captivité, aux Colossiens, à Philémon, aux Éphésiens, aux Philippiens, en l’an 57-59 (56-58). Il est difficile de dire laquelle, de l’Épitre aux Colossiens ou de celle aux Éphésiens, a été écrite la première. Elles présentent des ressemblances si frappantes d’idées et de termes, qu’elles ont dû être composées à la même époque, peut-être à quelques jours de distance seulement. La lettre aux Colossiens étant plus particulière, visant des erreurs plus définies, et celle aux Éphésiens étant plus générale, on en a conclu ordinairement à la priorité de l’Épitre aux Colossiens ; cette fixation repose sur des données toutes subjectives.

IV. Canonicité. — La canonicité de l’Épitre aux Éphésiens ressort de ce fait que, ainsi que nous allons le démontrer, elle a été employée par les Pères de l’Église des premiers siècles comme Écriture divine, et qu’elle est cataloguée dans la plus ancienne liste d’écrits canoniques, le canon de Muratori, et dans les autres canons. Elle est dans les vieilles versions latines et syriaques, dans les plus anciens manuscrits, Vaticanus etSinaiticus, avec ce titre : ad Ephesios.

V. Authenticité. — 1° Preuves extrinsèques. — La tradition chrétienne a unanimement cru que l’Épitre aux Éphésiens avait été écrite par saint Paul. Saint lrénée est le premier qui nomme Paul comme l’auteur de cette lettre, mais elle a été connue par les Pères apostoliques. Quelques passages de saint Clément Romain ont pu être inspirés par l’Épitre aux Éphésiens : I Cor., xlvi, 5, 6, 1. 1, col. 308, et Eph., iv, 4-6 ; I Cor., lxiv, t. i, col, 304, et Eph., i, 4 ; I Cor., xxxvi, 2, t. i, col. 281, et Eph., i, 18 ; I Cor., xxxviii, 1, t. i, col. 284, et Eph., v, 21. Les ressemblances entre ces divers passages sont très vagues, et il serait possible qu’elles viennent du fond commun de la tradition chrétienne ; deux seulement ont plus de consistance. Chap. lxiv, t. i, col. 304, saint Clément dit en parlant de Dieu : ’0 £xXe ! |àu£voc tôv Kvpsov’It)<joOv Xpuiôv xct *ii*5î Si’ctÙToû eïç ao-i nspioiiffiov. Quoique ce texte ait pu avoir son origine première dans le Deutéronome, xiv, 4, la combinaison de l’élection de JésusChrist et de celle des chrétiens par le moyen de Jésus-Christ pour être le peuple préféré de Dieu, la seconde élection dépendant de la première, cette combinaison rappelle de très près Eph., i, 4.

— Chap. xlvi, 6, t. i, col. 307, saint Clément demande aux Corinthiens : "H où/i êva ©ebv s^opttv xai eva Xptjrov xa êv mve’j|ia ttjç ^âpiTOç t’o èx^uflèv èç’t^ïç, xa fiîa xXfjot ; h Xpio-E<jS ; paroles qui rappellent Eph., iv, 4-6, et cela d’autant plus que saint Clément ajoute : « Pourquoi disperser les membres du Christ et troubler par des séditions son propre corps, et en venir à une telle folie d’oublier que nous sommes les membres les uns des autres ? » Cf. Eph., IV, 25. — La Doctrine des douze Apôtres, IV, 10, 11, et l’Épitre de Barnabe, xix, 7, t. ii, col. 777, contiennent des préceptes aux maîtres et aux serviteurs, lesquels ressemblent beaucoup à ceux de l’Épitre aux Éphésiens, vi, 9, 5. — Les critiques ne sont pas d’accord sur le sens de ce passage de saint Ignace d’Antioche, Ad Eph., xii, 2, t. v, col. 656 : « Vous êtes les co-initiés, ffu(i[ivffTai, de Paul, ôç iv tïxctt] eTuatoXy] [ivyjfioveuei 6[icov. » Fautil traduire : Paul, qui, dans toute sa lettre ou dans toute lettre, se souvient de vous ? Le premier sens supposerait une allusion de saint Ignace à l’Épitre aux Éphésiens, mais il est peu conforme aux règles grammaticales. On retrouve cependant dans la lettre de saint Ignace aux Éphésiens plusieurs expressions qui ont pu être inspirées par l’Épitre aux Éphésiens. Voir en particulier l’adresse de l’épître, t. v, col. 644, et Eph., i, 1 ; Ad Eph., 1, 1, t. v, col. 644, (iipirjT*t ôvte ; éîoû, cf. Eph., v, 1. Dans l’épître à Polycarpe, v, 1, t. v, col. 724, Ignace l’engage à ordonner à ses frères : àixr.iv ti ; « uilSîo-jç <î> ; & KOpio ; ït|v’ExxXtjjîï’». Cf. Eph., v, 29. La description de l’armure

que doit revêtir le chrétien, Ad Polyc, vi, 2, t. v, col. 726, a été suggérée par Eph., vi, 11. Saint Polycarpe écrit aux Philippiens, i, 3, t. v, col. 1005 : EiSfoe ; ôti zipirt è<rre aeuwfiivoi o-jx IÇ ëpY<ov àXXà 6eXirç|j.aTi 0eoO 8tà’It)<joO Xpurroû ; cf. Eph., ii, 8, 9. Comparez encore Polycarpe, Ad Philipp., xii, 1, t. v, col. 1014, et Eph., iv, 26 ; Hermas, Mand., iii, 1, t. ii, col. 917, et Eph., iv, 25, 29 ; Mand., x, 2, 5, t. ii, col. 940, et Eph., iv, 5. Saint Justin, Contra Tryph., xxxix, 7, t. vi, col. 559, cite le Psaume lxviii, 19, sous la forme que lui donne Eph., iv, 8. Saint lrénée, citant des passages de l’Épitre aux Éphésiens, Eph., v, 30 ; ï, 7 ; ii, 11-15, les introduit par ces paroles : Kaôùic à [iaxip-.o ; IlaûXoc çTjtriv èv tïj itpô{’Ef e<n’ou « ImffToXïj, Adv. hser., v, 2, 3, t. vii, " col. 1126, et : Quemadmodum apostolus Ephesiis ait, Adv. hser., v, 14, 3, t. vii, col. 1163. Clément d’Alexandrie attribue aussi nommément l’Épitre aux Éphésiens à saint Paul, Strom., iv, 8, t. viii, col. 1275 ; Psed., i, 5, t. viii, col. 270. Il en est de même d’Origène, De princip., iii, 4, 1. 1, col. 328. Du témoignage de Tertullien, Adv. Marc, v, 11, 17, t. ii, col. 500 et 512, il ressort qu’il a existé une lettre de Paul, que Marcion disait avoir été adressée aux Laodicéens, tandis qu’au témoignage de l’Église elle l’avait été aux Éphésiens. Pour le témoignage que les hérétiques, Naasséniens, Basilides, Valentin et ses disciples Ptolémée et Théodote, rendent à l’authenticité de l’Épitre aux Éphésiens, voir les références dans Cornely, Introd. in Novi Test, libros, p. 506-507. — Après avoir discuté les preuves externes d’authenticité, Ilort conclut qu’il est à peu près certain que l’Épitre existait vers l’an 95, et absolument certain qu’elle existait quinze ans plus tard. On pourrait faire remarquer que l’existence de l’Épitre aux Éphésiens se trouve attestée par l’usage qui en a été fait dans la première ÉpItre de Pierre. Cette question sera discutée plus loin.

2° Preuves internes. — Les critiques qui nient, en totalité ou en partie, l’authenticité de l’Épitre aux Éphésiens présentent surtout des arguments tirés de l’examen interne de cette lettre. Usteri, Entwkkelung des paulinischen Lehrbegriffs, 1824, émit, sous l’influence de Schleiermacher, des doutes sur l’authenticité de l’Épitre aux Éphésiens. Ainsi qu’on le voit par son Einleitung in das Neue Test., publié en 1845, Schleiermacher rejetait cette Épitre, parce qu’elle n’était paulinienne ni par la langue ni parles idées ; deWette, Einleitung in das Neue Test., 1826, soutint que l’Épitre aux Éphésiens, œuvre d’un disciple de Paul, était une paraphrase verbeuse de l’Épitre aux Colossiens ; Ewald, Davidson, Renan, Ritschl, Weizsàcker, ont adopté cette théorie, en la modifiant pins ou moins. Baur et ses disciples, Schwegler, Kôstlin, Hilgenfeld, Hausrath, ont cru découvrir dans l’Épitre aux Éphésiens des traces de gnosticisme et de montanisme, et l’ont repoussée jusqu’au milieu du n » siècle. Pfleiderer la regarde comme l’œuvre d’un judéo-chrétien, paulinien, désireux de réconcilier les partis adverses. Hitzig et Holtzmann supposent qu’il a existé une lettre primitive de saint Paul aux Colossiens, d’après laquelle un disciple de Paul a écrit l’Épitre aux Éphésiens ; de Soden et Klbpper ont plus ou moins modifié cette hypothèse, mais ont nié l’authenticité. — Toutes les objections soulevées contre l’authenticité de l’Épitre aux Éphésiens peuvent être classées sous trois chefs : la forme, le fond de l’Épitre et ses rapports avec l’Épitre aux Colossiens.

ï. forxb de L’épître. — Nous devrions d’abord répéter les réflexions que nous avons déjà faites, col. 872, à propos d’objections analogues dirigées contre l’Épitre aux Colossiens, à savoir qu’un écrivain serait bien monotone, si on trouvait dans ses livres toujours le même nombre restreint de mots ; en outre, qu’il est difficile de juger la langue d’un écrivain dont on a quelques lettres seulement, et qu’en tout cas les Pères grecs, bons juges en la matière, ont tous accepté cette Epitre comme étant de saint Paul. Constatons seulement qu’actuellement, même

chez les critiques rationalistes, on se rend compte combien est peu décisif ce critérium de la langue, et du style. Pour en faire un usage légitime il faudrait posséder, pour les mettre en comparaison, des ouvrages du même auteur, écrits à peu près à la même époque et sur un sujet analogue.

1° Langue de l’Épître. — D’après Thayer, il y a quarante-deux mots dans cette Épltre qui ne se retrouvent ni dans saint Paul ni dans les autres écrits du Nouveau Testament ; il y en a, d’après Hollzmann, trente-neuf qui se rencontrent dans le Nouveau Testament et non dans les lettres de saint Paul, donc quatre-vingt-un mots inconnus à saint Paul, et dix-neuf qu’on ne trouve que rarement dans les écrits de saint Paul. Enfin de Wette cite une dizaine de mots qui n’ont pas dans l’Épitre aux Éphésiens le même sens que dans les autres Épltres. Une observation importante doit être faite tout d’abord. Les phénomènes que nous venons de relever se reproduisent dans les autres Épltres de saint Paul ; chacune d’elles a un certain nombre de mots que l’Apôtre n’a pas employés ailleurs, mais qui ne sont nullement caractéristiques, et elle possède aussi des mots qui sont des feai ; Xeyôjieva. Relativement, l’Épitre aux Éphésiens en a moins que la première Épitre aux Corinthiens. La première a 2400 mots et 42 cÉTt. Xey., la deuxième a 5000 mots et 108 o.k. Xey. ; par conséquent, il y a 2° / d’Sit. Xey. dans l’Épitre aux Corinthiens, et seulement 3/5 dans l’Épître aux Éphésiens. Mais il importe surtout d’examiner les mots de l’Épitre aux Éphésiens que saint Paul n’a pas employés ailleurs, les Épltres pastorales et l’Épître aux Colossiens exceptées. Il y en a quatre-vingt-un ; sur ce nombre it faut d’abord défalquer neuf mots qui ne se trouvent que dans les citations de l’Ancien Testament ; quinze se retrouvent dans l’Épitre aux Colossiens et sont pauliniens, puisque cette Épitre est actuellement tenue pour authentique en très grande partie, même par les critiques rationalistes. Quelques mots tels que ôryvota, ànonàu>, 8ûpov, [liyeôoç, çpôvi)<ji ; , ûij/oc, sont des mots si communs, qu’on s’étonne que saint Paul ne les ait pas employés dans ses autres Épîtres. Comment aussi ne retrouve-t-on pas dans ses lettres awtïipiov et svairXayxvo ; ? De plus, ces mots, employés une seule fois dans l’Épître aux Éphésiens, ne peuvent être regardés comme caractéristiques d’un écrivain. Parmi les mots signalés, il en est qui appartiennent à la description de l’armure du chrétien et par là même sont spéciaux ; il y en a six. Aé<rquoç, qu’on retrouve d’ailleurs dans l’Épitre à Philémon, i, 9, ne pouvait être employé que par Paul prisonnier. Cependant, lorsque Paul dit qu’il est dans les chaînes, il se sert du terme êv Seu[ioïç, voirPhil., i, 7, "13, 14, 17, tandis qu’ici il emploie : iv âXùoet ; « peffëeûw èv âMæt, vi, 20 : l’Évangile pour lequel je suis ambassadeur, vêtu d’une chaîne. Cette diversité des mots s’explique, parce qu’ici il s’agit de captivité en général plutôt que de chaînes concrètes. On trouve aussi plusieurs mots composés avec <xùv ; cela s’explique par le sujet traité : unité de l’Église, union du chrétien en Jésus-Christ ; il en est de même pour les mots é-/apiT « ><Tev, ixXi)pâ>6ï)|i.ev) demandés par l’idée développée. Les autres mots, tels que xocTapTia[16ç, irpoo-xapTÉp^atç, ôaioT7]î, avoi-Çic, ne peuvent être regardés comme étrangers à saint Paul, puisque celui-ci a employé des termes analogues : xaTapTi’Çw, xotTàpuixtç, itpo<TxapTepeîv, jac’wc, avoifo)- Remarquons enfin que l’Épitre aux Galates, regardée comme authentique même par Baur et son école, contient quarante-deux mots qui ne sont pas dans les autres Épîtres de saint Paul. Ceci montre le peu de valeur de ces calculs de mots. L’observation de de Wette serait plus sérieuse si elle était fondée. Saint Paul, dit-il, exprime autrement certaines idées, et les mots employés ici ont un sens différent dans ses autres Épîtres. Mais il n’en est rien. EuXoyîot, dans Eph., i, 3, a le même sens que dans Rom., xv, 39 ; oiûva, Eph., ii, 2 = Rom., xii, 2 ; Gal., i, 4 ; funiaou, Eph., iii, 9 = çwti’ohov, II Cor., iv, 4, 6 ; ivarf, piov, Eph., v, 32 = I Cor., xv, 51 ; xiii, 2 ; Rom., xi, 25 ; <xcp6ap<xta, Eph., vi, 24 = Rom., iii, 7 ; I Cor., xv, 53, 54 ; oixovofu’a, Eph., iii, 2 = 1 Cor., ix, 17. Les mots kXy]pow, Eph., iv, 10 ; hXt)Poù<tt : iii, Eph., i, 23 ; iii, 19 ; « Xt, pw (ia, Eph., i, 10, 23 ; iii, 19 ; iv, 13, mériteraient d’être discutés à part. En fait, ils ne sont que l’extension d’un sens de ces mots, familier à saint Paul. Quant à 81160Xoc, Eph., iv, 27 ; vi, 11, nous ne voyons pas pourquoi saint Paul l’a employé de préférence à Estoc-vcU, le mot dont il s’est servi huit fois dans les autres Épîtres. Les écrivains du Nouveau Testament emploient indifféremment SiâêoXo ; et Earotvâ ; , il est probable que saint Paul aura fait de même. Il serait trop long de nous arrêter aux autres expressions mises en cause ; on les trouvera discutées dans le commentaire d’Oltramare, et surtout présentées en détail dans Brunet, Authenticité de l’Épître aux Éphésiens, preuves philologiques, p. 59-75. Il serait aussi possible de prouver que les formules caractéristiques de cette Épitre se retrouvent dans saint Paul, c’est ce qui a été fait dans Brunet, Authenticité, p. 21-52. Enfin nous avons dans l’Épitre aux Éphésiens vingt-deux mots que saint Paul seul a employés, car on ne les retrouve pas dans le Nouveau Testament : àya6<TÛVï], v, 9 ; àXr, 6eôsiv, IV, 15 ; àvaxe^aXaioucOo », I, 1 ; àveïi/vt’aa-co ; , III, 8 ; àitXÔTïjç, vi, 5 ; àppaêûv, 1, 14 ; lm-/oç-tftla., iv, 6 ; eûvoia, vi, 6 ; eûwSia, v, 2 ; GôXtisiv, v, 29 ; xâpi-TtTeiv, m, 14 ; Tteptx-paXaia, vi, 17 ; TtXeovéxTvic, v, 5 ; 7toîr)[ia, II, 10 ; jtpea-êeûeiv, vi, 20 ; 7cpoerot[iâÇetv, II, 10 ; Tipooaytoy^, II, 18 ; 7cpoTt6ej9a[, I, 9 ; utoôetria, I, 5 ; ÛTcepëâXXssv, I, 9 ; ii, 2 ; Û7tepexTepi<T<Toû, iii, 20 ; àpa oiv, ii, 19, très remarquable comme caractéristique du style de saint Paul, qui l’a employé douze fois, tandis que les autres écrivains du Nouveau Testament ne l’emploient jamais. 2° Style de l’Epître. — 1. Le style de l’Épitre, a-t-on dit, est lourd, embarrassé, diffus ; les particules logiques oîv, apa, apa oiv, 81b, 81<Sti, yàp, y sont rares ; l’auteur abuse de Voratio pendens. Les phrases sont d’une longueur démesurée ; elles sont reliées par des clauses qui insèrent mal les propositions l’une dans l’autre, ou elles sont coupées de parenthèses ou brisées par des constructions grammaticales irrégulières. Il y a répétition des mêmes mots, accumulation de génitifs. Haupt, Der Brief an die Epheser, p. 56, relève quatre-vingt-treize génitifs. Il signale les liaisons prépositionnelles, étrangères à saint Paul : àyaôbç 7tpôç ti, iv, 29 ; àyâroi [isrà TtfaTCwç, vi, 23 ; 8éy]<ti ; nepi, vi, 18 ; xa-à ttjv eû80xiav, i, 5, 9 ; les unions de mots autres que dans saint Paul : àyarcàv T7jv’ExxXï)<n’av, v, 25 ; 818ôvai ttvi tt, i, 22 ; forte yivwmcovrec, v, 5 ; îva, avec l’optatiꝟ. 1, 17 ; iii, 16 ; 7tXïipoûa8ai ef « ti, ii, 19. Les mêmes observations pourraient être faites au sujet d’autres Épîtres. Toutes les fois que l’Apôtre ne combat pas directement des adversaires et qu’il expose une doctrine, son style devient traînant. Voir Colossiens (Épître aux), col. 873. Les particules logiques, étant donné que l’Apôtre raisonne peu ici, sont cependant suffisamment représentées : .o5v, quatre fois ; àpa oiv, une fois ; 811>, cinq fois ; yàp, onze fois. C’est à peu près les mêmes proportions que dans l’Épitre aux Galates. Les longues phrases, basées sur Voratio pendens, se retrouvent dans les Épîtres incontestées de Paul, quand il fait, comme dans les passages incriminés de l’Épître aux Éphésiens, i, 3-14, 15-23 ; ii, 1-10, 11-18 ; iii, 1-12, 14-19 ; iv, 11-16, des souhaits aux fidèles, Rom., i, 1-8 ; Gal., i, 1-6, ou des actions de grâces à Dieu pour eux, I Cor., i, 4-9 ; Phil., i, 3-8, ou bien dans les expositions doctrinales ou historiques. Rom., ii, 13-16 ; iv, 16-22 ; V, 12-21 ; Gal., ii, 1-11 ; Phil., i, 26-30. Il est inexact que la phrase de l’Épitre soit verbeuse ; elle est plutôt condensée, pleine de pensées et marchant d’une allure très grave. Von Soden, comparant l’Épître aux Éphésiens aux autres lettres de Paul, dit que les deux écrivains de ces Épltres avaient des caractères différents ; l’un était flegmatique et l’autre colérique. Le calme qui se montre dans notre Épitre est peut-être dû aux cir

constances et au caractère de la lettre, qui était circulaire, générale, d’exposition positive, plutôt que polémique, particulière ou de discussion. Le seul point de comparaison est avec Rom., i, 6, ou viii, 25-39. C’est avec raison que Haupt caractérise les différences de style entre l’Épître aux Éphésiens et les autres Épitres de Paul en remarquant que celles-ci sont dramatiques et celle-là est lyrique. C’est bien, en effet, l’impression que donne la partie dogmatique des trois premiers chapitres, qui est une suite de bénédictions, d’actions de grâces et de prières. Pourquoi ne serait-ce pas un de ces hymnes dont Paul nous parle dans l’Épître aux Corinthiens et dont nous retrouvons des exemples ailleurs, I Cor., xiii, ou bien un xâpKTjva irvev|i(XTixbv, un don spirituel, comme l’Apôtre dit aux Romains, i, 11, qu’il veut leur en communiquer un, afin qu’ils soient affermis ? Quant aux autres reproches, on pourrait faire remarquer que les phénomènes visés sont plutôt caractéristiques de la langue de saint Paul. Voir Lasonder, Disquisitio de linguse paulinse idiomate, II, p. 110 et p. 15.

u. doctrine de L’Êpitre. — L’effort de la critique rationaliste a porté principalement sur la doctrine de l’Epître ; on a soutenu : 1° que les doctrines caractéristiques de saint Paul étaient absentes de l’Epître aux Éphésiens, et 2° que celles qu’on y trouve étaient étrangères à saint Paul. — 1° Absence de doctrines spécifiquement pauliniennes. — Puisque nous avons à répondre à des critiques qui refusent de tenir pour pauliniennes les Épitres pastorales et l’Épître aux Hébreux, nous puiserons nos arguments dans les autres Épitres de saint Paul, et, afin de tenir compte de l’hypothèse qui voit dans l’Epître aux Éphésiens une compilation formée à l’aide d’une lettre primitive aux Colossiens, nous laisserons même de côté cette Épltre aux Colossiens. On ne trouve plus, dit-on, dans la lettre aux Éphésiens la polémique contre les judaïsants, ni la doctrine de la justification par la foi, sur laquelle saint Paul revient avec tant d’insistance dans ses Épîtres incontestées. Cette doctrine ne se retrouve plus, en effet, ici dans les mêmes termes que dans les lettres où saint Paul avait à combattre les Juifs ou les chrétiens judaïsants, parce que l’Apôtre n’avait plus à convaincre des hommes pour qui la pratique de la loi aurait été la base nécessaire de la justification. Il parlait à des païens « morts par leurs offenses et par leurs péchés », Eph., Il, 1, et il leur déclare que c’est par la grâce qu’ils sont sauvés, ii, 6, par la foi, ii, 8, que cela ne vient pas d’eux, que c’est le don de Dieu : « ce n’est point par les œuvres, afin que personne ne se glorifie. » ii, 8, 9. Et il résume toute sa doctrine, telle qu’elle ressortait de l’Épître aux Romains, dans ces paroles adressées aux Éphésiens : « Car nous sommes son ouvrage (de Dieu), ayant été créés en Jésus-Christ pour de bonnes œuvres, que Dieu a préparées d’avance pour que nous y marchions. » ii, 10. Saint Paul insiste dans cette lettre sur le principe du salut, qui est la grâce de Dieu ; mais il n’oublie pas le moyen de salut, qui est la foi, ii, 8 ; iii, 17 ; vi, 23, productrice des bonnes œuvres, ii, 10. C’est bien la vraie doctrine de saint Paul. Rom., vi, 4, 14 ; iii, 20, 27 ; iv, 2 ; vin, 3, 4 ; ix, 11 ; I Cor., i, 29 ; Phil., ii, 12, 13. Il en est de même pour la conception de la chair, aipl, siège des désirs et du péché. Eph., ii, 3, et Rom., viii, 3 ; Gal., v, 13, 16, 19. Il serait possible en outre de montrer que les doctrines enseignées dans l’Épître aux Éphésiens se retrouvent dans les autres Épitres de saint Paul. Le projet de Dieu pour le salut des hommes, Eph., i, 4-11 = Rom., vin, 28-30 ; ix, 8-24 ; xvi, 25, 26 ; I Cor., ii, 7 ; Gal., iv, 4, 5 ; la réunion de tous les êtres en JésusChrist, Eph., l, 10, est esquissée dans ses parties constitutives dans Rom., viii, 34 ; iii, 22, 29-30 ; iv, 9, 16 ; v, 9-11 ; xi, 23-32 ; I Cor., xil, 27 ; Phil., ii, 9. Comparez encore Eph., i, 16, et Rom., i, 9 ; Eph., i, 20, et I Cor., xv, 25 ; Eph., i, 22, et I Cor., xv, 27 ; Eph., i, 22, 23, et Rom., xil, 5 ; I Cor., in, 6 ; Eph., ii, 5, et Rom., v, 6 ; Eph., iii, 4, et Rom.,


v, 1, etc. — 2° Présence de doctrines non pauliniennes.

— Il est certain que chaque lettre de saint Paul renferme une certaine portion de doctrine nouvelle par rapport aux autres lettres. Serait-il possible qu’un esprit aussi puissant que celui de l’Apôtre, favorisé qu’il était d’ailleurs par l’abondance des dons du Saint-Esprit, restât cantonné dans une unique doctrine, toujours exprimée de la même manière ? Si nous trouvons dans notre Épître des doctrines qui ne sont pas ailleurs, nous devons néanmoins les tenir pour pauliniennes, pourvu qu’elles ne soient pas contradictoires avec les précédentes et qu’elles puissent être considérées comme le développement naturel de doctrines antérieures. Or tel est l’enseignement de l’Épître aux Éphésiens. Il est inutile de répondre aux accusations de gnosticisme ou de montanisme dirigées contre l’Épître aux Éphésiens, puisque actuellement les critiques n’en tiennent plus compte. Comment d’ailleurs cette Épître aurait-elle pu être imprégnée du gnosticisme et du montanisme du n » siècle, puisqu’il est prouvé par les textes qu’elle existait à la fin du I er siècle ? — 1. Jésus-Christ occupe ici, dit-on, une place prédominante, qu’il n’a pas dans les autres Épîtres ; il est le médiateur de la création, le centre de la foi, de l’espérance et de la vie chrétienne, la source de toutes les grâces. Il est vrai que l’attention du lecteur est portée d’une manière spéciale sur Jésus-Christ ; mais toutes les attributions du Christ, mises au premier plan dans cette Épître, se retrouvent ailleurs. « Pour nous, dit saint Paul aux Corinthiens, I Cor., viii, 6, il n’y a qu’un seul Seigneur, Jésus-Christ, par qui sont toutes choses et par qui nous sommes. » Cf. I Cor., xv, 45-49 ; Rom., viii, 18-23. Voir aussi plus haut les textes sur la réunion en Jésus-Christ de tous les êtres. — 2. L’Église, ’ExxXrjata, est ici regardée comme un tout organique, formé de l’ensemble des Églises locales, tandis qu’ailleurs saint Paul ne parle que des Églises particulières. Cette idée de l’unité de l’Église est, affirme-t-on, étrangère à saint Paul. Il n’en est rien ; saint Paul a employé au sens collectif le mot’ExxXr]<7Ïa dans ses autres Épîtres, I Cor., xv, 9 ; Gal., i, 13 ; Phil., iii, 6, ou bien au sens abstrait, comme dans notre Épître. I Cor., x, 32 ; xii, 28. — 3. La relation du Christ avec l’Église n’est plus la même, dit-on, dans l’Épître aux Éphésiens que dans les autres Épitres. Ici le Christ est la tête, i, 23 ; iv, 15, tandis qu’ailleurs Jésus-Christ était le principe vital, qui animait le corps tout entier. I Cor., vi, 17 ; xii, 12. Il nous semble que ces deux métaphores, loin de s’exclure, aboutissent à exprimer la même idée, qui d’ailleurs était préparée dans les autres lettres, à savoir que l’Église est un corps, dont les chrétiens sont les’membres et Jésus-Christ la tête. Il y est, en effet, parlé des chrétiens, formant un seul corps dans le Christ, Rom., xii, 4, 5, étant le corps du Christ, I Cor., xii, 27, ou le Christ est déclaré la tête de l’homme. I Cor., xi, 3. Celle idée, en outre, ne pouvait être étrangère à saint Paul, bien qu’il ne l’ait pas exprimée en termes précis dans ses autres lettres, puisqu’elle ressort de l’enseignement même de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Matth., xxi, 42 ; Marc, xii, 10, 11 ; Luc, xv, 17. — 4. Saint Paul parle ici des Apôtres et des prophètes autrement qu’il ne le fait ailleurs. Ceci encore n’est pas exact. Cf. I Cor., xii, 28, 29 ; xv, 9, 11 ; iv, 9. L’épithète de « saints », qu’il donne aux Apôtres et aux prophètes, iii, 5, s’explique parle contexte ; il l’a employée ailleurs. Rom., i, 2 ; I Cor., xvi, 1 ; II Cor., viii, 4 ; IX, 1.

— 5. L’universalisme de cette Épître n’est pas celui des grandes Épitres. Ici les païens sont incorporés au peuple juif, tandis qu’ailleurs il n’y a plus ni Juif ni païen, mais une humanité nouvelle en Jésus-Christ. C’est bien encore de cette façon que dans l’Épître aux Éphésiens saint Paul conçoit le nouvel ordre de choses, « la réconciliation so fait en un seul corps avec Dieu. » ii, 16. — 6. Dans l’Épître aux Éphésiens seulement saint Paul parle de la descente de Jésus-Christ aux enfers, iv, 9. Si l’Apôtre n’en parle pas ailleurs, il y fait au moins allusion. Rom.,

II. - 59

xiv, 9 ; Phil., m. 10. — 7. Les doctrines sur les anges sont plus développées que dans les autres Épîtres. En effet, Eph., i, 21, saint Paul a ajouté xjpi<5tY| ; aux listes d’êtres célestes, données Rom., viii, 38 ; I Cor., xv, 24. Mais l’exaltation de Jésus-Christ au-dessus des anges, Eph., i, 20, est enseignée aussi dans Phil., ii, 10.

777. RAPPORTS EXTRE L’ÉPITRE AUX ÉPHÉSIEyS ET

L’épitrb À ux colossiens. — La liste des passages parallèles des deux Épîtres a été donnée plus haut, col. 874. 1 ! y a des ressemblances d’idées et souvent identité d’expressions. De là on a conclu à une dépendance entre ces deux Epîtres ; les uns ont soutenu que l’Épître aux Éphésiens était la lettre originale, d’autres ont cru la trouver dans l’Épître aux Colossiens. Holtzmann, Kritik der Epheser und KolosserBriefe, p. 26, marchant sur les traces de Hônig, établit que dans un certain nombre de passages la priorité est du côté de l’Épître aux Éphésiens ; il suppose donc qu’il a dû exister une lettre primitive de saint Paul aux Colossiens, à l’aide de laquelle un interpolateur a confectionné l’Épître aux Ephésiens ; puis cette dernière a fourni des passages à l’Épître actuelle aux Colossiens. C’est assez compliqué et très subjectif. En fait, les rapports entre ces deux Épîtres s’expliquent par les circonstances qui leur ont donné naissance. Les Épîtres aux Colossiens et aux Éphésiens ont été écrites à la même époque et peut-être à quelques jours de distance seulement ; elles étaient destinées à combattre les mêmes erreurs et à établir des vérités dogmatiques et morales identiques au fond. Les deux lettres étaient cependant très différentes dans la marche de l’argumentation, parce que l’Épître aux Colossiens, étant une lettre à une Église en particulier, était plus polémique et attaquait l’erreur plus directement, tandis que l’Épître aux Éphésiens, étant une circulaire, se plaçait à un point de vue plus général. La première établissait la dignité suréminente de Jésus-Christ au-dessus de tous les êtres créés, et la seconde la grandeur des bienfaits que Dieu a accordés à l’Église en Jésus-Christ. Aussi, quoique dans cette partie dogmatique on rencontre des passages parallèles, il est à remarquer qu’ils ne se trouvent pas dans une même suite d’idées ; il y a des sections entières, Eph., i, 3-14 ; i, 15-n, 10, qui n’ont pas de parallèles dans l’Épître aux Colossiens, sinon de courts passages, qui se retrouvent dans de tout autres développements. Si les passages, sont parallèles, Eph., iii, 1-21, et Col., i, 24-29, ils sont exprimés en termes différents. La partie morale des deux Épîtres offre beaucoup plus de ressemblances, ainsi qu’on devait s’y attendre ; cependant peut-on dire que les conseils aux époux, donnés Eph., v, 22-23, ne sont qu’une amplification verbeuse de Col., iii, 18, 19 ? Ces ressemblances de termes et d’idées dans deux exposés assez différents s’expliquent très facilement par ce fait que saint Paul a écrit ces deux lettres à la même époque, alors qu’il était sous l’impression des mêmes circonstances et pénétré des mêmes idées, de sorte qu’il en est résulté qu’il a employé les mêmes expressions. Il n’a pas cherché à exprimer différemment des idées qui dans les deux Épîtres étaient les mêmes. Un faussaire, aurait mieux déguisé ses emprunts, et en tout cas aurait écrit une lettre qui extérieurement aurait ressemblé davantage aux autres Épîtres de l’Apôtre.

On a signalé aussi des ressemblances entre l’Épître aux Éphésiens et la première Épltre de saint Pierre : Eph., I, 3, et I Petr., i, 3 ; Eph., ii, 18, 19, 20, 22, et I Petr., il, 4, 5, 6 ; Eph., i, 20, 21, 22, et I Petr., iii, 22 ; Eph., III, 5, 10, et I Petr., i, 10, 11, 12. On a relevé encore des termes identiques ou des pensées analogues dans l’Épître aux Ephésiens et l’Épître aux Hébreux, l’Apocalypse et l’Évangile selon saint Jean. Voir Abbott, Epistle to the Ephesians, p. xxiv-xxrx. La plupart des ressemblances sont fortuites ou s’expliquent par ce fait que les écrivains de ces différents livres puisaient dans le même fonds de tradition chrétienne. Cependant les rapports entre l’Épître

aux Éphésiens et la première Épttre de saint Pierre sont à diverses reprises si littéraux, la suite des idées si concordantes, Eph., i, 5-15, et I Petr., i, 5-13, que Von est obligé de conclure à des relations de dépendance littéraire entre ces deux Épîtres, et cela d’autant plus qu’il y a aussi des ressemblances entre la première Épltre de saint Pierre et l’Épître aux Romains. Diverses explications ont été proposées. Il est possible que saint Pierre ait connu les Épîtres de saint Paul ; II Petr., iii, 15, le prouve, malgré certains critiques, qui nient l’authenticité de cette Épître. Lors de son séjour à Rome, saint. Pierre a pu connaître les Épîtres aux Romains et aux Éphésiens. Enfin, et ceci paraît l’hypothèse la plus probable, si la première Épître de saint Pierre a été écrite ou peut-être composée par Silvanus, sous l’inspiration de saint Pierre, on comprend très facilement que le fidèle compagnon de saint Paul y ait introduit des idées et même des mots empruntés aux letlres de son maître.

VI. Texte de l’Épître. — Des vingt manuscrits onciaux qui contiennent les Épîtres de saint Paul, dix la possèdent en entier ou en très grande paitie ; deux autres en ont seulement des fragments. Voir Tischendorf, Novum Testa ?mentum grssce, t. iii, Prolegomena, auctore C. R. Gregory, p. 418-435, 673-675, 801-1128. Les manuscrits présentent quelques variantes. Deux seulement sont à relever : chap. ii, 14, et v, 30. Voir Tischendorf, Novum Teslamentum grsece, t. ii, p. 363-901, et t. iii, p. 1286-1297.

VIL Citations de l’Ancien Testament.— Il y a vingt citations de l’Ancien Testament dans l’Épître aux Éphésiens ; neuf livres sont cités : les Psaumes, six fois, i, 20, 22 ; H, 20 ; IV, 8, 26 ; v, 6 ; la Genèse, quatre fois, IV, 24 ; v, 16, 30, 31 ; le Deutéronome, deux fois, ii, 26 ; VI, 9, ainsi qu’Isaïe, ii, 13 ; vi, 14, 17, et les Proverbes, lv, 9, 10 ; v, 18 ; l’Exode, une fois, vi, 2, 3, ainsi que les Chroniques, vi, 9 ; Daniel, v, 16, et Zacharie, vi, 25. Sept citations sont littéralement ou presque littéralement empruntées au texte grec, ou à l’hébreu, quand celui-ci ressemble au grec, de sorte qu’on doit conclure que la source est plutôt le texte grec, Eph., i, 22 ; iv, 8, 26 ; v, 16, 18 ; vi, 2, 3, 14, 17 ; les autres n’offrent que des ressemblances de mots ou d’idées. Deux citations, IV, 8, et v, 14, sont introduites par ôt’o Xsysi. La citation v, 14, n’est pas empruntée à l’Ancien Testament ; il est possible que saint Paul l’ait empruntée à un écrit extra-canonique ou ait reproduit un ancien hymne chrétien ainsi mesuré :

"E-feipat & xaûsùSwv

xai àvàfffa èx twv vexpùv

xai È7uiç<x’j<tei (roi 6 Xpi<rv4{.

Ces deux hypothèses paraissent improbables à Jacobus, Eph., v, 14, dans Theol. Studien, p. 9-29 ; il croit que le passage dérive de Jonas, i, 6.

VIII. Analyse de l’Épître aux Éphésiens. — Elle commence par la salutation ordinaire, I, 1-2, et se divise en deux parties : la première dogmatique et la seconde morale. Pour la partie dogmatique, il est difficile d’établir un plan dont les parties s’enchaînent logiquement ; c est plutôt une suite de bénédictions, d’actions de grâces, de prières.

î. partie dogmatique, i, 3-in, 21. — 1° Actions de grâces pour les bienfaits reçus de Dieu en Jésus-Christ, i, 3-14 ; — 1. pour les bénédictions spirituelles de Dieu, qui nous a bénis, nous a élus et prédestinés pour la justification et l’adoption en Jésus-Christ, 3-6 ; — 2. en qui nous avons la rédemption, et pour la connaissance du mystère de sa volonté de réunir toutes choses dans le Christ, 7-12 ; — 3. les Ephésiens, appelés à la foi, ont été scellés du Saint-Esprit, arrhes de l’héritage futur, 14.

— 2° Actions de grâces et prière pour les Éphésiens, dont Paul a appris la foi et la charité, i, 15, 16 ; il demande à Dieu pour eux la connaissance de leur vocation, de la gloire de leur héritage et de la grandeur de la puissance

divine, 17-19, qui s’est montrée — 1. en Jésus-Christ dans sa résurrection et son élévation au-dessus de toutes les créatures et dans son établissement comme chef de l’Église, 20-23 ; — 2. dans le salut de tous les croyants, u, 1-10 ; en eux, païens, qui, de même que les Juifs, étaient morts par leurs péchés, 1 -3, et que Dieu a ressuscites et exaltés avec Jésus-Christ, pour manifester les richesses de sa grâce, 4-7 ; car c’est par la grâce, par la foi, qu’ils sont sauvés, pour opérer de bonnes œuvres, 8-10 ; — 3. dans le changement opéré en eux, ii, 11-22 ; ils étaient païens dans la chair, sans Christ, séparés du peuple de la promesse, sans espérance et sans Dieu, 11, 12 ; maintenant ils sont rapprochés par le sang du Christ, notre paix, qui a aboli les ordonnances légales, détruit le mur de séparation entre Juifs et païens, et a donné la paix à tous et accès auprès du Père dans un même Esprit, 13-18 ; ils ne sont donc plus des étrangers, mais ils font partie de l’Eglise, dont Jésus-Christ est la pierre angulaire, et où Dieu habite, 19 - 22. — 3° Apostolat de Paul pour la révélation de ce mystère, le salut de tous, iii, 1-13, et reprise de la prière pour les Éphésiens, iii, 14-21.

— 1. Ce mystère du salut des païens, participants à la promesse en Jésus-Christ, a été communiqué à saint Paul par une révélation spéciale, iii, 1-6, et il a reçu la mission de proclamer les richesses du Christ et de faire connaître à tous les hommes et aux anges ce mystère, caché en Dieu, 7-13. — 2. Pénétré de ce mystère, saint Paul demande au Père de fortifier les Éphésiens dans la foi, dans l’amour, pour qu’ils comprennent l’amour du Christ, qui surpasse toute connaissance, iii, 14-19 ; gloire à Dieu dans l’Église en Jésus-Christ, 20-21.

77. partie morale, iv, 1-vi, 9. — 1° Conséquences pratiques des enseignements dogmatiques, iv, 1-16. — 1° Exhortation de Paul à répondre à leur vocation et à conserver l’unité de l’Esprit, non seulement extérieure, mais surtout intérieure, iv, 1-3 ; car ils forment un seul corps, relié par la même foi et le même Dieu, 4-6, et cette unité se montre : — 1. en ce que le Christ, distributeur de la grâce, la donne à chacun selon sa mesure, 7-10 ; — 2. donnant des charges diverses, mais destinées à promouvoir l’unité de la foi et de la connaissance, la réalisation du corps mystique du Christ par la foi et la charité, 11-16. — 2° Exhortations pratiques générales, IV, 17-v, 20. — Ils ne doivent plus vivre comme les païens, IV, 17-19 ; car ils connaissent le Christ, de qui ils ont appris à se dépouiller du vieil homme pour revêtir l’homme nouveau, 20-24 ; qu’ils s’abstiennent donc du mensonge, du péché par la colère, du vol, des paroles mauvaises, pour ne pas attrister l’Esprit de Dieu, 25-31 ; qu’ils exercent la charité fraternelle, qu’ils soient les imitateurs de Dieu, et qu’ils marchent dans la charité, imitant Jésus-Christ, qui s’est oflert pour nous à Dieu, îv, 31-v, 2 ; qu’ils s’abstiennent de tous les vices du paganisme, 3-5, qu’ils prennent garde aux séducteurs, 6-7, et puisqu’ils sont passés des ténèbres à la lumière, ils doi vent marcher dans la lumière et s’abstenir des œuvres de ténèbres, 8-14 ; ils doivent se conduire comme des sages, racheter le temps, ne pas s’enivrer de viii, être remplis du Saint-Esprit dans des actions de grâces et des prières continuelles, 15-20. — 3° Précepte pour la vie de famille, v, 21-vi, 9 ; selon le précepte de la soumission mutuelle, 21, Paul établit : — 1. Les devoirs des époux, v, 22-33 ; les femmes doivent être soumises à leurs maris, car l’homme est la tête ou le chef de la femme, comme le Christ est la tête de l’Église, 21-24 ; les maris doivent aimer leur femme, comme le Christ aime l’Église, qu’il a comblée de bienfaits, 25-27 ; et cette union est une imitation de l’union du Christ avec l’Église, 28-33. — 2. Devoirs des parents et des enfants, vi, 1-4 ; les enfants doivent obéissance à leurs parents, 1-3 ; les parents ne doivent pas irriter leurs enfants par leur sévérité, 4.

— 3. Devoirs des serviteurs et des maîtres, VI, 5-8 ; les esclaves doivent obéir à leurs maîtres comme au

Christ, 5-8, et les maîtres voir dans leurs esclaves des frères, 9.

m. épiloquk, vi, 10-24. — 1° Exhortation à se fortifier dans le Seigneur et à se revêtir des armes de Dieu pour combattre les esprits méchants, 10-12 ; qu’ils prennent donc les armes de Dieu, qui sont la vérité, la justice, la paix, la foi, l’assurance du salut, l’Esprit et la parole de Dieu, 13-17 ; mais surtout qu’ils persévèrent dans la prière pour tous et pour lui, afin qu’il parle librement pour faire connaître le mystère de l’Évangile, 18-20 ; Tychique leur dira tout ce qui le concerne ; afin qu’ils soient consolés, 21-22 ; vœux et prière de l’Apôtre pour ses frères, 22, 24.

IX. Bibliographie. — Pères grecs : S. Jean Chrysostome, Homiliæ in Epist. ad Ephesios, t. lxii, col. 9-176 ; Théodore de Mopsueste, In Epist. B. Pauli Commentaria, t. lxvi, col. 911-922 ; Théodoret, Opéra, t. lxxxii, col. 507-558 ; Œcuménius, Commentarius, t. cxviii, col. 1 166-1256 ; Théophylacte, Explanatio, t. cxxiv, col. 10331138 ; S. Jean Damascène, Loti selecti, t. xci, col. 821-856.

— Pères latins : Ambrosiaster, Comm. in tredecim Epist. B. Pauli, t. xvii, col. 371-404 ; Pelage ou un pélagien, dans les Œuvres de saint Jérôme, t. xxx, col. 823842 ; Primasius Adrum., Commentaria, t. lxviii, col. 607626 ; Sedulius Scotus, Collectanea, t. ciii, col. 195-212 ; Walafrid Strabon, Glossa ordinaria, t. cxiv, col. 587-602.

— Moyen âge : Haymon d’Alberstadt, Expos, in Ep. P., t. cxvii, col. 699-734 ; Hugues de Saint-Victor, Quant, in Ep. P., t. clxxv, col. 567-576 ; Hervé de Bourges, Comm. in Ep. Pauli, t. clxxxi, col. 1201-1281 ; Pierre Lombard, Collectanea, t.’cxcii, col. 169-222 ; S. Thomas d’Aquin, In omnes divi Pauli apostoli Epist. Commentaria, Parme, 1861, t. xiii, col. 444-505. — xrie-xrme siècle : Cajetan, Literalis Expositio, Rome, 1529 ; Gagnæus, Brevissima scholia, . Paris, 1543 ; Benoît Justinien, Explorationes, Lyon, 1612 ; Estius, Commentarius, Douai, 1614 ; Picquigny, Triplex Expositio, Paris, 1703 ; Noël Alexandre, Commentarius literalis, Paris, 1745 ; Cornélius a Lapide, Commentarius, Anvers, 1614 ; dom Calmet, Commentaire, Paris, 1707. — Commentaires modernes spéciaux. — Catholiques : Schnappinger, Der Brief Pauli an die Epheser erkl&rt, in-4°, Heidelberg, 1793 ; Bisping, Erklàrung der Briefe an die Epheser, in-8°, Munster, 1866 ; Maunoury, Commentaire sur l’Épître aux Galates, aux Éphésiens, etc., Paris, 1881 ; Henle, Der Epheserbrief erklàrt, in-8°, Augsbourg, 1890 ; Brunet, De l’authenticité de l’Épître aux Éphésiens, Preuves philologiques, in-8°, Lyon, 1897. — Non catholiques. Pour les ouvrages antérieurs au xixe siècle, consulter Abbott, CritU cal Commentary on the Epistle to the Ephesians, in-8°, Londres, 1897, p. xxxv-xxxviii. — xixe siècle : Baumgarten-Crusius, Comment, ûber die Briefe Pauli Eph. und Kol., Iéna, 1847 ; Beet, Commentary on the Epistle to the Ephesians, in-8°, Londres, 1890 ; Beck, Erklàrung des Br. Pauli an die Epheser, Giitersloh, 1891 ; Dale, Epistle to the Ephesians ; its Doctrine and Ethics, 1884 ; Davies, The Epistle to the Ephesians, Londres, 1884 ; Eadie, Commentary on the Greek Text of the Epistle of Paul to the Ephesians, Edimbourg, 1883 ; Ellicott, Critical and grammatical Commentary on Ephesians, Londres, 1855 ; Harless, Commentar ûber den Brief Pauli an die Epheser, Stuttgart, 1858 ; V. Hofmann, Der Brief Pauli an die Epheser, Nordlingue, 1870 ; A. Klôpper, Der Brief an die Epheser, Gœttingue, 1891 ; Macpherson, Commentary on St. Paul’s Epistle to the Ephesians, Edimbourg, 1892 ; Meier, Commentar ûber des Brief Pauli an die Epheser, Berlin, 1834 ; Meyer, Kritisch-exegetisches Handbuch ûber d. Pauli an die Epheser, 6e édit., par Woldemar Schmidt, Gœttingue, 1886 ; Oltramare, Commentaire sur les Épitres de saint Paul aux Colossiens, aux Éphésiens et à Philémon, Paris, 1891 ; Sadler, Galatians, Ephesians, Philippians, Londres, 1889 ; Von Soden, Die Briefe an die Kolosser,

Epheser, 1893 ; G. Wohlenberg, Die Briefe an die Ephe^ ser, Munich, 1895 ; Holtzmann, Kritik der Epheser-und Kolosserbriefe, 1872 ; F. J. A. Hort, Prolegomena to the St. Paul’s Epistle to the Romans and the Ephesians, Londres, 1895 ; Koster, De echtheid van de brieven aan de Kol., en aan de Eph., Utrecht, 1877 ; Lunemann, De Ep. ad Ephesios authentia, Gœttingue, 1842 ; Soden, Epheserbrief, dans les Jahrbûcher fur protestantische Théologie, 1887 ; Haupt, Die Gefangenschaftbriefe, Gœttingue, 1897 ; Gore, An Exposition of the Epistle to the Ephesians, Londres, 1898. E. Jacquier.

    1. ÉPHÉSIENNES##

ÉPHÉSIENNES (LETTRES). Voir Amulette, t. i, col. 528.

ÉPHI (hébreu : ns> « [et nsa, Lev., v, 15 ; xi, 13], ’éfâh), mesure de capacité pour les solides, d’environ 38 litres 88. Elle avait la même contenance que le bath (voir t. i, col. 1306), Ezech., xlv, 10 ; . mais celui-ci servait pour mesurer les liquides, tandis que l’éphi servait pour mesurer les solides. S. Jérôme, In Ezech., xlv, 10, t. xxv, col. 449 ; S. Eucher, Instruct., ii, 14, t. L, col. 821. On le considérait comme l’unité de mesure. Deut., xxv, 14 ; Prov., xxv, 10 ; Lev., xix, 36 ; Amos, viii, 5 ; Mich., v, 10. La Vulgate, dans un grand nombre de passages, a conservé, comme les Septante, le nom même de la mesure hébraïque, mais en modifiant la terminaison âh en i, à l’imitation des traducteurs grecs, qui ont oîcpi (voir H. Hody, De Bibliorum textibusoriginalibus, 1. ii, c. iv, 6, in-f°, Oxford, 1705, p. 113) ; sept, d’après l’édition de saint Jérôme parVallarsi, Patr. lai., t. xxv, col. 449.

1° Origine. — D’après M. Oppert, La notation des mesures de capacité, dans la Zeitschrift fur Assyriologie, t. i, 1886, p. 89, l’éphi est assyrien. « Le ap, 7T"1’dit-il, était Yépha originaire. » Mais la plupart des hébraïsants de nos jours croient que les Israélites empruntèrent cette mesure à l’Egypte. D’accord avec eux, les

égyptologues identifient Vêfâh hébreu avec le I *, ap-t égyptien et l’oine, xini, oy^uni, CDim, copte. (Cf. en grec otçt, oîcpi, iepet, ici.) « Ce mot, apparenté avec la racine 1, ap (cf. h ne, numerus et men sura), désigne une mesure de solides, une sorte de boisseau, et le vase lui-même qui sert à mesurer, » dit H. Brugsch, qui le traduit par epha, Hieroglyphischdemotisches Wôrterbuch, t. i, Leipzig, 1867, p. 49-50.

— « L’identité d’origine de l’épha, ns>N, et de Vape-t ou a Pe > I " - », est bien évidente ; car le w, t, jouait en

égyptien un rôle tout à fait analogue à celui de n — n (ou » — ï) des Hébreux et des Arabes, » dit aussi M. E. Revillout, Comparaison des mesures égyptiennes et hébraïques, dans la Revue égyptologique, t. ii, 1882, p. 195. P. E. Jablonslcy avait déjà admis l’origine égyptienne de l’éphi. Panthéon Mgyptiorum, 3 in-8°, Francfort-surle-Main, 1750-1752, t. ii, p. 229-230 ; . Opuscula, 4 in-8°, Leyde, 1804-1813, t. i, p. 182-183. Son opinion a été acceptée par Gesenius et Rôdiger, Thésaurus linguse hebrsese, p. 83 ; Addenda, p. 68-69. Voir aussi E. Rodiger, dans Ersch et Grùber, Allgemeine Encyklopâdie, sect. i, t. xxxv, p. 308 ; P. de Lagarde, Erklârung hebrâischer Wbrter, dans les Abhandlungen der Gesellschaft der Wissenschaften zu Gôttingen, t. xxvi, 1880, p. 2-3 ; Fr. Buhl, Gesenius’Hebrâisches Handwôrterbuch, 12° édit., 1895, p. 34.

2° Contenance. — 1, Comme pour toutes les autres mesures hébraïques, il y a désaccord parmi les interprètes et les métrologistes au sujet de la contenance de l’éphi. Sa valeur relative nous est du moins connue par l’Écriture elle-même. Ézéçhiel, xlv, 11, nous dit qu’il a la même capacité que le bath. L’Exode, xvi, 36, nous apprend qu’il vaut dix gomors. La tradition juive confirme

et complète ces données. « L’'êfâh, dit Rabbi Salomon, contient trois se’dh ; le se’âh, six qabs ; le qab, quatre logs ; le log a la capacité de six coques d’oeuf, d’où il résulte que la dixième partie d’un’êfâh a la contenance de quarante-trois coquilles d’oeuf, plus un cinquième. » Dans G. Waser, De antiquis mensuris tiebreeorum, in-4°, Heidelberg, 1600, p. 74. La paraphrase chaldaïque jnstifie ce que dit Rabbi Salomon : elle rend l’éphi par T’nd nSn, telaf sein, « trois se’dh. » Exod., xvi, 37 ; Ruth, ii, 17, etc. Les rapports ainsi établis entre les mesures hébraïques de capacité sont admis par tout le monde. Voir Mesures.

— 2. Quantaux évaluations de l’éphi que nous ont laissées les écrivains de l’antiquité, elles sont pour la plupart contradictoires. (Voiries textes dans Frd. Hultsch, Metrologicorum scriptorum reliquiee, 2 in-12, Leipzig, 1864, t. i, p. 259, 260, 266 ; t. ii, p. 167, 223, 233). Josèphe lui-même n’est pas conséquent dans ses écrits. Il dit, Ant. jud., VIII, ii, 9, que le bath, (JâSo ; , dont la contenance est égale à celle de l’éphi, comme on vient de le voir, vaut soixante et douze xestes (£sora ; ), ce qui fait un métrète attique. Mais dans le même ouvrage, XV, ix, 2, nous lisons que le cor, xôpoç, c’est-à-dire dix éphis, équivaut à dix médimnes attiques, ce qui donne à l’éphi une valeur de quatre-vingt-seize xestes. Ce dernier passage a induit en erreur bon nombre d’interprètes. Aujourd’hui on admet généralement, sur les bonnes preuves qu’en a données Bôckh, Metrologischc Vntersuchungen, in-8°, Berlin, 1838, p. 259, que la première appréciation est seule exacte, et par conséquent que l’éphi équivaut au métrète attique ou à soixante et douze xestes. Comme le ?éoTï)ç ou sextarius romanus valait 0, 54 centilitres (C. Alexandre, Dictionnaire grec - français, 21e édit., 1892, p. 1625 ; E. Pessonneau, Dictionnaire grec-français, 7=édit., 1895, p. 1601), il s’ensuit que l’éphi valait38 litres 88. Il faut remarquer cependant que l’on ne peut calculer avec une exactitude rigoureuse et avec une entière certitude les mesures anciennes, soit parce que la comparaison qui en a été faite avec les mesures d’un peuple étranger n’était pas absolument exacte, soit parce que la valeur n’en a pas été toujours la même, soit pour d’autres causes encore. De là vient que les différents auteurs donnent des valeurs plus ou moins divergentes pour l’éphi hébreu. AinsiV. Queipo, Essai sur les systèmes métriques et monétaires des anciens peuples, 3 in-8°, Paris, 1859, t. i, p. 141 ; t. ii, p. 438, admet que l’éphi primitif valait 29 litres 376, et que, depuis le retour de la captivité de Babylone, il ne valut plus que 21 litres 420. D’après Saigey, Traité de métrologie ancienne et moderne, in-12, Paris, 1834, p. 21, l’éphi ne contenait que 18 litres 088. D’après J. Benziger, Hebrâische Archâologie, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1894, p. 184, l’éphi égale 36 litres 44 ; d’après Ad. Kinzler, Die biblischen Altertûmer, 6e édit., Calw, 1884, p. 399, il égale 39 litres 392, etc. Voir aussi Paucton, Métrologie ou Traité des mesures, in-4°, Paris, 1780, p. 248, 251, 256. La conclusion à tirer de ces opinions si diverses, c’est que nous ne connaissons la valeur de l’éphi que d’une manière approximative.

3° L’éphi dans l’Écriture. — L’éphi est une des mesures dont il est le plus souvent fait mention dans l’Ancien Testament (il n’est pas nommé dans le Nouveau), mais la Vulgate ne l’a pas rendu uniformément par le même terme ; elle a traduit l’hébreu’êfâh par cinq expressions différentes. — 1. Elle se sert du mot original un peu modifié, éphi, Exod., xvi, 36 : « le gomorest la dixième partie de l’éphi, » Septante : tpt&v [lÉTptov ; Lev., v, 11 ; VI. 20 (hébreu, 13) ; Num., xv, 4 (hébreu : ’ièèârôn, « dixième de l’éphi » ) ; xxviii, 5, Septante : oîçt (dans tous ces passages, il est question d’un dixième d’éphi de fleur de farine pour l’oblation des sacrifices) ; Ruth, II, 17 : « un éphi d’orge » (o ! ?î) ; I Reg., xvii, 17 (Septante, 20 : yô|xop) : « un éphi de grains rôtis ; » Ezech., xlv, 10, 11, 13, 24 ; xlvi, 5, "J, 11, 14 (Septante : iiézpov, ^oîviE et itÉ|jLU.a). — 2. La Vulgate traduit’êfâh par le mot général

de rnensura, « mesure, » Prov., XX, lO’ftirrpov) ; Amos, vin, 5 (lisrpov) ; Mich., vi, 10 (non rendu dans les Septante), parce que, dans ces trois endroits, l’hébreu’êfâh est employé dans le sens générique de mesure de capacité. — 3. Elle s’est servie du mot modius, « boisseau, » au lieu d’éphi, Lev., xix, 36 (xo3c, « congé » ), et Deut., xxv, 14, 15 ((i=Tpov), pour exprimer également une mesure en général ; mais elle a rendu avec moins d’exactitude’êfâh, qui a là un sens précis, par modius, dans Jud., VI, 19 (oï T Q, I Reg., i, 24 (o’iipi) ; Is., v, 10 (ulTpov). Voir Boisseau, t. i, col. 1840. — 4. Dans un seul endroit, Num., v, 15, elle a mis au lieu « d’un dixième d’éphi de farine d’orge », qu’on lit en hébreu : « un dixième de satum. » Voir Se’ah. — 5. Enfin, dans la version de Zacharie, saint Jérôme a traduit cinq fois’êfâh par amphora, « amphore. » Septante : jiitpov. Zach., v, 6, 7, 8, 9, 10. Voir Amphore, t. i, col. 521. V’êfâh apparaît dans la vision de Zacharie comme une mesure de capacité, susceptible, à cause de sa forme, de recevoir une femme symbolique, qui figure les iniquités d’Israël et qui y est enfermée. Un ange place au-dessus d’elle, à l’ouverture du vase, un couvercle de plomb pour l’empêcher d’en sortir, et deux femmes, à qui des ailes de cigogne (hébreu) permettent de voler, emportent V’êfâh et son contenu dans la terre de Sennaar, c’est-à-dire dans la terre de la captivité, en Babylonie. Ce sont sans doute ces divers détails qui ont porté saint Jérôme, quoiqu’jl ne s’explique pas là-dessus, In Zach., v, 5, t. xxv, col. 1410, à adopter ici le mot « amphore » ; celle-ci était bien connue de ses lecteurs latins, sa capacité était considérable, et ses deux anses permettaient de l’enlever et de la transporter facilement. L’'êfâh signifie dans cette vision, ou bien que les péchés d’Israël avaient atteint la mesure déterminée par Dieu pour les punir, cf. Gen., xv, 16, ou bien que les pécheurs sont comme des grains de blé qui sont amoncelés dans une mesure. Voir J. Knabenbauer, Comment, in proph. min., t. ij, 1886, p. 277.

— L’indication de 1’'êfâh est probablement sous-entendue dans le texte hébreu, Ruth, iii, 15, 17, et Agg., ii, 16 (Septante et Vulgate, 17), comme étant l’unité de mesure des grains. La Vulgate a suppléé dans ces trois passages le mot modius, « boisseau ; » les Septante ont reproduit le texte original sans addition dans les deux premiers, et ils ont ajouté aâza (voir Se’ah) dans le troisième. F. Vigouroux.

1. ÉPHOD (hébreu : ’Êfôd ; Septante : Eouçf ; Codex Alexandrinus : OvyiS), père de Hanniel, de la tribu de Manassé. Num., xxxiv, 23.

2. ÉPHOD (hébreu : ’êfôd ; Septame : êitwjjifi ; , èipoiiS, èçû’S, cttoXti ; Vuïgate : superhumerale, ephod), sorte de vêtement sacré, diversement orné, suivant qu’il était porté par le grand prêtre, ou par d’autres personnes dans des fonctions religieuses, ou parfois même employé à des usages idolâtriques.

I. Éphod DU grand prêtre. — 1° Description. — L’Écriture ne décrit nulle part d’une façon complète ce vêtement ; mais en réunissant les différents textes, en y ajoutant les explications de Josèphe, et surtout en rapprochant ces données des monuments égyptiens, comme l’a fait très heureusement V. Ancessi dans son livre, L’Egypte et Moïse, in-8°, 1875, p. 32-46, 57-69, on arrive à se faire une idée juste et claire de ce qu’était l’éphod. On peut voir assez fréquemment sur les monuments égyptiens, porté par des dieux ou des pharaons, un vêtement ainsi composé : une large bande d’étoffe aux couleurs diverses ceint le buste depuis le milieu du corps jusqu’aux aisselles ; à la partie inférieure une riche ceinture le retient appliqué autour des reins ; à la partie supérieure, sur le dos et sur la poitrine, à gauche et à droite, partent deux bandelettes qui viennent se rejoindre et s’agrafer sur l’épaule comme des bretelles (fig. 589).

Cf. Lepsius, Denkmâler, Abth. iii, Bl. 224, 242, 274 ; A. Erman, Aegypten und àgyptisches Leben im Altertum, in-8°, "Tubingue, 1885, p. 358. Quelquefois une sorte de jupe descendant jusqu’aux genoux semble faire partie du même vêtement. Lepsius, Denkmâler, Abth. iii, Bl. 140, 172 ; Champollion, Monuments, pi. 252. Mais plus ordinairement, comme dans les exemples cités plus haut, il paraît distinct du pagne ou schenti, porté habituellement par les

. 589. — Boi égyptien portant l’éphod. Thèbes. xx « dynastie. D’après Lepsius, Denkmâler, Abth. iii, Bl. 224.

Égyptiens de toutes les époques. D’après les monuments, ce vêtement se compose donc de trois parties : le corselet, la ceinture et les épaulières ; or il en est ainsi dans l’éphod du grand prêtre. — Le corselet, il est vrai, n’est pas décrit dans le texte sacré ; mais il est implicitement marqué. Le verbe ceindre de l’éphod, II Reg., ii, 18, suppose une sorte de ceinture, et cependant ce n’en était pas une proprement dite, puisqu’il est question de la ceinture de l’éphod. Exod., xxviii, 8 (hébreu). « L’éphod, dit Josèphe, Ant. jud., III, vii, 5, est large d’une coudée et laisse à découvert le milieu de la poitrine. » Or une large bande d’étoffe ceignant le buste à partir de la ceinture jusqu’aux aisselles, telle que nous la montrent les monuments égyptiens indiqués plus haut, remplit parfaitement ces conditions. Josèphe, Ant. jud., III, vii, 5, suppose de plus que l’éphod avait des manches, mais l’Écriture n’en mentionne nulle part ; et l’auteur juif pouvait du reste avoir en vue les manches de la tunique sur laquelle on mettait l’éphod. Le tissu du corselet était

de fin lin (Ses) retors, brodé de fils teints couleur hyacinthe, pourpre, écarlate, et broché de lamelles d’or. Exod., xxviii, 6 ; xxxix, 2. Cf. Josèphe, Ant.jud., III, vu, 5. — La ceinture est expressément désignée, Exod., xxviii, 8 : le l.iéséb, rendu textura par la Vulgate, est traduit par ceinture dans les versions syriaque, chaldéenne ; Josèphe a également Çtavirç. Cette ceinture retenait la partie inférieure du corselet ; elle était de même étoffe et de même couleur. Exod., xxviii, 8, 27, 28 ; xxix, 5 ; xxxix, 5, 20, 21 ; Lev., viii, 7. — Mais ce qui distinguait particulièrement l’éphod et en faisait un vêtement bien différent d’une tunique, c’étaient les épaulières ; aussi est-ce la partie surtout décrite ou rappelée dans le texte sacré. Deux bandes d’étoffe, appelées ketêfôt (d’après l’étymologie, « épaulières » ) « seront fixées à l’éphod à ses deux extrémités, et ainsi il sera attaché », dit l’Exode, xxviii, 7. Cf. xxxix, 4. La Vulgate traduit ke(êfôt par oras, ce qui rend la description inintelligible ; les Septante, au contraire, en mettant èîtt.i[iî8£ç, emploient l’expression grecque équivalente au mot hébreu. De chaque côté du corps, à droite et à gauche, une bandelette partait du bord supérieur du corselet sur la poitrine et sur le dos ; et ces quatre bandes se rejoignaient deux à deux sur les épaules à la façon de bretelles, comme nous le voyons sur les monuments égyptiens. Ces bandes étaient de même ti’ssu et de même couleur que le corselet. Exod., xxviii, 8. Et à l’endroit où elles s’agrafaient sur chaque épaule se trouvait une pierre fine, sertie dans un chaton d’or. Exod., xxv, 7 ; xxviii, 11-12 ; xxxv, 9, 17 ; xxxix, 16-19. Josèphe, Ant. jud., III, vii, 5, dit également que ces deux cabochons reliaient entre elles les bandelettes de l’éphod à la façon d’une agrafe. Les noms des enfants d’Israël (et par conséquent des douze tribus) étaient gravés sur ces pierres précieuses, six sur l’une et six sur l’autre, selon l’ordre de leur naissance. Exod., xxviiii, 9-10. D’après la tradition juive, les noms des six aînés étaient sur l’épaule droite, et les noms des puînés sur l’épaule gauche. Josèphe, Ant.jud., III, vii, 5. — En terminant cette description des trois parties de l’éphod, il est curieux de constater que, malgré le peu de clarté des textes pris en eux-mêmes, et indépendamment de la lumière que leur donnent’les monuments égyptiens, un rabbin du moyen âge, Raschi, arrive aux mêmes conclusions. « Personne, dit - il dans son Commentaire sur l’Exode, au ꝟ. 6 du chapitre xxviii, ne m’a jamais indiqué, et je n’ai jamais trouvé dans la tradition quelle était la forme de l’éphod ; mais je pense que le grand prêtre était ceint de l’éphod (Exod., xxviii, 8), comme de ces larges ceintures que portent les princes quand ils montent à cheval. Telle devait être, en effet, la forme de la partie inférieure de l’éphod, comme nous pouvons le conclure de ce passage (I Reg., ii, 18) où il est dit que David se ceignit d’un éphod de lin. L’éphod était donc une espèce de ceinture. Mais l’éphod ne consistait pas seulement en une ceinture, car nous lisons dans le Lévitique, vin, 7, qu’on plaça l’éphod sur le grand prêtre et qu’on le ceignit bel.iêseb hâ’êfôd, « par la ceinture de » l’éphod. » Le hêseb était donc une ceinture, et l’éphod était le vêtement placé au-dessus de cette ceinture. On ne peut pas dire non plus que l’éphod soit les deux bandelettes, puisqu’on les appelle les bandelettes de l’éphod. Nous devons donc conclure que le nom d’éphod, Exod., xxviii, 8, s’applique à une partie du vêtement, tandis que les bandelettes désignent une autre partie, comme la ceinture en désigne une troisième. » Cf. V. Ancessi, L’Egypte et Moïse, p. 42-43.

2° Usages. — L’éphod, tel qu’il vient d’être décrit, était un des vêtements dont le grand prêtre devait se revêtir pour exercer ses fonctions sacerdotales. Exod., xxviii, 4 ; Lev., viii, 7 ; I Reg., ii, 28. Il ne l’avait donc pas d’une façon habituelle ; aussi le voyons-nous suspendu dans le tabernacle et couvrant l’épéede Goliath. I Reg., xxi, 9. En le revêtant, le grand prêtre portait ainsi sur les

épaules les noms des douze tribus d’Israël, qu’il représentait devant le Seigneur. Exod., xxviii, 12 ; Lev., viii, 7. L’éphod servait aussi à attacher le rational ou pectoral dans l’espace laissé vide entre le bord supérieur du corselet et les deux bandelettes. C’est bien ce que dit Josèphe. Ant.jnd.jlll, vii, 5 : « L’éphod laisse à nu le milieu de la poitrine, et c’est là qu’est placé le pectoral… ; il remplit exactement le vide de l’éphod. » Il était suspendu par deux anneaux d’or à deux chaînes d’or fixées par l’autre extrémité aux deux agrafes des bandelettes, agrafes placées non pas sur les épaules, mais un peu en descendant vers la poitrine, comme on peut le voir sur les monuments égyptiens. Exod., xxviii, 13-14, 23-28. Voir Pectoral. L’éphod ainsi muni du pectoral servait à consulter Jéhovah. David, pour connaître les desseins de Saül et des gens de Ceila contre lui, pria le grand prêtre Abiathar d’apporter l’éphod. Et le Seigneur répondit par l’éphod. I Reg., xxili, 6-9. Un peu plus tard, David demanda au même Abiathar de mettre l’éphod pour lui et de consulter le Seigneur. I Reg., xxx, 7. Dans I Reg., xiv, 3, où il s’agit de la guerre de Saùl avec les Philistins, il est bien dit qu’Achias le grand prêtre portait l’éphod ; mais quand le roi veut consulter le Seigneur pour connaître l’issue du combat, on lit dans le texte hébreu massorétique ^ ꝟ. 18 : « Saül dit à Achias : Faites approcher l’arche d’Èlohim (car l’arche d’Êlohim était alors avec les enfants d’Israël). Mais les Septante portent : « Saül dit à Achias : Faites approcher l’éphod ; car il portait alors l’éphod devant les enfants d’Israël. » C’est évidemment la vraie leçon, en harmonie avec le ꝟ. 3, avec le verbe haggiSâh, expression propre à l’usage de l’éphod. I Sam., xxiii, 9 ; xxx, 7. De plus, c’est avec l’éphod qu’on interrogeait le Seigneur ; et l’on ne voit pas d’ailleurs que l’arche eût été alors apportée de Cariathiarim. Enfin Josèphe, Ant. jud., VI, vi, 3, ne parle pas de l’arche en cette circonstance ; mais il dit que Saùl ordonna au grand prêtre de prendre l’éphod, axoXr^i àp^iEpaTixTiv, pour prophétiser sur l’avenir. La confusion s’explique d’ailleurs facilement entre tisn, ’êfâd, et jiin, ’ârôn.

II. Éphod ordinaire. — Nous voyons un éphod porté par de simples prêtres : Doëg l’Iduméen, sur l’ordre de Saùl, massacre quatre-vingt-cinq prêlres revêtus de l’éphod. I Reg., xxii, 18. Un simple lévite, encore enfant, Samuel, était ceint de l’éphod. I Reg., ii, 18. David lui-même, dans le transport de l’arche de la maison d’Obédédom à Jérusalem, marchait devant Jéhovah, ceint d’un éphod. II Reg., vi, 14 ; I Par., xv, 27. Ce vêtement, porté par de simples prêtres ou des lévites ou par le roi dans une fonction religieuse, étant nommé éphod, devait avoir la forme générale de l’éphod du grand prêtre ; mais il faut remarquer que dans tous les exemples qui viennent d’être cités l’éphod est dit’ëfôd bad, et non pas simplement’êfôd, comme lorsqu’il s’agit de celui du grand prêtre. Ce dernier éphod d’ailleurs était en ses et non en bad. Exod., xxviii, 7 ; xxxix, 2. Le ses était le fin lin d’une éclatante blancheur ; le bad paraît être le lin écru. De plus, l’éphod ordinaire n’avait pas les ornements d’or et de couleurs variées de l’éphod du grand prêtre, et surtout il ne servait pas à attacher le pectoral. Les Septante, pour l’éphod porté par David, II Reg., vi, 14 ; I Par., xv, 27, semblent avoir voulu bien distinguer ce vêtement de celui du grand prêtre en traduisant par

ffToXirç.

III. Éphod iDOLATRiQUE. — Après la défaite des Madianites, Gédéon, recueillant dans le butin les pendants d’oreille, du poids de dix-sept cents sicles d’or, en fit

faire un éphod, qu’il plaça, l>sn, hissîg, dans sa ville

d’Éphra. Ce fut l’occasion pour Israël d’un culte idolâtrique, et pour Gédéon et sa maison une cause de ruine. Jud., viii, 27. Dans un épisode qu’on lit vers la fin du livre des Juges, xvii, mais qui paraît devoir se placer au commencement de cette période, nous voyons un ÉphruîÉPHOD - ÉPHRA

1870

mite du nom de Michas se faire un pêsél et un massêkah et de plus un éphod et des teraphim, ꝟ. 4-5 ; des Danites, qui cherchaient à s’établir au nord de la Palestine, lui enlevèrent ces objets, Jud., xviii, 14-20, et se constituèrent un culte à Laïs, culte idolâtrique comme celui de Michas. Qu’était cet éphod de Gédéon et de Michas ? Des exégètes, comme Gesenius, Thésaurus, p. 135, pensent que l’éphod de Gédéon était une statue, une idole, appelée du nom à’éphod (isn) à cause des revêtements d’or qui la couvraient. Les lames d’or ou d’argent dont on avait coutume de recouvrir les idoles de bois ou de métal portent précisément le nom de mus, ’âpudâh, dans Is., xxx, 22 ; cf..1er., vi, 34. Il est à remarquer, de plus, que les statues ou représentations des dieux en Egypte sont souvent revêtues de l’éphod. Lepsius, Denkmâler, Abth. iii, Bl. 212, 250. Cependant rien n’oblige de changer la signification habituelle du mot éphod. On conçoit qu’ayant reçu plusieurs communications divines à Éphra, et y ayant élevé un autel à Yahvéh Salôm, Jud., "VI, 24, Gédéon ait désiré comme chef du peuple avoir près de lui un moyen de consulter Dieu. On comprend qu’on ait pu ensuite faire servir cet éphod à un culte idolâtrique. F. Vigouroux, Bible et découvertes modernes, 6e édit., 1896, t. iii, p. 154 ; Fr. de Hummelauer, Comment, in libr. Judicum, in-8°, Paris, 1888, p. 175. — Quant à l’éphod de Michas, généralement on le tient pour un éphod du même genre que celui du grand prêtre d’Israël. Comme Michas s’était fait une représentation de Jéhovah (probablement sous la forme d’un veau d’or, comme au temps de Jéroboam), il fallait y joindre l’accompagnement indispensable alors d’un culte vrai ou faux, l’instrument nécessaire pour interroger la divinité, c’est-à-dire l’éphod, et des théraphims, sorte de talismans ou d’amulettes servant à attirer la protection d’en haut. Osée, iii, 4, annonce aux enfants d’Israël, adonnés à l’idolâtrie, qu’un temps viendra où leur royaume sera détruit et où ils seront sans roi, sans sacrifice, sans autel, sans éphod et sans théraphim. E. LeveSQUE.

    1. EPHPHÉTHA##

EPHPHÉTHA, verbe araméen à l’impératif, qui signifie : « ouvre-[toi]. » Ce mot fut prononcé en cette langue par Notre-Seigneur guérissant un sourd-muet. Marc, vii, 34. Le texte grec reçu porte : ’E ?ça6dc. L’araméen doit être nnsn, hippâfaï}, ou nrraN, ’iptah, pour

nrsnN, ’étpâtâli, « sois ouvert. » Voir E. ltautsch, Gram matik. des Biblisch-Aramàischen, in-8°, Leipzig, 1884, p. 10.

4. ÉPHRA (hébreu : ’Ofrâh ; Septante : ’Eypaôâ), ville de la demi-tribu occidentale de Manassé. Dans Josèphe, Ant.jud., V, vi, 7, ce nom est écrit’Eypiv.

I. Identification. — La situation d’Ephra est difficile à déterminer. Le récit sacré, Jud., vi, 11, nous dit que Gédéon, qui en était originaire, se cachait dans un pressoir, pendant qu’il battait et vannait son blé, afin de n’être pas aperçu par les Madianites et leurs alliés, qui venaient d’envahir la vallée du Jourdain et la plaine de Jesraël. On peut conclure de là que cette localité n’était pas éloignée du ileuve et de la plaine. Saint Jérôme, De situ et nominibus locorum hebraicorum, t. xxiii, col. 891, au mot Drys, nom sous lequel il désigne le chêne d’Éphra, dit avoir parlé de cette ville aux livres des Questions hébraïques ; la perte de cet ouvrage, pour la partie concernant le livre des Juges, nous prive des seuls renseignements que nous aurions eu par là de l’antiquité. Les auteurs du Survey of Western Palestine Exploration Fund, Memoirs, in-4°, Londres, 1882, t. ii, p. 162, proposent d’identifier’Ofrâh avec le village actuel de Fer’ata’, situé à dix kilomètres vers le sud-ouest de Naplouse, sur une montagne qui domine toute la plaine <le Césarée. Cf. Armstrong, Names and Places in the Old Testament and Apocrypha, in-8°, Londres, 1887,

p. 132 ; Conder, Tent-Work in Palestine, in-8°, Londres, 1879, p. 339. Cette identification est indirectement repoussée par Victor Guérin, Samarie, t. ii, p. 179, qui identifie Far’ata’avec Pharaton (hébreu : Pir’aton). ville d’Éphraïm, patrie du juge Abdon. Jud., xii, 13-15, Fer’ata’, situé vers le sud de Sichem, dut appartenir à la tribu d’Éphraïm, tandis qu’Éphra était certainement de la tribu de Manassé, dont Gédéon faisait partie. Dans le territoire de cette dernière tribu on ne rencontre pas aujourd’hui de nom correspondant exactement au nom de’Ofrâh ; mais il en est qui s’en rapprochent et pourraient en dériver. Sous les montagnes de Tallûza’, à l’est, commence la large, belle et fertile vallée de Fara’7, ’. Elle se dirige au sud-est et débouche dans le Ghôr, en face de la ruine, située sur la rive du Jourdain, nommée’Ed-Damiêh. La vallée reçoit son nom d’une ruine importante, appelée Tell elFara’a', située elle-même dans la partie la plus occidentale de la vallée. Une petite ruine, située à un kilomètre et demi plus au sud, se nomme’Odfer ; à quatre kilomètres au sud-est d’'Odfer, une troisième ruine est désignée sous le nom de Beit-Fâr ; une quatrième ruine, connue sous le nom de Khirbet Farouèh, se trouve à quatre kilomètres et demi au sud-ouest de Tell elFara’a', sur un petit plateau qui domine l’ouadi Béniân, un des affluents de l’ouadi Fara’a'. Le nom d"Odfer, quoique commençant par’(n), et non par’(y), n’est pas sans analogie avec’Ofrâh ; mais la ruine qui le porte paraît trop insignifiante et trop peu ancienne pour avoir pu être l’antique Éphra. Beit-Fâr, « maison des rats, » semble un nom purement arabe. À l’étendue de ses ruines, à quelques beaux blocs de pierre et à des fûts de colonnes monolithes que l’on remarque parmi elles, on voit que Farouéh fut une localité ancienne et importante. Le nom aurait toutes les radicales de’Ofrâh, s’il se prononçait en réalité Farou’ah, comme l’écrit Victor Guérin, Samarie, 1. 1, p. 364 ; mais telle n’est certainement pas la prononciation commune et ordinaire dans le pays. Celle de Fara’a' est indubitable, et ainsi ce nom offre une analogie certaine avec’Ofrâh ; seulement l’ordre des lettres est interverti, par une métathèse semblable à celle qui a modifié un grand nombre d’autres noms bibliques ou anciens : ainsi Emmaùs est devenu’Amu’âs ; Thisbé, Istéb, et Làfrûn est appelé Baflûn par les paysans. Situé dans une vallée d’un abord facile et attrayant, à vingt kilomètres à peine de l’endroit où’elle débouche dans le Ghôr, Fara’a' ne pouvait voir d’un regard tranquille le passage des Madianites envahisseurs dans la vallée du Jourdain. Ces données ne suffisent pas sans doute à établir d’une manière certaine l’identité de’Ofrâh et de Fara’a' ; mais elles semblent lui donner quelque probabilité, que les autres localités, ses voisines, n’ont pas au même degré.

II. Description. — Tell elFara’a' est une colline s’élevant de quarante à cinquante mètres de hauteur au-dessus de sa base (fig. 590). Son large sommet, de près d’un kilomètre carré de superficie, et ses flancs sont couverts de pierres disséminées, de grandeurs diverses, débris d’anciennes habitations entièrement ruinées. À six cents mètres à l’est, une seconde colline de moindre étendue est également couverte de ruines de caractère antique. Vers l’extrémité orientale de la colline, une grande tour carrée, de dix mètres environ d’élévation et de quinze mètres de côté, surplombe la vallée. Elle était construite avec de beaux blocs, dont un grand nombre étaient taillés en bossage ; l’étage supérieur est détruit. Elle est appelée Bordj el-Fara’a'. Tout à côté est un birket, de vingt mètres environ de longueur sur sept de largeur, entièrement creusé dans le roc. On remarque encore plusieurs citernes, taillées également dans le roc. II est incontestable qu’il y avait jadis en ce lieu une ville relativement importante. — Au nord et près du tell, une source extrêmement abondante et pure prend naissance au milieu d’un bosquet de figuiers et d’arbres divers.

1871

ÉPHRA — EPHRXMI (CODEX)

1872

Elle forme aussitôt un grand ruisseau, qui coule au pied du tell, entre une double bordure de lauriers-roses, de séders et d’une multitude d’autres arbustes. Le ruisseau poursuit son cours jusqu’au Jourdain, grossi des eaux de plusieurs affluents, qui l’aident à mettre en mouvement plusieurs moulins, établis depuis quelques années sur ses bords.

III. Histoire. — Éphra avait été donné en possession à la famille d’Esri, de la souche d’Abiézer, une des grandes branches de la tribu de Manassé. Cf. Jud., VI, 24, 29 ; vin, 2, 32, et Jos., xvil, 2. De là le surnom de’Ofrdh’Abî Hâ-’ézrî qui lui était donné, Jud., vi, 24, et qui la distinguait de’Ofrdh (Vulgate : Ophra) de Benjamin.

mais plus tard ce culte dégénéra en idolâtrie. Gédéoa mourut à Éphra et fut enseveli dans le tombeau de sa famille. Jud., viii, 24-34. Peu après, Abimélech, fils de Gédéon, né d’une femme sichémite, vint, avec la troupe qu’il avait levée dans sa patrie, immoler sur un rocher d’Éphra les soixante-dix fils de Gédéon ; seul Joatham, le plus jeune, avait réussi à se cacher. Jud., IX, 1-5. Depuis ce moment il n’est plus question d’Éphra de Manassé dans l’histoire. L. Heidet.

2. ÉPHRA, nom d’une ville de Palestine, I Reg., sm, 17, appelée ailleurs par la Vulgate Ophera, Ephraim, Ephron, Ephrem. Voir Éphrem 1.

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590. — Tell el-Fara’a'. D’après « ne photographie de M. L. Heidet.

C’est la patrie de Gédéon. Il y battait le blé, en se cachant dans le pressoir de sa famille, lorsque l’ange, qui venait l’appeler à délivrer Israël de l’oppression étrangère, lui apparut sous un chêne situé non loin de la ville. Là nuit qui suivit l’apparition, Gédéon détruisit l’autel de Baal, qui appartenait à son père Joas, coupa Y’âsêrâh (voir Aschéra, t. i, col. 1074), et éleva à la place un autel consacré au Seigneur. Gédéon fit retentir la trompette guerrière et appela à sa suite les hommes de la famille d’Abiézer et de la tribu de Manassé. Il envoya aussi des messagers à Aser, à Zabulon et à Nephthali, et il fut rejoint par un grand nombre de guerriers. Éphra fut sans doute le centre où se groupa cette armée, et où Gédéon demanda au Seigneur le signe de la toison. Jud., vi. Après sa victoire sur les Madianites et leurs alliés, Gédéon revint habiter Éphra. Avec les boucles d’or (nézém) prises sur les Madianites et les Ismaélites, que lui donnèrent ses compatriotes, Gédéon fit fabriquer un éphod pour rehausser le culte du Seigneur, qu’il avait établi au lieu de l’apparition céleste. Le peuple y vint en foule,

EPHR/EMI (CODEX). Ce manuscrit, désigné sous le nom de Codex Ephrxmi rescriptus, et dans l’appareil critique du Nouveau Testament par le sigle C, est le manuscrit n° 9 du fonds grec de la Bibliothèque Nationale, à Paris ; il était coté 1905 dans la Bibliothèque du Roi et 3769 dans la Bibliothèque de Colbert. C’est un manuscrit palimpseste (voir, fig. 591, le fac-similé du ꝟ. 162, verso, du Codex Ephrxmi, contenant Matth., xi, 17-xii, 3). L’écriture seconde cursive est d’une main du xme siècle, et le texte est celui de vingt-trois discours ou traités de saint Éphrem, en grec. L’écriture première onciale est d’une main du Ve siècle, et le texteest celui de Job, des Proverbes, de l’Ecclésiaste, du Cantique des cantiques, de la Sagesse, de l’Ecclésiastique, des quatre Évangiles, des Actes des Apôtres, des Épitres paulines, des Épitres catholiques, de l’Apocalypse. Au total 209 feuillets palimpsestes ; une colonne à la page ; de 40 à 46 lignes à la colonne ; ni accents ni esprits ; ponctuation rare. Les caractères sont plus grands et plus soignés que dans le Vaticanus, le Sinaiticus, VAlexan* - r v __ r r’^ -^ w ^_ … r* 1873

EPHR^EMI (CODEX)— ÉPHRAÏM (TRIIiU D’)

1874

drinus. Quelques capitales. Ce manuscrit aurait été écrit avant le milieu iiu v siècle, en Egypte, conjecture-t-on. Un correcteur du vi>' siècle, que l’on désigne par le sigle G’2 ou C, et un correcteur du IXe siècle, C 3, seraient le premier de Palestine, le second de Constantiuople ; mais ce sont là des suppositions de peu de base. Le manuscrit a appartenu, au XVIe siècle, au cardinal Ridolti, à Florence, à la mort duquel il fut acheté par les Strozzi, toujours à Florence. d’où il passa aux mains de la reine Catherine de.Medieis. et ainsi à Paris. Il l’ut étudié par Montfaucon. qui même en publia un fac-similé dans sa Palœogmpliia yrivca (Paris, 1708), et partiellement eollationné par Jean liuivin, par Wetstein. par Griesbach, parSeholz. par Fleck, enfin intégralement par Tischendorf, qui l’a édité : Codex Eplinvrni Syri reseriptus sive fragmenta uteinsipie Testurnenti « cod. gr. paris, ceteberrimo quinti ut videtur p. C/ir. sœculi, Leipzig, 1810181Ô. Toutefois il y a lieu de craindre que. vu la difficulté du déchiffrement, l’édition de Tischendorf ne laisse beaucoup à désirer. — Le texte du Nouveau Testament donné par le Codex Ephrwmi est, au jugement deAYeslcott et Hort, un texte mixte ou éclectique : dans l’ensemble il appartient à la famille de textes que l’on désigne sous le nom de syrienne, mais il présente maintes leçons « pi’ésyriennes », soit « occidentales », soit c aloxandrines », soit « neutres ». À cet égard, il est à rapproche : ’du Codex Ale.eaiidriiius. (Tuant à l’Ancien Testament, c’est la version des Septante que le Codex Ep/inemi présente : mais, dans l’état actuel de la classification des manuscrits grecs des Septante, on ne saillait spécifier davantage. — Voir les l^roieqeonena de C. 11. Gregory a l’etlitio octava rritiea major du Novum Tcstamentuni gerce de Tischendorf, et l’introductiou au tome n du OUI Testament in tireek de Swete, in-12, Cambridge, 1891. P. Latifi oi..

    1. ÉPHRAIM##

ÉPHRAIM, nom d’un des fils de Joseph, de la tribu à laquelle il donna son nom, dune ville, d’une montagne et d’une forêt de Palestine, et d’une porte de Jérusalem.

1. ÉPHRAÏM (hébreu : ’Éfraim ; Septante : ’Eçsa-.’g : une fois Eplireen, dans la Vulgate, Ps. i.xxvii, l J), le second fils que donna à Joseph son épouse, l’Kgyptienno Aseneth, tien., xi.i..">'2 : Xl.vi, 20 ; xi.vm, I, et qui dcint le père d’une tribu d’Israël. Gen., xi.vm, 5, lli.’Il, 17. 20. Il naquit pendant les sept années de fertilité, « avant que la famine vint., Gen., XI.I, OU. Le nom qu’il reçut, ’Efraim, au duel, de fdrdh, « fructifier, être fécond. » est, par un de ces jeux de mots fréquents dans la liible, une allusion à la double fécondité » de sa mère. Joseph, en l’appelant ainsi, dit : « Lieu m’a fait fructifier (hébreu : liifrani) dans la terre de mon affliction. » Gen.. XI.I, 02. Jacob, en le bénissant, lui donna le pas sur son frère aine -Manassé. Lorsque les deux enfants fuient présentés par leur père au vieillard atfaihli par l’âge et la maladie, celui-ci, usant du pouvoir qui lui appartenait eu vertu des promesses divines, les adopta comme ses fils, afin qu’ils formassent, non deux branches d’une même tribu, mais deux tribus distinctes, au même titre que ses premiers-nés, Huben et Siméon. Gen., xi.vin, 5. Joseph, voulant maintenir a Manassé son droit d’aînesse, avait eu soin de placer ses enfants devant Jacob de manière que l’ainé put recevoir l’imposition de la main droite, « Lt ayant mis Éphraïm a sa droite, c’est-à-dire à la gauche d’Israël, et Manassé à sa gauche, c’est-à-dire à la droite de son père, il les approcha tous deux de Jacob : lequel, étendant sa main droite, la mit.-ur la tête d’Kphraïm, qui était le plus jeune, et mit sa main gauche sur la tête de.Manassé’, qui était l’ainé, croisant ainsi les mains. » Gen.. xi.vm, ld. 11. Puis il les beuit. Mais Joseph contriste. » prenant la main de son père, tacha de la lever de dessus la (été d’Kphraïm. pour la mettre sur la tête de Manassé, » lui rappelant que celui ci était le premier-né. Jacob refusa en disant : « Je sais, mon fils, je sais : lui aussi sera chef de peuples, et sa race se multipliera ; mais son frère, qui est plus jeune, sera plus grand que lui, et sa postérité se multipliera dans les nations. Jacob les bénit donc alors, et dit : Israël sera béni on vous, et on dira : Que Dieu vous bénisse comme Éphraïm et Manassé. Ainsi il mit Kphraïm avant Manassé. » Gen.. xi.vm, 17, I’J-20. C’est la seconde fois que dans la famille le plus jeune était substitué au plus vieux. L’histoire des deux tribus nous montre, en ellet la prééminence de l’une sur l’autre. Voir Éi’iiRAÏM 2.

Joseph, avant sa mort, put voir les enfants d’Kphraïm jusqu’à la troisième génération. Gen., i., "22. Parmi ceuxci, que l’Écriture mentionne N’uni., xxvi, 30, et 1 Par., vu, 20-21, il en est deux, Ézer et Llad, qui furent tués par les habitants primitifs de Geth, dans une expédition où ils avaient tenté de ravir leurs troupeaux. 1 Par., vu, 21. Nous voyons par ce simple fait comment, avant l’exode, quelques dans israélites avaient déjà pénétié en Palestine. Cf. Llevue biblique, Paris, janvier IS’Jd, p. 118-151). Kphraïm pleura longtemps ses fils, et en eut (dus tard un autre, qu’il appela liéria. Il eut aussi une j fille, nommée Sara, qui bâtit liéthoron intérieur et supérieur et Ozensara. Parmi ses descendants, le plus célèbre fut Josué. 1 Par., vii, 22-27. On s’est demandé si ce passage des Paralipoineiies désigne réellement et directement le fils de Joseph. Les commentateurs y ont plutôt vu un descendant d’Kphraïni, portant le même nom. Cf. Keil, Chrojiik, Leipzig, 187(1, p. 10$1-$2(12 : Clair, La Suinte Bible, Les Tæaliponiénes, Paris, 1880, p. 12 : i-12l. Cependant les données nouvelles de l’histoire, fournies par les documents égyptiens, permettent parfaitement d’admoltie certains établissements transitoires des Hébreux dans la Terre Promise, avant la conquête. Les autres pas-.a-.es du l’Écriture où se lit le nom d’Kphraïm se rapportent, non à la personne du patriarche, mais a la tribu dont il l’ut le chef. Voir Kl’iiiiAÏM 2. A. I.Kui-.Nliiti..

2. ÉPHRAÏM, une des douze tribus d’Israël.

I. Gï.oon.vI’UiK. — La tribu d’L’phraïui occupait ml territoire assez étendu, entre Dan et llonjamin au sud, Manassé occidental au nord, la Méditerranée a l’ouest, et le Jourdain à l’est. K’Kcnluro ne nous donne pas. comme pour les autres, l’énuuiération de ses illes principales ; aussi est-ce une des plus pauvres sous ee rapport. Le tracé des limites est tellement vague sur plus d’un point, qu’il o.-t dilficile à suivre. Lssayons ci pendant de le déterminer, en serrant d’aussi près que possible le texte sacré. oir la carte.

1° LiMirr.s. — Les enfants de Joseph reçurent la part de leur héritage aussitôt après ceux de.luda, avec lesquels ils partageaient la prééminence. La liible expose en ces termes la délimination méridionale de leur doinaine, ce qui forme la frontière sud d Kphiaim : « Le lot échu aux enfants de Joseph part du Jourdain, auprès de Jéricho et de ses eaux (la fontaine d Klisé-e ou’.C «  es-Sulliini vers l’orient ; [suGanl] le d.-seit qui monte de Jéricho a la colline de IVthel (le désert.le Iiétiiavi’ii i. Ll il sort de liéthel I.uza et passe ver.- la frontière de l’Ai’chite.’. ! <-< Wriki vois Atarolh ; et il descend a l’occident vers la frontière du.laphletilo jusqu’aux conlins de Kélhoruij inl’eueur t lied’/Vi’l-Mlin et jusqu’à Gazer I Te il Lijézer, . et il aboutit a la inei Muiiterraueei. » Jos.. xvi. l-o. Cette ligne de démarcation correspond exactement a la limite nord de benjamin, telle qu’elle est donnée Jos.. xvin. 12. III. Voir I11 : nj-MIN 1. t. I. col. 1.VJ2. I ! tant r’Miiaïquer c p.-ndaiit qu’a partir de liéthoron elle n’a plus qu’un point de irpn-, Gazer, et qu’elle ne tient pas compte de la tribu île D.m.

H est dune probable que le lut dé cette dernier, - fu ! pins

tard taillé- dans le coin sud-. > : n st-l’Lph] aim. JosUe. dans le même chapitie xvi, ô, i éprend cette liau du sud, en 1875

    1. ÉPHRAÏM##

ÉPHRAÏM (TRIBU D’)

1876

disant : « La frontière des enfants d’Éphraïm selon leurs familles et la frontière de leurs possessions est, à l’orient, Ataroth Addar jusqu’à Béfhoron supérieur, et ses confins se terminent à la mer. » Il y a là une véritable obscurité, peut-être une lacune, en tout cas une concision qui nous empêche d’utiliser le texte. Voir Ataroth Addar, t. i, col. 1204, et Dan 2, t. ii, col. 1232. — La limite septentrionale est bien plus vague encore. Voici comment elle est décrite, avec la frontière orientale : « Machmélhath regarde le septentrion ; puis la frontière tourne à l’orient vers Thanathsélo (hébreu : Ta’ânat Silôh ; aujourd’hui Ta’na), et elle passe de l’orient à Janoé (hébreu : Yânôhâh, actuellement Yanûn), et elle descend de Janoé à Ataroth (voir Ataroth 5, 1. 1, col. 1205) et à Naaratha (hébreu : Na’ârâ(â ; Khirbet Samiyéh ou Khirbet el-Audjéh et-Tahtdni), et elle parvient à Jéricho et se termine au Jourdain. De Taphua la frontière passe vers la mer jusqu’à la vallée des Roseaux (hébreu : Nahal Qânâh) et se termine à la mer (la Méditerranée et non pas « la mer Salée », comme porte faussement la Vulgate). Tel est l’héritage de la tribu des enfants d’Éphraïm selon leurs familles. » Jos., xvi, 6-8. Ce tracé correspond naturellement à celui qui est fixé pour la limite sud de Manassé, Jos., xvii, 7-9. Ce dernier passage ne précise que quelques points. Nous savons aussi que Machméthath était « en face de Sichem », et que, si le territoire de Taphua était échu à Manassé, la ville de Taphua appartenait aux enfants d’Éphraïm. En résumé, il semble que cette description a pour point de départ une position centrale, vers la ligne de partage des eaux, et que de là elle nous conduit d’abord dans la direction de l’est, de Machméthath au Jourdain, ensuite dans la direction de l’ouest, de Taphua à la Méditerranée. Malheureusement, Machméthath et Taphua n’ont pu jusqu’ici être identifiées. Nous n’avons donc sur la ligne septentrionale que deux jalons, dont l’un certain, Sichem, indiqué I Par., vii, 28, et l’autre simplement probable, le Nahal Qânâh, qu’on croit reconnaître dans le Nahr el-Fâléq. Voir Cana 1, col. 105. La frontière orientale est bien marquée par Ta’na, Yanoûn et Khirbet Samiyéh, échelonnées du nord.au sud sur l’arête montagneuse qui borde la vallée du Jourdain. L’ensemble de ces limites est ainsi résumé par le premier livre des Paralipomènes, vii, 28 : « Leurs possessions et leur demeure furent Béthel avec ses dépendances, et Noran (hébreu : Na’âràn, probablement la Naaratha de Jos., xvi, 7) du côté de l’orient, et Gazer avec ses dépendances du côté de l’occident, et Sichem avec ses dépendances, jusqu’à Aza avec ses dépendances. »

Quelques villes du territoire de Manassé furent cédées à Éphraïm. Jos., xvi, 9. Celles qui appartenaient à cette dernière tribu nous sont peu connues. En dehors des localités déjà mentionnées, nous ne pouvons citer que les suivantes : Silo (Séilun), Thamnathsaré, le lieu de la sépulture de Josué, identifié par V. Guérin avec Khirbet Tibnêh, à sept heures et demie environ au nordnord -ouest de Jérusalem, par les explorateurs anglais avec Kefr Hâris, par le P. Séjourné avec Khirbet el-Fakhakhir, entre les villages de Serta et de Béroukin (cf. Revue biblique, 1893, p. 608-626) ; Lebona (El-Loubbân), Jésana (Ain Sinia), Baalhasor (Tell Asur), Baalsalisa (Khirbet Sirisia), Thapsa (Khirbet Tafsah), Galgal (Djeldjuliyéh), Pharathon (Fer’ata), Ataroth (Athara).

2° description. — La tribu d’Éphraïm occupait la partie centrale de la Palestine, plus de la moitié des monts de Samarie. Son domaine comprenait ainsi une région montagneuse bornée à l’ouest par une étroite bande de la plaine de Saron, et à l’est par une portion de la vallée du Jourdain. La ligne de faite est beaucoup plus rapprochée de cette dernière. Ses deux points extrêmes sont, au sud le Tell Asur (10Il mètres), et au nord les deux sommets qui dominent Naplouse, le

Djebel Sliniah ou mont Hébal (938 mètres) et le Djebel et-Tur ou mont Garizim (868 mètres) ; dans l’intervalle, les hauteurs varient entre 600 et 800 mètres. De ces terrasses supérieures descendent assez régulièrement à l’ouest les terrasses successives, coupées de petits chaînons et de vallées, qui forment la transition entre la côte et la haute montagne. Comme le versant oriental est plus près du Jourdain, le fleuve n’en reçoit que de petits ouadis, VAoudjéh, le Baqr, le Fasaïl, et le cours inférieur du Farah. Sur le versant occidental, au contraire, les torrents s’allongent et serpentent, comme les ouadis Et-Tin, En-Naml, - Qânah et Rabâh, pour former les canaux plus importants qui se jettent dans la Méditerranée. Les collines calcaires qui composent ce massif sont moins régulières et moins monotones que celles qui se trouvent plus bas, aux environs et au-dessous de Jérusalem. Parsemées de bois d’oliviers, couvertes de nombreux villages, elles sont séparées par des vallées fertiles, où s’étendent champs et vergers. Ce pays bien arrosé garde encore, malgré sa déchéance, des vestiges de cette beauté primitive que Jacob chantait ainsi en annonçant à Joseph l’avenir de ses enfants, Gen., xi.ix, 22 :

Joseph est un rameau chargé de fruits,

Un rameau chargé de fruits, sur [les bords] d’une source,

Ses branches couvrent les murailles.

Moïse n’est qu’un écho du vieux patriarche quand il dit à Joseph : « Que sa terre soit remplie des bénédictions du Seigneur, des fruits du ciel, de la rosée et des sources d’eaux cachées sous la terre ; des fruits produits par l’influence du soleil et de la lune ; des fruits qui croissent au sommet des montagnes anciennes et sur les collines éternelles ; de tous les grains et de toute l’abondance de la terre. » Deut., xxxiii, 13-16. Il est en effet, dans l’héritage d’Éphraïm, telle plaine, comme celle d’El-Makhnah, au-dessous de Naplouse, la plus belle et la plus large de la contrée, qui était un petit grenier d’abondance, rempli de blé et réalisant pleinement les bénédictions de Jacob et de Moïse. Plusieurs endroits sont également pourvus de nombreuses sources. Et nous ne parlons que de la montagne ; tout le monde connaît l’admirable fertilité de la plaine de Saron. Les prophètes font les mêmes allusions aux richesses du territoire d’Éphraïm. Cf. Is., xxviii, 1. Les montagnes elles-mêmes donnèrent à la tribu un rôle et une force dont nous parlons plus loin. Sa situation au centre de la Palestine, les chemins de communication qui la reliaient au nord et au sud du pays, aussi bien qu’à la mer et au Jourdain ; des villes importantes au point de vue politique et religieux, comme Sichem et Silo : tous ces avantages physiques contribuèrent à son importance. >

II. Histoire. — À la sortie d’Egypte, la tribu d’Éphraïm élait, sous le rapport numérique, parmi les plus petites d’Israël. Au premier recensement, qui se fit au désert du Sinaï, elle ne comptait que quarante mille cinq cents guerriers, alors que Juda en avait 74600 ; Zabulon, 57 400, etc. Elle surpassait cependant Manassé, 32200, et Benjamin, 35400. Num., i, 32-37. Ces trois tribus, issues de Rachel, marchaient ensemble, Éphraïm en tête, et formaient un corps d’armée de 108100 hommes. Elles étaient campées à l’ouest du tabernacle. Num., ii, 18. Éphraïm avait pour chef Élisama, fils d’Ammiud, Num., i, 10 ; h, 18, qui, au nom de ses frères, fit au sanctuaire les mêmes offrandes que les autres chefs de tribu. Num., vu, 48-53. — Parmi les explorateurs envoyés en Chanaan, celui qui représentait la tribu fut Osée, fils de Nun, Num., xiii, 9, dont Moïse changea le nom en celui de Josué. Num., xiii, 17. Déjà se dessinait dans un de ses plus grands hommes la gloire dé cette famille israélite, qui pourtant au point de vue numérique était en décrois 4877

    1. ÉPHRAÏM##

ÉPHRAÏM (TRIBU D’)

1878

sance. En effet, an second recensement, à la veille de la conquête, elle ne comptait plus que 32500 guerriers ; c’était donc une perte de 8 000, qui ne mettait au-dessous d’elle que Siméon, 22200. Manassé, au contraire, avait monté de 32200 à 52 700, et Benjamin de 35400 à 45600. Num., xxvi, 34, 37, 41. Au nombre des commissaires chargés d’effectuer le partage de la Terre Promise, se trouvait, en dehors de Josué, Camuel, fils de Sephthan, de la tribu d’Éphraïm. Num., xxxiv, 24.

Mécontents du lot qui leur était échu, les fils de Joseph vinrent porter devant Josué une plainte aussi injustifiable qu’arrogante. Celui-ci leur conseilla d’abord, non sans une certaine ironie, de défricher les forêts dont était couverte la montagne d’Éphraïm. Puis il les engagea à marcher sans crainte à l’ennemi, dont ils redoutaient trop les chars de fer. Jos., xvii, 14-18.

Une fois installés dans le territoire que nous avons décrit, l’ancien territoire d’Amalec, les Éphraïmites n’exterminèrent point les Chananéens de Gazer, et les laissèrent vivre au milieu d’eux. Jud., i, 29. Ils sont signalés au premier rang parmi les Israélites qui répondirent à l’appel de Débora, leur glorieuse prophétesse. Jud., v, 14.

— Avertis par Gédéon, ils s’en allèrent barrer la route aux Madianites vaincus, en occupant les passages du Jourdain, tuèrent les deux chefs ennemis, Oreb et Zeb, et poursuivirent les fuyards au delà du fleuve, portant au héros d’Israël leur trophée sanglant, les deux têtes coupées. Jud., vii, 24, 25. Mais cédant à leur mécontentement, ils reprochèrent à Gédéon, sur un ton plein d’arrogance, de ne pas les avoir appelés au combat. Celui-ci les apaisa par un compliment délicat : « Que pouvais-je faire qui égalât ce que vous avez fait ? Le grappillage d’Éphraïm ne vaut-il pas mieux que toutes les vendanges d’Abiézer ? Le Seigneur a livré entre vos mains les princes de Madian, Oreb et Zeb. Qu’ai-je pu faire qui approchât de ce que vous avez fait ? » Jud., viii, 1-3. — Ils se montrèrent plus insolents encore à l’égard de Jéphté, qui pourtant avait défait les Ammonites, dont les ravages s’étaient fait sentir jusqu’au sud de la Palestine ( Juda et Benjamin) et au centre (Éphraïm). Jud., x, 9. Se soulevant, ils allèrent trouver le vainqueur et lui dirent : « Pourquoi, lorsque vous alliez combattre les enfants d’Ammon, n’avez-vous pas voulu nous appeler, pour que nous y allassions avec vous ? » Ajoutant la menace aux reproches, ils voulaient le brûler lui-même en incendiant sa maison. Jephté n’eut ni la patience ni la douceur de Gédéon, et, dans une réponse pleine de fermeté, ne craignit pas de faire ressortir leur lâcheté : « Nous avions, leur dit- ii, une grande guerre, mon peuple et moi, contre les enfants d’Ammon ; je vous ai priés de nous secourir, et vous ne l’avez pas voulu faire. Ce qu’ayant vii, j’ai exposé ma vie, et j’ai marché contre les enfants d’Ammon, et le Seigneur les a livrés entre mes mains. En quoi ai-je mérité que vous vous souleviez contre moi pour me combattre ? » Rassemblant alors les hommes de Galaad, que les Éphraïmites insultaient aussi, il alla avec eux s’emparer des gués du Jourdain, par où ceux-ci devaient rentrer dans leur pays. « Et lorsque quelque fuyard d’Éphraïm se présentait et disait : Je vous prie de me laisser passer ; ils lui demandaient : N’êtes-vous pas Éphrathéen ? et comme il répondait que non, ils lui répliquaient : Dites donc : Schibboleth (c’est-à-dire « un épi » ). Mais comme il prononçait sibboleth, parce qu’il ne pouvait pas bien exprimer Ja première lettre de ce nom, ils le prenaient aussitôt et le tuaient au passage du Jourdain ; de sorte qu’il y eut quarante-deux mille hommes de la tribu d’Éphraïm qui furent tués ce jourlà. » Jud., xii, 1-6. On sait comment, à la funeste journée des Vêpres siciliennes, on fit subir aux Français une épreuve analogue, au moyen du mot ciceri, que la plupart ne purent prononcer à l’italienne.

Après la mort de Saûl, Éphraïm, eomme les autres tribus, à l’exception de Juda, reconnut la royauté d’Isbo seth. II Reg., ii, 9. Mais plus tard, vingt mille huit cents hommes de la même tribu, « tous gens très robustes, renommés dans leurs familles, » vinrent trouver David à Hébron pour l’établir roi. I Par., xii, 30. Ils lui fournirent un certain nombre d’officiers. I Par., xxvii, 10, 14, 20. Quand, à la mort de Salomon, éclatèrent tous les mécontentements que le monarque avait accumulés au cœur de son peuple, les Éphraïmites, toujours pleins du désir d’exercer une certaine prépondérance en Israël, surent profiter des circonstances pour le réaliser. Jéroboam était un des leurs. III Reg., xi, 26. Sichem fut habilement choisie comme lieu d’assemblée pour les légitimes réclamations du peuple. III Reg., xii, 1. On sait ce qui advint, et quel schisme se produisit. À partir de ce moment, l’histoire d’Éphraïm se confond avec celle d’Israël ; son nom même est souvent employé pour désigner le royaume du nord, et c’est dans ce sens qu’il faut le prendre dans les prophètes. Cf. Is., Vil, 2-5, 8, etc. ; surtout Os., v, 3, 5, 9 ; vi, 4, etc. Si la tribu, comme toutes les autres séparées de Juda, tomba dans l’idolâtrie, cependant plusieurs de ses membres s’enfuirent pour rester fidèles au vrai Dieu, et nous les voyons s’unir à Asa pour immoler des victimes au Seigneur à Jérusalem. II Par., xv, 8-11. Aux courriers que le pieux roi Ézéchias envoya en Éphraïm et Manassé, pour inviter les Israélites à monter au Temple et célébrer la Pàque, ceux-ci ne répondirent que par les moqueries et les insultes. Il vint néanmoins quelques pèlerins. II Par., xxx, 1, 10, 18. Poussée par son zèle, la multitude des fidèles, après avoir rempli ses devoirs religieux, envahit les deux provinces méridionales du royaume schismatique pour y détruire les objets idolâtriques. II Par., xxxi, 1. Josias fit de même en ces contrées une sainte expédition. II Par., xxxiv, 6, 9. Tels sont les principaux faits qui concernent spécialement la tribu d’Éphraïm ; le reste rentre dans l’histoire générale d’Israël. Voir Israël (royaume d’).

III. Importance et caractère. — D’où vient le rôle prééminent qu’eut Éphraïm ? Il est permis d’en trouver la raison dans sa situation et son caractère, en dehors même des desseins de Dieu, manifestés par les bénédictions qui lui furent accordées. Les autres tribus du nord paraissent avoir été beaucoup moins maîtresses chez elles et soumises à des influences extérieures qui durent diminuer la part active qu’elles auraient pu prendre aux affaires intérieures. Nombreuses étaient les villes dont les Chananéens n’avaient pas été expulsés, et l’on sait de quelle puissance formidable disposaient encore les vaincus après la conquête. Sans compter les séductions pernicieuses que trouvaient ces tribus auprès de voisins comme les Phéniciens, elles étaient aussi plus exposées aux incursions des Bédouins pillards et de conquérants étrangers venant de Syrie, d’Assyrie ou d’Egypte. Leur pays, par la plaine d’Esdrelon, était ouvert à toutes les invasions. Bien différente était la position d’Éphraïm, qui jouissait d’une plus grande sécurité au sein de ses montagnes. On ne pouvait aborder ses plaines fertiles et ses vallées bien arrosées que par une ascension plus ou moins pénible, par des passes plus ou moins étroites, dangereuses pour une armée. Aucune attaque ne fut portée sur ce massif central, ni du côté de la vallée du Jourdain, ni du côté de la plaine maritime. Plus accessible par le nord, il était cependant facile à défendre, et un peuple moins affaibli par les dissensions intestines avait beau jeu pour protéger de ce côté-là même contre une invasion étrangère le cœur du pays. Outre ces défenses naturelles, la tribu posséda encore, au moins pendant assez longtemps, le double centre religieux et civil de la nation, Silo et Sichem. C’est autour de cette dernière ville et de Samarie que se concentra la vie de la nation.

A ces avantages physiques Éphraïm joignait une puissance morale, une énergie de caractère, qui fit de cette 1879

    1. ÉPHRAÏM##

ÉPHRAÏM (TRIBU D’) — ÉPHRAÏM (FORÊT D")

1880

tribu la force des enfants d’Israël. Jacob l’avait prédit en ces termes, Gen., xlix :

y. 23. On le provoque, on l’attaque ;

Les archers le percent [de leurs flèches] ;

?. 24. Mais son arc reste fort,

Ses bras demeurent flexibles,

Par la main du [Dieu] puissant de Jacob,

Par le nom du Pasteur et du Rocher d’Israël.

Moïse le compare au buffle ou au taureau : « ses cornes sont comme celles du re’êm (Vulgate : du rhinocéros) : avec elles il lancera en l’air tous les peuples jusqu’aux extrémités de la terre. » Deut., xxxiii, 17. Si Benjamin est le loup ravisseur, Gen., xlix, 27, et Juda le lion, xlix, 9, caché dans ses montagnes sauvages, dans sa forteresse de Sion, gardant le sud de la Terre Sainte, Éphraïm, son rival, est le taureau moins belliqueux, mais non moins puissant, qui doit défendre le nord. Cependant le sentiment qu’il a de sa force, la fierté des promesses reçues, de la prééminence acquise, le poussent jusqu’à l’arrogance. Arrogant, il l’est vis-à-vis de Josué, quand il vient se plaindre, avec Manassé, de la faible part d’héritage concédée à « un peuple si nombreux, et que le Seigneur a béni ». Jos., xvii, 14. Il l’est vis-à-vis de Gédéon et de Jephté, à qui il fait durement le même reproche : « Pourquoi ne nous avez-vous pas appelés au combat ? » Jud., viii, 1 ; iii, 1. Il ne peut tolérer qu’on puisse se passer de lui. Quoi qu’il en soit, Dieu l’appelle « la force de sa tête », Ps. lix (hébreu, lx), 9 ; CVII (cviil), 9, bien qu’il lui ait préféré Juda. Ps. lxxvii (lxxviii), 67. Et la raison de cette préférence, c’est que ce superbe n’eut pas le courage de résister aux séductions de l’idolâtrie ; en abandonnant le Seigneur et sa loi, il fit comme un guerrier fanfaron, qui abandonne son poste au jour du combat. Ps. lxxvii, 9. — L’histoire du schibboleth, Jud., xii, 6, nous montre qu’il y avait en Éphraïm des provincialismes comme en Galilée. Matth., xxvi, 73.

A. Legendre.

3. ÉPHRAÏM (MONTAGNE D’) (hébreu : Har’Éfraim ; Septante : cfpo ; tô’Efpa’151, ou ô’po ; ’Efpaiji), nom par lequel est désignée’la partie montagneuse du territoire attribué à Éphraïm. Jos., xvii, 15. Voir Éphraïm 2. D’une façon générale, il indique la moitié septentrionale du massif qui court, entre la Méditerranée et le Jourdain, depuis le sud de la Palestine jusqu’à la plaine d’Esdrelon, la moitié méridionale étant appelée « montagne de Juda ». Jos., xi, 21 ; xx, 7. Ce district était aussi nommé « montagne d’Israël ». Jos., xi, 16, 21, et « montagne d’Amalec ». Jud., v, 14 ; xii, 15. Il s’étendait même jusque dans la tribu de Benjamin, Jud., iv, 5, allant ainsi de Béthel à Samarie. Il comprenait dans ses limites les villes suivantes : Thamnath Saraaou Thamnathsaré, Jos., XIX, 50 ; xxiv, 30 ; Jud., ii, 9 ; Sichem, Jos., xx, 7 ; xxi, 21 ; 1Il Reg., xii, 25 ; 1 Par., VI, 67 ; Gabaath de Phinées, jos., xxiv, 33 ; Béthel, Jud., iv, 5 ; Samir, Jud., x, 1 ; Ramathaïm-Sophim, I Reg., i, 1. C’était une des douze préfectures que Salomon avait établies pour l’entretien de sa maison, et l’intendant chargé d’y lever les impôts s’appelait Ben-Hur. III Reg., iv, 8. La contrée, en effet, était renommée pour sa fertilité, comme le Carmel, Basan et Galaad. Jer., l, 19. Elle était aussi bien boisée. Jos., XVII, 15 ; IV Reg., ii, 24. Comme c’était le centre du pays, Aod y fit entendre, par le son de la trompette, l’appel aux armes pour marcher contre les Moabites. Jud., iii, 27. Gédéon y envoya de même des courriers pour convoquer le peuple contre les Madianites. Jud., vu, 24. C’est là que demeuraient Michas ou Michée, dont l’histoire est racontée Jud., xvii, xviii, et le lévite dont la femme fut victime des habitants de Gabaa. Jud., xix. C’est de là qu’était Séba, fils de Bochri, qui s’était soulevé contre David. II Reg., xx, 21. Les rois de Juda y conquirent certaines villes. II Par. ; xiii, 19 ; xv, 8.

A. Legendre.

4. ÉPHRAÏM, ville de Palestine ainsi nommée II Reg., xili, 23. Dans d’autres passages de l’Ancien Testament, elle est appelée Ophéra, Éphron, etc. Dans le Nouveau, elle est appelée Éphrem. Voir Éphrem 1.

5. ÉPHRAÏM (FORÊT D’) (hébreu : Ya’ar’Éfràim ; Septante : Spïfiôç’Efpiiu. ; Vulgate : saltus Ephraim), forêt dans laquelle eut lieu le combat entre les armées de David et de son fils révolté Absalom, et où celui-ci trouva une mort tragique. II Reg., xviii, 6. Cet endroit n’est pas mentionné ailleurs, et l’on se demande de quel côté du Jourdain il faut le chercher. Comme la tribu d’Éphraïm habitait un pays bien boisé, Jos., xvii, 15, qu’Absalom lui-même avait des propriétés près de la ville de ce nom, II Reg., xiii, 23, on serait tout d’abord tenté de croire que ce bois tirait son nom ou du pays ou de la ville, et qu’il était par là même à l’ouest du Jourdain. On ajoute à ces raisons un détail du récit sacré, qui nous montre Achimaas prenant « le chemin du kikkar » ou de la vallée du Ghôr, pour aller porter des nouvelles de la bataille à David, resté à Mahanaïm, de l’autre côté du fleuve. II Reg., xviii, 23. Cette circonstance laisserait donc supposer que les événements se passèrent dans la région occidentale. Telle est l’opinion admise par certains auteurs, comme Winer, Biblisches Realwôrlerbuch, Leipzig, 1847, t. i, p. 334, et Keil, Die Bûcher Samueîs, Leipzig, 1875, p. 339. Il semble bien cependant, à considérer la marche et les opérations des deux armées, qu’elles se rencontrèrent à l’est du Jourdain. Ainsi : 1° David, après avoir franchi le fleuve, vient à Mahanaïm ; Absalom, suivi de tout Israël, « passe aussi le Jourdain, » et vient « camper dans le pays de Galaad », II Reg., xvii, 22, 24, 26, et l’on ne dit nulle part qu’il soit revenu sur ses pas. — 2° Le roi se tient dans la ville, afin de pouvoir en cas de besoin porter secours à son armée, II Reg., xviii, 3 ; l’engagement n’eut donc pas lieu très loin de là. — 3° Cette proximité ressort encore des points suivants : c’est le jour même de la bataille que David reçoit la nouvelle du succès de ses armes, II Reg., xviii, 20 ; les deux messagers paraissent avoir franchi la distance de la forêt à la ville tout d’une traite, et même en courant. II Reg., xviii, 22. On ajoute aussi que, après la victoire, l’armée de David revint à Mahanaïm, II Reg., xix, 3, tandis que, si le combat avait eu lieu en deçà du fleuve, elle eût marché directement sur Jérusalem. Mais on peut répondre que, la révolte étant terminée après la mort d’Absalom et la défaite des siens, les vainqueurs n’avaient plus qu’à aller chercher le roi à Mahanaïm, pour le ramener dans sa capitale, où personne ne devait penser à organiser la résistance.

On a dit, contre les deux premières preuves, qu’elles ne sauraient avoir de force que dans le cas où nous aurions le récit complet des faits qui se sont passés dans cette guerre. « Le combat décisif pourrait à la rigueur avoir été précédé de plusieurs autres, comme il arrive dans toutes les opérations militaires, et les mots : « le peuple sortit dans la plaine, » II Reg., xviii, 6, signifieraient uniquement que l’armée de David prit l’offensive. Ce serait alors à la suite de plusieurs échecs partiels qu’Absalom aurait repassé le Jourdain et se serait réfugié dans une région d’un accès difficile, afin de résister avec avantage. » Cf. Clair, Les livres des Rois, Paris, 1879, t. ii, p. 108. Avec ce système d’interprétation, on peut faire toutes les hypothèses ; mais ne donnei t-il point trop de facilité pour tout expliquer ? D’après le i récit biblique, tel que nous le possédons, les événements

! racontés semblent bien avoir eu pour théâtre une coni

trée située à l’orient du Jourdain et non loin du fleuve. Cependant l’expression dérék hak-kikkâr, littéralement « le chemin du cercle », II Reg., xviii, 23, signifie-t-elle « la vallée du Jourdain », qui aurait offert à Achimaas une voie plus facile pour arriver plus vite vers le roi ? Ce i n’est pas sûr. La Vulgate y a vu un « chemin plus court », 4881

"ÈPHRAÏM (FORÊT D*) — ËPHRÉE

1882

per viam compendii ; de même Josèphe, Ant. jud., VII, S, 4. Les Septante ont traduit par un nom propre : ïj iSo ? r toO Ke^àp, « le chemin du Kékar. » Voir Kikkar. — Étant donc donné que la forêt d’Éphraïm se trouvait à l’est du Jourdain, d’où lui venait ce nom ? Nous ne pouvons faire ici que des conjectures. On a supposé qu’il se rattachait à la défaite des Éphraïmites, sous Jephté, près des gués du fleuve, Jud., xii, 5, 6, ou à la situation de la forêt elle-même, qui aurait été en face de la montagne d’Éphraïm. Il ne peut se rapporter à la ville d’Éphron, I Mach., v, 46 ; II Mach., xii, 27, qui, placée sur la route de Carnaïm à Bethsan, était trop loin pour contribuer à cette dénomination. — C’est dans ce bois qu’Absalom, passant sous un térébinthe, resta pris par sa chevelure et reçut des coups mortels" de la main de Joab, malgré les ordres formels de David. II Reg., xviii, 14.

A. Legendre.

6. ÉPHRAÏM (PORTE D’) (hébreu : àa’ar’Éfraim ; Septante : ï) mita]’E ?pai[i ; Vulgate : porta Ephraim), une des portes de l’ancienne Jérusalem. IV Reg., xiv, 13 ; II Par., xxv, 23 ; II Esdr., viii, 16 ; su, 38 (hébreu, 39). On peut supposer, d, ’aprés le nom même, qu’elle se trouvait dans la muraille septentrionale, puisque c’est la route du nord qui conduisait en Éphraïm. Les passages de la Bible où elle est mentionnée mènent également à cette conclusion. Nous lisons, en effet, au IVe livre des Rois, xrv, 13 : « Joas, roi d’Israël, prit à Bethsamès Amasias, roi de Juda, flls de Joas, fils d’Ochozias, et il l’emmena à Jérusalem. Il fit à la muraille de Jérusalem une brèche de quatre cents coudées, depuis la porte d’Éphraïm jusqu’à la porte de l’Angle. » Le même fait est raconté dans les mêmes termes II Par., xxv, 23. Il s’agit évidemment ici de la première enceinte de la ville ; la deuxième ne fut bâtie que plus tard, sous Ézéchias et Manassé. Or la partie que l’on pouvait détruire plus facilement, c’était bien la partie septentrionale, qui n’avait point pour la défendre, comme les trois autres, de profondes vallées, de véritables précipices. « Quant à la position [de la porte d’Éphraïm] dans cette muraille du nord, elle est indiquée relativement à la porte de l’Angle : elles étaient à « quatre cents coudées » l’une de l’autre, soit 210 mètres. Or la situation de la porte de l’Angle paraît tout naturellement indiquée par cet angle que formait le premier mur en tombant perpendiculairement sur l’enceinte du Temple. Elle donnait accès dans le chemin qui suivait le fond de la vallée pour aller au nord-ouest, rue que l’on appelle encore maintenant Tarik el-Ouadi, « rue de « la Vallée, » ou Tarik Bab-el-Ahmoud, « rue de la porte « de la Colonne, » ou porte de Damas. En mesurant de là quatre cents coudées ou 210 mètres, on arrive exactement à l’autre artère principale qui va du sud au nord de Jérusalem, à la jonction du Souk el-Attarin et du Tarik Bab-en-Nébi-Daoud. Les vestiges de porte ancienne que l’on voit précisément en cet endroit représenteraient donc la porte d’Éphraïm. » P. M. Séjourné, Les murs de Jérusalem, dans la Bévue biblique, Paris, 1895, p. 43 ; plan, p. 39. Lorsqu’on bâtit la deuxième enceinte, qui enfermait au nord l’angle rentrant formé par la première, on établit une porte correspondant à l’ancienne, dont elle prit le nom. Cette dernière n’est pas mentionnée par Néhémie dans rémunération qu’il fait, II Esdr., iii, des portes de Jérusalem. Il est probable qu’elle n’avait pas souffert et qu’elle est comprise dans le coin du rempart auquel on ne toucha pas. II Esdr., iii, 8. Sa position est également bien marquée au nord d’après la marche des deux chœurs qui firent le tour des remparts lors de la consécration solennelle des nouvelles murailles. II Esdr., xii, 31-38. Partant du même point, la porte actuelle de Jaffa, ils marchèrent dans un sens opposé, le premier allant d’abord au sud, puis à l’est et aunord, le second se dirigeant au nord, puis à l’est et au sud-est, jusqu’en face du Temple. Or, dans cette dernière direction, la porte d’Éphraïm est citée la première, entre la tour des

Fourneaux et la porte Ancienne. II Esdr., xii, 38. La place qui la précédait fut un des endroits où les Israélites, pour célébrer la fête des Tabernacles, dressèrent des tentes de feuillages. II Esdr., viii, 16. — Plusieurs auteurs identifient la porte d’Éphraïm avec celle de Benjamin. Jer., xxxvii, 12 ; Zach., xiv, 10. Ce n’est pas certain.

Voir Benjamin 5, t. i, col. 1599.
A. Legendre.

ÉPHRAÏMITE. Voir Épiirathéen.

    1. ÉPHRATA##

ÉPHRATA (hébreu : ’Éfrâfâh ; Septante ; ’EçpaBâ), ancien nom de Bethléhem de Juda. Gen., xxxv, 16, 19 ; xlviii, 7 ; Ruth, iv, 11. Dans le premier passage de la Genèse et dans Ruth cette ville est appelée simplement Éphrata ; dans les deux autres textes de la Genèse, une glose explique que cette Éphrata est Bethléhem. Ce fut, dit le texte sacré, « sur le chemin qui conduit à Éphrata » que mourut Rachel, femme de Jacob, en donnant le jour à Benjamin. — Michée, v, 2, dans la prophétie où il annonce le lieu de naissance du Messie, le désigne sous le nom de Bethléhem-Éphrata. Voir Bethléhem 1. — Éphrata est aussi nommée Ps. cxxxi (cxxxii), 6 ; mais, d’après certains commentateurs, Éphrata est là pour la tribu ou la montagne d’Éphraïm, et non pour Bethléhem.

    1. ÉPHRATHA##

ÉPHRATHA (hébreu : ’Éfrât, ’Éfrâfâh, « fertile ; » Septante : ’E ?pâ6, ’E ?pa61), seconde femme de Caleb fils d’Hesron. Elle fut mère de Hur, dont les descendants furent les habitants de Bethléhem. I Par., Il, 19, 24, 50 ; iv, 4. Le nom d’Éphrata (ou Éphratha, l’orthographe est la même en hébreu), donné à Bethléhem, peut venir de la mère de Hur. Cependant il y en a qui croient que le nom d’Éphrata remonte à une époque plus ancienne. Voir Caleb -Éphrata, col. 59.

    1. ÉPHRATHÉEN##

ÉPHRATHÉEN (hébreu : ’Éfrâfî ; Septante : ’Eqjpatoîoç), 1° originaire d’Éphrata ou de Bethléhem de Juda, Ruth, i, 2, où il est question d’Élimélech, de Noémi et de leurs deux fils, et I Reg. (Sam.), xvii, 12, où il est question de David. — 2° Jud., xii, 5, Ëphrathéen signifie Éphraïmite ou originaire de la tribu d’Éphraïm. De même 1(111) Reg., xi, 26. — Dans I Reg. (Sam.), i, 1, Épiirathéen signifie originaire du territoire d’Éphraïm.

    1. ÉPHRÉE##

ÉPHRÉE (hébreu : Hofra’; Septante, Jer., li, 30 : Oùoçpîj ; Vulgate : Ephree), roi d’Egypte, contemporain de Nabuchodonosor et de Sédécias, roi de Juda. Jer., xliv, 30. Il n’est désigné nommément que dans ce seul passage, mais il est question de lui comme roi d’Egypte dans plusieurs endroits de Jérémie et d’Ézéchiel. Sur les

monuments égyptiens, son nom est écrit

o

Vahabra ; chez les écrivains grecs, il devient’Anpti]ç, Hérodote, ii, 161-163, 169 ; Diodore de Sicile, i, 68 ; dans Manéthon, Oûaçpi ; (Eusèbe, Chron., i, 20, t. Six, col. 192). Il était fils de Psammélique II et petit-fils de Néchao II (XXVIe dynastie). Il régna de 589 à 570 ou 569 avant J.-C. (fig. 593).

Sous son grand-père Néchao II, l’Asie antérieure était passée de la domination des rois de Ninivé à celle des rois de Babylone, et dès lors la puissance de Nabuchodonosor constitua un grave danger pour l’Egypte. Le pharaon le sentit. Il fut, par suite, intéressé à soutenir le royaume de Juda contre les Chaldéens, parce qu’il devait lui servir de rempart contre une invasion asiatique. Quand les troupes de Nabuchodonosor, après avoir ravagé tout le pays de Juda, assiégèrent le roi Sédécias dans Jérusalem, Jer., xxxiv, 7, celui-ci fit appel à l’Egypte. Ezech.jXVii, 15. Les nombreux Juifs qui avaient fui dans la vallée du Nil, devant l’armée chaldéenne, cf. Jer., xliv, 8-14, appuyèrent sans doute sa demande. Le pharaon résolut cbinç de le délivrer, et, ayant rassemblé son année, il

se mit en marche pour la Palestine. Mais, comme l’avaient prédit Jérémie, xxxvii, 9-10, et Ézéchiel, xvii, 11-18, son intervention ne devait point sauver Juda de sa perte. La tentative d’Éphrée échoua complètement. Prévenue de son approche, l’armée chaldéenne leva le siège de Jérusalem pour aller arrêter sa marche. Jer., xxxvii, 5, 11. On ne saurait dire au juste ce qui se passa alors. Les deux ennemis en vinrent-ils aux mains, ou le pharaon, effrayé du danger qu’il allait courir, se retira-t-il sans combattre et sans attendre Nabuchodonosor ? Le langage de Jérémie, xxxvii, 5, peut s’entendre dans ce dernier

débris (fig. 594). E. Renan, Mission de Pkénicie, p. 179180 ; cf. p. 26 ; E. de Rougé, dans la Revue archéologique, t. vil, 1864, p. 194. — Il fut moins heureux dans une autre campagne qu’il entreprit ensuite contre Cyrène. Les Grecs, qui y étaient établis, rendaient la vie dure aux Libyens. Le pharaon voulut défendre ces derniers, mais les Gyrénéens battirent ses troupes égyptiennes, Hérodote, iv, 159, et cette défaite fut fatale à Éphrée. Ses sujets s’imaginèrent que c’était volontairement qu’il avait envoyé les Égyptiens à la boucherie ; ils se révoltèrent ; le roi perdit son trône et, quelque temps après, mourut étranglé. Tel est le récit

[[File: [Image à insérer]|300px]]
593. — Sphinx égyptien portant un cartouche au prénom d’Éphrée (Hûâabra). Musée du Louvre..

sens : « L’armée du Pharaon, qui est sortie, dît- ii, pour vous secourir, retournera dans son pays, en Egypte. » Mais ces paroles ne sont pas suffisamment explicites pour qu’on puisse rejeter avec certitude le récit de Josèphe, qui déclare positivement qu’une bataille fut livrée et que les Égyptiens furent battus. Ant.jud., X, vii, 3. — L’échec du roi d’Egypte amena bientôt la chute de Jérusalem. Les Chaldéens y entrèrent en 587, brûlèrent la ville et le Temple, et emmenèrent le peuple en captivité à Babylone. Désormais aucune barrière ne pouvait arrêter le monarque asiatique lorsqu’il entreprendrait une campagne contre l’Egypte.

Éphrée, qui n’avait pu sauver les Juifs, donna du moins asile dans son royaume à ceux qui, n’ayant pas été déportés en Chaldée, y cherchèrent un refuge après le meurtre de Godolias, gouverneur de Juda au nom de Nabuchodonosor. Jer., xii, 17-18 ; xlii, 14 ; xliii, 7. Il leur permit de s’établir à Taphnès, à Madgol, à Memphis et jusque dans la Haute Egypte. Jer., xliii, 8 ; xiiv, 1, 15. Cf. Ezech., xxix, 4 ; xxx, 13-18. L’insuccès de la lutte qu’il avait soutenue en Palestine contre Nabuchodonosor ne paraît pas d’ailleurs avoir découragé le pharaon. Quelques années après la chute de Jérusalem, . entre 574 et 570, lorsque le roi de Babylone, après un siège de treize ans, Josèphe, Cont. Apion., i, 21, eut pris la ville de Tyr (S. Jérôme, In Ezech., xxvi, 6 ; xxix, 17, t. v, col. 241-243, 285 ; S. Cyrille d’Alexandrie, In Is., xiv, 8-11, t. lxx, col. 369-372), ou du moins eut fait la paix avec le roi phénicien Ithobaal III, selon l’opinion de beaucoup d’historiens ( voir Rùetschi, dans Herzog, Real-Encyklopâdie, 2e édit., t. x, 1882, p. 465), Éphrée résolut de s’emparer de la Phénicie. À l’aide d’une flotte équipée par les Grecs, il fit une expédition contre Sidon, força cette ville à capituler et battit les flottes alliées de Phénicie et de Cypre, qui étaient au service des Chaldéens. Hérodote, ii, 161 ; Diodore de Sicile, I, 68. Tout le pays tomba en son pouvoir ; on lui attribue la construction à Gébal (Bjblôs) d’un temple dont on à retrouvé quelques

d’Hérodote, ii, 161-163 ; cf. Diodore de Sicile, i, 68. — Ce que raconte l’historien d’Halicarnasse est néanmoins en contradiction avec la narration de Josèphe. D’après l’écrivain juif, Ant.jud., X, IX, 7 ; cf. Cont. Apion., i, 19-20, ce fut Nabuchodonosor qui, dans une expédition contre l’Egypte, arracha au roi le trône et la vie et emmena

894. — Fragment d’nn bas-relief égyptien, en calcaire noir, de Byblos. D’après Eenan, Misnivic de Phèniele, p. 178.

en Chaldée les Juifs qui s’étaient réfugiés en Egypte. Quoi qu’il en soit de ces récits contradictoires, le roi de Babylone, qui fit en Egypte une expédition contre Amasis, successeur d’Éphrée, semble bien avoir fait aussi précédemment une campagne contre ce pays, lorsque Ephrée vivait encore. Voir A. Wiedemann, Der Zug Nebucadnezar’s gegen Aegypten, dans la Zeitschrift fur âgyp

lische Sprache, 1878, p. 5-6 ; F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. iv, p. 244-253. Cf. Ezech., xxx, 14-19, 24-25. On voit d’ailleurs que tous les documents s’accordent à faire mourir le roi d’Egypte de mort violente et justifient ainsi la prophétie de Jérémie, xliv, 30 : « Je livrerai le pharaon Éphrée entre les mains de ses ennemis et de ceux qui cherchent sa vie. » Cf. Jér., xlvi, 23-26. Hérodote, ii, 169, lui attribue un caractère présomptueux et arrogant ; il dit qu’il se vantait que « même les dieux ne pourraient le renverser de son trône ». Ézéchiel, xxix, 3, le représente sous l’image d’un grand crocodile, couché au milieu des eaux du Nil et s’écriant : « Le fleuve est à moi ; c’est moi qui l’ai fait. » Son orgueil fut honteusement humilié. Ezech., xxix, 4-12 ; xxx. F. Vigouroux.

1. ÉPHREM, ville de la tribu de Benjamin, qui fut occupée par Éphraïm. Son nom est écrit dans la Bible de manières très diverses : hébreu : ’Ofrâh ; Septante : ’EçpaOi ; Codex Sinaiticus : ’UppaOâ ; Codex Alexandrinus : ’Açpâ ; Vulgate : Ophera, Jôs., xviii, 23 ; —’Ofrâh, Toçepi, Ephra, 1 Reg., xiii, 17 ; —’Éfràïm, ’Eçpa’iji, Ephraim, II Reg., xiii, 23 ; — est écrit (ketîb)’Èfrôn, mais se lit (qeri)’Éfrâîn, ’Epp&iv, Ephron, II Par., xm, 19 ; —’Afrâh ; Vulgate : domus pulveris. Voir Aphra, t. i, col. 735. —’Aça(p£(j.a, I Mach., xi, 34 (omis dans la Vulgate ; voir t. i, col. 721) ; —’Eppsifp. ; Codex Sinaiticus et quelques autres manuscrits : ’EcppÉfi ; Vulgate : Ephrem, Joa., xi, 54.

I. Nom ; identification. — Josèphe, Bell, jud., IV, IX, 9, écrit ce nom’Eçpetin, et, Ant. jud., XIII, IV, 9, 'Aq>eipi|i.dc. Cet historien semble avoir pris le nom d’Éphraïm, II Reg., xiii, 23, pour le nom de la tribu. Quelques critiques, parmi lesquels Gesenius, Thésaurus lingum hebrseæ, p. 141, l’ont suivi dans ce sentiment. La forme du nom, écrit en ce passage avec’(n) et non avec’(y), comme il l’est partout ailleurs dans le texte hébreu, est le fondement de cette opinion. D’après le plus grand nombre des commentateurs, ce nom, en cet endroit, et les diverses autres formes, sont des variantes d’un même nom, désignant une seule localité. L’auteur de Il Reg., xiii, 23, n’a pu indiquer Baalhasor près [de la limite de la tribu] d’Éphraïm, nnaM oy, puisque cette

localité était alors en plein territoire de cette tribu, et il n’a pu désigner que la ville d’Éphraïm, qui était, en effet, voisine de Baalhasor. Voir Baalhasor, t. i, col. 1338. Le changement de la radicale initiale’(y) en’(n) peut être une négligence de copiste ou une erreur fondée sur la même opinion ; les finales des noms se sont souvent modifiées dans la suite des temps, et la disposition de la ville, agrandie peut-être et composée de deux parties distinctes, a pu faire prendre à la forme primitive du nom, ’Ofrâh ou’Éfràh, la forme duelle’Efràïm, « les deux’Efràh. » L’identité de la localité apparaît de l’ensemble des indications bibliques et extrabibliques, qui déterminent toutes une même région, presque un même point, pour le site d’Éphraïm. Nommée, Jos., xviii, 23-24, avec’Ofni = probablement Gofna ou Djifnéh, ’Ofrâh paraît s’être trouvée dans la partie extréme-nord, assignée dans le principe à la tribu de Benjamin ; elle était au nord de Machmas, d’après I Reg., xiii, 16-18 ; voisine de Baalhasor, selon Il Reg., xiii, 23 ; elle apparaît clairement située au nord de Béthel, II Par., xiii, 19 ; elle devait être non loin de la limite septentrionale de la province de Judée, d’après I Mach. (grec), XI, 34, puisque pour lui être annexée elle fut détachée du territoire de la Samarie. L’Évangile de saint Jean, xi, 54, la place sur les confins du désert, c’est-à-dire de la région inhabitée qui s’étend, sur une largeur de quinze à vingt kilomètres, à l’ouest de Jéricho. Eusèbe la nomme indifféremment Éphraïm et Éphron. Au mot’Eçpai|i, il reproduit l’indication de l’Évangile, et au mot’Ë ? p<iv il ajoute : « de la tribu de

Juda ; il existe maintenant un grand bourg (xtifir, ) du nom d’Éphraïm dans la région d’Élia, à peu près au vingtième mille. » Onomasticon, édit. Larsow et Parthey, in-16, Berlin, 1862, p. 196. Saint Jérôme, De situ et nominibus locorum hebraicorum, t. xxiii, col. 894, rend le nom Épbraïm d’Eusèbe par Ephrsea, et traduit les paroles srcpl toi ôpia A’illa. ; , « dans la région d’Élia, y> par contra septentrionem, « du côté du nord ; s le saint docteur parait avoir lu dans son exemplaire de V Onomasticon : irepi rà p<$ptia. Robinson, se fondant sur les données générales des Saints Livres et surtout sur la direction et la distance fixées par saint Jérôme, a cru reconnaître Éphraïm dans le village actuel de Thayebéh, situé, en effet, à peu de distance de l’ancienne limite de la Judée et de la Samarie, là où commence l’ancien désert de Juda, à deux kilomètres seulement au sud de Tell-’Asur, très probablement le Ba’al-ffâsôr du livre des Rois, à huit ou neuf kilomètres au nordrest de Beitin ou Béthel, et à vingt-huit kilomètres ou dix-neuf milles romains au nordnord-est de Jérusalem. E. Robinson, Biblical Besearches in Palestine, in-8°, Boston, 1841, t. ii, p. 124-125. Cette identification a été adoptée généralement par les palestinologues modernes. Cf. V. Guérin, Judée, t. iii, p. 45-51 ; F. de Saulcy, Dictionnaire topographique abrégé de la Terre Sainte, in-8°, Paris, 1877, p. 137 ; Gratz, Schauplatz der heiligen Schrift, nouv. édit., in-8°, Ratisbonne (sans date), p. 325 ; C. R. Conder, Tentwork in Palestine, in-8°, Londres, 1879, t. ii, p. 339 ; G. Armstrong, Name and Places in the Old Testament and apocrypha, in-8°, Londres, 1887, p. 136 ; Id., Names and Places in the New Testament, in-8°, Londres, 1888, p. 11.

Cependant M. Joh. Fahrngruber, ancien recteur de l’hospice autrichien, à Jérusalem, tout en adoptant l’identification d’Éphraïm ou Ofrâh de l’Ancien Testament avec Thayebéh, pense qu’Éphrem dont parle saint Jean pourrait être différent et propose une autre identification, Nach Jérusalem, in-18, Augsbourg, [1881], p. 381-382. Le texte de VOnomasticon d’Eusèbe, publié par J. Bonfrère, édition Jean Clerc, in-f », Amsterdam, 1707, p. 70, indique Éphron à environ huit milles, <i ; àitô o-yinetaiv’r. Celte leçon s’accorde mieux avec les deux autres indications d’Eusèbe, d’après lesquelles Ephraïm est dans la tribu de Juda et dans les confins de Jérusalem, et elle pourrait èlre la leçon authentique. À douze kilomètres ou huit milles au nord-est de Jérusalem se trouve une ruine appelée Tell-Fdrah et Khirbet - Fârah ; elle domine la vallée du même nom. C’est l’antique Aphara de Josué, xviii, 23, appelée du IVe siècle au vne Pharon (<ï>apa>v) et Pharan (ifcapàv), et célèbre par sa laure, située à deux stades à l’ouest de la ruine, et elle-même à dix milles vers l’est de Jérusalem. Cf. Cyrillus Scythopolit., Vita S. Euthymii magni, ch. il et xxvii, dans Acta sanct. Bolland., t. ii, janv., édit. Palmé, p. 668 et 691. La ressemblance des noms Fârah et Pharon avec Éphraïm, surtout avec ses variantes’Açpi, ’Eçpciv, ’Açaipefia, est évidente ; Fârah est sur la limite extrême de l’ancien désert de Juda ; par sa situation isolée et presque inabordable au milieu de vallées abruptes, nul lieu n’était plus convenable au dessein du Seigneur, qui voulait se retirer de la foule et échapper aux regards des scribes et des pharisiens, ainsi que l’insinue l’évangéliste. Joa., xi, 54.

— La probabilité que, pour ces diverses raisons, semblait avoir cette opinion, a été sérieusement infirmée par le témoignage de la carte de Mâdaba, découverte en décembre 1896. « Éphron ou Éphrata, où vint le Christ, » est placé au nord et à peu de distance de Rimmon : c’est la position de Thayebéh par rapport à Bammûn, dont l’identité avec la Rimmon biblique est hors de contestation. Cette indication constate l’existence d’une tradition locale chrétienne sur le lieu où se rendit le Sauveur après la résurrection de Lazare ; elle montre Éphrem du Nouveau Testament identique à Éphraïm ou’Ofrâh de l’Ancien ; elle justifie l’exactitude de la traduction de saint

Jérôme, et elle montre la leçon adoptée par Bonfrère comme une erreur de quelque copiste ayant pris’x pour’ti, « vingt » pour « huit ». La collation des divers manuscrits et éditions de V Onomaslicon avait déjà amené Larsow et Parthey à tirer cette conclusion critique et à adopter la leçon appuyée par saint Jérôme. L’indication de la tribu de Juda au lieu de la tribu de Benjamin est une de ces inexactitudes fréquentes, mais sans importance, de V Onomasticon.

II. Description. — Thayebéh (fig. 595) est située sur un des sommets les plus élevés des montagnes de la Judée. Sa hauteur au-dessus du niveau de la Méditerranée est, d’après la grande carte du Palestine Exploration Fund,

village couvre les pentes de la montagne. Presque toutes les maisons sont intérieurement voûtées ; quelques-unes paraissent très anciennes. On rencontre en beaucoup d’endroits des citernes et des silos creusés dans le roc vif, qui datent très certainement de l’antiquité, et prou vent, avec les débris de la citadelle, l’importance primitive de cette localité… L’église grecque a été construite en partie, principalement dans ses assises inférieures, avec des matériaux antiques, parmi lesquels se trouvent plusieurs fragments de colonnes encastrés dans la bâtisse. Elle n’offre du reste rien qui mérite d’être signalé. — La montagne de Thayebéh domine au loin tous les environs. De son sommet on jouit d’un coup d’oeil très vaste et singu 595. — Thayebéh. D’après une photographie de M. L. Heldet

de 2850 pieds ou 823 mètres. « Sur le ppint culminant de la montagne, dit Victor Guérin, qui donne, loc. cit., une description très exacte de la localité, on observe les restes d’une belle forteresse, construite en magnifiques blocs, la plupart taillés en bossage. Ce qui en subsiste encore est actuellement divisé en plusieurs habitations particulières. Au centre s’élève une petite tour, qui semble accuser un travail musulman, mais qui a été bâtie avec des matériaux antiques. Cette forteresse était elle-même environnée d’une enceinte beaucoup plus étendue, dont une partie est encore debout. Du côté du nord et du côté de l’ouest, celle-ci est presque intacte sur une longueur d’une soixantaine de pas. Très épaisse, et construite en talus incliné et non point par ressauts successifs en retraite les uns sur les autres, elle est moins bien bâtie que la forteresse antique, à laquelle elle semble avoir été ajoutée à une époque postérieure. L’appareil des blocs qui la composent est assez considérable, mais peu régulier : les angles seuls offrent des pierres bien équarries ou relevées en bossage. Au-dessous de la forteresse, le

lièrement imposant. Le regard plonge, à l’est, dans la profonde vallée du Jourdain, et au delà de ce fleuve il découvre les chaînes de l’antique pays de Gile’ad et d’Ammon. Il embrasse aussi une partie du bassin septentrional de la mer Morte et des montagnes de Moab. A l’ouest, au nord et au sud, l’horizon, quoique moins grandiose, est encore très remarquable. » — À six cents mètres environ vers le sud-est du village, s’élèvent, sur une colline, les restes d’une église chrétienne ; elle est appelée El-Khader, et quelquefois Mâr Giriés, « Saint-Georges. » Elle n’avait qu’une nef et une abside ; mais elle semble avoir remplacé une église plus grande et mieux bâtie, dont les vestiges et les débris apparaissent çà et là dans les ruines et aux alentours. On remarque ^plusieurs fûts de colonnes, quelques chapiteaux et un baptistère. Un grand escalier de quinze à vingt degrés, s’étendant sur toute la largeur du monument, amenait à l’atrium qui précédait l’église. Un mur d’enceinte construit avec des pierres de grand appareil, peut-être celles de l’église primitive, a entouré le sommet du monticule. Des citernes Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/984 Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/985 Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/986 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/987 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/988 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/989 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/990 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/991 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/992 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/993 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/994 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/995 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/996 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/997 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/998 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/999 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/1000 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/1001 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/1002 MediaWiki:Proofreadpage pagenum templatePage:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/1003