Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 3/161-170

Fascicules du tome 3
pages 151 à 160

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 3, pages 161 à 170

pages 171 à 180


s. Dié du Blaisois, desquels le nom latin est Deodatus ; outre que ce mot de Diey n’a nulle analogie avec Deicolus. Quelques-uns l’ont nommé S. Diel ; ce qui a un rapport assez juste avec Deicolus ; d’autres, S. Deile, ce qui n’est qu’une fausse orthographe du nom de Deel, qui est le mot d’usage parmi le peuple de la Franche-Comté. Id.

DÉELE. s. f. Nom de femme, qui a pour Patron S. Déel. Deicola. Voyez DÉEL.

DÉERNE. s. f. Vieux mot. Fille, servante.

☞ DEES. Petite ville de Transylvanie, sur les frontières de Hongrie, sur la petite rivière de Samds.

DÉESSE. s. f. Divinité fabuleuse du sexe fémmin, qu’adoroient les Payens & les Idolâtres. Dea, Diva. Les Dieux & les Déesses de l’antiquité ; Junon, Diane, Proserpine, Thétis, étoient leurs Déesses, la Victoire, &c. Vénus étoit la Déesse de l’amour, la Déesse de Paphos & d’Amathonte. La Déesse Fortune, cette capricieuse Divinité, n’étoit qu’une chimère Bouil. C’étoit le privilège des Déesses d’être représentées toutes nues sur les médailles : l’imagination demeuroit dans le respect à leur égard. S. Evr. Les Anciens ne s’étoient pas contentés de le faire des Dieux femmes, ou d’admettre les deux sexes parmi les Dieux, ils en avoient aussi d’hermaphrodites. Ainsi Minerve, selon quelques Savans, étoit homme & femme, appelé Lunus & Luna. Mithra chez les Perses étoit Dieu & Déesse, & le sexe de Vénus & de Vulcain étoit aussi douteux. De-là vient que dans leurs invocations ils disoient, si vous êtes Dieu, si vous êtes Déesse, comme Aulu-Gelle nous l’apprend, L. II. C. 28. Arnobe adv. Gent. L. III. se mocque de ces différences de sexe parmi les Dieux, & dit que Cicéron & les plus sages Grecs & Romains s’en sont mocqués.

Déesses meres. Divinités qui présidoient à la campagne & aux fruits de la terre, car on les voit représentées avec des fleurs & des fruits à la main, ayant quelquefois la corne d’abondance. On leur faisoit des offrandes de lait & de miel, & on leur sacrifioit le cochon qui fait beaucoup de mal aux champs. Le culte de ces Divinités est des premiers temps du Paganisme, & a été le plus universellement répandu. Elles avoient en Sicile un Temple très-ancien, dans la ville d’Enguie, où l’on prétendoit qu’elles étoient apparues. Le culte de ces Déesses passa d’Egypte dans la Grèce, ensuite à Rome, & de-là chez les Gaulois, chez les Germains, chez les Espagnols ; car on trouve par tout des traces de ce culte.

On appelle figurément une belle femme, une Déesse. Cette Reine avoit une majesté, un port de Déesse. C’est la Déesse des beautés. Voit. Belle Déesse que j’adore, ne pleurez plus. Id.

DÉESTANCE. s. f. Vieux mot. Douleur, tristesse.

DEF.

DÉFÂCHER. SE DÉFÂCHER, v. récip. S’appaiser après s’être mis en colère. Iram sedare, ponere, placare. Il n’a guère d’usage que dans ces phrases proverbiales ; s’il est fâché, qu’il se défâche. S’il se fâche, il aura la peine de se défâcher. Il aura deux peines, de se fâcher & de se défâcher.

Défâché, ée, part.

☞ DÉFAILLANCE. s. f. Diminution des forces vitales qui tendent à s’éteindre. Animæ defectio. Défaillance de nature, état de foiblesse où se trouve un homme, causé par la vieillesse, par les maladies, ou par le défaut de vivres. Je ne veux pas les renvoyer sans avoir mangé, de peur qu’ils ne tombent en défaillance sur le chemin. Port-R.

☞ On confond dans l’usage ordinaire foiblesse, défaillance, évanouissement, pamoison, syncope ; & la plupart de ces mots, sont donnés comme synonymes dans nos Dictionnaires. Il y a pourtant des nuances qui les distinguent. Foiblesse peut-être regardé comme le terme générique qui reçoit les différentes dénominations de défaillance, d’évanouissement ou de syncope, suivant les différens degrés où elle est portée. Syncope enchérit sur évanouissement, qui enchérit à son tour sur défaillance. La syncope, est le plus haut degré de la diminution des forces. Voyez Évanouissement, Syncope.

Défaillance, est aussi un terme de Chimie, qui signale la liquéfaction, ou la résolution d’un sel, ou de quelque autre corps semblable, en liqueur, qui se fait en l’exposant à la cave, ou dans quelque lieu frais & humide. Dissolutio. M. Harris dit Deliquium ; de l’huile de tartre per deliquium. Ce qu’on appelle huile de tartre par défaillance, n’est autre chose que le sel de tartre qui est devenu liquide, étant exposé sec à l’air libre.

Défaillance, se prend aussi en Astronomie pour éclipse. Deliquium.

DÉFAILLANT, ante. adj. Terme de Pratique. Qui ne comparoît pas en justice sur les assignations données. Qui vadimonium deserit, non obit. Tous les défaillans sont condamnés aux dépens. Défaillans se dit en matière civile, comme contumace en matière criminelle.

DÉFAILLIR. v. n. & défectif, qui n’est plus usité qu’en certains temps, & sur-tout à l’infinitif. On le peut conjuguer ainsi, je défaus, nous défaillons, je défaillois, je défaillis, j’ai défailli, je défaudrai, que je défaille, je défaudrois. Il signifie, manquer de forces, ou manquer simplement. Deficere. On ne peut plus marcher quand les jambes défaillent. Ce vieillard est venu tout d’un coup à défaillir. Se sentir défaillir les forces, l’esprit, la vue. Voit. Ils vouloient rebrousser chemin avant que le ciel & la lumière vinssent encore à leur défaillir. Vaug. Je défaus, je défaudrai, je défaudrois, sont de tous les temps qu’on a marqués ci-dessus, le moins en usage ; & l’on ne croit pas qu’on puisse s’en servir, si ce n’est en badinant. On diroit je tombe en défaillance, je tomberai, je tomberois en défaillance. Les autres sont moins intolérables, cependant on ne s’en sert plus aujourd’hui.

DÉFAIRE, v. a. Détruire une chose faite, faire qu’elle ne soit plus ce qu’elle étoit. Faire & défaire sont deux actions opposées. Destruere. On défait en un temps ce qu’on a fait en un autre. Il se dit de toutes sortes d’ouvrages. Quand un Maçon défait un jour ce qu’il a fait l’autre, ce n’est pas le moyen d’achever. J’ai défait la tapisserie, la broderie, la fleur que j’avois commencée ; elle ne me plaisoit pas. Pénélope, pour tromper ses amans, défaisoit pendant la nuit sa toile. Ximenès ne portoit point de linge, & dormoit ordinairement sur la dure, défaisant tous les matins son lit, comme s’il eût couché dedans. Fléchier.

Quand je pense être au point que cela s’accomplisse,
Quelque excuse toujours en empêche l’effet,
C’est la toile sans fin de la femme d’Ulysse,
Dont l’ouvrage du soir au matin se défait. Malh.

☞ On le dit dans ce sens pour rompre une chose conclue & arrêtée. Dissolvere. Défaire un mariage, défaire un marché.

☞ On le dit de même pour délier, dénouer. Solvere. Le bruit couroit par-tout que celui qui pourroit défaire ce nœud, auroit l’Empire de l’Asie. Abl. Ayant fait plusieurs efforts pour défaire les nœuds, il les coupa. Vaug.

En ce même sens on l’emploie à la place de faire mourir, & on dit qu’un homme s’est défait lui-même, qu’une femme a défait son fruit. Mortem sibi vel alteri consciscere.

☞ DÉFAIRE, en termes de guerre signifie, dissiper une armée, ou l’affoiblir au point qu’elle ne puisse plus tenir la campagne. Expugnare, profligare. Alexandre défit les Perses en trois batailles rangées. Samson avec une mâchoire d’âne défit les Philistins.

Défaire, dit plus que battre, & moins que mettre en déroute, qui renferme de plus l’idée d’une fuite précipitée & d’un désordre général de l’armée défaite.

Défaire, se dit des armées : battre des détachemens. Voyez Vaincre, Battre, Déroute.

En ce sens on dit au figuré, Défaire quelqu’un dans la dispute, pour dire, le mettre hors de combat, & le réduire à n’oser, ou ne pouvoir plus parler. Expugnare, superare, perturbare. Ce répondant a été défait dès le premier argument. Ce criminel s’est défait au milieu de son interrogatoire.

Se défaire, dans un sens tout semblable, veut dire, être étonné, surpris, déconcerté, perdre la présence d’esprit. La Comtesse se mit à rire, & ne se défit point de mon effronterie. Bussy Rab. Dom Emmanuel de Lira se brouilla, sans néanmoins se défaire & s’arrêter, ni tomber en confusion. M. Pelisson. Lettr. Histor.

☞ Dans cette acception défaire ne paroît pas d’un style bien correct, & je ne conseillerois à personne de s’en servir.

On diroit mieux que la maladie a bien défait quoelqu’un, pour dire qu’elle l’a bien changé, qu’il est bien amaigri, atténué.

On veut encore dans le Dictionnaire de l’Académie. Qu’on dise qu’un vin se défait, pour dire qu’il s’affoiblit qu’il perd de sa qualité. Ces sortes de vins-là ne sont pas de garde, ils se défont aisément. On peut l’employer comme terme de marchand de vin.

Se défaire d’une chose, quitter, abandonner une chose dont on ne veut plus. Je me suis défait de cette maison, qui me coûtoit trop à entretenir. Il s’est défait de son bénéfice, moyennant pension. Il se faut défaire de toutes ses mauvaises habitudes. Quand on a des défauts dont on ne se peut défaire, il ne faut songer qu’à les cacher. S. Evr. Défaites-vous de vos scrupules. Port-R. On se défait difficilement de l’amour propre. S. Evr. Je veux me défaire de mon humeur triste & mélancholique. P. le Bos. Lorsque la passion s’est une fois emparée de notre cœur, on tache en vain de s’en défaire S. Evr. Il faut obliger les Hérétiques à se défaire de leur esprit, en leur faisant voir sa foiblesse. Maleb. L’esprit ne se défait pas aisément des opinions dont il est bien préoccupé.

Défaire, en ce sens, signifie encore, Débarrasser, délivrer quelqu’un de ce qui embarrasse, de ce qui nuit, de ce qui est à charge. Ne voulez-vous donc pas me défaire de votre Marquis incommode ? Mol. Il s’est défait adroitement de ses gardes, il s’est échappé. Veux-tu te défaire d’un homme, prête-lui de l’argent, & tu ne le verras plus ? Gon. Se défaire de la fièvre. Se défaire d’un domestique, chasser, congédier un domestique dont on est mécontent.

Défaire, se dit aussi pour, se débarrasser de quelqu’un en le tuant, en le perdant tout-à-fait. Perdere, interficere. Darius, pour se défaire d’Alexandre, sollicita même la fidélité des Domestiques d’Alexandre. Vaug.

Défaire, avec le pronom personnel, signifie, dans le Commerce, vendre. Vendere. Ce cheval est beau il vous sera aisé de vous en défaire. Ce Marchand a quitté le trafic, & s’est défait de toute sa marchandise en faveur de son neveu. Ce curieux ne veut point se défaire de ce tableau.

Défaire, signifie figurément, Effacer par un plus grand éclat, par plus de mérite ou de beauté. Superare. Les Dames n’aiment point avoir de belles suivantes qui les défassent. Les couleurs vives & éclatantes défont celles qui sont plus douces. L’écarlate défait toutes les autres couleurs. Le diamant défait toutes les autres pierres précieuses. Cet homme défait tous les autres par la supériorité de son esprit. Je trouve le verbe défaire, employé dans cette acception dans tous nos Dictionnaires, même dans celui de l’Académie. Malgré cette autorité je ne voudrois pas m’en servir. Quand nous avons des mots propres pour rendre ce que nous voulons dire, pourquoi en employer d’autres qui ne présentent point, ou qui ne présentent qu’inparfaitement l’idée accessoire que nous y attachons. Quand je dis qu’un homme défait tous les autres, pour dire qu’il les efface, cette expression est au moins louche.

Défait, aite. part. Il a quelques significations du verbe, en latin comme en françois. Un lit défait. Une armée défaite. Un homme défait, détruit.

Défait, signifie aussi, un homme amaigri, exténué par quelque maladie, pâle, abattu. Pallidus, macilentus, exsanguis. Il n’est pas bien remis de sa maladie, il est encore tout défait. Ce criminel parut si défait lors de sa capture, que cela donna un grand soupçon contre lui. On peint les Hermites avec un visage défait, exténué par les jeunes & les macérations. César averti de se méfier d’Antoine & de Dolabella, répondit qu’il ne falloit rien appréhender de ces visages fardés & enjoués, mais de ces visages pâles & défaits, tels que Cassius & Brutus. Abl.

☞ DÉFAITE. s. f. Echec que reçoit une armée tellement affoiblie par la perte d’une bataille, qu’elle ne peut plus tenir la campagne. Clades. Ajoutez à cette idée celle d’une suite précipitée & d’un désordre général, c’est la déroute. Les Romains apprirent la guerre, d’Annibal, par l’expérience de leurs défaites, & par des réflexions sur leurs fautes. S. Evr. Les seules défaites de Mithridate ont presque fait toute la gloire des plus grands Capitaines Romains. Racine.

Défaite, signifie encore Excuse artificieuse, échappatoire. Excusatio, tergiversatio, declinatio. Ce valet est un rusé menteur, qui a toujours des défaites prêtes. Un mauvais payeur a mille défaites pour amuser & renvoyer ses créanciers. Cette raison n’est pas pertinente, ce n’est qu’une défaite.

Défaite, dans le Commerce, signifie la même chose que débit, & sa signification est toujours modifiée par les épithètes qu’on y joint. Venditio. Marchandises de bonne ou de mauvaise défaite, qui se vendent facilement ou difficilement. Le bled est une marchandise de bonne défaite de bon débit. On dit d’une belle fille, qu’elle est de bonne défaite, qu’on lui trouvera bientôt un bon parti. L’usage permet qu’on dise, cette fille est de défaite, c’est-à-dire, qu’on peut aisément s’en défaire, la marier. Mais la défaite exprime figurément qu’elle s’est rendue. Défaire, se défaire, un visage défait, un ennemi défait, défaite d’une marchandise, défaite d’une armée, toutes acceptions différentes.

DÉFAIX. s. m. Terme de Coutumes. Lieu défendu. Une garenne, un étang qui appartient au Seigneur, est un défaix. Prohihitus.

DÉFALCATION. s. f. Terme de Commerce. Déduction, soustraction qu’on fait d’une petite somme sur une plus grande. Toute défalcation faite, vous me devez tant de reste.

DÉFALQUER, v. a. Déduire, soustraire, retrancher une petite somme d’une plus grande. Aliquid de summa deducere. Ce marchand a beaucoup de bien ; mais il en faut défalquer ses dettes.

Ce mot vient de falx, latin, qui signifie faulx, d’où les Jurisconsultes disent aussi qu’est venu le nom de la Loi Falcidie : eò quòd falcem injiceret legatis. D’autres le sont venir de l’Espagnol defalcar.

Défalqué, ée. part. De summa deductus.

☞ DÉFAVEUR. s. f. Cessation de faveur. Voy. faveur. On le dit des personnes & de certaines choses qui entrent dans le commerce. La défaveur d’un Courtisan. La défaveur des papiers publics.

Car de faveur aux moindres apparences,
Comme chacun vous courtise & vous suit,
En défaveur aussi chacun vous suit.

DÉFAVORABLE. adj. Préjudiciable, désavantageux, qui n’est point favorable. Damnosus. C’est un esprit de vanité qui a établi chez les Européens l’injuste droit d’aînesse, si défavorable à la propagation. Lettres persanes. Le dessein du P. Brumoy dans son Théâtre des Grecs, est de citer de nouveau les Poëtes Grecs au Tribunal du public, afin qu’ils soient jugés avec quelque connoissance de cause, sans égard aux autorités favorables, ou défavorables. Journ. des sav. Mars 1731. L’expérience fut fort défavorable au nouvel Opérateur, & funeste à la plus grande partie des malades qu’il tailla. Ac. des Sc. 1699. Hist. p. 30. Ce mot est de la façon de M. de Fontenelle. Jamais le talent de l’Orateur ne paroît avec plus d’avantage que dans une cause défavorable. Rollin.

☞ Bien des gens comdamnent ce mot, je n’en vois pas la raison. Depuis Voiture de bons écrivains s’en sont servis.

DÉFAVORABLEMENT. adv. D’une façon fâcheuse, disgracieuse & fort opposée à celle que l’on espéroit. Damnosè. L’Abbé de S. Pierre a été traité bien défavorablement par ses confrères les Académiciens. Mon procès a été jugé mais il ne le pouvoit être plus défavorablement pour moi. Il n’est pas usité.

DÉFAUT. s. m. Imperfection, vice naturel, ou acquis. Ces mots ne sont synonymes, qu’en ce qu’ils désignent en général une qualité repréhensible, un manquement d’une chose. Mais ils ont chacun leur idée propre qui les caractérise dans le physique & dans le moral. Défaut n’exprime que ce qu’il y a de mal dans la chose provenant d’un écart positif de la règle, sans aucun rapport à l’Auteur ; une mauvaise qualité de l’esprit, ou une mauvaise qualité purement extérieure. Défectuosité exprime un mal qui n’est pas un mal par lui-même, mais uniquement par rapport au but de la chose, ou au service qu’on s’en propose. Vice dit un mal qui naît du fond ou de la disposition naturelle de la chose & qui en corrompt la bonté, presque toujours une mauvaise qualité morale qui procède de la dépravation ou de la bassesse du cœur. Voyez ces mots & les syn de M. l’Abbé Girard. Quelques connoisseurs ont observé qu’il y avoit dans la chapelle de Versailles un défaut de proportion, en ce que la grandeur du vaisseau ne repondoit pas à l’élévation. La difformité & la timidité sont des défauts. Vitium. Mendum. Il y a des gens qui n’ont de l’esprit que pour trouver des défauts dans les meilleures qualités des autres. Quand on étudie ses défauts, c’est une marque assurée qu’on les veut surmonter. Boss. Nous avouons nos défauts, pour réparer par notre sincerité le tort qu’ils nous font dans l’esprit des autres. Rochef. Il n’appartient qu’aux grands d’avoir de grands défauts Id. Nous n’avouons nos petits défauts, que pour faire comprendre que nous n’en avons pas de plus grands. Id. Nous aimons à avouer de nous-mêmes les défauts des gens d’esprit. Nicol. Le public n’a que faire de nos querelles, il a besoin d’être instruit de la vérité, & non pas de nos défauts particuliers. Bail. C’est s’accuser d’un défaut que de se scandaliser qu’on le reprenne. Mol. Une personne raisonnable doit apprendre à connoître ses propres défauts, & à supporter ceux d’autrui. S. Evr. L’amour ne nous laisse voir les défauts d’une Maitresse que sous les couleurs de la vertu. S. Evr. On doit plus estimer celui qui cache ses défauts avec honte, que celui qui les publie avec effronterie. Maleb.

Ainsi donc Philosophe, à la raison soumis,
Mes défauts désormais sont mes seuls ennemis. Boileau.

Défaut, se dit aussi des manquemens, de la privation, de l’absence d’une chose. Defectus. Défaut d’esprit, de mémoire. Ha ! que je vois de défauts dans votre passion, & que vous savez mal aimer. Lett. Port. C’est un défaut de la langue, c’est un mot qui lui manque, c’est un défaut de lumière, un faux jour qui empêche que ce tableau ne paroisse.

On appelle le défaut de la cuirasse, son extrémité, l’endroit où elle finit. Commissura, extremæ partes. Les gens-d’armes étoient obligés de le trouver pour percer leur ennemi qui étoit armé à l’épreuve. On le dit figurement du foible d’un homme, de l’endroit par où il se peut laisser prendre. On le dit d’autre chose que d’une cuirasse. Ce Chasseur a tiré ce sanglier au défaut de l’épaule ; il l’a blessé au défaut de l’épaule. On dit aussi au défaut du bras, au défaut de la cuisse, pour marquer les endroits où ces parties se terminent.

En termes de Chasse, on dit que les chiens sont en défaut, quand ils ont perdu la piste de la bête qu’ils chassent. Error in investigatione feræ.

On le dit aussi des hommes en ce sens. Les fautes des sots sont quelquefois si lourdes & si difficiles à prévoir, qu’elles mettent les sages en défaut, & ne sont utiles qu’à ceux qui les font. La Bruy. Fallere.

Défaut, en termes de Palais, signifie manquement, refus, faute de comparoître en Justice aux termes des assignations qui ont été données. Vadimonium desertum, non obitum. Ce qu’on appelle contumace en matière criminelle, on l’appelle défaut en matière civile. Il y a des défauts à faute de comparoir par un défenseur, à faute de défendre, & à faute de plaider. Le défaut faute de comparoir est celui qui se donne au demandeur contre celui qui est assigné, & qui, sur l’assignation, ne se présente pas dans les délais de l’Ordonnance.

☞ Ce défaut se prend au greffe, se fait juger après un autre délai, ce jugement adjuge les conclusions au Demandeur avec dépens. Quand c’est le Demandeur qui manque à la comparution, on appelle cela congé.

Défaut faute de défendre, est celui que prend le Demandeur contre le Défendeur qui s’est présenté sur l’assignation, mais qui n’a pas fourni de défenses dans les délais de l’Ordonnance.

☞ Ce défaut se donne à l’audience, & le profit s’en juge sur le champ, dans les jurisdictions inférieures. Dans les Cours souveraines il se lève au Greffe, est signifié au Procureur du défaillant, & jugé huitaine après : & s’il signifie des défenses entre le jugement & le défaut, sa partie en sera quitte pour réfonder les dépens.

Défaut faute de venir plaider, est celui qui se donne au Demandeur, à l’audience, contre le Défendeur qui s’est présenté & a fourni des défenses, mais qui a manqué de comparoir à l’audience pour plaider.

Défaut en matière criminelle. Voyez contumace. Un défaut sauf trois jours. Un défaut pur & simple. Défaut sauf l’heure, est celui qui est prononcé à l’Audience, & rabattu lorsque l’Avocat ou le Procureur se présente pour plaider avant que les Juges soient levés de leurs sièges. Il faut réfonder les dépens des défauts & contumaces. Un Criminel ayant sommé le Lieutenant Criminel de Caën, qui étoit son Juge, de comparoître dans un an devant Dieu, je ferai défaut, répondit le Lieutenant Criminel.

On le dit aussi des manquemens qu’on fait aux autres choses ordonnés en Justice, ou des procédures ordinaires. Un défaut à faute de conclure un procès. Défaut à faute de donner caution, de faire enquête, &c.

Au défaut. adv. Au lieu de, à la place de. Alterius loco. Au défaut de la force, il faut employer la ruse. On dit proverbialement, que chacun à sa besace, où il met ses défauts derrière le dos, & ceux d’autrui par devant.

DÉFAUX. s. m. Terme de Coutumes. Amende qui est due au Seigneur Censier pour le défaut de payement du cens. Multa pro censu non persoluto.

☞ DÉFÉCATION. s. f. Terme de Chimie & de Pharmacie. Defecatio. Dépuration d’une liqueur, qui se fait par la chute spontanée des parties qui la rendoient trouble. Acad. Fr. On le dit principalement des sucs des fruits, & de certaines plantes qui ne passent point par le filtre, & ne s’eclaircissent point par l’ébullition. Les parties qui se précipitent au fond du vase s’appellent fèces, dépôt ou résidence. Voyez Décantation.

DÉFECTIF, ive ou DEFECTUEUX. adj. Terme de Grammaire. Verbe qui n’a pas tous ses temps & ses modes. Verba defectiva, verba modis quibusdam & temporibus curentia.

☞ On le dit aussi des noms qui manquent de quelque nombre ou de quelque cas.

☞ DÉFECTION. s. f. Abandonnement d’un parti auquel on est lié, ou des intérêts d’une personne à laquelle on est attaché. Ce mot est formé du latin deficio, je manque. Défection des sujets qui abandonnent leur Souverain. Défection des soldats qui abandonnent leur Général. Défection des alliés qui abandonnent leurs alliés. Defectio. Le Roi eut la douleur d’apprendre la défection de tous ses sujets Boss.

Défection, se dit aussi en Astrologie pour éclipse. La défection de la lune, du soleil. Defectus, deliquium solis, lunæ.

Défection, se dit figurément en ce dernier sens. On répand avec affectation une prétendue prophétie du Cardinal de Cusa, qui marque la défection de l’Eglise pour les premières années du siècle où nous sommes. Mém. de Tr. La défection de l’Eglise est chimérique. Les promesses de J. C. be sauroient manquer. Les portes de l’Enfer ne prévaudront jamais contr’elle. D’où conclut-il la défection du Pape ? C’est du reniement de Saint Pierre. N’a-t-il pas vu que Saint Pierre n’étoit qu’un particulier, quand il commit ce crime ? J. C. vivant encore sur la terre gouvernoit son Eglise par lui-même. Saint Pierre n’en fut le chef qu’après la mort du Sauveur. Mais devenu un autre homme, c’est lui qui affermit la foi des Apôtres sur la résurrection du fils de Dieu. Mém. de Trev.

DÉFECTUEUSEMENT. adv. D’une manière défectueuse.

DÉFECTUEUX, euse. adj. Ce qui a quelques défauts, ce qui manque des conditions réquises. Vitiosus. Un livre défectueux : un verbe défectueux. Les définitions d’Aristote sont très-défectueuses. Marchandises défectueuses.

On le dit dans ce sens en style de Pratique. Un testament est défectueux quand si n’est pas revêtu de toutes ses solemnités. Un acte est défectueux, lorsqu’il est imparfait, ou qu’il contient des clauses vicieuses.

☞ DÉFECTUOSITÉ. s. f. Terme qui exprime quelque chose qui n’est pas mal par lui-même, mais uniquement par rapport au but de la chose ou au service qu’on s’en propose. La roture est en France une défectuosité qui prive les sujets de beaucoup de places brillantes, dont ils seroient néanmoins capables, comme la noblesse en est une en Suisse qui empêche d’avoir part au gouvernement. Voyez défaut. C’est une défectuosité dans un contrat, de n’être point paraphé en toutes ses apostilles. Un Auteur moderne se plaint des défectuosités de l’Histoire Ecclésiastique Anglo-Saxone de Bède. Larrey.

DÉFENDANT. s. m. Nom d’un Saint de France. Defendens. Voyez M. Chastelain, Martyr. au 2 de Janvier, p. 36. & 43.

DÉFENDEUR. s. m. Défenderesse. s. f. Terme de Palais. Celui qui est ajourné par devant le Juge, pour être condamné aux fins & conclusions du demandeur, lequel fournit des défenses pour être déchargé de la demande qui est intentée contre lui. Reus, rea. Le défendeur est opposé au demandeur. Souvent dans la poursuite d’une affaire le demandeur est aussi défendeur, & le défendeur devient demandeur. Défendeur en requête civile, est celui qui soutient le jugement qui a été rendu contre celui qui a obtenu des lettres pour faire remettre les choses en l’état qu’elles étoient auparavant. Défendeur en la forme, & demandeur au fond, ou bien demandeur en l’une, & défendeur en l’autre, se dit lorsqu’il s’agit non-seulement de la chose qui a donné occasion à la contestation, mais encore de la validité de la procédure. Défendeur originaire, est celui lequel après avoir été assigné, demande un délai pour appeler un garant. En matière criminelle, on dit défendeur & accusé.

DÉFENDRE, v. a. Je défens, je défendis, j’ai défendu, je défendrai, que je défende. Mettre quelqu’un ou quelque chose à couvert du mal qu’on veut lui faire, en répoussant les attaques, en s’opposant à ce qu’on fait, à ce qu’on dit. Ce terme ne dit point précisément la même chose que protéger & soutenir. On est protégé par les autres, par ceux qui ont de la puissance. On peut être défendu par ses égaux, par ses inférieurs : on se défend soi-même. Défendre annonce une action plus marquée que soutenir. Voy. ces mots. Il est du droit naturel de défendre la personne, son honneur & les biens, contre toutes sortes d’agresseurs. Ce Cavalier s’est bien défendu, il a vendu bien cher sa vie. Celui qui tue par la nécessité de se défendre n’est point punissable, il y a une entière impunité pour les homicides involontaires. S. Evr.

Défendre, se dit, dans le même sens à la guerre, quand on est commis pour garder, pour conserver un poste, une place pour répousser les attaques, s’opposer à ceux qui veulent s’en rendre maîtres. Ce Gouverneur a acquis beaucoup de gloire à défendre cette ville. Cette garnison s’est mal défendue, a capitulé trop tôt. Après avoir chassé les ennemis de la contrescarpe, qui ne la défendirent qu’à coups de mousquet. Bussi Rab.

Défendre, signifie aussi Flanquer. Le flanc défend la courtine, & la face du bastion opposé. Cette demi-lune flanque, défend cet ouvrage à cornes, à couronne. Les fortifications anciennes sont aisées à enlever, elles ne sont défendues de rien, il n’y a rien qui les flanque. Défendre a aussi sa signification propre en ces occasions, & quand on dit que le flanc défend la courtine, on entend que non seulement il est à côté, mais aussi qu’il en empêche les approches ; c’est-à-dire que ceux qui sont placés sur le flanc d’un bastion découvrent ceux qui attaquent la courtine, peuvent les tuer, les empêcher d’en approcher.

Défendre, avec le datif du nom de la chose, se dit, en style barbare du Palais, pour signifier, Fournit des défenses, donner des réponses aux demandes, aux productions de sa partie. Respondere, confutare. Il n’a pu se dispenser de procéder avec lui seul, & de défendre aux demandes qui avoient trait à cette succession. Brousse. Il a été condamné faute de défendre. Voyez défaut.

Défendre, se dit aussi en toutes sortes d’autres contestations. Propugnare. Socrate prend tous les partis que l’on veut, soit pour défendre, soit pour attaquer. S. Evr. Ce Bachelier a bien défendu ses thèses, & repondu à toutes les objections qu’on lui a faites. Il ne s’est pas trop défendu de cette galanterie, il en demeure tacitement d’accord. J’ai fait ce que j’ai pu pour me défendre de cette commission, pour m’en exempter. Cette marchandise est bonne, il n’y a qu’à se défendre du prix, disputer sur le prix. De pretio pugnare.

Défendre, signifie encore employer son crédit, son autorité, son éloquence, pour soutenir les droits ou l’innocence de quelqu’un. Tueri, defendere, tutari. Vous avez bien défendu mes intérêts. César opprima la liberté publique que défendoit Pompée. Bouh. La colère est comme une tutrice que la nature a donnée à l’homme pour la conservation de ses droits : elle lui donne le désir & la force de les défendre. M. Esp. Cicéron défendit Milon, qu’il ne put justifier. Défendre suppose seulement le désir de réussir.

Défendre, signifie encore, se parer, se garantir. Tutari, defendere, tueri ab aliquâ re. Il faut bien se vêtir en hiver pour se défendre du froid. Les femmes portent des masques pour se défendre du hâle. Les chevaux ont bien du mal à se défendre des mouches en automne. On met des rideaux aux fenêtres pour se défendre du grand jour. Cette colline défend ma maison du mauvais vent.

On dit, sur la mer, défend du Sud, défend du Nord, lorsqu’on commande au Timonier de ne pas gouverner de côté-là.

DÉFENDRE, signifie encore, interdire l’usage de quelque chose. Interdicere, vetare, prohibere. Les commandemens de Dieu défendent d’idolâtrer, de jurer, de tuer, de porter faux témoignage. Ceux de l’Eglise défendent la chair en Carême. Un Médecin défend le vin aux malades. Les Magistrats défendent les Brelans, l’Occa, la bassette. On a défendu le commerce avec les étrangers, les dentelles & manufactures étrangères. La Loi naturelle, la raison, nous défend de faire à autrui ce que nous ne voulons pas qu’il nous fasse. On dit aussi, Défendre sa maison à quelqu’un, pour dire, lui en interdire l’entrée. Défendre un livre, c’est de la part des puissances Ecclésiastiques & autres, en empêcher la lecture, le débit, l’impression. Défendre une sorte de marchandises, c’est en empêcher la vente, ou le débit, à l’égard des Marchands, & l’usage, à l’égard des autres.

☞ Dans ce sens dépendre & prohiber sont synonymes, avec cette différence que défendre a une signification bien plus étendue que prohiber qui ne s’applique qu’aux choses qui sont défendues par une loi humaine & de police.

On dit figurément & proverbialement, faire quelque chose à son corps défendant, pour dire, faire quelque chose avec répugnance, avec contrainte. Ac. Fr.

On dit proverbialement, bien attaqué, bien défendu quand le combat ou la dispute ont été bien opiniâtres.

☞ Se défendre, en termes de manège, se dit d’un cheval qui, en sautant ou en reculant, résiste à ce qu’on veut qu’il fasse.

Défendu, ue. part. & adj. Defensus, vetitus, prohibitus. Il y a toujours dans l’ame des plus grands hommes quelque endroit mal défendu. Vill. Livre défendu, marchandise défendue. Voy. Défendre.

En termes de Blason, on dit, qu’un sanglier est défendu d’une telle couleur, ou d’un tel métal, quand sa défense ou sa dent de dessous est d’un autre émail que son corps. Dentibus instructus.

DÉFENDS. s. m. Terme des Eaux & forêts, qui se dit des bois dont on a défendu la coupe, & dont l’entrée est défendue aux bestiaux. Un tel bois est en défends, c’est-à-dire, la coupe en est réservée pour quelque occasion importante, le bois est trop jeune pour y laisser entrer les bestiaux. On dit aussi à la campagne, que vides terres, c’est-à-dire, qui ne sont point fermées ni closes, sont en défends depuis la mi-Mars jusqu’à la Sainte-Croix de Septembre. En autres temps elles sont communes, c’est-à-dire, qu’on y peut mener paître ses bestiaux. Les chèvres, les porcs, les oies & autres bêtes mal-faisantes, sont toujours en défends, pour dire qu’il n’est pas permis de les mener dans les terres, dans les prés, &c. On les appelle en Latin defensa, & on les nomme pareillement héritages défensables.

DÉFENSABLE. adj. Terme de Coutumes. Un lieu défensable, qu’on appelle devezium dans les titres, les chartes, &c. est un lieu où il n’est permis qu’à quelques personnes de faire certaines choses, qu’il est défendu à tous autres d’y faire, par exemple, un bois où il n’est permis qu’au propriétaire de faire paître ses bestiaux, est un lieu défensable. Prohibitus, vetitus.

DÉFENSE. s. f. Action par laquelle on défend, & on résiste aux violences de ceux qui attaquent. Defensio. La défense de son corps & de ses biens est permise par les loix. Il n’a pas eu le loisir de se mettre en défense, de mettre l’épée à la main. Les Princes d’Allemagne se sont ligués pour la défense commune. La pudeur a été donnée aux femmes pour servir de garde & de défense à leur honneur. S. Evr.

Défense, signifie aussi protection, justification. Dieu prend en main la défense des innocens & des foibles, de la veuve & des orphelins. Cet Auteur a pris la défense de son confrère, il a fait son apologie. Cet Orateur a entrepris la défense de cette proposition, il la soutient hautement. Costar a fait la défense des Œuvres de Voiture, & Ogier celle des Œuvres de Balzac.

Défense, en termes de guerre, signifie en général la résistance que font les troupes aux attaques de l’ennemi.

☞ La défense d’une place c’est l’art de résister aux attaques de l’ennemi qui veut s’en emparer. Cette garnison a fait une belle, une longue défense ; pour dire a soutenu un long siége.

Défenses, en termes de fortification, c’est tout ce qui sert à couvrir les ouvrages & les soldats qui défendent la place. Les parapets, les flancs, les casemates, les ravelins, &c. sont défenses : & on dit d’une ville, que ses défenses sont ruinées, quand le canon a abattu ou détruit ces ouvrages, quand les soldats ne peuvent plus tirer à couvert. Propugnacula, munimenta. On avoit abattu avec des béliers les principales défenses. Vaug. Il fallut rétablir les défenses de la place. Ablanc.

On appelle aussi la ligne de défense, celle qui flanque un bastion, & qui est tirée du flanc qui lui est opposé. Linea defensionis. La ligne de défense ne doit être que 120. toises, c’est-à-dire, à la portée du mousquet. Il y a des lignes de défense rasantes & fichantes. Voy. Ligne. Etre en défense, ou mettre en défense, c’est-à-dire, être ou mettre en état de défense. Le logement n’est pas encore en défense. On a mis la redoute en défense.

On dit, en termes de Blason, qu’un hérisson est en défense, lorsqu’il est roulé en peloton, ainsi qu’il a coutume de se mettre pour éviter d’être pris.

Défense, en termes de Palais, se dit des premières écritures qu’on fournit dans un procès contre un demandeur. En général les défenses sont les moyens qu’on emploie contre une demande. Defensio. Les appointemens en droit se donnent sur des demandes & défenses. On donnoit ci-devant des jugemens par défaut, qu’on nommoit des deboutés de défenses.

Défenses, signifie aussi un jugement qu’on obtient pour empêcher l’exécution d’un autre jugement. On donne des arrêts de défenses particulières pour lier les mains à des Juges, ou à des Officiers, pour empêcher qu’ils ne continuent l’instruction d’un procès, l’exécution d’un jugement, & aux parties, pour empêcher qu’elles ne passent outre à un mariage, à la construction de quelque bâtiment, ou autre chose semblable. En matière criminelle, un accusé pour toutes écritures donne des défenses par atténuation. Ce sont des exceptions proposées par l’accusé, pour détruire les raisons, les moyens & les preuves dont se sert l’accusateur, pour prouver que l’accusé a commis le crime dont il s’agit.

☞ Ces sortes de défenses sont abrogées par l’Ordonnance criminelle ; mais on peut présenter requête pour servir de défenses, raisons, moyens contre les pièces justificatives de l’accusateur.

Défenses au contraire. Ce sont celles que le Juge permet de proposer pour contredire les moyens mis en avant pour la partie adverse.

Défense, se dit aussi des publications qui se font en Justice pour interdire l’usage de quelque chose, & pour empêcher qu’on ne la fasse. Défense en ce sens est la publication qui est faite d’une chose par un Edit, une Ordonnance, une Déclaration, un Arrêt, &c. Interdictum, interdictio. Il y a des défenses faites par les loix divines & humaines, de nuire à son prochain. On a publié la défense des dentelles d’or & d’argent. La Cour fait très-expresses inhibitions & défenses à toutes personnes de, &c. Les défenses ont été publiées à son de trompe.

☞ Nous avons déjà observé que le terme de défense est beaucoup plus étendu que celui de prohibition : que le premier s’applique également à quelque loi que ce soit, divine ou humaine qui défend de faire une chose, au lieu que le dernier ne se dit que d’une loi humaine qui défend de faire quelque chose.

Défenses générales, sont les Lettres ou les Arrêts que les débiteurs obtiennent contre tous leurs créanciers pendant un temps, pour faire homologuer un contrat, ou pour l’entérinement du répit qu’ils demandent.

Les Mâcons & les Couvreurs appellent aussi défense, le signe fait en forme de croix, qu’ils attachent au bout d’une corde, qu’ils laissent pendre de dessus le toit pour avertir les passans qu’ils travaillent sur la maison. Signum pensile. La défense n’est quelquefois qu’une latte attachée à une corde qui la tient suspendue. Mettre la défense, retirer la défense.

Défenses, en termes de Marine, sont de grosses pièces de bois longues de 15. à 20. pieds, qui sont amarrées à l’avant & à l’arrière du vaisseau pendant le combat, pour empêcher l’abordage des ennemis & des brûlots. Elles servent aussi dans un mouillage pour empêcher que les vaisseaux ne s’endommagent en se choquant les uns les autres. Ces pièces de bois s’appellent aussi des boute-hors.

On appelle aussi défenses, des bouts de mâts, des bouts de câble, ou de grosses cordes tressées qu’on laisse pendre le long des flancs du vaisseau, quand il est à l’ancre auprès de plusieurs bâtimens, pour rompre leur choc quand ils viennent à se heurter, & pour empêcher qu’ils ne s’endommagent. On se sert aussi pour la même précaution de fagots, ou autres choses semblables.

Défenses, se dit aussi de certaines pièces de bois endentées deux à deux, ou trois à trois, qui sont sur les préceintes du vaisseau, & servent à conserver les chaloupes contre les préceintes & les têtes des chevilles de fer, quand on les embarque, & quand il les faut remettre à la mer.

Défenses, en termes de Chasse, se dit de deux grandes dents d’en bas qui servent au sanglier pour se défendre. Apri dentes falcarii. Quelques-uns le disent aussi des dents de l’éléphant qui sont disposées de la même manière, & de celles du cheval marin. L’ivoire se fait des os & des défenses de l’éléphant. Ab. Les dents & les défenses du cheval marin sont fort grandes, & guérissent les hémorroïdes. Id.

En termes de Librairie ou de Relieurs, on appelle défenses, de petits feuillets qu’on met au commencement & à la fin des livres, & que l’on colle contre la couverture. Ordinairement ces feuillets ont toute la longueur du livre, mais ils n’ont que le tiers ou le quart de la largeur. On met quelquefois ces défenses de parchemin, & quelquefois on n’en met que vis-à-vis des nerfs. On les appelle défenses, parce qu’elles défendent le livre, & l’empêchent d’être endommagé par la carne du carton & par les nerfs, le repli de cuir de la couverture, & autres coutures. Les défenses sont encore recouvertes d’un feuillet entier du livre que l’on colle par-dessus contre la couverture.

Défenses, en termes de manège, se dit d’un cheval qui, en sautant ou en reculant, résiste à ce qu’on veut qu’il fasse.

DÉFENSEUR. s. m. Celui qui défend. Voyez Défendre. Defensor, propugnator. Charlemagne, Saint Louis, ont été les défenseurs & les protecteurs de l’Eglise. Heureux celui qui a le Dieu de Jacob pour son défenseur. Port. R. L’Eglise n’a jamais manqué & ne manquera jamais de défenseurs.

Défenseur, terme d’Histoire Ecclésiastique. C’étoit anciennement une dignité dans l’Etat & dans l’Eglise. Les Défenseurs avoient soin de conserver le bien public, & de protéger les misérables. Chaque Eglise Patriarchale avoit son Défenseur, & cet usage commença vers l’an 423. Il s’est conservé sous d’autres noms. C’est la même chose que les Avocats, ou Avoués qui défendoient autrefois les intérêts des Eglises. Voyez le mot Avoué. L’Empereur se qualifie encore Avocat de l’Eglise. Les Rois d’Angleterre ont conservé le titre de Défenseur de la Foi, qui fut accordé à Henri VIII. par Léon X. & qui lui fut confirmé par Clément VII. Le Concile de Chalcédoine, Can. 2. appelle le Défenseur d’une Eglise Ἔκδικος. Le Pape Urbain, Cap. Salvator, de Simonia, dit que ce Concile entend par-là des Avoués, des Châtelains, des Juges. Codin, de Officiis aulæ. Const. parle aussi de Défenseurs du Palais ; & Bollandus, Act. Sanct. Janu. T. I. p. 501. En 407. un Concile de Carthage, c. 97. demande à l’Empereur des Défenseurs du nombre des Scholastiques, c’est-à-dire, des Avocats qui étoient en exercice ; & qu’il leur fût permis d’entrer dans les cabinets des Juges toutes les fois qu’il seroit nécessaire pour les affaires de l’Eglise. Ces Défenseurs sont à peu près ce que furent dans la suite les Avoués, & c’est là une espèce de commencement de l’Avouerie. Dans l’Ordo Romanus, quand le Pape va à l’Eglise de la Station dire la Messe, il est à cheval avec ses principaux Officiers, & les Acolytes avec les Défenseurs l’accompagnent à pied. Les Ecclésiastiques obtinrent des Empereurs d’avoir leurs Défenseurs, qui étoient des laïques chargés de maintenir les intérêts de l’Eglise dans les Tribunaux des Magistrats. Dès l’an 368. Valentinien parle d’un Défenseur de l’Eglise Romaine. Tillem. Il n’est donc pas vrai que le Concile d’Afrique tenu en 423. soit le premier qui parle des Défenseurs dans son Canon 42. Il y avoit des Défenseurs de l’Eglise, des Défenseurs du patrimoine de Saint Pierre, qui alloient dans les Provinces pour avoir soin des biens de l’Eglise Romaine, & qu’on appelle encore dans l’Ordre Romain Défenseurs Régionaires, Defensores Regionarii. Il y avoit aussi des Défenseurs des Monastères, des Défenseurs des Eglises Paroissiales. S. Grégoire parle souvent de ces Officiers ; & c’est dans ses Lettres & dans celles du Pape Pelage qu’il tant chercher tous les devoirs des Défenseurs.

Les Défenseurs des Eglises, ou Avoués, étoient de deux sortes. Les uns étoient Défenseurs des causes, ou des procès de l’Eglise ; & les autres, Défenseurs de ses terres. Le Prince donnoit les premiers ; les seconds étoient héréditaires, & c’étoient les fondateurs ou patrons des Eglises. Les premiers furent appelés dans la suite Œconomes & Vidames ; & ils prirent soin non-seulement des procès, mais encore de tout ce qui regardoit les provisions & le revenu des Eglises. Le premier ou le Chef des Défenseurs de l’Eglise, s’appeloit Primus Defensor, ou Primicerius Defensor ; en Grec Πρωτέκδικος. Gretser, Meursius, & le P. Goar, ont parlé fort au long de cet Office. Voy. aussi Macri, Du Cange, Spelman & Hofman, dans leurs Dictionnaires ; & ci-dessus au mot Avoué.

Nous n’avons point de charge qui réponde à celles des Défenseurs : on peut cependant, soit pour la nature & la qualité de leurs charges, soit pour la manière dont ils faisoient les affaires, soit pour leurs fonctions, les comparer aux Procureurs Généraux & à leurs Substituts, ou aux Lieutenans Généraux de Police & aux Commissaires. Il y avoit un Défenseur de l’Empire, ou du Royaume, Defensor Regni. Il étoit chargé de soutenir les droits de l’Empire, l’autorité du Prince, la rigueur des loix. Le Défenseur de la ville, Defensor civitatis, Defensor plebis, maintenoit les droits, les usages, les coutumes de chaque ville : on pourroit peut-être le comparer au Conseiller-Pensionnaire de chaque ville de Hollande. Cet Officier connoissoit toutes les causes pécuniaires au-dessous de 500 pistoles, & des crimes légers. Ont faisoit par-devant lui les insinuations des testamens & des donations, & les dépositions de témoins. C’est pour cela qu’il avoit son Archive ou son greffe. Voyez la Novelle 15. & Senator Cassiod. L. VII. Epist. 11. Ces Défenseurs des Villes, ou Cités, qui étoient chargés des premiers soins de la Police dans les principales villes chez les Romains, ne pouvoient sortir de ces villes, non plus que les Présidens des Provinces, de la Province qui leur étoit confiée, si ce n’étoit pour accomplir un vœu, & à condition d’y revenir coucher le même jour. De la Mare, Tr. de la Pol. Tom. 1. p. 206. Il y avoit aussi dans les Gaules des Défenseurs des villes. L’élection de ces Magistrats dépendoit du Président de la Province. La loi portoit qu’il les choisiroit entre les plus nobles, les plus riches & les plus estimés des citoyens. Les Magistrats Romains, jaloux de l’autorité de ces Officiers, firent tout leur possible pour les détruire ; de sorte que l’on ne prit plus pour ces places importantes que des gens inconnus, sans nom, sans réputation, obscurs, comme porte la Novelle 15. de Justinien. De Defens. Civit. Cela parut d’une trop dangereuse conséquence au service du Prince & au bien public. On les rétablit. Voyez la Novelle citée, Godefroy sur cette Novelle & de la Mare, Tr. de la Pol. T. I. p. 25. Le Défenseur des pauvres, des pupilles & des veuves, prenoit soin des affaires de ces sortes de personnes, qui seroient souvent indéfendues, si personne n’étoit chargé de leurs affaires. Les Diacres au commencement de l’Eglise étoient les Défenseurs des pauvres, des pupilles & des veuves ; mais dans la suite cet emploi devint une charge, qui fut exercée par des laïques. Justinien en parle dans sa 15e. Novelle. Les Défenseurs de l’Eglise étoient comme les Commissaires & les Subdélégués du Patriarche. Le premier, ou le Chef de ces Défenseurs, jugeoit avec d’autres Défenseurs, qui étoient les assesseurs, les affaires de moindre conséquence qui étoient du ressort du Patriarchat, & il en rendoit compte ensuite au Patriarche.

Il est parlé dans le Droit Romain des Défenseurs : c’étoit dans les villes qui n’étoient ni libres, ni privilégiées des Officiers préposés pour la répartition des impôts, ou tributs : ils régloient ce que chacun des habitans devoit payer. La fonction des Défenseurs étoit semblable à celle des Censeurs de Rome & à celle de nos Elus : on ajouta dans la suite à leur pouvoir celui de juger les causes sommaires. Voy. la 15e. Novelle de l’Empereur Justinien, & liv. 4. de Defens. Civit.

Défenseur en Mythologie. Surnom d’Hercule, qui avoit à Rome un Temple sous ce titre. Defensor. C’étoit-là où les Soldats & les Gladiateurs, à qui son donnoit un congé honorable, venoient suspendre leurs armes.

DÉFENSIBLE. adj. m. & f. Vieux mot. Qui se peut défendre, qui est de défense, qui est à l’abri, à couvert. Munitus, defensioni opportunus, a, um. Une place défensible.

DÉFENSIF, ive. adj. Il n’est guère en usage qu’au féminin, & signifie qui est fait pour la défense. Les armes défensives sont les casques & les cuirasses, & autrefois le bouclier. Voyez au mot Arme. Arma ad legendum, ad defendendum. Les Princes les plus foibles font entr’eux des ligues offensives & défensives, pour se précautionner contre l’attaque des plus puissans. Voy. Ligue. Il s’emploie aussi substantivement, mais seulement au féminin. Etre sur la défensive, ne faire simplement que se défendre. Paratum esse ad resistendum, resistere oppugnantibus. Ils se tiennent le plus qu’ils peuvent sur la défensive.

DÉFENSIF. s. m. Terme de Médecine & de Chirurgie. C’est ce qui sert dans la cure d’une plaie pour empêcher la violence de la douleur, l’hémorrhagie, l’impression de l’air extérieur, &c. On dit un défensif, comme on dit un astringent. La cautérisation étant faite, on couvre la plaie avec de petits bourdonnets de charpie… & l’œil d’un défensif & d’une compresse triangulaire. Dionis. Pour le premier appareil de l’entorse M. Dionis se servoit d’un petit défensif fait avec le blanc-d’œuf, l’huile rosat & la poudre d’alun.

Défensif. Terme d’Oculiste. Bandage que l’on met sur les yeux d’un malade après quelque opération, comme celle de la cataracte. Defensivum. Je mis un défensif sur ses deux yeux, ce que je continuai jusqu’au neuvième jour, auquel temps je fus obligé de lui ôter le bandage, à cause d’une légère fluxion qui lui survint aux deux yeux. Geisler. Journ. des Sc. 1720. p. 445.

DÉFÉQUER, v. a. Terme de Chimie. Oter les fèces ou impuretés d’une liqueur. Defecare, purgare, expurgare. On fait des distillations & autres opérations en Chimie pour en séparer le plus pur & le plus subtil d’avec les fèces, le marc ou la lie.

Déféqué, ée. part. Defecatus, purgatus, expurgatus. L’esprit de vin bien déféqué s’évapore facilement.

DÉFÉRANT, ante. adj. Qui a de la déférence. Facilis, commodus. Un homme civil & déférant est bien venu par-tout. Il n’est pas en usage.

DÉFÉRENCE, s. f. Condescendance honnête, qui fait qu’on se conforme aux sentimens & aux volontés de ceux pour qui l’on doit avoir des égards. Reverentia, obsequium. Quoique la déférence soit une suite de la considération ou du devoir, il y a cependant un terme au-delà duquel elle cesse d’être ce qu’elle étoit. Sacrifier indistinctement sa volonté à celle des autres, c’est bassesse, ou bêtise. On a de la déférence pour l’âge, pour le mérite, pour la dignité de quelqu’un. Avoir de la déférence pour les personnes de mérite & de qualité. Ablanc. Prévenez-vous les uns & les autres par des témoignages d’honneur & de déférence. Port-R. Le respect & la déférence naissent de l’estime mutuelle que doivent avoir deux amis. S. Evr.

DÉFÉRENT. adj. quelquefois employé substantivement. Terme d’Astronomie dans le système de Ptolomée. Cercle déférent, qui porte la planète avec son épicycle. C’est un cercle qu’on a supposé pour expliquer l’excentricité, le périgée & l’apogée des astres, sur lequel on a dit que la planète se mouvoit ; & il est placé dans l’épaisseur de chaque sphère. Circulas deferens. Comme une planète n’est pas toujours également éloignée de la terre, l’on a compris que son mouvement propre se fait dans un cercle, ou ellipse, qui n’est pas concentrique à la terre. C’est ce cercle ou ellipse excentrique qu’on appelle déférent, parce que passant par le centre de la planète, il semble la supporter & la soutenir dans son orbite. On supposoit ces déférens différemment inclinés à l’Ecliptique, mais jamais de plus de huit degrés, excepté celui du soleil, qui est dans le plan de l’Ecliptique même, qui se trouve coupé différemment par le déférent de chaque planète en deux points qu’on appelle nœuds. Dans le systême de Ptolomée ce même déférent est aussi appelé le déférent de l’Epicycle, parce qu’il traverse l’Epicycle par son centre, & qu’il semble le soutenir.

☞ Comme on n’avoit imaginé les cercles excentriques, que pour expliquer les points de l’apogée & du périgée ; aujourd’hui qu’il est démontré que les planètes décrivent des ellipses autour du soleil, on a banni ces cercles déférens, comme l’on avoit banni les Epicycles de Ptolomée.

Déférent. Terme d’Anatomie. Ce mot se dit des vaisseaux du corps humain. Des vaisseaux déférens, des vaisseaux préparans. On appelle vaisseaux déférens, des vaisseaux qui conduisent la semence goute à goute dans les vésicules séminaires. Quelques-uns appellent ces vaisseaux éjaculatoires. Ils sont blancs, nerveux, ronds, situés en partie dans le scrotum, & en partie dans l’abdomen, un à droite, & un à gauche.

Déférent, se prend substantivement, en termes de monnoie, & signifie les marques qui indiquent le lieu de la fabrication, le Directeur & le Graveur. Acad. Fr. Le déférent des monnoies est ordinairement une lettre qui se place au bas de l’écusson ; celui du Directeur, au bas de l’effigie ; celui du Graveur, avant le millésime. Celui des monnoies ne change point. Ceux du Directeur & du Graveur sont arbitraires.

DÉFÉRER. c. n. Se conformer aux sentimens & aux volontés de ceux à qui l’on doit des égards. Voyez Déférence. Aliquem observare, alicui honorem deferre, reverentiam erga aliquem adhibere. Les inférieurs doivent déférer aux supérieurs. En matière de langues on doit tout déférer à l’usage. Bouh. Il faut déférer aux loix, aux arrêts de défenses. Ils devoient déférer aux anciennes loix de l’Eglise. Pasch. Il faut déférer aux avis, aux sentimens des plus sages, des plus expérimentés.

Aux avis d’un censeur tu ne dois déférer
Qu’autant qu’il aura su t’instruire & t’éclairer. Vill.

Déférer. v. a. qui se dit en cette phrase : Déférer des honneurs, des titres, des dignités, pour dire, les donner, les attribuer à quelqu’un. Deferre alicui honores, magistratus. Les Romains déféroient le triomphe aux Chefs victorieux. Les Sénateurs & la Noblesse de Pologne lui déférèrent la couronne. Suivant le Dict. de l’Acad. ce mot n’est d’usage qu’en parlant des dignités, des honneurs dont une multitude dispose en faveur d’un particulier. On dit aussi, Déférer le serment à une partie, pour dire, s’en rapporter à son serment. Jusjurandum alicui deferre.

Déférer, en termes de Palais, signifie dénoncer. Alicujus nomen ad Judices deferre. On ne reçoit point le témoignage de ceux qui ont été déférés en Justice, jusqu’à ce qu’ils se soient purgés. Celui qui est absous peut demander le nom de celui qui l’a déféré, pour avoir réparation contre lui. Il avoit été arrêté prisonnier, parce que deux témoins l’avoient déféré. Vaug. Déférer quelqu’un à l’inquisition.

Déféré, ée. part.

DÉFERLER, v. a. Terme de Marine. C’est étendre & déployer les voiles pour s’en servir. Vela explicare.

Déferlé, ée. part. Voiles déferlées, qui sont déployées sur leurs cargues prêtes à être bordées.

DÉFERMER. v. a. Mettre dehors, ou en liberté, ce qui étoit enfermé. Solvere, expedire, extrahere. On a enfermé un chien dans un cabinet, il faut le venir défermer, ou mettre en liberté. Vous avez en fermé par mégarde mon manteau dans votre coffre, venez le défermer, le tirer dehors. Ce mot n’est pas françois ; il est seulement en usage sur les rivières où l’on dit défermer un bateau, c’est-à-dire, détacher la corde qui le tient attaché aux anneaux de fer pu ailleurs.

DÉFERRER, v. a. Oter les fers de quelque chose. ferramenta detrahere. Il faut déferrer cette porte-là pour en faire servir les fers à une autre.

Déferrer, se dit plus ordinairement des chevaux. Oter le fer du pied d’un cheval ou d’une autre bête de monture. Equum soleis exarmare, equo soleas eximere. Il faut déferrer ce cheval, son fer le blesse, il s’est déferré des quatre pieds. Soleæ exciderunt.

☞ On dit de même, se déferrer, en parlant d’une aiguillette, d’un lacet, &c. dont la ferrure se défait. Votre lacet s’est déferré.

On dit figurément, mais en style populaire, qu’on a déferré un homme des quatre pieds, pour dire qu’on l’a rendu muet, déconcerté, interdit. Perturbare. On dit aussi, qu’un homme s’est déferré, quand il est interdit & confus, en parlant à quelque personne qu’il craint, ou qui le presse trop fort sur quelque chose. Il se fit une huée qui déferra le témoin. Ablanc. Os alicui obstruere.

Déferré, ée. part.

DÉFET. f. m. Terme de Librairie. Il ne se dit guère qu’au pluriel, & signifie les feuilles dépareillées d’une édition qui restent après que les assemblages sont faits, & auxquelles on a recours pour compléter d’autres exemplaires, auxquels il manque seulement quelque feuille, ou dont quelqu’une a été gâtée. Telle feuille n’est pas propre, il en faut chercher une autre dans les defets. Ce mot vient du Latin Defectus, parce que toutes ces feuilles ne peuvent pas former des exemplaires complets.

DÉFEUILLÉ. adj. dépouillé de feuilles. Foliis nudatus. Un arbre défeuillé. Une forêt défeuillée. Il est dans Monet & dans Pomey. Mais il n’est pas en usage.

DEFFOULER. v. a. Vieux mot. Fouler, marcher dessus. Calcare, proculcare. Ils leurs crachèrent au visage, & marchèrent sur eux & sur le signe de la Croix, passerent & deffoulèrent aux pieds. An. Vie S. Louis.

DEFFUBLER. v. a. Vieux mot qui signifie découvrit, dévêtir, dégraffer, déboucher, déboutonner. Diffibulare.

Se DEFFUBLER. Se découvrir. Vieux mot. Le Ligueur dont il est parlé au commencement de la Satyre Ménippée, qui portoit grand chapeau, & rarement le deffubloit, étoit le Cardinal de Pellevé. Voyez Calottier. On disoit aussi : Se défuler, que Nicod écrit desfuler. Quasi insulam detrahere, ôter son chapeau. Il est dans les dernières éditions de Richelet.

DÉFI. s. m. Appel, provocation au combat. Provocatio, scheda provocatoria. Le défi se fait par écrit, de vive voix, ou par gestes. Ce terme est employé par extension pour toute sorte de provocation. Il lui a envoyé un cartel de défi, il lui a fait un défi. Il a accepté le défi. Je lui ai fait un défi sur un tel problème, un défi à la paume, au billard. Anciennement, & lorsque les duels étoient en usage, l’accusateur jetoit son gant par terre pour gage du défi. L’accusé le relevoit pour marque qu’il acceptoit le défi & le combat.

DÉFIANCE. s. f. Crainte d’être trompé, qui fait que nous n’osons nous fier à la fidélité des autres. Diffidentia. Dans ce sens il est opposé à confiance, assurance qu’on prend sur la probité & la discrétion de quelqu’un. Si la défiance est conçue avec raison, elle est juste, utile & nécessaire ; si elle est injuste, trop inquiète & mal fondée, c’est une foiblesse honteuse & ridicule. Cail. La défiance sert à exercer la prudence, & à prévoir les événemens, ou pour en profiter, ou pour les éviter. Id. Ce qui nous empêche de faire voir le fond de notre cœur, c’est la défiance que nous avons de nous mêmes, bien plus que la défiance que nous avons de nos amis. Rochef. Les opérations de la défiance sont tellement mêlées avec celles de la prudence, qu’il est facile de s’y tromper à cause de leur ressemblance. S. Evr. La défiance est ridicule, si elle se fait des chimères pour s’en effrayer ; elle est injurieuse, si elle soupçonne la probité de quelqu’un mal-à-propos ; mais c’est un acte de sagesse, quand elle empêche d’être surpris & trompé. Id. A la Cour on se nourrit de soupçons, de défiances & de jalousie. Balz.

La Défiance est nécessaire,
Il est bon de prévoir un fâcheux accident,
On ne doit point ici marcher en téméraire. Quin.

On dit proverbialement que la défiance est la mère de sûreté, ou, est mère de sûreté, pour faire entendre que pour n’être pas trompé, il ne faut pas se confier trop légèrement.

☞ Quelquefois ce mot désigne simplement la crainte qu’une chose n’ait pas toutes les qualités nécessaires pour un certain effet. C’est ainsi que l’on dit qu’il faut avoir une juste défiance de ses propres forces. Il ne faut pas que la défiance de nos forces nous entretienne dans la paresse, & nous empêche de faire quelques entreprises louables.

DÉFIANT, ANTE. adj. Qui n’ose se fier à la fidélité de personne. Suspiciofus, suspicax. Les gens foibles & ignorans sont ceux qui sont les plus défians. La charité n’est point défiante ni soupçonneuse. Bourdal. Exh. T. I. p. 172.

☞ DÉFICIENT. adj. Terme d’Arithmétique. Les nombres déficiens sont ceux dont les parties aliquotes ajoutées ensemble font une somme moindre que le tout dont elles sont parties. Encycl. Tel est le nombre 8, dont les parties aliquotes, 1, 2, 4. prises ensemble ne font que 7.

DEFICIT. s. m. Terme de Pratique emprunté du Latin, pour exprimer une chose qui manque. C’est ainsi que l’on dit qu’une pièce d’un inventaire, d’une production est en deficit ; & l’on met ce mot à côté des articles où l’on fait mention d’une pièce produite qui ne s’y trouve pas.

☞ On dit dans le même sens qu’une somme est en déficit dans la caisse d’un Banquier, d’un Receveur, &c.

☞ Ce mot n’a point de pluriel. Il y a plusieurs deficit dans cette caisse, non pas deficits.

DÉFIE. s. m. On appelle en termes de Marine, le défie du vent, l’avertissement qu’on donne à celui qui gouverne, gouverne, afin qu’il ne prenne pas vent devant, ou qu’il ne mette pas en ralingue.

DÉFIEMENT. s. m. Terme de Coutumes. Déclaration de guerre, défi, appel. Provocatio.

DÉFIER. v. a. Faire un appel, provoquer son ennemi au combat, soit aux armes, soit en toutes sortes de disputes, de jeux & d’exercices. Provocare. Les anciens Chevaliers se défioient souvent pour éprouver leur courage. Défier quelqu’un à boire, à chanter, au jeu, au trictrac, à la paume. Marsias osa défier Apollon à qui joueroit mieux de la flûte. Bens. Je m’en vais défier les vents au milieu de l’Océan. Voit.

Dans ce mot l’i & l’e qui sont de suite font deux syllabes différentes dans ces vers :

Et sur le mérite des mœurs,
On pourroit défier les plus fins connoisseurs
De vous souhaiter quelque chose. Me. Des-Houl.

Ce mot vient de diffidare, qui se trouve en plusieurs Auteurs de la basse Latinité. Ménage.

Défier, sert aussi à reprocher à quelqu’un son peu de forces, ou son peu de courage, en le piquant & en l’aiguillonnant. Hoc age, si potes, rem magnam feceris, &c. C’est le tour Latin qu’on doit donner à ces expressions Françoises. Je vous défie d’aller en cette maison où il revient des Esprits. Vous me voulez faire un procès, je vous en défie. Je vous défie de m’oublier entièrement, & vous n’aurez jamais sans moi que des plaisirs imparfaits. Let. Port. Vous ne sautiez m’oublier, il est impossible que, &c.

Défier, en termes de Marine, a plusieurs significations, & est tantôt actif, tantôt neutre, tantôt réciproque. Défier, signifie prendre garde, empêcher que quelque chose n’arrive. Défier l’ancre du bord, c’est empêcher que l’ancre ne donne contre le bord. Défie du vent, est un avertissement qu’on donne à celui qui gouverne, afin qu’il ne prenne pas vent devant. Un vaisseau qui ne se défie que de grains qui paroissent au vent à lui. Un vent qui défie de la côte, c’est-à-dire, qui vient de la côte.

Défier. Déclarer quelqu’un ennemi public. Le Pape Honorius fit en 1225. une Constitution très sévère pour la sûreté des Cardinaux. Si quelqu’un, dit-il, poursuit un Cardinal à main armée, le frappe ou le prend, ou participe en quelle que manière que ce soit à une telle violence, il sera infâme comme criminel de lèze-Majesté, défié & banni c’est-à-dire, ennemi public, incapable de faire testament, ni de succéder à personne, même ab intestat. Fleury. L’Empereur Frédéric défia en 1226. par Edit public seize villes d’Italie, c’est-à-dire, qu’il les déclara ennemies. Id.

Défier est aussi réciproque. Se défier de quelqu’un, n’oser se fier à la fidélité des autres, dans la crainte d’être trompé, prendre des précautions pour n’être pas trompé par quelqu’un que l’on soupçonne de peu de fidélité, de peu de sincérité.

☞ On dit aussi, se défier de ses propres forces, de son esprit, de ses talens, n’avoir pas grande confiance en ses propres forces, en sa capacité. Diffidere alicui. Il se faut défier des flatteurs. Ceux qui ne se défient de rien sont les plus faciles à surprendre. Il faut se défier de l’amour aveugle que les hommes ont pour leurs propres Ouvrages. S. Evr. Je me défie un peu trop de vos promesses. Pasc. Je vous promets de ne vous point haïr : je me défie trop des sentimens violens pour oser l’entreprendre. Lettres Portug..

Défier, signifie aussi prévoir, se douter. Suspicari. Je me suis toujours bien défié que cela arriveroit ainsi. Qui se seroit jamais défié qu’on eût rendu un si méchant arrêt ? pour dire, qui l’eût prévu ? On doute que défier en ce sens soit du beau style.

On dit proverbialement qu’il ne faut jamais défier un fou, quand un homme propose de faire quelque folie, quelque extravagance, & qu’il demande si on l’en défie.

Défié, ée. part.

DÉFIGURER, v. a. Changer, gâter la figure, les traits. Deformare, deturpare, fœdare. Il se dit, tant des personnes que des choses, au propre & au figuré. Cette balafre lui a tout défiguré le visage. On ne connoît plus ce malade, tant il est défiguré. Dans une grande frayeur le visage se défigure, & fait quelquefois des mouvemens horribles. Felib. Depuis qu’on a abattu ce pavillon, ce bâtiment est tout défiguré. Un habit est tout défiguré, quand on en a ôté la garniture. Souvent ceux qui le mêlent de corriger ou de traduire des Ouvrages, les défigurent entièrement. Il défigure tellement les Auteurs, qu’ils ne sont plus reconnoissables. Boil. L’Eglise ne devoit pas vous être moins chère, parce qu’elle vous paroissoit défigurée. Nico. L’esprit fécond en déguisemens s’étudie à défigurer, selon ses intérêts, tantôt les vices, & tantôt les vertus. Fléch. Les rochers & les montagnes défigurent la terre, & en rendent la surface hideuse & mal polie. S. Evr.

DÉFILÉ. s. m. terme de Guerre. Passage étroit où l’on ne peut passer qu’à la file, où peu de personnes peuvent passer de front. Angustiæ, angusta via. C’est un pays couvert, montagneux, ou marécageux, où l’on trouve à tous momens des défilés. Ils donnèrent sur le bagage en passant, à cause qu’il y avoit un long défilé. Ablanc.

DÉFILER. v. a. Oter le fil ou le cordon qui étoit passé dans quelque chose. Filum detrahere. Tirer certaines choses d’un fil où elles étoient enfilées. E filo aliquid extrahere, educere. Défiler les perles d’un collier, défiler les grains d’un chapelet ou simplement défiler un chapelet, un collier. Ce collier de perles est défilé.

☞ Il est aussi réciproque. Votre collier se défile, va se défiler. On dit figurément, mais en style familier & populaire, que le chapelet se défile, lorsque, de plusieurs personnes liées ensemble d’amitié ou d’intérêt, quelques-unes se détachent des autres.

Défiler, v. n. terme usité dans l’art militaire, lorsqu’il est question de la marche des troupes. Aller à la file, l’un après l’autre, sur un petit front, ou sur très-peu de files. Voyez File & Front. Le passage de la montagne étoit si étroit, que les soldats ne pouvoient défiler que deux à deux, quatre à quatre. Bini, quaterni incedere.

Défiler, signifie aussi marcher par files, sans être contraint par le terrein ; & il n’est pas nécessaire que les soldats marchent tous l’un après l’autre ; ils peuvent marcher plusieurs de front, pourvu que ce soit en petit nombre. On fit défiler les troupes par pelotons, par compagnies, par escadrons. Turmatim, manipulatim.

☞ On se sert encore de ce verbe pour exprimer le mouvement qu’on fait faire à des troupes pour les voir plus en détail. Après la revue, on fit défiler les troupes dix à dix.

☞ On dit généralement défiler, de tous les mouvemens qu’on fait faire à des troupes sur un front moindre que celui sur lequel elles étoient en bataille : mais ce mot convient mieux lorsqu’on les fait marcher sur un petit front.

Défiler, est aussi un terme de Chandelier. Detrahere. C’est ôter la chandelle des baguettes. Défiler la chandelle. Dans ce sens il est actif.

Défiler, avec le pronom personnel, se dit des étoffes ; mais on dit mieux s’éfiler. Filatim dissolvi, solvi.

Défilé, ée, part.

DEFINAILLE. s. f. Vieux mot. Fin, mort. On a dit aussi définer, pour finir, mourir.

DÉFINER. v. n. Être près de sa fin, Ad finem vergere. Il n’est plus en usage.

DÉFINÉ, ée. adj. Vieux mot. Qui a pris fin, qui est fini, qui est mort. Mortuus, defunctus, a, um.

☞ DÉFINIR. v. a. Suivant la force du mot, c’est marquer les bornes & les limites d’une chose. Definire. Ce mot conserve quelque chose de son idée principale dans toutes les occasions où il est employé.

Définir, en termes de Logique, signifie, Expliquer la nature d’une chose par son genre & par sa différence. Voyez ces mots. La faire connoître telle qu’elle est, de sorte qu’on ne puisse plus la confondre avec une autre. Definire. Les Philosophes définissent l’homme, un animal raisonnable. Descartes définit l’ame, une substance qui pense. Il est inutile de définir les mots simples & communs ; car ceux qui entendent une Langue, dès qu’ils entendent prononcer ces mots, ont d’abord une idée claire & distincte de la chose. Il faut s’arrêter à certains termes primitifs qu’il n’est pas besoin de définir. Il est plus aisé, & beaucoup plus nécessaire de définir les mots des arts & des sciences, dont les idées sont plus composées ; car en définissant les termes des arts, l’on trouve toujours la définition plus claire que la chose définie : au lieu qu’en définissant les termes communs, la chose définie est toujours plus claire que la définition.

Définir un mot, c’est en déterminer le sens, de façon qu’on ne puisse ni étendre ce sens, ni le restreindre, ni l’attribuer à un autre mot. Voyez Définition.

Définir, signifie aussi, Faire une description des qualités apparentes d’une chose, la faire connoître par un grand nombre de circonstances. Explicare, declarare definiendo. Les gens de Cour sont cachés, ils sont difficiles à définir ; on ne les connoît point. Le je ne sai quoi est si délicat, & si imperceptible qu’on ne le peut définir. Bouh. L’homme ne se peut définir lui-même ; il ne sait point précisément ce qu’il est. La Bruy. C’est un homme qu’on ne peut définir.

Définir, se dit dans le même sens que décider, déterminer. Tout ce qui arrive dans le monde a été de tout temps défini dans les décrets de Dieu. L’Ecriture, les Conciles ont défini & déterminé les articles de la Foi. Il n’y a encore rien de jugé, de défini sur cette question. Dieu a défini le temps où cela arrivera, a marqué, déterminé.

Défini, ie, part.

Défini, signifie aussi, Ce qui est borné & terminé, qui est circonscrit en de certaines bornes, & opposé à indéfini. Finitus, circumscriptus. Tous les corps ont un lieu défini, occupent des espaces définis & bornés.

Défini, Terme de Grammaire. Article, ou prétérit, qui a une signification précisé & déterminée. Definitus. Il n’y a qu’un article défini : le pour le masculin, & la pour le féminin. Dans ces phrases, la volonté du Roi, la maison de la Reine, j’ai dit au Roi, &c. les articles, la, du, de la, au, sont articles définis : ils marquent quelque chose de défini, de fixe & de déterminé ; au contraire quand on dit la qualité de Roi, le rang de Reine, l’article de ne marque rien de déterminé, il signifie seulement un Roi, ou une Reine en général ; c’est pour cela qu’on l’appelle article indéfini. Voyez Article, & Indéfini. Le prétérit parfait défini, marque un temps passé : j’ai aimé. Quelques Grammairiens l’appellent indéfini, & donnent le nom de défini au prétérit parfait j’aimai. Peu importe pourvu qu’on entende bien la valeur de ces prétérits, & qu’on ne se trompe point dans l’usage qu’on en fait. Voyez Aoriste.

DÉFINITEUR. s. m. Terme usité dans plusieurs Ordres Religieux. Ce mot signifie, celui qui est Assesseur ou Conseiller d’un Général, ou d’un Supérieur, dans quelques Monastères. Definitor. C’est aussi le nom qu’on lui donne en Latin. On diroit mieux Consultor. Dans les Ordres Religieux, du moins dans quelques-uns, les Définiteurs sont pour le rang au dessous du Supérieur du Couvent où ils demeurent, quand ils sont dans ce Couvent ; ailleurs les Définiteurs ont le pas sur leur propre Supérieur, qui cesse de l’être à leur égard quand il est hors de son Couvent. Les Définiteurs sont aussi soumis dans ce Couvent où ils demeurent, au Supérieur immédiat de ce Couvent dans les choses qui regardent la discipline Religieuse ; mais ils ne leur sont pas soumis dans les autres choses.

DÉFINITIF, ive. adj. Qui termine, qui décide le fonds d’une question. Decretorius. L’Eglise a donné un jugement définitif sur cet article de Foi.

Définitif, terme de Palais, par lequel on entend un jugement qui décide & termine entierement la contestation qui étoit entre les parties : bien différent, comme l’on voit, du jugement préparatoire, autrement appelé interlocutoire, qui décide seulement quelque chose antérieure, pour l’instruction, avant que de parvenir au jugement définitif. Sentence définitive. Arrêt définitif.

On trouve diffinitif dans l’Ordonnance de 1670. pour les matières criminelles ; dans l’Edit du Roi (Louis XV.) de mil sept cent seize, portant érection d’une Chambre de Justice dans le recueil des pièces, concernant les différends des Pairs de France avec les Présidens à mortier du Parlement de Paris. Malgré ces autorités, l’usage est pour définitif & définitivement.

☞ En définitive. adv. Terme de Palais : définitivement, par jugement définitif. Decretorio judicio. On perd des affaires par provision, qu’on gagne en définitive.

DÉFINITIF, ive. Tuilage définitif. Terme de Manufacture de lainerie. C’est la dernière façon que les Tondeurs donnent à l’étoffe.

DÉFINITION. s. f. Décision d’une autorité supérieure. Decretum. La définition de l’Eglise, ou du Concile, d’un Chapitre, &c. Dans cette derniere phrase définition signifie un arrêté.

Définition, en Logique, est l’explication de la nature d’une chose, un discours qui explique ce qu’une chose est, ou qui détaille les attributs par lesquels la nature d’une chose est déterminée. Ces principaux attributs sont le genre & la différence. Voyez ces mots.

☞ On demande ordinairement trois choses pour qu’une définition soit bonne. 1o. Qu’elle soit claire, c’est-à-dire, qu’elle donne une idée claire & distincte de la chose définie : 2o. qu’elle soit universelle ou adéquate, c’est-à-dire, qu’elle convienne à tout ce qui est contenu dans l’espèce définie : 3o. qu’elle soit propre ou particulière à la chose définie, afin qu’elle serve à faire distinguer la chose définie d’avec toute autre.

☞ Il y a deux sortes de définitions, l’une nominale ou de nom, qui explique le sens ou la signification propre d’un mot, l’autre de chose, dont on vient de parler, qui détaille les principaux attributs d’une chose, pour en faire connoître la nature. Definitio nominis, definitio rei.

On ne peut avoir une idée distincte d’une chose, qu’en employant beaucoup de mots pour la désigner & pour la définir. Mais, parce qu’il seroit importun de répéter cette suite de mots qui composent une définition, on a attaché à un seul mot l’idée qu’on a conçue, & qui tient lieu de toutes les autres. C’est pourquoi toutes les fois qu’on se sert du mot qu’on a défini, il faut substituer mentalement la définition en la place du défini, & avoir ces deux choses tellement jointes & inséparables dans la pensée, qu’aussitôt que le discours exprime l’une, l’esprit y attache immédiatement l’autre. En suppléant ainsi la définition entière aux termes courts, on abrège le discours, que de fréquentes circonlocutions pour expliquer chaque terme, rendroient ennuyeux. Port R. La plupart des définitions d’Aristote sont défectueuses, & si peu propres à faire comprendre la nature des choses, que le Chancelier Bacon avoit raison de dire qu’elles sont semblables à celle qu’on feroit de l’homme en le définissant un animal qui laboure la terre. Id. Les noms sont en la bouche du peuple des définitions abrégées, comme les définitions sont dans les écrits savans des noms expliqués. Pélisson.

Définition, en Mathématique. C’est l’explication du sens d’un mot : comme quand on dit, qu’il faut entendre par cercle, une figure dont tous les points à la circonférence sont également éloignés du centre.

Définition, en Rhétorique, mérite plutôt le nom de Description que de Définition. Voyez Description.