Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DÉLIES

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 195).
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DÉLIES. s. f. Fêtes qui se célébroient à Athènes en l’honneur d’Apollon. Delia, orum. La principale cérémonie de cette tête étoit une Ambassade des Athéniens à l’Apollon de Délos, ou bien un pèlerinage qu’ils y faisoient faire tous les cinq ans ; ils choisissoient pour cela un certain nombre de Citoyens, qu’on chargeoit de cette commission, & qu’on appeloit pour cela Déliastes, Δηλιάσται, ou Théores, Θεωροί, c’est-à-dire, les voyans, ceux qui vont voir. Le Chef de l’Ambassade ou de la députation, s’appeloit Archithéore, Ἀρχιθέωρος. On y joignoit quatre personnes de la famille des Céryques, Prêtres descendans de Mercure, qui demeuroient à Délos toute l’année pour y servir dans le Temple. Toute cette députation partoit sur cinq vaisseaux, sur lesquels on portoit tout ce qui étoit nécessaire pour la fête & les sacrifices. Celui qui portoit les Déliastes, ou Théores, étoit appelé Déliade, Δηλιάς, ou Théoride ; les quatre autres vaisseaux sacrés qui l’accompagnoient se nommoient le Parale, l’Antigonide, la Ptolémaïde & l’Ammonide. Quelques-uns disent que le Parale & la Déliade, sont le même vaisseau : d’autres les distinguent. Il en est aussi qui disent que la Déliade, étoit le vaisseau même sur lequel Thésée, vainqueur du Minotaure, avoit ramené les jeunes Athéniennes qui devoient être sacrifiées à ce monstre.

Les Déliastes qui montoient ce vaisseau, étoient couronnés de laurier. Quand ils étoient arrivés ils offroient d’abord un sacrifice à Apollon. Après le sacrifice, de jeunes filles dansoient autour de l’autel une danse nommée en Grec Γέρανον, & dans laquelle par leurs mouvemens embarrassés, & la manière dont elles figuroient ensemble, elles représentoient les tours & les détours du labyrinthe. Quand les Déliastes revenoient à Athènes, le peuple alloit au-devant d’eux, & les recevoit avec de grandes acclamations & de grands cris de joie. Ils ne quittoient point leur couronne que toute leur commission ne fût finie ; & alors ils alloient la consacrer à quelque Dieu dans son temple. La Déliade qui les portoit étoit aussi couronnée, & c’étoit par-là que toute la fête commençoit ; le Prêtre d’Apollon couronnoit la pouppe de ce navire. Tout le temps que duroit l’allée & le retour, & toute la cérémonie, s’appeloit les Délies & pendant tous ces jours-là les loix défendoient d’exécuter aucun criminel, privilège singulier de cette fête d’Apollon, & que n’avoient pas même celles de Jupiter, car Plutarque remarque que ce fut un jour consacré à Jupiter qu’on fit prendre à Phocion le poison auquel il avoit été condamné, & l’on attendit au contraire trente jours pour le donner à Socrate, parce que c’étoient les Délies. Voyez Thucydide, L. III. Jul Pollux, L. VIII. c. 9. sect. 26. Franc. Rossæus Arch. Attic. L. VII. c. 2. Sam. Petit. Comment. in Leg. Attic. L. I. Tit. 2. Paschal. Coron. L. IV. c. 18. & 19. Meursius Lexic. Suicerus, Θεωρός

Thucydide, L. III. p. 243. de la seconde édition d’Henri Estienne, dit que ce fut pendant l’hiver de la sixième année de la Guerre du Péloponèse que les Athéniens firent les Délies, après avoir expié l’Ile de Délos, & en avoir ôté tous les tombeaux, & ordonné que personne n’y naîtroit & n’y mourroit dans la suite, mais que l’on transporteroit tous les moribonds dans une petite Île appelée Rhénie, qui touche presque à Délos. Long-temps avant ce temps-là les Ioniens & les Insulaires voisins de l’Ionie faisoient des espèces de Délies ; c’est-à-dire, des fêtes & des jeux semblables aux Ephésies, qu’ils célébrèrent dans la suite. Il y avoit des combats gymnastiques & de poësie, ou de musique. Thucydide, à l’endroit que j’ai cité ci-dessus, en parle d’après Homere.