Grammaire de l’hébreu biblique/Syntaxe/Pronom/Paragraphe 147

Paul Joüon
Institut biblique pontifical (p. 454-455).
§ 147. Suppléances pronominales.

a Pour la suppléance du pronom personnel réfléchi cf. § 146 k.

On emploie עֶ֫צֶם os, membre, corps au sens du pronom français même mis après le nom pour marquer plus expressément la chose dont on parle[1]. Tous les exemples sont avec des noms de choses : Ex 24, 10 כְּעֶ֫צֶם הַשָּׁמַ֫יִם comme le ciel même ; Job 21, 23 בְּעֶ֫צֶם תֻּמּוֹ dans sa prospérité (?) même ; surtout avec יוֹם (§ 143 k) : Gn 7, 13 בְּעֶ֫צֶם הַיּוֹם הַזֶּה en ce jour-là même.

Le simple pronom personnel employé emphatiquement peut équivaloir à même : Ex 5, 7 הֵם יֵֽלְכוּ ils iront eux-mêmes (§ 146 a 1) ; Is 7, 14 אֲדֹנָי הוּא le Seigneur lui-même (ou ici : de lui-même § 146 c 1). Le même (adj. d’identité) s’exprime ordinairement par הַהוּא (§ 143 j). אֶחָד un aboutit assez souvent au sens de même : Lév 22, 28 בְּיוֹם אֶחָד dans un (même) jour, le même jour ; Gn 41, 11 בְּלַ֫יְלָה אֶחָד dans une (même) nuit, la même nuit ; 11, 1 שָׂפָה אֶחָ֑ת וּדְבָרִים אֲחָדִים la même langue (lèvre) et les mêmes mots ; 2 S 12, 1 בְּעִיר אֶחָ֔ת dans la même ville ; 1 R 3, 17 בְּבַ֫יִת אֶחָד dans une même maison ; Mal 2, 10 אָב אֶחָד לְכֻלָּ֫נוּ nous avons tous le même père.

b אִישׁ homme, un homme s’emploie au sens affaibli de quelqu’un[2] Ct 8, 7 ; on (cf. § 155 g) ; avec négation, le sens devient personne Ex 34, 3. De même דָּבָר une chose s’emploie au sens affaibli de quelque chose Gn 18, 14 ; avec négation, le sens devient rien 19, 8. Au pluriel on a אֲנָשִׁים quelques-uns[3] Jér 26, 17.

c En corrélation on a אִישׁ avec אָח frère, רֵעַ compagnon : Gn 13, 11 וַיִּפָּֽרְדוּ אִישׁ מֵעַל אָחִיו ils se séparèrent l’un de l’autre ; Jug 6, 29 וַיֹּֽאמְרוּ אִישׁ אֶל־רֵעֵ֫הוּ. Symétriquement, au féminin, on a אִשָּׁה femme avec אָחוֹת sœur, *רְעוּת compagne : Ex 26, 3 (en parlant de tapis יְרִיעוֹת fém.) ; Is 34, 15 (vautours דַּיּוֹת fém.).

d Par contre אִישׁ s’emploie aussi au sens fort de chacun : Gn 47, 20 מָֽכְרוּ אִישׁ שָׂדֵ֫הוּ ils vendirent chacun son champ ; de même אישׁ אישׁ (§ 135 d) Ex 36, 4. Avec l’article (p.-ê. dû aux Naqdanim, § 137 f) du ל (לָאִישׁ) 1 R 8, 39 (= 2 Ch 6, 30) (opp. Jér 17, 10 לְאִישׁ en même contexte !) ; 1 S 26, 23 ; Pr 24, 29 ; mais לְאִישׁ 2 S 6, 19 ; Zach 10, 1 ; 1 Ch 16, 3.

Remarques. 1) On remarquera que le suffixe du nom est à la 3e p. : 1 S 25, 13 חִגְרוּ אִישׁ אֶת־חַרְבּוֹ ceignez chacun votre (son) épée (§ 151 d).

2) Quand אישׁ devrait être logiquement au génitif, on le met en casus pendens (§ 156), et l’on donne un suffixe au nom[4] : Gn 42, 35 הִנֵּה אִישׁ צְרֽוֹר־כַּסְפּוֹ בְּשַׂקּוֹ voici que la bourse d’argent de chacun était dans son sac ; 41, 12 ; 42, 35 ; Ex 12, 4 ; 28, 21 ; Nb 5, 10 ; 26, 54 ; 2 R 23, 35. De même dans Zach 7, 10 רָעַת אִישׁ אָחִיו אַל־תַּחְשְׁבוּ ne méditez pas le mal l’un de l’autre, אישׁ est logiquement casus pendens[5] ; Gn 9, 5 (⸮).

e Pour chaque on emploie כֹּל suivi du nom sans l’article (§ 139 h) ; cf. כֻּלֹּה au sens de chacun § 146 j.

g Tel se rend surtout par כְּ comme avec זֶה : Gn 44, 7 b עֲשׂוֹת כַּדָּבָר הַזֶּה faire une telle chose ; 7 a כַּדְּבָרִים הָאֵ֫לֶּה de telles paroles ou de telles choses ; Jér 5, 9 גוֹי אֲשֶׁר כָּזֶה un tel peuple ; 2 S 17, 15 כָּזֹאת וְכָזֹאת telle et telle chose. Parfois l’idée de tel n’est que virtuelle (par omission de כּ) : Is 7, 17 יָמִים אֲשֶׁר לֹא־בָ֫אוּ des jours (tels) qu’il n’en est pas arrivé (omission du rétrospectif כָּהֵם) ; Ex 10, 6 ; 34, 10 (cf. § 174 f). Voir aussi § 158 f : « un homme tel que moi ».

Tel, au lieu d’un nom qui n’est pas exprimé, se rend par פְּלֹנִי אַלְמֹנִי Ruth 4, 1 ; 1 S 21, 3 מְקוֹם פּ׳ א׳ tel lieu (remarquer l’état cst. § 129 f).

Pour tel corrélatif on a p. ex. Lév 7, 7 כַּֽחַטָּאת כָּֽאָשָׁם tel le sacrifice expiatoire, tel le délictif.

g Pour les équivalents du pronom français on cf. § 155 b.

  1. עצם est usuel en néo-hébreu pour exprimer le pronom réfléchi.
  2. Pour quelqu’un on a parfois aussi אָדָם homme Lév 1, 2 ; נֶ֫פֶשׁ âme, personne Lév 4, 2. — Autres manières d’exprimer quelqu’un, § 155 d-f.
  3. Le pluriel du nom, sans plus, peut avoir la nuance quelques : Gn 24, 55 יָמִים quelques jours.
  4. La place donnée ainsi à אישׁ est p.-ê. à l’analogie de la construction avec אִישׁ sujet : Gn 47, 20 (supra).
  5. רעת serait donc séparé de son génitif logique ; voir des cas analogues § 129 r. Peut-être cependant רעת est-il construit sur l’expression entière considérée comme un bloc.