Grammaire de l’hébreu biblique/Syntaxe/Proposition/Paragraphe 156

Paul Joüon
Institut biblique pontifical (p. 477-478).
§ 156. Appendice : Casus pendens devant proposition nominale ou verbale.

a Souvent un nom (ou un pronom) est placé en tête de la phrase d’une façon indépendante de la proposition qui suit, dans laquelle il est repris à l’aide d’un pronom rétrospectif. Le nom est ainsi comme suspendu, d’où l’appellation de casus pendens. Cette construction est motivée tantôt par l’importance du nom, qui s’impose d’abord à l’esprit, tantôt par un désir de clarté ou de légèreté[1].

Le nom en casus pendens peut être un génitif (logique), un objet (accusatif), le complément d’une préposition, un sujet.

b Génitif : Nah 1, 3 יְהֹוָה בְּסוּפָה וּבִשְׂעָרָה דַּרְכּוֹ Jéhovah, dans l’ouragan et la tempête est sa voie ; Gn 34, 8 שְׁכֶם בְּנִי חָֽשְׁקָה נַפְשׁוֹ בְּבִתְּכֶם l’âme de mon fils S. est attachée à votre fille. De même avec un pronom Is 59, 21 וַֽאֲנִי זֹאת בְּרִיתִי אוֹתָם et moi, voici mon alliance avec eux (אוֹתָם = אִתָּם § 103 j) ; Gn 40, 16 ; Jos 23, 9 ; Is 45, 12 ; Jér 30, 6 ; Éz 33, 17 ; Job 21, 4 ; 1 Ch 28, 2.

c Objet : Généralement sans אֵת : Gn 28, 13 הָאָ֫רֶץ אֲשֶׁר אַתָּה שֹׁכֵב עָלֶ֫יהָ לְךָ אֶתְּנֶ֫נָּה וּלְזַרְעֶ֑ךָ la terre sur laquelle tu dors, je la donnerai à toi et à ta race. Parfois avec אֵת : Gn 13, 15 אֶת־כָּל־הָאָ֫רֶץ אֲשֶׁר־אַתָּה רֹאֶה לְךָ אֶתְּנֶ֑נָּה toute la terre que tu vois, je te la donnerai ; 21, 13 ; 35, 12 ; 47, 21 ; 1 S 25, 29 ; 1 R 15, 13 (cf. § 125 j 4).

d Complément d’une préposition : 1 S 9, 20 וְלָֽאֲתֹנוֹת הָאֹֽבְדוֹת לְךָ … אַל־תָּ֫שֶׂם אֶת־לִבְּךָ לָהֶם ne te mets point en peine des ânesses que tu as perdues ; 2 S 6, 23. La préposition peut être omise devant le nom en casus pendens. — Avec pronom : 1 S 12, 23 גַּם אָֽנֹכִי חָלִ֫ילָה לִּי quant à moi, loin de moi… ! ; 2 Ch 28, 10.

e Sujet : Pour les propositions nominales du type de Gn 34, 21 cf. § 154 i 1. En prop. verbale : Gn 3, 12 הָֽאִשָּׁה אֲשֶׁר נָתַ֫תָּה עִמָּדִי הִיא נָֽתְנָה־לִּי מִן־הָעֵץ la femme que tu as mise près de moi (elle) m’a donné ; 24, 7. De même כֹּל avec participe est en casus pendens (suivi du waw d’apodose) dans Jug 19, 30 ; 2 S 2, 23.

f Remarques. 1) Au lieu du pronom de reprise on peut avoir un nom nouveau : Ex 12, 15 כָּל־אֹכֵל חָמֵץ וְנִכְרְתָה הַנֶּ֫פֶשׁ הַהִיא מִיִּשְׂרָאֵל quiconque mangera du (pain) fermenté, cette personne sera retranchée d’Israël ; Nb 35, 30.

g 2) Le participe est employé fréquemment en casus pendens :

Génitif : Gn 9, 6 שֹׁפֵךְ דַּם הָֽאָדָם בָּֽאָדָם דָּמוֹ יִשָּׁפֵךְ qui verse le sang d’un homme, par (le moyen d’)un homme son sang sera versé. (Ici et dans tous les cas semblables le participe est construit sur le pronom, comme il apparaît p. ex. Ex 21, 12 מַכֵּה § 121 m) ; Pr 17, 13.

h Objet : Nb 35, 30 כָּל־מַכֵּה־נֶ֫פֶשׁ … יִרְצַח אֶת־הָֽרֹצֵחַ quiconque frappe quelqu’un… on tuera le meurtrier (cf. § f) ; 2 S 14, 10.

i Complément d’une préposition : 2 S 4, 10.

j Sujet : Ex 12, 15 (§ f). Dans Ex 21, 12 le casus pendens n’est que virtuel ; au lieu d’un pronom séparé de reprise ou d’un nom nouveau comme dans Nb 35, 30, il n’y a que le pronom contenu dans la forme verbale : מַכֵּה אִישׁ וָמֵת מוֹת יוּמָ֑ת qui frappe un homme et que (celui-ci) meure, il sera mis à mort.

k 3) Au lieu du participe on a parfois une proposition relative : Jos 15, 16 אֲשֶׁר־יַכֶּה אֶת־קִרְיַת־סֵ֫פֶר וּלְכָדָהּ וְנָתַ֫תִּי לוֹ אֶת־עַכְסָה בִתִּי לְאִשָּׁה celui qui battra Qiryat-Séfèr et la prendra, je lui donnerai ma fille ʿAksa pour femme ; Gn 15, 4.

l 4) Un nom (ou équivalent d’un nom) en casus pendens forme comme un membre séparé. Afin de le relier à la proposition qui suit on ajoute souvent un waw, analogue au waw d’apodose, et qu’on peut appeler, par extension, waw d’apodose (cf. § 176 a) : 1 R 15, 13 וְגַם אֶת־מַֽעֲכָה אִמּוֹ וַיְסִרֶ֫הָ מִגְּבִירָה et même, sa mère Maʿka, il lui enleva la dignité de reine-mère ; Ex 12, 15 (§ f) ; Jos 15, 16 (§ k).


  1. Comparer l’anticipation du sujet dans une proposition-objet (§ 157 d).