Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 2/591-600

Fascicules du tome 2
pages 578 à 590

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 2, pages 591 à 600

pages 601 à 610


d’acrimonie ; que les corpuscules qui en sortent sont chauds, provenans d’un sel volatil, & d’un souffre impur & puant ; que la rage qu’elle cause & les autres symptomes marquent des parties très-agissantes ; que si le sang se trouve coagulé après la mort, l’esprit de vin en fait autant.

La petite ciguë, cicuta minor, Petroselino similis, C. B. n’est pas moins venimeuse que la précédente ; on croit même que son effet est plus prompt & plus mauvais. On la reconnoît aisément par ses feuilles, qui ressemblent à celles du persil ordinaire, & qui ont une odeur vireuse ; sa tige est basse, & n’a guère plus de deux piés & demi ; elle est menue, chargée de feuilles, & divisée en quelques branches qui sont terminées par des ombelles de fleurs blanches, fleurdelisées, en quoi elles diffèrent de celles du persil. Sa semence est menue, & toute la plante a une odeur désagréable & vireuse. Sa racine périt dès que les semences sont mûres. Comme cette dernière espèce de ciguë approche du persil par ses feuilles, il est arrivé quelquefois de fâcheux accidens à ceux qui en avoient mangé par mégarde. Cette plante se trouve assez souvent dans les jardins, dans les vignes, &c.

Il n’est pas possible de découvrir quelle étoit la ciguë des Anciens, parce que cette plante n’est pas la seule des ombellifères qui soit dangereuse. Il y a quelques espèces d’œnanthes, une espèce de berle nommée sium. Erucæ folio, C. B. qu’on a reconnu être très-pernicieuse. Cette dernière plante a fait le sujet d’un ouvrage entier, & Wepfer a cru qu’elle étoit la ciguë aquatique. Cicuta aquatica.

Bauhin a distingué trois sortes de ciguë aquatique. La ciguë de marais, à feuilles larges & blanchâtres, la ciguë à feuilles rougeâtres, & la ciguë à feuilles étroites, ou ciguë aquatique de Gesner, qui est celle dont on parle ordinairement. Wepfer a fait un Traité intitulé Cicutæ aquaticæ Historia notis & commentario illustrata. Il est assez ordinaire de prendre les feuilles de la ciguë pour celles du persil, & ses racines pour des panais, ou pour des carottes.

Quelques-uns sont devenus fous pour avoir mis en leur potage des feuilles de ciguë au lieu de persil. La ciguë est ennemie du cerveau, comme les cantharides de la vessie, & le lièvre marin du poumon. La ciguë prise en breuvage cause des vertiges & convulsions, trouble la vue & l’entendement, rend les extrémités froides, & bouche les conduits de la respiration. La ciguë est un aliment pour l’étourneau, & un poison pour l’oie. La ciguë fait mieux son effet quand elle est prise avec du vin. La ciguë est moins dangereuse ici que dans les pays chauds.

On l’appeloit autrefois en françois feguë ou cocuë, mot qui, selon Isidore, vient de ce que la ciguë a des nœuds cachés. Habet cæcos nodos, id est, occultos. C’est pourquoi dans les Poëtes, cicuta se prend pour internodia cannarum ; pour l’espace qui est entre les nœuds des cannes de roseaux. D’autres disent que cicuta est dite comme circa cutem. Elle a une peau, une espèce d’écorce tout autour, mais elle est vide au dedans. Cicuta, d’où est venu ciguë, singifie en latin un tuyau fistuleux. Les Poëtes appellent cicuta, un chalumeau, un flageolet de berger.

Est mihi disparibus septem compacta cicutis
Fistula. Virgile, Eclog. II, v. 36.

Hac te nos fragili donabimus ante cicutâ. Id.
Exlog. V, à la fin.

Ciguë se dit aussi du jus, du suc de la ciguë ; d’un poison, d’un breuvage fait de ciguë. Cicuta. Socrate, condamné à mort, but de la ciguë. Platon remarque dans son Dialogue de l’Immortalité de l’ame, que le Bourreau avertit Socrate de ne point parler, de peur que le poison n’opérât trop lentement. M. Petit, dans ses Observations miscellanées, ne croit pas qu’il fit cela par un principe de compassion, qui n’est pas la vertu des Bourreaux, mais par avarice, & de crainte d’être obligé d’acheter encore de la ciguë ; car on n’en fournissoit au Bourreau qu’une certaine quantité, au de-là de laquelle il étoit obligé d’en acheter à ses dépens ; ce qui est confirmé par un passage de Plutarque dans la vie de Phocion ; car le Bourreau n’ayant point assez de ciguë, parce qu’il l’avoit employée à d’autres criminels, Phocion lui donna de l’argent pour en acheter, en disant que c’étoit une chose étrange, que dans Athènes il fallût acheter jusqu’à sa mort.

CIL.

CIL. Pronom. Vieux mot qui signifioit autrefois celui. Il n’est plus en usage en ce sens. Ille. Cil a été dans ses beaux jours le plus joli mot de la langue françoise : il est douloureux pour les Poëtes qu’il ait vieilli. La Bruy.

Certes, mon Dieu, tout ce qu’il te plaira
Je souffrirai comme cil qui sera
Le tien subject. Marot.

Cil signifie aussi le poil qui sort des cartilages situés aux extrémités des paupières. Cilium. Il se dit plus ordinairement au pluriel. Cilia, palpebrarum pili. Les cils sont de petits poils recourbés en arc, ceux de la paupière supérieure sont plus longs, & courbés en dehors. Ceux de la paupière inférieure sont courbés en sens contraire. Ces poils sont destinés à écarter des yeux la poussière & les ordures légères qui pourroient y entrer. On appelle les cartilages qui sont aux extrémités des paupières, tarses.

Nicod dérive le mot de cil, de cillere, qui signifie mouvoir. On peut le faire venir aussi de celo, quòd celent oculos.

CILIAIRE. adj. Terme d’Anatomie qui s’applique à différentes parties de l’œil. Ciliaris.

On appelle ligament ciliaire une rangée de fibres noires, disposées en rond, par lesquelles plusieurs Anatomistes croient que le cristallin est suspendu dans le globe de l’œil. M. Mariotte soutient que ces petites fibres ne sont point attachées au cristallin, & ne servent aucunement à le soûtenir.

Muscle ciliaire. Musculus ciliaris. C’est la partie du muscle orbiculaire des paupières, la plus voisine des cils, à laquelle Riolan a donné ce nom, parce qu’il la prenoit pour un muscle entier. Dict. de James.

Ciliaire. (Procès) Voyez Procès.

Ce mot vient du latin ciliaris, mot impropre, qui signifie, ressemblant aux cils, ou poils des paupières.

☞ CILICE. s. m. Espèce de vêtement fait d’un tissu d’une matière rude, de poil de chèvre ou de bouc. On croit que ce nom lui a été donné, parce que les anciens habitans de la Cilicie en faisoient usage. C’étoit aussi l’habit des anciens Moines, & des Hébreux dans les calamités publiques. Cilicium. Aujourd’hui on entend par cilice, une petite camisole faite d’un poil rude & piquant qu’on porte sur la peau par mortification. Porter la haire & le cilice. On le vit quelquefois, lorsqu’il devoit aller en compagne, se revêtir d’un cilice, comme pour s’armer contre l’ennemi dans ces occasions si dangereuses. P. Verj.

D’où vous vient cet air sombre, & ce cilice affreux,
Et cette cendre enfin qui couvre vos cheveux ?

Rac.

Dans le Chevœana on demande si le cilice est la même chose que le sac, que les Juifs avoient coutume de porter dans les temps de pénitence & d’affliction ? Ceux qui croient qu’ils étoient différens, disent que le cilice étoit de poil de chameau, de bouc ou de chèvre, & que le sac étoit de chanvre, de peau, ou de quelque grosse étoffe.

Cilice, terme de guerre. Les Anciens avoient inventé les cilices, pour s’opposer à l’effet des balistes, & en rompre les coups. Ces cilices étoient des espèces de matelas, ou pour mieux dire, des tissus de crin de cheval & de poil de chèvre, piqués & remplis de bourre ou d’herbes matines entre deux étoffes. Les assiégés suspendoient ces cilices devant les parapets ou sur les brèches, pour rompre la violence des traits ou flèches lancées par les balistes. Le Chevalier Folard.

CILICIE, ancienne Province de l’Asie mineure. Cilicia. Elle avoit à l’Orient la Syrie, la Pamphilie à l’occident, au nord la Cappadoce, & au midi la mer Méditerranée ; elle est presque entourée du mont Taurus. C’est ce qu’on nomme aujourd’hui Caramanie propre. Les principales villes de Cilicie étoient Tarse, Adana, qui ont conservé leur nom : Anazarme, Séleuvie, Sébaste, Pompéiopolis, &c. Cicéron fut Proconsul de Cilicie. Antoine accorda des Rois à la Cilicie ; mais sous Vespasien elle fut de rechef réduite en Province. Voyez Vigenère sur César.

Quelques-uns tirent ce nom d’un Cilix qui y regna, & qui étoit Phénicien, fils de Phénix, selon Solin, & d’Agénor, selon Hérodote. Au sentiment de Bochart, Chanaan L. I, c. 5, il vient de l’hébreu ou phénicien, חלקים, Callekim ou Callukim, qui signifie des pierres, parce que la partie occidentale de cette Province est très-pierreuse ; d’où vient qu’on la nomma Trachee ou Apre, Trachæa Cicilia, & le reste campagne ou plaine de Cilicie, Cilicia campestris.

☞ La terre de Cilicie étoit une espèce de terre ainsi nommée, parce qu’on la trouvoit dans de pays-là. En la faisant bouillir dans l’eau, elle devenoit visqueuse & ténace. On s’en servoit pour enduire les ceps de vigne que l’on vouloit garantir des insectes.

CILICIEN, ENNE. s. m. & f. Qui est de Cilicie. Cilix. S. Paul étoit Cilicien, de Tarse en Cilicie. Les Ciliciens descendoient des Phéniciens ; c’est le sentiment de toute l’antiquité, soit qu’ils y eussent passé en droiture, soit qu’ils eussent d’abord occupé l’Île de Chypre, & que de-là ils se fussent répandus sur la côte voisine. voyez Bochart, Chan. L. I, c. 5.

CILICISME. s. m. Manière de s’expliquer qui se ressent du langage des Ciliciens. Chaque Province a des termes & des expressions particulières, & qui sont vicieuses. On a reproché à S. Paul son cilicisme, c’est-à-dire, les termes ou expressions qu’il avoit apportées de la Cilicie sa patrie : comme Asinius Pollio a reproché à Tite-Live sa patavinité, c’est-à-dire, son langage Padouan, qui choquoit la délicatesse des oreilles de la Cour d’Auguste. Mais tout de même qu’on n’a pû découvrir au vrai en quoi consistoit cette patavinité, il est impossible aussi de distinguer le cilicisme qu’Origène & S. Jérome ont reproché à S. Paul. Balthasar Stolberg, qui a fait un Traité des solécismes du Nouveau-Testament, y parle aussi du cilicisme de S. Paul. S. Jérome, qui étoit fort savant dans les langues, a prétendu y trouver beaucoup de cilicisme. Beauval. Basnage.

CILINDRE. Voyez Cylindre.

☞ CILLEMENT. s. m. (dans ce mot, & dans les suivans, mouillez les deux ll.) Mouvement vif, alternatif, & synchronique des paupières : mouvement par lequel on ferme les paupières & on les rouvre dans le moment. Palpebratio. Une lumière trop vive cause le cillement.

☞ Il ne faut pas confondre le cillement des paupières avec le clignement. Dans le cillement les paupières se joignent de manière que l’œil est entièrement fermé. Dans le clignement elles sont seulement rapprochées, & l’œil est à moitié ouvert. Les Vocabulistes paroissent avoir confondu ces deux mots, puisqu’ils les rendent tous deux par le même mot latin mictatio ; car je suppose que mictatio & mictare qui se trouvent aux mots cillement & ciller, sont des fautes d’impression. Ils disent même bien positivement que le clignement est une action par laquelle les deux paupières se joignent fortement l’une à l’autre. Il est vrai que deux lignes après ils disent, avec M. le Chevalier de Jaucourt, qu’on cligne les paupières pour regarder un objet éloigné : ce qui ne suppose pas les paupières si fortement jointes l’une à l’autre. Rapprochons ces idées. On cligne les paupières pour regarder un objet éloigné : par le clignement les deux paupières se trouvent fortement jointes l’une à l’autre : c’est-à-dire en bon françois, qu’on ferme les yeux pour mieux voir.

CILLER. v. a. Qui ne se dit que des yeux & des paupières. Les fermer & les rouvrir au même instant. Voyez Cillement. Palpebrare. Une lumière trop vive fait ciller les yeux, les paupières.

☞ On le dit aussi absolument. On ne sauroit regarder le soleil sans ciller. Il a vu tout cela, & n’a pas seulement cillé.

Ménage, après Nicod, dit que ce mot vient de sigillare, ou plutôt de cillare, qui a été dit pour cillere, qui, selon Servius, signifie movere.

Ciller, en termes de Fauconnerie, signifie coudre les cils ou paupières d’un oiseau de proie, afin qu’il ne voie goute, & ne se débatte point. Accipitris palpebras infibulare, transuere. Tous les Tendeurs ayant pris des oiseaux passagers, leurs cillent les yeux avec une aiguillée de fil.

Ciller est aussi v. n. & alors, il ne se dit que des chevaux. Ainsi on dit qu’un cheval cille, commence à ciller ; pour dire, qu’il commence à avoir quelques poils blancs aux paupières, au dessus des yeux. Ac. Fr.

☞ CILLEY ou CILLYE, contrée d’Allemagne, aux frontières de la Croatie, avec titre de Comté, avec une capitale qui porte le même nom, sur la rivière de Saana. Celia & Celeia.

CIM.

CIMAGRÉE. Voyez Simagrée.

CIMAISE. Voyez Cymaise.

CIMARIOT, OTE. s. m. & f. Voyez Chimariot. J’aimerois cependant mieux dire cimariot, que chimariot. Mati & M. Corneille l’ont aussi préféré.

CIMARRE. s. f. Robbe de chambre, où tient un collet rond de même étoffe. Chastelain. Voyez Simarre.

CIMBALE. Voyez Cymbale.

☞ CIMBEBAS. Peuples d’Afrique, sur la côte occidentale de la Cafrerie, dans le Royaume de Mataman.

CIMBRE. s. m. & f. Nom de peuple ancien. Cimber. Les Cimbres habitoient autrefois ce que nous appelons aujourd’hui le Jutland, & qui se nommoit de leur nom, Chersonèse Cimbrique. Les uns prétendent qu’ils étoient Scythes d’origine ; d’autres, que ce sont les mêmes que les Cimmériens. Les Cimbres ravagèrent la Germanie, l’Istrie, la Dalmatie, la Rhétie, le Dauphiné, l’Aquitaine. Marius les défit entièrement l’an de Rome 741. Les Cimbres passoient pour être les inventeurs du tambour.

Ce mot, selon quelques-uns, vient de celui de Gomer, fils de Japhet, par le changement du g, en c. Festus dit que c’est un nom gaulois, qui signifier voleur ; & Strabon les appelle des coureurs, des vagabonds, des voleurs.

CIMBRIQUE. adj. Qui appartient aux Cimbres. Cimbricus, a. La Chersonèse Cimbrique. C’étoit la Péninsule, qu’habitoient les Cimbres, aujourd’hui le Jutland.

☞ Il y a une espèce de terre, nommée Terra Cymbrica, qui vient de Femereau, Île de la mer Baltique, tantôt cendrée, quelquefois tirant sur le safran, bonne pour la dissenterie. C’est une espèce de bols.

CIME. s. f. La partie la plus élevée d’une montagne, d’un grand arbre. Cacumen, vertex. La cime de cette montagne est toujours couverte de neige. Il est défendu de couper la cime des arbres par les Ordonnances des Eaux & Forêts. Ce rocher porte sa cime jusques dans les nues.

Du profane Parnasse abandonne la cime,
Ma muse, vers le Ciel prends un vol plus sublime.

Le Noble Téneliere.

Cime se prend en Botanique pour le haut de la tige des arbres & des herbes.

Ce mot vient de cima, qui, selon Isidore, a été dit, quasi coma, car c’est le sommet des plantes ou des arbres.

Cime se prend aussi, au figuré, pour tout ce qui est regardé comme le plus haut degré d’une chose.Culmen, fastigium, apex. Ils se croient à la cime du bonheur. Godeau. On le dit rarement, ou plutôt on ne le dit point.

CIMENT. s. m. Composition d’une nature ténace propre à lier & faire tenir ensemble plusieurs parties distincte. Arenatum, intrita, signinum. Le meilleur ciment du monde est la poudre de Pazzolane mêlée avec le Beton. Le bitume est le ciment qu’on a employé aux murs de Babylone. En France on fait du ciment de tuile, ou de brique pilée, & on la mêle avec de la chaux. On fait des bassins de fontaine avec de la chaux & du ciment. Le ciment est d’un bon usage pour les ouvrages fondés dans l’eau. Davilers.

Il se fait aussi du ciment éternel avec des briques pilées, du verre, du charbon de pierre, de l’arène bien lavée, de l’écaille de fer, qui tombe sous le marteau, avec de la chaux vive bien broyée, qu’on dissout dans du vin ou de l’eau commune. Maltha.

Ce mot vient du Latin cæmentum, qui vient de cædo. Le ciment n’est autre chose que plusieurs pierres & tuiles broyées & mêlées ensemble, dit Martinius. Cependant M. Félibien nous apprend que ce que les anciens Architectes nommoient cæmentum, ne s’entend pas de notre ciment à faire du mortier, qui est de la tuile cassée ; mais de leur manière de maçonner, & de la qualité de la pierre qu’ils employoient, comme lorsqu’on remplit des voûtes & des murs avec du moilon & du blocage.

Ciment est aussi un terme d’Orfévre, de Metteur en œuvre & de Graveur. Malthæ genus. C’est un composé de briques mises en poudre & bien tamisées, de poix résine & de cire, dont on se sert pour tenir en état les ouvrages qu’on veut graver, ou pour remplir ceux qu’on veut ciseler.

On dit proverbialement & figurément, qu’une affaire est faite à chaux & à ciment, quand on l’a si bien assurée par les clauses & conditions qu’on y a mises, quand elle est faite avec toutes les formalités capables de la rendre solide. Res adversùs eventus omnes firmata, secura.

Ciment signifie aussi en Morale, ce qui fait la liaison entre les personnes. Vinculum. La vertu est le meilleur ciment qui puisse lier les amis ensemble. Cette métaphore est un peu dure ; & en Morale ciment est moins élégant & moins usité que cimenter.

Ciment. Terme de Chimie. Voyez Cément.

CIMENTER. v. a. Lier avec du ciment, enduire avec du ciment. Signinum opus facere. Les jointures de ces pierres sont bien cimentées. Le bassin d’une fontaine doit être enduit & cimenté avec de bon ciment. Les murs étoient cimentés de bitume. Vaug.

Cimenter se dit aussi figurément, en parlant de ce qui lie & affermit quelque chose. Firmare, vincire, astringere. L’amitié de ces personnes est cimentée par des alliances réciproques. Les Martyrs ont cimenté la Foi par leur sang.

Mais un Roi vraiment Roi, qui sage en ses projets,
Du bonheur du public ait cimenté sa gloire ;
Il faut pour le trouver courir toute l’histoire. Boil.

En vain de l’Eglise naissante,
L’Enfer attaque le berceau :
Le sang des Martyrs la cimente,
Il en naît un peuple nouveau.

Nouv. choix de Vers.

Ces expressions sont élégantes, & de bon goût en notre langue.

CIMENTÉ, ÉE, part. Il a le significations de son verbe en Latin comme en François, tant au propre qu’au figuré. Les bâtiments cimentés sont les plus durables. On a vû les amitiés les mieux cimentées s’altérer par d’innocentes plaisanteries. S. Evr.

CIMENTIER. s. m. Homme de journée, qui bat le ciment, & qui en vend. Cæmentarius.

CIMETERRE, s. m. Grand coutelas, qui ne tranche que d’un côté, & qui est un peu recourbé par le bout. Gladius falcatus, acinaces. Darius portoit une ceinture d’or, d’où pendoit un cimeterre, qui avoit un fourreau couvert de pierres précieuses. Vaug. Les Turcs & les Orientaux sont armés de cimeterres, ont des cimeterres d’acier, de Damas.

Ce mot vient du mot turc scimatirre. Nicod dit que Charlemagne en ses lettres closes à Offa Roi des Merciens, rend le mot de cimeterre par gladius Hunistus, à cause que les Huns portoient cette sorte d’épée.

CIMETIÈRE, s. m. & non pas CIMÉTIÈRE. Lieu sacré destiné à enterrer les corps des défunts. ☞ Lieu béni & consacré avec les solemnités ordinaires, pour la sépulture des Fideles. Cœmeterium, sepulcretum, sepulcrorum frequentia, commune sepulcrum, sepulcralis area. Autrefois on n’enterroit personne dans les Eglises : mais dans les cimetières. Les cimetières ont toujours été en grande vénération parmi les Chrétiens. Le Concile d’Elvire, Can. 34 & 36. défend d’allumer des cierges pendant le jour dans les cimetières, & ch. 35. Il défend aux femmes de passer la nuit à veiller dans les cimetières. L’usage de bénir les cimetières est très-ancien. L’Evêque en faisoit le tour avec sa crosse, ou bâton pastoral, l’eau bénite étant portée devant lui. Hist. de Bret. par D. Lobineau, T. II, p. 208. Les Calvinistes, les Mahométans, ont aussi des cimetières à leur mode.

Dans les premiers siècles les Chrétiens faisoient leurs assemblées dans les cimetières, comme nous l’apprenons d’Eusèbe, Liv. VII de son Histoire Ecclésiastique, ch. 11. & de Tertullien qui appelle les cimetières où l’on s’assembloit pour faire les prières, areas. Tert. ad. Scap. C. 3. Valérien ayant apparemment confisqué les cimetières, & les lieux destinés au culte de Dieu, Gallien les rendit aux Chrétiens par un rescript public, qui est rapporté par Eusèbe, L. VII, C. 3. Il semble que les cimetières, & les lieux de Religion, y soient pris pour une même chose. Comme les Martyrs étoient enterrés dans les cimetières, ce fut là particulièrement que les Chrétiens bâtirent des Eglises, lorsque Constantin leur eut donné une entière liberté ; & on croit que c’est de cette coutume qu’est venue la règle qu’on observe aujourd’hui, de ne consacrer aucun Autel sans y mettre des Reliques des Martyrs. De Tillem. Hist. des Emp. T. III, p. 282, 283.

On a entendu autrefois par cimetière, non-seulement l’endroit où l’on enterroit les morts, mais aussi toutes les terres qui environnoient les Eglises paroissiales, & qui étoient contiguës aux vrais cimetières. Chorier, Hist. de Dauph. T. II, p. 47.

Ce mot vient du Lain cœmeterium, qui a été fait du Grec κοιμητήριον, qui veut dire, un dortoir, du verbe κοιμάω (koimaô), dormio, je dors ; parce qu’il semble que les défunts y dorment en attendant le jugement universel.

On dit figurément, que l’Italie est le cimetière des François, parce qu’il en meurt un grand nombre pendant les guerres qu’on a en ce pays-là. On le dit généralement d’un pays dont l’air est mortel pour les étrangers.

CIMIER, s. m. terme de chasse, en parlant du cerf, c’est la pièce de chair qui se leve le long du dos & des reins de l’animal, depuis les côtes jusqu’à la queue. Lumbus. Le droit du Roi à la chasse est le cimier du cerf avec les cuisses & les nombles.

À la boucherie le cimier de bœuf est une partie de la cuisse. Pars bovinæ coxendicis. On contient plusieurs tranches, chaque tranche contient trois morceaux, dont le premier s’appelle la pièce ronde ; le second la semelle, ainsi nommé à cause de sa figure ; & le troisième le tendre. Le derrière de cimierest contenu depuis les tranches jusqu’à la queue, & est à présent nommé cullotte.

Cimier. Terme de Blason. C’est la partie la plus élevée dans les ornemens de l’Ecu, & qui est au dessus du casque. Imposita summæ galeæ figura. Le cimier de France est une fleur-de-lis carrée. On l’a appelé ainsi du mot de cime, à cause qu’on le met à la cime du casque. Le cimier est l’ornement du timbre, comme le timbre est celui de l’Ecu. Les cimiers de plumes sont plus fréquens que les autres, & ils sont faits souvent d’une masse de plumes d’autruche ou de héron, & ces touffes de plumes dans les anciens tournois étoient nommées plumails ou plumarts. Elles se mettoient dans des tuyaux sur de hauts bonnets. Les cimiers se faisoient aussi de cuir bouilli, de carton, de parchemin, peints & vernis, quelquefois d’acier ou de bois, & on y représentoit souvent une piéce du Blason de l’Ecu, comme un aigle, ou une fleur-de-lis ; mais jamais une de ces pièces qu’on nomme honorables, comme pal, fasce, giron, &c. On en changeoit quelquefois selon la fantaisie, parce qu’il ne tenoit lieu dans le Blason que de devise & d’ornement. L’usage est très-ancien ; car Hérodote en attribue l’invention aux Cariens, qui les premiers portèrent des aigrettes & des plumes sur leurs caques, & peignirent des figures sur leurs boucliers. C’est pour cela que les Perses les appelèrent des coqs ; parce qu’ils paroissoient crêtés comme des coqs. Les anciens guerriers portoient des cimiers pour donner de la terreur à leurs ennemis par la vue des dépouilles des animaux qu’ils avoient domptés, ou pour se donner une mine plus formidable. On les portoir aussi par superstition, comme Tacite le témoigne des Æstyens, peuples voisins de la mer Baltique. Pyrrhus portoit pour cimier un grand panache, & des cornes de bouc. Plutarque, Vie de Pyrrhus. Diodore de Sicile dit que les Rois d’Egypte portoient des têtes de lion, de taureau, ou de dragon pour cimier.

Les cimiers ont servi de fondement à plusieurs fables : car les Anciens donnèrent à Sérapis une tête d’épervier, parce que ce cavalier en avoit un sur son cimier. Ils firent de Géryon un monstre à trois têtes, parce qu’il avoit un triple cimier. Ils feignirent que Prothée changeoit à tous momens de forme, parce que c’étoit un Roi d’Egypte qui changeoit tous les jours de cimier, & paroissoit tantôt avec une tête de lion, & tantôt avec celle d’un dragon, d’un ours, d’un cheval, &c. Les cimiers extravagans sont aussi fort anciens en Gaule, comme on peut recueillir de quelques témoignages de Plutarque & de Diodore de Sicile, en parlant des Gaulois & des Germains.

Le cimier est une plus grande marque de Noblesse, que l’Armoirie, parce qu’on le portoir aux tournois, où on ne pouvoit être admis sans avoir fait preuve de Noblesse.

Le cimier a servi de distinction à des factions différentes, les Monaldeshi, par exemple, Gentilshommes d’Orviète en Italie, s’étant divises, prirent les uns une biche, les autres un chien, les autres une vipère, & les autres une aigle pour cimier.

Le cimier sert aussi à la distinction des différentes branches d’une même famille.

Quelquefois on a fait son cimier de sa devise. Ainsi Côme de Médicis, dont la devise étoit un faucon d’argent, tenant un anneau d’or de sa serre droite, avec ce mot semper, en avoit aussi fait le cimier de ses armes. Le plus souvent on a pris une pièce de ses armes pour cimier. Ainsi le cimier de France est une fleur-de-lis carrée, celui de l’Empire un aigle, celui de Castille un Château, celui de Léon un Lion, &c. Les familles qui changent d’armes, comme ont fait les Brunswich & les Colones, ne changent pas pour cela de cimier. Ceux-là ont retenu le cheval, & ceux-ci la sirène.

Le cimier de plumes a été le plus généralement reçu chez tous les peuples. Le cimier n’est plus d’usage que dans le blason & dans les tournois. Voyez le P. Menestrier, dans ses Origines des ornemens des Armoiries. Les Anciens ont appelé le cimier crête, crista.

CIMMÉRIEN, ENNE. s. m. & f. Nom de peuple. Cimmerius, a. On trouve trois peuples différens qui ont porté ce nom. L’un étoit Scythe, & habitoit le long du Pont, proche le détroit de Caffa, qui s’appeloit de leur nom, le Bosphore Cimmérien. C’est une Colonie de ces Cimmériens qui pénétra dans le Jutland, où ils furent appelés Cimbres. D’autres Cimmériens étoient entre la Colchide & l’Ibérie, occupant la partie de la Géorgie, qui se nomme Havessen. Il y a encore eu des Cimmériens en Italie, proche du lac Averne & de Bayes. Ils vivoient dans des lieux souterrains, d’où ils ne sortoient que la nuit pour voler. C’est de ceux-là qu’Homere a parlé dans l’Odyssée.

Ce nom, selon Bochart, Chan. L. I, ch. 33, vient de כמר camar, ou cimmer, qui signifie nigescere, être noir, être obscur. C’est-là ce qui a donné occasion aux fables que l’on a faites sur ces peuples, aux ténèbres Cimmériennes, c’est-à-dire, aux ténèbres dans lesquelles ces peuples vivoient, & qui passèrent en proverbe pour signifier des ténèbres très-épaisses. D’autres disent que ce proverbe venoit de ce que les Cimmériens du Pont habitoient un pays toujours couvert de brouillards & de vapeurs ; d’autres, de ce que ceux d’Italie demeuroient dans des cavernes souterraines. On disoit aussi que l’entrée de l’enfer étoit dans leur pays.

CIMMÉRIS ou CIMMÉRIDE. s. f. Terme de Mythologie. Nom d’une Déesse. Cimmeris. Hésychius dit que Cimméris est la mere des Dieux, c’est-à-dire, Cybèle, & elle fut ainsi appelée, dit Vossius, de Idol. L. II, c. 52, parce que les Cimmériens l’honoroient.

CIMOLIE. s. f. Espèce de terre qu’on apporte d’une des Îles Cyclades, appelée Cimole, d’où elle a pris son nom. Terra cimolia. Cette terre est grasse, molle & blanche. Il y en a qui tire sur la couleurs de pourpre. Elle est bonne pour résoudre des parotides, les tumeurs des testicules & les enflures de jambes : elle est aussi propre pour la brûlure & pour en appaiser la douleur.

On donne encore le nom de cimolie ou cimolée à une certaines terre liquide qui tombe sous les meules des Couteliers pendant qu’ils aiguisent leurs couteaux & autres tranchans, à cause de sa ressemblance avec la cimolie des Anciens. La cimolée des Couteliers, car c’est plutôt cimolée que cimolie, est un mêlange des parties de la meule même & du fer liquéfiées par l’eau. On se sert de la cimolée en Médecine. Elle est astringente & résolutive. On l’emploie aussi dans la teinture pour teindre en noir.

☞ CIMOSSE. s. f. En italien Cimossa. Lisière pratiquée par les Génois à certains damas pour meuble. Encyc.

☞ CIMPA. Petite ville d’Asie, au Royaume de Tonquin, à l’orient de Ketoi.

CIN.

CINABRE & CINNABRE. s. m. Vermillon, couleur rouge. Cinnabaris. Plusieurs ont cru que le cinabre n’est autre chose que le sang de dragon, qu’on recueille lorsque le dragon & l’éléphant se battent ensemble, comme disent Solin, Pline & Isidore ; mais c’est une fable réfutée par Dioscoride & par Scaliger : Dioscoride n’a pas expliqué ce que c’étoit que le cinabre ; la plûpart des Modernes croient qu’il a entendu la larme d’un arbre qui vient en Afrique, laquelle est d’un très-beau rouge, & qu’on appelle sang de dragon. Ce qu’on nomme à présent cinabre est toute autre chose.

☞ Les Naturalistes entendent par cinabre un demi-métal qui se forme naturellement, & qui renferme le mercure : on le distingue en naturel & en artificiel.

Le cinabre naturel ou minéral est un mêlange de mercure & de soufre, qui se sont sublimés ensemble par le moyen de quelque chaleur souterraine : il est d’une très-belle couleur rouge. On le trouve dans les veines des mines d’argent, & sa couleur est plus ou moins haute, & selon la pureté du minéral, & selon le lieu où sont ces mines. On en apporte de Hongrie, de Transilvanie, de plusieurs endroits d’Allemagne ; mais le plus beau se trouve dans la Carinthie. C’est un bon remède dans les maladies vénériennes, & dans plusieurs autres qui sont causées par des sérosités âcres.

M. Adam Hofsheter, premier Médecin du Roi de Dannemark, a donné au public l’analogie du cinabre naturel, qu’il prétend être un remède salutaire en plusieur occasions. M. Jean Godefroy de Beker, premier Apoticaire du même Roi, a regardé ce sentiment comme une opinion dangereuse, & a publié un écrit pour montrer les maux que le cinabre naturel peut produire dans le corps humain. Il prétend qu’on espère en vain à force de lotions ôter au cinabre sa malignité arsénicale ; qu’il s’est assûré par plusieurs expériences, qu’on tire du vif argent de tout cinabre, & qu’on n’en sépare le soufre arsénical que par le feu.

Le cinabre artificiel, est un mêlange d’un quart de soufre & de trois parties de vif argent sublimés. On prend une partie de soufre, qu’on fait fondre dans une grande terrine : on y mêle peu-à-peu trois parties de mercure coulant : on remue le tout, & on le tient en fusion jusqu’à ce qu’il ne paroisse plus de mercure. On pulvérise alors ce mêlange, & on le met sublimer dans des pots à feu ouvert & gradué. Par ce moyen on a une masse dure & d’une couleur très-rouge, qui sert au même usage que le cinabre naturel. On prépare aussi un cinabre d’antimoine, qui est fait avec le vif argent & le soufre d’antimoine.

On dit, révivifier le cinabre.

Ce mot vient du grec κινάϐρα (kinabra), qui signifie l’odeur des boucs, une odeur insupportable, parce qu’au rapport de Mathiole, lorsqu’on tire de terre une espèce de cinabre fossile, il jette une odeur si forte & si desagréable, qu’on est obligé de se boucher le nez, & de se couvrir le visage, de peut d’être infecté.

Vossius, dans son étymologie, écrit cinnabari. Καννίϐαρι (Kannibari), qui est un mot indien que l’on trouve dans Pline, liv. 33, c. 7, dans Hésychius, dans Théophrate, περὶ λίθων (peri lithôn), & dans Dioscoride, l. 5, c. 110. Ce mot dans la langue des Indiens, signifie sang de dragon. Arien, in Periplo, dit que c’est la gomme d’un arbre indien.

CINÆDUS. s. m. Nom d’un oiseau dont Galien ordonne de se frotter les paupières, lorsqu’on en a fait tomber les poils trop longs, comme il arrive dans le trichiasis. Galien de comp. Med. S. L. Liv. IV, cap. 8. C’est un oiseau de mer, qu’il est très-difficile d’avoir.

☞ CINALOA. Province de l’Amérique septentrionale au Mexique, sur la côte orientale de la mer de Californie.

CINAMOME. Voyez Cinnamome.

☞ CINAN. Grande ville de la Chine, première métropole de la Province de Channton. Elle a trente cités dans son territoire. Elle est de 30′ plus orientale que Peking. Lat. 37°.

CINCELIER. s. m. Pulvinus, Pulvillus. Ce mot est hors d’usage, il veut dire, un coussin, un oreiller, un canape. On a dit aussi cuicelier pour cincelier.

CINCENELLE. s. f. Terme de rivière. C’est une corde de médiocre grosseur, qui sert aux bateliers à remonter leurs coches & bateaux, une espèce de petit cable. Funis nauticus.

CINCHEU. Voyez Cingcheu.

CINCHEU. Grande ville de la Province de Quangsi à la Chine, capitale d’un territoire de même nom. Elle est de 8° plus occidentale que Peking, par les 33° 55′ de lat.

CINDIADE. adj. f. Terme de Mythologie. Surnom de Diane. La statue de Diane Cindiade, dit Polybe, avoit cela de singulier ; que quoiqu’elle fut à l’air, il ne pleuvoir ni ne neigeoit jamais dessus. On n’est pas obligé de croire Polybe sur sa parole.

CINDRE & SINDRE. Nom d’un instrument de Charpentier. Ce mot est formé de centrum.

CINÉFACTION. s. f. Opération de Chimie. Voyez Cinération. C’est la même chose. Mais ce dernier est plus usité.

CINÉFIER. v. a. Réduire un corps en cendres par la violence du feu. Cinefacere. Il n’est pas en usage.

CINÉRAIRE. adj. Qui appartient à la cendre. On ne le dit qu’en parlant des urnes qui renfermoient des cendres. En creusant la terre au village d’Alleaume, proche de Valognes en Normandie, vers la fin du XVIIe siècle, on trouva des urnes cinéraires. Supplément du Mercure de Mai 1722.

☞ On appeloit urnes cinéraires, celles où étoient renfermées les cendres qui entroient dans la poudre dont se servoient les femmes chez les Romains.

☞ Et l’on appeloit cinéraires, s. m. un domestique occupé à friser les cheveux & à préparer ces cendres. Cinerarius.

☞ On appeloit aussi cinerarium, le tombeau, l’urne où l’on renfermoit les cendres d’un corps.

CINÉRATION. s. f. Terme de Chimie. C’est la réduction du bois, ou autres corps combustibles, en cendres, par la violence du feu. Solutio in cineres, cinefactio. On l’appelle aussi cinéfaction.

☞ CINÉTINIQUE. s. f. La science du mouvement en général, dont la méchanique n’est qu’une branche. Encyc.

☞ CINGCHEU ou CINCHEU. Grande ville de la Province de Channton à la Chine. Elle a quatorze villes dans son département. Elle est d’un degré plus orientale que Peking. Lat. 26° 36’.

CINGLAGE ou SINGLADE. s. m. Terme de Marine, qui signifie le chemin qu’on croit qu’un vaisseau fait en 24 heures. Spatium quod intra viginti quatuor horas navis decurrit. C’est plutôt le chemin que fait le vaisseau, ou qu’il peut faire en 24 heures. Il signifie quelquefois le loyer des gens de mer. Naulus.

☞ CINGLAIS ou CINGLOIS. Canton de France en Normandie, entre Falaise & la rivière d’Orne.

CINGLEAU. s. m. Terme d’Architecture. C’est une espèce de cordeau qui sert pour trouver & décrire la diminution des colonnes.

CINGLER. v. n. Naviguer avec un vent favorable, & à pleines voiles. Courir sur une route quelconque. Passis velis ferri, invehi. Il vient du latin cingulare. Il cingla avec cent voiles vers les Îles. Cingler en haute mer à pleines voiles. Bouh. Cingler en haute mer, à l’est, à l’ouest.

Cingler est aussi un verbe actif, & signifie fouetter, frapper avec une houssine, avec une corde ; en général avec quelque chose de délié & de pliant. Ce Cocher lui a cinglé le visage d’un coup de fouet, d’une houssine.

On dit aussi que le vent cingle, lorsqu’il est froid & cuisant, & qu’il fait le même effet sur le corps, que feroient les coups de fouet, lorsqu’il coupe le visage. Urere. On le dit de même de la pluie, de la grêle, de la neige.

Cingler, dans ce sens de fouetter, vient apparemment de cingulum, ceinture, parce que la houssine, ou la corde de laquelle on le dit, entourent le corps de celui qu’on en frappe, & lui font comme une ceinture.

CINNABRE. Voyez Cinabre, Cinnamie. s. m. Mot Arabe dont se sert Mésué, & par lequel il entend la cannelle grossière, comme il entend la plus fine par celui d’archemi.

CINIQUE. Voyez Cynique.

CINNAMOME. s. m. Arbre qui croît en quelques endroits des Indes orientales, & dont les Anciens ont parlé si confusément & si diversement, qu’il paroît bien que cette plante leur étoit fort peu connue. Cinnamomum. Il y en a même qui ont débité plusieurs fables à ce sujet : mais depuis les longues navigations des Hollandois & des Portugais, on a été suffisamment éclairci ; de sorte qu’on ne doute plus à présent que le cinnamome des Anciens ne soit notre cannelle. Elle est appelée en latin cinnamomum ; c’est-à-dire, amomum de la Chine, parce qu’on croyoit autrefois qu’elle en venoit ; mais on se trompoit, puisque le cinnamome ou la cannelle, ne croît qu’en l’Île de Ceilan & sur la côte de Malabor.

Le mot Cinnamome vient de l’hébreu, קנמון, Kinnamon. d’où les Grecs & les Latins, les François, &c. ont formé le nom qu’ils donnent à cet arbre. Voyez Cannelle.

Cinnamome. Nom d’oiseau. Aristote parle d’un oiseau d’Arabie qu’on appeloit cinnamome, parce qu’il faisoit son nid de verges & de branches de cinnamome, dont Solin fait aussi mention.

CINQ. Terme numéral, qui est le second des nombres impairs, & qui suit le nombre de quatre. ☞ les cinq sens. Cinq aunes d’étoffe. Nous trouvâmes cinq personnes. La lettre finale q ne se prononce point quand le mot cinq est suivi immédiatemenr & sans repos, d’un mot qui commence par une consonne. Cinq mois. Dans les autres cas le q se prononce. Cinq ans. Prêter son argent à cinq pour cent.

Cinq est aussi substantif. Un cinq est le chiffre qui marque le nombre cinq. Un cinq ou chiffre Arabe est formé ainsi 5, & en chiffre romain V.

☞ Le cinq. Voyez Entremain.

On appelle un cinq au jeu de cartes, une carte qui a cinq marques, un cinq de carreau, un cinq de trèfle ; & aux dez, le côté du dé qui est marqué de cinq points. Acad. Fr.

On dit proverbialement, donner cinq & quatre la moitié de dix-huit, c’est-à-dire, donner deux soufflets ; l’un de la paume de la main, ou les cinq doigts assemblés frappent ensemble ; l’autre du revers de la main, auquel il n’y a que quatre doigts qui frappent, parce que le pouce demeure en arrière sans action. On dit aussi, mettre cinq, & retirer six, en parlant de ceux qui mettent les cinq doigts dans un plat, & qui retirent quelque bon morceau qui fait le sixiéme. Ces façons de parler sont tout-à-fait basses & triviales.

CING EGLISES. Ville de la basse Hongrie, sur la rivière de Keoriz. Quique Ecclesiæ. Elle a pris son nom du nombre de ses Eglises.

☞ CINQ PORTS. Nom par lequel on désigne cinq villes maritimes d’Angleterre, situées sur la côte qui regarde la France. Ces cinq villes sont Hurthings, Rommey, Hythe, Douvres & Sandwich. Les députés qu’elles envoient au Parlement sont qualifiés Barons de Cinq Ports.

CINQ SOUS. Nom de quelques Villages sur nos cartes géographiques, & mis pour Saint Sous, qui se dit, par corruption ; pour Saint Ceols ou Ceouls. Il y a Cinq Sous ou plutôt Saint Sous en Berry, & Saint Sous dans le Diocès de Paris. Voyez Ceols. Saint sous, & par corruption, Cinq Sous en Berry, est entre Bourges & Sancerre, & à peu près à moitié du chemin de l’un à l’autre, ce qui a fondé ce proverbe, ou dictum, qui se dit dans le pays, en allant de Bourges à Sancerre, on trouve toujours cinq sous pour boire. Il est fondé sur l’équivoque de cinq sous, qui signifie de l’argent, de la monnoie, & Cinq Sous ou Saint Sous, ou Ceouls, petit bourg où l’on s’arrête pour dîner, quand on va de l’une à l’autre de ces villes.

CINQUAIN. s. f. Terme de Guerre, est un ancien ordre de bataille composé de cinq bataillons, ou de cinq escadrons. Quand on les a mis de front sur un terrain, on fait avancer le 2e & le 4e pour former une avant garde ; du 3e, on forme une arrière garde, & du premier & du 5e un corps de bataille qu’on laisse sur son terrain. Cuneus. Cette façon de ranger se peut pratiquer quand on a 10, 14, 20 bataillons avec le même ordre.

CINQUANTAINE. s. f. Terme collectif qui désigne le nombre de cinquante. Quinquagenarius numerus, quinquaginta. Il y a une cinquantaine de pistoles de pot de vin pour celui qui fera une telle affaire. La Quinquagésime est une cinquantaine de jours. On appelle à Rouen la cinquantaine, une compagnie d’arbalêtriers composée de cinquante hommes de cheval, & obligée de faire le guet pendant la nuit pour empêcher les désordres qui pourroient arriver. Descript. Géogs. & Hist. de la hautre Normandie, tom 2. pag. 161. Il y a à Caudebec une compagnie appelée la cinquantaine, comme à rouen. Ibid, tom. 1, p. 8.

On dit d’un homme qui a cinquante ans accomplis, qu’il a la cinquantaine. Acad. Fr.

Cinquantaine. Compagnie bourgeoise de cinquante hommes. L’Officier qui la commande porte le nom de cinquantenier. Vous pouvez faire un gros de Gentilshommes, un gros de valets de chambre, auquel vous joindrez la cinquantaine & les archers. M. De la Rochefoucaut. En cet endroit la cinquantaine se prend pour toute la Milice bourgeoise de Paris, divisée en compagnies de cinquante chacune.

CINQUANTE. Nombre composé de cinq dixaines. quinquaginta. Les compagnies de cavalerie sont composées pour l’ordinaire de cinquante Maîtres.

☞ CINQUANTENIER. s. m. Celui qui commande cinquante hommes. On ne le dit qu’en parlant des Officiers de la Police & de la milice des villes. À Paris c’est un Officier qui exécute les ordres de la Ville, qu’il reçoit du Quartinier, pour les faire savoir aux bourgeois. Dux quinquagenorum militum. Chaque quartinier a sous lui deux Cinquanteniers. L’obligation des Quartiniers, Cinquanteniers Dixainiers & Bourgeois, est dès aussitôt qu’un crime a été commis, & qu’il est venu à leur connoissance, d’en avertir le Commissaire du quartier, & de se joindre à lui, s’il en est besoin, pour y pourvoir. De la Mare.

Cinquantenier étoit autrefois le Juge d’un Village & petit lieu, comme les Centeniers l’étoient des lieux un peu considérable, & les Comtes des grosses villes. De la Mare, Tr. de la Police, L. I, T. VII, C. I.

CINQUANTIÈME. adj. de T. g. Nombre d’ordre. Quinquagesimus. Les Juifs solemnisoient leur grand Jubilé en la cinquantième année : alors chacun rentroit en son héritage, & les valets ou esclaves recevoient leur liberté.

Il est aussi substantif, & signifie la cinquantième partie d’un tout. Il a un cinquantième en cette affaire ; on fait payer le cinquantième en telle Douane. Pars quinquagesima.

☞ Le cinquantième, en matière d’impôts, est une imposition qui a été levée dans certains temps pour les besoins de l’Etat. Philippe le Bel leva le cinquantième sur le Clergé.

CINQUENELLE. s. m. Terme d’Artillerie, par lequel on comprend tous les longs cordages qui servent à l’Artillerie. Funes trahendis muralibus machinis. Quelques-uns disent aussi cincelle, qui est une espèce de petit cable.

CINQUIÈME. Nombre d’ordre. Quintus. ☞ Le cinquième Roi de la première Race. Vous trouverez cela dans le cinquième volume, à la cinquième page. La cinquième classe.

☞ On dit absolument la cinquième, pour désigner la cinquième classe d’un collège, en commençant à compter par la rhétorique. Il fait sa cinquième en tel collège : & l’on appelle cinquième, un écolier qui étudie dans la cinquième classe. In quintà Scholà auditor.

Cinquième est aussi quelquefois substantif, & signifie une partie d’un tout divisé en cinq. Quinta pars. On ne peut disposer que d’un cinquième de ses propres par la Coutume de Paris. Ce Fermier n’est que pour un cinquième dans cette Ferme.

☞ Le cinquième est aussi une imposition dont les Rois ont quelquefois ordonné la levée pour les besoins de l’Etat.

☞ En matière de fiefs, le cinquième qui appartient au Seigneur, s’appelle quint. Droit de quint. Voyez ce mot.

CINQUIÈMEMENT. adv. En cinquième lieu : il se dit seulement des raisons ou des discours divisés par articles. Cinquièmement il est ordonné. On l’explique aussi le plus souvent par le mot latin quintò.

☞ CINTHIEN. Cynthius. Surnom donné à Appollon, à cause d’une montagne de ce nom dans l’Île de Délos, où il avoit un temple. On appeloit aussi Diane, Cynthia à cause du culte qu’on lui rendoit dans cette Île.

CINTIEN. Ville de la Chine, dans la Province de Junnan, sur les frontières de celle de Queicheu.

CINTHUS. s. m. Nom propre d’une haute montagne de l’Île de Délos. Cinthus. Voyez Délos.

CINTRAGE. s. m. Terme de Marine, qui signifie toutes les cordes qui ceignent, qui lient, & qui entourent quelque chose. Navis retinacula.

CINTRE ou CEINTRE. Terme d’Architecture. Trait d’arc, ou figure courbe qu’on donne à une voûte, à une arcade. Arcus quem structus fornix efficit. La salle du Palais à Paris est voutée en plein cintre ; c’est-à-dire, fait en demi-cercle parfait. Arcus integer. Il y a des voûtes qui ne se font pas en plein cintre, qu’on appelle autrement surbaissées, ou en anse de panier, qui ne font qu’une portion de cercle. Arcus diminutus, delumbatus. Un cintre surmonté, est celui dont le centre est plus haut que le diamètre du demi-cercle. Arcus in acumen fastigiatus. Cintre rampant, est celui qui est tracé au simbleau, par des points cherchés, suivant le rampant d’un arc boutant, ou d’un escalier. Arcus inclinatus.

CINTRE, dans le langage de la coupe des pierres, (c’est-à-dire, en termes d’Architecture,) signifie le contour arrondi de la partie intérieure d’une voûte, pris en un endroit déterminé, ou perpendiculairement à la direction, alors il s’appelle l’arc droit, ou obliquement à l’arrête d’une face biaise ; alors il s’appelle cintre de face, ou arc de face. Frézier.

Celui de ces deux cintres, qu’on a le premier en vue pour tracer la voûte, s’appelle cintre primitif. Celui qui résulte de cette première déterminaison, s’appelle cintre secondaire.

Par la nature des sections cylindriques, dans les voûtes biaises, ces deux cintres sont de même hauteur, mais d’inégale largeur & contour : si l’un est circulaire, l’autre est elliptique, & si l’un & l’autre sont elliptiques, l’un est plus alongé que l’autre, & leurs divisions en voussoirs sont proportionnelles ; celles du secondaire sont assujéties à celles du primitif.

Les cintres, considérés dans la figure de leur contour, ont différens noms : celui qui est en demi-cercle complet, s’appelle plein cintre ; celui qui étant supposé de largeur égale ne s’éleve pas à même hauteur que le demi-cercle, s’appelle une anse de pannier, ou surbaissé ; celui qui dans la même supposition s’éleve au dessus du demi-cercle ; s’appelle surhaussé, ou surmonté ; celui qui est d’un arc de cercle beaucoup moindre que sa moitié, comme du quart ou du sixième, s’appelle bombé. Frézier.

Cintre signifie aussi cette construction ou cette assemblage de charpente, qu’on fait pour bâtir de grandes voûtes, y soûtenir les pierres, en attendant que les clefs y soient mises pour les fermer. Le moindre cintre, est composé d’un entrait, qui lui sert de base, d’un poinçon, de deux contre-fiches, de quatre autres pièces de bois cintrées, ou de deux arbalêtriers, ou de deux dosses sur lesquelles on maçonne un cintre de moilon. On l’appelle armatura en italien. Arcus ligneus struendo desuper fornici accommodatus, ligneum fornicis fulcrum.

Cintre. Terme de Charpentier. Si le plancher qui sert de forme à la voûte est plat, la Charpenterie qui le soûtient ne s’appelle plus cintre, mais étayement. Frézier.

☞ CINTRE, outil de Charron, regle ou barre de bois plate qui sert aux Charrons pour mettre les roues à la hauteur qu’elles leur sont commandées.

☞ On appelle cintre à l’Opéra, la partie du plancher de la salle qui est sur l’orchestre. C’est là que sont les machines par le moyen desquelles on exécute les vols, la descente des chars.

On écrit cintre ou ceintre, l’un & l’autre est usité, & vient de la même étymologie, cinctus, de cingere, environner ; d’où s’est fait ceindre & ceinture, & de-là cintre ; & comme on écrite ceindre & ceinture, il paroît que ceintre est mieux que cintre. Ménage le dérive de centrum, parce que les cintres aboutissent à un centre.

☞ CINTRER. v.a . Faite un cintre, bâtir en cintre, faire un ouvrage en cintre. Arcuare, concamerare. Il faut cintrer cette porte, cette galerie.

☞ C’est aussi commencer à faire les voûtes, ou mettre la charpente sur laquelle on les construit. Arcum ligneum struendo desuper fornici accommodare. Cette Eglise est déjà fort élevée, on est prêt à cintrer.

CINTRÉ, ÉE. part. Tout ce qui est courbé en demi-cercle, s’appelle cintré. On dit des portes & des fenêtres dont le haut est en demi-cercle, qu’elles sont cintrées. On dit une bordure cintrée. Une glace de miroir cintrée, &c.

Cintré, en termes de Blason, se dit du Globe ou Monde Impérial entouré d’un cercle, ou d’un demi-cercle en forme de cintre. Vinctus circulis aut hemicyclis. On dit aussi des couronnes fermées des Rois, qu’elles sont cintrées de tant de cintres ou diadèmes, c’est-à-dire, de tant de cercles ou demi-cercles.

CIO.

☞ CIOKING. Ville de la Chine, dans la Province de Junnan.

CION. s. m. Jet d’arbre. On écrit Scion. Voyez ce mot.

CION. s. m. Terme de Médecine. Arétée entend par ce mot, un corps solide qui est suspendu au palais entre les amygdales. Il dit qu’on l’appelle aussi, gargaréon, & que staphile est le nom d’une maladie à laquelle cette partie est sujette. Ce corps est nerveux, mais humide, parce qu’il est situé dans un lieu humide. Aretée, de causis & signis acut. morb. Lib. I, cap. 8. Cion est aussi le nom d’une maladie ; c’est proprement le gonflement de la luette, ou cet état dans lequel, parvenue à une grosseur extraordinaire, elle pend, représentant une colonne : Κίων (Kiôn), en grec, signifie une colonne. C’est par la ressemblance de la luette avec une certaine excroissance caronculeuse dans les parties naturelles de la femme, qu’Hippocrate s’est avisé de donner à celle-ci le nom de cion. Dict. de James.

☞ CION. Ville d’Asie, Capitale d’un Royaume de même nom, dans l’Ile de Celebes. Cette Ville est située au fond d’un Golfe, à cinquante lieues de Macacar.

CIONIA. s. f. C’est, selon Dioscoride, l’entre deux des pourpres & des porcelaines, autour duquel leur coquille est entortillée, & clouée, comme avec de petits clous. Sa cendre est plus brûlante que celle des pourpres.

☞ CIOULE. (la) Rivière de France, qui a sa source aux piés du mont d’or en Auvergne, & se perd dans la Loire au dessous de Saint Pourçain.

CIOUTAT. Mot Provençal, qui signifie Ville, Cité, & qui s’est formé du latin Civitas comme l’Espagnol Ciudad. La Cioutat, Ville & Port de mer en Provence, entre Marseille & Toulon, n’est point l’ancien port appelé Citharistes par Méla, Liv. III, ch. 4, & par Pline Promontorium Citharista, L. III, C. 4, & dont Ptolomée & Antonin parlent aussi. L’ancien Cithariste, ou Citariste, comme quelques-uns écrivent, est apparemment le bourg qu’on nomme aujourd’hui Céreiste, à une lieu de Cioutat dans les terres. La mer s’étant retirée de ce lieu, comme d’Aiguesmortes, & de plusieurs autres endroits de cette côte, la meilleure partie de Cithariste s’est approchée de la mer, & a formé une Ville, qu’on a nommé la Cioutat, c’est-à-dire, la Cité, ou la Ville ; & Cithariste est devenu un bourg. Berthelot, Professeur d’Hydrographie à Marseille, écrit Sciotat, dans sa carte marine de la Méditerrannée, mais mal. Michelot & Thérin dans la leur écrivent Ciotat.

Cioutat. s. m. Est le nom d’une sorte de raisin. Il est fort semblable en tout au chasselas, pour la couleur, la grosseur & le goût. La feuille en est très-différente ; celle du Cioutat étant toute déchiquetée, comme des feuilles de persil. Il me semble qu’il rapporte un peu davantage que le chasselas ; mais j’aime mieux le chasselas. La Quint.

CIP.

CIPIA. s. f. Nom d’une ancienne famille Romaine. Cipia gens. On ne trouve ce nom que sur des médailles Consulaires, qui sont même assez rares, & sur lesquelles on lit M. CIPI. M. F. avec une tête de Rome casquée, ou une tête de Jupiter couronnée de laurier ; & au revers une bige, ou une pouppe de navire, avec ce mot ROMA, dans l’exergue. M. Patin croit que la famille Cipia est la même que la famille Cispia ; que, selon l’ancienne manière d’écrire, on retranchois quelquefois l’s, & qu’il y en a des exemples dans les Inscriptions antiques. Il est vrai qu’il rapporte des inscriptions où on lit CISPIUS & CISPIA, & une où l’on trouve CIPIA, mais il ne s’ensuit pas que ces personnes aient été de même famille. Néanmoins cela ne détruit pas non plus la conjecture de cet Antiquaire.

CIPOLLINI. s. m. Nom que les Italiens donnent à une sorte de marbre, dont la couleur tire sur le vert, par de grandes veines, plus ou moins fortes. Ce marbres sert à faire des pilastres, de grandes tables, & d’autres ouvrages ; mais il n’est pas propre pour les statues. Il se trouve dans les montagnes de Carrare, & en d’autres lieux.

CIPOREME. s. f. Espèce d’ail qui croît au Brésil, & qui n’a point de feuilles. Ciporema. Ray. Index.

CIPPE. Terme d’Architecture & d’Antiquaire. Cippus. C’est une petite colonne peu haute qu’on érigeoit dans les grands chemins, ou ailleurs, & sur laquelle on mettoit le plus souvent des inscriptions, ou pour apprendre les chemins aux voyageurs, ou pour conserver la mémoire de quelque chose. On voit des cippes sur plusieurs médailles. Les cippes, qui se mettoient sur les routes, pour la commodité des voyageurs, s’appellent proprement colonnes miliaires, parce qu’on y marquoit combien il y avoit de milles d’un lieu à un autre. Hortinger a fait un petit ouvrage de Cippis Herbræorum, des Cippes des Hébreux, dans lequel il prend Cippe pour tombeau, ou pour tout monument qui se met sur le tombeau d’un mort. Il se dit encore pour une petite butte ou élévation de terre.

Cippe étoit aussi dans l’antiquité un instrument de bois qui servoit à tourmenter les coupables & les esclaves.

☞ C’étoient des espèces d’entraves qu’on leur mettoit aux piés.

César se sert encore du mot cippus pour désigner des pieux pointus, enfoncés en terre pour embarrasser un passage.

CIPRÈS. Voyez Cyprès.

CIR.

☞ CIRAGE. s. m. Action de cirer, ou l’effet qui résulte de cette action. Ceratura. Ce cierge a été fort long, & est mal fait. Le Cirage d’un appartement.

☞ On le dit aussi de la cire appliquée sur quelque chose. Cirage des bottes, cirage des toiles, des gants.

Cirage, en termes de Peintures, est un tableau peint en camayeu de couleur de cire jaune. Cet terme est peu utile & ces sortes de tableaux sont regardés comme de vrais camayeux. Pictura monocromatos monocromatea, monocromatum, monocromatus, monochronum.

CIRCAISSE. s. f. Au lieu de Circasse. Du Loir a dit Circaisse. Les Turcs seuls peuvent avoir en Turquie des femmes de toute sorte de religion, & privativement à tous autres des Circaisses, parce qu’elles sont ordinairement si belles, qu’ils en sont jaloux. Du Loir, p. 176.

CIRCASSE. s. m. Peuple qui habite la Circassie. Circassus. On dit Circasse & Circassien. Les Turcs les appellent Charkes. Les Circasses se retirent dans d’épaisses forêts, pour être à couvert des Tartares, qui les vendent cherement pour esclaves, parce qu’ils sont bien faits, beaux & adroits. Maty. Quoique les Circasses aient leurs Princes particuliers, uls sont tributaires des Moscovites. Voyez Oléarius, Herbert & Tavernier, dans son Voyage de Perse, L. III, c. 11.

Les Tartares Circasses, voisins des Nogais, sont plutôt tributaires que sujets du Kan. Leur tribut consiste en miel, ou fourrures, & en un certain nombre de jeunes garçons & de jeunes filles. Ces peuples ont le sang parfaitement beau. Ils ont leur langue particulière, qu’ils parlent avec beaucoup de douceur. Leurs mœurs, quoique toujours farouches & sauvages, ne le sont pas tant, à beaucoup près, que celles des Nogais. Il y a parmi eux des vestiges du Christianisme, & ils font carresse aux Chrétiens qui vont chez eux. Leur pays, que les Tartares Précops nomment l’Abba, est bon & fertile ; l’air y est très-pur, & les eaux y sont fort bonnes. Ses limites sont au Nord, le fleuve Kouban & les Nogais au Midi, la Mer Noire ; à l’Orient, la Mingrelie ; à l’Occident, le Bosphore Cimmérien, & parti du limen, ou mer de Zabache. L’Adda est presque moitié plaines & moitié montagnes. Les Circasses des montagnes, font leur demeure dans les bois, & ne sont pas si sociables que les autres : ceux des plaines ont des villages & quelques petites villes sur la mer Noire, où il y a du commerce. Les Beys ou Seigneurs qui les gouvernent, trafiquent de leurs vassaux, & les peres & meres de leurs enfans. Les Circasses passent pour être plus adroits à manier les armes à la chasse, que vaillans à s’en servir dans le combat. Mém. des Miss. du Levant, 1715. Voyez ce livre, p. 26 & suiv. p. 95 & suiv.

CIRCASSIE, pays habité par les Circasses. Circassia, Circassi, Mœtæ, Comania. C’est un grand pays que quelques Géographes mettent dans l’Asie, & d’autres dans l’Europe. Il est entre la mer Noire & le mont Caucase, qui la sépare de la Georgie au midi. Il a le détruit de Caffa la mer de Zabache au couchant ; le Don ou Tanaïs au nord ; & le Volga avec la mer Caspienne au levant. La Circassie dépend du Czar de Moscovie. On l’appelle autrement, Comame. Maty. D’autres la distinguent de la Comanie, & disent que la Circassie est un pays d’Asie, situé entre la Comanie à l’orient, la Moscovie au Nord, la Mingrelie au couchant ; la Georgie en partie au midi. La Circassie est un beau pays fort diversifié : on trouve en ce pays-là toutes sortes de fleurs, & sur tout de belles tulipes. Les campagnes sont remplies d’arbres fruitiers qui y viennent fort bien. Il y a en Circassie grande quantité de bétail & de fort bons chevaux ; il n’y a point de villes ni de forteresses, mais seulement des villages, dont les maisons sont disposees en rond, avec une place au milieu. Tavernier, Tom. I. Le côté de la Circassie par où nous entrâes, est plein de hautes montagnes & de profondes vallées, ombragées de quantité de grands arbres. C’est de-là que le Kan de Krimée tire ses plus grandes richesses en esclaves. Tout le monde y est d’une beauté enchantée. Mém. des Miss. du Lev. 1714. Voyez ce livre, p. 119 & suiv.

CIRCASSIEN, ENNE. s. m. & f. Qui est de Circassie. Circassus. On le dit aussi-bien que Circasse. Les Circassiens ont été autrefois Chrétiens & la plupart font encore profession du Christianisme, mais n’en font aucun exercice. Les autres se disent Mahométans. Les Circassiennes sont fort bien faites, & ont le visage beau, le teint blanc & uni, les joues fort colorées. La Sultane Validé, Circassienne de nation, femme d’un esprit fort élevé, se donna un coupe de poignard dans sa douleur. Mem. des Miss. du Lev. 1715. Les Circassiens aiment fort la chasse. Les Circassiens ont le plus beau sang du monde. Les Princes & les Seigneurs d’Asie remplissent leurs serrails de Circassiennes.

Ce mot est aussi adjectif. Un paysan, un soldat, un cavalier Circassien ; une femme, une esclave Circassienne.

CIRCÉ. s. f. nom ☞ d’une célèbre Magicienne. Terme de Mythologie. Circe. Selon Homere, elle étoit fille du Soleil, & de la Nymphe Persa, fille de l’Océan, ou, selon le faux Orphée, d’Apollon & d’Astérope ; & elle fut fort habile dans l’art des poisons. Elle épousa le Roi Sarmatare, dont elle ravit le Royaume après l’avoir empoisonné. Comme elle tyrannisoit ses sujets, ils se révoltèrent ; & elle se retira en Italie, & donna son nom à la montagne & au promontoire, où elle habitoit. Circœus mons, Circœum, ou Circeium promontorium. Lactance dit, L. I, c. 21. qu’elle porta le nom de Marique, où Marice, Marica. Les Minturniens l’adoroient sous ce nom, quoique d’autres prétendent que ce fut Vénus. On conte cent effets fabuleux de ses enchantemens, que Bochart croit avoir été inventés par les Phéniciens, sur ce qu’elle s’étoit retirée chez les Latins, & qu’en Phénicien, comme en Hébreu, לט, lat, & au pluriel לטם, latim, & לטן, latin, signifie enchantement. Voyez Homere, Odyss. L. X, Loyd, Hoffman, Bochard & Vossius, de Idolol. L. I, c. 40.

CIRCÉE. s. f. Circœa. Plante qui a sa racine blanche, noueuse, oblique, rampante, chargée de quelques fibres. Ses tiges sont droites, menues, arrondies, pleines de moëlle, vertes, un peu velues, & garnies de feuilles opposées, larges à leur base, pointues à leur extrémité, assez semblables à celles de la Morelle, mais un peu plus velues, dentelées sur leurs bords, & attachées à des queues longues de demi-pouce. Ces tiges se terminent par un épi de fleurs assez écartées les unes des autres, petites, & composées de deux pétales blanches, & taillées en cœur : deux étamines & un pistil occupent leur milieu. Le calice de ces fleurs est fermé par de petites feuilles vertes, rabattues dans le temps que la fleur s’épanouit, & qui tombent ensuite avec les pétales. Il succéde à la fleur un fruit fermé par la base du calice qui est taillée en petite poire verdâtre, velue & divisée en deux loges, qui renferment chacune une semence oblongue. Cette plante croît dans les bois, & dans des lieux humides, en plusieurs endroits du Royaume. Elle vient assez abondamment aux environs de Paris. On l’a nommée aussi Circœa Lutetianorum.

Il y en a une autre espèce commune dans les montagne ; elle ne diffère de celle-ci que par la petitesse de toutes ses parties ; à peine s’élève-t-elle à la hauteur de quatre à cinq pouces ; la couleur de ses feuilles est d’un vert plus clair & plus gai : on la nomme Circœa minima. Quoique cette plante porte le nom d’une fameuse Enchanteresse, on ne lui attribue aucune propriété qui tienne du merveilleux.

CIRCENSE. adj. Circensis. Ce mot en françois ne se peut dire qu’au pluriel, en parlant des Jeux circenses, comme dit M. Blondel, pour les Jeux du Cirque, comme on dit ordinairement. Par le nom de Jeux Circenses, on entend en général tous les combats du Cirque, de quelque manière qu’ils se fissent, à pié, à cheval, sur un char, à la lutte, à coups de poings, avec des épées, des piques, des dards, des flèches, contre des hommes, ou contre des bêtes, sur la terre, dans l’arène, ou sur des vaisseaux. Il n’y avoit guère que les Esclaves qui donnassent au peuple ce cruel plaisir : c’étoit un exercice qui auroit déshonoré les honnêtes gens. Il y en a qui disent que les Jeux Circenses ont été ainsi nommés du mot latin Circuitus, parce que ces sortes de combats se faisoient dans un lieu entouré d’épées nues, afin que les combattans ne pussent s’enfuir ; & même dans les commencemens, ils se faisoient au bord de la rivière, & du côté de la terre le champ du combat étoit fermé avec des épées nues. tous les Auteurs qui ont écrit des spectacles des Romains, & des Antiquités Romaines, ont parlé des Jeux Circenses. La plûpart des fêtes des Romains étoient accompagnées de Jeux Circenses. & les Magistrat, ou les autres Officiers de la République, donnoient souvent ces sortes de spectacles au peuple. Les grands Jeux Circenses duroient cinq jours, & commençoient le quinzième de Septembre. Au reste, quoique l’Abbé de Marolles, M. Blondel, les Auteur de Moréri, & d’autres peut-être encore, se servent du mot Circenses, ont dit plus communément les Jeux ou les combats du Cirque ; mais sur-tout il ne faut pas les appeler les Jeux de Circé, comme a fait un de nos Traducteurs, dans un ouvrage de Cicéron. Ce sont les Jeux du Cirque. Voyez Cirque.

☞ CIRCENSTER ou CIRCESTER. Ville d’Angleterre, dans le comté de Glocester, sur la rivière de Charnu. Son ancien nom latin est Corinium. ou Durocornivium.

CIRCIO, s. m. est un oiseau des Indes, gros comme un étourneau, de diverses couleurs, remuant presque toujours la queue. On lui apprend à parler plus facilement qu’au perroquet. Voyez Jonston.

CIRCIUM. Voyez CIRSIUM.

CIRCONCELLION, s. m. nom de Secte. Circumcellio. Vers l’an 329 ou 33à, commencèrent chez les Donatistes les Circoncellions. C’étoient des troupes de furieux, qui couroient par les bourgades & les marchés avec des armes, se disant les défenseurs de la justice, mettant en liberté les esclaves, déchargeant les gens obérés de leurs dettes, & menaçant de mort les créanciers, s’ils ne les déchargoient. Il n’y avoit point de sûreté sur les grands chemins, ni même dans les maisons. Les deux plus fameux étoient Manida & Fasis, qui prenoient le beau titre de Chefs des Saints. Leurs propres Evêques furent contraints de les abandonner, & d’écrire au comte d’Afrique, nommé Taurin, qu’il les réprimât. En effet, il envoya contr’eux des troupes en un lieu nommé Octavense, où il y en eut plusieurs de tués, que les Donatistes honorèrent depuis comme martyrs. Il y en eut aussi qui se précipitèrent ou se tuèrent eux-mêmes de quelqu’autre manière par une fureur que les Sectaires traitoient de zèle pour la Religion ; & les Donatistes les révéroient aussi comme des saints. Optat de Milève décrit ces excès dans son IIIe Liv. Voyez aussi S. Augustin, her. 69. Baronius, à l’an 398. Forbes, Instructiones Historico Theol. L. XIV, c. 4, & Du Cange dans son Glossaire.

CIRCONCIRE. v. a. Je circoncis, au sing. & au plur. nous circoncisons, vous circoncisez, ils circoncisent. Circumcidere. Retrancher le prépuce : ce qui se fait particulièrement chez les Juifs & les Mahométans, pour marquer qu’un homme est de leur Religion. Amurat I fut le premier des Sultans qui se fit solennellement circoncire.

Ce mot vient de Circumcidere. Voyez CIRCONCISION.

☞ CIRCONCIS, ISE. part. Qui a le prépuce coupé. Curtus. Apella.

CIRCONCISEUR. s. m. Celui qui circoncit, soit Juif, soit Mahométan, &c. Qui circumcidit : ce terme n’est pas usité.

CIRCONCISION. s. f. Cérémonie de la Religion Judaïque & Mahométane, par laquelle on coupe, on retranche le prépuce aux mâles qui doivent professer l’une ou l’autre Loi. Circumcisio. La circoncision a commencé du temps d’Abraham, & ce dut comme le sceau de l’alliance que Dieu contracta avec lui. Ce fut l’an du Monde 2138 qu’Abraham, suivant l’ordre qu’il en avoit reçu de Dieu, se circoncit lui-même, & toues les mâles qui étoient dans sa maison. Les Egyptiens & les Ethiopiens avoient aussi une espèce de circoncision, comme on voit dans Hérodote & dans Philon Juif. Car Hérodote, L. II, c. 35, &c. 104, assûre que la circoncision des enfans étoit en usage chez les Egyptiens & les Ethiopiens ; mais il ne sait, dit-il, lesquels l’avoient prise des autres, parce que cette coutume étoit très-ancienne dans ces deux Nations. Les habitans de la Colchide l’avoient aussi, & cet Historien en conclut qu’ils étoient Egyptiens. Il dit que les Phéniciens & les Syriens étoient aussi circoncis, mais qu’ils avoient pris cet usage des Egyptiens ; qu’enfin, peu avant le temps qu’il écrivoit, la circoncision avoit passé de la Colchide aux peuples qui habitoient proche du Thermodoon & du Parthénius. Quoique Dieu en fit une loi à Abraham, & ensuite à Moïse, il n’est pas sûr que nul autre peuple ne la pratiquât pas déjà.

Les Juifs faisoient leur circoncision avec un couteau de pierre. Marsham, savant Anglois, a prétendu que les Hébreux avoient emprunté la circoncision des Egyptiens, & que Dieu n’en étoit pas le premier instituteur. Il cite en témoignage Hérodote & Diodore de Sicile. Plusieurs Savans au contraire ont prouvé que les Hébreux n’avoient reçu la circoncision d’aucun autre peuple. Il y a sur cela un petit Traité de Gotlieb, intitulé, Nonnulla de Circumcisione Fragmenta. Mais, soit que cette cérémonie vienne de Dieu immédiatement, soit que Dieu l’ait sanctifiée, en l’ordonnant pour un signe spécial de son alliance, pour être un type de la Circoncision spirituelle, il est certain qu’elle se pratiquoit fort différemment chez les Hébreux & chez les Egyptiens. Chez les Hébreux c’étoit une cérémonie de Religion, & elle se faisoit le huitième jour après la naissance. Chez les Egyptiens, c’étoit une propreté, & selon quelques-uns, une nécessité physique. On la faisoit seulement à la treizième année, & on l’exerçoit sur les filles, aussi-bien que sur les garçons. Le P. Alexandre. Les Israëlites ne pratiquèrent point la cérémonie de la Circoncision durant les quarante années qu’ils passèrent dans le Désert, parce que la Circoncision étant la marque qui distinguoit le peuple de Dieu des Gentils, il étoit inutile de prendre cette marque dans des lieux où il n’y avoit personne qui pût se mêler aux Israëlites, ou plutôt afin d’être toujours prêts à marcher quand Dieu l’ordonneroit. La Circoncision, si contraire à l’affection paternelles par les douleurs qui l’accompagnent, n’est-elle pas un témoignage certain de l’alliance de Dieu avec les Patriarches, puisqu’on ne peut les soupçonner d’avoir inventé une cérémonie qui les pouvoit rendre ridicules aux yeux des autres nations ? Abad. Au sujet de la conversion d’Izates, Roi de l’Adiabène, & parce qu’Ananias, Marchand Juif, qui l’avoit converti, craignant qu’il ne se rendît odieux à son peuple, s’il se faisoit circoncire, lui dit, dans Josèphe, Lic. XX des Antiq. ch. 2, qu’il peut servir Dieu sans être circoncis, pourvû qu’il imite les mœurs des Juifs, & que c’est-là l’essentiel, plutôt que la Circoncision ; & qu’au contraire Eléazar, autre Juif, lui dit, que c’est une impiété de n’être point circoncis ; M. Fleury conclut qu’on voit par-là que les Juifs n’étoient pas bien d’accord entr’eux sur la nécessité de la Circoncision. Mais 1°. la circoncision n’étoit ordonnée qu’aux Hébreux, & pour ceux qui voudroient embrasser la Loi Mosaïque. Pour ces deux sortes de personnes Dieu s’exprime sur cela nettement, Gen. XVII, 14. Aussi Ananias n’en doutoit-il point. Izates n’étoit pas Juif. On put le convertir & le détromper de l’idolâtrie, sans lui faire embrasser la Loi Mosaïque. 2°. Pour les autres Nations, il est certain qu’il n’y avoit point d’obligation, & qu’ils pouvoient se sauver sans cela. Ananias avoit encore raison en cela, & Eléazar se trompoit, s’il prétendoit le contraire. Mais non ; ce que dit Josèphe ne marque point de différens sentimens sur la nécessité de la Circoncision. Ananias vouloit qu’Isates servît Dieu, sans se faire Juif, il le pouvoit. Eléazar vouloit qu’il se fît Juif.

Les Turcs mortifient la peau des enfans avec de petites tenailles. Ils la coupent avec un rasoir, puis ils mettent certaine poudre dessus qui guérit la plaie, & qui ôte la douleur. Ils ne circoncisent leurs enfans qu’à la sept ou huitième année, parce qu’ils ne croient pas la Circoncision nécessaire au salut. Les Persans circoncisent leurs enfans à treize ans, & les femmes depuis neuf jusqu’à quinze. Ceux de Madagascar coupent la chair à trois diverses reprises, & font beaucoup souffrir les enfans ; & le plus diligent des parens qui se trouve présent, se saisit du prépuce, & l’avale. Herréra témoigne qu’il y avoit une espèce de Circoncision chez les Mexicains, quoiqu’il n’y eît chez eux aucune connoissance du Judaïsme, ni du Mahométisme. Cas ils incisoient aux enfans le membre viril & les oreilles avec plusieurs cérémonies, & sur-tout aux enfans des Grand-Seigneurs, dès qu’ils étoient nés. Les Brasiliens usent aussi de la Circoncision.

La Circoncision se fait aussi sur les femmes, en leur coupant un morceau de l’hyménée, ou des parties que l’on appelle nymphes. Strabon dit que les femmes d’Egypte étoient circoncises. Belon le dit des Cophtes. Paul Jove & Munster le disent des sujets du Prêtre-Jean. Les Ethiopiens ont la Circoncision ; non pas qu’ils croient que c’est un Sacrement, mais que par-là ils disent qu’ils sont fils d’Abraham, & que cela contribue à la propreté, ou plutôt en mémoire de la Circoncision de Jesus-Christ, & parce qu’il a été circoncis. Voyez le P. Tellès Ludolf. Par la même raison ils circoncisent aussi les femmes, comme en Egypte.

Le pere est obligé, chez les Juifs, de faire circoncire son fils au huitième jour : on ne le peut faire avant ce temps-là ; mais si l’enfant est foible ou infirme, on peut différer jusqu’à ce qu’il se porte bien. Il y a un parrain pour tenir l’enfant pendant qu’on le circoncit, & une marraine, qui le porte de la maison à la Synagogue, & qui le rapporte. Celui