Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 3/181-190

Fascicules du tome 3
pages 171 à 180

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 3, pages 181 à 190

pages 191 à 200


au Palais, il y a des parens au degré, pour dire, il ne peut être jugé.

Degré, se dit des différentes espèces de parenté, ou d’affinité, & de l’éloignement qu’elles ont d’une souche commune. Il y a des degrés de consanguinité ou de parenté, & des degrés d’affinité. Les degrés d’affinité sont les mêmes que les degrés de parenté. Il y a des degrés de parenté en ligne directe, & d’autres en ligne collatérale. Il y a, en l’une & l’autre ligne, des degrés ascendans & des degrés descendans. En ligne directe, les degrés ascendans sont, le premier père & mère, le second aïeul & aïeule, le troisième bisaïeul & bisaïeule, le quatrième trisaïeul & trisaïeule. Les degrés descendans sont, le premier fils & fille, le second petit-fils & petite-fille, le troisième arrière-petit-fils & arrière-petite-fille, le quatrième fils de l’arrière-petit-fils, fille de l’arrière-petit-fils.

En ligne collatérale les degrés ascendans, 1o. père & mère ; 2o. oncle paternel & tante paternelle, oncle maternel & tante maternelle ; 3o. grand-oncle paternel, grand’tante paternelle ; grand-oncle maternel, grand’tante maternelle, 4o. pere du grand oncle ou de la grand’tante paternels ; pere du grand-oncle ou de la grand’tante maternels.

Dans la même ligne les degrés descendans sont, 1o. le frère & la sœur ; 2o. les fils ou les filles du frère & de la sœur, que nous appelons cousins germains & cousines germaines ; 3o. les cousins & cousines issus de germains, c’est-à-dire, les petits-fils ou petites-filles du frère ou de la sœur ; 4o. les fils ou filles de ceux-ci.

On dit, ils sont parens au premier degré, au second, au troisième & quatrième. Les noces étoient autrefois défendues jusqu’au septième degré, elles ne le sont plus que jusqu’au quatrième. Ces nouveaux mariés ont eu besoin de dispense, à raison de leur parenté ; mais ils n’ont pas eu de peine à l’obtenir, parce qu’ils ne sont parens qu’au quatrième degré.

Degré de Noblesse, c’est la distance qu’il y a d’une génération à l’autre, depuis le premier qui a été annobli. Celui qui est annobli fait dans sa ligne le premier degré ; les enfans font le second, les petits-enfans le troisième, &c.

Degré, en termes de Fauconnerie, se dit de l’endroit où l’oiseau durant sa montée ou élévation en l’air tourne la tête, & prend une nouvelle carrière, qu’on appelle second ou troisième degré, jusqu’à ce qu’il se perde de vue au quatrième.

Degré, signifie encore, comme nous l’avons déjà dit, une certaine extension des qualités élémentaires, ou la différence de plus & de moins que les philosophes supposent dans chacune des quatre premières qualités. Ainsi l’on dit que le feu est chaud au huitième degré ; que le poivre est chaud, qu’une plante est chaude au deuxième, au troisième degré.

En termes de physique ancienne, les mêmes qualités sont divisées en huit. Le dernier ou souverain degré d’intension s’appelle dans l’Ecole, ut octo. Le feu est chaud au huitième degré, & sec au quatrième.

En termes de Chimie, on appelle, donner le feu par degrés, lorsqu’on ouvre, ou qu’on ferme les registres, ou trous, qu’on fait exprès dans les fourneaux pour augmenter ou diminuer la violence du feu. Les Chimistes distinguent quatre degrés de feu, ou de chaleur. Le premier degré est celui que font seulement deux ou trois charbons. Le second est celui que font quatre ou cinq charbons, ou bien autant de feu qu’il en faut pour échauffer sensiblement un vase, en sorte néanmoins que l’on puisse tenir la main dessus pendant quelque-tems. Le troisième degré est lorsqu’il y a un feu capable de faire bouillir un pot plein de 5 ou 6 pintes d’eau. Le quatrième degré est quand le feu est assez grand pour faire une fournaise. Au reste tous ces degrés se varient différemment selon les différentes circonstances des opérations, la différence des fourneaux, des vaisseaux, de la matière, &c. Harris.

☞ On dit de même en physique, degrés de masses, de vîtesse, de mouvement ou de force. On entend par masse, le poids, la quantité de matière d’un corps. La vîtesse est un terme relatif à l’espace parcouru & au temps employé à le parcourir : plus l’espace parcouru par un corps est grand, & le temps qu’il a employé à le parcourir, court ; plus la vîtesse est grande. La force est le produit de la masse multipliant la vîtesse. Ainsi la force d’un corps qui a 10 de masse & 20 de vîtesse, ou 20 de masse & 10 de vîtesse, est 200, parce qu’en multipliant 10 par 20, ou 20 par 10, le produit est 200. La masse, la vîtesse, la force d’un corps sont susceptibles de plus ou de moins ; & c’est pour marquer les différens rapports de plus ou de moins des corps comparés ensemble, que les Physiciens se servent du mot degré. Ainsi l’on dit que si le corps A par exemple a 10 degrés de masse, avec 10 degrés de vîtesse, & que le corps B n’ait que 5 degrés de masse avec 5 degrés de vîtesse, le premier aura 100 degrés de force, pendant que le second n’en aura que 25. Si un cheval qui a 100 de force, tire une pierre qui en a 50, il est évident que ce cheval ne tirera pas la pierre avec 100, mais seulement avec 50 degrés de force, parce que la réaction ou la résistance étant égale ou contraire à l’action ou à la compression, les forces égales & contraires se détruisent. Ainsi les 50 de force ou de résistance qui sont dans la pierre détruisent 50 degrés de la force ou de l’action du cheval qui la tire.

Degré, se dit aussi des différentes parties dans lesquelles plusieurs instrumens de mathématique, comme l’arbalête ou bâton de Jacob sont divisés. Les divisions qui sont aux Baromètres & aux Thermomètres servent à marquer dans le premier la pesanteur actuelle de l’air, & dans le second le plus ou le moins de chaud. Le Baromètre est descendu à 27 degrés. Le Thermomètre est monté à 30 degrés. Voyez Baromètre, Thermomètre.

Degré, en termes de Géométrie & d’Astronomie, est la division qu’on fait sur les cercles pour servir de mesures. Tout cercle se divise en 360. degrés, & chaque degré en 60. parties égales, qui sont les minutes. Quand on veut déterminer la grandeur d’un angle, on compte les degrés. Par exemple, quand on dit un angle de 90. degrés, on entend un angle droit, parce qu’il comprend la quatrième partie de la circonférence d’un cercle. Cet astre est élevé de tant de degrés sur l’horison, il décline de l’Equateur de tant de degrés. Cette ville a tant de degrés de longitude & de latitude. Un signe a 30 degrés. Ptolomée a observé qu’un degré sur la terre valoit 68. milles & deux tiers : mais les Arabes n’ont trouvé que 56. milles, quand ils l’ont observé exactement dans les plaines de Seniar par l’ordre d’Almomoum. Ptolomée comptoit sur le pied de 500. stades pour un degré. Le mille Arabique étoit égal à sept stades & demi. Mais voici des observations plus modernes & plus certaines. Fernel a observé qu’un degré d’un grand cercle de la terre contenoit 68096. pas géométriques, qui valent 5646. toises quatre pieds de Paris. Snellius a observé que ce degré étoit de 28500. perches du Rhin ; qui font 55021. toises de Paris. Riccioli a fait le degré de 64363. pas de Boulogne, qui font 62900. de nos toises. Mais M. Picard, de l’Académie des Sciences, l’ayant mesuré par ordre du Roi avec toute l’exactitude possible, a trouvé qu’il étoit de 57060 toises suivant l’étalon de Paris, lesquelles étant réduites à la mesure universelle ou invariable qu’il établit sur la pendule, qui a sa proportion avec la toise de Paris, comme de 881. à 864. le degré se trouve de 55559. toises de la mesure universelle, & en multipliant 57060. toises par 360. on aura 20541600. toises pour la circonférence entière du grand cercle, c’est-à-dire, pour le tour de la terre, & par une suite nécessaire le rayon de la terre sera de 3267982. toises. Voici la réduction juste des degrés de diverses mesures.

Chaque degré du grand Cercle contient,
Toises du Châtelet de Paris, 57060
Pas de Boulogne, 58481
Verges du Rhin de douze pieds, 29556
Lieues Parisiennes de 2000. toises, 28¼
Lieues communes de France de 2200. toises. 25
Lieues de Marine de 2853. toises. 20
Milles d’Angleterre de 5000. pieds,
Milles de Florence de 3000. brasses,

Dans cette supputation on ne donne que 57060. toises à un degré. Cependant M. Cassini donne à la mesure moyenne d’un degré de la circonférence de la terre 57100. toises, & cette mesure a été établie par ses observations faites le long de la méridienne de Paris, depuis l’Observatoire de cette Capitale jusqu’à la montagne de Canigou dans les Pyrénées, comme l’a remarqué le P. Laval Jésuite, dans les Mémoires de Trévoux 1713. pag. 1465. En Hollande on ne donne que 15. lieues à chaque degré du grand cercle ; les Espagnols en donnent 17½. & les Italiens partagent un degré du grand cercle en 60 milles.

Quatre secondes d’un degré céleste rapportées sur la terre, valent plus de 66 toises. Ac. des Sc. 1700. Hist. pag. 120. & par conséquent une seconde du ciel est sur terre 16¾. toises, & à peu-près 17 toises, & une minute 990 toises, & le degré 59400 toises & plus. Cependant, au même endroit, on dit qu’un degré céleste répond sur la terre à une étendue de 57060 toises, ce qui ne donne à la minute sur terre que 951 toises, & à la seconde . toises. C’est évidemment une faute d’impression, & au lieu de 66, il faut lire 60.

Selon le calcul de M. Cassini que l’on vient de rapporter, la minute d’un degré de la terre est de 951. toises, . & la seconde est de 15. toises .

Degré de latitude, est l’espace de 57100. toises renfermé entre deux parallèles. Gradus latitudinis.

Degré de longitude, est l’espace renfermé entre deux méridiens.

Ces expressions sont venues des Anciens, qui connoissoient une étendue de la terre fort longue d’orient en occident, & une étendue beaucoup plus petite du midi au nord. Voyez longitude & latitude.

Degré, en termes d’Algèbre, est la même chose que puissance, Voyez Puissance.

Degré, en termes de Musique, c’est l’intervalle des sons. On marque aujourd’hui la distance des degrés par des lignes qui forment de petites bandes sur le papier ; autrefois on les marquoit par des nombres : cette ancienne méthode a été renouvellée au siècle passé par le P. Souhaity, Récollet. M. Lancelot joint ensemble les deux méthodes, l’ancienne & la nouvelle. Voyez ces Auteurs, dans les traités qu’ils ont faits sur l’art de chanter. Dans la voix il y a trois choses à considérer, son étendue, son degré d’aigu ou de grave, & sa partie. Sauv. Le degré selon M. Sauveur, dont on vient de citer les paroles, prises de ses Principes d’Acoustique, est le medium, ou son moyen d’une voix ; ainsi, quand une voix monte autant au-dessus d’une note qu’elle descend au-dessous, cette note est le degré de cette voix. Voyez l’Auteur cité, p. 64. 65.

On dit degrés conjoints, de deux notes qui se suivent immédiatement ; degrés disjoints, de deux notes qui ne se suivent pas immédiatement. C’est-à-dire, qu’on appelle degrés conjoints, quand on va de suite d’une ligne à un espace, & d’un espace à une ligne ; & degrés disjoints lorsqu’on va d’un espace à un espace, ou d’une ligne à une ligne, ce qui se fait par intervalle, en sautant une ligne ou un espace.

DÉGRÉER. v. a. Terme de Marine. Oter les agrès. Voyez DÉSAGRÉER.

Dégréé, éée, part. Désagréé, éée. Vasis & instrumentis nudatus, spoliatus. Un vaisseau dégréé par des coups de vent, une frégate demi-dégréée. Un bâtiment dégréé de toutes ses manœuvres, d’une partie de ses manœuvres.

DÉGREVANCE. s. f. Vieux mot. Dommage, préjudice.

DÉGRINGOLER, v. a. Descendre vîte. Devolvi. Terme populaire, qui se dit en cette phrase, on lui a fait dégringoler les montées quatre à quatre.

DÉGROSSAGE. s. m. Terme de Tireur d’or. Il se dit de l’art de réduire les lingots qu’on veut tirer en fil d’or ou d’argent à une certaine grosseur, après qu’ils ont été tirés à la grande argue.

DÉGROSSER. ou DEGROSSIR, v. a. Terme de Tireur d’or. C’est faire passer l’or ou l’argent par les filières, afin de le rendre plus petit, plus menu, plus délié. Extenuare. Voyez Boizard, Tr. des Mon. P. I. C. 28.

DÉGROSSI. s. m. Presse ou machine dans laquelle on fait passer entre deux rouleaux les lames dont on doit faire les monnoies pour les rendre plus unies & plus étendues. Prælum.

☞ DÉGROSSIR. v. a. Terme usité dans plusieurs Arts méchaniques pour exprimer les premières façons que l’on donne à un ouvrage, avant que de le conduire à sa perfection. Dégrossir ou débrutir les glaces. Dégrossir le fer. Ce terme est particulièrement en usage chez les Sculpteurs, qui sont obligés d’abattre plusieurs grosses parties d’un bloc de marbre ou de bois, avant que de travailler délicatement avec le ciseau. Extenuare. Chez les Menuisiers & autres ouvriers c’est de même ôter le plus gros de la matière, pour commencer à lui faire recevoir la forme que l’ouvrier doit lui donner. Adumbrare.

Dégrossir, rendre plus fin & plus délié. Attenuare, comminuere. Peut-être aussi que cette eau, dont on use préférablement à toutes les autres (pour faire la porcelaine à la Chine) est empreinte de certains sels particuliers, qui sont propres à purifier, & à dégrossir la terre ; ou qui unifient plus fortement ses parties. P. le Comte.

Dégrossir, Terme de Faiseurs d’aiguilles. Il se dit de l’acier qu’on fait passer pour la première fois par un gros trou de filière, pour le disposer à passer par de plus petits.

Dégrossir, Terme de Batteur d’or, qui signifie battre les feuilles d’or ou d’argent dans une sorte de moule de vélin, appelé petit moule à gaucher. C’est par cette façon qu’on commence à étendre le métal.

Dégrossir, à la monnoie. Voyez Dégrossi.

Les Imprimeurs disent dégrossir une épreuve ; pour dire, la lire la première fois, & en ôter les plus grosses fautes. On n’envoie point à un Auteur la première épreuve, on la dégrossit auparavant.

Dégrossir, au figuré. Ebaucher, se dit des affaires & des Sciences, commencer à les éclaircir, à les débrouiller : dégrossir une matière avant que de la traiter à fond.

Richelet jadis en raccourci
Vous a de l’art les règles dégrossi. R.

Dégrossi, ie, part.

DÉGUAINER. Voyez DÉGAINER.

DÉGUENILLÉ, ée. adj. Celui ou celle dont les habits sont en lambeaux. Pannosâ veste indutus. Il est tout déguenillé.

DÉGUERPIR, v. a. Abandonner la possession d’un héritage, d’un immeuble, à des créanciers demandeurs en déclaration d’hypothèque, pour se libérer de leur action. Abdicare. On déguerpit un héritage, une maison, une rente. Il est purement terme de pratique. On l’emploie aussi absolument. En déguerpissant on est quitte de tout, & l’obligation personnelle cesse. On crée un Curateur à un héritage qu’on a déguerpi, quand il y a plusieurs créanciers hypothécaires. Il a été assigné en déclaration d’hypothèque, & obligé de déguerpir.

Ce mot est formé & compose du vieux mot guerpir, qui signifioit abandonner. Ménage. On appeloit aussi cela autrefois époncer, gréver, délaisser. Loiseau ajoûte que le mot guerpir a été formé de Werpir, tiré de Werp, mot Allemand, qui veut dire, mettre en possession : ensuite de guerpir on a fait déguerpir, & la proposition de a donné à ce mot un sens opposé à celui de son simple, ce qui est ordinaire dans la langue Françoise, comme faire & défaire, habiller & déshabiller. &c.

Déguerpir, se dit aussi figurément, & en style, populaire, pour abandonner la place, sortir d’un lieu par un motif de crainte. Alors il est neutre. On l’a fait déguerpir de sa place. Nous fatiguerons tant notre Provincial, qu’il faudra qu’il déguerpisse. Mol. Abire, loco cedere, movere se loco, de loco.

Déguerpi, ie, part.

DÉGUERPISSEMENT. s. m. Terme de pratique. Abandonnement d’un héritage chargé d’hypothèque. Abdicatio. Quand on n’a point fait décréter un héritage, on court le danger du déguerpissement. Loiseau, dans son Traité du déguerpissement, dit que le déguerpissement est le délaissement de l’héritage, fait à celui auquel il est redevable de quelque charge foncière, pour s’exempter d’icelle : & il appelle abandonnement, le délaissement de la possession de l’héritage hypothéqué : ainsi le déguerpissement, selon cet Auteur, regarde les charges foncières, & l’abandonnement, les simples hypothèques, & les rentes constituées. Voyez Loiseau, Traité du déguerpissement.

DÉGUEULER. v. a. Terme populaire, bas, qui signifie vomir après un excès de débauche, & se dit des animaux & des ivrognes. Vomere. Dégueuler sous la table. Dégueuler des injures ne vaut pas mieux.

☞ DEGUEULLEUX. s. m. En hydraulique, ce sont de gros masques de pierre ou de plomb, dont on orne les cascades, & qui vomissent l’eau dans un bassin.

DÉGUIGNONNER. v. a. Oter le guignon, le malheur, principalement au jeu. Ce beau coup m’a déguignonné. Je suis déguignonné à l’heure qu’il est : il y avoit long-temps que j’étois en guignon, que je jouois malheureusement. Il est du style familier.

DÉGUISEMENT. s. m. Habillement extraordinaire, différent de celui qu’on a coutume de porter. Ce qui empêche de connoître une chose ou une personne telle qu’elle est. Habitus mutatio. Changement de forme extérieure, d’apparence. Ce prisonnier a été reconnu malgré son déguisement.

Déguisement, se dit aussi, dans le même sens, au figuré. Simulatio, dissimulationis integumentum. L’esprit fécond en déguisement s’étudie à défigurer, selon les intérêts, tantôt les vices, tantôt les vertus. Fléch. Il n’y a point de déguisement qui puisse long-temps cacher l’amour où il est, ni le feindre où il n’est pas. Rochef. Il faut arracher le masque aux hypocrites, afin de les dépouiller de leurs frauduleux déguisemens. S. Evr. Tous les déguisemens justifient mal une mauvaise conduite. La vérité est forte, & prévaut toujours, malgré les déguisemens & les artifices. Voy. Déguiser.

DÉGUISER, faire prendre à quelqu’un un habit extraordinaire pour le rendre méconnoissable. Alienum alicui vultum, habitum, alienam personam, faciem induere. Ce masque étoit si bien déguisé, que personne ne le put connoître. Vous êtes tout déguisé avec cette perruque blonde. Il a été assassiné par des gens déguisés.

☞ On dit aussi déguiser des viandes, c’est-à-dire, les assaisonner de telle sorte, qu’on a de la peine à les reconnoître. Déguiser sa voix, c’est ne pas parler avec le son de sa voix naturelle. Déguiser son écriture, écrire d’un autre caractère que l’ordinaire. Déguiser son style, composer d’un style différent du sien. Ac. Fr.

Déguiser se dit figurément, & signifie cacher sous des apparences contraires ce qu’on veut dérober à la pénétration d’autrui. Pour réussir dans les affaires d’intérêt & de politique, il faut quelquefois déguiser ses desseins. M. l’Abbé Girard. Déguiser son ambition. La Rochef. Déguiser la vérité, déguiser le fait, c’est raconter une chose autrement qu’elle n’est dans l’intention de surprendre ceux à qui l’on parle » Ac. Fr. Déguiser sa perfidie. Ablanc.

Se Déguiser, se dit dans le sens propre & dans le sens figuré. Dans le sens propre, il signifie prendre un masque ou toute autre chose qui nous rende méconnoissable. Dans le sens figuré, il signifie se montrer tout autre que l’on n’est. Cet homme-là fait toutes sortes de personnages, il se déguise en mille manières. Dans ce dernier sens il se dit aussi des l’actions en les personifiant. Il n’est point de forme sous laquelle l’amour ne se déguise, non pas même celle de la raison & de la vertu. S. Réal. L’hérésie se déguise sous diverses formes, & elle emprunte souvent la figure de la vérité. S. Evr.

O ! ma chère Cephise !
Ce n’est point avec toi que mon cœur se déguise. Racine.

Déguisé, ée. part. & adj. Employé au propre & au figuré. Au propre ce mot se dit de celui qui est méconnoissable par la manière dont il est couvert, qui a changé ses parures ordinaires. Aliénâ, insuetâ veste indutus, obtectus, latens. Homme déguisé en femme. Femme déguisée en homme.

Déguisé, travesti, masqué, consideré dans une signification synonyme. Pour être masqué, il faut se couvrir d’un faux visage, il suffit pour être déguisé de changer ses parures ordinaires. On ne se sert du mot travesti qu’en cas d’affaires serieuses, lorsqu’il s’agit de passer en inconnu ; & c’est alors prendre un habit ordinaire & commun dans la société, mais très-différent de celui de son état. Syn. Fr.

☞ On se masque pour aller au bal. On se déguise pour venir à bout d’une intrigue. On se travestit pour n’être pas reconnu de ses ennemis.

Déguisé dans un sens figuré, celui qui se montre autre qu’il n’est, pour donner le change. Par des apparences contraires il se dérobe à la pénétration d’autrui. Simulatus. Il est nécéssaire d’être déguisé pour ceux qui, non contens de percer les ténèbres qu’on leur oppose, discutent la lumière dont on voudroit les éblouir. Les vertus des hommes ne sont souvent que des vices déguisés.

☞ Dans ce sens il est régardé comme synonyme de caché & de dissimulé. Voyez à ces articles les nuances qui distinguent ces mots.

DÉGUSTATION. s. f. Essai qu’on fait des liqueurs en les goûtant. Degustatio. Les Commis des Aides disent dans leurs procès-verbaux qu’ils ont connu à la dégustation que des liqueurs étoient semblables ou différentes.

DEH.

DÉHAIT. s. m. Vieux mot qui veut dire maladie. Morbus, infirmitas, ægrotatio. Le Fisicien, ou le Sérorgien ne connoît en lui aucune chose ou déhait. Assis, c. 223. 238.

Déhait. Vieux mot. Tristesse, chagrin. On trouve dans Villon, Mais a donc il y a grand déhait, pour dire, il y a grand ennui, grande fâcherie. On a dit aussi déhaiter, deshaitié déhaitié ; pour dire fâché, languissant, chagrin.

DÉHAITÉ. adj. Terme de Fauconnerie. On appelle Oiseau déhaité de voler, celui qui ne vole pas de bon gré. Invitè, ingratis volans.

DEHAITÉ, ée. vieux adj. Malade, qui a quelque maladie, quelque déhait. Ægrotus, infirmas, æger. Quand le chef est déhaité, tous les membres en sont malades. Assis, c. 283.

DÉHÂLER. v. a. (l’h s’aspire) Oter l’impression que le hâle a causé sur le visage. Adustam, infuscatam æstu cutem restituere, pristino colori reddere. Cette pommade est bonne pour déhâler, pour ôter le hâle. Cette Dame de campagne n’ose faire des visites jusqu’à ce qu’elle se soit déhâlée.

Déhâlé, ée. part.

DÉHANCHÉ, ée. adj. Qui a les hanches rompues ou disloquées, ou qui marche en laissant aller le haut de son corps, comme s’il avoit les hanches rompues. Cette femme paroît toute déhanchée. On le dit aussi des chevaux qui n’ont plus de force aux hanches, ou qui ont fait un si violent effort de hanches, que les ligamens qui tiennent l’os, se sont relâchés.

Molière a dit se déhancher, dans la scène 4e de son impromptu de Versailles, où il donne cet avis à Mademoiselle Du Parc. Prenez bien garde vous, à vous déhancher comme il faut, & à faire bien des façons : cela vous contraindra un peu, mais qu’y faire ? Il faut par fois se faire violence.

DÉHARDER. v. a. Terme de Chasse, C’est : ôter des couples que l’on a passées dans le milieu d’une couple qui tient deux chiens, pour en tenir plusieurs ensemble, & les en ôter aussi quand ils ont les jambes prises dans leurs couples : lâcher des chiens qui sont liés quatre à quatre, ou six à six. Solvere.

DÉHARNACHEMENT. s. m. L’action de déharnacher. Pomey. Instructus equini exemptio.

DÉHARNACHER, v. a. Ôter le harnois d’un cheval. Instructu suo equum eximere. Dites au cocher qu’il ne déharnache pas ses chevaux. On dit aussi populairement & par extension, qu’une personne est déharnachée, lorsqu’elle est à demi déshabillée, ou qu’il manque plusieurs choses à son ajustement.

Déharnaché, ée. part.

DÉHÉRENCE. Voyez DÉSHÉRENCE.

DÉHET. adj. Vieux mot. Gaillard, qui se porte bien.

Monté sur belle haquenée,
Et pensez que j’étois déhet.

On disoit autrefois Déhés, pour malheur, & Daudehés, pour mauvaise rencontre.

DEHLI. Quelques-uns écrivent Delly, & le P. Catrou, dans son Histoire générale du Mogol, écrit Déli & Dely. C’est une ville du Mogolistan en Asie, capitale d’un Royaume de même nom. Delium. Déhli est situé sur la rivière de Gemini ou Sémeux. Maty. par les 31 degrés 45 minutes de latitude, & les cent vingt-trois de longitude. P. Catrou. Délhi est divisé en deux ; le vieux qui n’est plus qu’un fauxbourg, & le nouveau, qu’on nomme Cha-Jaham-Abad, c’est-à-dire, ville ou colonie de Cha-Jaham. Déhli fut bâti au commencement du dernier siècle, par Cha-Jaham, dans le dessein d’en faire la capitale de son Empire, au lieu d’Agra, où il trouvoit les chaleurs de l’été trop violentes. Corn. Déhli avoit cependant déjà été, sous un règne précédent la résidence de l’Empereur du Mogol. Voici ce qu’en dit l’Historien du Mogol, qui a écrit sur les Mémoires de Manourhi. Akebar avoir transporté la Cour de Déli à Agra, & Jehan-Guir d’Agra à Lahor. Cha-Jaham la fit retourner de Lahor à Dély, & rétablit cette ancienne capitale dans son premier lustre. Il est vrai que le vieux Dély ne servit que comme de fauxbourg au nouveau. Il est incroyable quelle dépense l’Empereur fit à l’ériger & à l’embellir. On dit même qu’il signala la fondation de sa nouvelle capitale par des superstitions jusque-là inouies aux Mahométans, & qu’il emprunta sans doute de la superstition des Indes. Il fit verser le sang de plusieurs criminels qu’on égorgea dans les fondemens de la ville. On en traça l’enceinte dans une grande plaine sur le Gemma. On y ouvrit onze portes. Comme la ville étoit fortifiée de douze tours, on laissa une entrée au milieu de chaque courtine. La plus grande & la plus magnifique répond à la citadelle qui sert de palais à l’Empereur, & de Serrail pour ses femmes. Les murailles en sont construites de briques, avec de grandes chaînes de ces pierres de taille rouges, qui ressemblent à du marbre. Les Bazards ou les Marchés publics de Dély, sont environnés d’arcades qui supportent une large terrasse. Quoique les Palais des Seigneurs y soient beaux, bien bâtis, & ornés de jardins, les maisons des simples Bourgeois n’y sont guère couvertes que de roseaux, mais les appartemens en sont gais & commodes. P. Catrou. Voyez aussi Bernier sur Déhli & Agra.

DEHORS. Adverbe de lieu relatif opposé à dedans. Foris. La porte de la ville étoit fermée, il a fallu coucher dehors. Votre mère & vos frères sont là dehors. Port-R. On dit absolument qu’on a mis dehors quelqu’un, pour dire, qu’on l’a chassé. On dit aussi dehors, pour dire, sortez d’ici. Foras. Dehors est aussi quelquefois une préposition : cela arrive lorsque dehors a un cas ou sous-entendu, comme, par dehors la ville. Il en est dehors, ou quelquefois simplement, il est dehors, parce que dans ces phrases dehors a une relation au lieu dont il a été parlé.

Ce mot vient de de & de foris. Nicot.

En termes de Marine, mettre un vaisseau dehors, c’est le faire sortir du port, lorsqu’il est équipé.

Dehors, terme de Manège : c’est le côté opposé à celui sur lequel le cheval tourne. Quand le cheval tourne à droite, toutes les parties gauches du cheval & du Cavalier sont les parties du dehors.

On dit proverbialement, qu’un homme n’est ni dehors ni dedans, lorsqu’il est incertain de la réussite d’un affaire commencée, qu’on ne lui veut dire ni oui ni non.

Dehors. s. m. En termes de Fortification, se dit de toutes les pièces détachées qui servent de défense à une place, comme les ravelins & demi-lunes, ouvrages à corne & à couronne, contregardes, envelopes, &c. Circummunitio, exterius munimentum. Les dehors de cette ville étoient bons, mais les murailles, le corps de la place ne valoient rien. Les dehors doivent commander les uns aux autres : les plus voisins de la place doivent être les plus élevés. Les coups échapés que l’on tire des dehors, & qui sont hauts, parce que les ennemis ont peur de se trop découvrir. Bussi Rab.

Dehors, se dit de tout ce qui environne une chose, de ce qui en approche le plus. Adjacentia, circumjecta loca. Une maison belle par dehors, par le dehors. Alors ce mot est synonyme d’extérieur & d’apparence, en observant les nuances marquées par M. l’Abbé Girard. Voy. ces mots. Le dehors est ce qui environne ; il n’est pas proprement de la chose, mais il en approche le plus. Les fossés les cours, les jardins & les avenues sont les dehors d’un Château. Les toits, les murs, les jours & les entrées en sont l’extérieur.

☞ Dans le sens figuré, ce mot est souvent employé dans la signification d’extérieur, d’apparence. Externa facies, species. L’intérieur des familles est souvent troublé, pendant que les dehors contens, paisibles & enjoués, vous y font supposer une paix qui n’y est point. La Bruy. Les soins attachés aux dignités forment dans l’esprit un tourbillon de chagrin qui rend les dehors sombres & rebutans. Le P. Gail. Sous l’humble dehors d’un respect affecté vous cachez une noire malice. Boil. Tous les dehors du vice sont plus spécieux parmi les Grands ; mais le fond y est le même que chez le peuple. La Bruy. Les femmes ne doivent pas négliger les apparences, ni les dehors de leur conduite, sous prétexte qu’elles s’abstiennent de ce qu’il y a de plus grossier dans le vice. Bell. On ne prend les dehors de la dévotion que pour être en droit de réformer son prochain. Vill.

☞ Il faut pourtant remarquer avec M. l’Abbé Girard, qu’extérieur se dit plus souvent de l’air & de la physionomie des personnes ; que dehors est plus ordinaire pour les manières & pour la dépense ; & qu’apparence semble être plus d’usage à l’égard des actions & de la conduite. L’extérieur prévenant n’est pas toujours accompagné du vrai mérite. Les dehors brillans ne sont pas des preuves certaines d’une fortune solide. Les pratiques de dévotion sont des apparences qui ne décident rien sur la vertu. Je ne dirois donc pas sauver les dehors, garder les dehors avec l’Académie, mais sauver les apparences.

Le Dehors se dit sur-tout en matière de dévotion, de tout ce qui est étranger, extérieur, opposé à la retraite. Les emplois du dehors dissipent toujours, quelque saints qu’ils soient. Bouh. Vie d’Ign. L. II. Ils ne respiroient que l’hérésie, & cachoient la corruption de leur cœur sous des dehors agréables. Id.

On dit aussi, en termes de Jardinage, le dehors d’un arbre, pour l’espace qui est hors de sa rondeur, de sa figure régulière. Ne manquez pas quand vous taillez un arbre, de couper toutes les branches qui se jettent dans le dehors. Voilà des branches dans le dehors de cet arbre, qui le rendent tout difforme. Liger.

Au Dehors. Sorte d’adv. A l’extérieur. Forinsecus, extrinsecus. Le deuil n’est qu’au dehors. Gon. Les dons du S. Esprit qui se font connoître au dehors, sont données pour l’utilité de l’Eglise. Port-R. Les dévots ne manquent pas de préférer certaines vertus choisies dont l’exercice se fait au dehors. S. Evr. La mauvaise humeur d’un Critique est un chagrin superbe & présomptueux, qui se produit au dehors. Balz.

De dehors. Autre sorte d’adv. Opposé à de dedans. Foris. Il vient de dehors. Pomey. On dit aussi qu’un homme est de dehors ; pour dire, qu’il est étranger.

Dehors (en). Autre sorte d’adv. Qui est opposé à en dedans. Prominens, eminens, exstans. Les balcons & les saillies qui sont en dehors paient un droit au Voyer. Cela avance trop en dehors. Porter la pointe du pied en dehors, marcher de manière que les pieds soient bien ouverts, & qu’il y ait plus de distance entre les deux pointes des pieds qu’entre les talons.

Dehors (par). Autre sorte d’adv. Par les parties extérieures. Extra. On a visité ce bâtiment par dedans & par dehors. Cette maison est plus belle par dedans, que par dehors.

Dehors (par), est aussi quelquefois préposition. Il passa par dehors la ville, Extra urbem, mais en ce sens il n’a guère d’usage qu’en cette phrase & autres semblables. Acad.

DÉHOUSER. v. a. Vieux mot, qui signifie, Débotter. Ocreas detrahere. Il vient de houses, ou houseaux : on disoit déhouser, pour dire, mourir, quitter ses bottes : de-là le proverbe,

A l’an soixante douze,
Temps qu’on se déhouse.

DÉHOUSSÉE. adj. f. Terme comique, pour dire, Dépucelée. Devirginata. Gloss sur Marot. Ce mot est vieux.

DEI.

DÉJA. adv. de temps. A cette heure-là, dès-lors, dès ce temps-là. Jam. Déja les ennemis s’approchoient avec une contenance hardie qui ravissoit la victoire par avance.

Déja, signifie aussi dès l’heure donc on parle. Il étoit déja grand jour. Il s’emploie aussi dans la signification d’auparavant. Il étoit déja venu. Je vous ai déja dit ce que je pensois.

DÉJANIRE. s. f. Fille d’Œnée, Roi de Calydon, femme d’Hercule. L’amour, jaloux de Déjanire qui cause la mort à Hercule, fait le sujet d’une Tragédie Grecque, des Trachiniennes de Sophocle, & d’une Tragédie Latine de Sénèque, intitulée, Hercule au mont Oëta.

☞ DÉICIDE. s. m. Ce mot n’est d’usage qu’en parlant de la mort, à laquelle Pilate & les Juifs condamnèrent le Sauveur du monde. Deicidium. Tous les maux dont les Juifs sont accablés depuis tant de siècles viennent du Déicide, qu’ils ont commis dans la personne de Jesus-Christ. Un Poëte a dit sur les fruits de la mort de Jésus-Christ.

Grand Dieu ! grace aux fureurs humaines,
L’Univers a changé de sort,
Je vois des palmes éternelles
Croître en ces campagnes cruelles,
Qu’arrosa ton sang précieux ;
L’homme est heureux d’être perfide ;
Et coupables d’un déicide,
Tu nous fais devenir des Dieux. Nouv. choix de Vers.

Déicide. s. m. Coupable de déicide. Qui a donné la mort à Jesus-Christ, qui en a été cause. Deicida. Judas est un infâme déicide. Ne tournons point toute notre indignation contre les Juifs ; nous sommes autant & plus déicides qu’eux.

☞ Ce mot est formé des mots Latins Deus, Dieu, & cædere, tuer. Ainsi il signifie mort d’un Dieu. C’est cependant comme homme que Jesus-Christ est mort.

DÉICOON. s. m. Fils d’Hercule & de Mégare.

DEIDAMIE, ou HIPPODAMIE. s. f. Fille d’un Roi d’Argos, épousa Pirithoüs. Leur noce fournit l’occasion du fameux différend des Centaures & des Lapithes, parce que les premiers voulurent insulter les Dames de la noce.

DÉJECTION. Terme de Médecine, qui se dit de l’évacuation des excrémens par l’anus faite par le mouvement peristaltique des boyaux, ainsi que des matières mêmes évacuées. Dejectio. Les Médecins jugent des maladies par les déjections.

Déjection, ou Chûte, se dit aussi en Astrologie Judiciaire, des Planètes, lorsqu’elles sont dans leur détriment, qu’elles ont le moins de force par l’opposition de quelques autres ; ou en Astronomie, lorsque la Planète est dans le signe opposé à celui où elle a plus d’efficacité & d’influence, & que l’on appelle exaltation. Par exemple, le signe du Bélier étant l’exaltation du soleil, le signe de la Balance sera sa déjection. Dejectio.

Déjection ou effusion des choses qui ont porté préjudice à quelqu’un : c’est un quasi-délit dont est tenu celui de la maison duquel on a jeté ou répandu, de jour, ou à heure indue, ou quelque chose qui a causé du dédommage, dans un lieu où l’on a coutume de passer ou de se reposer. De ce quasi-délit naît une action appellée de dejectis vel effusis, qui parmi nous est portée par-devant le Lieutenant de Police. Le Propriétaire ou le principal locataire de la maison d’où la chose est tombée ou a été versée, est responsable du dommage qui en est arrivé, ou le Sous-Locataire de l’appartement duquel la chose est tombée ou a été versée.

☞ DÉJETER (se), v. récip. qui se dit du bois qui se tourmente pour avoir été mis en œuvre avant que d’être bien sec, & qui se courbe, ou qui sort de ses emboîtures, de ses rainures. Incurvari. Le bois vert est sujet à se déjetter, à se tourmenter, à se courber, s’enfler, s’étendre. Monsieur Dionis emploie déjetter en parlant des courbures qui font perdre au corps ou à ses parties leur disposition, leur situation, leur figure naturelle. On remarque que l’épine se courbe & se déjette en cinq manières principales. Dionis. La méchanique dont on use pour redresser des tailles qui se déjettent.

Déjeté, ée. part.

DÉJEUNER. v. n. Faire le premier repas du jour, qui se fait avant le dîner. Jentare. Cet homme a toujours déjeûné dès le matin. Il a bien gagné à déjeuner. Déjeuner d’un pâté.

Ce mot vient du Latin dejenare, comme qui diroit, rompre le jeûne, faire une action contraire au jeûne, d’où quelques-uns ont fait aussi par abréviation le mot de dîner, parce qu’autrefois on ne dînoit point quand on jeûnoit.

Déjeuner, ou Déjeuné. s. m. Plusieurs écrivent déjeûné sans r, & on le prononce toujours ainsi. Léger repas qu’on fait le matin avant le dîner. Jentaculum. Muni d’un bon déjeuné. Boil. Les enfans & les vieillards ajoutent aux deux repas ordinaires, le déjeûner & le goûter. Lemery. Ils trouvèrent un bon déjeuner qui les attendoit, & qu’ils mangèrent de fort bon cœur, bénissant Dieu, qui ne leur avoit pas fait manger leur pain blanc le premier. Racine.

Qu’un ample déjeûné
Long-temps nous tienne à table, & s’unisse au dîné. Boil.

On appelle déjeûné-dîné, un grand déjeûné qui ne permet pas de dîner. On dit déjeûné de Clercs, dîner de Procureurs, collation de Commères, souper de Marchands.

Déjeuner, se dit figurément & dans le style familier, en parlant de quelque chose dont on croit qu’on viendra facilement à bout, qui ne peut pas résister long-temps. Cette place ne peut pas tenir long-temps : il n’y en a pas pour un bon déjeûner. Res aliqua levioris momenti ac ponderis. Il a eu peu de bien de sa femme, il n’y en a pas pour un bon déjeûner.

DEIFICATION. s. f. Terme du Paganisme. Action ou cérémonie par laquelle on déifioit les Empereurs, on les mettoit au rang des Dieux, on leur décernoit les honneurs divins. Apotheosis, consecratio, in numerum Deorum relatio. C’est le même qu’Apothéose. Cette coutume qu’avoient les Romains de déifier leurs Empereurs fit dire à Vespasien lorsqu’il se sentit près de mourir : Je sens bien que je deviens Dieu.

Eusèbe, appuyé sur le témoignage de Sanchoniathon, rapporte que dans les premiers temps ceux qui s’étoient distingués par leur sagesse, leur force, ou leur valeur ; & ceux qui avoient contribué d’une manière éminente au bien de la société, ou à qui les arts étoient redevables de leurs progrès, avoient été déifiés de leur vivant, ou immédiatement après leur mort. Essai sur les Hiérogl. p. 312.

DÉIFIER, v. a. Mettre au rang des Dieux. In numerum Deorum referre. Les Romains ont déifié la plupart de leurs Empereurs.

Déifier, se dit aussi figurément de ceux qu’on loue par excès, & qu’on veut faire passer pour des Dieux. Extollere supra modum. Tout Poëte déifie ses Héros, ses Mécénes, ses Maîtresses.

Déifié, ée. part.

DÉIFIQUE. adj. m. & f. Vieux mot. Qui a la vertu de déifier, de rendre semblable aux Dieux ; excellent, admirable. O déifiques doublons d’Espagne, qui avez eu cette efficace de nous faire tous rajeunir & renouveler en une meilleure vie ! s’écria l’Archevêque de Lyon dans sa Harangue, p. 68. du 1. t. de la Sat. Ménip.

Déifique. Divin, parfait en son genre. Divinus, deificus a unm.

Hauts Empereurs, Princesses magnifiques,
Laides & laids, visages déifiques. Marot.

DÉILE. s. m. Voyez Déel.

☞ DÉINCLINANT, DÉINCLINÉ. adj. Terme de Gnomonique. Cadrans déinclinans ou déinclinés sont ceux qui déclinent & inclinent, ou réclinent tout-à-la-fois, c’est-à-dire qui ne passent ni par la ligne du zénith, ni par la commune section du méridien avec l’horison, ni par celle du premier vertical avec l’horison. Encyc.

☞ DÉINOUR. Ville de l’Iraque Persienne, près de la ville de Hamadan. Long. 85. deg. sept. 35. deg. selon les Tables des Arabes.

DÉINSE. s. m. Petite ville des Pays-Bas. Deinsa, Donsa. Déinse est fortifiée. Il est dans la Châtellenie de Courtray en Flandre sur le Lys.

☞ DÉJOINDRE. v. a. Particulièrement usité en parlant des ouvrages de Charpenterie, de Menuiserie & de Maçonnerie. Séparer ce qui étoit joint ; faire que ce qui étoit joint ne le soit plus. Disjungere. Le hâle a déjoint ces ais.

☞ Il est souvent employé avec le pronom personnel. Les pierres de cette voûte commencent à se déjoindre. Le bois vert qui est employé dans les ouvrages de Menuiserie se déjoint, se déjette, quand il travaille, quand il devient sec. Quand les tableaux peints sur du bois se déjoignent, tout l’ouvrage est défiguré.

Déjoint, ointe, part.

DEJOPÉ. s. f. Fille d’Asius, une des Nymphes compagnes de Cyrêne, mère d’Aristée.

DÉJOUER, en termes de Marine, se dit d’un pavillon, d’une flamme, d’une girouette qui voltige au gré du vent. Circumferri vento. Le pavillon déjoue.

DÉIPHILE. s. f. Fille d’Adraste, Roi d’Argos, devoit épouser un sanglier, suivant l’oracle d’Apollon, qui se vérifia en ce sens qu’elle épousa Tydée, qui portoit une peau de sanglier.

DÉIPHOBE. s. m. Fils de Priam, après la mort de son frère Paris, épousa la belle Hélène. Cette femme le trahit, la nuit de la prise de Troye, elle introduisit dans son appartement Ménélas & Ulysse qui le tuèrent. Enée à son retour des enfers lui éleva un monument.

Déiphobe. s. f. C’est le nom de la Sibylle de Cumes, fille de Glaucus, & Prêtresse d’Apollon. Cette Sibylle rendoit ses oracles du fond d’un antre qui étoit dans le temple d’Apollon. Cet antre avoit cent portes, d’où sortoient autant de voix terribles qui faisoient entendre les réponses de la Prophétesse. Déiphobe étoit aussi Prêtresse d’Hécate qui lui avoit confié la garde des bois sacrés de l’Averne. C’est pour cela qu’Enée s’adresse à elle pour descendre aux enfers. Les Romains élevèrent un temple à cette Sibylle dans le lieu même où elle avoit rendu ses oracles, & l’honorèrent comme une Divinité.

DÉIPNOSOPHISTE, ou DIPNOSOPHISTE, s. m. Qui fait des leçons de Philosophie à table, qui moralise à table. Deipnosophista. Un Déipnosophiste dans Athénée fait venir la coutume de porter des couronnes, de la permission qu’en donna Jupiter à Prométhée, & montre que ce qui a depuis fait tant d’honneur aux hommes, n’a été donné en premier lieu que pour une peine. Baudelot, Hist. de Ptolémée Aul. L. II. C. VIII. p. 339.

DÉISME. s. m. Doctrine de ceux qui, pour toute Religion, croient qu’il y a un Dieu, & se bornent à suivre la loi naturelle. Hæresis eorum qui Deo, quem fatentur existere, nullum cultum exhibent, nisi ut libet. Deistarum Hæresis.

DÉISTE. s. m. Homme qui n’a point de Religion particulière, mais qui reconnoît seulement l’existence d’un Dieu, sans lui rendre aucun culte extérieur, en rejetant toute sorte de révélation. Nullius cultor religionis & in solâ Dei existentis confessione conquiescens ; Deista. Les Déistes soutiennent que le plus certain est d’en revenir à la simplicité de la nature, & à la créance d’un Dieu unique, qui est la seule vérité reconnue du consentement de tous les hommes. Ils prétendent que la liberté de la raison est opprimée sous le joug de la Religion, & que les esprits sont tyrannisés par la nécessité qu’on leur impose, de croire des mystères inconcevables, comme si Dieu pouvoir dispenser d’un culte sincère & véritable ceux qui le reconnoissent pour tel. On appelle plus particulièrement Déistes, des gens qui ne sont point tout-à-fait sans Religion, mais qui rejettent toute révélation, croyant seulement ce que la lumière naturelle démontre, qu’il y a un Dieu, une Providence, des récompenses pour les bons, & des châtimens pour les méchans ; qu’il faut honorer Dieu, mais chacun à sa manière & selon sa volonté, comme on convient, disent-ils, que les premiers hommes l’ont fait jusqu’à Moïse ; comme si, supposé que Dieu ait révélé des vérités, & qu’il ait prescrit un culte qu’il veuille qu’on lui rende, on pouvoit ne lui pas obéir ; ou que la révélation pût être douteuse après toutes les preuves que nous en avons.

DÉITÉ. s. f. Terme de Poësie, qui a été appliqué aux Dieux & aux Déesses des Payens. Divinitas. Jupiter, Apollon, Junon & Minerve, étoient les Déités des Idolâtres. La bonne Fortune a toujours été la principale Déité des Princes. P. Job. L’attachement particulier que les Princes ont eu à certaines Déités, & les titres particuliers sous lesquels ils les ont honorées en reconnoissance de leur protection en général, ou de quelques grâces particulières qu’ils en avoient reçues, nous est connue par les manières différentes de la légende des médailles. Idem. On commence à estimer les suites des Déités, à cause du plaisir qu’on a d’y remarquer les noms différens, les symboles, les temples, les autels & les pays où elles étoient. L’on en peut faire une belle suite de bronze par le moyen des villes Grecques qui en fournissent grande quantité ; mais la plus jolie & la plus agréable est celle d’argent que fournissent les médailles des familles. Id. Sur les revers des médailles impériales les Déités sont représentées plus agréablement encore que sur celles des familles. Id.

On dit des personnes qu’on veut louer excessivement, que ce sont des Déités.

DÉJUC. s. m. Temps où les oiseaux juchés se réveillent, & quittent le juchoir. On le dit par extension du lever des hommes, quand on les prend au sortir du lit. Tempus quo alites evigilant, & de perticâ desiliunt. Mane, diluculum.

Ce mot se dit encore dans la Ménagerie, quand on parle du lever des volailles.

DÉJUCHER. v. n. & a. Sortir du juchoir. Faire sortir du juchoir. Dormitoriâ perticâ exilire ; de dormitoriâ perticâ dejicere. Voilà l’heure où les poules déjuchent. Ce paysan est allé déjucher des poulets pour les vendre à un poulaillier.

Déjucher, se dit au figuré pour se déplacer d’un lieu haut & élevé. Je vous ferai bien déjucher de-là.

☞ On le dit aussi activement, déplacer, faire sortir quelqu’un d’un lieu élevé & avantageux. Depellere, detrudere, dejicere. Les ennemis se sont emparés de ce château, de cette éminence, on aura bien de la peine à les déjucher de-là. Il est du style familier.

Déjuché, ée, part.

DEIVIRIL, ile. adj. Terme dogmatique de Théologie. Qui est tout ensemble divin & humain. Theandricus. Les Euthychiens disoient que le même Jesus-Christ & le même Fils, produit les opérations divines, & les opérations humaines, par une seule opération théandrique, c’est-à-dire, Déivirile, ou divine & humaine tout ensemble, en sorte que la distinction n’est que de la part de notre entendement. C’est M. l’Abbé Fleury qui parle ainsi ; mais ce mot n’est point dans l’usage ; on dit toujours théandrique. M. Godeau s’en étoit servi néanmoins avant lui dans son Hist. de l’Eg. VIIe siècle, L. 1. no. 84. On lut encore (dans le Concile tenu par le Pape Martin en 649.) les neuf Chapitres ou Articles de Cyrus, Patriarche d’Alexandrie, & parce qu’il se fondoit sur une autorité de S. Denis en son Epitre à Caïus, dans laquelle il appelle l’opération de J. C. Deivirile ; les Evêques firent apporter le livre de ce Saint, & le Pape remarqua que Cyrus avoit corrompu son texte. Car S. Denis avoit dit une nouvelle opération déivirile, c’est-à-dire, théandrique ; & Pyrrhus lui faisoit dire une seule opération, changeant le mot de nouvelle, en celui de seule. Unam operationem pour novam operationem, ce qui étoit bien différent. Quelque temps après Sergius raya aussi le mot de deivirile, par lequel S. Denis n’entendoit autre chose, sinon que le verbe s’étant fait homme, opéroit divinement & humainement ; mais il ne vouloit pas dire, qu’il n’y eût qu’une opération en lui. Godeau.

Ce mot est composé de Deus, Dei, Dieu, & virilis, viril, de vir, homme, & signifie une chose qui est tout à la fois divine & humaine, un mélange, un composé de divin & d’humain. Les hérétiques Monophysites avoient fait ce mot pour exprimer leur erreur ; car, comme ils enseignoient qu’il n’y avoit point deux natures distinctes en J. C. que la nature humaine & la nature divine depuis l’union & par l’union hypostatique étoient confondues ensemble & devenues une seule nature, qui n’étoit ni l’une ni l’autre, mais un composé de l’une & de l’autre, une troisième nature qui résultoit de l’union & du mêlange de l’une & de l’antre, il s’ensuivoit, comme ils le disoient en effet, que les opérations de cette troisième nature, c’est-à-dire, de J. C. n’étoient ni purement divines, ni purement humaines, & qu’il n’y en avoit plus de deux sortes, les unes divines & les autres humaines ; mais qu’elles étoient toute d’une seule espèce, qu’ils appeloient théandriques, déiviriles, c’est-à-dire, si l’on pouvoit s’exprimer ainsi, divin-humaines. Au reste, le P. le Quien, Dominicain, bien loin d’excuser le prétendu S. Denis, & de l’expliquer, prétend que c’est un hérétique Monophysite. Voyez les Dissertations préliminaires de ce Père sur S. Jean Damascène, dans la nouvelle édition qu’il en a donnée.

DEL.

DELÀ, adverbe de lieu relatif à deçà, qui marque un éloignement du lieu où l’on est. Ultra. A cinq ou six cens pas delà venoit Sisigambis. Vaug. Une ligne à plomb ; est celle qui ne penche ni en deçà, ni en delà. Hinc indè. C’est un homme qui court deçà & delà pour apprendre des nouvelles. Huc & illuc. De côté & d’autre. Jambe deçà, jambe delà.

Delà, préposition, signifie plus outre, de l’autre côté. Trans. Delà les monts. Delà l’eau. Passer delà l’eau.

☞ En ce sens il se joint avec les particules au, de, & par. Au-delà de la rivière. De-delà les monts. Dix lieues par-delà. Le Roi d’Espagne prend la qualité de Roi de deçà & delà les mers. C’est la suite des choses qu’on écrit qui détermine dans ces occasions-là, la signification vague & générale du mot delà.

Delà, par-decà, par-delà. Façons de parler qui marquent le lieu où est celui à qui l’on parle. Ecrivez-moi de delà ; je vous écrirai de deçà, quand vous serez par-delà. Façons de parler qui ne sont plus en usage.

Au-delà. adv. Aller au delà. Ultrà, trans. Je lui ai donné tout ce que je lui devois, & au-delà, c’est-à-dire, encore davantage.

Au-delà, est aussi une préposition qui régit le génitif. S’emporter au-delà des bornes. Ablanc. Ultrà. Il a été au-delà de la Ligne. La Chine est à plus de 600 lieues au delà des terres qu’habitent les Hollandois dans l’Inde. Il ne faut rien entreprendre au-delà de ses forces. Les Modernes ont bien passé au-delà des Anciens, si l’on en croit quelques Savans modernes ; mais c’est avoir trop bonne opinion de notre siècle, que de se persuader que nous en soyons encore venus jusque-là.

Par-delà, adv. Il est passé par-delà. Voilà un ouvrage achevé, je ne vois rien par-delà. Ultra.

Par-delà, est aussi une préposition qui régit l’accusatif. Je l’ai servi par-delà tout ce qu’on peut s’imaginer. Ultra. Elle promet par-delà son pouvoir. Racine. Par-delà mes sermens, Expression dont s’est servi Corneille dans Cinna.

Et prens vos intérêts par-delà mes sermens.

☞ Expression dont je ne trouve que cet exemple, & cet exemple me paroît mériter d’être suivi. Volt.

DÉLÂBREMENT. s. m. Dilaceratio. État d’une chose délabrée. Voilà un habit dans un pitoyable délâbrement.

DÉLÂBRER. v. a. Mettre en pièces, en lambeaux. Lacerare. Il ne se dit, au propre, que des habits, des étoffes, tapisseries, ou autres choses qui se peuvent mettre en lambeaux.

Délâbrer, se dit, au figuré, d’une armée, d’une affaire, d’un procès, d’une maison, d’une terre, qui sont en désordre, en mauvais état. Une année délâbrée par les fatigues & par le manque de vivres. Quand on achète des terres par décret, elles sont ordinairement délabrées. Sans moi vos affaires étoient fort délabrées. Mol.

Délabré, ée. part. & adj. Lacer, laceratus. Une réputation délabrée. Troupe de Comédiens délabrés. Scar. Famille délabrée, ruinée. Homme délabré, dont l’habit est tout déchiré.

DÉLACER, v. a. Oter le lacet, ou le ruban qui tient quelque chose lacée ou attachée. Exsolvere, laxare funiculo serico. Délacer un corps de jupe. On dit de même délacer une femme, défaire le lacet qui est passé dans les œillets du corps de jupe.

Délacé, ée, part.

☞ DÉLAI. s. m. Ce mot est synonyme à remise, & tient un peu du Palais. Il signifie en général le renvoi d’une chose qui devroit être faite dans un certain temps, à un temps plus éloigné. Dilatio, procrastinatio. Les mauvais payeurs ne cherchent que des délais pour ne point payer. Donner, prendre du délai.

Délai, en Jurisprudence, est un terme qu’on donne à quelqu’un pour faire quelque chose. Temps accordé par la loi ou par la coutume, pour la procédure ou pour les affaires. Dilatio. Les délais qu’on donne pour assigner, pour comparoir, pour fournir des écritures, & mettre un procès en état, sont réglés par l’Ordonnance. Vadimonii prolatio, dilatio. On accorde à l’héritier présomptif 40 jours après l’inventaire, pour délibérer s’il acceptera la succession. Il a obtenu un renouvelement, une prorogation de délai pour faire sa preuve ; pour délibérer, pour rapporter des titres, des Bulles, pour se faire promouvoir aux Ordres.

Délai, fatal ou péremptoire, est celui qui est préfix sans espérance de prolongation.

☞ Bref délai est celui qui est plus court que les délais ordinaires : ce qui arrive dans les cas qui requièrent célérité.

Délai de grace, qui est accordé par le juge ou par les parties au-delà des délais ordinaires.

On dit, en Pratique, pour toutes préfixions & délais. On l’a appelé aussi autrefois jour d’apensement ; & délai en quelques Coutumes a signifié injure atroce, ou reproche de quelque cas laid ou vilain.

Ménage dérive ce mot de dilatum ; qu’on a dit pour dilatio.

Délai, Terme d’Horloger. On l’appelle autrement volant. C’est dans les grosses horloges ce qui sert à les retarder. Retinaculum.

C’est aussi l’espace de temps qu’il y a depuis que la cheville de la roue d’étoteau se repose sur le dentillon, jusqu’à ce que la sonnerie parte. Cet intervalle est dans toutes les sonneries, excepté celles qui ont des détentes à fouet.

DÉLAIS. s. m. Terme de Palais. Cession, abandonnement d’un bien pour lequel on est inquiété. Derelictio, cessio. Un acquéreur après avoir fait le délai & déguerpissement de l’héritage, est déchargé de l’action en déclaration d’hypothèque.

DÉLAISSEMENT. s. m. Abandonnement, manque de secours, d’assistance. Derelictio, destitutio. Prétendre que le délaissement de Jesus-Christ sur la croix le porta à des mouvemens de désespoir ; c’est une impiété, & une absurdité de Calvin, à laquelle on ne sauroit trouver de nom assez fort. On doit plaindre cette veuve dans le grand délaissement où elle est, sans support, sans amis. C’est un délai délaissement cruel, mais il n’a point d’idée tragique, il ne touche pas. Le Mait.

Délaissement, Terme de Palais. Ce mot se prend quelquefois pour abandonnement, & dans un sens opposé en quelque chose à celui de déguerpissement : mais c’est proprement un terme général qui convient à cinq espèces différentes qui sont la cession de biens, la renonciation tant à la succession qu’à la communauté, le désistement d’une possession, lorsqu’on est poursuivi par une action réelle, l’abandonnement par hypothèque, & le déguerpissement. Cet homme est obéré, il a fait un délaissement, un abandon général de tout son bien à ses créanciers. Cessio.

Délaissement par hypothèque. Cession & abandonnement qui se fait par le détenteur d’un héritage hypothéqué à des dettes antérieures à son acquisition. Cessio. Par le délaissement, il s’exempte des arrérages des rentes auxquelles le fonds est hypothéqué. Il y a cette différence entre le délaissement & le déguerpissement, c’est que par le délaissement, on ne perd pas absolument la propriété de l’héritage délaissé ; au contraire, on peut en reprendre la possession tant qu’il n’a pas été adjugé en Justice, en passant titre nouveau des rentes qui sont dues par le fonds. De plus, si après les rentes payées il reste de l’argent, celui qui a fait le délaissement se prend en son ordre pour le prix de son acquisition. Mais celui qui fait le déguerpissement, abandonne le fonds sans retour & sans réserve.

Délaissement, ou délais, en termes de Marine, est un acte par lequel un assuré dénonce la perte du vaisseau à l’assureur, & lui délaisse & abandonne les effets sur lesquels l’assurance a été faite, avec sommation de payer la somme assurée. Cessio.

☞ DÉLAISSER, v. a. Laisser quelqu’un sans secours, n’avoir point de soin de le secourir. Derelinquere, destituere. Le Sauveur dit à son père, étant sur la croix, Seigneur, Seigneur, pourquoi m’avez vous délaissé. Job se plaignoit d’être délaissé de tous ses amis. La science est triste, affreuse, délaissée. Boil.

☞ Observons avec M. l’Abbé Girard que délaisser ne se dit guère que des personnes. Nous délaissons les malheureux à qui nous ne donnons aucun secours.

☞ On dit plus souvent abandonner que délaisser. Ce dernier a meilleur grâce au participe qu’à ses autres modes, & il a par lui seul une énergie d’universalité, qu’on ne donne au premier qu’en y joignant quelque terme qui la marque précisément. Ainsi l’on dit : c’est un pauvre délaissé, il est généralement abandonné de tout le monde.

☞ Souvent nos parens nous abandonnent plutôt que nos amis. Dieu permet quelquefois que les hommes nous délaissent pour nous obliger à avoir recours à lui. Une personne qui se voit délaissée dans sa misère ne regarde la charité que comme un paradoxe qui occupe inutilement une quantité de vains discoureurs.

Délaisser, signifie aussi, donner, quitter, abandonner. Cedere. Dans les Contrats, on dit qu’on a quitté & délaissé une terre, à titre de ferme, à un tel métayer ; à titre de vente, de donation. Il a été contraint de déguerpir, de délaisser la possession de cet héritage. Voyez Délaissement, terme de Palais.

☞ On dit aussi, en termes de Pratique, délaisser une procédure commencée, délaisser des poursuites, s’en désister.

Délaissé, ée. part. & adj. Relictus, derelictus, destitutus.

DELAL. s. m. Les Persans nomment ainsi certaines personnes qui agissent pour eux dans l’achat & dans la vente de leurs marchandises : c’est ce que nous appelons proprement en France des Courtiers.

DÉLARDEMENT. s. m. Terme d’Architecture. C’est pour les pierres la même chose que le débillardement pour les bois. Il se dit particulièrement de l’amaigrissement que l’on fait au-dessous des marches, pour former l’intrados d’une rampe ou d’une coquille d’un escalier tournant. Frezier. Detractio, imminutio.

DÉLARDER. v. a. Terme de Charpenterie. C’est, rabattre en chanfrein les arrêtes d’une pièce de bois, comme quand on taille l’arrêtier de la croupe d’un comble. Partem tigni angulatam decutere, recidere. Si on abat les arrêtes en creux, on dit, délarder en creux. Délarder des chevrons, des arrêtiers, &c.

Délarder, en Maçonnerie, c’est piquer avec la pointe d’un marteau le lit d’une pierre ; & démaigrir ce qui en doit être posé en recouvrement, Crassitudinem lapidis qui alteri tegendo inserviat imminuere, tenuare : c’est aussi couper obliquement le dessous d’une marche de pierre ; c’est pourquoi on dit qu’elle porte son délardement.

Délardée, ée. part. Chevron délardé. Marche d’escalier délardée.

☞ DÉLASSEMENT. s. m. Terme relatif au besoin que le corps & l’ame ont de repos. Par rapport au corps, c’est le relâche qu’on prend après le travail : cessation de travail dans la vue de réparer les forces. Par rapport à l’esprit c’est un passe temps pour le distraire de ses fatigues. Corporis, animi refectio, recreatio. Amusement dit une occupation légère, & qui plaît. Divertissement paroît annoncer des plaisirs plus vifs & plus étendus. Récréation dit un court délassement. Voyez ces mots. Après de grands travaux, il faut du délassement. Le jeu est un travail pour les uns, & un délassement pour les autres. La Comédie fut toujours le délassement des grands hommes, le divertissement des gens polis & l’amusement du peuple. S. Evr. Dans cette auguste retraite ou il daigne quelquefois m’admettre à ses délassemens, dans ces momens heureux, où il tempère l’éclat qui l’environne pour descendre jusqu’à nous, je recueillerai plus soigneusement que jamais ses paroles, Le Duc de la Force, parlant du Roi.

☞ DÉLASSER, v. a. Donner du relâche. Se délasser, réparer ses forces par la cessation du travail, distraire l’esprit de ses fatigues par quelque passe-temps. Le sommeil délasse. On se couche pour se délasser. Le jeu délasse l’esprit. Corpus, animum recreare, reficere. Délasser le Roi de ses nobles travaux. Mol. Il faut délasser l’esprit qui est trop tendu. Ablanc. Allons nous délasser à voir d’autres procès. Racine. Alexandre étant à Ephèse, pour se délasser l’esprit, alloit souvent à la boutique d’Apelle, fameux Peintre de son temps. Du Ryer.

Délassé, ée, part.

☞ DÉLATEUR. s. m. On donnoit ce nom à Rome, à des Citoyens qui devenoient les accusateurs secrets ou déclarés de leurs Concitoyens. Delator. Les délateurs étoient fort à craindre dans l’ancienne Rome. Les délateurs étoient fort communs & fort odieux.

Les déserts autrefois peuplés de Sénateurs,
Ne sont plus habités que par leurs délateurs. Rac.

☞ DÉLATEUR. En Jurisprudence, est celui qui dénonce à la justice un crime ou un délit, & celui qui en est l’auteur, sans se porter partie civile. En quoi il diffère de l’accusateur, qui défère aussi un crime à la Justice, en rend plainte, mais en poursuit la réparation comme partie civile.

☞ On ne se sert chez nous que du mot de dénonciateur que l’on regarde comme synonyme de délateur dans toute la rigueur d’une parfaite ressemblance. Cependant celui de dénonciateur paroît avoir une signification plus étendue, & convenir à toutes sortes de dénonciations : au lieu que celui de délateur est plus à sa place quand il est question de dénonciations odieuses. Le délateur est presque toujours l’instrument de la passion d’autrui, conduit par des impressions étrangères, ou par des motifs qui le rendent vil & odieux. Le dénonciateur peut-être animé par des motifs louables & honnêtes.

☞ DÉLATION. s. f. Delatio. Dénonciation d’un crime fait à la justice par quelqu’un qui n’est point personnellement intéressé à la poursuite de ce crime. Dans les crimes de Lèse-Majesté on arrête souvent sur une simple délation. On ne décide point de la vie d’un homme sur une simple délation.

DÉLATTER. v. a. Oter les lattes de dessus un toît. Tegulas detrahere. Il faut délatter ce toît, & le relatter à neuf.

☞ DÉLAVÉ. ée. adj. ou participe du verbe délaver qui n’est plus en usage. Terme de teinture qui se dit des couleurs foibles & blafardes. Voyez ces mots. Ce bleu est trop délavé. Dilutior est.

☞ Les Joailliers appellent aussi pierre délavée, celle dont la couleur est foible.

☞ DÉLAYANT. s. m. ou adj. pris substantivement. Terme de Médecine. Remède qui rend les humeurs plus fluides, en écartant leurs parties unies & serrées, & mettant entr’elles un liquide qui les tient plus séparées. Le principal délayant est l’eau. Diluens. Les tisannes rafraîchissantes, les émulsions, les eaux de poulet, de riz, d’orge, de coquelicoc, &c. sont des délayans. Bouillet. On rend ces délayans plus efficaces par l’addition du sel de prunelle, du nitre purifié ; de l’esprit de vitriol ou de souffre. Id.

DÉLAYER, v. a. Détremper, rendre une chose liquide, ou plus liquide qu’elle ne l’étoit auparavant ; ce qui se fait par le mélange de quelque liqueur. Diluere. Il faut bien délayer la farine pour faire de la bouillie ou de la colle. On délaye de l’ocre avec de l’huile pour peindre des travées, des portes, &c. plusieurs prononcent dilayer, mais mal.

Ce mot vient du Latin diluere, ou de deliquare. Ménage.

Délayé, éé. part.

DELAYER, v. n. Vieux mot. User de délai, différer. Poes. de Jean le Févre.

DELBRUGH ou DELBURGK. Bourg, ou petite ville du cercle de Westphalie. Delbruggia. Ce lieu est près des sources de l’Ems, dans l’Evêché de Paderborne. C’est à Delbrug que les Légions de Varus furent taillées en pièces, & que Germanicus vengea cet affront fait au nom Romain, par la défaite des Bructères, dont ce fut la dernière habitation. Voyez les Monumenta Paderbornensia, p. 57.

DÉLEALTÉ. s. f. Vieux mot. Déloyauté.

DÉLÉAN, ou selon la prononciation Hébraïque, Dilean. Ville de la Tribu de Juda, Jos. XV. 38. Les Septante la nomment Δάλαδ. Selon les principes posés par le P. Soucier, Jésuite, dans sa Dissertation sur les médailles Hébraïques, & sur les premières lettres Hébraïques, c’est une faute du Copiste, on a pris un nun de l’ancien & vrai caractère Hébreu, pour un daleth du même caractère, ce qui est faisable dans un exemplaire usé.

☞ DÉLECTABLE. adj. de t. g. Quelquefois employé substantivement. Cette épithète paroît convenir aux choses qui flattent les sens ou le goût. Delectabilis, delectationem afferens. On dit d’un lieu, d’un séjour, qu’il est délectable. Ce vin, ces mots sont délectables. Il faut préférer l’honnête au délectable.

Que toujours cher à mes amis, Mêlant l’utile au délectable, Leur amitié tendre & durable Me tienne ce qu’il m’ont promis. Nouv. choix de vers.

☞ Je haïrois ce mot, dit le P. Bouhours, si M. de la Chambre ne s’en servoit pas quelquefois. Il peut passer en fait de morale.

DÉLECTABLETÉ. s. f. Vieux mot. Joie. On a dit dans le même sens Délitablete, déliteux & délicteux, pour délicieux, agréable.

DÉLECTATION. s. f. Delectatio. Sentiment doux & agréable, plaisir qu’on savoure, qu’on goûte avec réflexion. On boit, on mange avec délectation. On prend trop de délectation aux choses du monde. Ce mot n’est guère dans l’usage ordinaire. Il est admis en fait de morale. Il est très-familier parmi ceux qu’on appelle Jansenistes. Il répand une douceur céleste qui surmonte la délectation de la chair. Pasc.

☞ Selon le sistême des Jansenistes il y a deux délectations qui entraînent les hommes dans le bien ou dans le mal, d’une manière douce, mais invincible. Il semble que les différens accès de plaisir céleste ou terrestre nous rendent vertueux sans mérite, ou vicieux sans crime.

Les Jansénistes appellent leur grace nécessitante, une délectation victorieuse. Ils attribuent ce terme à S. Augustin ; & l’on croit communément, à la manière dont ils en parlent, que le S. Docteur s’en sert à tout moment ; mais, dit on, il n’est qu’une seule fois dans ce Père, & dans un sens tout différent du leur. Délectation signifie plaisir, sentiment du plaisir qu’excite dans l’ame un objet agréable. Délectation céleste, c’est celle que produisent en l’ame les objets de la foi avec la grace. Délectation terrestre, c’est celle qui naît des objets de La concupiscence, & qui est le mouvement de la concupiscence.

DÉLECTER, v. a. Donner du plaisir. Delectare, oblitare. L’émail d’une prairie, la couleur verte délectent la vûe, la réjouissent. Les ragoûts délectent le palais. On le dit aussi avec le pronom personnel. Un Satyrique se délecte à médire de son prochain, à railler ses amis. Delectare se aliquâ re, cum aliquâ re, ou delectari in aliquâ re. Ces deux mots vieillissent, on ne les dit qu’en riant. Bouh. Les Théologiens se servent quelquefois du premier en matière de dévotion & de morale.

Délecté, ée. part.

DÉLÉGATION. s. f. Terme de Jurisprudence. Commission qu’on donne extraordinairement à un Juge pour juger ou instruire quelque procès. Delegatio. Les Juges commis ne peuvent pas instrumenter au-delà de ce qui est porté par leur délégation.

Délégation d’un débiteur. Delegatio. C’est une espèce de cession par laquelle on substitue un autre débiteur en sa place. Acte par lequel on transporte une somme à prendre pour le payement d’une dette. Voyez Ulpien, l. 11. de novationibus, & delegationibus. La délégation diffère du transport, en ce que trois personnes interviennent dans la délégation, le créancier, le débiteur du créancier, & un troisième qui doit lui-même au débiteur, & auquel le débiteur transporte l’obligation de payer le créancier & le délègue pour cela : mais dans la cession & le simple transport, il suffit que le cédant & le cessionnaire soient présens. On donne des délégations à des créanciers qu’on ne peut pas payer comptant pour empêcher les poursuites. On fait une délégation sur un fermier. Le fermier accepte la délégation. L’usage des délégations est fréquent dans les contrats de vente. Quand la délégation est portée par le contrat de vente elle équipolle à une opposition.

DÉLÉGATOIRE. adj. m. & f. Se dit des rescrits, ou commissions du Pape pour commettre des Juges. Rescriptum summi Pontificis rei gerendæ quempiam eum jurisdictione præficiens. Les rescrits délégatoires doivent être adressés à des personnes Ecclésiastiques en dignité dans la Province où résident les parties.

DÉLÉGUER. v. a. Terme de Jurisprudence. Commettre quelques Juges, ou autres personnes, avec pouvoir d’examiner, de juger ou de faire quelques procédures. Delegare, mandare, aliquem rei gerenda præficere. Les commissions extraordinaires des chambres de Justice, d’Intendans, de Grand-Jours, sont composées de Juges délégués par le Roi. Un Juge délégué ne peut subdéléguer, si la commission ne lui en donne expressément le pouvoir. Les Cours Souveraines délèguent souvent des Juges inférieurs, pour faire des instructions de quelques affaires. Le Pape, suivant le Concordat, est obligé de déléguer des Juges dans le Diocèse des collitigans, autrement la délégation est abusive. Fevret.

Déléguer, signifie aussi, assigner des fonds pour le paiement d’une dette. On dit, en ce sens, qu’un homme a délégué ses revenus & ses rentes à ses créanciers. On dit aussi dans le même sens, déléguer un fermier.

Délégué, ée. part.

Délégué, est aussi quelquefois substantif, & signifie député. Les Ordinaires agissent en qualité de Délégués du Pape.

DÉLEPHAT. s. f. Terme de Mythologie. C’est le nom de la Vénus des Assyriens & des Chaldéens, ou que les Assyriens & les Chaldéens donnent à Vénus. Hésichius. Selden, De Diis Syr. Synt. II. c. 4. croit que ce nom דלפת vient de דלו, qui dans la langue de ces peuples pouvoit signifier la cohabitation de l’homme & de la femme, ou bien de דלפה, dilpha, qui signifie gutta, stilla, de même que chez les Grecs elle a été appellée Ἀφροδίτη, d’ἀφρός, spuma.

DELES. Préposit. Vieux mot. De long, à côté. Voy. LÈS.

DÉLESTAGE. s. m. Terme de Marine. Déchargement du lest d’un vaisseau. Saburiæ ejectio. Il y a des lieux marqués par les Officiers de la Marine hors des ports & des rades pour le délestage des vaisseaux. On trouve aussi dans les Ordonnances le mot de délestage pris pour celui de lest, c’est-à-dire, pour les choses qui servent à lester un vaisseau, qui en font le lest.

DÉLESTER, v. a. C’est ôter le lest du vaisseau. Saburram ejicere. On a coutume de délester les vaisseaux de deux ans en deux ans.

Délesté, ée. part.

DÉLESTEUR. s. m. Celui qui a soin du délestage des vaisseaux. Saburræ ejiciendæ præfectus.

DÉLÉTAIRE. adj. m. & f. Qui détruit & qui tue. Tous les poisons sont délétaires, puisqu’ils tuent ; mais ceux qui sont proprement délétaires, sont ceux qui dérangent les parties du corps, tels que sont les corrosifs. Le P. Léon, Carme, dit que les truffes & les champignons ont des qualités délétaires. Laissons ce mot là au P. Léon.

DELFLANDE, ou comme les Hollandois écrivent, Defflandt. Petite contrée du Comté de Hollande, qui prend son nom de Delft, comme si elle en étoit la capitale. Car la Haye, qui est aussi dans cette contrée, n’a point titre de ville, & ne passe que pour un village.

DELFT. nous ne prononçons jamais la finale t, & l’on écrit même sans cette lettre Delf. Delphi, Delfi, Delphium, Delfium. La ville de Delft est pour le rang la troisième de celles du Comté de Hollande, située sur les petites rivières de Gaech & de Schie, entre la Haye, Roterdam & Leyde. Cette ville est médiocrement grande, traversée de beaux canaux, l’un desquels, nommé Delft, lui a donné son nom. La faïence de Delft est célèbre. On voit à Delft les tombeaux de Guillaume Prince d’Orange, auteur de la révolte des Pays-bas, de l’Amiral Tromp, & de Pierre Hein, qui fut grand Amiral du Brésil, lorsque ce pays étoit aux Hollandois.

DELI. Voyez DEHLI.

Déli. s. m. Garde du Grand Visir. Satelles Polemarchi Turcici. Les Grands Visirs n’ont point un nombre de Délis fixé. Ils en entretiennent plus ou moins, selon qu’il leur plaît, ou qu’ils aiment à paroître, avec magnificence. Ils n’en ont cependant pas moins de cent communément, ni plus de quatre cens. Le Grand Visir Cuproli en entretenoit deux mille. Ces Délis sont la plupart de Bosnie & d’Albanie, parce que ces peuples sont plus fidèles que les Turcs. Ricaut, de l’Empire Ottoman.

Déli, דלי, est un mot Turc qui signifie deux choses, un fou, & un brave, un homme courageux, vaillant, résolu. C’est dans ce dernier sens qu’on le donne aux Délis, ou Gardes du Grand Visir. Leur Commandant est appelé Déli Bachi, דליבאשי, & leurs Compagnies sont appelés, Deliler Bajraghi, une enseigne de Délis, une compagnie de Délis. Les armes des Délis sont une lance, & une hache d’armes avec l’épée. Quelques-uns portent aussi des pistolets à la ceinture.

DÉLIADE. s. f. Delias. Navire des Athéniens ; qui portoit leurs Députés à Délos, pour y faire les Délies, & qui rapportoit à Athènes ceux de l’année précédente. Voyez Délies.

DÉLIAGE. s. m. Terme de Coutûmes. C’est un droit qui se lève sur les voitures, & sur différentes marchandises ou denrées, & se paie au Seigneur. Voy. le Coutumier de Leave, où ce droit est expliqué en détail, & fort au long.

DÉLIAISON. s. f. Terme de Maçonnerie, c’est un arrangement, une disposition de pierres dans un mur,