Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 2/351-360

Fascicules du tome 2
pages 341 à 350

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 2, pages 351 à 360

pages 361 à 370


de Micy près d’Orléans, qui mourut en 542. Les habitans de Celles ont été affranchis par Robert de Courtenay sieur de Mehun & de Celles. Il y a à Celles un Grenier à sel, un Couvent d’Ursulines, un Hôpital des Freres de la Charité, & à une extrémité de la ville un très-beau Château sur le Cher, bâti par Philippe de Béthune, qui fut Ambassadeur à Rome, au commencement du dernier siècle. Voyez la Thaumassiere, Histoire de Berry, L. IX, c. 40.

CELLIER. s. m. Lieu où l’on serre les provisions d’une maison, le vin, le bois, &c. Il diffère de la cave, en ce qu’il est moins profond ; il est quelquefois souterrain, ou fort peu au-dessous du rez de chaussée. On prononce célié.

C’est de ce mot qu’est venu celle, ou cellule, qui se dit d’une habitation de Moine près d’une Abbaye, ou qui étoit de sa dépendance.

CELLITE. s. m. Nom de Religieux autrement dit Alexien. Cellularius, Alexianus & en Flandre Cellebroeders. Ils ont pris le nom d’Alexien, parce qu’ils ont choisi S. Alexis, pour leur Patron, & celui de Cellites, à cause des petites chambres ou cellules où ils pansent les malades, si l’on en croit Modius, ou, selon le P. Hélyot, de cella, pris dans la signification de sépulcre, parce que la principale obligation de ces Religieux étoit d’enterrer les morts. Ils sont appelés Alexiens en Italie, & Cellites en Allemagne. On ne sait qui fut leur Instituteur. Ascagne Tambourin met leur établissement en 1309. Ils furent d’abord séculiers, mais dans la suite ils embrassèrent la règle de S. Augustin, & firent des vœux solennels, ce que Sixte IV approuva en 1471. Ils sont tous laiques, & ne reçoivent point de Prêtres parmi eux. Ils ont soin des malades, assistent les pestiférés, enterrent les morts, ont aussi soin des fous, & leurs Couvens servent de lieu de correction pour les enfans de famille qui s’écartent de leur devoir. Voyez le P. Héliot. T. III, c. 54. On les appelle Nollards à Liége. Il ne faut pas les confondre avec l’Ordre appelé Ordo Vespilonum. Ordre des Enterreurs. Voyez Alexien.

Cellite. s. f. Cellularia. Il y a aussi des Religieuses Cellites, appelées est quelques endroits Collectines, & plus communément Sœurs Noires. Elles ne savent point le temps de leur origine. Elles n’ont point de clôture ; elles suivent la Règle de S. Augustin. Elles font un quatrième vœu d’assister les malades, même en temps de peste. En quelques lieux elles ont soin des filles repenties. Il y en a qui y sont soumises aux Evêques, mais la plûpart sont sous l’obéissance des Alexiens ou Cellites. Elles sont habillées de noir, avec un scapulaire.

CELLULAIRE. adj. m. & f. Terme d’Anatomie, qui se dit des parties du corps animal, qui contiennent plusieurs petites cellules. Cellularius, a. um. Cellulis abundans. Un tissu cellulaire, la tunique cellulaire. Quand, pour préparer des injections, on pousse de l’eau dans les vaisseaux que l’on veut injecter, il y a ordinairement un inconvénient inévitable, qui est que dans toutes les parties où il se trouve un tissu cellulaire tant soit peu considérable, la tunique cellulaire ne manque jamais d’être engorgée d’eau, ce qui gâte les parties que l’on a dessein de conserver dans les liqueurs, ou de faire dessécher. Demours, Acad. d’Edimb. T. I, p. 127. La substance de l’os est une partie compacte ou solide, en partie cellulaire ou spongieuse, & en partie réticulaire. Winslow. La partie que j’ai nommée cellulaire ou spongieuse fait presque tout le tissu intérieur des os, qui n’ont point de grandes cavités, & généralement celui de toutes les épiphyses, & n’occupe que les extrémités des os creux. Id. Les cellules de ce tissu sont plus ou moins considérables, dans certains os que dans d’autres. Id. Les globules du poumon sont des paquets vésiculaires ou cellulaires. Id. Les deux lames de la pie-mère ne tiennent ensemble que par un tissu cellulaire. Id.

☞ C’est aussi un terme de Physique, & d’Histoire naturelle, que l’on applique à quelques parties des arbres. Ainsi, l’on dit en parlant des différentes substances que l’on distingue dans l’écorce, enveloppe cellulaire, tissu cellulaire,

☞ Quand on a enlevé l’épiderme (Voyez ce mot) on trouve immédiatement au dessous une substance qui est souvent d’un vert foncé, & qui est presque toujours succulente & herbacée. Cette substance examinée avec une loupe, a paru à M. Duhamel semblable à un morceau de feutre ou de chamois : car elle est formée d’un nombre prodigieux de filamens très-fins qui s’entrelacent en toutes sortes de directions. Un petit morceau qu’il avoit tenu longtemps en macération, examiné avec un microscope assez foible, lui parut semblable à la substance médullaire. Une plus forte lentille lui fit appercevoir çà & là de petits corpuscules de figure assez régulière, qui étoient séparés de la masse. Il examina un de ces petits corps avec une lentille qui forçoit beaucoup : il lui parut encore semblable à de petits fragmens de moelle, traversée par quantité de cloisons ou de fibres très-déliées. Voila tout ce que le microscope a fait appercevoir sur l’organisation de cette substance. Quand on fait bouillir une branche dans l’eau, cette substance se cuit, & alors, elle ressemble à une pâte ; elle s’endurcit en se refroidissant, & elle devient friable quand elle sèche.

☞ Dans les arbres où, comme dans le sureau, il est aisé de l’observer, on peut remarquer qu’elle est plus succulente dans le temps de la sève, qu’en hiver. Ainsi, quand elle est bien remplie de sève, elle est moins adhérente à l’épiderme, que quand elle est moins humectée.

☞ Elle paroît formée d’un amas du tissu cellulaire (Voyez ce mot plus bas) & M. Duhamel croit qu’on peut la regarder comme une enveloppe générale, & qu’il lui est permis de l’appeler l’enveloppe cellulaire.

☞ Il est vrai que cette substance est souvent d’une couleur très-verte & fort différente de celle du tissu cellulaire, qui assez souvent tire sur le blanc : mais comme on n’ignore pas que la couleur verte des feuilles vient du contact de la lumière, & que celles qui croissent à l’ombre sont blanches, ne peut-on pas conjecturer que cette portion du tissu cellulaire, étant la plus extérieure, a pu contracter une couleur dont le reste est privé.

☞ M. Duhamel soupçonne qu’elle est produite par une extension du tissu cellulaire qui se comprime sous l’épiderme. On peut conjecturer que cette enveloppe succulente sert à prévenir le desséchement des parties qu’elle recouvre. On peut la regarder aussi comme l’organe qui sépare la matière de la transpiration. (Voyez Transpiration) & elle peut encore servir à la réparation de l’épiderme.

Cellulaire {tissu), sous cette enveloppe on apperçoit un plexus réticulaire, ou réseau de fibres longitudinales, que l’on regarde comme des vaisseaux lymphatiques. (Voyez Plexus réticulaire.) Ensuite un tissu cellulaire, vésiculaire ou parenchimiteux ; (termes que M. Duhamel regarde comme synonymes.) & enfin des fibres, qu’il nomme vaisseaux propres. Voyez Écorce.

☞ Suivant l’idée qu’on doit se former des plexus réticulaires qui forment, pour ainsi dire, la charpente de l’écorce, il reste bien de petits espaces vides qu’il faut remplir, puisque les alvéoles qui forment les plexus par la disposition réciproque de leur réseau, sont en grand nombre. La substance qui les remplit est grenue. Grew l’a nommée le Parenchyme ; Malpighi, le tissu vêsiculaire ou utriculaire ; M. Duhamel, tissu cellulaire.

☞ Malpighy & Grew représentent ce tissu comme étant formé de petites vessies, bourses ou utricules qui, se touchant immédiatement, font des files ou des suites de vessies dont la direction est horisontale ; de sorte que ces files de vessies coupent à angles droits les fibres longitudinales, ce qui fait un entrelacement assez semblable à celui des brins de bois dont est composée une claie : & pour se former une idée assez juste du sentiment de Malpighi & de Grew, il faut, dit M. Duhamel, imaginer que les fibres longitudinales, ou les faisceaux qui forment le plexus réticulaire, sont disposés comme les brins de bois qui forment la claie ; & les files, series ou suites de vésicules sont représentées par les traverses de la claie qui croisent & unifient par leur enlacement les brins qui sont placés suivant la longueur de la claie.

☞ Suivant ces mêmes Auteurs toutes les utricules ne sont pas de même grosseur, & elles ne sont pas toutes de la même figure : ce qui fait que Grew les compare à l’écume qui se forme sur le vin doux dans le temps de la fermentation.

☞ Il semble que la chair des fruits est, pour la plus grande partie, une masse de tissu cellulaire très-dilatée & remplie de sucs. Si cela est, les vésicules paroissent bien sensiblement dans certains fruits, comme dans les oranges. Elles sont moins sensibles dans d’autres fruits. Si l’on convenoit que la chair des fruits est un tissu cellulaire très-dilaté & abreuvé de sucs, ce tissu seroit différemment organisé dans les arbres de différente espèce.

☞ Dans le tissu cellulaire des racines potagères, examiné au microscope par M. Duhamel, il n’a apperçu que de petits flocons semblables à de petits morceaux de moëlle d’arbres ou à la mousse de savon.

☞ Le même Physicien n’a pu parvenir à découvrir d’une façon bien distincte les bourses ou les utricules de Malpighi & de Grew. Il n’en nie cependant pas l’existence : mais il se contente d’avertir que ses observations au microscope lui présentent l’idée d’un tissu cellulaire, qu’il compare, ainsi que Grew l’a fait, à l’écume du vin qui fermente, ou à de la salive dans laquelle on découvre souvent des grains d’une substance plus compacte qui ne diffère peut-être pas essentiellement du reste du tissu cellulaire.

☞ Quoi qu’il en soit, cette substance vésiculaire ou cellulaire remplit les mailles du reseau ou les alvéoles qu’elles forment ; de sorte qu’elle traverse toutes les couches de l’écorce, & qu’elle s’étend depuis le corps ligneux jusqu’à l’épiderme. Elle paroît dans les alvéoles comme grenue ; & les flocons ou grains du tissu cellulaire sont plus gros & plus durs dans les couches corticales & extérieures que dans celles qui approchent du bois.

☞ La couleur de cette substance n’est pas absolument la même dans tous les arbres, & l’on observe bien plus aisément sa situation, respectivement aux fibres longitudinales, quand sa couleur est différente de celle de ces fibres.

☞ Pour se former une idée de la position du tissu cellulaire sur ces fibres, il faut se représenter un fétu de paille qui seroit enduit d’une matière visqueuse, & qu’on auroit trempé dans du gruau. Alors les flocons de gruau qui y resteroient attachés, représenteroient assez exactement la disposition du tissu cellulaire sur les fibres longitudinales.

CELLULE. s. f. Petite chambre ou maison, où loge un Religieux. Cella, cellula. Ce dortoir est divisé en tant de cellules, ou chambres. Les Chartreux ont chacun une maison séparée qui leur sert de cellule. La sale où l’on tient le Conclave est divisée par des cloisons en plusieurs cellules pour loger les Cardinaux.

Cellule, se dit de plusieurs petites séparations ou carrés qui se font dans les boîtes, dans des casses d’Imprimerie, pour y garder plusieurs choses sans confusion. L’art de Raymond Lulle consiste en la distribution des sujets en plusieurs cellules, en l’évacuation des cellules.

Cellules, se dit aussi des petites divisions qui se trouvent dans les ruches des mouches à miel, où elles se retirent, qui sont toutes admirablement compassées & égales, & de figure hexagone. Les abeilles distribuent le miel dans leurs cellules. Ablanc.

Cellule. Terme d’Anatomie. Petit interstice, petite division, petit réservoir qui se trouve en différentes parties du corps animal, & reçoit ou contient quelque liqueur, ou quelqu’autre matière. Cellula. Ces cellules sont distendues par l’air. Demours, Académie d’Edimb. T. I, p. 237.

Cellule adipeuses, sont les petites loges ou capsules qui contiennent la graisse. Elles ressemblent à une membrane flasque quand elles ne sont pas remplies de graisse.

On dit que le cerveau a plusieurs cellules, ou plusieurs petites cavités séparées. On le dit aussi de plusieurs autres parties du corps.

Cellule. Voyez Cloison.

Cellule, cellula, loculamentum, est pris en Botanique pour des loges ou cavités des fruits, séparées entr’elles par des cloisons. Voyez Fruit, & Capsule.

CELLULEUX, EUSE. adj. Terme d’Anatomie. Cellulaire. Qui a des cellules. Cellulosus, a, um. La tunique celluleuse interne du canal intestinal. Demours. Acad. d’Edimb. T. I, 133. Cellulaire est plus usité.

CELME ou CELMIS. s. m. Terme de Mythologie. Ce fut, dit-on, le père nourricier de Jupiter. Pour avoir révélé que le père des Dieux étoit mortel, il fut enfermé dans une tour impénétrable, d’où vint la fable qui dit qu’il fut changé en diamant.

CELMIS, un des Curetes ou Corybantes, qui ayant couché, dit-on, avec la mère des Dieux, fut chassé par ses autres frères. Il avoit le secret de donner au fer dans la forge une si grande dureté, que le fer de Celmis passa depuis en proverbe.

CELORS. s. m. Nom d’une ancienne mesure en usage dans la Bourgogne. Bien est vrai que les anciens usoient de Celors, qui étoient une mesure de laquelle les vingt-six faisoient un bouillon, comme dit un titre de l’an 1238, fait par Gérard de Tirreguerre, qui donne à Estienne, de Vauxgrigneux, aujourd’hui Vaugrenans. Gollut. Mem. des Bourguignons, L. II, ch. 33.

CELOTOMIE. s. f. Voyez Castration.

CELSITUDE. s. f. C’est un titre de dignité qui se donnoit autrefois, comme on donne aujourd’hui ceux de Majesté, Altesse, Grandeur, Hautesse, &c.

CELTE. s. m. Celta. Les Celtes étoient un peuple de l’ancienne Gaule, que César partage en trois nations ; les Celtes, les Aquitains & les Belges. Les Celtes occupoient tout ce qui s’étend entre la Garonne, la Seine, & la Marne, séparés des Aquitains par la Garonne, & des Belges par les deux autres fleuves. César dit que Celte étoit un nom de la langue de ces peuples, & que les Romains les nommoient Gaulois. Appien dit qu’une opinion fort commune croit qu’ils se nommoient ainsi de Celte, fils de Polyphême & de Galatée ; d’autres tiennent que ce fut d’un Roi des Gaulois qui portoit ce nom. Bochart, dans son Phaleg. L. III, c. 6, p. 186 & suiv. prétend qu’ils furent ainsi nommés, parce qu’ils avoient communément les cheveux blonds. Il montre par plusieurs témoignages de l’antiquité qu’ils avoient en effet les cheveux blonds, & qu’ils ont été appelés ξανθότριχες, & ξανθὰ ἔθνη, c’est-à-dire, gens à cheveux blonds, nations blondes. Cela étant certain, il croit que ce mot vient de חלתא, chalta, ou chelta, qui, dans le Thalmud au Traité Nidda, signifie du safran, & qu’ainsi Celte est la même chose que ξανθός, flavus, blond. Bodin, dans sa Mérhode, c. 9, croit que Celtes est la même chose que Κέλητες, de κέλης, equus desultorius, parce qu’ils montoient des chevaux sans selle & sans les atteler à un char. Lazius dit que Celtes est fait de Galate par contraction. Strabon dit que les Celtes furent ainsi appelés à cause de leur noblesse, soit parce qu’ils avoient la principale autorité dans les Gaules, soit parce qu’ils étoient plus forts & plus vaillans. Quelques Modernes pour soutenir ce sentiment, disent qu’encore aujourd’hui Gelten a cette signification en allemand ; qu’en flamand Geste-baors signifie un poisson excellent, & Gildos, un bœuf fort & vigoureux ; que ce sont autant de vertiges de l’ancienne signification de ce nom.

Dadin de Hauteserre, Rer. Aquitan. L. I, ch. 1, montre que tous les Gaulois ont été appelés Celtes ; & le P. Pezron a fait un Traité de l’Antiquité, & de la langue des Celtes, où il prouve qu’ils étoient de la postérité de Gomer, fils aîné de Japhet. Depuis le P. Pezron, deux Auteurs nous ont appris bien des choses curieuses & intéressantes sur les Celtes. M. de Saint-Aubin dans les Antiquités de la Nation & de la Monarchie Françoise ; & M. Pelloutier dans son Hist. des Celtes.

CELTIBÈRE. s. m. & f. Ancien peuple d’Espagne, qui possédoit une partie de l’Arragon & de la Castille. Celtiberus, a. Les Celtibères étoient des Celtes, qui étant passés de Gaule en Espagne, & s’étant arrêtés & fixés le long de l’Ebre, Iberus en latin, furent appelés Celtiberes, comme qui diroit des Celtes de l’Ebre, c’est-à-dire, habitans sur les bords de l’Ebre. Les Celtibères étoient les plus vaillans hommes d’Espagne. Florus les appelle Robur Hispaniæ, la force de l’Espagne ; & Diodore de Sicile, L. VI. Strabon, L. IV. Pline, L. III, c. 1. Florus, L. II, c. 17, disent qu’ils résistèrent longtemps avec un courage incroyable aux Carthaginois & aux Romains. On dit aussi Celtibérien, Celtibérienne. Voyez Vigenère sur César, & Cordemoy, Histoire de France, T. I, p. 11.

CELTIBÉRIE. Pays des Celtibères. Celtiberia. C’est l’Arragon. Vigenère.

CELTIBÉRIEN, ENNE. Voyez Celtibère. C’est la même chose.

CELTIQUE. s. m. & f. Peuple d’Espagne. Celticus. Les Celtiques étoient une Colonie de Celtes, ou de Celtibères, qui pénétrèrent jusques sur la côte occidentale d’Espagne, où ils s’établirent depuis le Dourou jusques au promontoire ou cap appelé promontoire Celtique, qui étoit apparemment le cap de Finisterre. Voyez Mela, L. III. c. 1. Strabon, L. III.

CELTIQUE. adj. m. & f. Qui appartient aux Celtes. Celticus. La Gaule Celtique, c’est la partie de la Gaule qu’occupoient les Celtes. Bellovèse & Segovèse, neveux d’Ambigat, Prince Biturige, Roi des Celtes, conduisirent des Colonies Celtiques en Allemagne & en Italie sous le règne du vieux Tarquin.

CELUI, CELLE. Au pluriel, ceux & celles, celui-ci, celle-là, sont des pronoms démonstratifs, qui signifient la même chose que ce. Ille, illa ; is, ea. Ce pronom est de toutes les personnes, comme on parle en Grammaire ; & l’on dit fort bien : je suis celui qui, &c. Vous êtes celui, il est celui ; ou avec un nom propre, César est celui qui, &c. Ceux qui disent qu’on ne met pas bien celui après un adjectif ; se trompent ; on trouve cette construction dans les ouvrages les mieux écrits en notre langue. Heureux ceux dont les iniquités sont pardonnées. P. Lall. Jésuite. Heureux celui que sa compassion rend attentif aux besoins du pauvre. Id.

CELUI-LA, CELLE-LA. Autre pronom démonstratif. Ille, illa. Is, ea. C’est celui-là qui l’a tué. C’est celle-là qui me captive. Mais il ne faut jamais joindre la particule avec le pronom démonstratif celui ou celle, quand il est immédiatement suivi du pronom relatif qui, ou lequel, comme ceux-là qui aiment Dieu. Voiture n’est point à imiter dans cette construction.

Car le feu qui brûla Gomorrhe,
Ne fut jamais si véhément,
Que celui-là qui me dévoore.

Celui-là, Celui-ci. Pronoms distributifs. Ils répondent aux pronoms latins distributifs ille & hic, dont l’usage est de désigner, de signifier l’une des deux choses ou des deux personnes dont on vient de parler, & dont on ne veut pas répéter le nom. Celui-là, ille, sert à désigner la première donc il a été parlé ; & celui-ci, hic, désigne la dernière. Les femmes ne s’accommodent point de cette expression ; elles se brouillent dans l’usage de ces deux mots : celui-ci, celui-là ; mais les gens de lettres les trouvent tort commodes, & s’en servent pour éviter la répétition du nom propre, ou de longues phrases qui font languir le discours.

CELVULF. s. m. Nom d’homme. Ceolvulsus. S. Celvulf quitta le Royaume de Northumberland pour se faire Moine. Ce fut à lui que Bède dédia son Histoire d’Angleterre. Voyez M. Chastelain, au 15 de Janvier.

CEM.

CEMBEL. s. m. Ce mot se trouve dans nos vieux Auteurs, & signifie deux choses. 1o. Une danse de campagne sous les arbres, sous l’ormeau, ou comme on disoit, sous l’ormel. 2o. Un tournois, une assemblée de Chevaliers. Ce mot, dit Borel, pourroit venir de cymbalum, puisqu’on appelle encore en Languedoc une sonette, un cimboul.

☞ CÉMENT, mieux que CIMENT. s. m. Terme de Chymie. On appelle généralement de ce nom toutes les compositions, tous les mélanges de soufre, de sels, de charbon, de brique pilée, &c. que l’on arrange dans des creusets ou autres vaisseaux avec des métaux ou autres substances, & que l’on expose ensuite à l’action du feu, pour causer par ce moyen quelque altération dans ces substances. Cæmentum.

☞ Les Cémens sont différens & différemment composés, selon les différentes vues qu’on se propose, & les différens changemens qu’on veut produire dans les substances qu’on soumet à cette opération. Il y a deux principaux cémens, le commun & le royal. Le commun se fait avec la poudre de briques, le sel commun, le nitre & le verdet. Le royal est composé des sels gemme & ammoniac, de chacun une partie, de deux parties de sel commun, & de quatre patries de bol, ou de briques en poudre, le tout malaxé avec une qualité suffisante d’urine & réduit en une pâte dure.

☞ On se sert du cément royal pour séparer l’argent d’avec l’or dans l’opération du départ. Voyez Départ. Cément pour convertir le fer en acier ; cément pour convertir le cuivre rouge en cuivre jaune ; cément pour donner à certains verres les qualités de la porcelaine. On stratifie dans un creuset des lames d’or avec du cément royal ; on couvre ce creuset, puis l’ayant entouré de feu, on fait calciner la matière pendant dix ou douze heures avec beaucoup de violence, afin que les sels mangent & consument les impuretés de l’or.

☞ CÉMENTATOIRE. adj. de t. g. Terme de Chymie. Poudre cémentatoire, c’est la même chose que ce qu’on appelle ciment.

Cémentatoire. Terme de Minéralogie. On appelle, quoiqu’improprement, cuivre cémentatoire, le cuivre qui a été précipité de certaines eaux vitrioliques, par le moyen du fer que l’on trempe dans cette eau.

☞ Il y a des sources d’eau cémentatoires en Hongrie, qui dissolvent & détruisent le fer, & mettent en sa place le cuivre dont elles sont chargées.

CÉMENTER, v. a. Terme de Chymie. Faire la cémentation. Purifier l’or par le moyen du cément.

CÉMÉTERIAL, ALE. adj. Qui concerne le cimetière, qui est situé dans un cimetière. Il y avoit dans l’enceinte du Monastère une chapelle céméteriale, sous le nom de S. Etienne. Hist. de l’Eglise de Meaux, T. I, p. 70.

CÉMON. s. m. Nom d’homme. Ceadmanus. S. Cémon étoit Chantre du Monastère de sainte Hilde. Bède a écrit sa vie au IVe livre de son Hist. d’Angleterre.

CEN.

CÉNACLE. s. m. Terme consacré, pour dire, le lieu où l’on mange. Cœnaculum. Les Anciens avoient une salle destinée à cela ; & c’étoit ordinairement le lieu le plus élevé de la maison. Constantin avoit fait bâtir un cénacle à Rome pour y nourrir des pauvres, & on en voit encore aujourd’hui les restes qui sont ornés de quelques mosaïques. Ce mot n’est plus guère en usage, si ce n’est pour désigner le lieu où notre Seigneur fit la Cène avec les disciples.

Ils étoient entrés dans le cénacle pleins d’ignorance, de ténèbres, d’aveuglement, de foiblesse, de mauvaises inclinations & de péché, & ils en sortirent plus éclairés & plus brûlans d’amour de Dieu, que des Séraphins. Faid.

Ce mot de Cœnaculum se trouve souvent dans notre Bible latine, & il signifie ordinairement le dernier étage d’une maison. Il est dit au chap. I des Actes des Apôtres, qu’après que Jésus-Christ fut monté au ciel, ses disciples retournèrent à Jérusalem dans une maison, & qu’ils montèrent in cœnaculum, c’est-à-dire, au lieu le plus élevé de la maison, qui étoit un lieu retiré & propre à faire la prière : c’étoit une espèce de terrasse, parce que les Orientaux faisoient les toits de leurs maisons plats, en forme de terrasse. Ils s’y retiroient non-seulement pour y manger ; mais aussi pour s’y reposer & pour y prendre l’air.

Autrefois on a dit cenaille pour Cénacle.

CENAGE. s. m. Terme de Coutumes. C’est un droit qui se paye à cause de la pêche accordée à quelqu’un sur une rivière

CENAILLE. s. m. Vieux mot, lieu où l’on soupe, du latin cœnaculum.

CENCHRÉE. s. m. Nom du port de Corinthe du côté de l’orient. Cenchræa, Cenchreum, Cenchreis. Voyez Corinthe.

☞ CENCHRIS, femme de Cinyras, & mere de Myrrha, ayant osé se vanter d’avoir une fille plus belle que Vénus ; cette Déesse, pour se venger de l’orgueil de la mère, permit que la fille brûlât pour son père d’une flamme incestueuse, qu’elle trouva le moyen de satistaire sans qu’il le sçut. Myrrha, pour cacher son crime & sa grossesse, se retira dans les forêts, où Vénus, qui en eut pitié, la changea en un arbre, d’où naquit Adonis, & d’où découle la myrrhe.

☞ CENCHRITE. s. f. Les anciens Naturalistes ont donné ce nom à une pierre précieuse, qui semble parsemée de grains de millet. Cenchrites ou Cenchritis.

CENCHRUS. s. m. Espèce de serpent, qu’on nomme ainsi à cause qu’il a plusieurs petites taches blanches, semblables au millet. Cenchris. Dioscoride dit que ses morsures sont aussi dangereuses que celles des vipères. La chair s’enfle comme aux hydropiques, & tombe ensuite par pièces. Le même Dioscoride dit qu’entr’autres remèdes contre ces sortes de morsures, on peut mettre de la graine de laitue & de celle de lin enduite, sur la plaie,

CENDAL. s. m. Etoffe qui étoit fort estimée chez les Anciens, dont on faisoit entr’autres choses les bannières. Cilicii panni genus. C’étoit une espèce de camelot. Borel estime que ce nom lui vient de sandal, dont il y a de trois sortes, du rouge, du blanc & du citrin. Il dit aussi qu’il vient de Sindon, & celui-ci de Sidon, de Syrie. Du Cange dit que c’étoit une étoffe de soie, & que ce mot vient de setal, à cause qu’elle étoit tramée de soie. D’autres le dérivent de l’arabe sindali, une feuille ou une lame mince & déliée.

CENDRE. s. f. Matière terrestre, poudre qui reste du bois, ou autres matières combustibles, quand elles ont été consumées par le feu. Cinis. La ville de Londres a été presque toute réduite en cendres, par un incendie. Les verres se font avec des cendres de fougère & autres cendres. Il n’est permis de faire des cendres dans les forêts que des houpiers, troncs, racines & autres bois qu’on ne peut exploiter, ni en ouvrages ni en bois de corde. Un pain cuit sous la cendre chaude. Les cendres, quelles qu’elles soient, seroient d’un grand usage pour améliorer les terres, si on en avoit beaucoup, & comme on n’en a que très-peu, on les met au pied de quelque figuier, ou de quelqu’autre arbre, & elles n’y sont pas inutiles. La Quint. ☞ C’est aux sels dont les cendres sont chargées, qu’elles doivent la propriété de blanchir le linge, de dégraisser les étoffes. Les cendres de bois flotté, qui a perdu la plus grande partie de ses sels dans l’eau, sont presque inutiles aux blanchisseuses.

Ce mot vient de cintre, ablatif de cinis, comme gendre de gener, tendre, de tener. Mén. Le mot cinis en latin vient du grec κόνις, qui signifie poussiere, ou de candeo en latin, d’où viennent les verbes, incendo, succendo, &c.

☞ On dit figurément réduire une ville, une Province en cendres, la désoler, la ravager, y mettre tout à feu & à sang. Omnia ferro & flammà vastare.

☞ En parlant d’une passion mal éteinte, on dit que c’est un feu caché sous la cendre. Ignis suppositus cineri doloso. La rancune sait se couvrir de l’extérieur de l’amitié, jusqu’au moment qu’elle trouve à se satisfaire. C’est un feu qui couve sous la cendre.

☞ C’étoit autrefois la coutume chez les Hébreux, dans les désolations publiques, de prendre le sac & de le couvrir de cendre, pour marquer une grande douleur & une grande pénitence. Telle fut la pénitence des Ninivites. De là les expressions, prendre la cendre & le cilice, faire pénitence avec le sac & la cendre, témoigner une grande douleur d’avoir offensé Dieu, faire pénitence pour obtenir le pardon de ses péchés. C’est encore une pratique dans quelques maisons religieuses d’expirer sur la cendre.

☞ Le Mercredi des Cendres est le premier jour de Carême, ainsi nommé, parce qu’on va prendre des cendres bénites à l’Eglise. Sacrorum Cinerum dies, dies Cinerum. Le Prêtre marque en forme de croix le front des Fidèles de la cendre qui est faite des linges qui ont servi à l’autel, ou des branches de buis qui ont été bénites, en prononçant ces mots, Memento homo, quia pulvis es, & in pulverem reverteris. Pratique ordonnée par le Concile de Bénévent en 1091, qui enjoint à tous les fidèles Clercs & Laïques, hommes & femmes, de recevoir des cendres sur leur tête ce jour-là, pour se disposer à l’esprit de pénitence & d’humiliation pendant le Carême. Cette pratique, quoique générale, n’est pas d’obligation.

Cendre gravelée. C’est la cendre de la lie de vin brûlée dont on se sert pour faire la lessive ; mais on s’en sert principalement pour faire des pierres à cautère. Cineres clavellati.

Cendre d’azur, est de l’azur broyé, lavé & réduit en poudre. Cinis cæruleus. Voyez Azur.

Cendre verte, est une couleur bleue qui se fait en Flandre, & dont les Peintres se servent dans les paysages seulement, à cause qu’elle verdit trop aisément ; ce qui lui a fait donner le nom de cendre verte. Voyez Bleu.

Cendre de fougère, est la cendre dont on fait le verre de fougère. Cinis silicis. Généralement la cendre de toutes sortes de bois est propre à faire le verre de vitre.

Cendre de plomb, est du plomb en fort menus grains, dont on charge les fusils pour tirer au menu gibier. Plumbeæ pilulæ minutissimæ.

Cendre de bronze. C’est ce qu’on appelle autrement Pompholix, ou calamine blanche.

Cendre d’Auvergne. Cendre tirée de plusieurs plantes nées dans les montagnes fort exposées au soleil, & toute remplie de sels alcalis. Cinis Arvernicus. La cendre d’Auvergne a été employée pour séparer les acides volatils du sel ammoniac de sa partie volatile, d’avec sa partie fixe. Acad. d. S. 1071, p. 73.

Elle s’appelle ainsi, parce que les plantes dont on la tire se prennent, ou ont été prises d’abord des montagnes d’Auvergne.

☞ Les Grecs & les Romains étoient dans l’usage de brûler les corps morts ; & ils avoient grand soin d’en recueillir les cendres dans des urnes. Artemise but les cendres de son mari Mausole. Le corps étant brûlé, la mère, la femme, les enfans ou les parens du défunt, en habits de deuil, ramassoient les cendres & les os qui n’avoient pas été consumés par le feu. Ils commençoient par implorer les Dieux Mânes & l’ame du défunt, le priant d’avoir pour agréable ce pieux devoir qu’ils alloient lui rendre ; puis se lavant les mains & versant sur le brasier du vin & du lait, ils ramassoient les cendres & les os qu’ils arrosoient de vin & de lait. Le premier os qu’ils recueilloient s’appeloit os rejectum, selon Varron, ou exceptum ; parce qu’il servoit à achever le reste des funérailles. Les restes ainsi arrosés, ils les renfermoient dans une urne faite de différentes matières, & venoient pleurer dessus. Ils renfermoient ces larmes dans de petits vases appelés les lacrymatoria, des lacrimatoires, qu’ils mettoient au fond de l’urne sur laquelle le Prêtre faisoit une aspersion, ainsi que sur les assistans pour les purifier, avec une branche de romarin, de laurier ou d’olivier ; & congédioit l’assemblée par ces mots i, licet. Allez-vous-en, vous pouvez vous retirer. Voyez le reste au mot Bucher. On ne brûle plus que les corps des scélérats, dont les cendres sont jetées au vent.

☞ De cet usage de brûler les morts & d’en recueillir les cendres dans des vases, est venue l’expression poëtique & figurée, la cendre, les cendres des morts. Troubler les cendres de quelqu’un. Manes lædere, blesser la mémoire d’un mort. Ciceron a dit, cineri alicujus dolorem inurere, persécuter quelqu’un jusque dans le tombeau ; &, cineri alicujus dare pœnas, être puni pour avoir remué les cendres, violé le tombeau de quelqu’un : & Virgile, cineri fidem servare, être fidèle même après la mort : & Phèdre, cinis dummodo absolvar ; pourvu qu’après ma mort je sois justifié.

Cendre se prend aussi pour la mort même de la personne dont on réduisoit le corps en cendres.

Traître ! sans lui donner le loisir de répandre
Les pleurs que son amour auroit dûs à ma cendre.

Racine.

Cendre se dit encore pour marquer une chose vile, abjecte, méprisable. Cinis.

Seigneur, t’oserai-je parler
Moi qui ne suis que cendre & que poussière ? Corn.

On dit proverbialement d’un mauvais ragoût, roti, bouilli, traîné par les cendres. On dit en parlant d’un bon mari ou d’une bonne femme, qu’il faudroit les brûler pour en avoir les cendres, pour signifier que l’un & l’autre sont fort rares.

On dit aussi que les cendres ne peuvent pas couvrir le feu, quand une personne doit plus d’intérêts qu’elle n’a de revenu, ou quand une somme n’est pas assez forte pour satisfaire tous ceux qui demandent.

CENDRÉ, ÉE. adj. Qui est de couleur de cendre. Il y a un certain gris qu’on appelle gris cendré. Cinereus, cinericius. Cheveux cendrés, étoffe d’un gris cendré

CENDRÉE. s. f. est la dragée ou la plus menue poudre de plomb, qui sert à tirer sur le menu gibier. Cinis plumbeus, pilulæ plumbeæ.

Cendrée. Terme de Plombier : c’est l’écume du plomb.

Cendrée. s. f. Terme de Monnoie. Les coupelles d’affinage sont aussi appelées casses ou cendrées. Borzard. Voyez Coupelle.

CENDREUX, EUSE. adj. Qui est sali, couvert de cendres. Cinere aspersus, conspersus. Ce petit chat est tout cendreux, il s’est couché dans les cendres. Habit cendreux.

On appelle du fer cendreux, celui qui demeure noir, quand même il est poli, qu’on ne peut rendre bien clair. Ce fer n’est pas si sujet à se rouiller, à cause qu’il tient un peu de la nature du plomb.

CENDRIER. s. m. Celui qui fait des cendres dans les forêts, le Marchand qui en fait trafic. Cinerarius. Dans ce dernier sens, le mot de cendrier n’est en usage que parmi le peuple.

Cendrier est aussi la partie la plus basse des fourneaux & des rechauts qui est au dessous de la grille ou du foyer, destinée à en recevoir les cendres. Cinerarium.

CENDRIOT, OTE. s. m. & f. Cineriota. L’hérésiarque Vigilantius donnoit le nom de cendriots aux Catholiques, parce qu’ils honoroient les reliques & les cendres des Martyrs.

Ce mot vient de cinis, cendre.

CENDRURES. s. f. pl. Mauvaise qualité de l’acier. Elle consiste dans de petites veines, qui, quand elles se trouvent au tranchant d’un instrument, le mettent en grosse scie.

CÈNE. s. f. Cérémonie qu’on fait tous les ans le Jeudi-Saint, en mémoire de la Cène ou du dernier repas que fit Jésus-Christ avec ses Apôtres, où il leur lava les pieds, & leur recommanda de faire de même. Ultima Christi Domini cœna. Les Princes, les Prélats, &c. font la Cène le jour de la Cène, c’est-à-dire, qu’ils servent à manger aux pauvres, après leur avoir lavé les pieds, en mémoire de la Cène que J. C. fit avec ses Apôtres. La Cène de Paul Veronèse est un fameux tableau de ce Peintre, qui représente la Cène de notre Seigneur.

Ce mot vient du grec κοινὸς, qui signifie commun.

Ceux de la Religion prétendue réformée appelent Cène, la Communion qu’ils font entr’eux sous les deux espèces. Les Catholiques ne se servent pas du mot Cène, pour dire l’Eucharistie. En effet, il ne se trouve point en ce sens-là dans le Nouveau Testament. Dans le procès que les Docteurs de Sorbonne firent à leur confrère René Benoît, on lui opposa principalement le mot de Cène, dont il s’étoit servi selon l’idée des Calvinistes, & il ne put se purger de ce reproche, qu’en rejetant toute la faute sur les Imprimeurs, qui l’avoient trompé.

☞ CENEDA. Ceneta ou Ceneda Agathiæ. Ville d’Italie dans la Marche Trévisane, du domaine de Venise, avec un Evêché suffragant d’Aquilée.

CÉNÉE. s. m. Terme de Mythologie. C’est le nom d’un des Lapithes. Les Poëtes disent que Cénée avoit d’abord été fille & s’appeloit Cenis, qu’elle fut aimée de Neptune, & qu’elle le pria de la transformer en homme, mais en homme invulnérable ; qu’il lui accorda sa demande ; qu’elle parut en homme sous le nom de Cénée, & qu’il combattit contre les Centaures dans la querelle que les Lapithes eurent avec eux aux noces de Pirithoüs ; qu’étant invulnérable, il n’avoit rien à craindre des traits des Centaures, mais qu’ils l’étouffèrent par la quantité d’arbres qu’ils jetoient sur son corps ; qu’enfin Neptune ne voulant pas qu’une personne qu’il avoit aimée pérît entièrement, il la métamorphosa en oiseau. Ovide parle beaucoup de Cénée, au livre XII de ses Métamorphoses.

CENELLE. s. m. Fruit du houx, qui est petit & rouge.

CENERETH, CENEROTH ou CENNERETH. Ville de la Tribu de Nephthali. Jos. XIX 35. La terre ou la région de Cénéreth étoit la contrée voisine de cette ville, qui en prenoit son nom. C’est celle que les Evangélistes appellent Terre de Génésar, ou Génésareth, Matth. XIV, 34. Marc, VI, 53. La mer de Cénéreth, dans l’Ancien Testament, est aussi la même chose que l’étang ou le lac de Genésar ou de Génésareth, la mer de Tibériade ou de Galilée dans le nouveau. C’est le grand lac que forme le Jourdain entre la partie de la Tribu de Manassé, qui étoit à l’orient du Jourdain, & la Tribu de Zabulon à l’occident, ayant au midi une partie de la Tribu d’Issachar, & au septentrion une partie de celle de Nephthali.

CENEVÉ. Voyez Senevé.

CENGLE. s. f. Du Cange, le P. Monet, édition de Rouen, 1637, le P. Binet, Dupuis sur Etienne, & Baudouin sur Nicod, écrivent de la sorte.
CENGLÉ, ÉE, adj.
CENGLER.

Furetière & Ménage conviennent qu’autrefois on écrivoit changle, changler, cependant ils écrivent sangle, sangler, comme l’Académie, Richelet, Joubert, Boudot & plusieurs autres Modernes. Danet écrit sengle & cengle, ce qui prouve qu’il balançoit sur le choix qu’il devoit faire. Voyez Sangle.

CENIS. Montagne qui est dans la partie des Alpes, que les Anciens appeloient les Alpes Cottiennes. Cenisius mons, ou Cinereus mons. Le mont Cenis est le passage ordinaire de ceux qui vont de France en Italie. Il est aux confins du Piémont & de la Savoie, entre le Marquisat de Suze & la vallée de Morienne.

☞ CENIS. (les) Peuple de l’Amérique septentrionale dans la Louisiane, vers la source d’une rivière de même nom, qui a son embouchure à l’occident de celle du Mississipi.

CENOBIARQUE ou CŒNOBIARQUE. s. m. Supérieur de Communauté, Supérieur d’un Monastère, Supérieur d’une maison de Moines vivans en commun. Cœnobiarcha, Cœnobiarchus, Monasterii Præses, Monasterio Præfectus. Quelques-uns écrivent Cénobiarque, comme l’on prononce. S. Théodose le Cenobiarque, après avoir beaucoup souffert pour la foi catholique, mourut en paix. Chastelain.

Ce mot est composé de trois noms grecs κοινὸς, commun, βιὸς, vie, & ἀρχὴ, commandement ; & signifie proprement celui qui a le commandement sur des Cénobites, c’est-à-dire, sur des personnes qui vivent en commun. Cette étymologie montre qu’il faudroit écrire Cœnobiarque.

CÉNOBITE. s. m. Religieux qui vit dans un Couvent, ou en commun, sous une certaine Règle, par opposition à Ermite ou Anachorète. Cœnobita. Cassien remarque que le Couvent est différent du Monastère, en ce que le Monastère se peut dire de l’habitation d’un seul Religieux ; au lieu que le Couvent ne se dit que de plusieurs Religieux habitant ensemble, & vivant en communauté ; comme le porte la signification du mot grec κοινοϐίτης, de κοινὸς, communis, & βιὸς, vita. Voyez la Règle de Saint Benoît, & les Commentaires sur cette règle, de Dom Armand Jean de Rancé, Abbé de la Trappe ; de D. Mége, Moine Bénédictin de la Congrégation de Saint Maur. Dans les Monastères d’Egypte, les uns étoient Anachorètes, gardant une entière solitude, & ne parlant qu’à Dieu & à eux-mêmes : les autres Cénobites, pratiquant la loi de la charité dans une Communauté, morts pour tout le reste des hommes, se tenant lieu de monde les uns aux autres, & s’excitant mutuellement à la vertu. Fleury. Les Disciples de Saint Basile étoient Cénobites, vivant en communauté ; aussi le pays (la Cappadoce) étoit trop froid, pour se pouvoir écarter dans les déserts comme en Egypte, & vivre en Anachorètes. Id. Dans la dix-huitième Conférence de Cassien, l’Abbé Piammon parle de trois différentes sortes de Moines qui se trouvoient en Egypte. Les Cénobites qui vivoient en communauté ; les Anachorètes, qui après s’être formés dans les communautés, passoient dans la solitude ; & les Sarabaïtes, qui n’étoient que de faux Moines, & des coureurs. Il rapporte au temps des Apôtres l’institution des Cénobites, comme un reste, ou une imitation de la vie commune des premiers Fidèles de Jérusalem. Les Cénobites & les Anachorètes étoient à peu près en nombre égal dans l’Egypte.

Ce n’est point Saint Pacôme qui a été le pere des Cénobites, & qui a fondé les premiers Monastères parfaits, comme l’a cru M. de Tillemont ; c’est Saint Antoine. Saint Ammon fonda même des Monastères dans la partie de l’Egypte qu’on appeloit Nitrie, avant que Saint Pacôme en établît aucun. Voyez le P. Hélyot, Disc. Prélim. ch. 6 & 7.

CÉNOBITIQUE. adj. Qui appartient à la vie religieuse & monastique. Cœnobiticus. Saint Pacôme est l’instituteur de la vie cénobitique, parce que c’est le premier qui forma des Communautés réglées. Du Pin. Saint Pacôme est le premier dont nous ayons une règle, & qui ait donné la forme entière à la vie cénobitique. Il vivoit au commencement du IVe siècle, & sa conversion ne peut guère être arrivée plus tard que l’an 313. Fleury.

Mais le P. Hélyot pense autrement que MM. Du Pin & Fleury. Voyez la fin de l’article Cénobite.

CÉNOMAN, ANE. s. m. & f. Nom d’un ancien peuple de la Gaule Celtique. Cenomanus. Ce sont les anciens Manseaux, ou les peuples qui habitoient le Maine.

Il y avoit aussi des Cénomans dans la Gaule Cisalpine. Leur capitale étoit Bresse, Brixia. Les Romains eurent quelquefois affaire à eux.

CÉNON. s. m. Nom de dignité parmi les hérétiques Montanistes. Les Montanistes avoient des Patriarches, des Cénons, & les Evêques ne tenoient que je troisième rang parmi eux. Du Pin.

CÉNOTAPHE. s. m. Tombeau vide ; monument dressé à la mémoire de quelque mort illustre enterré ailleurs, ou dont on n’a pu trouver le corps après une bataille, ou un naufrage. Tumulus inanis, sepulchrum honorarium, cœnotaphium. Le Cardinal Noris a fait des dissertations sur les Cénotaphes des Césars Caïus & Lucius, qui sont à Pise. Voyez Tombeau.

Ce nom vient de κενὸς, vide, & de τάφος, sépulcre.

CENS. s. f. Terme d’Histoire Romaine. Le cens, census, chez les Romains, n’étoit autre chose que la déclaration authentique que faisoient les sujets de l’Empire de tous leurs biens meubles & immeubles, devant les Magistrats commis pour cela. Ils étoient appelés Censeurs dans la ville de Rome, & Censiteurs dans les Provinces. Ces déclarations étoient accompagnées d’un dénombrement par écrie des fonds qu’ils possédoient, de leur qualité & de leur quantité, avec les tenans & les aboutiisans. Chorier, L. IV, p. 193.

☞ Tullus Hostilius institua le cens, & fit le premier le dénombrement du peuple Romain, pour savoir quel nombre il pouvoit avoir de combattans, & quel secours d’argent il en pouroit tirer. Cet usage se perpétua sous le gouvernement républicain. Les Censeurs étoient obligés d’avoir un registre exact de toutes les déclarations, & de veiller à ce qu’aucun étranger ne se fît inscrire par surprise ; ne quis in censorias tabulas irreperet.

☞ Le Cens embrassoit les trois ordres de la république ; les Sénateurs, les Chevaliers & le peuple : lectio & recitatio senætus, censio, recensio & recognitio, & census ou lustrum. Le Censeur assis sur la chaire curule faisoit appeler les sénateurs par l’Huissier chacun par son nom ; legebant ou recitabant senatum. Ils rayoient de la liste ceux qu’ils vouloient déposer, & en substituoient d’autres à leur place tirés du nombre des Chevaliers. In senatum legere.

☞ On appeloit de même les Chevaliers les uns après les autres, & lorsqu’il n’y avoit rien à redire à leur conduite, le Censeur leur disoit, Præteri & traduc equum. Si on avoit des reproches graves à lui faire, on lui ôtoit la pension & le cheval, equus adimebatur.

☞ Ensuite on passoit à la revue du peuple, non-seulement de Rome, mais de toutes les villes municipales qui avoient le droit de bourgeoisie dont on envoyoit les noms aux Censeurs ; & lorsqu’il y avoit à redire à leurs mœurs, on les dégradoit, en les privant du droit de suffrage, & en les mettant à la taille. Ærarios fieri & in ceritum tabulas referri, parce que les habitans de cette petite ville avoient la qualité de citoyens Romains, mais ne jouissoient pas du droit de suffrage.

☞ Le cens achevé, on indiquoit une assemblée générale au champ de Mars, pour assister au sacrifice d’expiation. Le peuple s’y trouvoit en armes, divisé par Centuries, & l’on prioit les Dieux d’avoir pour agréable le cens qu’on venoit de faire, & qu’il leur plût conserver la République dans sa splendeur & dans sa gloire.

☞ Ce sacrifice se célébroit tous les cinq ans, & se nommoit Lustrum, de-même que le cens du peuple. De-là on nomma aussi lustre, la révolution de cinq ans.

☞ L’illustre Auteur de l’Esprit des Loix, prouve qu’il n’y a jamais eu de cens général dans l’ancienne Monarchie Françoise, & que ce que l’on appeloit cens, étoit un droit particulier levé sur les serfs par les maîtres.

Cens. Signifie parmi nous, rente seigneuriale & foncière, dont un héritage est chargé envers le Seigneur de Fief d’où il dépend. Census. Le cens est la marque de la seigneurie que le Seigneur s’est retenue, quand il a baillé à cens & rente une terre dépendante de son fief. ☞ Il est la véritable marque de la directe seigneurie sur les rotures, comme la foi & hommage, est le caractère de la directe sur les fiefs. Le cens est imprescriptible & non rachetable. Le cens emporte droits de lods & vente, & saisine d’amende en cas de vente. Il y a cens mort ou cens truant, qui ne porte aucun droit, dont il est parlé en la Coutume de Soêmes & d’Auvergne.

Le cens est une marque de seigneurie, parce que les Francs donnèrent les terres qu’ils conquirent, ou à charge que ceux à qui ils les donnoient les serviroient à la guerre, ou à charge de cens, & de rente. On dit au Palais que les cens & autres devoirs féodaux sont rendables & non requérables. Les cens & autres devoirs féodaux sont éteints par l’acquisition que font les Seigneurs de nfief des héritages qui sont sujets à ces devoirs. Voyez Bodin, la Coutume de Paris, Bruneau, Chopin, Lhomeau, Chaline, &c. Le cens est imprescriptible ; le tenancier ne peut le prescrire contre son Seigneur, en ce qui regarde le fonds du Droit du Seigneur, & non en ce qui concerne les arrérages qui se peuvent prescrire par un décret faute d’opposition. La quotité de cens se peut prescrire par trente ans, entre majeurs non privilégiés, & par quarante ans contre l’Eglise. Voyez Lange.

Chef-cens, est le premier cens. Primigenius census, primitivum vectigal ; Sur-cens, celui qui a été ajoûté. Secundariæ indictionis census, secundarium vectigal. Le menu cens ne consiste d’ordinaire qu’en tournois, mailles & autres petites monoies, minuti æris census annuus, levior census dominii tantum index. Il est le chef-cens & capital, & plus seigneurial que le gros cens, qui est une espèce de rente dont l’héritage est chargé, & qui se paye en gros & en bloc pour toutes les terres qui ont été données. Multi æris census, gravior census, gravius vectigal. Le premier n’est qu’un signe & reconnoissance de la seigneurie de celui qui le premier a donné l’héritage à cens.

Le sur-cens, est le cens qui a été imposé depuis la première concession. Il y a aussi un cens aqueste, qu’en la Coutume de Melun on appelle rogo, que le Seigneur est tenu de demander ; & on l’appelle autrement cens requérable : au lieu qu’on est obligé de porter les autres cens en la maison du Seigneur ; à cause de cela, on l'appelle cens portable. Census collectitius, vectigal collectaneum.

Cher-cens, on appelle le cens-cher, lorsque l’héritage censuel est chargé de cens annuel à peu-près de ce qu’il peut valoir par an. Cens simple, cens double, qui est double du simple. Cens truant, est celui qui ne porte ni lods, ni ventes, ni aucun profit au Seigneur. Croix de cens, est la monnoie dont on paye le cens, parce qu’autrefois toute la monnoie étoit marquée d’une croix.

Ce mot vient de census ; Nicot. & census vient de censere, qui signifie, priser, estimer, à cause que les Censeurs à Rome, appelés d’abord Censores, & ensuite Censitores, estimoient de temps en temps les biens des particuliers, pour imposer les tributs à proportion.

On dit proverbialement, quitter la terre pour le cens ; pour dire, se défaire d’une chose qu’on possède à des conditions trop onéreuses.

On dit, des Seigneurs & des héritages censables, censifs, censiers, & censuels, selon les divers pays & Coutûmes, en parlant d’un Seigneur qui a droit de lever un cens, ou d’un héritage qui en est chargé envers lui. Cui debitus est census annuus.

Censable se dit du Seigneur qui a droit de cens ; & censéable, de l’héritage qui est chargé de cens : Censier se dit de l’un & de l’autre.

CENSAL. s. m. Est un terme de Commerce du Levant, qui signifie Courtier. Ce mot est en usage principalement en Provence & dans les Echelles du Levant. Pour la commodité des Marchands, & pour faire fleurir le négoce, il y a aujourd’hui dans Marseille 46 Censaux ou Courtiers, dont l’établissement est si ancien, que je n’ai pu trouver son origine ; car dans l’un des statuts qui furent faits l’an 1257, il est parlé du serment que font les Courtiers tous les ans le jour de la Purification dans l’Hôtel-de-Ville, entre les mains du Viguier & des Consuls. Vers le milieu du XVe siècle il y en avoit jusqu’à 70. En 1579, les Consuls les réduisirent à 30. En 1599, le nombre fut augmenté de huit, avec défenses faites à toutes personnes d’exercer la charge de Censal, à peine de faux, de 150 livres d’amende, & de punition corporelle. Aux années 1604 & 1609, on accrut ce nombre de six, & à mesure qu’on faisoit quelque augmentation, les Consuls dressoient de nouveaux Règlemens, dont les principaux articles sont insérés dans un Livre intitulé : Le Règlement du sort. Louis le Grand a érigé la charge de Censal en Office ; & depuis, les Censaux prennent des provisions du Roi. De Ruffi, Hist. de Marseille, T. II, p. 230. Quelques-uns écrivent Sensal.

☞ CENSE. s. f. Ce terme est usité dans quelques provinces, en Flandre, dans le Hainaut, en Bourgogne, pour dire une petite ferme, une métairie. Prædium, prædiolum rusticum. Cette terre consiste en deux ou trois censes.

☞ CENSÉ, ÉE. adj. du latin censere, croire, penser, signifie la même chose que réputé. Habitus, existimatus. Les Ecclésiastiques absens pour le service du Roi sont censés présens, & ont part aux distributions. Il est censé complice de cet assassinat par les preuves & indices du procès. Une loi est censée abolie par le non usage.

CENSERIE. s. f. exprime tout ce que signifie courtage, c’est-à-dire, la profession du Censal ; & quelquefois le droit qui lui est dû.

CENSEUR. s. m. Terme d’Histoire Romaine. C’étoit autrefois un des premiers & des plus importans Magistrats de Rome ; il avoit le soin de l’intérêt public & de la correction des mœurs. Censor. C’étoit comme le Réformateur des mœurs & de la Police. Les Censeurs furent créés l’an 311 de Rome, lorsque le Sénat eut remarqué que les Consuls, trop appliqués aux affaires de la guerre & aux expéditions militaires, ne pouvoient veiller assez exactement aux affaires privées. Les deux premiers furent Papirius & Sempronius ; ils furent créés l’an de Rome 311. Chacun leur étoit soumis, puisqu’ils avoient droit de reprendre tout le monde. Les Censeurs étoient au nombre des grands Magistrats. Au commencement ils furent tirés du Sénat ; mais depuis que les Plébéiens purent aspirer au Consulat, ils parvinrent aussi à la dignité de Censeur. La coutume étoit d’en élire deux ; l’un de famille patricienne, l’autre de famille plébeïenne, & quand l’un des deux mouroit dans le temps de son emploi, l’autre sortoit de charge, & on en elisoit deux nouveaux. M. Rutilius fut le premier du peuple qui ayant été fait Dictateur l’an 402 de Rome, après avoir été deux fois Consul, demanda aussi la charge de Censeur. Publius Philo Dictateur, ennemi des Patriciens, en 414, porta une loi par laquelle il fut ordonné que l’un des Censeurs seroit pris d’entre les Plébeïens. Elle fut en vigueur, jusqu’en 622, que les deux Censeurs furent élus d’entre le peuple. Depuis on en a repris du peuple & du Sénat. Cette Charge étoit si considérable, qu’on ne l’obtenoit qu’après avoir passé par les autres ; & on trouva étrange que Crassus en eût été pourvu avant que d’avoir été ni Consul ni Prêteur. Cette Magistrature fut d’abord établie pour cinq ans ; mais cet usage ne dura pas neuf ans seulement après l’institution des Censeurs. Mamercus Emilius, Dictateur, fit porter une loi qui régla que la Censure ne dureroit qu’un an & demi, & qui fut observée depuis à la rigueur. Le Censeur avoit le droit d’exclure les Sénateurs qu’il jugeoit indignes de cette dignité, & de casser les Chevaliers qui ne remplissoient pas bien leurs devoirs, en les privant du cheval public. Dac. Les Censeurs faisoient aussi la taxe, & l’estimation des biens & des facultés de tous les Citoyens de Rome, pour imposer le tribut à proportion de ce que chacun possédoit. Cicéron a décrit très-précisément les fonctions de cette charge. Elles se réduisent au dénombrement du peuple, à la correction des mœurs, à l’estimation des biens de chaque Citoyen, à l’imposition des taxes selon les facultés d’un chacun, à la surintendance des tributs, à la défense des Temples & au soin des lieux publics. Les gens du Roi, les Magistrats de police, ont des fonctions qui répondent en quelque sorte à cette charge, & ils peuvent être appelés les Censeurs des mœurs. Il y a même un Magistrat dans la République de Venise, qui est chargé de ce soin, & qui est six mois en charge.

Censeur se dit chez nous dans le discours ordinaire d’un homme qui critique, qui contrôle les actions d’autrui. Censor. Quand ce mot est seul, il se prend presque toujours en mauvaise part. Dire de quelqu’un que c’est un censeur, c’est dire qu’il trouve à redire à tout. Quand il est joint à quelque épithète, c’est cette épithète qui le détermine à un sens favorable ou défavorable. Censeur équitable, censeur injuste. Pour s’ériger en Censeur, il faut joindre à la supériorité du pouvoir, l’autorité des bonnes mœurs, & des bons exemples. De Vill. Un censeur indiscret & imprudent, aigrit le mal au lieu de le guérir. Id. On soupçonne d’ordinaire que les airs chagrins d’un censeur inexorable, proviennent d’une secrète envie, qui ne peut souffrir le mérite des autres. Bell.

Censeur un peu fâcheux, mais souvent nécessaire ;
Plus enclin à blâmer que savant à bien faire. Boil.

Censeur se dit aussi d’un Critique savant qui doit faire l’examen d’un livre sans passion, pour y remarquer ce qu’il y a de mauvais & de condamnable. Il faut être le premier Censeur de ses Ouvrages. J’ai prié mon ami d’examiner cette pièce en sévère Censeur. Le Censeur se met dans la nécessité d’avoir évidemment raison, afin de justifier par là ce qu’il y a d’odieux dans la censure. Abbé de Saint Réal.

Faites choix d’un Censeur solide & salutaire,
Que la raison conduise, & le savoir éclaire. Boil.

Censeur des Livres, ☞ Censeur royal, ou tout simplement Censeur. On nomme ainsi des gens de lettres commis par M. le Chancelier, pour examiner les livres qu’on doit imprimer. Ils ne donnent leur approbation qu’à des livres qui ne contiennent rien de contraire à la Religion & aux bonnes mœurs. Les Docteurs de la Faculté de Théologie, prétendent que c’est un privilège qui leur appartient, & que les Papes l’ont attribué à leur Corps. En effet, ils ont été long-temps en possession de ce droit. Mais en 1614, par Lettres Patentes du Roi, l’on établit quatre Docteurs de la Faculté, pour être Censeurs & Approbateurs de tous les livres concernant la Religion, & en être responsables en leur nom. Quant aux livres qui ne traitent point des matières de la Religion, il paroît que les Maîtres des Requêtes ont eu le pouvoir de les examiner, & qu’ils l’ont conservé jusqu’au règne d’Henri IV. Il n’est pas cependant bien sûr si ce droit étoit annexé à leur charge, ou si c’étoit une commission personnelle dont l’on chargeoit quelques Maîtres des Requêtes. Il semble même qu’ils n’examinoient que les Livres de Droit & d’Histoire, dans lesquels on peut agiter des questions qui intéresseroient l’Etat. ☞ Aujourd’hui, comme nous l’avons dit, les Censeurs sont des gens de lettres, distingués par leurs lumières & par leurs connoissances, commis par M. le Chancelier pour l’examen des livres.

M. Bayle, compare les Auteurs sollicitans l’approbation des Examinateurs, à ces âmes errantes sur les bords du Styx, & attendant avec impatience d’être transportés sur l’autre rive. Il leur applique ces vers de Virgile ;

Tendentesque manus, ripæ ulterioris amore :
Navita sed tristis nunc hos, nunc accipit illos.
Astt altos longè summotos arcet arenâ.

On appelle Censeurs dans les Universités, & sur-tout en Sorbonne, certains Docteurs, qui assistent aux thèses, afin de prendre garde à ce que tout s’y passe dans l’ordre. Ce sont principalement ces Censeurs, qui jugent du mérite du répondant. Il y en a deux qu’on appelle Censeurs de discipline ou de mœurs. En Sorbonne, les Censeurs donnent leur suffrages par billet. Censeur se dit encore dans les Universités de celui qui est chargé d’examiner les cahiers, soit de Philosophie, soit de Théologie, de ceux qui veulent être Maîtres ès Arts, ou Bacheliers.

Censeur. Terme de Collège. Les Censeurs sont parmi les écoliers, ceux que le Régent choisit pour l’aider à maintenir le bon ordre & la discipline scholastique. Un Régent doit se défier de la probité & de la fidélité des Censeurs, qui agissent souvent par passion. Les Censeurs des leçons, sont ceux qui doivent reprendre ceux qui récitent leurs leçons, lorsqu’ils font des fautes. Censores lectionum, ou Censores exigendo memoriæ penso præpositi. Censeurs de la chaire, sont ceux qui sont auprès de la chaire du Régent, pour apprendre plus facilement de lui ce qu’ils doivent faire en chaque occasion. Assidentes Magistro Censores, &c.

☞ CENSIER. adj. Epithète qui s’applique au Seigneur auquel le cens est dû. Seigneur Censier. Prædiatorii vectigalis, census dominus.

☞ On dit aussi papier censier, plus communément terrier, censualis liber, où sont écrits les cens & les rentes dûes à un Seigneur, ou les reconnoissances qui en ont été passés par les tenanciers. Codex vectigalium, censuum index.

Censier, ère. f. Signifie encore celui ou celle qui tient une cense à ferme, & on dit le Censier d’un tel Seigneur.

☞ CENSIF. s. m. Vieux mot, synonyme de censive.

CENSITAIRE. s. m. & f. Celui ou celle qui a une terre ou un fonds à charge de cens, à charge de payer à un Seigneur de fief un droit de cens, une rente annuelle. Censuus, a. Il a trouvé bon que les nouveaux censitaires, comme représentant les anciens mansionnaires, ou fermiers, eussent les mêmes immunités accordées à ceux-ci. Normand. Pouvoit-il dispenser les nouveaux censitaires des droits de Vicomte qui ne lui appartenoient pas ? Id.

CENSITE. adj. m. & f. Sujet au cens. Censui obnoxius. Il y a un Traité des personnes de main-morte, censites & taillables, par Antoine Colombet, qui l’a intitulé, Colonia celtica lucrosa. Il est vieux. On dit plus ordinairement censitaire.

CENSITEUR. s. m. Censitor. Chez les Romains c’étoit dans les Provinces ce que le Censeur étoit dans Rome. Chorier. L. IV, p. 193.

CENSIVE. s. f. Quelques-uns disent CENSIF. s. m. mais ce dernier est vieux. Etendue d’un fief sur lequel il est dû des cens. Fundus vectigalis. Il y a une petite censive en un tel endroit qui dépend de mon fief. Les héritages qui sont en la censive d’un Seigneur, lui doivent lods & ventes. Rochefort dit que les censives ont été établies sur le modèle de ce que fit Pharaon par le conseil de Joseph, & que les Seigneurs censiers l’ont imité.

Censive signifie aussi la nature, la qualité des héritages : ainsi on dit héritage tenu en censive, ou à titre de cens, pour dire, qu’il est roturier & chargé de redevance.

Censive, se prend encore pour la redevance en argent, ou en denrées, que certains biens doivent annuellement au Seigneur du fief dont ils relèvent. Cette terre doit tant de censive. Census, præstatio censualis.

CENSIVEMENT. adj. Terme de Coutumes, qui exprime la manière, dont on tient une terre, c’est à-dire, à droit de cens d’un Seigneur. Tenir des terres censivement. Cum onere census pendendi.

CENSUEL, ELLE. adj. m. & f. Terme de Droit. Qui appartient, qui a rapport au cens. Ad censum pertinens, censualis. Le droit censuel est noble, & il se partage noblement. Voyez les Auteurs qui ont traité des cens.

☞ Les Romains appeloient livres censuels, censuales, les livres où les pères écrivoient la naissance de leurs enfans.

CENSURABLE. adj. Qui mérite censure, qui peut être censuré. Censurâ dignus. Leur censure, toute censurable qu’elle est, aura son effet. Pasc. Conduite, action censurable. Proposition censurable.

CENSURE. s. m. Charge, office de Censeur. Censura. Il n’y avoit point à Rome de dignité dont le pouvoir & l’autorité s’étendissent plus loin. L. Papinius & L. Sempronius ont les premiers exercé la censure à Rome. L’âge & la gravité des mœurs étoient une espèce de Censure & de Magistrature, qui donnoit droit de correction. Voyez Censeur. S. Evr.

Censure. Jugement par lequel on condamne quelque action. Censura, reprehensio.

On le dit particulièrement du jugement par lequel on condamne des ouvrages qui regardent la Religion, la doctrine, ou les mœurs. Il y a eu une censure de la Sorbonne contre un tel livre. La Lettre du Pape Gélase aux Evêques de Lucanie contient une censure des Livres authentiques & apocryphes, c’est-à-dire un décret qui distingue les Livres authentiques, & reçus pour tels dans l’Eglise, de ceux qui ne le sont pas, & marque les uns & les autres. Le Pape Hormisdas, dans sa lettre à Possessor, marque que l’on ne peut suivre ce que la censure de Gélase, qu’il indique, n’a pas reçu.

On le dit aussi d’un jugement par lequel on blâme quelque chose soit en critiquant un livre où il se trouve quelques fautes, soit en reprenant les actions d’autrui. Rien n’est plus utile pour la correction des mœurs, qu’une censure fine & ingénieuse. De Vill. Un esprit chagrin interprète tout mal ; & s’érigeant en pédagogue impitoyable du genre humain, il y a peu d’actions assez innocentes pour échaper à sa censure. Bell. La censure que l’on exerce sur les ouvrages d’autrui, n’engage point à en faire de meilleurs, à moins qu’elle ne soit amère, chagrine & orgueilleuse ; mais si elle a plutôt un air gai & libre, que décisif, elle laisse la liberté d’en faire encore pis si l’on veut. Fonten. La censure doit être accompagnée de quelques louanges, qui en corrigent l’amertume. Abb. de S. Réal.

Censure signifie aussi la correction ou réprimande que fait un supérieur, ou le public. Reprehensio. Il faut déférer à la censure de nos supérieurs, de ceux qui sont plus sages que nous. Tous les Auteurs sont exposés à la censure du public.

☞ On appelle censures Ecclésiastiques, ou simplement censure une peine publique dont l’Eglise ou le Supérieur Ecclésiastique punit quelquefois les Chrétiens qui sont sous sa Juridiction. Ces censures sont l’excommunication, la suspense & l’interdit. Voyez ces mots.

Ceux qui ont le droit de porter des censures Ecclésiastiques, sont le Pape, dans toute l’Eglise ; les Evêques, dans leurs Diocèses ; les Vicaires généraux, en leur nom ; les Chapitres, sede vacante.

Les Rois de France se sont toujours maintenus exemts & affranchis des censures & des excommunications de la Cour de Rome. En effet, on remarque que sous la première race, les Papes ne censurèrent aucun Roi de France. Lothaire est le premier qui fut excommunié par le Pape Nicolas I, pour avoir répudié Teutberge sa femme légitime. C’est la première brèche qui fut faite aux libertés de l’Eglise Gallicane : cependant le Pape n’osa hasarder l’excommunication sur sa propre autorité ; & il la fit confirmer par l’Assemblée des Evêques de France. Le Pape Urbain III usa de la même précaution lorsqu’il excommunia Philippe I. Philippe Auguste fut aussi excommunié avec les mêmes formalités. Mais depuis les Rois ont mieux soutenu leurs privilèges : car le Pape Benoît XIII ayant censuré le Roi Charles VI, & mis le Royaume en interdit, le Parlement de Paris par Arrêt de 1408 ordonna que la Bulle fût lacérée. Jules II ayant aussi lancé l’excommunication contre Louis XII, l’Assemblée générale tenue à Tours censura les censures de Jules II. Lorsque le Pape censura & excommunia Henri IV en 1591, le Parlement s’opposa à la Bulle du Pape.

Les censures sont portées ou par le Droit, à jure, ou par le Juge Ecclésiastique ab homine. on appelle censures à jure celles qui sont ordonnées ou par le Droit commun, contenu dans ce que nous nommons Droit canonique, ou par le droit particulier de chaque Diocèse. Les censures ab homine, sont celles qui sont portées par le Supérieur Ecclésiastique contre certaines personnes particulières. Les premières sont générales & perpétuelles. Il n’en est pas de même des secondes ; mais aussi elles sont toujours réservées. On divise les censures par rapport à l’effet qu’elles produisent, en celles qu’on appelle latæ sententiæ, & en celles qu’on nomme ferendæ sententiæ, c’est-à-dire, en censures de sentence prononcée, qui s’encourent par le seul fait, sans qu’il soit besoin d’une nouvelle sentence du Juge ; & en censures de sentence comminatoire, qui ne s’encourent pas sans une nouvelle sentence du Juge. Ipso facto est la marque la plus ordinaire de la censure latæ sententiæ. Sub pœna excommuntiationis, ne dénote qu’une censure ferendæ sententiæ. ☞ Dans nos tribunaux on ne regarde comme véritables censures que celles qui sont prononcées par sentence, après une procédure régulière. Si l’on considère les censures par rapport aux sujets pour lesquels on les inflige, & à la conduite des Supérieurs, elles se divisent en justes & injustes, en valides & invalides. Les censures justes sont celles qu’un Supérieur prononce selon les loix, observant les formalités prescrites par le Droit. Les injustes qu’on nomme illicites, sont celles où ces conditions ne se rencontrent pas. On nomme valide, la censure qui est portée par le Supérieur qui a l’autorité requise pour la prononcer, & où l’on a gardé les formalités essentielles qui sont nécessaires pour la faire subsister ; & invalide, la censure qui est portée par une personne qui n’a pas l’autorité requise, ou qui l’ayant, n’a pas gardé les formalités essentielles. Il ne faut pas confondre la censure invalide & la censure injuste : la censure peut-être injuste sans être invalide. La déposition, la dégradation, ni même l’irrégularité ne sont point des censures. Un Ecclésiastique qui exerce les fonctions des Ordres majeurs étant lié par quelques censures, tombe dans l’irrégularité. On excepte l’excommunication mineure. Le pouvoir de porter des censures a été donné à l’Eglise en la personne des premiers Pasteurs. Il n’y a que ceux qui jouissent de la Juridiction extérieure, qui puissent porter des censures ; ainsi les Curés n’ont pas ce droit. L’Histoire Ecclésiastique fournit un grand nombre d’exemples de censures. Voyez les Conférences d’Angers.

CENSURER. v. a. Condamner un livre comme préjudiciable à la Religion ou à l’Etat. Censurer une proportion, c’est déclarer qu’elle contient quelque erreur. Dammare.

Censurer signifie aussi, critiquer, reprendre. Reprehendere ; Censoris virgulâ notare. Cet Auteur ne s’occupe qu’à censurer les ouvrages d’autrui. Cette femme est médisante & censure les actions de tout le monde. Ce n’est pas toujours par un véritable zèle qu’on censure ; c’est par chagrin, ou par la malignité de l’esprit humain. Bell.

Aimez qu’on vous censure. Boil,

Faites-vous des amis prêts à vous censurer. Id.

Tous les dévots de cœur sont aisés à connoître ;
Ils ne censurent point toutes nos actions ;
Ils trouvent trop d’orgueil dans ces corrections. Mol.

Censuré, ée, part. Censurâ notatus, damnatus. Livre censuré, proposition, doctrine, opinion censurée, condamnée.

☞ CENT. adj. numéral de t. g. & quelquefois substantif masculin. C’est le carré de dix, le produit de dix par dix ; un nombre qui contient dix fois dix, cinq fois vingt. Centum. C’est ce nombre qui commence la troisième colonne des chifres arabes, disposés en ordre d’Arithmétique. Il faut cent ans pour faire un siècle. Une compagnie de cent maîtres. Une Hydre à cent têtes. Cent hommes & cent femmes. Cent un, cent deux, cent trois. Cent un an, cent un chevaux. Cent mille. Cent millions. Au pluriel on dit & on écrit cents ou cens. Deux cens ans, deux cens hommes. Richelet écrit avec un t au pluriel, quand il suit une consonne, deux cens pistoles. Mais cette ortographe est mauvaise. Il faut une s au pluriel, parce qu’on la prononce nécessairement dans deux cens ans, deux cens hommes. Ainsi on ne doit pas moins écrire deux cens pistoles, quoique l’s ne s’y prononce pas, par la règle générale des pluriels. Quand on marque l’année courante depuis une époque, comme quand on dit l’an mil sept cent trente-deux depuis la naissance de J. C. Cent ne prend pas d’s, en cette occasion, quoique précédé de sept, parce que c’est un nombre absolu pour un nombre ordinal, & que l’on n’y parle que d’une année, comme s’il y avoit, l’an millième sept centième trente-deuxième. Restaut.

☞ Cent est aussi s. m. Un cent de pommes. Un cent de fagots. Un cent de marons. C’est en ce sens qu’on disoit dans la dernière édition de ce Dictionnaire, que cent étoit un terme numéral masculin. Mais on ne disoit pas un adjectif numéral seulement masculin. Ainsi la critique des Vocabulaires porte évidemment à faux, & fait dire à l’Editeur ce qu’il ne disoit point.

☞ On dit jouer un cent de piquet, jouer une partie de cent points au piquet.

Ce mot vient du latin centum, qui vient du grec κεντεῖν, pungere. À chaque cent on faisoit un point. Ce mot a été pris du celtique Cant. Pezron. Cant est-il celtique, & n’est-il point Roman ?

Cent, signifie un nombre grand, incertain, indéterminé. Je lui ai dit cent & cent fois. Sæpius. Cet homme a cent défauts, cent perfections. Multus, plurimus. Je remarquois en elle cent attraits. Voit. On fit encore cent réflexions dans lesquelles on s’empressa de rendre justice au mérite de ce savant homme. (M. Perrault) {{Mlle l’Héritier.

Cent en terme de commerce, sert à régler la proportion du profit de l’intérêt qu’on fait dans le négoce. On demande deux & demi pour cent pour remettre de l’argent en une telle ville. L’intérêt ordinaire de la place est de huit pour cent, ou le denier douze. Les Hollandois qui trafiquent aux Indes gagnent cent pour cent, c’est-à-dire, le double. Centesimum fructum afferre. Rapporter cent pour cent.

Cent est encore un terme de commerce, qui sert à exprimer certaine quantité des choses dont on trafique. Un cent de sel à Amsterdam, c’est-à-dire quatorze tonneaux.

Un cent de sel de Marenne, de brouage, de l’Île de Ré, &c. c’est-à-dire, vingt-huit muits ras, à vingt quatre boisseaux par muid.

Cent de bois. C’est la mésure des bois de charpente en œuvre de différentes longueurs & grosseurs. Cent fois la quantité de douze pieds de longs sur six pouces de gros, qui font cent pièces de bois, à quoi on les réduit pour les estimer.

☞ CENTAINE. s. f. Nombre collectif, qui renferme cent unités. Centum, centenarius, centenus numerus. Une centaine d’années. Une centaine d’écus. Une centaine d’hommes. Nombre, dixaine centaine, mille, &c, C’est l’ordre des nombres en Arithmétique.

☞ On dit adverbialement à centaines, par centaines, pour dire en grande quantité. Je reçois des lettres par centaines, à centaines.

Centaine, se dit aussi du brin de fil ou de soie par où tous les fils d’un écheveau sont liés ensemble, & par où on doit commenter à le dévider. Fili in spiram convoluti initium. Vous mêlerez cette soie, si vous ne trouvez la centaine.

☞ CENTAL. Petite ville des Etats de Savoie, dans le Marquisat de Saluces, sur la rivière de Malia.

☞ CENTAURE. s. m. Terme de Mythologie. Animal fabuleux, moitié homme, moitié cheval. Centaurus. Le Centaure Chiron eut soin de l’éducation d’Achille. Le combat des Centaures contre les Lapithes. Les Centaures y périrent presque tous, par la valeur de Thesée & de Pirithoüs ; le reste se sauva dans les montagnes d’Arcadie, de manière qu’on n’en entendit presque plus parler.

Les Poëtes ont feint que les Centaures étoient fils d’Ixion & d’une Nuée. Le château où ils se retiroient, s’appeloit Νεφέλη, qui signifie Nuée ; c’est ce qui a donné occasion à ce que l’on a dit de leur mère. Il est souvent parlé des Centaures dans les Lettres d’Ovide. M. de Méziriac en traite fort au long dans son Commentaire sur la lettre de Philis à Démophon, où il dit : les Centaures étoient demi-hommes & demi-chevaux : ils avoient la tête d’un homme & les bras ; & peu-à-peu, descendant vers la poitrine, ils commençoient d’être chevaux, ayant quatre pieds comme un cheval, & tout le reste du corps & même le cri de cheval, comme les décrivent Lucien, au Dialogue intitulé Antiochus ; & Philostrate au Tableau des Centaurelles. Quant à leur origine, Diodore de Sicile, Liv. IV, en a le mieux parlé de tous ; les principaux Auteurs qui en ont traité, sont Eustathius sur le premier de l’Iliade, Tzetzès Chiliade 7, Hist. 99, & Palæphate en ses Histoires Incroyables. Consultez Vigenère sur les Centaurelles de Philostrate ; il rapporte tout ce qu’en ont dit Tzetzès Si Palæphate. Les Centaures dont parle les Poëtes, sont Chiron, Eurytus, Amycus, Grynæus, Rhoëtus, Arneus,