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LES EXCENTRICITÉS


naire. D’ailleurs l’histoire n’est-elle pas là pour nous empêcher de condamner à la légère des mots sans crédit aujourd’hui, mais que leur fortune peut relever demain ? Ne nous montre-t-elle point Caillière, l’auteur des Mots à la mode, signalant comme des intrus les adjectifs haineux, respectable, désœuvré ; le substantif impolitesse !… Ceci se passait dès 1693. En 1726, l’abbé Desfontaine, dans son Dictionnaire néologique, condamnait à son tour l’usage de détresse, scélératesse, naguères, encourageant, érudit, inattaquable, entente, improbable, etc., etc.

Ne nous pressons donc point de proscrire, et considérons les Excentricités du langage comme une réserve d’enfants perdus où notre armée régulière peut recruter quelques auxiliaires utiles.

L’argot d’ailleurs est un langage essentiellement français. Il emprunte fort peu à l’étranger, quoi qu’on en ait dit. Comme beaucoup de patois provinciaux, il a conservé les traces de notre vieille langue. Quant au reste, il ne l’a pas précisément inventé, il se l’est plutôt approprié en modifiant selon ses besoins le parler usuel.

À l’appui de notre dire, voici des exemples purs ou peu altérés de mots anciens :

Abadis, abéquer, agoniser, ambier, arche, arpion, arsouille, auber, bagou, baudru, bécher, biture, blaiche, blavin, carle, copain, coyon, douille, cadenne, esbrouffe, escarpe, esclot, estrangouiller, flouer, fouillouse, frime, gambiller, lichard, ligote, mion, morfiller, abouler, baladeur, balochard, calège,