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On croit que le canon paschal a été calculé par Eusebe de Césarée, & de l’ordre du concile de Nicée. Voyez Pasque, Fête, Cycle.

* Canon, parmi les religieux, c’est le livre qui contient la regle & les instituts de l’ordre : on l’appelle aussi regle, institut. Voyez Regle.

* Canon, se dit encore dans l’Eglise du catalogue des saints reconnus & canonisés par l’Eglise. Voyez Saint & Canonisation.

* Canon ; on appelle ainsi par excellence les paroles sacramentales de la messe ; les paroles secretes dans lesquelles on comprend depuis la préface jusqu’au Pater ; intervalle au milieu duquel le prêtre fait la consécration de l’hostie. Voyez Messe.

Le sentiment commun est que le canon commence à Te igitur, &c. Le peuple doit se tenir à genoux pendant le canon de la messe, & le réciter en soi-même tout bas, & de maniere à n’être point entendu. Quelques-uns disent que S. Jerôme par ordre du pape Sirice, a mis le canon dans la forme où nous l’avons ; d’autres l’attribuent au pape Sirice même qui vivoit sur la fin du ive. siecle. Le concile de Trente dit que le canon de la messe a été dressé par l’Eglise, & qu’il est composé des paroles de Jesus-Christ, de celles des apôtres, & des premiers pontifes qui ont gouverné l’Eglise.

Canon, dans la Musique ancienne ; c’étoit une regle ou méthode de déterminer les intervalles des notes. Voyez Gamme, Note, Musique, &c.

Canon, en Musique moderne, est une sorte de fugue qu’on appelle perpétuelle, parce que les parties partant l’une après l’autre, répetent sans cesse le même chant.

Autrefois, dit Zarlin, on mettoit à la tête des fugues perpétuelles qu’il appelle fughe in conseguenza, certains avertissemens qui marquoient comment il falloit chanter ces sortes de fugues ; & ces avertissemens étant proprement les regles de cette espece de fugue, s’intituloient canoni, canons. C’est de-là que prenant le titre pour la chose même, on a nommé canons ces sortes de fugues.

Les canons les plus faciles & les plus communs, se prennent à l’unisson ou à l’octave, c’est-à-dire, que chaque partie répete sur le même ton le chant de celle qui l’a précédée. Pour composer cette espece de canon, il ne faut qu’imaginer un chant à son gré, y ajoûter en partition autant de parties qu’on veut, puis de toutes ces parties chantées successivement n’en composer qu’un seul air ; faisant ensorte que le chant de l’une puisse former une suite agréable avec celui de l’autre.

Pour exécuter un tel canon, la personne qui chante la premiere partie part seule, chantant de suite tout l’air, & le recommence aussi-tôt sans manquer à la mesure. Dès que celui-ci a fini le premier chant qui a servi de sujet, le second entre, commence, & poursuit ce même chant comme a fait le premier ; les autres partent de même successivement aussi-tôt que celui qui les précede a achevé le premier chant ; & recommençant ainsi sans cesse, on peut continuer ce canon aussi long-tems qu’on veut.

L’on peut encore prendre une fugue perpétuelle à la quinte ou la quarte ; c’est-à-dire, que chaque partie fera entendre le même chant que la précédente, une quinte ou une quarte au-dessus d’elle. Il faut alors que l’air soit entierement imaginé, & que l’on ajoûte des diéses ou des bémols selon le cas, aux notes dont les degrés naturels ne rendroient pas exactement à la quinte ou à la quarte, le chant de la partie précédente. On ne doit avoir ici égard à aucune modulation, mais seulement au chant ; ce qui augmente beaucoup la difficulté : car à chaque fois qu’une partie reprend la fugue, elle entre dans un nouveau ton.

Pour faire un canon dont l’harmonie soit un peu variée, il faut que les parties ne se suivent pas trop promptement, que l’une n’entre que long-tems après l’autre ; quand elles se suivent rapidement, comme à la demi-pause ou aux soupirs, on n’a pas le tems d’y faire entendre plusieurs accords, & le canon ne peut manquer d’être monotone : mais c’est un moyen de faire sans beaucoup de peine des canons à tant de parties qu’on veut ; car un canon de quatre mesures seulement sera déjà à huit parties si elles se suivent à la demi-pause ; & à chaque mesure qu’on ajoûtera, on gagnera encore deux parties.

L’empereur Charles VI. qui étoit grand Musicien, & composoit très-bien, se plaisoit beaucoup à faire & chanter des canons. L’Italie est encore pleine de fort beaux canons qui ont été faits pour ce prince par les meilleurs maîtres de ce pays-là. (S)

* Canon, (en Géométrie & en Algebre,) signifie une regle générale pour la solution de plusieurs questions d’un même genre ; ce mot est aujourd’hui peu usité. On se sert plus communément des termes méthode & formule. Voyez Méthode & Formule.

Canon naturel des triangles : c’est une table qui contient tout ensemble, les sinus, les tangentes, & les sécantes des angles ; on la nomme de la sorte, parce qu’elle sert principalement à la résolution des triangles. Voyez Triangle.

Canon artificiel des triangles : c’est une table où se trouvent les logarithmes des sinus & des tangentes, &c. Voyez Sinus, Tangente, Logarithme.

Canon, (dans l’Art militaire.) est une arme à feu de fonte ou de fer, propre à jetter des boulets de plomb ou de fer.

Le mot de canon semble venir de l’Italien cannone, qui vient de canna, canne, parce que le canon est long, droit, & creux comme une canne.

Les premiers canons ont été appellés bombardes. Voyez Bombarde. On leur a aussi donné des noms terribles, pareils à ceux que les anciens donnoient à leurs machines de guerre ; tels sont ceux de coulevrine, qui vient du nom de couleuvre ; de serpentine, de basilic, & d’autres semblables. Ces noms leur furent donnés à cause de la figure de ces animaux que l’on représentoit sur ces sortes de pieces : les Espagnols par dévotion leur donnoient quelquefois des noms de saints, témoins les douze apôtres que l’empereur Charles-Quint fit faire à Malaga pour son expédition de Tunis.

Les principales parties du canon sont Planche V. de l’Art milit. fig. 4, 5, & 6. 1°. La culasse A avec son bouton ; elle n’est autre chose que l’épaisseur du métal du canon depuis le fond de sa partie concave jusqu’au bouton, lequel termine le canon du côté opposé à sa bouche.

2°. Les tourillons I, qui sont deux especes de bras qui servent à soûtenir le canon, & sur lesquels il peut se balancer & se tenir à peu près en équilibre : je dis à peu près, parce que le côté de la culasse doit l’emporter sur l’autre d’environ la trentieme partie de la pesanteur de la piece. Comme le métal est plus épais à la culasse que vers l’embouchure du canon, les tourillons sont plus près de sa culasse que de sa bouche.

3°. L’ame qui est toute la partie intérieure ou concave du canon. Elle est marquée dans la fig. 5. Pl. V. de l’Art milit. par deux lignes ponctuées.

Au fond de l’ame est la chambre, c’est-à-dire la partie qu’occupe la poudre dont on charge la piece. Voyez Chambre.

Dans les pieces de 24 & de 16, on pratique au fond de l’ame une espece de petite chambre cylindrique ab, Pl. V. de l’Art mil. fig. 5. & 6. qui peut contenir environ deux onces de poudre.