CHAPITRE XXVII.
THÉORIE DES CONSÉQUENTS.
305.Nous pouvons encore tirer de la théorie des invariants
intégraux d’autres conclusions qui nous seront utiles dans la suite,
en la présentant sous une forme un peu différente.
Commençons par examiner un exemple simple. Soit un point
dont les coordonnées dans l’espace soient et et dont le
mouvement soit défini par les équations
(1)
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et sont des fonctions données et uniformes de
supposons d’abord que et s’annulent tout le long de l’axe
des de telle façon que
soit une solution des équations (1).
Posons ensuite
les équations (1) deviendront
(2)
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où et sont des fonctions de et périodiques de
période par rapport à
Nous conviendrons de ne donner à que des valeurs positives,
et nous pourrons le faire sans difficulté puisque est
une solution.
Je suppose maintenant de plus que ne puisse jamais s’annuler
et, par exemple, reste toujours positif ; alors sera toujours
croissant avec
Imaginons qu’on ait intégré les équations (2) et qu’on en présente
la solution sous la forme suivante
Les lettres et représentent des constantes d’intégration.
Soit
Soient le point dont les coordonnées sont
et celui dont les coordonnées sont
Ces deux points appartiennent tous deux au demi-plan des
situé du côté des positifs.
Le point sera dit le conséquent de
Ce qui justifie cette dénomination, c’est que, si l’on considère
le faisceau des courbes qui satisfont aux équations différentielles (1) ;
si, par le point on fait passer une courbe et qu’on
la prolonge jusqu’à ce qu’elle rencontre de nouveau le demi-plan
cette nouvelle rencontre aura lieu en
Si l’on trace dans ce demi-plan une figure quelconque les
conséquents des différents points de formeront une figure
que l’on appellera la conséquente de
Il est clair que et sont des fonctions continues de et
de
Donc, la conséquente d’une courbe continue sera une courbe
continue, celle d’une courbe fermée sera une courbe fermée, celle
d’une aire fois connexe sera une aire fois connexe.
Supposons maintenant que les trois fonctions et soient
liées par la relation
où est une fonction positive et uniforme de
Les équations (1) admettront alors l’invariant intégral
et les équations (2) admettront
Considérons maintenant les équations
(3)
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où est regardé comme la variable indépendante.
Elles admettront évidemment l’invariant intégral
(4)
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(Cf. no 253).
Comme et ont été supposés plus haut essentiellement
positifs, c’est un invariant intégral positif.
Soient une aire quelconque située dans le demi-plan
et sa conséquente.
Soient l’intégrale
(5)
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étendue à l’aire plane et la même intégrale étendue à l’aire
plane
Soit alors le volume engendré par l’aire quand on la fait
tourner autour de l’axe des d’un angle infiniment petit
l’intégrale (4) étendue à sera évidemment
Soit de même le volume engendré par l’aire quand on la
fait tourner autour de l’axe des d’un angle l’intégrale (4)
étendue à sera
L’invariant intégral (4) devant avoir même valeur pour et
pour on doit avoir
Ainsi, l’intégrale (5) a même valeur pour une aire quelconque et sa conséquente.
C’est une nouvelle forme de la propriété fondamentale des invariants
intégraux.
306.Soit alors une courbe fermée située dans le demi-plan
et enveloppant une aire Soit la conséquente
de ce sera aussi une courbe fermée qui enveloppera
une aire et cette aire sera la conséquente de
Si l’intégrale (5), étendue à et à a pour valeur et
on aura
et il suit de là que ne pourra être une partie de et une
partie de
Quatre hypothèses peuvent être faites sur la position relative
des deux courbes fermées et
1o est intérieur à
2o est intérieur à
3o Les deux courbes sont extérieures l’une à l’autre ;
4o Les deux courbes se coupent.
L’équation exclut les deux premières de ces hypothèses.
Si, pour une raison quelconque, la troisième se trouve également
exclue, on sera certain que les deux courbes se coupent.
Supposons, par exemple, que dépendent d’un paramètre
arbitraire et que, pour soit sa propre conséquente ;
alors, pour les valeurs très petites de différera très
peu de il ne pourra donc pas arriver que les deux courbes
et soient extérieures l’une à l’autre, et il faudra qu’elles se coupent.
Courbes invariantes.
307.J’appellerai courbe invariante toute courbe qui sera sa
propre conséquente.
Il est aisé de former des courbes invariantes ; soient, en effet,
un point quelconque du demi-plan, son conséquent ; joignons
à par un arc de courbe quelconque soit le conséquent
de celui de et ainsi de suite. L’ensemble des
arcs de courbe constituera évidemment une
courbe invariante.
Mais nous serons amenés aussi à envisager des courbes invariantes
dont la génération sera plus naturelle.
Supposons que les équations (1) admettent une solution périodique. Soient
(6)
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les équations de cette solution périodique, de telle façon que les
fonctions soient périodiques en de période
Je suppose que, quand augmente de augmente de
Les équations (6) représentent une courbe ; soit le point où
cette courbe coupe le demi-plan ; ce point sera évidemment
son propre conséquent.
Supposons maintenant qu’il existe des solutions asymptotiques
très voisines de la solution périodique (6). Soient
(7)
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les équations de ces solutions.
Les fonctions seront développables suivant les puissances
de les coefficients étant eux-mêmes des fonctions périodiques
de Dans cette expression, est un exposant caractéristique,
est une constante d’intégration.
Dans les équations (7), les trois coordonnées se trouvent
donc exprimées en fonction de deux paramètres, et ces équations
représentent donc une surface que l’on peut appeler la
surface asymptotique. Cette surface asymptotique va passer par
la courbe (6) ; puisque les équations (7) se réduisent aux équations (6),
quand on y fait
La surface asymptotique va couper le demi-plan suivant une
certaine courbe qui passe par le point et qui est manifestement
une courbe invariante.
308.Considérons une courbe invariante Je suppose que
dépendent du paramètre ainsi d’ailleurs que la courbe
Je suppose que pour la courbe soit fermée, mais
qu’elle cesse de l’être pour les petites valeurs de
Soit un point de La position de ce point dépendra de
pour la courbe est fermée, de sorte que, après avoir parcouru
cette courbe à partir de on revient au point ; si
est très petit, il n’en sera plus de même, mais on reviendra passer
très près de il y aura donc sur la courbe un arc de courbe
différent de celui où se trouve mais qui viendra passer très près de Soit le point de cet arc de courbe qui est le plus
voisin de
Je joins
Soient et les conséquents de et ces deux points
se trouveront sur soit la courbe conséquente de la petite
droite
Nous aurons à envisager la courbe fermée qui se compose de
l’arc de la courbe compris entre et et de la petite
droite Quelle sera sa conséquente ?
Supposons, pour fixer les idées, que les quatre points
se succèdent sur dans l’ordre
La conséquente de se composera de l’arc de la
courbe et du petit arc conséquent de la petite droite
On peut faire plusieurs hypothèses :
1o Le petit quadrilatère curviligne est convexe,
je veux dire qu’aucun de ses côtés curvilignes ne présente de
point double et que les seuls points communs à deux côtés sont
les sommets. Dans cette hypothèse, la courbe se présenterait
comme l’indique l’une des deux figures suivantes
Fig. 1. |
Fig.2
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Cette hypothèse doit être rejetée, car il est manifeste que l’intégrale
est plus grande dans le cas de la fig. 1 pour que
pour et plus petite dans le cas de la fig. 2.
2o L’arc ou a un point double. — S’il en était ainsi l’arc qui joint un point quelconque de la courbe à son premier conséquent ;
nous supposerons qu’il n’en est pas ainsi ; et, en effet,
cette circonstance ne se présentera dans aucune des applications
que j’ai en vue ; elle ne s’appliquera pas, en particulier, dans le cas
de la courbe invariante engendrée par une surface asymptotique
ainsi que je l’ai expliqué à la fin du numéro précédent. Il est aisé
de constater, en effet, que la surface asymptotique ne présente pas
de ligne double si l’on se borne à la portion de cette surface qui
correspond aux petites valeurs des quantités que j’ai appelées
plus haut
D’autre part, la droite n’a pas de point double, et il doit
en être de même de sa conséquente En résumé, nous supposerons
que les quatre côtés de notre quadrilatère n’ont pas de
point double.
3o L’arc coupe l’arc — (Ce cas contient comme
cas particulier celui où la courbe K serait fermée.) Nos courbes
présentent alors l’aspect de la fig. 3.
Fig. 3.
4o L’arc coupe son conséquent — Nos courbes
présenteraient alors l’aspect de la fig. 4.
Il y a des cas où l’hypothèse doit être rejetée. Supposons, par
exemple, que dépendent d’un paramètre que pour
la courbe soit fermée et que chacun de ses points soit son propre
conséquent, de telle façon que pour les quatre sommets du
quadrilatère se confondent.
Alors les quatre distances seront des
infiniment petits si est l’infiniment petit principal. Supposons que soit un infiniment petit d’ordre un infiniment
petit d’ordre et que soit plus grand que
Fig. 4.
Comme est le conséquent de la longueur de l’arc
devra être d’ordre Soit alors l’un des points d’intersection
de Dans le triangle mixtiligne dont deux côtés sont
les droites et et le troisième côté l’arc de courbe
faisant partie de le côté est plus grand que la différence
des deux autres ; il devrait donc être d’ordre et nous
avons vu qu’il doit être d’ordre
L’hypothèse doit donc être rejetée.
5o Deux côtés adjacents du quadrilatère se coupent, par
exemple et — Il faut alors que qui est l’antécédent
de coupe lui-même si est l’intersection de
avec et celle de avec l’arc sera le conséquent
de et nous tomberons sur la figure suivante
Fig. 5.
Il est manifeste que et peuvent jouer le même rôle que
et et que l’on retombe sur le premier cas.
Cette nouvelle hypothèse doit donc être rejetée.
En résumé les deux arcs et se couperont toutes les
fois que pour une raison ou pour une autre les hypothèses 2o et 4o
devront être rejetées.
Il resterait à examiner le cas où les points se suivraient
sur dans un ordre différent. Les ordres
ne diffèrent pas essentiellement de celui
que nous venons d’étudier.
Les ordres tels que ne
se présenteront pas dans les applications qui vont suivre ; nous
supposerons toujours en effet que, si est très petit, les distances
et sont très petites par rapport à la longueur
des arcs ou
Il reste l’ordre ou les ordres équivalents ; nous n’en
parlerons pas non plus ; il est clair que, s’il se présente, il y aura
sur l’arc un point qui sera son propre conséquent.
309.Supposons par exemple que les équations (1) admettent
une solution périodique
(6)
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et des solutions asymptotiques
(7)
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Supposons que les équations (1) dépendent d’un paramètre
très petit et que soient développables suivant les puissances
de ce paramètre.
Supposons que, pour les solutions asymptotiques (7) se
réduisent à des solutions périodiques. Voici comment cela pourra
se faire. Nous avons dit que les sont développables suivant les
puissances de les coefficients étant eux-mêmes des fonctions
périodiques de Mais l’exposant dépend de supposons qu’il
s’annule pour alors pour les fonctions deviendront
des fonctions périodiques de et les solutions (7) se réduiront
à des solutions périodiques.
La surface asymptotique va couper le demi-plan suivant une certaine courbe qui passe par le point intersection du
demi-plan avec la courbe gauche (6).
La courbe est manifestement invariante, comme je l’ai dit
à la fin du no 307 ; pour chacun des points de est son
propre conséquent.
Je supposerai de plus que, pour la courbe est fermée.
Reportons-nous au Chapitre VII, tome I ; nous avons vu aux
nos 107 et suivants que, dans le cas de la Dynamique, les exposants
caractéristiques sont développables suivant les puissances
de et sont d’ailleurs deux à deux égaux et de signe contraire.
Nous supposerons qu’il en est ainsi.
Nous avons alors en réalité deux surfaces asymptotiques correspondant
aux deux exposants égaux et de signe contraire et
nous avons donc deux courbes qui iront se couper au point
Nous distinguerons quatre branches de courbe
aboutissant toutes quatre au point et correspondront
à l’exposant et à l’exposant
Fig. 6.
Ces diverses branches de la courbe sont représentées sur la
fig. 6. La branche est la branche la branche
est la branche la branche est la branche et
la branche est la branche
Ces quatre branches de courbe sont évidemment invariantes.
Maintenant, pour se confond avec avec et (si nous supposons que, pour la courbe que nous appellerons
alors est fermée) ces quatre branches de courbe iront
s’appliquer sur la courbe fermée
On peut déduire de là que, pour très petit, ces branches de
courbe différeront peu les unes des autres ; que s’écartera peu
de de et que suffisamment prolongé ira passer très
près de suffisamment prolongé.
J’ai marqué sur la figure divers points de ces branches de courbe
et leurs conséquents. Ainsi sont respectivement
les conséquents de
Ce que nous remarquerons d’abord, c’est que les points
se succèdent bien (comme nous l’avons supposé au début
du no 308) dans l’ordre quand on parcourt de à
la courbe invariante formée des deux branches et
Cette courbe invariante n’est pas fermée, mais elle diffère peu
de la courbe fermée
Examinons, en ce qui la concerne, les cinq hypothèses du
no 308. La première, comme nous l’avons vu, doit toujours être
rejetée. La seconde ne se présentera pas non plus.
Elle ne pourrait se présenter, en effet, que si la surface asymptotique (7)
avait une ligne double.
Nous avons dit que les sont développables suivant les puissances
de soit donc
Si notre surface avait une ligne double, cette ligne double
devrait satisfaire aux équations (1) ; en effet, la surface asymptotique
est engendrée par une infinité de lignes satisfaisant à ces
équations de telle sorte que, si deux nappes de cette surface
venaient à se couper, l’intersection ne pourrait être autre chose
qu’une de ces lignes.
Comme dépend à la fois du temps et du paramètre nous
mettrons ce fait en évidence en écrivant
S’il y avait une ligne double, nous devrions avoir les trois
identités
où et sont deux constantes et où est une fonction de ces
trois identités devraient subsister quel que soit
En différentiant, on aura
Mais, en vertu des équations (1), on aura
et de même
d’où
d’où
étant une constante.
On tirerait de là
où
L’identité devant être vraie pour d’où
il vient
d’où d’où
ou
ou, en faisant encore
Les deux valeurs et étant égales, il n’y a pas de Ligne double.
C. Q. F. D.
La troisième hypothèse est celle qu’il convient d’adopter.
Passons à la quatrième ; pour voir si elle doit être rejetée, il
faut chercher à se rendre compte de l’ordre de grandeur des distances
et c’est ce que nous ferons dans les diverses
applications qui vont suivre.
Enfin, la cinquième hypothèse se ramène toujours à la première,
comme nous l’avons vu.
Extension des résultats précédents.
310.Nous avons fait plus haut sur les équations (1) des hypothèses
très particulières ; mais toutes ne sont pas également
nécessaires.
Considérons, en effet, un domaine simplement connexe et
faisant partie du demi-plan et supposons que l’on
sache d’une manière quelconque que, si le point se
trouve à l’origine du temps en un point de ce domaine, va
en croissant constamment de 0 à quand croît de 0 à de
telle façon que la courbe satisfaisant aux équations (1) et passant
par le point en la supposant prolongée depuis ce point
jusqu’à sa nouvelle rencontre avec le demi-plan, n’est jamais
tangente à un plan passant par l’axe des
Alors on pourra définir, comme au no 305, le conséquent
du point et il est clair que tout ce qui précède sera
encore applicable aux figures qui se trouvent à l’intérieur du
domaine
Il ne sera pas nécessaire que les courbes qui satisfont aux
équations (1) et qui viennent rencontrer le demi-plan en dehors
de soient assujetties à ne jamais être tangentes à un plan
passant par l’axe des Il ne sera pas nécessaire non plus que
soit une solution des équations (1).
Alors, si est une courbe fermée intérieure à et si est sa
conséquente, les deux courbes seront extérieures l’une à l’autre
ou se couperont.
Les résultats du no 308 seront également applicables aux
courbes invariantes qui ne sortiront pas du domaine et, si
même une courbe invariante sort du domaine quand elle est suffisamment prolongée, les résultats seront encore applicables à
la portion de cette courbe qui est intérieure à ce domaine.
311.Considérons maintenant, au lieu d’un domaine plan
une aire courbe simplement connexe. Par un point de cette
aire courbe faisons passer une courbe satisfaisant aux équations (1)
et prolongeons cette courbe jusqu’à ce qu’elle rencontre
de nouveau le nouveau point d’intersection pourra encore
s’appeler le conséquent de
Si nous considérons deux points, et très voisins l’un de
l’autre, leurs conséquents seront, en général, très voisins l’un de
l’autre ; il y aurait exception si le point se trouvait sur le bord
de ou si la courbe touchait la surface au point ou au
point Sauf ces cas d’exception, les coordonnées de sont
des fonctions analytiques des coordonnées de
Pour éviter ces cas d’exception, je considérerai un domaine
faisant partie de et tel que la courbe issue d’un point
intérieur à vienne recouper en un point qui ne vienne
jamais sur le bord de tel aussi que la courbe ne touche ni
en ni en Je supposerai enfin que ce domaine est simplement
connexe.
Adoptons un système particulier de coordonnées que j’appellerai,
par exemple, et et pour lesquelles je supposerai seulement
ce qui suit :
1o Quand et seront plus petits que 1, les coordonnées
rectangulaires et seront des fonctions analytiques et
uniformes de et qui seront périodiques de période par
rapport à
2o À un point de l’espace ne pourra correspondre plus
d’un système de valeurs de tel que
(λ)
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3o Quand on fait ou et qu’on fait varier et
de à le point décrit la surface ou une portion
de cette surface comprenant le domaine
4o Des conditions (1) et (2) il résulte que le déterminant fonctionnel
de par rapport à n’est jamais infini ni nul
quand les inégalités (λ) sont remplies.
5o On peut transformer les équations (1) en les mettant sous la
forme
(1 bis)
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Je supposerai que reste positif pour
Les équations (1 bis) admettront l’invariant intégral
et les équations
(3 bis)
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admettront l’invariant intégral
Soit une figure quelconque faisant partie de et sa conséquente ;
supposons que les différents points de et de se
déplacent de telle façon que et restent constants et que
croisse de 0 à étant très petit ; la figure engendrera un
volume et la figure engendrera un volume l’intégrale
aura même valeur pour et pour donc l’intégrale double
analogue à l’intégrale (5) du no 305, aura même valeur pour
et Elle est d’ailleurs essentiellement positive.
Il résulte de là que les résultats du no 306 sont applicables aux
courbes fermées situées à l’intérieur de et que ceux du
no 308 sont applicables aux courbes invariantes ou du moins à
la portion de ces courbes qui est à l’intérieur de
Même une courbe invariante sort du domaine quand elle est
suffisamment prolongée, les résultats seront encore applicables à
la portion de cette courbe qui est intérieure à ce domaine.
Application aux équations de la Dynamique.
312.Soit une fonction des quatre variables
formons les équations canoniques
(1)
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Je supposerai, comme je le fais d’ordinaire :
1o Que est une fonction périodique de et
2o Que dépend d’un paramètre et est développable suivant
les puissances de ce paramètre sous la forme
3o Que est fonction seulement de et de
Cela posé, nous aurons l’intégrale
(2)
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étant une constante.
Cela posé, donnons à une valeur déterminée une fois pour
toutes et soit un point mobile dont les coordonnées rectangulaires
sont
La fonction est une fonction de que je me réserve de
déterminer plus complètement dans la suite.
Supposons d’abord que qui dépendra de d’une manière
quelconque, soit développable suivant les puissances croissantes
de et Il en résultera que, pour la fonction
ne dépendra plus de et, d’autre part, que la fonction
ne changera pas quand on changera en et en
Nous supposerons alors que est une fonction impaire de
qui croît de 0 à 1 and croît de 0 à on pourra prendre
par exemple
Si l’on adopte cette hypothèse, le point sera toujours à l’intérieur
d’un tore de rayon 1, tangent à l’axe des
À chaque point intérieur à ce tore, correspondront une infinité
de systèmes de valeurs de et mais ces systèmes ne
seront pas essentiellement distincts les uns des autres, puisqu’on
passe de l’un à l’autre en augmentant ou d’un multiple de
ou en changeant en et en
Si l’on se donne et s’en déduira à l’aide de
l’équation(2). Supposons que les variables et varient conformément
aux équations (1), le point correspondant décrira une certaine
courbe que j’appellerai trajectoire.
Par chaque point intérieur au tore passe une trajectoire et une
seule.
Il est aisé de voir quelle est la forme de ces trajectoires
pour
Pour les équations différentielles se réduisent à
Les sont donc des constantes, ce qui montre que nos trajectoires
sont situées sur des tores, et les sont des fonctions
linéaires du temps ; car
ne dépendant que des est une constante.
Si le rapport est commensurable, les trajectoires sont
des courbes fermées ; elles ne sont pas fermées, au contraire, si
ce rapport est incommensurable.
Soient quatre entiers tels que
posons
L’identité
montre qu’en passant des variables aux variables on
n’altère pas la forme canonique des équations.
Nous supposerons que ne s’annule pas quand reste inférieur
à une certaine limite Alors conservera toujours le
même signe et l’on aura, par exemple,
Cette inégalité, vraie pour le sera encore pour les petites
valeurs de
Alors les relations
définiront un certain domaine plan qui aura d’ailleurs la forme
d’un cercle.
Les trajectoires issues d’un point de ce domaine ne seront alors
jamais tangentes à un plan passant par l’axe des du moins
avant d’avoir recoupé de nouveau le demi-plan Notre
domaine pourra donc jouer le rôle du domaine du no 310.
Les équations (1) admettent l’invariant intégral
d’où l’on déduit le suivant à l’aide de l’intégrale
Mais est égal à et par conséquent négatif. L’invariant
est alors un invariant positif.
Les résultats des nos 306 et 308 sont donc applicables aux
courbes tracées dans le domaine
Cela posé, soit une valeur de plus petite que et telle
que les valeurs correspondantes de et de satisfassent à la
relation
où et sont deux entiers premiers entre eux.
La courbe
qui est une circonférence, sera une courbe invariante pour
En supposant toujours les trajectoires issues des divers
points de cette circonférence auront pour équation générale
d’où
Pour avoir les conséquents successifs d’un point donné, il suffira
de faire successivement
Pour passer d’un point à son conséquent il suffit donc d’augmenter
de
d’où il suit que tous les points de la circonférence invariante
coïncideront avec leur ième conséquent.
Ce point et ses premiers conséquents sont distribués
sur cette circonférence dans un ordre circulaire qu’il est aisé de
retrouver quand on connaît les deux entiers et je l’appellerai
l’ordre
Ne supposons plus les équations (1), d’après le Chapitre III, admettront encore des solutions périodiques peu différentes
des solutions
Elles en admettront au moins deux dont l’une instable et l’autre
stable. À chacune de ces solutions périodiques correspondra une
trajectoire fermée ; je considère une de ces trajectoires que j’appelle
et qui correspondra à une solution instable, afin que par
passent deux surfaces asymptotiques.
Soit le point où cette trajectoire perce le demi-plan
ses conséquents successifs (fig. 7). Le point
coïncidera avec son ième conséquent
Je joins le point au centre de la circonférence le
rayon ainsi mené coupera la circonférence en un point très
voisin de Les divers points se succéderont sur la circonférence
dans l’ordre circulaire
J’ai fait la figure en supposant, pour fixer les idées,
La trajectoire fermée coupe le demi-plan aux cinq
points Par cette trajectoire passent deux
surfaces asymptotiques qui se coupent.
L’intersection de ces surfaces asymptotiques avec le demi-plan
se composera de diverses courbes ; nous aurons deux courbes se
coupant en deux en deux en deux en deux
en Toutes ces courbes sont représentées sur la figure.
Fig. 7.
Considérons en particulier les deux courbes qui passent en
nous distinguerons quatre branches de courbe, à savoir
les deux premières sont représentées en
trait plein, les deux dernières en trait pointillé ; la première et la
troisième, comme la deuxième et la quatrième sont dans le prolongement
l’une de l’autre.
De même à chacun des points aboutiront quatre branches
de courbe dont deux sont représentées en trait plein et deux en
trait pointillé et qui sont deux à deux dans le prolongement l’une
de l’autre.
Soit un point de la branche par menons un
rayon allant au centre de la circonférence et prolongeons
ce rayon jusqu’en à sa rencontre avec la courbe en trait plein Comme est très petit et que toutes nos courbes
diffèrent très peu de la circonférence le segment
sera très petit.
Nous voyons alors que sont
les conséquents successifs de que
sont ceux de et enfin que
sont ceux de
Les arcs ne sont plus rectilignes en
général, mais sont des arcs de courbe très petits.
La partie de la figure en trait plein reproduit alors les fig. 1
ou 2 du no 308 ; et l’ensemble de nos courbes en trait plein
représente une courbe invariante
J’ai fait la figure dans la première hypothèse qui, comme nous
l’avons vu, doit être rejetée ainsi que la cinquième ; d’après ce
que j’ai dit au no 309, il en est de même de la deuxième.
Il faut examiner la quatrième avec plus de détail. Pour cela,
cherchons l’équation de nos surfaces asymptotiques. D’après ce
que nous avons vu au no 207, cette équation peut s’obtenir de la
façon suivante :
On forme une fonction qui est développable suivant les puissances
de de telle sorte que
Quant à c’est une fonction périodique de période par
rapport à et par rapport à
Nous aurons ensuite
(4)
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L’équation (4) est l’équation de la surface asymptotique.
Si la série était convergente, la périodicité des entraînerait
cette conséquence que nos courbes devraient être fermées
et que les deux points et coïncideraient. Mais il n’en est
pas ainsi (cf. no 225, et sqq.).
Que signifie alors l’équation (4) ? Elle ne peut être vraie qu’au
point de vue formel ; c’est-à-dire que si est la somme des premiers termes de la série de telle façon que
l’équation
(4 bis)
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|
sera vraie aux quantités près de l’ordre
Mais l’équation (4 bis) représente une surface fermée et est
aussi grand que l’on veut.
Nous devons donc conclure que la distance est un infiniment
petit d’ordre infini (cf. nos 225 et suivants). D’autre part,
la distance (ou ) est de l’ordre de et est par
conséquent infiniment petit d’ordre
La distance est donc infiniment petite par rapport
à ce qui montre que la quatrième hypothèse doit être
rejetée.
La seule hypothèse possible est donc la troisième.
Donc les deux arcs et se coupent.
Application au problème restreint.
313.Je vais appliquer les principes précédents au problème
du no 9 et j’adopterai les notations de ce numéro ; nous aurons
par conséquent les équations canoniques
où l’on a posé
(5)
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|
et, d’autre part,
Posons maintenant
les équations conserveront la forme canonique et deviendront
on aura d’ailleurs
d’où
Si nous supposons l’excentricité très petite, et différeront
très peu en valeur absolue ; donc L’une des deux quantités et
est très petite.
J’observe de plus que les égalités
montrent que est toujours plus petit que en valeur absolue.
Donc et sont essentiellement positifs.
Supposons très petit, la fonction sera une fonction de
et de développable en outre suivant les puissances
de et de Ce sera donc aussi une fonction de
et de développable en outre suivant les puissances de
et
Elle sera périodique de période tant en qu’en
Si, au contraire, c’est qui est très petit, la fonction sera
une fonction de et de développable en outre suivant les
puissances de
et
Mais nous supposons nos quatre variables et liées par
l’équation des forces vives
cette équation se réduit approximativement à
Construisons la courbe en prenant et comme les
coordonnées d’un point dans un plan.
L’équation peut s’écrire
Cette courbe a deux asymptotes
et elle est symétrique par rapport à la première de ces deux
asymptotes.
Mais il importe de remarquer que la seule partie de la courbe
qui nous soit utile est celle qui est située dans le premier quadrant
Suivant les valeurs de la courbe peut présenter une des
formes représentées par les deux figures suivantes :
Fig. 8.
Les axes de coordonnées sont représentés en trait mixte, les
asymptotes et les parties utiles de la courbe en trait plein, les
parties inutiles de la courbe en trait pointillé.
Nous supposerons que l’on donne à une valeur telle que la
courbe présente la forme de la fig. 9 et qu’elle comprenne deux
arcs utiles et Nous n’envisagerons d’ailleurs que l’arc
Remarquons que quand on parcourt cet arc décroît constamment
de à zéro, croît constamment de zéro à et
croît constamment de zéro à
Si nous construisons maintenant la courbe en regardant
et comme des constantes et et comme les coordonnées d’un point dans un plan, la courbe différera peu de
et pourra encore être représentée par la fig. 9 ; elle aura un arc
utile et quand on parcourra cet arc le rapport croîtra constamment
de zéro à
Fig. 9.
On est ainsi conduit au mode de représentation géométrique
suivant : on représentera la situation du système par le point
dont les coordonnées rectangulaires sont
Ces trois fonctions sont développables suivant les puissances
de et si est très petit, et suivant celles
de et si est très petit. Elles ne dépendent
que du rapport
À chaque système de valeurs de et de et à chaque point
de l’arc utile correspond ainsi un point de l’espace et un seul.
Le déterminant fonctionnel des trois coordonnées par rapport
à et au rapport conserve toujours le même signe.
Nous pouvons donc appliquer les résultats du numéro précédent
à l’intérieur de tout domaine où ne s’annule pas.
Or s’annule pour
Mais si l’on a on aura évidemment
Or, le premier membre de cette égalité est et en construisant
la courbe nous avons supposé que nous nous trouvions
dans le cas de la fig. 9 ; or le cas de la fig. 9 suppose
Comme diffère très peu de et par conséquent de nous ne
pourrons avoir à la fois
(à moins que ne soit très voisin de sa limite , ce que nous ne
supposerons pas).
On n’aura donc pas, dans les conditions où nous nous sommes
placés,
Ainsi les résultats du numéro précédent sont applicables et si
l’on construit les surfaces asymptotiques et que l’on envisage
l’intersection de ces surfaces avec le demi-plan les deux
arcs analogues à ceux que nous avons appelés plus haut
et se couperont.
J’ajouterai encore un mot :
Les coordonnées du troisième corps par rapport au grand et
au petit axe de l’ellipse qu’il décrit sont, d’après une formule
bien connue,
On voit ainsi que, quand change de signe, la seconde de ces
coordonnées change de signe.
Il en résulte que la planète troublée circule dans le même sens
que la planète troublante si est positif et en sens contraire si
est négatif.