L’Encyclopédie/1re édition/LOI

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LOI, s. f. (Droit naturel, moral, divin, & humain.) La loi en général est la raison humaine, entant qu’elle gouverne tous les peuples de la terre ; & les lois politiques & civiles de chaque nation ne doivent être que les divers cas particuliers où s’applique cette raison humaine.

On peut définir la loi une regle prescrite par le souverain à ses sujets, soit pour leur imposer l’obligation de faire, ou de ne pas faire certaines choses, sous la menace de quelque peine, soit pour leur laisser la liberté d’agir, ou de ne pas agir en d’autres choses comme ils le trouveront à propos, & leur assurer une pleine jouissance de leur droit à cet égard.

Les hommes, dit M. de Montesquieu, sont gouvernés par diverses sortes de lois. Ils sont gouvernés par le droit naturel, par le droit divin, qui est celui de la religion ; par le droit ecclésiastique, autrement appellé canonique, qui est celui de la police de la religion ; par le droit des gens, qu’on peut considérer comme le droit civil de l’univers, dans le sens que chaque peuple en est un citoyen ; par le droit politique général, qui a pour objet cette sagesse humaine, qui a fondé toutes les sociétés ; par le droit politique particulier, qui concerne chaque société ; par le droit de conquête, fondé sur ce qu’un peuple a voulu, a pu ou dû faire violence à un autre ; par le droit civil de chaque société, par lequel un citoyen peut défendre ses biens & sa vie contre tout autre citoyen ; enfin, par le droit domestique, qui vient de ce qu’une société est divisée en diverses familles qui ont besoin d’un gouvernement particulier. Il y a donc différens ordres de lois, & la sublimité de la raison humaine consiste à savoir bien auquel de ces ordres se rapportent principalement les choses sur lesquelles on doit statuer, & à ne point mettre de confusion dans les principes qui doivent gouverner les hommes.

Les réflexions naissent en foule à ce sujet. Détachons-en quelques-unes des écrits profonds de ces beaux génies qui ont éclairé le monde par leurs travaux sur cette importante matiere.

La force d’obliger qu’ont les lois inférieures, découle de celle des lois supérieures. Ainsi dans les familles on ne peut rien prescrire de contraire aux lois de l’état dont elles font partie. Dans chaque état civil on ne peut rien ordonner de contraire aux lois qui obligent tous les peuples, telles que sont celles qui prescrivent de ne point prendre le bien d’autrui, de réparer le dommage qu’on a fait, de tenir sa parole, &c. & ces lois communes à toutes les nations, ne doivent renfermer rien de contraire au domaine suprème de Dieu sur ses créatures. Ainsi dès qu’il y a dans les lois inférieures des choses contraires aux lois supérieures, elles n’ont plus force de lois.

Il faut un code de lois plus étendu pour un peuple qui s’attache au commerce, que pour un peuple qui se contente de cultiver ses terres. Il en faut un plus grand pour celui-ci, que pour un peuple qui vit de ses troupeaux. Il en faut un plus grand pour ce dernier, que pour un peuple qui vit de sa chasse. Ainsi les lois doivent avoir un grand rapport avec la façon dont les divers peuples se procurent leur subsistance.

Dans les gouvernemens despotiques, le despote est le prince, l’état & les lois. Dans les gouvernemens monarchiques il y a une loi ; & là où elle est précise, le juge la suit ; là où elle ne l’est pas, il en cherche l’esprit. Dans les gouvernemens républicains, il est de la nature de leur constitution que les juges suivent la lettre de la loi ; il n’y a point de citoyen contre qui on puisse interpréter une loi, quand il s’agit de ses biens, de son honneur ou de sa vie. En Angleterre les jurés décident du fait, le juge prononce la peine que la loi infflige ; & pour cela il ne lui faut que des yeux.

Ceux qui ont dans leurs mains les lois pour gouverner les peuples, doivent toujours se laisser gouverner eux-mêmes par les lois. C’est la loi, & non pas l’homme qui doit régner. La loi, dit Plutarque, est la reine de tous les mortels & immortels. Le seul édit de 1499, donné par Louis XII. fait chérir sa mémoire de tous ceux qui rendent la justice dans ce royaume, & de tous ceux qui l’aiment. Il ordonne par cet édit mémorable « qu’on suive toujours la loi, malgré les ordres contraires à la loi, que l’importunité pourroit arracher du monarque ».

Le motif & l’effet des lois doit être la prospérité des citoyens. Elle résulte de l’intégrité des mœurs, du maintien de la police, de l’uniformité dans la distribution de la justice, de la force & de l’opulence de l’état, & les lois sont les nerfs d’une bonne administration. Quelqu’un ayant demandé à Anaxidame, roi de Lacédémone, qui avoit l’autorité dans Sparte, il répondit que c’étoient les lois ; il pouvoit ajouter avec les mœurs sur lesquels elles influent, & dont elles tirent leur force. En effet, chez les Spartiates, les lois & les mœurs intimement unies dans le cœur des citoyens n’y faisoient, pour ainsi dire, qu’un même corps. Mais ne nous ne flattons pas de voir Sparte renaître au sein du commerce & de l’amour du gain.

« La grande différence que Lycurgue a mise entre Lacédémone & les autres cités, dit Xénophon, consiste en ce qu’il a sur-tout fait, que les citoyens obéissent aux lois. Ils courent lorsque le magistrat les appelle : mais à Athènes, un homme riche seroit au desespoir que l’on pensât qu’il dépendît du magistrat ».

Il y a plus ; la premiere fonction des éphores de Lacédémone, en entrant en charge, étoit une proclamation publique, par laquelle ils enjoignoient aux citoyens, non pas d’observer les lois, mais de les aimer, afin que l’observation ne leur en fût point dure.

Rien ne doit être si cher aux hommes que les lois destinées à les rendre bons, sages & heureux. Les lois seront précieuses au peuple, tant qu’il les regardera comme un rempart contre le despotisme, & comme la sauvegarde d’une juste liberté.

Parmi les lois, il y en a d’excellentes, de vicieuses & d’inutiles. Toute bonne loi doit être juste, facile à exécuter, particulierement propre au gouvernement, & au peuple qui la reçoit.

Toute loi équivoque est injuste, parce qu’elle frappe sans avertir. Toute loi qui n’est pas claire, nette, précise, est vicieuse.

Les lois doivent commencer directement par les termes de jussion. Les préambules qu’on y met ordinairement sont constamment superflus, quoiqu’ils ayent été inventés pour la justification du législateur, & pour la satisfaction du peuple. Si la loi est mauvaise, contraire au bien public, le législateur doit bien se garder de la donner ; si elle est nécessaire, essentielle, indispensable, il n’a pas besoin d’en faire l’apologie.

Les lois peuvent changer, mais leur style doit toujours être le même, c’est à-dire simple, précis, ressentant toujours l’antiquité de leur origine comme un texte sacré & inaltérable.

Que les lois respirent toujours la candeur : faites pour prévenir ou pour punir la méchanceté des hommes, elles doivent avoir la plus grande innocence.

Des lois qui choqueroient les principes de la nature, de la morale ou de la religion, inspireroient de l’horreur. Dans la proscription du prince d’Orange, par Philippe II. ce prince promet à celui qui le tuera, ou à ses héritiers, vingt mille écus & la noblesse, & cela en parole de roi, & comme serviteur de Dieu. La noblesse promise pour une telle action ! une telle action ordonnée comme serviteur de Dieu ! tout cela renverse également les idées de l’honneur, de la morale & de la religion.

Lorsqu’on fait tant que de rendre raison d’une loi, il faut que cette raison soit 1°. digne d’elle. Une loi romaine décide qu’un aveugle ne peut plaider, parce qu’il ne voit pas les ornemens de la magistrature. Il est pitoyable de donner une si mauvaise raison, quand il s’en présente tant de bonnes. 2°. Il faut que la raison alléguée soit vraie ; Charles IX. fut déclaré majeur à 14 ans commencés, parce que, dit le chancelier de l’Hôpital, les lois regardent l’année commencée, lorsqu’il s’agit d’acquérir des honneurs ; mais le gouvernement des peuples n’est-il qu’un honneur ? 3°. Il faut, dans les lois, raisonner de la réalité à la réalité, & non de la réalité à la figure, ou de la figure à la réalité. La loi des Lombards, l. II. tit. XXXVII. défend à une femme qui a pris l’habit de religieuse de se marier. « Car, dit cette loi, si un époux qui a engagé à lui une femme par un anneau, ne peut pas sans crime en épouser une autre ; à plus forte raison, l’épouse de Dieu ou de la sainte Vierge ».

Enfin dès que dans une loi on a fixé l’état des choses, il ne faut point y ajouter des expressions vagues. Dans une ordonnance criminelle de Louis XIV. après l’énumération des cas royaux, on ajoute : « Et ceux dont de tous tems les juges royaux ont décidé » : cette addition fait rentrer dans l’arbitraire que la loi venoit d’éviter.

Les lois ne font pas regle de droit. Les regles sont générales, les lois ne le sont pas : les regles dirigent, les lois commandent : la regle sert de boussole, & les lois de compas.

Il faut imposer au peuple à l’exemple de Solon, moins les meilleures lois en elles-mêmes, que les meilleures que ce peuple puisse comporter dans sa situation. Autrement il vaut mieux laisser subsister les désordres, que de prétendre y pourvoir par des lois qui ne seront point observées ; car, sans remédier au mal, c’est encore avilir les lois.

Il n’y a rien de si beau qu’un état où l’on a des lois convenables, & où on les observe par raison, par passion, comme on le fit à Rome dans les premiers tems de la république ; car pour-lors il se joint à la sagesse du gouvernement toute la force que pourroit avoir une faction.

Il est vrai que les lois de Rome devinrent impuissantes à sa conservation ; mais c’est une chose ordinaire que de bonnes lois, qui ont fait qu’une petite république s’aggrandit, lui deviennent à charge lorsqu’elle s’est aggrandie, parce qu’elles n’étoient faites que pour opérer son aggrandissement.

Il y a bien de la différence entre les lois qui font qu’un peuple se rend maître des autres, & celles qui maintiennent sa puissance lorsqu’il l’a acquise.

Les lois qui font regarder comme nécessaire ce qui est indifférent, ne sont pas sensées, & ont encore cet inconvénient qu’elles font considérer comme indifférent ce qui est nécessaire ; ainsi les lois ne doivent statuer que sur des choses essentielles.

Si les lois indifférentes ne sont pas bonnes, les inutiles le sont encore moins, parce qu’elles affoiblissent les lois nécessaires ; celles qu’on peut éluder, affoiblissent aussi la législation. Une loi doit avoir son effet, & il ne faut pas permettre d’y déroger par une convention particuliere.

Plusieurs lois paroissent les mêmes qui sont fort différentes. Par exemple, les lois grecques & romaines punissoient le receleur du vol comme le voleur ; la loi françoise en use ainsi. Celles-là étoient raisonnables, celle-ci ne l’est point. Chez les Grecs & les Romains, le voleur étoit condamné à une peine pécuniaire, il falloit bien punir le receleur de la même peine ; car tout homme qui contribue, de quelque façon que ce soit, à un dommage, doit le réparer. Mais en France, la peine du vol étant capitale, on n’a pu, sans outrer les choses, punir le receleur comme le voleur. Celui qui reçoit le vol, peut en mille occasions le recevoir innocemment : celui qui vole est toujours coupable. Le receleur empêche à la vérité la conviction d’un crime déja commis, mais l’autre commet le crime ; tout est passif dans le receleur, il y a une action dans le voleur. Il faut que le voleur surmonte plus d’obstacles, & que son ame se roidisse plus long-tems contre les lois.

Comme elles ne peuvent prévoir ni marquer tous les cas, c’est à la raison de comparer les faits obmis avec les faits indiqués. Le bien public doit décider quand la loi se trouve muette ; la coûtume ne peut rien alors, parce qu’il est dangereux qu’on ne l’applique mal, & qu’on ne veuille la diriger, au lieu de la suivre.

Mais la coutume affermie par une chaîne & une succession d’exemples, supplée au défaut de la loi, tient sa place, a la même autorité, & devient une loi tacite ou de prescription.

Les cas qui dérogent au droit commun, doivent être exprimés par la loi ; cette exception est un hommage qui confirme son autorité ; mais rien ne lui porte atteinte, comme l’extension arbitraire & indéterminée d’un cas à l’autre. Il vaut mieux attendre une nouvelle loi pour un cas nouveau, que de franchir les bornes de l’exception déja faite.

C’est sur-tout dans les cas de rigueur qu’il faut être sobre à multiplier les cas cités par la loi. Cette subtilité d’esprit qui va tirer des conséquences, est contraire aux sentimens de l’humanité & aux vûes du législateur.

Les lois occasionnées par l’altération des choses & des tems, doivent cesser avec les raisons qui les ont fait naître, loin de revivre dans les conjectures ressemblantes, parce qu’elles ne sont presque jamais les mêmes, & que toute comparaison est suspecte, dangereuse, capable d’égarer.

On établit des lois nouvelles, ou pour confirmer les anciennes, ou pour les réformer, ou pour les abolir. Toutes les additions ne font que charger & embrouiller le corps des lois. Il vaudroit mieux, à l’exemple des Athéniens, recueillir de tems en tems les lois surannées, contradictoires, inutiles & abusives, pour épurer & diminuer le code de la nation.

Quand donc on dit que personne ne doit s’estimer plus prudent que la loi, c’est des lois vivantes qu’il s’agit, & non pas des lois endormies.

Il faut se hâter d’abroger les lois usées par le tems, de peur que le mépris des lois mortes en retombe sur les lois vivantes, & que cette gangrene ne gagne tout le corps de droit.

Mais s’il est nécessaire de changer les lois, apportez-y tant de solemnités & de précautions, que le peuple en conclue naturellement que les lois sont bien saintes, puisqu’il faut tant de formalités pour les abroger.

Ne changez pas les usages & les manieres par les lois, ce seroit une tyrannie. Les choses indifférentes ne sont pas de leur ressort : il faut changer les usages & les manieres par d’autres usages & d’autres manieres. Si les lois gênoient en France les manieres, elles gêneroient peut-être les vertus. Laissez faire à ce peuple léger les choses frivoles sérieusement, & gaiement les choses sérieuses. Cependant les lois peuvent contribuer à former les mœurs, les manieres & le caractere d’une nation ; l’Angleterre en est un exemple.

Tout ce qui regarde les regles de la modestie, de la pudeur, de la décence, ne peut guere être compris sous un code de lois. Il est aisé de régler par les lois ce qu’on doit aux autres ; il est difficile d’y comprendre tout ce qu’on se doit à soi-même.

La multiplicité des lois prouve, toutes choses égales, la mauvaise constitution d’un gouvernement ; car, comme on ne les fait que pour réprimer les injustices & les desordres, il faut de nécessité que, dans l’état où il y a le plus de lois, il y ait aussi le plus de déréglement.

L’incertitude & l’inefficacité des lois procede de leur multiplicité, de leurs vices dans la composition, dans le style & dans la sanction, du partage des interpretes, de la contradiction des jugemens, &c.

Les lois sont, comme au pillage, entre les mains de ce cortege nombreux de jurisconsultes qui les commentent. La seule vûe de leurs compilations a de quoi terrasser l’esprit le plus infatigable. Leurs gloses & leurs subtilités sont les lacets de la chicane. Toutes les citations, si ce n’est celles de la loi, devroient être interdites au barreau. Ce ne sont que des hommes que l’on montre à d’autres hommes, & c’est par des raisons, & non par des autorités qu’il faut décider les cas douteux.

Il y a des lois rétroactives qui viennent au secours des lois antérieures, & qui en étendent l’effet sur les cas qu’elles n’avoient pas prévus. Il faut très rarement de ces lois à deux fins, qui portent sur le passé & sur l’avenir.

Une loi rétroactive doit confirmer, & non pas réformer celle qui la précede ; la réforme cause toujours des mouvemens de trouble, au lieu que les lois en confirmation affermissent l’ordre & la tranquillité.

Dans un état où il n’y a point de lois fondamentales, la succession à l’empire ne sauroit être fixe, puisque le successeur est déclaré par le prince, par ses ministres, ou par une guerre civile ; que de desordres & de maux en résultent !

Les lois ont sagement établi des formalités dans l’administration de la justice, parce que ces formalités sont le palladium de la liberté. Mais le nombre des formalités pourroit être si grand, qu’il choqueroit le but des lois mêmes qui les auroient établies : alors les affaires n’auroient point de fin, la propriété des biens resteroit incertaine, on ruineroit les parties à force de les examiner. Il y a des pays en Europe, où les sujets sont dans ce cas-là.

Les princes ont donné de bonnes lois, mais quelquefois si mal-à propos qu’elles n’ont produit que de fâcheux effets. Louis le Débonnaire révolta contre lui les évêques par des lois rigides qu’il leur prescrivit, & qui alloient au-delà du but qu’il devoit se proposer dans la conjoncture des tems.

Pour connoître, pour peindre le génie des nations & des rois, il faut éclairer leur histoire par leurs lois, & leurs lois par leur histoire. Les lois de Charlemagne montrent un prince qui comprend tout par son esprit de prévoyance, unit tout par la force de son génie. Par ses lois, les prétextes pour éluder les devoirs sont ôtés, les négligences corrigées, les abus réformés ou prévenus. Un pere de famille pourroit y apprendre à gouverner sa maison : il ordonnoit qu’on vendît les œufs des basse-cours de son domaine, & les herbes inutiles de son jardin ; & l’on sait par l’histoire qu’il avoit distribué à ses peuples toutes les richesses des Lombards, & les immenses trésors de ces Huns qui avoient ravagé l’univers.

Dans toute société, c’est la force ou la loi qui domine. Tantôt la force se couvre de la loi, tantôt la loi s’appuie de la force. De là trois sortes d’injustices, la violence ouverte, celle qui marche à l’ombre de la loi, & celle qui naît de la rigueur de la loi.

Les passions & les préjugés des législateurs passent quelquefois au-travers de leurs lois, & s’y teignent ; quelquefois elles y restent & s’y incorporent.

Justinien s’avisa dans un tems de décadence de réformer la jurisprudence des siecles éclairés. Mais c’est des jours de lumieres qu’il convient de corriger les jours de ténebres.

Je finis malgré moi toutes ces réflexions qui portent sur les lois en général, mais je parlerai séparément des lois fondamentales, civiles, criminelles, divines, humaines, morales, naturelles, pénales, politiques, somptuaires, &c. & je tâcherai d’en développer en peu de mots la nature, le caractere, l’esprit & les principes. (D. J.)

Loi, proposition & sanction d’une, (Hist. rom.) c’est un point fort curieux dans l’histoire romaine que l’objet de l’établissement d’une loi. Nous avons donc lieu de penser que le lecteur sera bien-aise d’être instruit des formalités qui se pratiquoient dans cette occasion.

Celui qui avoit dessein, dans Rome, d’établir quelque loi, qu’il savoit être du goût des principaux de la république, la communiquoit au sénat, afin qu’elle acquît un nouveau poids par l’approbation de cet illustre corps. Si au contraire le porteur de la loi étoit attaché aux intérêts du peuple, il tâchoit de lui faire approuver la loi qu’il vouloit établir, sans en parler au sénat. Il étoit cependant obligé d’en faire publiquement la lecture, avant que d’en demander la ratification, afin que chacun en eût connoissance. Après cela, si la loi regardoit les tribus, le tribun faisoit assembler le peuple dans la place ; & si elle regardoit les centuries, ce premier magistrat convoquoit l’assemblée des citoyens dans le champ de Mars. Là un crieur public répétoit mot-à-mot la loi qu’un scribe lui lisoit ; ensuite, si le tribun le permettoit, le porteur de la loi, un magistrat, & quelquefois même un simple particulier, autorisé par le magistrat, pouvoit haranguer le peuple pour l’engager à recevoir ou à rejetter la loi. Celui qui réussissoit à faire accepter la loi, en étoit appellé l’auteur.

Quand il s’agissoit d’une affaire de conséquence, on portoit une urne ou cassette, dans laquelle on renfermoit les noms des tribus ou des centuries, selon que les unes ou les autres étoient assemblées. On remuoit ensuite doucement la cassette, de peur qu’il n’en tombât quelque nom ; & quand ils étoient mêlés, on les tiroit au hazard ; pour lors, chaque tribu & chaque centurie prenoit le rang de son billet pour donner son suffrage. On le donna d’abord de vive voix ; mais ensuite il fut établi qu’on remettroit à chaque citoyen deux tablettes, dont l’une rejettoit la nouvelle loi en approuvant l’ancienne, & pour cela cette tablette étoit marquée de la lettre A, qui signifioit ancienne ; l’autre tablette portoit les deux lettres U. R. c’est-à-dire, soit fait comme vous le demandez, uti rogas.

Pour éloigner toute fraude, on distribuoit ces tablettes avec beaucoup d’attention. On élevoit alors dans la place où se tenoient les assemblées plusieurs petits théâtres ; sur les premiers qui étoient les plus élevés, on posoit les cassettes où étoient renfermées les tablettes qu’on délivroit à ceux qui devoient donner leurs suffrages ; & sur les derniers étoient d’autres cassettes où l’on remettoit lesdites tablettes qui portoient le suffrage. De-là vint le proverbe, les jeunes gens chassent du théâtre les sexagénaires, parce qu’après cet âge, on n’avoit plus de droit aux charges publiques.

On élevoit autant de théâtres qu’il y avoit de tribus dans les assemblées des tribus ; savoir 35, & dans les assemblées de centuries, autant qu’il y avoit de centuries, savoir 193.

Il faut maintenant indiquer la maniere de donner les suffrages. On prenoit les tablettes qui étoient à l’entrée du théâtre, & après l’avoir traversé, on les remettoit dans la cassette qui étoit au bout. D’abord après que chaque centurie avoit remis ses tablettes, les gardes qui avoit marqué les suffrages par des points, les comptoient, afin d’annoncer finalement la pluralité des suffrages de la tribu ou de la centurie pour ou contre la loi proposée. Cette action de compter les tablettes en les marquant avec des points, a fait dire à Cicéron, comptez les points, & à Horace, celui-là a tous les points, c’est-à-dire, réussit, qui sait joindre l’utile à l’agréable : Omne tulit punctum, qui miscuit utile dulci.

La loi qui étoit reçue par le plus grand nombre de suffrages, étoit gravée sur des tables de cuivre ; ensuite on la laissoit quelque tems exposée publiquement à la vue du peuple, ou bien on la portoit dans une des chambres du trésor public pour la conserver précieusement (D. J.)

Lois des Barbares, (Code des Barbares) on appelle lois des Barbares, les usages des Francs Saliens, Francs Ripuaires, Bavarois, Allemands, Thuringiens, Frisons, Saxons, Wisigoths, Bourguignons & Lombards.

Tout le monde sait avec quelle sagacité M. de Montesquieu a développé l’esprit, le caractere & les principes de toutes ces lois, je n’en tirerai que quelque généralités.

Les Francs sortis de leur pays, firent rédiger par les sages de leur nation les lois saliques. La tribu des Ripuaires s’étant jointe aux Saliens, conserva ses usages, & Théodoric, roi d’Austrasie, les fit mettre par écrit. Il recueillit de même les usages des Bavarois & des Allemands qui dépendoient de son royaume. Il est vraissemblable que le code des Thuringiens fut donné par le même Théodoric, puisque les Thuringiens étoient aussi ses sujets. La loi des Frisons n’est pas antérieure à Charles Martel & à Pepin qui les soumirent. Charlemagne, qui le premier domina les Saxons, leur donna la loi que nous avons. Les Wisigoths, les Bourguignons & les Lombards ayant fondé des royaumes, firent écrire leurs lois, non pas pour faire suivre leurs usages aux peuples vaincus, mais pour les suivre eux-mêmes.

Il y a dans les lois Saliques & Ripuaires, dans celles des Allemands, des Bavarois, des Thuringiens & des Frisons, une simplicité admirable, une rudesse originale, & un esprit qui n’avoit point été affoibli par un autre esprit. Elles changerent peu, parce que ces peuples, si on en excepte les Francs, resterent dans la Germanie ; mais les lois des Bourguignons, des Lombards & des Wisigoths, perdirent beaucoup de leur caractere, parce que ces peuples qui se fixerent dans de nouvelles demeures, perdirent beaucoup du leur.

Les Saxons qui vivoient sous l’empire des Francs, eurent une ame indomptable. On trouve dans leurs lois des duretés du vainqueur, qu’on ne voit point dans les autres codes de lois des Barbares.

Les lois des Wisigoths furent toutes refondues par leurs rois, ou plûtôt par le clergé, dont l’autorité étoit immense. Nous devons à ce code toutes les maximes, tous les principes & toutes les vues du tribunal de l’inquisition d’aujourd’hui ; & les moines n’ont fait que copier contre les juifs des lois faites autrefois par les évêques du pays.

Du reste, les lois des Wisigoths sont puériles, gauches, idiotes, pleines de rhétorique, vuides de sens, frivoles dans le fonds, & gigantesques dans le style. Celles de Gondebaud pour les Bourguignons, paroissent assez judicieuses ; celles de Rhotaris & des autres princes Lombards, le sont encore plus.

Le caractere particulier des lois des Barbares, est qu’elles furent toutes personnelles, & point attachées à un certain territoire : le Franc étoit jugé par la loi des Francs, l’Allemand par la loi des Allemands, le Bourguignon par la loi des Bourguignons, le Romain par la loi romaine ; & bien loin qu’on songeât, dans ces tems-là, à rendre uniforme les lois des peuples conquérans, on ne pensa pas même à se faire législateur du peuple vaincu.

Cependant toutes ces lois personnelles des Barbares, vinrent à disparoître chez les François par des causes générales qui les firent cesser peu-à-peu. Ces lois étoient déja négligées à la fin de la seconde race, & au commencement de la troisieme on n’en entendit presque plus parler. Les fiefs étant devenus héréditaires, & les arriere-fiefs s’étant étendus, il s’introduisit de nouveaux usages, auxquels les lois des Barbares n’étoient plus applicables ; on leur substitua des coutumes.

Comme dans l’établissement de la monarchie, on avoit passé des coutumes & des usages à des lois écrites ; on revint quelques siecles après des lois écrites, à des usages & des coutumes non écrites.

La compilation de Justinien ayant ensuite paru, elle fut reçue comme loi dans les parties de la France qui se gouvernoient par le droit romain, & seulement comme raison dans celles qui se gouvernoient par les coutumes ; c’est pourquoi l’on rassembla quelques-unes de ces coutumes sous le regne de S. Louis & les regnes suivans ; mais sous Charles VII. & ses successeurs, on les rédigea par tout le royaume ; alors elles furent écrites, elles devinrent plus connues & prirent le sceau de l’autorité royale. Enfin, on en a formé de nouvelles rédactions plus completes dans des tems qui ne sont pas fort éloignés des nôtres, & dans des tems où l’on ne faisoit pas gloire d’ignorer ce qu’on doit savoir, & de savoir ce qu’on doit ignorer. (D. J.)

Loi, (Jurisprud.) signifie en général un commandement émané d’une autorité supérieure, auquel un inférieur est obligé d’obéir.

Les lois sont de plusieurs sortes, savoir divines ou humaines ; on les distingue aussi, la loi naturelle de la loi civile, la loi ancienne de la loi nouvelle. Il y a encore bien d’autres divisions des lois.

La premiere de toutes les lois, est celle de nature, les premiers hommes vivoient selon cette loi naturelle, qui n’est autre chose qu’un rayon de lumiere & un principe de la droite raison que Dieu a donné aux hommes pour se conduire, & qui leur fait appercevoir les regles communes de la justice & de l’équité.

L’ancienne loi ou la loi de Moïse, apellée aussi la vieille loi ou la loi des Juifs, est celle que Dieu donna à son peuple par la bouche de son prophete.

A celle-ci a succédé la loi de grace ou la loi chrétienne, la loi de l’évangile qui nous a été apportée par Jesus-Christ, & qui est la plus parfaite de toutes.

Pour ce qui est des lois humaines, il est probable que les premieres furent les lois domestiques que chaque pere de famille fit pour établir l’ordre dans sa maison ; ces lois ne laissoient pas d’être importantes, vu que dans les premiers tems, les familles formoient comme autant de peuples particuliers.

Lorsque les hommes commencerent à se rassembler dans des villes, ces lois privées se trouverent insuffisantes pour contenir une société plus nombreuse, il fallut une autorité plus forte que la puissance paternelle. De l’union de plusieurs villes & pays, il se forma divers états que l’on soumit au gouvernement d’une puissance soit monarchique, ou aristocratique, ou démocratique ; dès-lors ceux qui furent revêtus de la puissance souveraine donnerent des lois aux peuples qui leur étoient soumis, & créerent des magistrats pour les faire observer.

Toute loi est censée émanée du souverain ou autres personnes qui sont revêtues de la puissance publique ; mais comme ceux qui gouvernent ne peuvent pas tout faire par eux-mêmes, ils chargent ordinairement de la rédaction des lois les plus habiles jurisconsultes, & lorsque ceux-ci en ont dressé le projet, la puissance publique y met le sceau de son autorité en les adoptant & les faisant publier en son nom.

Chez les anciens, les sages & les philosophes furent les premiers auteurs des lois.

Moïse, le plus anciens de tous législateurs, donna aux Juifs plusieurs sortes de lois ; outre celles qui lui furent dictées par la sagesse divine, & que l’on appelle les lois du Décalogue, parce qu’elles sont renfermées en dix commandemens ; il leur donna aussi des lois cérémonielles pour le culte divin, & des lois politiques pour le gouvernement civil.

Les premieres lois ne pourvurent qu’aux grands inconvéniens ; les lois civiles régloient le culte des dieux, le partage des terres, les mariages, les successions ; les lois criminelles n’étoient rigoureuses que pour les crimes que l’on redoutoit le plus ; & à mesure qu’il survint de nouveaux désordres, on tâcha d’y remédier par de nouvelles lois.

Ceux qui donnerent des lois aux nations voisines des juifs emprunterent beaucoup de choses dans les lois de Moïse.

En Egypte, les rois eux-mêmes s’étoient soumis à certaines lois ; leur nourriture, leurs occupations étoient réglées, & ils ne pouvoient s’écarter de ces regles sans être sujets aux peines qu’elles prononçoient.

Osiris, roi d’Egypte, regla le culte des dieux, le partage des terres, la distinction des conditions. Il défendit d’user de prise de corps contre le débiteur, la rhétorique fut bannie des plaidoyers pour prévenir la séduction : les Egyptiens engageoient les cadavres de leurs peres, ils les donnoient à leurs créanciers en nantissement, & c’étoit une infamie à eux que de ne les pas dégager avant leur mort ; il y avoit même un tribunal où l’on jugeoit les hommes après leur mort, afin que la crainte d’une telle flétrissure portât les hommes à la vertu.

Amasis prononça la peine de mort contre le meurtrier volontaire, le parjure, le calomniateur, & contre ceux qui pouvant secourir un homme le laissoient assassiner.

En Crete, Minos établit la communauté des tables & des repas. Il voulut que les enfans fussent élevés ensemble, écarta l’oisiveté & le luxe, fit observer un grand respect pour la divinité & pour les maximes fondamentales de l’état.

Lycurgue qui donna des lois à Lacédémone, institua aussi à l’imitation de Minos, les tables communes & l’éducation publique de la jeunesse ; il consentit à l’établissement d’un sénat qui tempérât la puissance trop absolue des rois par une autorité au moins égale à la leur ; il bannit l’or & l’argent, & les arts superflus, & ordonna que les terres fussent partagées également entre tous les citoyens ; que les ilotes, espece d’esclaves, cultiveroient les terres, & que les Spartiates ne s’occuperoient qu’aux exercices qui les rendroient propres à la guerre.

Il permit la communauté des femmes, voulant par ce moyen peupler l’état, sans que le courage des hommes fût amolli par des engagemens trop tendres.

Lorsque les parens pouvoient prouver que leurs enfans étoient mal sains, il leur étoit permis de les tuer. Lycurgue pensoit qu’un homme incapable de porter les armes ne méritoit pas de vivre.

La jeunesse des deux sexes luttoit ensemble ; ils faisoient leurs exercices tous nuds en place publique.

On ne punissoit que les voleurs mal-adroits, afin de rendre les Spartiates vifs, subtils & défians.

Il étoit défendu aux étrangers de s’arrêter à Sparte, de crainte que leurs mœurs ne corrompissent celles que Lycurgue avoit introduites.

Dracon, premier législateur d’Athènes, fit des lois si rigoureuses, qu’on disoit qu’elles étoient écrites plutôt avec du sang, qu’avec de l’encre. Il punissoit de mort les plus petites fautes, & alla jusqu’à faire le procès aux choses inanimées ; une statue, par exemple, qui en tombant avoit écrasé quelqu’un, étoit bannie de la ville.

Mais, comme les pauvres souffroient beaucoup des véxations de leurs créanciers ; Solon fut choisi pour reformer les abus & déchargea les débiteurs.

Il accorda aux citoyens la liberté de tester, permit aux femmes qui avoient des maris impuissans, d’en choisir d’autres parmi leurs parens.

Ses lois prononçoient des peines contre l’oisiveté, & déchargeoient ceux qui tuoient un adultere. Elles défendoient de confier la tutelle d’un enfant à son plus proche héritier.

Celui qui avoit crevé l’œil à un borgne étoit condamné à perdre les deux yeux.

Il étoit interdit aux débauchés de parler dans les assemblées publiques.

Solon ne fit point de loi contre le parricide, ce crime lui paroissoit inoui ; il craignit même en le défendant d’en donner l’idée.

Il voulut que ses lois fussent déposées dans l’aréopage.

Les lois d’Athènes passerent dans la suite à Rome : mais avant d’y avoir recours, Romulus, fondateur de l’empire romain, donna des lois à ses sujets ; il permit aussi au peuple assemblé de faire des lois qu’on appella plébiscites.

Toutes les lois faites par Romulus & par ses successeurs rois furent appellées lois royales, & renfermées dans un code appellé papyrien.

Les sénatus consultes ou arrêts du sénat avoient aussi force de lois.

Vers la fin de l’an 300 de Rome, on envoya en Grece des députés pour choisir ce qu’il y auroit de meilleur dans les lois des différentes villes de ce pays, & en composer un corps de lois ; les décemvirs substitués aux consuls, rédigerent ces lois sur dix tables d’airain, auxquelles peu après ils en ajouterent deux autres ; c’est pourquoi ce corps de lois fut nommé la loi des douze tables, dont il ne nous reste plus que des fragmens.

Les préteurs & les édiles faisoient des édits qui avoient aussi force de lois.

Outre les droits de souveraineté dont Auguste fut gratifié par le peuple ; on lui donna le pouvoir de faire des lois, cette prérogative lui fut accordée par une loi nommée regia.

Auguste donna lui même à un certain nombre de jurisconsultes distingués le droit d’interpréter les lois & de donner des décisions, auxquelles les juges seroient obligés de conformer leurs jugemens.

Théodose donna pareillement force de loi aux écrits de plusieurs anciens jurisconsultes.

Les lois romaines ont été toutes renfermées dans les livres de Justinien, qui sont le digeste & le code, les institutes, les novelles.

Les successeurs de Justinien ont aussi fait quelques lois, mais il y en a peu qui se soient conservées jusqu’à nous.

Les romains porterent leurs lois dans tous les pays dont ils avoient fait la conquête ; ce fut ainsi que les Gaules les reçurent.

Dans le cinquieme siecle, les peuples du nord inonderent une partie de l’Europe, & introduisirent leurs lois chez les vaincus.

Les Gaules furent envahies par les Visigoths, les Bourguignons & les Francs.

Clovis, fondateur de la monarchie françoise, laissa à ses sujets le choix des lois du vainqueur ou de celles du vaincu ; il publia la loi salique.

Gondebaud, roi de Bourgogne, fit une ordonnance appellée de son nom loi Gombette.

Théodoric fit rédiger la loi des Ripuariens, & celles des Allemands & des Bavarois.

Ces différentes lois ont été recueillies en un même volume appellé code des lois antiques.

Sous la seconde race de nos rois, les lois furent appellées capitulaires.

Sous la troisiéme race, on leur a donné le nom d’ordonnances, édits & déclarations.

Le pouvoir législatif n’appartient en France, qu’au roi seul. Ainsi, quand les cours déliberent sur l’enregistrement de quelque nouvelle loi, ce n’est pas par une autorité qui leur soit propre ; mais seulement en vertu d’un pouvoir émané du roi même, & des ordonnances qui leur permettent de vérifier s’il n’y a point d’inconvénient dans la nouvelle loi qui est présentée. Les cours ont la liberté de faire des remontrances, & quand le roi ne juge pas à propos d’y avoir égard, les cours procedent à l’enregistrement.

Les magistrats sont établis pour faire observer les lois, ils peuvent sous le bon plaisir du roi, les interpréter, lorsqu’il s’agit de quelque cas qu’elles n’ont pas prévû ; mais il ne leur est pas permis de s’en écarter.

Les réglemens que les cours & autres tribunaux font sur les matieres de leur compétence ne sont point des lois proprement dites, ce ne sont que des explications qu’ils donnent pour l’exécution des lois ; & ces réglemens sont toujours censés faits sous le bon plaisir du roi, & en attendant qu’il lui plaise manifester sa volonté.

Les autres nations ont pareillement leurs lois particulieres. Voyez au mot Code & au mot Droit, &c.

Toutes les lois sont fondées sur deux principes, la raison & la religion : ces principes étoient inconnus aux payens tellement, que leurs plus grands législateurs s’en sont écartés en plusieurs points ; ainsi les Romains qui ont fait beaucoup de bonnes lois s’étoient donné comme les autres peuples, la licence d’ôter la vie à leurs propres enfans & à leurs esclaves.

La religion peut être regardée comme l’assemblage de toutes les lois ; car outre qu’elle commande à l’homme la recherche du souverain bien, elle oblige les hommes à s’unir & à s’aimer, elle défend de faire aucun tort à autrui.

Les engagemens de la société sont de trois especes, les uns qui ont rapport au mariage, à la naissance des enfans & aux successions ; les autres qui regardent les conventions, d’autres enfin qui sont involontaires, tels que l’obligation de remplir les charges publiques. De là les différentes lois qui concernent chacun de ces objets.

On trouve communément dans tous les pays trois sortes de lois ; savoir, celles qui tiennent à la politique & qui reglent le gouvernement, celles qui tiennent aux mœurs & qui punissent les criminels ; enfin les lois civiles, qui reglent les mariages, les successions, les tutelles, les contrats.

Toutes les lois divines & humaines, naturelles & positives de la religion & de la police, du droit des gens ou du droit civil, sont immuables ou arbitraires.

Les lois immuables ou naturelles, sont celles qui sont tellement essentielles pour l’ordre de la société, qu’on ne pourroit y rien changer sans blesser cet ordre si nécessaire ; telles sont les lois qui veulent que chacun soit soumis aux puissances, & qui défendent de faire tort à autrui.

Les lois arbitraires sont celles qui ont été faites, selon les tems & les circonstances, sur des matieres qui ne sont pas essentielles pour l’ordre de la société, celles-ci n’ont d’effet que pour l’avenir.

Un long usage acquiert force de loi, le non usage abolit aussi les lois ; les magistrats sont les interprétes des lois : pour en pénétrer le sens, il faut comparer les nouvelles aux anciennes, recourir aux lois des lieux voisins, juger du sens & de l’esprit d’une loi par toute sa teneur, s’attacher plutôt à l’esprit de la loi qu’aux termes, suppléer au défaut d’expression par l’esprit de la loi.

Lorsque la loi ne distingue point, on ne doit pas non plus distinguer : néanmoins dans les matieres favorables, la loi peut être étendue d’un cas à un autre ; au lieu que dans les matieres de rigueur, on doit la renfermer dans son cas précis.

Voyez le titre du Digeste de legibus, le Traité des lois de Domat, la Jurisprudence romaine de Terrasson, l’Esprit des lois de M. de Montesquieu.

On va expliquer dans les divisions suivantes les différentes sortes de lois qui sont distinguées par un nom particulier. (A)

Loi Acilia est une de celles qui furent faites contre le crime de concussion. Pedianus Acilius en fut l’auteur, elle étoit très-sévere ; il en est parlé dans la seconde Verrine. Il y avoit déjà eu d’autres lois de pecuniis repetundis, ou repetundarum, c’est-à-dire contre le crime de concussion. Voyez Loi Calpurnia. (A)

Loi Aebutia eut pour auteur un certain tribun nommé L. Aebutius, lequel présenta au peuple cette loi, dont l’objet étoit d’abroger plusieurs formules inutiles qu’avoit établies la loi des douze tables, pour la recherche des choses volées. Elle essuya beaucoup de contradiction, & néanmoins fut adoptée ; il en est parlé dans Aulu-Gelle. Voyez aussi Zazius. (A)

Loi Ælia Fusia fut faite par Ælius & Fusius, tribuns du peuple, à l’occasion de ce qu’anciennement les tribuns du peuple, qui faisoient des lois dans les comices, n’étoient point astreints aux égards que la religion obligeoit d’avoir pour les auspices. Il fut donc ordonné par cette loi que tout magistrat qui porteroit une loi, seroit obligé de garder le droit des prieres & des auspices, & que chacun auroit la liberté de venir donner avis des présages sinistres qui se présenteroient, par exemple, si l’on entendoit le tonnerre ; de sorte que quand le college des augures, un consul ou le préteur annonçoit quelque chose de semblable, l’assemblée du peuple devoit se séparer, & il ne lui étoit pas permis de rien entreprendre ce jour là. On croit que cette loi fut faite sous le consulat de Gabinius & de Pison, quelque tems avant la troisieme guerre punique, & qu’elle fut en vigueur pendant cent ans, ayant été abrogée par P. Clodius. Cicéron en fait mention dans plusieurs de ses ouvrages. Voyez le Catalogue de Zazius. (A)

Loi Aelia sanctia. Voyez ci-après Loi Aelia sentia.

Loi Aelia sentia ou Sextia fut faite du tems d’Auguste par les consuls Ælius Sextius Catulus & C. Sentius Saturninus. Elle régloit plusieurs choses concernant les successions, & entr’autres, que chacun ne pouvoit avoir qu’un héritier nécessaire. Elle défendoit d’affranchir les esclaves par testament, ou de les instituer héritiers en fraude des créanciers ; mais que pour que l’on pût accuser le testament de fraude ; il falloit qu’il y eût consilium & eventus. Elle avoit aussi réglé que les mineurs de 25 ans ne pourroient affranchir leurs esclaves qu’en présence du magistrat, en la forme appellée vindicta, c’est-à-dire celle qui se faisoit en donnant deux ou trois coups de baguette sur la tête de l’esclave, & que ces manumissions ne seroient autorisées qu’en connoissance de cause ; ce qui fut ainsi ordonné dans la crainte que les mineurs ne fussent séduits par les caresses de leurs esclaves. Mais Justinien corrigea ce dernier chapitre de la loi Ælia Sentia, du-moins quant aux dernieres volontés, ayant ordonné par ses institutes que le maître âgé de 17 ans, pourroit affranchir ses esclaves par testament ; ce qu’il fixa depuis par sa novelle 119 au même âge auquel il est permis de tester. Il étoit encore ordonné par cette loi, par rapport aux donations entre mari & femme, que si la chose n’avoit pas été livrée, & que le mari eût gardé le silence jusqu’à sa mort, la femme n’auroit pas la vendication de la chose après la mort de son mari, mais seulement une exception, si elle ne possédoit pas. Cicéron dans ses Topiques nomme cette loi Ælia Sanctia ; mais Charondas en ses notes sur Zazius, fait voir que ces deux lois étoient différentes. (A)

Loi Aemilia étoit une loi somptuaire qui fut faite par M. Aemilius Scaurus, consul. Il en est parlé dans Pline, lib. VIII. const. 57. Son objet fut de réprimer le luxe de ceux qui faisoient venir à grands frais des coquillages & des oiseaux étrangers pour servir sur leur table. Voyez Zazius.

Il ne faut pas confondre cette loi avec le senatusconsulte Aemilien, qui déclaroit valables les donations faites entre mari & femme, lorsque le donateur avoit persévéré jusqu’à la mort. (A)

Lois agraires, leges agrariæ. On a donné ce nom à plusieurs lois différentes qui ont eu pour objet de régler ce qui concerne les champs ou terres appellées en latin agri.

On pourroit mettre au nombre des lois agraires les lois des Juifs & des Egyptiens, qui regardoient la police des champs, & celle que Lycurgue fit pour le partage égal des terres entre tous les citoyens, afin de maintenir entr’eux une égalité qui fût la source de l’union. Mais nous nous bornerons à parler ici des lois qui furent nommées agraires.

La premiere loi appellée agraire fut proposée par Spurius Cassius Viscellinus, lors de son troisieme consulat. Cet homme, qui étoit d’une humeur remuante, voulant plaire aux plébéïens, demanda que les terres conquises fussent partagées entr’eux & les alliés de Rome. Le sénat eut la foiblesse d’accorder cette division aux plébéïens par la célebre loi ou decret agraire ; mais elle attira tant d’ennemis à celui qui en étoit l’auteur, que l’année suivante les questeurs Fabius Coeso & L. Valerius se porterent parties contre Cassius, qu’ils accuserent d’avoir aspiré à la royauté ; il fut cité, comme perturbateur du repos public, & précipité du mont Tarpéïen, l’an de Rome 270, ses biens vendus, sa maison détruite.

Cependant la loi agraire subsistoit toujours, mais le sénat en éludoit l’exécution : les grands possédoient la majeure partie du domaine public & aussi des biens particuliers : le peuple réclamoit l’exécution de la loi agraria, ce qui donna enfin lieu à la loi licinia, qui fut surnommée agraria. Elle fut faite par un riche plébéïen nommé C. Licinius Stolon, lequel ayant été créé tribun du peuple l’an de Rome 377, voulant favoriser le peuple contre les patriciens, proposa une loi tendante à obliger ces derniers de céder au peuple toutes les terres qu’ils auroient au-delà de 500 arpens chacun. Les guerres contre les Gaulois & la création de plusieurs nouveaux magistrats, furent cause que cette affaire traîna pendant neuf années, mais la loi licinia fut enfin reçue malgré les patriciens.

Le premier article de cette loi portoit que l’une des deux places de consuls ne pourroit être remplie que par un plébéïen, & qu’on n’éliroit plus de tribuns militaires.

Les autres articles de cette loi, qui la firent surnommer agraria, parce qu’ils concernoient le partage des terres, ordonnoient qu’aucun citoyen ne pourroit posséder dorénavant plus de 500 arpens de terre, & qu’on distribueroit gratuitement ou qu’on affermeroit à un très-bas prix l’excédent de cette quantité à ceux d’entre les citoyens qui n’auroient pas de quoi vivre, & qu’on leur donneroit au-moins à chacun sept arpens.

Cette loi regloit aussi le nombre des bestiaux & des esclaves que chacun pourroit avoir, pour faire valoir les terres qu’il auroit eu en partage, & l’on nomma trois commissaires pour tenir la main à l’exécution de cette loi.

Mais comme les auteurs des lois ne sont pas toujours ceux qui les observent le mieux, Licinius fut convaincu d’être possesseur de 1000 arpens de terre ; pour éluder la loi, il avoit donné la moitié de ces terres à son fils, qu’il fit pour cet effet émanciper ; mais cette émancipation fut réputée frauduleuse, & Licinius obligé de restituer à la république 500 arpens qui furent distribués à de pauvres citoyens. On le condamna même à payer l’amende de 10 mille sols d’or, qu’il avoit ordonnée : de sorte qu’il porta le premier la peine qu’il avoit établie, & eut encore le chagrin de voir dès la même année abolir cette loi par la cabale des patriciens.

Le mauvais succès de la loi licinia agraria fut cause que pendant long-tems on ne parla plus du partage des terres, jusqu’à ce que C. Quintius Flaminius, tribun du peuple, quelques années avant la seconde guerre punique, proposa au peuple, en dépit du sénat, un projet de loi pour faire partager au peuple les terres des Gaules & du Picentin ; mais la loi ne fut pas faite, Flaminius ayant été détourné de son dessein par son pere.

La loi sempronia agraria mit enfin à exécution l’ancien decret agraire de Cassius, & ordonna que les provinces conquises se tireroient au sort entre le sénat & le peuple ; & en conséquence le sénat envoyoit des proconsuls dans ces provinces pour les gouverner. Le peuple envoyoit dans les siennes des préteurs provinciaux, jusqu’à ce que Tibere ôta aux tribuns le droit de décerner des provinces, & nomma à celles du peuple des recteurs & des préfets.

Le peuple desiroit toujours de voir rétablir la loi licinia, mais il s’écoula plus de 130 années sans aucune occasion favorable. Ce fut Tibérius Gracchus, lequel ayant été élu tribun du peuple vers l’an de Rome 527, entreprit de faire revivre la loi licinia. Pour cet effet il fit déposer Octavius son collegue, lequel s’étoit rangé du parti des grands, au moyen de quoi la loi fut reçue d’une voix unanime, mais les patriciens en conçurent tant de ressentiment, qu’ils le firent périr dans une émotion populaire.

Caïus Gracchus, frere de Tibérius, ne laissa pas de solliciter la charge de tribun, à laquelle il parvint enfin ; il signala son avénement en proposant de recevoir une troisieme fois la loi licinia, & fit si bien qu’elle fut encore reçue, malgré les oppositions des patriciens ; mais il en coûta aussi la vie à Caïus Gracchus, par la faction des grands, qui ne pouvoient souffrir le rétablissement des lois agraires, Pour ôter jusqu’au souvenir des lois des Gracques, on fit périr tous ceux qui avoient été attachés à leur famille.

Après la mort des Gracques on fit une loi agraire, portant que chacun auroit la liberté de vendre les terres qu’il avoit eu en partage, ce qui avoit été défendu par Tibérius Gracchus.

Peu de tems après on en fit encore une autre qui défendit de partager à l’avenir les terres du domaine public, mais que ceux qui les possédoient les conserveroient en payant une redevance annuelle ; & que l’argent qui en proviendroit seroit distribué au peuple. Cette loi fut reçue favorablement, parce que chacun espéroit d’avoir sa part de ces revenus ; mais comme ils ne suffisoient pas pour une si grande multitude, l’attente du peuple fut vaine ; & environ dix ans après que Tibérius Gracchus avoit fait sa loi, Sp. Thorius revêtu de la même dignité, en fit une autre par laquelle il déchargea les terres publiques de toute imposition, au moyen de quoi le peuple fut privé de la jouissance des terres & de la redevance.

Ciceron, lib. II. de ses offices, fait mention d’une autre loi agraire faite par Philippe, tribun du peuple ; & Valere Maxime parle aussi d’une loi agraire faite par Sex. Titius, mais on ne sait point ce que portoient ces lois.

Cornelius Sylla fit pendant sa dictature une loi agraire, appellée de son nom cornelia : il fit distribuer beaucoup de terres aux soldats, lesquels augmentoient encore leurs possessions par les voies les plus iniques.

Le tribun Servilius fit ensuite une autre loi agraire qui tendoit à boulverser tout l’état : il vouloit que l’on créât des décemvirs pour vendre toutes les terres d’Italie, de Syrie, d’Asie, de Lybie, & des provinces que Pompée venoit de subjuguer, pour, de l’argent qui en proviendroit, acheter des terres pour le peuple, & lui assurer ainsi sa subsistance ; mais Cicéron par son éloquence fit si bien que cette loi fut rejettée.

Quelques années après le tribun Curion fit une autre loi agraire ou viaire, presque semblable à celle de Servilius.

Environ dans le même tems le tribun Flavius Canuleius en fit une autre, dont Cicéron fait mention lib I. ad Atticum. Voyez Loi flavia.

Enfin Jules-César fit aussi, par le conseil de Pompée, une loi agraire, appellée de son nom julia, & que Cicéron appelle aussi campana, par laquelle il partagea les terres publiques de l’Italie à ceux qui étoient peres de trois enfans ; & afin que chacun pût conserver son héritage, il établit une amende contre ceux qui dérangeroient les bornes.

La loi troisieme au digeste de termino moto, fait mention d’une loi agraire faite par l’empereur Nerva.

On trouve quelques fragmens des dernieres lois agraires dans les recueils d’inscriptions, & dans les anciennes lois que Flavius Ursinus a fait imprimer à la fin de ses notes sur le livre d’Antoine Augustin, de legibus senatus consultis. Voyez aussi le catalogue de Zazius.

Nous avons aussi en France plusieurs lois que l’on peut appeller lois agraires, parce qu’elles reglent la police des champs : telles sont celles qui concernent les paturages, le nombre des bestiaux, le tems de la récolte des foins & grains, & des vendanges, &c. Voyez le code rural. (A)

Loi des Allemands étoit la loi des peuples d’Alsace & du haut Palatinat. Elle fut formée des usages non écrits du pays, & rédigée par écrit par ordre de Théodoric ou Thierry, roi de France, fils de Clovis. Il fit en même tems rédiger la loi des Ripuariens & celle des Bavarois, tous peuples qui étoient soumis à son obéissance. Ce prince étoit alors à Chalons-sur Marne ; il fit plusieurs corrections à ces lois, principalement pour ce qui n’étoit pas conforme au Christianisme. Elle fut encore réformée par Childebert, & ensuite par Clotaire, lequel y procéda avec ses princes ; savoir 33 évêques, 34 ducs, 72 comtes, & avec tout le peuple, ainsi que l’annonce le titre de cette loi. Agathias dit que sous l’empire de Justinien les Allemands, pour leur gouvernement politique, suivoient les lois faites par les rois de France.

Dagobert renouvella cette loi des Allemands & autres lois antiques, & les mit en leur perfection par le travail de quatre personnages illustres, Claude, Chaude, Indomagne & Agilulfe.

Voyez le code des lois antiques, le glossaire de Ducange, au mot lex ; l’histoire du Droit françois de M. de Fleury. (A)

Loi d’Amiens, dans les anciens auteurs, signifie les coutumes d’Amiens. On appelle de même celles des autres villes, comme loi de Tournay, loi de Vervins, loi de la Bastie, &c. (A)

Loi ancienne, ou plûtôt Ancienne loi, qu’on appelle aussi la vieille loi, est la loi de Moïse Voyez ci-après Loi de Moïse. (A)

Loi des Angles, Angliens ou Thuringiens, lex Angliorum, étoit la loi des anciens Angles, peuples de la Germanie qui habitoient le long de l’Albe. Elle fut confirmée par Charlemagne. Voy. le glossaire de Ducange, au mot lex. (A)

Loi des Anglois, lex Anglorum, peuples de la Grande-Bretagne, fut originairement établie par les anciens Angles, ou Anglo-Germains, ou Anglo-Saxons & Danois qui occuperent cette île. Il y eut trois sortes de lois des Anglois ; savoir celle des Saxons occidentaux, celle des Merciens, & celle des Danois.

Le premier prince que l’on connoisse pour avoir fait rédiger des lois par écrit chez les Anglois, fut Ethelred, roi de Kent, qui commença à regner en 567, & établit la religion chrétienne ; mais ces lois furent très-concises & très-grossieres. Inas, roi des Saxons occidentaux, qui commença à regner en 712, publia aussi ces lois ; & Offa, roi des Merciens, qui régnoit en 758, publia ensuite les siennes. Enfin Aured, roi de la West Saxe ou des Saxons occidentaux, auquel tous les Angles ou Saxons se soumirent, ayant fait examiner les lois d’Ethelred, d’Inas & d’Offa, en forma une nouvelle, dans laquelle il conserva tout ce qu’il y avoit de convenable dans celles de ces différens princes, & retrancha le reste. C’est pourquoi il est regardé comme l’auteur des premieres lois d’Angleterre ; il mourut l’an 900. Cette loi est celle qu’on appelle west-senelaga ; elle fut observée principalement dans les neuf provinces les plus septentrionales que la Tamise sépare du reste de l’Angleterre.

La domination des Danois ayant prévalu en Angleterre, fit naître une autre loi appellée denelaga, c’est-à-dire loi danoise, qui étoit autrefois suivie par les 14 provinces orientales & septentrionales.

De ces différentes lois Edouard III. dit le confesseur, forma une loi appellée loi commune ou loi d’Edouard ; d’autres cependant l’attribuent à Edgard.

Enfin Guillaume le bâtard ou le conquérant avant subjugué l’Angleterre, lui donna de nouvelles lois ; il confirma pourtant les anciennes lois, & principalement celle d’Edouard.

Henri I. roi d’Angleterre, donna encore depuis à ce royaume de nouvelles lois.

Voyez Selden & Welocus en sa collection des lois d’Angleterre ; le glossaire de Ducange, au mot lex Anglorum, & au mot Droit des Anglois. (A)

Loi annaire. annaria. On donnoit quelquefois ce nom aux lois annales qui régloient l’âge auquel on pouvoit parvenir à la magistrature ; mais les anciens distinguoient la loi annaire de la loi annale, & entendoient par la premiere celle qui fixoit l’âge auquel on étoit exempt à l’avenir de remplir les charges publiques. Voyez Lampridius in commodo.

Lois annales, ou comme qui diroit loi des années, étoient des lois qui furent faites à Rome pour régler l’âge auquel on pouvoit parvenir à la magistrature. Tite-Live, liv. X. decad. 4, dit que cette loi fut faite sur les instances d’un tribun du peuple. Ceux qui étoient de cette famille furent de-là surnommés annales. Ovide en parle aussi dans ses fastes, où il dit :

Finitaque certis
Legibus est ætas, unde petatur honos.

La premiere loi de ce nom fut la loi junia, surnommée annalis. Voyez Loi junia.

Les autres lois qui furent faites dans la suite pour le même objet, furent pareillement nommées lois annales.

Cicéron de oratore fait mention que Pinnarius Rusca fit aussi une loi annale.

Voyez aussi Pacatus in laudat. Theod. Loyseau, des off. liv. I. ch. jv. n. 22. (A)

Loi annonaire est celle qui pourvoit à ce que les vivres n’enchérissent point, & qui rend sujets à accusation & punition publique ceux qui sont cause d’une telle cherté. Vid. Tit. ad leg. jul. de anno. ff. On a fait beaucoup de ces lois en France. Voyez Terrien sur l’ancienne coutume de Normandie, liv. IV. ch. xvj. (A)

Loi antia étoit une loi somptuaire chez les Romains, ainsi appellée, parce qu’elle fut faite par Anitius Restio. Outre que cette loi régloit en général la dépense des festins, elle défendit à tout magistrat ou à celui qui aspiroit à la magistrature, d’aller manger indifféremment chez tout le monde, afin qu’ils ne fussent pas si familiers avec les autres, & que les magistrats ne pussent aller manger que chez certaines personnes qualifiées ; mais peu après elle fut rejettée. Il est fait mention de cette loi par Cicéron dans le VII. liv. de ses épitr. famil. & dans le catalogue des lois antiques par Zazius. Gosson en parle aussi dans son commentaire sur la coutume d’Artois, article 12, où il dit que les magistrats doivent être leurs propres juges sur ce qui convient à leur dignité. Parmi nous il n’y a d’autre loi sur cette matiere que celle de la bienséance. (A)

Lois antiques, sont les lois des Wisigoths ; un édit de Théodoric, roi d’Italie ; les lois des Bourguignons ou Gombettes ; la loi salique & celle des Ripuariens, qui sont proprement les lois des Francs ; la loi des Allemands ; celle des Bavarois, des Anglois, & des Saxons ; la loi des Lombards ; les capitulaires de Charlemagne, & les constitutions des rois de Naples & de Sicile : elles ont été recueillies par Lindenbrog en douze livres, intitulés Codex legum antiquarum. Voyez Code des Lois antiques, & ici l’art. de chacune de ces lois. (A)

Loi Antonia judiciaria, c’étoit un projet de loi que le consul Marc-Antoine tâcha de faire passer après la mort de César, par laquelle il rejettoit dans la troisieme décurie qui étoit celle des questeurs ou financiers appellés tribuni ærarii, les centurions, & gens de la légion des Alandes. Cicéron en parle dans sa premiere Philippique, mais Antoine fut déclaré ennemi de la république avant que cette loi fut reçue.

Appien fait aussi Antoine auteur d’une loi dictatura, & Macrobe rapporte qu’il en fit une de nomine mensis Julii, par laquelle il ordonna que le mois qui avoit été appellé jusqu’alors Quintilis, seroit nommé Julius, du nom de Jules-César qui étoit né dans ce mois. Voy. Zazius & l’Hist. de la Jurisp. rom. de M. Terrasson. (A)

Loi aperte, ou Loi simple, ou Simple Loi, qui sont synonymes, signifient en Normandie la maniere de juger les actions simples, par lesquelles on défend quelque chose, sans qu’il soit besoin des formalités requises pour les autres actions. Il est dit dans le chap. lxxxvij. de l’ancienne coûtume, que toute querelle de meuble au-dessous de dix sols est simple, ou terminée par simple loi ; & au-dessus, apparissant, ou terminée par loi apparissant. Voyez le Glossaire de M. de Lanion au mot Loi apparissante, & ci-après Loi apparente.

Loi apparente ou apparoissant, qui dans l’ancienne coûtume de Normandie est aussi appellée loi apparissant, est un bref ou lettres royaux qu’on obtient en chancellerie à l’effet de recouvrer la possession d’un héritage dont on est propriétaire, & que l’on a perdu.

Cette forme de revendication est particuliere à la coûtume de Normandie.

Pour pouvoir agir par loi apparente, il faut que trois choses concourent.

1°. Que le demandeur justifie de son droit de propriété, & qu’il a perdu la possession depuis moins de quarante ans.

2°. Que celui contre qui la demande est faite soit possesseur de l’héritage, & qu’il n’ait aucun droit à la propriété.

3°. Que l’héritage contentieux soit désigné clairement dans les lettres par sa situation & par ses confins.

Pendant cette instance de revendication, le défendeur demeure toûjours en possession de l’héritage ; mais si par l’évenement il succombe, il est condamné à la restitution des fruits par lui perçus depuis la demande en loi apparente.

Il y avoit dans l’ancienne coûtume plusieurs sortes de lois apparoissant, savoir l’enquête de droit & de coûtume, le duel ou bataille, & le reconnoissant ou enquête d’établissement. Voyez l’anc. coût. chap. lxxxvij. & le Glossaire de M. de de Lauriere au mot, Loi apparissant. Voyez Basnage sur les art. 60, 61 & 62 de la coût. de Normandie. (A)

Loi apuleia, fut faite par le consul Apuleïus Saturninus, lequel voulant gratifier ce Marius dont le crédit égaloit l’ambition, ordonna que dans chaque colonie latine Marius pourroit faire trois citoyens romains ; mais cela n’eut point d’exécution. Cicéron fait mention de cette loi dans son oraison pro Cornelio Balbo. Voyez aussi Zazius.

Il y eut une autre loi du même nom, surnommée lex apuleïa majestatis, ou de majestate, qui fut faite à l’occasion d’un certain M. Norbanus, homme méchant & séditieux, lequel avoit condamné injustement Q. Cepion en excitant contre lui une émotion populaire. Norbanus fut accusé du crime de lese-majesté pour avoir ainsi ameuté le peuple. Ce fut Sulpitius qui l’accusa, & Antoine qui le défendit. Cicéron parle de cette affaire dans son second livre de oratore. (A)

Loi aquilia, étoit un plebiscite fait par l’instigation de L. Aquilius, qui fut tribun du peuple en l’année 572 de la fondation de Rome, & ensuite préteur de Sicile en 577. Quelques jurisconsultes ont cru qu’elle étoit d’Aquilius Gallus, inventeur de la stipulation aquilienne, mais celui-ci ne fut point tribun du peuple, & la loi aquilia est plus ancienne que lui.

Cette loi contenoit trois chapitres.

Le premier défendoit de tuer de dessein prémédité les esclaves & les animaux d’autrui.

On ne sait point certainement la teneur du second chapitre. Justinien nous apprend qu’il n’étoit plus observé de son tems. On croit qu’il établissoit des peines contre ceux qui enlevoient aux autres l’utilité qu’ils pouvoient tirer de quelque chose, comme quand on offusquoit le jour de son voisin sans aucun droit ; d’autres croyent que ce chapitre traitoit de servo corrupto, & qu’il fut abrogé, parce que le préteur décerna la peine du double contre celui qui seroit poursuivi pour l’action de servo corrupto ; au lieu que la loi aquilia ne punissoit que ceux qui nioient le crime.

Le troisieme chapitre contenoit des dispositions contre ceux qui avoient blessé des esclaves ou animaux d’autrui, & contre ceux qui avoient tué ou blessé des animaux, qui pecudum numero non erant, c’est-à-dire, de ces bêtes que l’on ne rassemble point par troupeaux.

Voyez le titre du digeste, ad legem Aquiliam. Pigrius, en ses Annales romaines tom. II. & M. Terrasson, en son histoire de la Jurisprudence rom. p. 144 & 145. (A)

Loi arbitraire ou muable, est celle qui dépend de la volonté du législateur, qui auroit pû n’être pas faite ou l’être tout autrement, & qui étant faite peut être changée, ou même entierement abolie ; telles sont les lois qui concernent la disposition des biens, les offices, l’ordre judiciaire. Il y a au contraire des lois immuables & qui ne sont point arbitraires, ce sont celles qui ont pour fondement les regles de la justice & de l’équité. (A)

Loi Aterina, que d’autres appellent aussi loi Tarpeia, fut faite sous les consuls Tarpeïus Capitolinus & A. Aterinus Fontinalis ; elle fixoit les peines & amendes à un certain nombre de brebis ou de bœufs : mais comme tous les bestiaux ne sont pas de même prix, & que d’ailleurs leur valeur varie, il arrivoit de-là que la peine du même crime n’étoit pas toûjours égale ; c’est pourquoi la loi Aterina fixa dix deniers pour la valeur d’une brebis, & cent deniers pour un bœuf. Denis d’Halicarnasse remarque aussi que cette loi donna à tous les magistrats le droit de prononcer des amendes, ce qui n’appartenoit auparavant qu’aux consuls. Voyez Zazius. (A)

Loi Attilia, fut ainsi nommée du préteur Attilius qui en fut l’auteur, elle concernoit les tutelles : la loi des douze tables avoit ordonné qu’un pere de famille pourroit par son testament nommer à ses enfans tel tuteur qu’il voudroit ; & que si un pere mouroit sans avoir testé, le plus proche parent seroit tuteur des enfans ; mais il arrivoit quelquefois que les enfans n’avoient point de parens proches, & que le pere n’avoit point fait de testament. Le préteur Attilius pourvut à ces enfans orphelins, en ordonnant que le préteur & le tribun du peuple leur feroient nommer un tuteur à la pluralité des voix ; c’est ce que les jurisconsultes nommerent tuteurs Attiliens, parce qu’ils étoient nommés on vertu de la loi Attilia ; comme cette loi ne s’observa d’abord qu’à Rome, on en fit dans la suite une autre appellée Julia Tibia, qui étendit la disposition de la loi Attilia dans toutes les provinces de l’empire. Voyez les institutes tit. de Attiliano tutore. (A)

Loi Atinia, fut faite pour confirmer ce que la loi des douze tables avoit ordonné au sujet de la prescription, ou plûtôt usucapion des choses volées, savoir, que ces sortes de choses ne pouvoient être prescrites à moins qu’elles ne revinssent entre les mains du légitime propriétaire. On ne sait pas au juste l’époque de cette loi. Cicéron observe seulement qu’elle fut faite dans des tems antérieurs à ceux de Scévola, Brutus, Manlius. Pighius, en ses Annales, tom. II. p. 255. pense qu’elle fut faite l’an de Rome 556, par C. Atinius Labeo, qui étoit tribun du peuple sous le consulat de Cornélius Cethegus, & de Q. Mucius Rufus, ce qui est assez vraissemblable : Cicéron en parle dans sa troisieme Verrine. Voyez aussi Zazius. (A)

Loi Aurelia, surnommée judiciaria, fut faite par M. Aurelius Cotta, homme très-qualifié, & qui étoit préteur ; ce fut à l’occasion des abus qui s’étoient ensuivis de la loi Cornelia judiciaria. Depuis dix ans le sénat se laissoit gagner par argent pour absoudre les coupables, ce qui fit que Cotta commit le pouvoir de juger aux trois ordres, c’est-à-dire, des sénateurs, des chevaliers, & des tribuns du peuple romain, qui étoient eux-mêmes du corps des chevaliers romains. Cette loi fut observée pendant environ seize ans, jusqu’à ce que la loi Pompeia reglât d’une autre maniere la forme des jugemens. Voyez Velleius Paterculus, lib. II. & Zazius. (A)

Loi Aurelia de Tribunis, eut pour auteur C. Aurelius Cotta, qui fut consul avec L. Manlius Torquatus ; il fut dit par cette loi, que les tribuns du peuple pourroient parvenir aux autres magistratures dont ils avoient été exclus par une loi que Sylla fit pendant sa dictature. V. Appien, lib. I. Bell. civ. & Ascanius ïn Cornelianam leg. (A)

Lois barbares, on entend sous ce nom les lois que les peuples du Nord apporterent dans les Gaules, & qui sont rassemblées dans le code des lois antiques, telles que la loi gothique ou des Visigoths ; la loi gombette ou des Bourguignons ; la loi salique ou des Francs ; celle des Ripuariens, celle des Allemands, celle de Bavarois ; les lois des Saxons, des Anglois, des Frisons, des Lombards ; elles ont été nommées barbares, non pas pour dire qu’elles soient cruelles ni grossieres, mais parce que c’étoient les lois de peuples qui étoient étrangers à l’égard des Romains, & qu’ils qualifioient tous de Barbares. Voyez code des lois antiques, & les articles où il est parlé de chacune de ces lois en particulier. (A)

Loi de bataille, signifioit autrefois les regles que l’on observoit pour le duel lorsqu’il étoit autorisé & même permis. Il en est parlé dans l’ancienne coûtume de Normandie, chap. cxvij. cxx. & ailleurs. (A)

Loi des Bavarois, lex Bajwariorum. La préface de cette loi nous apprend que Théodoric ou Thierry, roi d’Austrasie, étant à Châlons-sur-Marne, fit assembler les gens de son royaume les plus versés dans les sciences des anciennes lois, & que par son ordre ils réformerent & mirent par écrit la loi des Francs, celle des Allemands & des Bavarois qui étoient tous soumis à sa puissance ; il y fit les additions & retranchemens qui parurent nécessaires, & ce qui étoit reglé selon les mœurs des payens fut rendu conforme aux lois du christianisme ; & ce qu’une coûtume trop invétérée l’empêcha alors de changer, fut ensuite revu par Childebert & achevé par Clotaire. Le roi Dagobert fit remettre cette loi en meilleur style par quatre personnages distingués, nommés Claude, Chaude, Indomagne & Agilulfe. La préface de cette derniere réformation porte, que cette loi est l’ouvrage du roi, de ses princes, & de tout le peuple chrétien qui compose le royaume des Mérovingiens. On a ajoûté depuis à ces lois un decret de Tassilon, duc de Baviere. Voyez l’Hist. du Dr. fr. par M. l’Abbé Fleury. (A)

Loi des Bourguignons. Voyez Loi gombette.

Loi bursale, est celle dont le principal objet est de procurer au souverain quelque finance pour fournir aux besoins de l’état. Ainsi toutes lois qui ordonnent quelque imposition, sont des lois bursales : on comprend même dans cette classe celles qui établissent quelque formalité pour les actes, lorsque la finance qui en revient au prince est le principal objet qui a fait établir ces formalités. Tels sont les édits & déclarations qui ont établi la formalité du papier & du parchemin timbré, & celle de l’insinuation laïque. Il y a quelques-unes de ces lois qui ne sont pas purement bursales, savoir celles qui en procurant au roi une finance, établissent une formalité qui est réellement utile pour assurer la vérité & la date des actes : tels sont les édits du contrôle tant pour les actes des notaires que pour les billets & promesses sous signature privée. Les lois purement bursales ne s’observent pas avec la même rigueur que les autres. Ainsi, lorsqu’un nouveau propriétaire n’a pas fait insinuer son titre dans le tems porté par les édits & déclarations, le titre n’est pas pour cela nul ; l’acquéreur encourt seulement la peine du double ou du triple droit, & il dépend du fermier des insinuations d’admettre l’acquéreur à faire insinuer son contrat, & de lui faire remise du double ou triple droit. (A)

Loi caducaire, caducaria lex, surnommée aussi Julia, fut une loi d’Auguste, par laquelle il ordonna que les biens qui n’appartiendroient à personne, ou qui auroient appartenu à des propriétaires qui auroient perdu le droit qu’ils pouvoient y avoir, seroient distribués au peuple.

On comprit aussi sous le nom de lois caducaires plusieurs autres lois faites par le même empereur pour augmenter le trésor qui avoit été épuisé par les guerres civiles. Telles étoient les lois portant que toute personne qui vivoit dans le célibat, ne pourroit acquérir aucun legs ou libéralité testamentaire, & que tout ce qui lui étoit ainsi laissé, appartenoit au fisc, s’il ne se marioit dans le tems préfini par la loi.

Ceux qui étoient mariés & n’avoient point d’enfans, perdoient la moitié de ce qui leur étoit laissé par testament ou codicile : cela s’appelloit en droit pœna orbitatis. De même tout ce qui étoit laissé par testament à des personnes qui décédoient du vivant du testateur, ou après son decès, avant l’ouverture du testament, devenoit caduc, & appartenoit au fisc.

Justinien abolit toutes ces lois pénales. Voyez au code le titre de caducis tollendis, & la Jurisprudence rom. de Colombet. (A)

Loi calphurnia ou calpurnia de ambitu, c’est-à dire contre ceux qui briguoient les magistratures par des voies illicites. Elle fut faite par le tribun L. Calphurnius Pizo. Voyez ce qui est dit de lui dans l’article suivant. Zazius fait mention de cette loi en son catalogue. (A)

Loi calphurnia repetundarum eut pour auteur le même tribun qui fit la loi précédente. Ce fut la premiere loi faite contre le crime de concussion. C’étoit sous le consulat de Censorius & de Manlius, & du tems de la troisieme guerre punique : Ciceron en fait mention in Bruto, & dans son second livre des offices. Voyez aussi Zazius. (A)

Loi campana, ainsi appellée à campis, parce qu’elle concernoit les terres. C’est sous ce nom que Cicéron désigne la loi Julia agraria, lib. II. ad Atticum. Voyez Lois agraires & Loi Julia agraria. (A)

Loi canonique est une disposition qui fait partie du droit canonique romain, ou du droit ecclésiastique en général. Voyez Droit canonique. (A)

Loi Canuleia. C’étoit un plébiscite qui fut ainsi nommé de C. Canuleius tribun du peuple, qui le proposa au peuple. Les décemvirs, dans les deux dernieres tables de la loi qu’ils rédigerent, avoient ordonné entre autres choses, que les patriciens ne pouvoient s’allier aux plébeïens : ce qui porta les décemvirs à faire cette loi, fut qu’ils étoient eux-mêmes tous patriciens, & que suivant la coûtume ancienne aucun plébéïen ne pouvoit entrer dans le collége des augures, Romulus ayant réservé cet honneur aux seuls patriciens : d’où il seroit arrivé que, si l’on n’empêchoit pas les mesalliances des patriciens avec les plébéïens, le droit exclusif des patriciens pour la fonction d’augures auroit été troublé par une nouvelle race, que l’on n’auroit sû si l’on devoit regarder comme patricienne ou comme plébéïenne. Mais pour abolir cette loi qui excluoit les plébéïens, Canuleius proposa le plébiscite dont on vient de parler, portant que les patriciens & les plébéïens pourroient s’allier les uns aux autres indifféremment : car il ne paroissoit pas convenable que dans une ville libre, la plus grande partie des citoyens fussent regardés comme indignes que l’on prît alliance avec eux. Les patriciens s’opposerent fortement à cette loi, disant que c’étoit souiller leur sang ; que c’étoit confondre le droit des différentes races ; & que cela troubleroit les auspices publics & privés. Mais comme dans le même tems d’autres tribuns publierent aussi une loi, portant que l’un des deux consuls seroit choisi entre les plébéïens, les patriciens prévoyant que s’ils s’opposoient à la loi canuleia, ils seroient obligés de consentir à l’autre, ils aimerent mieux donner les mains à la premiere concernant les mariages. Cela se passa sous le consulat de M. Genutius & de P. Curiatus. Voyez Tit. Liv. lib. IV. & Zazius. (A)

Loi Carboniene. Carbonien défendoit de consacrer une maison, un autel sans la permission du peuple.

Il y eut aussi une loi de Sylla & de Carbon qui donna le droit de cité à ceux qui étoient aggrégés aux villes alliées, pourvû qu’au tems où cette loi fut publiée, ils eussent leur domicile en Italie, ou qu’ils eussent demeuré soixante jours auprès du préteur. Voyez Cicéron pro Archia poëta. (A)

Loi Cassia. Il y a eu trois lois de ce nom.

La premiere est la loi cassia agraria, dont on a parlé ci-devant, à l’article des Lois agraires.

La seconde est la loi cassia de judiciis, qui fut faite par C. Cassius & L. F. Longinus tribuns du peuple, sous le consulat de C. Marius & de C. Flavius Fembria. Cette loi dont le but étoit de diminuer le pouvoir des grands, ordonne que quiconque auroit été condamné par le peuple ou destitué de la magistrature, n’auroit plus entrée dans le sénat.

La troisieme loi cassia est une des lois appellées tabélaires, c’est-à-dire, qui régloient que l’on opineroit par écrit, au lieu de le faire de vive voix. Voyez Lois tabélaires. (A)

Loi de cens signifie amende de cens non payé : c’est de-là qu’on trouve dans les anciens dénombremens cens à loi & amende, ou bien cens & loi, qui en défaut de payement peuvent échoir. Voyez le contrat de 1477 pour la fondation de la messe dite de Mouy en l’église de S. Quentin. Lasont, sur Vermandois, art. 135. (A)

Loi Cincia étoit un plébiscite qui fut fait par le tribun M. Cinclus, sous le consulat de M. Cethegus & de P. Sempronius Tuditanus. Il le fit à la persuasion de Fabius, celui-là qui sut en temporisant, rétablir les affaires de la république. Dans les premiers siecles de Rome, les avocats plaidoient gratuitement, le peuple leur faisoit des présens. Dans la suite, comme on leur marquoit moins de reconnoissance, ils exigerent de leurs cliens des présens, qui étoient d’abord volontaires. C’est pourquoi il fut ordonné par la loi cincia aux avocats de prêter gratuitement leur ministere au menu peuple. La loi cincia avoit encore deux autres chefs. L’un cassoit les donations faites aux avocats, lorsqu’elles excédoient une certaine somme ; l’autre concernoit la forme de ces donations. Le jurisconsulte Paulus avoit fait un livre sur la loi cincia, mais qui est perdu : nous avons un commentaire sur cette même loi par Fréderic Prummerus.

Il y a plusieurs autres lois qui ont quelque rapport avec la loi cincia, telle que la loi Titia dont il sera parlé en son lieu. Il faut voir le surplus de ce qui concerne les avocats & leurs honoraires, au mot Avocats. (A)

Loi civile, (Droit civil d’une nation.) reglement émané du souverain, pour procurer le bien commun de ses sujets.

L’assemblage ou le corps des lois qu’il fait conformément à ce but, est ce qu’on nomme droit civil ; & l’art au moyen duquel on établit les lois civiles, on les explique lorsqu’elles ont quelqu’obscurité, ou on les applique convenablement aux actions des citoyens, s’appelle jurisprudence civile.

Pour pourvoir d’une maniere stable au bonheur des hommes & à leur tranquillité, il falloit établir des lois fixes & déterminées, qui éclairées par la raison humaine, tendissent à perfectionner & à modifier utilement la loi naturelle.

Les lois civiles servent donc, 1°. à faire connoître plus particulierement les lois naturelles elles-mêmes. 2°. A leur donner un nouveau degré de force, par les peines que le souverain inflige à ceux qui les méprisent & qui les violent. 3°. A expliquer ce qu’il peut y avoir d’obscur dans les maximes du droit naturel. 4°. A modifier en diverses manieres l’usage des droits que chacun a naturellement. 5°. A déterminer les formalités que l’on doit suivre, les précautions que l’on doit prendre pour rendre efficaces & valables les divers engagemens que les hommes contractent entr’eux, & de quelle maniere chacun doit poursuivre son droit devant les tribunaux.

Ainsi les bonnes lois civiles ne sont autre chose que les lois naturelles elles-mêmes perfectionnées & modifiées par autorité souveraine, d’une maniere convenable à l’état de la société qu’il gouverne & à ses avantages.

On peut distinguer deux sortes de lois civiles ; les unes sont telles par rapport à leur autorité seulement, & les autres par rapport à leur origine.

On rapporte à la premiere classe toutes les lois naturelles qui servent de regles dans les tribunaux civils, & qui sont d’ailleurs confirmées par une nouvelle sanction du souverain : telles sont toutes les lois qui déterminent quels sont les crimes qui doivent être punis.

On rapporte à la seconde classe les lois arbitraires, qui ont pour principe la volonté du souverain, ou qui roulent sur des choses qui se rapportent au bien particulier de l’état, quoiqu’indifférentes en elles-mêmes : telles sont les lois qui reglent les formalités nécessaires aux contrats, aux testamens, la maniere de procéder en justice, &c. Mais quoique ces réglemens soient arbitraires, ils doivent toujours tendre au bien de l’état & des particuliers.

Toute la force des lois civiles consiste dans leur justice & dans leur autorité, qui sont deux caracteres essentiels à leur nature, & au défaut desquels elles ne sauroient produire une véritable obligation.

L’autorité des lois civiles consiste dans la force que leur donne la puissance de celui, qui, étant revêtu du pouvoir législatif, a droit de faire ces lois, & dans les maximes de la droite raison, qui veulent qu’on lui obéisse.

La justice des lois civiles dépend de leur rapport à l’ordre de la société dont elles sont les regles, & de leur convenance avec l’utilité particuliere qui se trouve à les établir, selon que le tems & les lieux le demandent.

La puissance du souverain constitue l’autorité de ces lois, & sa bénéficence ne lui permet pas d’en faire d’injustes.

S’il y en avoit qui renversassent les principes fondamentaux des lois naturelles & des devoirs qu’elles imposent, les sujets seroient en droit & même dans l’obligation de refuser d’obéir à des lois de cette nature.

Il convient absolument que les sujets ayent connoissance des lois du souverain : il doit par conséquent publier ses lois, les bien établir & les notifier. Il est encore absolument essentiel qu’elles soient écrites de la maniere la plus claire, & dans la langue du pays, comme ont été écrites toutes les lois des anciens peuples. Car comment les observeroit-on, si on ne les connoît pas, si on ne les entend pas ? Dans les premiers tems, avant l’invention de l’écriture, elles étoient composées en vers que l’on apprenoit par cœur, & que l’on chantoit pour les bien retenir. Parmi les Athéniens, elles étoient gravées sur des lames de cuivre attachées dans des lieux publics. Chez les Romains, les enfans apprenoient par cœur les lois des douze tables.

Quand les lois civiles sont accompagnées des conditions dont on vient de parler, elles ont sans contredit la force d’obliger les sujets à leur observation, non seulement par la crainte des peines qui sont attachées à leur violation, mais encore par principe de conscience, & en vertu d’une maxime même du droit naturel, qui ordonne d’obéir au souverain en tout ce qu’on peut faire sans crime.

Personne ne sauroit ignorer l’auteur des lois civiles, qui est établi ou par un consentement exprès des citoyens, ou par un consentement tacite, lorsqu’on se soumet à son empire, de quelque maniere que ce soit.

D’un autre côté, le souverain dans l’établissement des lois civiles, doit donner ses principales attentions à faire ensorte qu’elles ayent les qualités suivantes, qui sont de la plus grande importance au bien public.

1°. D’être justes, équitables, conformes au droit naturel, claires, sans ambiguité & sans contradiction, utiles, nécessaires, accommodées à la nature & au principe du gouvernement qui est établi ou qu’on veut établir, à l’état & au génie du peuple pour lequel elles sont faites ; relatives au physique du pays, au climat, au terroir, à sa situation, à sa grandeur, au genre de vie des habitans, à leurs inclinations, à leurs richesses, à leur nombre, à leur commerce, à leurs mœurs, & à leurs coûtumes.

2°. De nature à pouvoir être observées avec facilité ; dans le plus petit nombre, & le moins multipliées qu’il soit possible ; suffisantes pour terminer les affaires qui se trouvent le plus communément entre les citoyens, expéditives dans les formalités & les procédures de la justice, tempérées par une juste sévérité proportionnée à ce que requiert le bien public.

Ajoutons, que les lois demandent à n’être pas changées sans nécessité ; que le souverain ne doit pas accorder des dispenses pour ses lois, sans les plus fortes raisons ; qu’elles doivent s’entre-aider les unes les autres autant qu’il est possible. Enfin, que le prince doit s’y assujettir lui-même & montrer l’exemple, comme Alfred, qu’un des grands hommes d’Angleterre nomme la merveille & l’ornement de tous les siecles. Ce prince admirable, aprés avoir dressé pour son peuple un corps de lois civiles, pleines de sagesse & de douceur, pensa, disent les historiens, que ce seroit en vain qu’il tâcheroit d’obliger ses sujets à leur observation, si les juges, si les magistrats, si lui même n’en donnoit le premier l’exemple.

Ce n’est pas assez que les lois civiles des souverains renferment les qualités dont nous venons de parler, si leur style n’y répond.

Les lois civiles demandent essentiellement & nécessairement un style précis & concis : les lois des douze tables en sont un modele. 1°. Un style simple ; l’expression directe s’entend toujours mieux que l’expression réfléchie. 2°. Sans subtilités, parce qu’elles ne sont point un art de Logique. 3°. Sans ornemens, ni comparaison tirée de la réalité à la figure, ou de la figure à la réalité. 4°. Sans détails d’exceptions, limitations, modifications ; excepté que la nécessité ne l’exige, parce que lorsque la loi présume, elle donne aux juges une regle fixe, & qu’en fait de présomption, celle de la loi vaut mieux que celle de l’homme, dont elle évite les jugemens arbitraires. 5°. Sans artifice, parce qu’étant établies pour le bien des hommes, ou pour punir leurs fautes, elles doivent être pleines de candeur. 6°. Sans contrariété avec les lois politiques du même peuple, parce que c’est toujours pour une même société qu’elles sont faites. 7°. Enfin, sans effet rétroactif, à moins qu’elles ne regardent des choses d’elles-mêmes illicites par le droit naturel, comme le dit Cicéron.

Voilà quelles doivent être les lois civiles des états, & c’est dans toutes ces conditions réunies que consiste leur excellence. Les envisager ensuite sous toutes leurs faces, relativement les unes aux autres, de peuples à peuples, dans tous les tems & dans tous les lieux, c’est former en grand, l’esprit des lois, sur lequel nous avons un ouvrage immortel, fait pour éclairer les nations & tracer le plan de la félicité publique. (D. J.)

Loi Claudia, on connoît deux lois de ce nom. L’une surnommée de jure civitatis, c’est-à-dire au sujet du droit de citoyen romain, fut faite par Claudius, consul l’an 577 de Rome, sur les instances des habitans du pays latin, lesquels voyant que ce pays se dépeuploit par le grand nombre de ceux qui passoient à Rome, & que le pays ne pouvoit plus facilement fournir le même nombre de soldats, obtinrent du sénat que le consul Claudius feroit une loi portant que tous ceux qui étoient associés au nom latin, seroient tenus de se rendre chacun dans leur ville avant les calendes de Novembre.

Il y eut une autre loi claudia faite par le tribun Claudius, appuyé de C. Flaminius, l’un des patriciens. Cette loi défendoit à tout sénateur, & aux peres des sénateurs, d’avoir aucun navire maritime qui fût du port de plus de 300 amphores, qui étoit une mesure usitée chez les Romains. Cela parut suffisant pour donner moyen aux sénateurs de faire venir les provisions de leurs maisons des champs ; car du reste on ne vouloit pas qu’ils fissent aucun commerce. Voyez Livius, lib. XXXI. Cicéron, actione in Verrem sept. Cette loi fut dans la suite reprise par César, dans la loi julia de repetundo.

Loi Clodia. Il y eut diverses lois de ce nom ; savoir,

La loi clodia monetaria, étoit celle en vertu de laquelle on frappa des pieces de monnoie marquées du signe de la victoire, au lieu qu’auparavant elles représentoient seulement un char à deux ou à quatre chevaux. Voyez Pline, lib. XXXIII. cap. ij.

Clodius surnommé pulcher, ennemi de Cicéron, fit aussi pendant son tribunat quatre lois qui furent surnommées de son nom, & qui furent très préjudiciables à la république.

La premiere surnommée annonaire ou frumentaire, ordonna que le blé qui se distribuoit aux citoyens, moyennant un certain prix, se donneroit à l’avenir gratis. Voyez ci-après Loi frumentaire.

La seconde fut pour défendre de consulter les auspices pendant les jours auxquels il étoit permis de traiter avec le peuple, ce qui ôta le moyen que l’on avoit de s’opposer aux mauvaises lois per obnuntiationem. Voyez ce qui sera dit ci-après de la loi celia fusia.

La troisieme loi fut pour le rétablissement des différens colléges ou corps que Numa avoit institués pour distinguer les personnes de chaque art & métier. La plûpart de ces différens colleges avoient été supprimés sous le consulat de Marius ; mais Clodius les rétablit, & en ajouta même de nouveaux. Toutes ces associations furent depuis défendues, sous le consulat de Lentulus & de Metellus.

La quatrieme loi Clodia, surnommée de censoribus, défendit aux censeurs d’omettre personne lorsqu’ils liroient leurs dénombremens dans le sénat, & de noter personne d’aucune ignominie, à moins qu’il n’eût été accusé devant eux, & condamné par le jugement des deux censeurs ; car auparavant les censeurs se donnoient la liberté de noter publiquement qui bon leur sembloit, même ceux qui n’étoient point accusés ; & quand un des deux censeurs avoit noté quelqu’un, c’étoit la même chose que si tous deux l’avoient condamné, à-moins que l’autre n’intervînt, & n’eût déchargé formellement de la note qui avoit été imprimée par son collegue. Voyez Zazius.

Loi Cœcilia & Didia, fut faite par Q. Cœcilius Metellus, & T. Didius Vivius, consuls l’an de Rome 656. Ce fut à l’occasion de ce que les tribuns du peuple & autres auxquels il étoit permis de proposer des lois, engloboient plusieurs objets dans une même demande, & souvent y mêloient des choses injustes, d’où il arrivoit que le peuple qui étoit frappé principalement de ce qu’il y avoit de juste, ordonnoit également ce qu’il y avoit d’injuste compris dans la demande ; c’est pourquoi par cette loi il fut ordonné que chaque réglement seroit proposé séparément, & en outre que la demande en seroit faite pendant trois jours de marché, afin que rien ne fût adopté par précipitation ni par surprise. Cicéron en parle dans la cinquieme Philippique, & en plusieurs autres endroits. Voyez aussi Zazius.

Loi Cœcilia repetundarum, fut une des lois qui furent faites pour réprimer le crime de concussion. L. Lentulus, homme consulaire, fut poursuivi en vertu de cette loi, ce qui fait juger qu’elle fut faite depuis la loi Calphurnia repetundarum. Voyez Loi calphurnia, & Zazius.

Loi Cœlia, étoit une des lois tabellaires qui fut faite par Cœlius pour abolir entierement l’usage de donner les suffrages de vive-voix. Voyez ci-après Lois tabellaires.

Loi commissoire, ou Pacte de la loi commissoire, est une convention qui se fait entre le vendeur & l’acheteur, que si le prix de la chose vendue n’est pas payé en entier dans un certain tems, la vente sera nulle s’il plaît au vendeur.

Ce pacte est appellé loi, parce que les conventions sont les lois des contrats ; on l’appelle commissoire, parce que le cas de ce pacte étant arrivé, la chose est rendue au vendeur, res venditori committitur ; le vendeur rentre dans la propriété de sa chose, comme si elle n’avoit point été vendue. Il peut même en répéter les fruits, à moins que l’acheteur n’ait payé des arrhes, ou une partie du prix, auquel cas l’acheteur peut retenir les fruits pour se récompenser de la perte de ses arrhes, ou de la portion qu’il a payée du prix.

La loi commissoire a son effet, quoique le vendeur n’ait pas mis l’acheteur en demeure de payer ; car le contrat l’avertit suffisamment, dies interpellat pro homine.

La peine de la loi commissoire n’a pas lieu lorsque dans le tems convenu l’acheteur a offert le prix au vendeur, & qu’il l’a consigné ; autrement les offres pourroient être réputées illusoires. Elle n’a pas lieu non plus lorsque le payement du prix, ou de partie d’icelui, a été retardé pour quelque cause légitime.

Quand on n’auroit pas apposé dans le contrat de vente, le pacte de la loi commissoire, il est toujours au pouvoir du vendeur de poursuivre l’acheteur, pour le payement du prix convenu, & à faute de ce il peut faire déclarer la vente nulle, & rentrer dans le bien par lui vendu ; mais avec cette différence, que dans ce cas l’acheteur en payant même après le tems convenu, demeure propriétaire de la chose à lui vendue ; au lieu que quand le pacte de la loi commissoire a été apposé dans le contrat, & que l’acheteur n’a pas payé dans le tems convenu, le vendeur peut faire résoudre la vente, quand même l’acheteur offriroit alors de payer.

Mais soit qu’il y ait pacte ou non, il faut toûjours un jugement pour résoudre la vente, sans quoi le vendeur ne peut de son autorité privée rentrer en possession de la chose vendue. Voyez au digeste le titre de lege commissoriâ.

Le pacte de la loi commissoire n’a pas lieu en fait de prêt sur gage, c’est-à-dire que l’on ne peut pas stipuler que si le débiteur ne satisfait pas dans le tems convenu, la chose engagée sera acquise au créancier ; un tel pacte est réputé usuraire, à moins que le créancier n’achetât le gage pour son juste prix. Voyez la loi 16. § ult. ff. de pign. & hyppot. & la loi derniere au code de pactis pignorum.

Lois consulaires étoient celles qui étoient faites par les consuls, comme les lois tribunitiennes étoient faites par les tribuns.

Loi Cornelia ; il y a eu plusieurs lois de ce nom, savoir :

La loi cornelia & gellia qui donna le pouvoir à Cn. Pompée, proconsul en Espagne, lequel partoit pour une guerre périlleuse, d’accorder le droit de cité à ceux qui auroient bien mérité de la république : elle fut faite par Lucius Gellius Publicola, & par Cn. Cornelius Lentulus.

La loi cornelia agraria fut faite par le dictateur Sylla, pour adjuger & partager aux soldats beaucoup de terres, & sur-tout en Toscane : les soldats rendirent cette loi odieuse, soit en perpétuant leur possession, soit en s’emparant des terres qu’ils trouvoient à leur bienséance. Cicéron en parle dans une de ses oraisons.

La loi cornelia de falso ou de falsis, fut faite par Cornelius Sylla, à l’occasion des testamens ; c’est pourquoi elle fut aussi surnommée testamentaire ; elle confirmoit les testamens de ceux qui sont en la puissance des ennemis, & pourvoyoit à toutes les faussetés & altérations qui pouvoient être faites dans un testament ; elle statuoit aussi sur les faussetés des autres écritures, des monnoies, des poids & mesures.

La loi cornelia de injuriis, faite par le même Sylla, concernoit ceux qui se plaignoient d’avoir reçu quelque injure, comme d’avoir été poussés, battus, ou leur maison forcée. Cette loi excluoit tous les proches parens & alliés du plaignant, d’être juges de l’action.

La loi cornelia judiciaria. Par cette loi Sylla rendit tous les jugemens au senat, & retrancha les chevaliers du nombre des juges ; il abrogea les lois Semproniennes, dont il adopta pourtant quelque chose dans la sienne ; elle ordonnoit encore que l’on ne pourroit pas récuser plus de trois juges.

La loi cornelia majestatis fut faite par Sylla, pour régler le jugement du crime de leze-majesté. Voyez Loi Julia.

La loi cornelia de parricidio, qui étoit du même Sylla, fut ensuite réformée par le grand Pompée dont elle prit le nom. Voyez Loi Pompeia.

La loi cornelia de proscriptione, dont parle Cicéron dans sa troisieme Verrine, fut faite par Valerius Flaccus ; elle est nommée ailleurs loi Valeria ; elle donnoit à Sylla droit de vie & de mort sur les citoyens.

La loi cornelia repetundarum, avoit pour objet de réprimer les concussions des magistrats qui gouvernoient les provinces. Voyez Cicéron, épitre à Appius.

La loi cornelia de sicariis & veneficis, fut aussi faite par Sylla ; elle concernoit ceux qui avoient tué quelqu’un, ou qui l’avoient attendu dans ce dessein, ou qui avoient préparé, gardé, ou vendu du poison, ceux qui par un faux témoignage avoient fait condamner quelqu’un publiquement, les magistrats qui recevoient de l’argent pour quelque affaire capitale, ceux qui par volupté ou pour un commerce infame auroient fait des eunuques.

La loi cornelia sumptuaria fut encore une loi de Sylla, par laquelle il régla la dépense que l’on pourroit faire les jours ordinaires, & celle que l’on pourroit faire les jours solemnels qui étoient ceux des calendes, des ides, des nones, & des jeux ; il diminua aussi par cette loi le prix des denrées.

Le tribun Cornelius fit aussi deux lois qui porterent son nom, l’une appellée

Loi cornelia de iis qui legibus solvuntur, défendoit d’accorder aucune grace ou privilege contre les lois, qu’il n’y eût au-moins 200 personnes dans le senat ; & à celui qui auroit obtenu quelque grace, d’être présent lorsque l’affaire seroit portée devant le peuple.

La loi cornelia de jure dicendo, du même tribun, ordonna que les préteurs seroient tenus de juger suivant l’édit perpétuel, au lieu qu’auparavant leurs jugemens étoient arbitraires. Il y avoit encore une autre loi surnommée Cornelia, savoir,

La loi Cornelia & Titia, suivant laquelle on pouvoit faire des conventions ou gageures pour les jeux où l’adresse & le courage ont part. Le jurisconsulte Martianus parle de cette loi. Sur ces différentes lois voyez Zazius.

Loi de crédence, c’est ainsi que l’on appelloit anciennement les enquêtes, lorsque les témoins déposoient seulement qu’ils croyoient tel & tel fait, à la différence du témoignage positif & certain, où le témoin dit qu’il a vu ou qu’il sait telle chose ; il en est parlé au style du pays de Normandie. François I. par son ordonnance de 1539, article 36, ordonna qu’il n’y auroit plus de réponses par crédit, &c. (A)

Loi criminelle. (Droit civil ancien & mod.) loi qui statue les peines des divers crimes & délits dans la société civile.

Les lois criminelles, dit M. de Montesquieu, n’ont pas été perfectionnées tout d’un coup. Dans les lieux mêmes où l’on a le plus cherché à maintenir la liberté, on n’en a pas toujours trouvé les moyens. Aristote nous dit qu’à Cumes les parens pouvoient être témoins dans les affaires criminelles. Sous les rois de Rome, la loi étoit si imparfaite, que Servius Tullius prononça la sentence contre les enfans d’Ancus Martius, accusés d’avoir assassiné le roi son beau-pere. Sous les premiers rois de France, Clotaire fit une loi en 560, pour qu’un accusé ne pût être condamné sans être oui, ce qui prouve qu’il régnoit une pratique contraire dans quelques cas particuliers. Ce fut Charondas qui introduisit les jugemens contre les faux témoignages : quand l’innocence des citoyens n’est pas assûrée, la liberté des citoyens ne l’est pas non plus.

Les connoissances que l’on a acquises dans plusieurs pays, & que l’on acquerra dans d’autres, sur les regles les plus sûres que l’on puisse tenir dans les jugemens criminels, intéressent le genre humain plus qu’aucune chose qu’il y ait au monde ; car c’est sur la pratique de ces connoissances que sont fondés l’honneur, la sûreté, & la liberté des hommes.

Ainsi la loi de mort contre un assassin est très juste, parce que cette loi qui le condamne à périr, a été faite en sa faveur ; elle lui a conservé la vie à tous les instans, il ne peut donc pas reclamer contre elle.

Mais toutes les lois criminelles ne portent pas ce caractere de justice. Il n’y en a que trop qui révoltent l’humanité, & trop d’autres qui sont contraires à la raison, à l’équité, & au but qu’on doit se proposer dans la sanction des lois.

La loi d’Henri II. qui condamnoit à mort une fille dont l’enfant avoit péri, au cas qu’elle n’eût point déclaré sa grossesse au magistrat, blessoit la nature. Ne suffisoit-il pas d’obliger cette fille d’instruire de son état une amie, une proche parente, qui veillât à la conservation de l’enfant ? Quel aveu pourroit-elle faire au fort du supplice de sa pudeur ? L’éducation a augmenté en elle l’idée de la conservation de cette pudeur, & à peine dans ces momens reste-t-il dans son ame une idée de la perte de la vie.

La loi qui prescrit dans plusieurs états, sous peine de mort, de revéler les conspirations auxquelles même on n’a pas trempé, est bien dure, du-moins ne doit-elle être appliquée dans les états monarchiques, qu’au seul crime de lese majesté au premier chef, parce qu’il est très-important de ne pas confondre les différens chefs de ce crime.

Nos lois ont puni de la peine du feu la magie, l’hérésie, & le crime contre nature, trois crimes dont on pourroit prouver du premier qu’il n’existe pas ; du second, qu’il est susceptible d’une infinité de distinctions, interpretations, limitations ; & du troisieme, qu’il est dangereux d’en répandre la connoissance ; & qu’il convient mieux de le proscrire sévérement par une police exacte, comme une infame violation des mœurs.

Mais sans perdre de tems à rassembler des exemples puisés dans les erreurs des hommes, nous avons un principe lumineux pour juger des lois criminelles de chaque peuple. Leur bonté consiste à tirer chaque peine de la nature particuliere du crime, & leur vice à s’en écarter plus ou moins. C’est d’après ce principe que l’auteur de l’esprit des lois a fait lui-même un code criminel : je le nomme code Montesquieu, & je le trouve trop beau, pour ne pas le transcrire ici, puisque d’ailleurs sa briéveté me le permet.

Il y a, dit-il, quatre sortes de crimes. Ceux de la premiere espece, choquent la religion, ceux de la seconde, les mœurs ; ceux de la troisieme, la tranquillité ; ceux de la quatrieme, la sûreté des citoyens. Les peines doivent dériver de la nature de chacune de ces especes.

Il ne faut mettre dans la classe des crimes qui intéressent la Religion, que ceux qui l’attaquent directement, comme sont tous les sacrileges simples ; car les crimes qui en troublent l’exercice, sont de la nature de ceux qui choquent la tranquillité des citoyens ou leur sûreté, & doivent être renvoyés à ces classes.

Pour que la peine des sacrileges simples soit tirée de la nature de la chose, elle doit consister dans la privation de tous les avantages que donne la Religion ; telles sont l’expulsion hors des temples, la privation de la société des fideles pour un tems ou pour toujours, la fuite de leur présence, les exécrations, les détestations, les conjurations.

Dans les choses qui troublent la tranquillité, ou la sûreté de l’état, les actions cachées sont du ressort de la justice humaine. Mais, dans celles qui blessent la divinité, là où il n’y a point d’action publique, il n’y a point de matiere de crime ; tout s’y passe entre l’homme & Dieu, qui sait la mesure & le tems de ses vengeances. Que si, confondant les choses, le magistrat recherche aussi le sacrilege caché, il porte une inquisition sur un genre d’action où elle n’est point nécessaire, il détruit la liberté des citoyens, en armant contre eux le zele des consciences timides, & celui des consciences hardies. Le mal est venu de cette idée, qu’il faut venger la divinité ; mais il faut faire honorer la divinité, & ne la venger jamais. Si l’on se conduisoit par cette derniere idée, quelle seroit la fin des supplices ? Si les lois des hommes ont à venger un être infini, elles se régleront sur son infinité, & non pas sur les foiblesses, sur les ignorances, sur les caprices de la nature humaine.

La seconde classe des crimes, est de ceux qui sont contre les mœurs ; telles sont la violation de la continence publique ou particuliere, c’est-à-dire de la police, sur la maniere dont on doit jouir des plaisirs attachés à l’usage des sens, & à l’union des corps. Les peines de ces crimes doivent être tirées de la nature de la chose. La privation des avantages que la société a attachés à la pureté des mœurs, les amendes, la honte de se cacher, l’infamie publique, l’expulsion hors de la ville & de la société ; enfin, toutes les peines qui sont de la jurisdiction correctionnelle, suffisent pour reprimer la témérité des deux sexes. En effet ces choses sont moins fondées sur la méchanceté, que sur l’oubli ou le mépris de soi-même.

Il n’est ici question que de crimes qui intéressent uniquement les mœurs ; non de ceux qui choquent aussi la sureté publique, tels que l’enlevement & le viol, qui sont de la quatrieme espece.

Les crimes de la troisieme classe, sont ceux qui choquent la tranquillité. Les peines doivent donc se rapporter à cette tranquillité, comme la privation, l’exil, les corrections, & autres peines qui ramenent les esprits inquiets, & les font rentrer dans l’ordre établi.

Il faut restreindre les crimes contre la tranquillité, aux choses qui contiennent un simple lésion de police : car celles qui, troublant la tranquilité, attaquent en même tems la sûreté, doivent être mises dans la quatrieme classe.

Les peines de ces derniers crimes sont ce qu’on appelle des supplices. C’est une espece de talion, qui fait que la société refuse la sûreté à un citoyen qui en a privé, ou qui a voulu en priver un autre. Cette peine est tirée de la nature de la chose, puisée dans la raison, & dans les sources du bien & du mal. Un citoyen mérite la mort, lorsqu’il a violé la sûreté, au point qu’il a ôté la vie. Cette peine de mort est comme le remede de la société malade.

Lorsqu’on viole la sûreté à l’égard des biens, il peut y avoir des raisons pour que la peine soit capitale ; mais il vaudroit peut-être mieux, & il seroit plus de la nature, que la peine des crimes contre la sûreté des biens, fût punie par la perte des biens ; & cela devroit être ainsi si les fortunes étoient communes ou égales ; mais comme ce sont ceux qui n’ont point de biens qui attaquent plus volontiers celui des autres, il a fallu que la peine corporelle suppléât à la pécuniaire, du moins on a cru dans quelque pays qu’il le falloit.

S’il vaut mieux ne point ôter la vie à un homme pour un crime, lorsqu’il ne s’est pas exposé à la perdre par son attentat, il y auroit de la cruauté à punir de mort le projet d’un crime ; mais il est de la clémence d’en prévenir la consommation, & c’est ce qu’on fait en infligeant des peines modérées pour un crime consommé. (D. J.)

Loi de desrenne, étoit une maniere de procéder usitée dans l’ancienne coutume de Normandie, pour les matieres qui se terminent par desrenne ou simple loi ; elle y fut abolie. Desfontaines en fait mention chap. xxxiv. n. 2. Voyez Desrenne, & Loi simple. (A)

Loi diocésaine, (Hist. ecclés.) taxe que les évêques imposoient anciennement sur les ecclésiastiques de leur diocèse pour leurs visites ; c’étoit une espece de droit qui n’entroit point dans la jurisdiction spirituelle ou temporelle des évêques, mais émanoit de leur siege & de leur caractere, en les autorisant d’exiger des curés & des monasteres, une aide pour soutenir les dépenses qu’ils étoient obligés de faire en visitant leurs diocèses.

Ce droit est nommé par les auteurs ecclésiastiques procuratio ; mais il est appellé dispensa, la dépense de l’évêque dans les capitulaires de Charles le chauve ; procuratio paroit le véritable nom qu’on doit lui donner ; car procurare aliquem, signifie traiter bien quelqu’un, lui faire bonne chere : Virgile dit dans l’Enéide, lib. IX.

Quod superest læti benè gestis corpora rebus
Procurate, viri.

Les évêques ne se prévalent plus de ce droit, quoiqu’ils y soient autorisés par plusieurs conciles, lesquels leur recommandent en même tems la modération, & leur défendent les exécutions. En effet la plupart des évêques sont si fort à leur aise, & leurs curés si pauvres, qu’il est plus que juste qu’ils visitent leurs diocèses gratuitement. Leur droit ne pourroit être répété que sur les riches monasteres qui sont sujets à la visite : les décimateurs en ont toujours été exemts. Voyez Hautessere, l. IV. c. iv. de ses dissertations canoniques. (D. J.)

Loi Domitia, étoit la même que la loi Licinia, qui régloit que les prêtres ne seroient plus choisis par les colleges, mais par le peuple. Le préteur Laelius ayant fait abroger cette loi, elle fut remise en vigueur par Domitius Œnobarbus tribun du peuple, d’où elle prit alors le nom de Domitia. Il apporta seulement un tempérament à la loi Licinia, en ce qu’il ordonna que l’on appelleroit le peuple en moindre nombre, & que celui qui seroit ainsi proposé seroit confirmé par le college des prêtres. Ce qui donna lieu à Domitius de rétablir en partie la loi Licinia, fut le ressentiment qu’il eut de ce que les prêtres ne l’avoient point admis au sacerdoce en la place de son pere. Voyez Suétone in Nerone, Cicéron pro Rullo, & dans ses épîtres à Brutus. (A)

Loi Didia, étoit une des lois somptuaires des Romains ; elle fut ainsi nommée de Didius tribun du peuple. C’étoit une extension de la loi Orchia & Fannia, qui régloient la dépense des repas. Elle ordonna que ceux qui invitoient & ceux qui seroient invités, encourroient également la peine portée par la loi, en cas de contravention. Voyez ci-après Loi Fannia, Loi Orchia, Lois somptuaires, & le catalogue de Zazius. (A)

Loi divine, (Droit divin.) Les lois divines sont celles de la Religion, qui rappellent sans cesse l’homme à Dieu, qu’il auroit oublié à chaque instant.

Elles tirent leur force principale de la croyance qu’on donne à la religion. La force des lois humaines vient de ce qu’on les craint : les lois humaines sont variables, les lois divines sont invariables. Les lois humaines statuent sur le bien, celles de la Religion sur le meilleur.

Il ne faut donc point toujours statuer par les lois divines, ce qui doit l’être par les lois humaines, ni régler par les lois humaines, ce qui doit l’être par les lois divines.

Les choses qui doivent être réglées par les lois humaines, peuvent rarement l’être par les principes des lois de la Religion ; ces dernieres ont plus de sublimité, & les lois humaines plus d’étendue. Les lois de perfection tirées de la Religion, ont plus pour objet la bonté de l’homme qui les observe, que celle de la société dans laquelle elles sont observées. Les lois humaines au contraire ont plus pour objet la bonté morale des hommes en général, que celle des individus. Ainsi, quelles que soient les idées qui naissent immédiatement de la Religion, elles ne doivent pas toujours servir de principe aux lois civiles, parce que celles-ci en ont un autre, qui est le bien général de la société.

Il ne faut point non plus opposer les lois religieuses à celles de la loi naturelle, au sujet, par exemple, de la défense de soi-même, & de la prolongation de sa vie, parce que les lois de la Religion n’ont point abrogé les préceptes des lois naturelles.

Grotius admettoit un droit divin, positif, universel ; mais la peine de prouver la plûpart des articles qu’on rapporte à ce prétendu droit universel, forme d’abord un préjugé désavantageux contre sa réalité. S’il y a quelque loi divine qu’on puisse appeller positive, & en même tems universelle, dit M. Barbeyrac, elle doit 1°. être utile à tous les hommes, dans tous les tems & dans tous les lieux ; car Dieu étant très-sage & très-bon, ne sauroit prescrire aucune loi qui ne soit avantageuse à ceux-là même auxquels on l’impose. Or une loi convenable aux intérêts de tous les hommes, en tous tems & en tous lieux, vû la différence infinie de ce que demande le climat, le génie, les mœurs, la situation, & cent autres circonstances particulieres ; une telle loi, dis-je, ne peut être conçue que conforme à la constitution de la nature humaine en général, & par conséquent c’est une loi naturelle.

En second lieu, s’il y avoit une telle loi, comme elle ne pourroit être découverte que par les lumieres de la raison, il faudroit qu’elle fût bien clairement revélée à tous les peuples. Or, un grand nombre de peuples n’ont encore eu aucune connoissance de la revélation. Si l’on replique que les lois dont il s’agit, n’obligent que ceux à la connoissance desquels elles sont parvenues, on détruit par-là l’idée d’universalité, sans nous apprendre pourquoi elles ne sont pas publiées à tous les peuples, puisqu’elles sont faites pour tous. Aussi M. Thomasius qui avoit d’abord admis ce système de lois divines, positives & universelles, a reconnu depuis qu’il s’étoit trompé, & a lui-même renversé son édifice, le trouvant bâti sur de trop foibles fondemens. (D. J.)

Loi dorée, lex aurea : on a donné ce surnom à une disposition de la novelle 149 de Justinien, chap. cxliij. où cet empereur veut que le salut du peuple soit la premiere loi, salus populi suprema lex esto.

Loi duellia ; il y en eut deux de ce nom : l’une appellée aussi duellia-mœnia, fut la premiere loi que l’on fit pour réprimer les usures excessives. Cette loi fut ainsi nommée de M. Duellio, d’autres disent Duellius, & de Menenius ou Mænius tribuns du peuple, qui en furent les auteurs ; elle défendoit d’exiger plus d’une once ou douzieme partie de la somme à titre d’usure, c’est à dire un pour cent ; cela arriva l’an 398 de Rome. Voyez Tite-Live, lib. VII.

L’autre loi appellée aussi duellia, fut faite l’an 306 de Rome par le tribun M. Duellius : elle ordonnoit que celui qui laisseroit le peuple sans tribuns, ou qui créeroit des magistrats sans convoquer le peuple, seroit frappé de verges & décapité. Voyez Denys d’Halicarnasse, lib. XIII.

Loi Ebutia, voyez ci-après Loi Licinia & Ebutia.

Loi ecclésiastique, en général est toute loi qui concerne l’Eglise ou ses ministres, & les matieres qui ont rapport à l’Eglise, telles que les bénéfices, les dixmes.

Quelquefois par le terme de lois ecclésiastiques, on entend spécialement celles qui sont faites par les prélats ; elles sont générales pour toute l’Eglise, ou particulieres à une nation, à une province, ou à un seul diocèse, suivant le pouvoir de ceux dont elles sont émanées.

Quiconque veut voir les lois ecclésiastiques digérées dans un ordre méthodique, doit consulter l’excellent ouvrage de M. de Héricourt, qui a pour titre les lois ecclésiastiques.

Lois échevinales, c’est la jurisdiction des échevins de certaines villes des Pays-Bas : le magistrat est pris en cette occasion pour la loi même, quia magistratus est lex loquens, la loi vivante. Il est parlé du devoir des lois échevinales, dans les coutumes de Hainaut, chap. iij. Mons, chap. xxxvij. xxxviij. & xlix. Valenciennes, article 160.

Loi écrite ; on entend quelquefois par ce terme la loi de Moïse, & aussi le tems qui s’est écoulé depuis ce prophete jusqu’à Jesus-Christ, pour le distinguer du tems qui a précédé, qu’on appelle le tems de la loi de nature, où les hommes n’avoient pour se gouverner que la raison naturelle & les traditions de leurs ancêtres. Voyez Loi de Moïse.

En France, dans les commencemens de la troisieme race, on entendoit par loi écrite, le Droit romain, qui étoit ainsi appellé par opposition aux coutumes qui commencerent alors à se former, & qui n’étoient point encore rédigées par écrit. Voyez Droit écrit, Droit romain.

Loi de l’Eglise, est une regle reçûe par toute l’Eglise, telles que sont les regles de foi. Il y a des lois qui ne concernent que la discipline, & qui peuvent être reçûes dans une église, & ne l’être pas dans une autre.

Loi d’emende, dans les anciennes coutumes, signifie un reglement qui prononce quelque amende. On entend aussi quelquefois par-là l’amende même qui est prononcée par la coutume. Voyez la coutume d’Anjou, article 146. 150. & 250. celle du Maine, article 161. 163. 182. & 458.

Loi de l’état, est toute regle qui est reçûe dans l’état, & qui y a force de loi, soit qu’elle ait rapport au gouvernement général, ou au droit des particuliers.

Quelquefois par la loi de l’état, on entend seulement une regle que l’on suit dans le gouvernement politique de l’état. En France, par exemple, on appelle lois de l’état, celles qui excluent les femelles de la couronne, & qui empêchent le partage du royaume ; celle qui déclare les rois majeurs à 14 ans, & qui rend les apanages réversibles à la couronne à défaut d’hoirs mâles, & ainsi des autres. Quelques-unes de ces regles sont écrites dans les ordonnances de nos rois ; d’autres ne sont fondées que sur d’anciens usages non écrits qui ont acquis force de loi.

On appelle loi fondamentale de l’état, celle qui touche sa constitution, comme en France l’exclusion des femelles, &c.

Loi Fabia, fut faite par Fabius, pour restreindre le nombre des sectateurs. On appelloit ainsi ceux qui accompagnoient les candidats : le peuple se mit peu en peine de faire observer cette loi. Voyez Ciceron, pro Murena.

Loi falcidia, défendit de léguer plus des trois quarts de son bien. Voyez Quartre falcidie.

Loi Fannia, ainsi nommée de Fannius. Strabon qui fut consul onze ans avant la troisieme guerre punique, la croit la seconde loi somptuaire qui fut faite à Rome ; elle fixa la dépense qu’il seroit permis de faire ; elle défendit de s’assembler plus de trois, outre les personnes de la famille, les jours ordinaires, & plus de cinq les jours des nones ou des foires ; la dépense fut fixée à cent sols chaque repas les jours des jeux & des fêtes publiques, 30 sols les jours des nones ou des foires, & 10 sols les autres jours ; les légumes & les herbes n’y étoient point comprises ; & pour maintenir cette frugalité, la même loi défendit de servir dans un repas d’autre volaille qu’une poule non engraissée. Voyez Zazius, le traité de police, titre des festins, page 461. & ci-après Lois somptuaires.

Loi Favia, que d’autres appellent aussi Fabia, d’autres Flavia, & dont l’auteur est incertain, fut faite contre les plagiaires : elle ordonnoit que celui ou ceux qui auroient célé un homme ingénu, c’est-à-dire de condition libre, ou un affranchi, ou qui l’auroit tenu dans les liens, ou l’auroit acheté sciemment & de mauvaise foi ; ceux qui auroient persuadé à l’esclave d’autrui de se sauver, ou qui l’auroient celé, l’auroient tenu dans les fers, ou l’auroient acheté sciemment ; enfin, ceux qui seroient complices de ces diverses sortes de plagiat, seroient punis suivant la loi : cette peine n’étoit d’abord que pécuniaire ; dans la suite, on prononça des peines afflictives, même la peine de mort, ou la condamnation aux mines. Voyez Ciceron, pro Rabirio.

Loi Flavia ; c’est ainsi que quelques-uns nomment la loi précédente : il y eut aussi une autre loi Flavia, du nombre des lois agraires, qui fut faite par Flavius Canuleius tribun du peuple, laquelle n’avoit rien de populaire que son auteur. Voyez Lois agraires. (A)

Loi fondamentale, (Droit politique.) toute loi primordiale de la constitution d’un gouvernement.

Les lois fondamentales d’un état, prises dans toute leur étendue, sont non-seulement des ordonnances par lesquelles le corps entier de la nation, détermine quelle doit être la forme du gouvernement, & comment on succédera à la couronne ; mais encore ce sont des conventions entre le peuple, & celui ou ceux à qui il défere la souveraineté ; lesquelles conventions reglent la maniere dont on doit gouverner, & prescrivent des bornes à l’autorité souveraine.

Ces reglemens sont appellés lois fondamentales, parce qu’ils sont la base & le fondement de l’état, sur lesquels l’édifice du gouvernement est élevé, & que les peuples les considerent comme ce qui en fait toute la force & la sûreté.

Ce n’est pourtant que d’une maniere, pour ainsi dire abusive, qu’on leur donne le nom de lois ; car, à proprement parler, ce sont de véritables conventions ; mais ces conventions étant obligatoires entre les parties contractantes, elles ont la force des lois mêmes.

Toutefois pour en assurer le succès dans une monarchie limitée, le corps entier de la nation peut se réserver le pouvoir législatif, la nomination de ses magistrats, confier à un sénat, à un parlement, le pouvoir judiciaire, celui d’établir des subsides, & donner au monarque entr’autres prérogatives, le pouvoir militaire & exécutif. Si le gouvernement est fondé sur ce pié-là par l’acte primordial d’association, cet acte primordial porte le nom de lois fondamentales de l’état, parce qu’elles en constituent la sûreté & la liberté. Au reste, de telles lois ne rendent point la souveraineté imparfaite ; mais au contraire elles la perfectionnent, & réduisent le souverain à la nécessité de bien faire, en le mettant pour ainsi dire dans l’impuissance de faillir.

Ajoutons encore, qu’il y a une espece de lois fondamentales de droit & de nécessité, essentielles à tous les gouvernemens, même dans les états où la souveraineté est, pour ainsi dire absolue ; & cette loi est celle du bien public, dont le souverain ne peut s’écarter sans manquer plus ou moins à son devoir. (D. J.)

Lois forestieres, sont les reglemens qui concernent la police des eaux & forêts. M. Becquet grand maître des eaux & forêts au département de Berry, a donné au public en 1753 les lois forestieres, en deux vol. in-4°. C’est un commentaire historique & raisonné sur l’ordonnance des eaux & forêts, & sur les réglemens qui ont précédé & suivi.

Il y a en Angleterre les lois forestieres, concernant la chasse & les crimes qui se commettent dans les bois. Il y a sur cette matiere des ordonnances d’Edouard III. & le recueil appellé charta de forestâ. Voyez Eaux & Forêts, Maîtres des eaux & forêts.

Loi des Francs, lex Francorum, seu Francica, appellée plus communément loi salique. Voyez ci-après Loi salique.

Loi des Frisons, est une des lois apportées dans les Gaules par les peuples du Nord, & qui se trouve dans le code des lois antiques. (A)

Lois frumentaires, chez les Romains, étoient des lois faites pour régler la distribution du blé que l’on faisoit d’abord aux troupes & aux officiers du palais, & enfin que l’on étendit aussi aux citoyens, & même à tout le peuple. Chaque chef de famille recevoit tous les mois une certaine quantité de froment des greniers publics. Cet usage, à l’égard du peuple, fut établi par le moyen des largesses que les grands de Rome faisoient au menu peuple pour gagner ses bonnes graces ; ils lui faisoient délivrer du blé, d’abord c’étoit seulement à bas prix, ensuite ce fut tout-à-fait gratuitement. On fit diverses lois à ce sujet ; savoir, les lois Sempronia, Livia, Terrentia, Cassia, Clodia & Roscia, qui furent appellées d’un nom commun, lois frumentaires ; elles sont expliquées par Lipse, cap. viij. electorum ; & par Rosinus, antiquit. roman. lib. VIII. cap. xij. Ces distributions continuerent sous les empereurs, & se pratiquoient encore du tems de Justinien. Voyez Loiseau, des offices, liv. I. chap. j. n°. 59. & suiv.

Loi furia, fut faite par Furius, tribun du peuple. Elle défendoit à tout testateur de léguer à quelqu’un plus de mille écus, à peine de restitution du quadruple, pour empêcher que les héritiers institués n’abdicassent l’hérédité, qui se trouvoit épuisée par des legs excessifs. Voyez Théophile, dans ses institutions grecques, & Cicéron, pro Cornelio Balbo.

Loi fusia caninia, fut faite pour limiter le pouvoir d’affranchir ses esclaves par testament ; d’un côté, elle régla le nombre des esclaves que l’on pourroit ainsi affranchir, savoir que celui qui en auroit deux, pourroit les affranchir tous deux ; que celui qui en auroit trois, n’en pourroit affranchir que deux, depuis 3 jusqu’à 10 la moitié, depuis 10 jusqu’à 30 le tiers, depuis 30 jusqu’à 100 le quart, depuis 100 jusqu’à 500 la cinquieme partie, & que l’on ne pourroit en affranchir un plus grand nombre que 100. Cette même loi ordonnoit que les esclaves ne pourroient être affranchis par le testament qu’en les appellant par leur nom-propre. Dans la suite, le jurisconsulte Orphitien permit de les affranchir aussi en les désignant par le nom de leur emploi.

Cette loi fusia fut abrogée par Justinien, comme peu favorable à la liberté. Voyez le titre VII. aux institutes.

Loi gabinia, il y en eut trois de ce nom.

La premiere fut une des lois tabellaires. Voyez ci-après Lois tabellaires.

La seconde fut faite par A. Gabinius, tribun du peuple, pour envoyer Pompée faire la guerre aux pirates, avec un pouvoir égal à celui des proconsuls, dans toutes les provinces jusqu’à 50 milles de la mer. Voyez Paterculus, lib. II. Plutarque, en la vie de Pompée.

La troisieme loi de ce nom fut faite par le même Gabinius, pour réprimer les usures énormes que les receveurs publics commettoient dans les provinces. Voyez Cicéron, lib. VI. ad Atticum, & Zazius.

Loi Gellia, voyez ci-devant Loi Cornelia à l’article premier.

Loi générale, est celle qui est observée dans tous les pays d’une même domination, ou du moins dans toute une province. Telles sont les lois romaines, les ordonnances, édits & déclarations, les coûtumes générales de chaque province, à la différence des lois particulieres, telles que sont les coûtumes locales & statuts particuliers de certaines villes, cantons ou communautés.

Loi Genutia, fut un plébiscite proposé par Genutius, tribun du peuple, par lequel les intérêts furent entiérement proscrits, comme nous l’apprenons de Tite Live, lib. VII. Ce plébiscite fut reçu à Rome, mais il n’étoit pas d’abord observé chez les autres peuples du pays latin, de sorte qu’un Romain qui avoit prêté de l’argent à un de ses concitoyens, transportoit sa dette à un latin, parce que celui-ci pouvoit en exiger l’intérêt ; & comme, par ce moyen, la loi étoit éludée, le tribun Sempronius fit une loi, appellée sempronia, portant que les Latin & autres alliés du peuple romain seroient sujets à la loi genutia.

Loi Glaucia fut faite par C. Servitius Glaucia, pour rendre à l’ordre des chevaliers romains le pouvoir de juger avec le sénat, qui lui avoit été ôté. Voyez Cicéron, in Bruto, & ci-après, Lois judiciaires.

Loi Glicia, ainsi nommée, parce qu’elle fut faite, à ce que l’on croit, par quelqu’un de la famille Glicia, qui étoit une des plus celebres de la ville de Rome. Tacite, Suétone, Florus & Tite-Live ont parlé de cette famille, & les marbres capitolins en ont conservé la mémoire : ce fut cette loi qui introduisit la querelle ou plainte d’inofficiosité en faveur des enfans qui étoient prétérits ou exhérédés par le testament de leur pere ; nous devons à Cujas la découverte de cette loi. Hotman a pourtant nié qu’il y ait jamais eu une loi de ce nom ; mais les auteurs les plus accrédités attribuent, comme Cujas, à cette loi l’origine de la querelle d’inofficiosité, & la preuve que cette loi a existé, se trouve encore dans l’intitulé de la loi non est au digeste de inoffic. testam. lequel nous apprend que le jurisconsulte Caius avoit fait un traité sous le titre de liber singularis ad legem Gliciam. Voyez l’histoire de la jurisprud. rom. par M. Terrasson, p. 125.

Loi Gombette ou Lois des Bourguignons, lex Gundebada seu Burgundionum, étoit la loi des peuples du royaume de Bourgogne ; elle fut réformée par Gondebaud, l’un de leurs derniers rois, qui la publia à Lyon le 29 Mars de la seconde année de son regne, c’est-à-dire en 501 ; c’est du nom de ce roi que les lois des Bourguignons furent depuis nommées gombettes, quoiqu’il n’en fût pas le premier auteur. Il le reconnoît lui-même, & Grégoire de Tours le témoigne, lorsqu’il dit que Gondebaud donna aux Bourguignons des lois plus douces pour les empêcher de maltraiter les Romains : elle porte les souscriptions de trente comtes, qui promettent de l’observer, eux & leurs descendans. Il y a quelques additions qui vont jusqu’en l’an 520, c’est-à-dire dix ou douze ans avant la ruine du royaume des Bourguignons ; elle fait mention de la loi romaine, & l’on y voit clairement que le nom de barbare n’étoit point une injure, puisque les Bourguignons même, pour qui elle est faite, y sont nommés barbares pour les distinguer des Romains. Comme ce qui obéissoit aux Bourguignons forme environ le quart de notre France, on ne peut douter que cette loi ne soit entrée dans la composition du Droit françois. Elle se trouve dans le code des lois antiques sous ce titre : Liber constitutionum de præteritis & præsentibus atque in perpetuo conservandis, editus sub die 4 kal. April. Lugduni. Il en est parlé dans la loi des Lombards, dans les capitulaires & dans plusieurs auteurs. Ce qui nous reste de cette loi, fait connoître que les Bourguignons en avoient plusieurs autres ; ainsi que l’observe le M. président Bouhier sur la coûtume de Bourgogne, chap. ix. §. 14. Cette loi défere le duel à ceux qui ne voudront pas s’en tenir au serment ; c’étoit une coûtume barbare venue du nord, & qui étoit usitée alors chez tous les nouveaux peuples qui s’étoient établis dans les Gaules. (A)

Loi Gothique ou Loi des Visigoths, est celle qui fut faite pour les Visigoths, qui occupoient l’Espagne & une grande partie de l’Aquitaine. Comme ce royaume fut le premier qui s’établit sur les ruines de l’empire romain, ses lois paroissent aussi avoir été écrites les premieres : elles furent d’abord rédigées sous Evarix, qui commença à regner en 466 ; & comme elles n’étoient que pour les Goths, son fils Alaric fit faire pour les Romains un abrégé du code théodosien. Voyez Loi romaine.

La loi gothique fut corrigée & augmentée par le roi Leuvigild, & ensuite Chindaswind & Receswind lui donnerent une pleine autorité, en ordonnant que ce recueil seroit l’unique loi de tous ceux qui étoit sujets des rois goths, de quelque nation qu’ils fussent, de sorte que l’on abolit en Espagne la loi romaine, ou plutôt ou la mêla avec la gothique ; car ce fut de la loi romaine (c’est ainsi qu’on appelloit un abrégé du code théodosien fait par ordre d’Alaric) que l’on tira la plus grande partie de ce qui fut ajouté aux anciennes lois. Ce code gothique fut divisé en douze livres, & s’appelloit le livre de la loi gothique. Le roi Egica, qui regna jusqu’en 701, fit une révision de ce livre, & le fit confirmer par le concile de Tolede en 693. On y voit les noms de plusieurs rois, mais tous sont depuis Recarede qui fut le premier entre les rois catholiques. Les lois précédentes sont intitulées antiques, sans qu’on y ait mis aucun nom de rois, non pas même celui d’Evarix ; peut-être a-t-on supprimé ces noms en haine de l’arianisme. Ces lois antiques prises séparément, ont beaucoup de rapport avec celles des autres barbares, ainsi elles comprennent tous les usages des Goths qu’Evarix avoit fait rédiger par écrit. A prendre la loi gothique en entier, c’est la plus belle & la plus ample de toutes les lois des Barbares, & l’on y trouve l’ordre judiciaire qui s’observoit du tems de Justinien bien mieux que dans les livres de Justinien même. Cette loi fait encore le fond du droit d’Espagne, & elle se conserva dans le Languedoc longtems après que les Goths eurent cessé d’y dominer, comme il paroît par le second concile de Troyes, tenu par le pape Jean VIII. en 878. elle avoit acquis tant d’autorité qu’on en tira quelque chose pour insérer dans les capitulaires de Charlemagne, comme on voit liv. VI. chap. cclxix. & liv. VII. addit. 4. chap. j.

Loi de Grace ou Loi Chrétienne, Loi évangélique, est celle qui nous a été apportée par Jesus-Christ. Voyez Evangile.

Loi de grands six sols, c’est l’amende de quatre francs bordelois, & au-dessus.

Loi de petits six sols, c’est l’amende qui est au dessous des quatre francs ; il en est parlé dans la coûtume de la Boust, tit. VI. art. 6.

Loi de sept sols six deniers, c’est aussi une amende, coûtume de Lodunois, chap. xxxvij. art. 5. loi de treize sols six deniers. S. Sever, tit. VIII. art. 8. &c.

Loi des Gracques, c’étoient les lois agraires, & autres lois qui furent faites ou renouvellées du tems de Tiberius & Caïus Gracchus freres, qui furent tous deux successivement tribuns du peuple. Pour savoir quel fut le sort de ces lois des Gracques, voyez ce qui est dit ci devant à l’article Lois Agraires, en parlant de la loi licinia, dont les Gracques s’efforcerent de procurer l’exécution.

Lois de la Guerre, jus belli, ce sont certaines maximes du droit des gens, que toutes les nations conviennent d’observer même en se faisant la guerre, comme la suspension des hostilités, pour enterrer les morts ; la sûreté que l’on donne à ceux qui viennent pour porter quelque parole ; de ne point empoisonner les armes, ni les eaux, &c. Voyez Droit de la Guerre, voyez Grotius, de jure belli & pacis.

Loi habeas corpus, est un usage observé en Angleterre, suivant lequel un accusé est élargi en donnant caution de se représenter lorsqu’il ne s’agit point de vol, homicide ni trahison.

Loi Hieronica fut donnée aux Siciliens par le tyran Hiéron ; elle régloit la maniere de payer les dîmes au receveur public, la quantité de froment, le prix, & le tems du payement. Les choses étoient réglées de maniere que le laboureur ne pouvoit frauder le receveur public, ni le receveur exiger du laboureur plus du dixieme ; le rôle des laboureurs devoit être souscrit tous les ans par le magistrat. Cette loi parut si équitable aux Romains, lorsqu’ils se rendirent maîtres de la Sicile, qu’ils laisserent les choses sur le même pié. Voyez Zazius.

Loi Hircia fut faite par Hircius, ami de César, pour exclure de la magistrature tous ceux qui avoient suivi le parti de Pompée. Voyez la 13. Philippique de Cicéron.

Loi Horatia fut l’ouvrage de M. Horatius, surnommé Barbatus, lequel voulut signaler son consulat par la publication de cette loi ; elle ordonnoit que tout ce que le peuple séparé du sénat ordonneroit, auroit la même force que si les patriciens & le sénat l’eussent décidé dans une assemblée générale. Cette loi fut dans la suite renouvellée par plusieurs autres, qui furent de-là surnommées lois horatiennes. Voyez Zazius, & l’hist. de la jurisprud. rom. de M. Terrasson, p. 207.

Loi Hortensia fut faite par Qu. Hortensius, dictateur, lequel ramena le peuple dans Rome ; elle portoit que les plébiscites obligeroient tout le monde de même que les autres lois. Voyez les institutes de Justinien, tit. de jure nat.

Loi Hostilia permit d’intenter l’action pour vol au nom de ceux qui étoient prisonniers chez les ennemis, apud hostes, d’où elle prit son nom. Elle ordonna la même chose à l’égard de ceux qui étoient absens pour le service de l’état, ou qui étoient sous la tutelle de quelque personne semblable. Voyez aux instit. le titre per quos agere possumus. (A)

Loi humaine, (Jurisprud.) les lois humaines sont toutes celles que les hommes font en divers tems, lieux & gouvernemens. Leur nature est d’être soumises à tous les accidens qui arrivent, & de varier à mesure que les volontés des hommes changent, au lieu que les lois naturelles sont invariables. Il y a même des états où les lois humaines ne sont qu’une volonté capricieuse & transitoire du souverain. La force des lois humaines vient de ce qu’on les craint ; mais elles tirent un grand avantage de leur justice, & de l’attention particuliere & actuelle du législateur à les faire observer.

Toutes les lois humaines, considérées comme procédant originairement d’un souverain qui commande dans la société, sont toutes positives ; car, quoiqu’il y ait des lois naturelles qui font la matiere des lois humaines, ce n’est point du législateur humain qu’elles tirent leur force obligatoire, elles obligeroient également sans son intervention, puisqu’elles émanent du souverain maître de la nature.

Il ne faut point faire des conseils de la religion, la matiere des lois humaines. La religion parle du meilleur & du parfait, mais la perfection ne regardant pas l’universalité des hommes ni des choses, elle ne doit pas être l’objet des lois des mortels. Le célibat étoit un conseil du christianisme pour quelques êtres privilégiés. Lorsqu’on en fit une loi pour un certain ordre de gens, il en fallut chaque jour de nouvelles pour reduire les hommes qu’on vouloit forcer à l’observation de celle-ci. Le législateur demandoit plus que ce que la nature humaine comportoit, il se fatigua, il fatigua la société pour faire exécuter à tous les hommes par précepte, par jussion, ce que plusieurs d’entr’eux auroient exécuté comme un conseil de perfection. (D. J.)

Loi Icilia fut faite par L. Icilius, tribun du peuple, cinq années avant la création des décemvirs ; c’étoit une des lois qu’on appella sacrées ; elle comprenoit tous les droits du peuple & ceux des tribuns, peut-être fut-elle surnommée sacrée, parce qu’elle fut faite sur le mont Aventin, qui étoit un mont sacré, sur lequel le peuple s’étoit retiré par mécontentement contre les grands ; & il se peut faire que par imitation, on appelle aussi sacrées les autres lois du même genre ; cependant voyez ce qui est dit au mot Lois sacrées. Tite-Live, lib. III. fait mention de cette loi.

Loi immuable, est celle qui ne peut être changée, telles sont celles qui dérivent du droit naturel & du droit divin, & des regles de la justice & de l’équité, qui sont les mêmes dans tous les tems & dans les pays, au lieu qu’il y a des lois arbitraires qui sont muables, parce qu’elles dépendent de la volonté du législateur, ou des tems & autres conjonctures. (A)

Lois judiciaires ou judicielles, on appelloit ainsi chez les Romains celles qui concernoient les jugemens.

Au commencement, les sénateurs jugeoient seuls avec les consuls & les préteurs, jusqu’à ce que C. Sempronius Gracchus fit une loi appellée de son nom sempronia, qui ordonna que l’on adjoindroit aux trois cens sénateurs six cens chevaliers. Après la mort de Gracchus, Servilius Scepio tâcha de rétablir le sénat dans son autorité. Servilius Glaucia fit ensuite une loi appellée de son nom glaucia, qui restitua aux chevaliers le pouvoir de juger. Plotius Sillanus en fit une autre appellée plotia, qui ordonna que chaque tribu choisiroit dans son corps cinquante personnes, qui seroient juges pendant l’année. Mais L. Cornelius Sylla fit la loi cornelia, qui rendit toute l’autorité des jugemens au sénat, & en exclut les chevaliers. Le préteur M. Aurelius Cotta, fit la loi aurelia, qui commit le droit de juger aux trois ordres ; c’est-à-dire aux sénateurs, aux chevaliers & aux tribuns, appellés ærarii. La loi pompeia que fit environ 16 ans après M. Pompeius, laissa bien aux trois ordres le pouvoir de juger : mais elle régla différemment l’ordre des procédures ; enfin vint la loi julia, que fit César étant alors dictateur, par laquelle il retrancha des jugemens les tribuns, & fit plusieurs autres réglemens, tant sur l’âge & la dignité des juges, que sur la forme des jugemens publics & privés sur ces differentes lois. Voyez Zazius. (A)

Loi des Juifs, voyez Loi de Moïse.

Loi julia, on a donné ce nom à plusieurs lois différentes ; sçavoir, la loi julia agraria, faite par Jules César, pour la distribution des terres. Voyez Lois agraires.

Loi julia de ambitu, pour réprimer les cabales criminelles que quelques-uns employoient pour parvenir à la magistrature.

Loi julia de adulteriis, faite par le même prince, pour infliger des peines à ceux qui seroient coupables d’adultere.

Loi julia de annonâ, qui est aussi du même empereur, prononçoit des peines contre ceux qui étoient coupables de monopole pour le fait des blés.

Loi julia caducaria, voyez Loi caducaria.

Loi julia de civitate, fut faite par Livius Drusus, tribun du peuple, pour attribuer à tout le pays latin droit de cité.

Loi julia de fœnore, faite par Jules-César, régla la maniere dont les débiteurs satisferoient leurs créanciers.

Loi julia de fundo dotali, défendit aux maris d’aliéner les biens dotaux de leurs femmes malgré elles, ou de les hypothéquer quand même elles y consentiroient. Cette loi, qui ne s’appliquoit qu’aux biens d’Italie, fut étendue par Justinien à tous les fonds en général. Voyez la loi unique au code de rei uxoriæ actione.

Loi julia judiciaria, du même prince que la précédente, renferma le pouvoir de juger dans l’ordre des sénateurs & celui des chevaliers, & en exclut les tribuns du peuple.

Loi julia de libertatibus, contenoit un réglement par rapport à ceux qui étoient affranchis de la servitude.

Loi julia de maritandis ordinibus, fut faite par Auguste pour obliger les grands de se marier ; elle décernoit des honneurs & des récompenses à ceux qui avoient femme & enfans, & des peines contre les célibataires & ceux qui n’avoient point d’enfans.

Loi julia miscella, fut faite par Julius Miscellus pour favoriser les mariages. Elle permit pour cet effet à une femme veuve de se remarier, & de prendre ce que son mari lui avoit laissé à condition de ne se point marier, pourvû qu’elle jurât dans l’année qu’elle se remarioit pour procréer des enfans.

Loi julia de majestate, qui étoit de Jules-César, régloit le jugement & les peines du crime de leze-majesté ; elle abolit l’appel au peuple qui étoit auparavant usité dans cette matiere.

Loi julia norbana, faite la cinquieme année du regne de Tibere, régloit la condition des affranchis. D’autres l’appellent junia norbana. Voyez Loi junia.

Loi julia peculatus, faite par le même prince, prononçoit des peines contre ceux qui détournoient les deniers publics, ou l’argent destiné aux sacrifices, ou à la construction d’un édifice sacré.

Loi julia de pecuniis mutuis, étoit la même que l’on connoît sous le nom de loi julia de fœnore.

Loi julia repetundarum, dont Jules-Cesar fut aussi l’auteur, avoit pour objet de réprimer les concussions des magistrats.

Loi julia de sacerdotiis, faite par le même prince, étoient une de celles qui régloient la maniere de conférer le sacerdoce.

Loi julia sumptuaria, qui étoit aussi de Jules-César, avoit pour objet de réprimer le luxe. Voyez ci-après Lois somptuaires.

Loi julia testamentaria, qui est de l’empereur Auguste, avoit pour objet la publicité des testamens & la reconnoissance de la signature des témoins.

Loi julia théatrale, fut un adoucissement que fit Jules-César de la loi roscia, en faveur des pauvres chevaliers, dont il régla la séance au théâtre avec plus de bénignité.

Loi julia de vi, étoit une de celles qui défendoient d’user d’aucune violence, soit pour s’emparer de quelque chose, soit pour empêcher le cours de la justice.

Sur ces différentes lois, surnommées julia, on peut voir Zazius, & les auteurs qu’il indique sur chacune.

Loi junia, l’on en connoît quatre de ce nom, sçavoir la loi junia & licinia, qui fut faite l’an 690 de Rome, par Junius Sillanus, & Licinius Murena, consuls, pour prescrire plus étroitement l’observation des fêtes, & empêcher que ces jours-là, on ne traitât d’aucune affaire avec le peuple, ou qu’on ne fît quelque loi. Cic. Philipp. 5. & l. IV. ad Alticum.

Loi junia annale, annalis, fut ainsi appellée, parce qu’elle régloit le nombre d’années qu’il falloit avoir pour chaque degré de magistrature ; elle fut faite sous le consulat de L. Manlius Accidenus, & de Qu. Fulvius Flaccus.

Loi junia norbana, ainsi nommée de Junius Sillanus & de L. Norbanus Balbus, sous le consulat desquels elle fut faite l’an de grace 21, régloit l’état des affranchis. Elle établit une sorte d’affranchis, appellés latini, qui vivoient libres ; mais qui en mourant retomboient dans la condition servile, & leurs biens retournoient au patron, comme par droit de pécule, ces affranchis n’ayant ni la capacité de tester, ni les autres droits de tester. Il fut dérogé à cette loi d’abord par le S. C. Largien, ensuite par un édit de Trajan. Enfin la loi fut entierement abrogée par Justinien, qui ordonna que tous les affranchis seroient réputés citoyens romains. Voyez aux instit. & le tit. de succ. libert.

Loi junia velleia, ordonna à tout testateur d’instituer tous ceux qui étoient ses héritiers siens, sui, présomptifs, & que si quelqu’un de ses héritiers cessoit d’être sien, il institueroit ses enfans. Elle régloit encore plusieurs autres choses concernant les testamens ; quelques-uns croient que cette loi fut faite par Velleius, le même qui fut auteur du S. C. Velleïen. Voyez Zazius & la note de Carondas.

Loi laetoria, défendoit de prêter à usure aux fils de famille ; cette prohibition fut encore portée plus loin par le sénatusconsulte macédonien, qui annulla indistinctement toutes les obligations des fils de famille pour cause de prêt. Voyez Macédonien.

Lois de Layron, voyez Lois d’Oleron.

Loi lectoria, fut faite par Qu. Lectorius, pour empêcher les mineurs & les personnes en démence d’être trompés ; & pour cet effet, elle ordonna qu’on leur donneroit des curateurs. Cicéron fait mention de cette loi. Lib. III. de divinat. & lib. III. offic.

Loi licinia, il y eut diverses lois de ce nom, sçavoir la loi junia & licinia, dont on a parlé ci-devant à l’article Loi junia.

Loi licinia & ebutia ; ces deux lois furent faites par deux tribuns du peuple pour empêcher les magistrats de s’enrichir aux dépens du public, eux & leur famille. On ne sait précisément le tems où ces lois furent publiées. Il en est parlé dans Cicéron, de lege agrariâ.

Loi licinia de communi dividundo, avoit pour objet les partages. Il en est parlé dans Martien, l. sin. ff. de alienat.

Loi licinia & mutia, fut faite par les consuls Licinius & Mutius Scevola, pour empêcher ceux qui n’étoient pas citoyens romains de demeurer à Rome. Il en est parlé dans Cicéron, lib. III. offic.

Loi licinia agraria, pour le partage des terres. Voyez ci devant Lois agraires.

Loi licinia de consulibus, fut faite par le tribun Licinius Stolo, pour établir que l’un des consuls seroit choisi entre les Plébeïens.

Loi licinia de ære minuendo, qui étoit du même tribun, fut faite pour le soulagement des débiteurs ; elle ordonnoit qu’en déduisant sur le capital ce qui avoit été payé pour les intérêts, le surplus seroit payé en trois ans en trois payemens égaux.

Loi licinia de sacerdotiis, faite par Licinius Crassus, ordonnoit que les prêtres ne seroient plus choisis par leurs colleges, mais par le peuple.

Loi licinia de sodalitiis, qui étoit du même auteur, avoit pour objet de défendre toutes les associations qui pouvoient être faites dans la vue de gagner les suffrages pour parvenir aux honneurs. Ciceron, pro Plantio en fait mention.

Loi licinia sumptuaria, fut faite pour réprimer le luxe. Voyez ci-après Lois somptuaires.

Sur ces différentes lois, voyez Zazius & l’histoire de la jurisprud. rom. par M. Terrasson.

Loi des Lombards, lex Longobardorum, fut d’abord mise en ordre par leur roi Rotharis, & se trouve sous ce titre dans Heroldus : incipiunt leges Longobardorum, quas Rotharis rex solâ memoria & usu retinebat & composuit, jussitque edictum appellari, anno 707 ex quo Longobardi in Italiam venerant. La même chose a été observée par Herman, moine de saint Gal, sous l’an 637 ; dans ces tems, dit-il, Rotharis roi des Lombards, amateur de la justice, quoiqu’il fût arien, écrivit les lois des Lombards ; dans la suite les rois Grimould, la sixieme année de son regne, & Luitprand la premiere année, Ratchis & Aistulphe, réformerent cette loi, & y ajouterent de nouvelles dispositions, qui sont distinguées en leur lieu dans l’édition d’Heroldus. Enfin Charlemagne, Louis le Débonnaire, Lothaire, Pepin, Guy, Othon, Henry & Conrard, empereurs, y firent encore quelques additions, & le tout fut distribué en trois livres, sans néanmoins que l’on sache précisément dans quel tems elle a été mise dans cet ordre ; dans cette derniere rédaction, il se trouve plusieurs choses tirées des capitulaires de Charlemagne, comme on le voit par l’édition qu’en a donnée le docte M. Baluze.

Loi lurconiene, lurconis de ambitu, fut faite par Lurcon, tribun du peuple ; elle avoit pour objet de prévenir les brigues que l’on faisoit pour parvenir à la magistrature. Elle ordonnoit que celui qui dans cette vue auroit répandu de l’argent dans sa tribu, seroit obligé tant qu’il vivroit, de payer une somme considérable à chaque tribu. Ciceron, lib. I. ad Atticum.

Loi mamilia, est la même que la loi manilia, dont il est parlé ci-après ; quelques uns appellent son auteur Mamilius, mais on l’appelle plus communément Manilius.

Loi manilia ; il y en eut trois de ce nom, sçavoir la loi manilia, faite par le tribun Manilius Lemetanus, pour la recherche de tous ceux qui avoient malversé dans la guerre jugurthine, soit en négligeant les decrets du sénat, soit en recevant de l’argent.

Loi manilia, faite par le tribun Manilius, pour commettre au grand Pompée la direction de la guerre contre Mithridate.

Loi manilia de suffragiis libertinorum, fut proposée par le même Manilius, pour accorder à tous les affranchis droit de suffrage dans toutes les tribus ; ce qui ne fut tenté qu’à la faveur d’une émotion populaire ; mais ce trouble ayant été appaisé par le questeur Domitius Æuobarbus, le projet de Manilius fut rejetté. Voyez Ciceron, pro Milone.

Loi manlia, fut faite par le consul M. Manlius Capitolin ; elle ordonnoit que l’on payeroit au tresor public le vingtieme de ceux qui seroient affranchis. Voyez Tite-Live, lib. VII. & Ciceron, ad Atticum, lib. II.

Loi maria ; il y eut deux lois de ce nom, l’une surnommée de pontibus ; cette loi, pour dissiper les brigues, ordonna que les ponts construits dans le champ de Mars, par lesquels on devoit aller au scrutin, seroient rendus si étroits qu’il n’y pourroit passer qu’une personne à la fois. On ne sait si cette loi est du préteur Marius, ou du consul de ce nom.

L’autre loi appellée maria de moneta, parce qu’elle eut pour objet de fixer le prix des monnoies qui étoit alors si incertain, que chacun ne pouvoit sçavoir la valeur de ce qu’il avoit en espece ; elle fut faite par le préteur Marius Gratidianus, dont Catilina porta la tête par toute la ville. Voyez Ciceron, lib. III. de offic.

Loi memnia, établit des peines contre les calomniateurs ; elle dispensoit aussi ceux qui étoient absens pour le service de l’état de comparoître en jugement. Voyez Zazius.

Loi menia, fut faite par le tribun Menius, pour diminuer l’autorité du sénat ; avant cette loi, lorsque le peuple avoit donné son suffrage, le sénat interposoit son autorité ; au lieu que suivant cette loi, le sénat étoit réputé auteur de ce qui se proposoit même avant que le peuple eût donné son suffrage ; de maniere que tout ce que le peuple ordonnoit, paroissoit fait de l’autorité du sénat. Tite-Live, lib. I.

Loi mensia, régloit que l’enfant né d’un pere ou d’une mere étranger, suivroit la condition de celui qui étoit étranger. Voyez Charondas en sa note sur Zazius à la fin.

Loi metella, fut présentée au peuple par le consul Metellus, de l’ordre des censeurs Flaminius & Æmilius, elle concernoit la police du métier de soulon. Voyez Pline, lib. XXXV. cap. xvij.

Lois de la mer, voyez ci-après Lois d’Oleron.

Loi de melée, c’est l’amende dûe pour une rixe. Voyez la coûtume de Mons, chap. xlix.

Loi molmutine, lex molmutina, seu molmucina, vel mulmutina ; ce sont les lois faites en Angleterre par Dunwallo Molmutius, fils de Clothon, roi de Cornouaille, lequel succéda à son pere. Ces lois furent célebres en Angleterre jusqu’au tems d’Edouard, surnommé le Confesseur, c’est-à-dire jusques dans le onzieme siecle. Voyez le glossaire de Ducange, au mot lex molmutina.

Loi mondaine, lex mundana seu terrena ; sous la premiere & la seconde race de nos rois, on appelloit ainsi les lois civiles par opposition au droit canonique ; elle étoit composée du code théodosien pour les Romains, & des codes nationaux des Barbares, suivant lesquels ces derniers étoient jugés tels que les lois saliques & ripuaires pour les Francs, les lois gombettes pour les Bourguignons, &c. Dans les capitulaires & écrits des sept, huit, neuf & dixieme siecles, le terme de loi mondaine signifie les lois propres de chaque peuple, & désigne presque toujours les capitulaires. Voyez M. le président Henaut sous Clovis, & les recherches sur le droit françois, p. 162.

Loi muable, voyez Loi arbitraire.

Loi municipale, est celle qui est propre à une ville ou à une province : ce nom vient du latin municipium, lequel chez les Romains signifioit une ville qui se gouvernoit par ses propres lois, & qui avoit ses magistrats particuliers.

Les lois municipales sont opposées aux lois générales, lesquelles sont communes à toutes les provinces qui composent un état, telles que les ordonnances, édits & déclarations qui sont ordinairement des lois générales ; au lieu que les coutumes des provinces & des villes & autres lieux sont des lois municipales. Voyez Droit municipal. (A)

Loi naturelle, (Morale.) la loi naturelle est l’ordre éternel & immuable qui doit servir de regle à nos actions. Elle est fondée sur la différence essentielle qui se trouve entre le bien & le mal. Ce qui favorise l’opinion de ceux qui refusent de reconnoître cette distinction, c’est d’un côté la difficulté que l’on rencontre quelquefois à marquer les bornes précises qui séparent la vertu & le vice : de l’autre, la diversité d’opinions qu’on trouve parmi les savans mêmes qui disputent entre eux pour savoir si certaines choses sont justes ou injustes, sur-tout en matiere de politique, & enfin les lois diamétralement opposées les unes aux autres qu’on a faites sur toutes ces choses en divers siecles & en divers pays ; mais comme on voit dans la peinture, qu’en détrempant ensemble doucement & par degrés deux couleurs opposées, il arrive que de ces deux couleurs extrèmes, il en résulte une couleur mitoyenne, & qu’elles se mêlent si bien ensemble, que l’œil le plus fin ne l’est pas assez pour marquer exactement où l’une finit & l’autre commence, quoique pourtant les couleurs soient aussi différentes l’une de l’autre qu’il se puisse : ainsi quoiqu’en certains cas douteux & délicats, il puisse se faire que les confins ou se fait la séparation de la vertu & du vice, soient très-difficiles à marquer précisément, de sorte que les hommes se sont trouvés partagés là dessus, & que les lois des nations n’ont pas été par-tout les mêmes, cela n’empêche pas qu’il n’y ait réellement & essentiellement une très-grande différence entre le juste & l’injuste. La distinction éternelle du bien & du mal, la regle inviolable de la justice se concilie sans peine l’approbation de tout homme qui réfléchit & qui raisonne ; car il n’y a point d’homme à qui il arrive de transgresser volontairement cette regle dans des occasions importantes, qui ne sente qu’il agit contre ses propres principes, & contre les lumieres de sa raison, & qui ne se fasse là-dessus de secrets reproches. Au contraire, il n’y a point d’homme qui, après avoir agi conformément à cette regle, ne se sache gré à lui-même, & ne s’applaudisse d’avoir eu la force de résister à ces tentations, & de n’avoir fait que ce que sa conscience lui dicte être bon & juste : c’est ce que saint Paul a voulu dire dans ces paroles du chap. ij. de son épître aux Romains : que les Gentils qui n’ont point de loi, font naturellement les choses qui sont de la loi, & que n’ayant point de loi, ils sont leur loi à eux-mêmes, qu’ils montrent l’œuvre de la loi écrite dans leurs cœurs, leur conscience leur rendant témoignage, & leurs pensées entre elles s’accusant ou s’excusant.

Je ne disconviens pas qu’il n’y ait des gens qui, gâtés par une mauvaise éducation, perdus de débauche, & accoutumés au vice par une longue habitude, ont furieusement dépravé leurs principes naturels, & pris un tel ascendant sur leur raison, qu’ils lui imposent silence pour n’écouter que la voix de leurs préjugés, de leurs passions & de leurs cupidités. Ces gens plûtôt que de se rendre & de passer condamnation sur leur conduite, vous soutiendront impudemment, qu’ils ne sauroient voir cette distinction naturelle entre le bien & le mal qu’on leur prêche tant ; mais ces gens-là, quelque affreuse que soit leur dépravation, quelque peine qu’ils se donnent pour cacher au reste des hommes les reproches qu’ils se font à eux-mêmes, ne peuvent quelquefois s’empêcher de laisser échapper leur secret, & de se découvrir dans de certains momens où ils ne sont point en garde contre eux-mêmes. Il n’y a point d’homme en effet si scélérat & si perdu, qui, après avoir commis un meurtre hardiment & sans scrupule, n’aimât mieux, si la chose étoit mise à son choix, n’avoir obtenu le bien par d’autres voies que par des crimes, fût-il sûr de l’impunité. Il n’y a point d’homme imbu des principes d’Hobbes, & placé dans son état de nature, qui, toutes choses égales, n’aimât beaucoup mieux pourvoir à sa propre conservation, sans être obligé d’ôter la vie à tous ses semblables, qu’en la leur ôtant On n’est méchant, s’il est permis de parler ainsi, qu’à son corps défendant, c’est-à-dire, parce qu’on ne sauroit autrement satisfaire ses desirs & contenter ses passions. Il faut être bien aveuglé pour confondre les forfaits & les horreurs avec cette vertu qui, si elle étoit soigneusement cultivée, feroit voir au monde la réalité des traits ingénieux dont les anciens poëtes se sont servis pour peindre l’âge d’or.

La loi naturelle est fondée, comme nous l’avons dit, sur la distinction essentielle qui se trouve entre le bien & le mal moral, il s’en suit que cette loi n’est point arbitraire. « La loi naturelle, dit Cicéron, liv. II. des lois, n’est point une invention de l’esprit humain, ni un établissement arbitraire que les peuples aient fait, mais l’impression de la raison éternelle qui gouverne l’univers. L’outrage que Tarquin fit à Lucrece, n’en étoit pas moins un crime, parce qu’il n’y avoit point encore à Rome de loi écrite contre ces sortes de violences. Tarquin pécha contre la loi naturelle qui étoit loi dans tous les tems, & non pas seulement depuis l’instant qu’elle a été écrite. Son origine est aussi ancienne que l’esprit divin : car la véritable, la primitive, & la principale loi, n’est autre que la souveraine raison du grand Jupiter ».

Que ce soit donc une maxime pour nous incontestable, que les caracteres de la vertu sont écrits au fond de nos ames : de fortes passions nous les cachent à la vérité quelques instans ; mais elles ne les effacent jamais, parce qu’ils sont ineffaçables. Pour les comprendre, il n’est pas besoin de s’élever jusqu’aux cieux, ni de percer dans les abymes ; ils sont aussi faciles à saisir que les principes des arts les plus communs : il en sort de toutes parts des démonstrations, soit qu’on réfléchisse sur soi-même, ou qu’on ouvre les yeux sur ce qui s’offre à nous tous les jours. En un mot, la loi naturelle est écrite dans nos cœurs en caracteres si beaux, avec des expressions si fortes & des traits si lumineux, qu’il n’est pas possible de la méconnoître.

Loi nummaria, défendit à tout particulier de fabriquer des pieces de monnoie. Voyez Zazius sur la loi Cornelia de falso. (A)

Loi ogulnia, fut faite l’an de Rome 453 par les deux tribuns Quintus & M. Ogulnius ; elle portoit, que quand il y auroit quatre augures & quatre pontifes, & que l’on voudroit augmenter le nombre des prêtres, on choisiroit quatre pontifes & cinq augures, tous parmi les plébéïens, au lieu qu’auparavant le ministere du sacerdoce étoit affecte aux seuls patriciens. Voyez Zazius sur la loi Julia de sacerdotiis. (A)

Lois d’Oleron, appellées quelquefois par corruption lois de Layron ou droits de Layron, & connues aussi sous le titre de coutumes de la mer, sont des lois faites pour les habitans de l’île d’Oleron, lesquels depuis 6 à 7 cens ans ont toujours passé pour bons hommes de mer ; de sorte que les lois particulieres qui avoient été faites pour eux, par rapport à la navigation, furent regardées comme les coutumes de la mer, sans doute parce qu’il n’y en avoit point d’autres alors, la premiere ordonnance de la marine n’étant que de 1681. Selden dans sa dissertation sur fleta, p. 532 & 539, tient que Richard I. roi d’Angleterre, fut l’auteur de ces lois ; mais ce sentiment est réfuté par Denis Morisot & par Cleyrac, lequel fit imprimer ces lois à Rouen & ensuite à Bordeaux l’an 1647 ; ceux-ci assurent que ces lois furent faites par Eléonore, duchesse d’Aquitaine, à son retour de Syrie, & qu’on les appella le rouleau d’Oleron, qu’elles furent ensuite augmentées par Richard I. fils d’Eléonore. M. Ducange croit que ces additions ne différoient point de la charte du même Richard, intitulée Statuta illorum qui per mare ituri erunt.

Ces lois ont été traduites en Anglois, ce qui fait voir combien on en faisoit de cas & d’usage. (A)

Loi Oppia, dont Oppius tribun du peuple, fut l’auteur du tems de la seconde guerre punique, fut faite pour réprimer le luxe des dames Romaines ; elle défendit qu’aucune femme portât plus d’une demi-once d’or, & qu’elle eût un habit de diverses couleurs, ou qu’elle se fît voiturer dans un char par la ville ou à mille pas de distance, à moins que ce ne fût pour aller aux sacrifices publics. Dans la suite les tribuns Valérius & Fundanius demanderent l’abrogation de cette loi ; le consul Portius Caton parla pour maintenir la loi ; le tribun Valérius insista ; enfin au bout de vingt ans cette loi fut abrogée par ordre du peuple à la grande satisfaction des dames. Voyez Tite-Live, lib. XXXVII. (A)

Loi Orchia, ainsi nommée du tribun Orchius, fut la premiere loi somptuaire des Romains ; elle limita le nombre des convives, mais ne fixa rien pour la dépense. Voyez Lois Didia, Loi Fannia, Lois somptuaires. (A)

Loi de l’Ostracisme, c’est-à-dire la peine de l’ostracisme ou bannissement que l’on prononçoit à Athènes contre ceux dont la fortune ou le crédit donnoit de l’ombrage aux autres citoyens. Voyez Ostracisme.

Loi outrée, dans l’ancienne coutume de Normandie, étoit lorsque quelque différend étoit terminé par enquête ou brief. Quelques-uns ont cru que loi outrée étoit la même chose que loi de bataille ou duel, appellé combat à outrance ; mais cette explication ne peut s’accorder avec ce qui est dit dans le chap. xliij. de l’ancienne coutume de Normandie, où il est parlé de loi outrée pour les mineurs, puisque ceux-ci avoient terme jusqu’à vingt-un ans pour les querelles qui se terminoient par bataille ; ainsi par loi outrée, on doit entendre, comme Terrien, les brefs & enquêtes en matiere possessoire, de sorte que loi outrée n’est proprement autre chose qu’une loi apparoissant. Voyez le Glossaire de M. de Lauriere au mot Loi. Voyez Loi apparente. (A)

Loi Papia, il y en eut deux de ce nom ; savoir

Loi Papia de jure civitatis, ainsi nommée d’un certain Papius qui en fut l’auteur un peu avant le tems des Gracques ; elle concernoit les étrangers qui usurpoient les droits de cité. Voyez Cicéron, lib. III. Officior.

Loi Papia Popœa de maritandis ordinibus, qui fut aussi appellé loi Julia, fut faite par Papius Popœus, consul, sous l’autorité d’Auguste. Voyez ci-devant Loi Julia de maritandis ordinibus, & Zazius. (A)

Loi Papyria, il y eut cinq différentes lois de ce nom, qui furent faites par différens tribuns ou consuls surnommés Papyrius ; savoir la

Loi Papyria de sacrandis agris, fut faite par Papyrius, qui défendoit de consacrer aucune maison, terre ou autel sans le consentement du peuple.

Loi Papyria de nexis dont L. Papyrius, consul, fut l’auteur, défendit aux créanciers de tenir chez eux leurs débiteurs liés & enchaînés, comme cela étoit permis par la loi des douze tables.

Loi Papyria de refectione, Trib. pleb. fut faite par Papyrius Carbon, tribun, homme séditieux, pour autoriser à créer tribun la même personne autant de fois qu’elle le voudroit bien, ce qui étoit auparavant défendu par plusieurs lois.

Loi Papyria monetaria, fut publiée après la seconde guerre punique pour la fabrication des sols appellés semiunciales ; ce fut un nommé Papyrius qui en fut l’auteur, mais on ne sait quel est celui de la race papyrienne qui eut part à cette loi.

Loi Papyria tabellaria qui étoit du même auteur, regloit la maniere de donner les suffrages. Voyez ci-après Lois tabellaires. (A)

Loi particuliere, est opposée à loi générale ; mais ce terme se prend en deux sens différens, une coutume locale, un statut d’une ville ou d’une communauté sont des lois particulieres, en tant qu’elles sont des exceptions à la coutume générale de la province ; on entend aussi quelquefois par loi particuliere, celle qui est faite précisément pour un certain cas à la différence des autres lois, qui contiennent seulement des regles générales que l’on applique par interprétation aux divers cas qui y ont rapport. (A)

Loi Pedia, fut faite par le consul Pedius, contre les meurtriers de César, elle prononça contr’eux la peine du bannissement. Voyez Suétone, in Nerone.

Loi pénale, (Droit nat. & polit.) loi faite pour prévenir les délits & les crimes, & les punir.

Les lois pénales, ne sont pas seulement celles qui sont accompagnées de menaces expresses d’une certaine punition ; mais encore celles qui laissent quelquefois à la prudence des juges, le soin de déterminer la nature, & le degré de la peine sur laquelle ils doivent prononcer.

Comme il est impossible que les lois écrites ayent prévû tous les cas de délits ; les maximes de la raison, la loi naturelle, le climat, les circonstances & l’esprit de modération, serviront de boussole & de supplément à la loi civile ; mais on ne sauroit trop restraindre la rigueur des peines, sur-tout capitales ; il faut que la loi prononce.

Lors même que les lois pénales sont positives sur la punition des crimes, il est des cas où le souverain est le maître de suspendre l’exécution de ces lois, sur-tout lorsqu’en le faisant, il peut procurer autant ou plus d’utilité, qu’en punissant.

S’il se trouve d’autres voies plus commodes d’obtenir le but qu’on se propose, tout dicte qu’il faut les suivre.

Ce n’est pas tout, les lois pénales doivent avoir de l’harmonie, de la proportion entr’elles, parce qu’il importe d’éviter plutôt un grand crime qu’un moindre, ce qui attaque plus la société, que ce qui la choque le moins. C’est un grand mal en France, de faire subir la même peine à celui qui vole sur un grand chemin, qu’à celui qui vole & assassine ; on assassine toujours, car les morts, disent ces brigands, ne racontent rien. En Angleterre on n’assassine point, parce que les voleurs peuvent espérer d’être transportés dans des colonies, & jamais les assassins.

Je n’ai pas besoin de remarquer que les lois pénales en fait de religion, sont non-seulement contraires à son esprit, mais de plus elles n’ont jamais eu d’effet, que comme destruction.

Enfin, la premiere intention des lois pénales, est de prévenir le crime, & non pas de le punir. Si on les exécute à la rigueur, si l’on emploie la moindre subtilité d’esprit pour tirer des conséquences, ce seront autant de fléaux qui tomberont sur la tête du peuple. Laissez donc les lois pénales, je ne dirai pas dormir tout-à-fait, mais reposer très-souvent. S’il est permis aux juges, dit Bacon, de montrer quelque foiblesse, c’est en faveur de la pitié. (D. J.)

Loi Pesulania, que quelques-uns ont appellée par corruption Pesolonia, & Cujas loi Solonia, mais sans fondement, fit faire probablement par quelque tribun du peuple nommé, Pesulanus ou Pesulanius ; elle avoit établi au sujet des chiens en particulier, ce que la loi des douze tables avoit reglé pour le dommage causé par toutes sortes de bêtes en général, c’est-à-dire, que si le chien avoit causé du dommage dans un chemin ou lieu public, que le maître du chien étoit tenu du dédommagement, sinon de livrer le chien ; mais par l’édit des édiles dont Justinien fait mention en ses institutes, le maître de l’animal fut astreint à réparer le dommage, en payant une somme plus ou moins forte, selon le délit. Voyez le jurisconsulte Paulus, recept. sentent. lib. I. tit. 15. §. 1.

Loi Petilia de ambitu, fut faite par le tribun Petilius vers l’an de Rome 397, ce fut la premiere loi que l’on fit pour réprimer les brigues que l’on employoit pour parvenir à la magistrature, Voyez Tite-Live, lib. VII.

Loi Petilia de peculatu, fut faite contre ceux qui s’étoient rendus coupables de péculat, lors de la guerre que l’on avoit faite en Asie contre le roi Antiochus. Voyez Tite-Live, lib. XXXVIII.

Loi Petronia, fut faite par un tribun du peuple nommé Petronius ; on ignore quel étoit son principal objet, tout ce que l’on en sait est qu’elle défendoit aux maîtres de livrer arbitrairement leurs esclaves pour combattre avec les bêtes, & qu’elle ordonnoit que celui qui n’auroit pas prouvé l’adultere qu’il avoit mis en avant, ne pourroit plus intenter cette accusation. Voyez Zazius.

Loi de Philippe, lex Philippi ; on appella de ce nom une loi agraire faite par un certain Philippus, tribun du peuple. Voyez Valere-Maxime & Lois agraires.

Loi Plantia, déclaroit que les choses usurpées par force n’étoient pas sujettes à l’usucapion ; on croit qu’elle fut faite sous le consulat de Lepidus & de Catulus. Voyez ci-après Loi plotia de judiciis.

Loi Plotia, il y en eut deux de ce nom.

Loi Plotia agraria, fut une des lois faites pour le partage des terres. Voyez Zazius sur les lois agraires.

Loi Plotia de judiciis, étoit une des lois qui déféroient le pouvoir judiciaire aux sénateurs conjointement avec les chevaliers, d’autres écrivent loi Plautia ; & en effet, on tient qu’elle fut faite par Plautius Sillanus, tribun du peuple. Voyez Zazius.

Loi Pleniere, lex plenaria, étoit la même chose en Normandie, que loi apparoissant ; les lois de Guillaume le conquérant disent plener lei.

Loi Politique, (Droit polit.) les lois politiques, sont celles qui forment le gouvernement qu’on veut établir ; les lois civiles sont celles qui le maintiennent.

La loi politique a pour objet, le bien & la conservation de l’état, considéré politiquement en lui-même, & abstraction faite des sociétés renfermées dans cet état, lesquelles sont gouvernées par les lois qu’on nomme civiles. Ainsi, la loi politique est le cas particulier où s’applique la raison humaine pour l’intérêt de l’état qui gouverne.

Les lois politiques décident seules, si le domaine de l’état est aliénable ou non : seules elles reglent les successions à la couronne.

Il est aussi nécessaire qu’il y ait un domaine pour faire subsister un état, qu’il est nécessaire qu’il y ait dans l’état des lois civiles qui reglent la disposition des biens des particuliers. Si donc on aliene le domaine, l’état sera forcé de faire un nouveau fonds pour un autre domaine ; mais cet expédient renverse le gouvernement politique, parce que par la nature de la chose, à chaque domaine qu’on établira, le sujet payera toujours plus, & le souverain tirera toujours moins. En un mot, le domaine est nécessaire, & l’aliénation ne l’est pas.

L’ordre de succession dans une monarchie, est fondée sur le bien de l’état, qui demande pour la conservation de cette monarchie, que cet ordre soit fixé. Ce n’est pas pour la famille régnante que cet ordre est établi ; mais parce qu’il est de l’intérêt de l’état, qu’il y ait une famille régnante. La loi qui regle la succession des particuliers est une loi civile, qui a pour objet l’intérêt des particuliers. Celle qui regle la succession à la monarchie, est une loi politique, qui a pour objet l’avantage & la conservation de l’état. Voyez Succession à la couronne, (Droit polit.)

Quant aux successions des particuliers, les lois politiques les reglent conjointement avec les lois civiles ; seules elles doivent établir dans quel cas la raison veut que cette succession soit déférée aux enfans, & dans quel cas il faut la donner à d’autres ; car quoique l’ordre politique demande généralement que les enfans succedent aux peres, il ne le veut pas toujours ; en un mot, l’ordre des successions ne dépend nullement des principes du droit naturel.

D’un autre côté, il ne faut pas décider par les lois politiques ou civiles, des choses qui appartiennent au droit des gens. Les lois politiques demandent, que tout homme soit soumis aux tribunaux criminels ou civils du pays où il est, & à l’animadversion du souverain. Le droit des gens a voulu que les ambassadeurs ne dépendissent pas du souverain chez lesquels ils sont envoyés, ni de ses tribunaux.

Pour ce qui regarde les lois politiques en fait de religion, en voici le principe général. Elles doivent soutenir la religion dominante, & tolérer celles qui sont établies dans l’état, & qui contribuent à le faire fleurir.

Enfin, les lois politiques doivent avoir toutes les conditions, toutes les qualités pour le fonds & le style, qui sont requises dans les lois civiles, & dont nous avons fait le détail au mot Loi civile. (D. J.)

Loi Pompeia : il y en eut six de ce nom qui furent faites par les Pompeius ; savoir la

Loi Pompeia de ambitu, fut faite pour éloigner les brigues que l’on employoit pour s’élever à la magistrature.

Loi Pompeia judiciaria, cette loi ordonna que les juges seroient choisis également dans les trois ordres qui composoient le peuple romain.

Loi Pompeia de coloniis, qui étoit de Cneius Pompeius Strabon, attribua aux latins la capacité de parvenir à la magistrature, & de jouir de tous les autres droits de cité.

Loi Pompeia parricidii dont le grand Pompée fils du précédent fut l’auteur, regla la peine du parricide.

Il y eut une autre loi du même Pompée qu’il donna en Bithynie, qui regloit entr’autres choses l’âge auquel on pourroit être admis à la magistrature ; sur toutes ces lois, voyez Zazius.

Loi Portia, fut une de celles que l’on fit pour maintenir les privileges des citoyens Romains, celle-ci prononçoit des peines graves contre ceux qui auroient tué, ou même seulement frappé un citoyen Romain. Voyez Ciceron, pro Rabirio.

Loi Positive, est celle qui a été faite, elle est opposée à la loi naturelle qui n’est point proprement une loi en forme, & qui n’est autre chose que la droite raison. La loi positive se sous-divise en loi divine & loi humaine. Voyez Droit positif.

Loi prédiale, le terme de loi est pris ici pour condition, ou bien c’est l’acte par lequel on a imposé & imprimé quelque qualité & condition à un héritage qui l’affectent en lui-même & lui demeurent en quelques mains qu’il passe ; par exemple, ut ager sit vectigalis vel emphyteuticus vel censualis. Voyez Loyseau, du déguerpissement, liv. X. ch. iij. n°. 2.

Loi probable & monstrable, on appelloit ainsi anciennement celle qui étoit appuyée du serment d’une ou de plusieurs personnes.

Loi publiliennes, on appella ainsi trois lois que fit le dictateur Q. Publilius, l’une pour ordonner que les plébiscites obligeroient tous les Romains ; l’autre portant, que le sénat seroit réputé le seul auteur de toutes les lois qui se feroient dans les contrées avant que l’on eût pris les suffrages. La premiere portoit, que l’un des censeurs pourroit être pris entre les plébiciens ; ces lois furent depuis englobées dans d’autres. Voyez Tite-Live, liv. VIII.

Loi Pupia, que l’on croit de Pupius Pison, tribun du peuple, régla le tems où le sénat devoit tenir ses séances. Voyez Zazius & Charondas en sa note au même endroit.

Loi Quintia, Agraria, étoit une des lois agraires. Voyez ci-devant Lois agraires.

Loi Regia, est celle par laquelle le peuple Romain accorda à Auguste, au commencement de son empire, le droit de législation. Ulpien fait mention de cette loi en ces termes : Quod principi placuit legis habet vigorem, & ajoûte que cela eut lieu en conséquence de la loi Regia, par laquelle le peuple lui remit tout le pouvoir qu’il avoit : quelques auteurs ont prétendu que cette loi n’avoit jamais existé, & qu’elle étoit de l’invention de Tribonien, mais il faudroit donc dire aussi qu’il a supposé le passage d’Ulpien qui en fait mention. Cette loi fut renouvellée en faveur de chaque empereur, & notamment du tems de Vespasien ; suivant les fragmens que l’on en a trouvés, elle donnoit à l’empereur le droit de faire des traités & des alliances avec les ennemis & avec les peuples dépendans ou indépendans de l’empire ; il pouvoit, suivant cette même loi, assembler & congédier le sénat à sa volonté, & faire des lois qui auroient la même autorité que si elles avoient émané du sénat & du peuple, il avoit tout pouvoir d’affranchir sans observer les anciennes formalités ; la nomination aux emplois & aux charges lui étoient dévolues, & il lui étoit libre d’étendre ou de resserrer les limites de l’empire, enfin, de regler tout ce qui regardoit le bien public & les intérêts des particuliers ; ce pouvoir ne différant en rien de celui qu’avoient les rois de Rome, ce fut apparamment ce qui fit donner à cette loi le nom de regia. Voyez l’hist. de la Jurisp. rom. par M. Terrasson, page 240. & suivantes. Voyez Lois royales. (A)

Loi Rhodia de jactu, est une loi du digeste qui décide, qu’en cas de péril imminent sur mer, s’il est nécessaire de jetter quelques marchandises pour alléger le vaisseau, la perte des marchandises doit être supportée par tous ceux dont les marchandises ont été conservées.

Cette loi fut nommée Rhodia, parce que les Romains l’emprunterent des Rhodiens, qui étoient fort expérimentés dans tout ce qui a rapport à la navigation.

Elle fut confirmée par Auguste & ensuite par Antonin, à la reserve de ce qui pouvoit être contraire à quelque loi romaine. Voyez au digeste le titre de lege Rhodiâ de jactu. (A)

Loi des Ripuariens ou Ripuaires, lex Ripuariorum, n’est quasi qu’une répétition de la loi Salique, aussi l’une & l’autre étoient-elles pour les Francs : on croit que la loi Salique étoit pour ceux qui habitoient entre la Meuse & la Loire, & la loi Ripuaire pour ceux qui habitoient entre la Meuse & le Rhin ; elle fut rédigée sous le roi Théodoric étant à Châlons-sur-Marne avec celles des Allemands & des Bavarois ; il y avoit fait plusieurs corrections, principalement de ce qui n’étoit pas conforme au christianisme. Childebert, & ensuite Clotaire II. la corrigerent, & enfin Dagobert la renouvella & la mit dans sa perfection, comme il a été dit en parlant de la loi des Bavarois. Pour juger du génie de cette loi, nous en citerons seulement deux dispositions : il en coûtoit cent sols pour avoir coupé une oreille à un homme, & si la surdité ne suivoit pas, on en étoit quitte pour cinquante sols. Le chap. iij. de cette loi permet au meurtrier d’un évêque de racheter son crime avec autant d’or que pesoit une tunique de plomb de la hauteur du coupable, & d’une épaisseur déterminée : ainsi ce n’étoit pas tant la qualité des personnes, ni les autres circonstances du délit, qui regloient la peine, c’étoit la taille du coupable ; quelle ineptie ! Il est parlé de la loi des Ripuariens dans les lois d’Henri, roi d’Angleterre. (A)

Lois Romaines, on donna ce nom à un abrégé du code Théodosien, qui fut fait par l’ordre d’Alaric, roi des Goths qui occupoient l’Espagne, & une grande partie de l’Aquitaine ; il fit faire cet abrégé par Anien son chancelier, qui le publia en la ville d’Aire en Gascogne : cette loi n’étoit pas pour les Goths, mais pour les Romains.

On entend aussi par lois romaines en général, toutes les lois faites pour les Romains, & qui sont renfermées dans le corps de droit civil. Voy. Droit romain & Code.

Loi Romuleia, fut faite par un des triumvirs nommé Romuleius, elle institua le college des ministres & des sacrifices, appellés epulones, & déféra cet emploi aux triumvirs. Voyez Tite-Live, lib. III. Décad. 4.

Loi Roscia, il y en eut deux de ce nom, savoir la

Loi Roscia, qui étoit une des lois frumentaires, dont Cicéron fait mention dans son livre II. à Atticus.

Loi Roscia théâtrale, dont L. Roscius, tribun du peuple, fut l’auteur, pour donner aux chevaliers les quatorze premiers rangs au théâtre V. Cicéron pro Murenâ. Voyez aussi Lois théatrales.

Loi royale, en Danemark, est une loi faite en 1660, qui confirme la nouvelle puissance qui fut alors déférée à Charles Gustave, puissance bien plus étendue que celle qu’avoient eu jusqu’alors les rois ses prédécesseurs, avant la révolution arrivée en 1660. Le gouvernement de Danemark, semblable en ce point à tous les gouvernemens gothiques, étoit partagé entre un roi électif, les grands de la nation ou le sénat, & les états. Le roi n’avoit presque point d’autre droit que celui de présider au sénat & de commander les armées : les rois qui précéderent Frédéric III. avoient souscrit à des capitulations qui limitoient leur pouvoir ; mais Charles Gustave, roi de Suede, entra en Danemark sous prétexte de secourir le roi contre le sénat &, la nation blessée de la supériorité que s’attribuoit la noblesse, se réunit pour déférer au roi une puissance absolue & héréditaire : on rendit au roi les capitulations qui limitoient son pouvoir, & l’on s’obligea par serment de maintenir la nouvelle puissance que l’on venoit de déférer au roi.

La loi qui la confirme, & qu’on appelle la loi royale, contient quarante articles, dont les principaux sont, que les rois héréditaires de Danemark & de Norwege seront regardés par leurs sujets comme les seuls chefs suprèmes qu’ils ayent sur la terre ; qu’ils seront au-dessus de toutes les lois humaines, & ne reconnoîtront dans les affaires civiles & ecclésiastiques d’autre supérieur que Dieu seul ; qu’ils jouiront du droit suprème de faire & d’interpreter les lois, de les abroger, d’y ajoûter ou d’y déroger ; de donner ou d’ôter les emplois à leur volonté ; de nommer les ministres & tous les officiers de l’état ; de disposer & des forces & des places du royaume ; de faire la guerre avec qui & quand ils jugeront à propos ; de faire des traités ; d’imposer des tributs ; de déterminer & regler les cérémonies de l’office divin ; de convoquer des conciles ; & enfin, suivant cette loi, le roi réunit en sa personne tous les droits éminens de la souveraineté tels qu’ils puissent être, & les exerce en vertu de sa propre autorité. La loi le déclare majeur dès qu’il est entré dans sa quatorzieme année, dès ce moment il déclare publiquement lui-même qu’il est son maître, & qu’il ne veut plus se servir de tuteur ni de curateur ; il n’est tenu ni à prêter serment, ni à prendre aucun engagement, sous quelque nom ou titre que ce puisse être, soit de bouche ou par écrit envers qui que ce soit. Le même pouvoir doit appartenir à la reine héréditaire ; si dans la suite des tems la couronne passoit à quelque princesse du sang royal ; si quelqu’un, de quelque rang qu’il fût, osoit faire ou obtenir quelque chose qui fût contraire à cette autorité absolue, tout ce qui aura été ainsi accordé & obtenu sera nul & de nul effet, & ceux qui auroient obtenu de pareilles choses seront punis comme coupables du crime de lése majesté. Tel est le précis de cette loi, la seule à laquelle il ne soit pas permis au roi lui-même de déroger. Voyez les Lettres sur le Danemark, imprimées à Geneve, & l’extrait qui en est fait dans l’année littéraire, année 1758, let. XIV. p. 314. & suiv. (A)

Loi Rupilia, fut donnée aux Siciliens par P. Rupilius, lequel après avoir été employé à la recette des revenus publics, fut fait consul, & délivra la Sicile de la guerre des brigands & des transfuges ; elle regloir la forme des jugemens & la compétence des juges. Voyez Cicéron, Verrinâ quartâ.

Loi sacrée, (Hist. rom.) en latin lex sacrata ; les Romains appelloient lois sacrées, dit Grotius, les lois à l’observation desquelles le peuple Romain s’étoit lui-même astreint par la religion du serment. Il falloit, à la vérité, que l’autorité du peuple intervînt pour faire une loi sacrée ; mais toute loi dans l’établissement de laquelle le peuple étoit intervenu, n’étoit pas pour cela sacrée, à moins qu’elle ne portât expressément, que la tête de quiconque la violeroit, seroit devouée aux dieux, ensorte qu’il pourroit être impunément tué par toute autre personne ; car c’est ce qu’on entendoit par caput sacrum sancire, ou consecrare. Voyez Paul Manus dans son traité de Legibus ; Festus au mot sacratæ leges, & Perizonii animadversiones. (D. J.)

Lois sacrées ; on donna ce nom à certaines lois, qui pour peine des contraventions que l’on y commettroit, ordonnoient que le contrevenant & toute sa famille & son argent, seroient consacrés à quelqu’un des dieux. Voyez Cicéron pro Cornelio Balbo.

La qualité de sacrées que l’on donnoit à ces lois, étoit différente de ce qu’on entend par lois saintes. Voyez ci-après Lois saintes. Voyez aussi Loi Cilia. (A)

Lois sacrées des Mariages, (Hist. & Jurisprud. rom.) leges sacratæ nuptiarum ; c’est une sorte d’hypallage, pour dire, lois des mariages sacrés.

Par les mariages sacrés des Romains, il faut entendre, ou les mariages qui se pratiquoient par la confarréation, laquelle se faisoit avec un gâteau de froment, en présence de dix témoins, & avec certains sacrifices & des formules de prieres ; d’où vient que les enfans qui naissoient de ce mariage s’appelloient, confarreatis parentibus geniti : ou bien il faut entendre par mariages sacrés, ceux qui se faisoient ex coemtione, par un achat mutuel, d’où les femmes étoient nommées matres familias, meres de familles. Ces deux sortes de mariages sont également appellés par les anciens jurisconsultes, justæ nuptiæ, pour les distinguer d’une troisieme sorte de mariage, qui s’appelloit matrimonium ex usu, concubinage.

Les lois des mariages sacrés portoient, que la femme, ainsi mariée, entreroit en communauté de sacrifices & de biens avec son mari, sacrorum, fortunarumque esset socia ; qu’elle seroit la maîtresse de la famille, comme lui en étoit le maître ; qu’elle seroit héritiere de ses biens en portion égale, comme un de ses enfans, s’ils en avoient de leur mariage, si non, qu’elle hériteroit de tout, ex asse verò, si minùs.

Cette communauté, cette société de sacrifices & de biens, dans laquelle la femme entroit avec son mari, doit s’entendre des sacrifices privés de certaines familles, qui étoient en usage parmi les Romains, comme du jour de la naissance, des expiations, & des funérailles, à quoi même étoient tenus les héritiers & les descendans des mêmes familles. De-là vient que Plaute a dit, qu’il lui étoit échu un grand héritage, sans être obligé à aucun sacrifice de famille, se hereditatem adeptum esse, sine sacris, effertissimam.

La femme unie juxtà sacratas leges, ou pour m’exprimer avec les jurisconsultes, justis nuptiis, devenoit maîtresse de la famille, comme le mari en étoit le maître.

On sait qu’après la conclusion du mariage la mariée se présentoit sur le seuil de la porte, & qu’alors on lui demandoit qui elle étoit ; elle répondoit à cette question, ego sum Caïa, je suis Caïa, parce que Caïa Cecilia, femme de Tarquin l’ancien, avoit été fort attachée à son mari & à filer ; ensuite on lui présentoit le feu & l’eau, pour lui marquer qu’elle devoit avoir part à toute la fortune de son mari. Plutarque nous apprend encore, dans la troisieme question romaine, que le mari disoit à son épouse, lorsqu’elle le recevoit à son tour chez elle, ego sum Caïus, je suis Caïus, & qu’elle lui repliquoit de nouveau, ego Caïa, & moi je suis Caïa. Ces sortes d’usages peignent les mœurs, ils se sont perdus avec elles. (D. J.)

Lois saintes. Les lois sont ainsi appellées, parce que le respect leur est dû, sub sanctione pœnæ ; c’est pourquoi elles sont mises au nombre des choses que l’on appelle en Droit res sanctæ. Voyez aux instit. le tit. de rev. divis. & les annotateurs. (A)

Loi de saint Benoist ; c’est ainsi que l’on appelle vulgairement dans le pays de Labour le droit que les habitans de chaque paroisse ont de s’assembler pour leurs affaires communes, & de faire des statuts particuliers pour leurs bois padouans & paturages, pourvu que leurs délibérations ne soient pas préjudiciables au bien public & aux ordonnances du roi. Ce droit est ainsi appellé dans les coutumes de Labour, tit. XX. article 4 & 5. Voyez aussi celle de Sole, tit. I. art. 4. & 5 ; & la conférence des eaux & forêts, titre XXV. article 7. (A)

Loi salique, lex salica ou plûtôt pactum legis salicæ, appellée aussi lex Francorum seu francica ; étoit la loi particuliere des Francs qui habitoient entre la Meuse & le Rhin, comme la loi des Ripuaires étoit celle des Francs qui habitoient entre la Loire & la Meuse.

Il y a beaucoup d’opinions diverses sur l’origine & l’étymologie de la loi salique ; nous ne rapporterons ici que les plus plausibles.

Quelques-uns ont prétendu que cette loi avoit été nommée salica, parce qu’elle avoit été faite en Lorraine sur la petite riviere de Scille, appellée en latin Salia, laquelle se jette dans la Moselle.

Mais cette étymologie ne peut s’accorder avec la préface de la loi salique, qui porte qu’elle avoit été écrite avant que les Francs eussent passé le Rhin.

Ceux qui l’attribuent à Pharamond, disent qu’elle fut nommée salique de Salogast, l’un des principaux conseillers de ce prince, ou plûtôt duc ; mais du Tillet remarque que Salogast n’étoit pas un nom propre, que ce mot signifioit gouverneur des pays saliens. On tient donc que cette loi fut d’abord rédigée l’an 422 en langue germanique, avant que les Francs eussent passé le Rhin ; mais cette premiere rédaction ne se trouve plus.

D’autres veulent que le mot salica vienne de sala, qui signifie maison, d’où l’on appella terre salique celle qui étoit autour de la maison, & que la loi dont nous parlons ait pris le surnom de salica, à cause de la disposition fameuse qu’elle contient au sujet de la terre salique, & qui est regardée comme le titre qui assure aux mâles la couronne à l’exclusion des femelles.

D’autres encore tiennent, & avec plus de raison, que la loi salique a été ainsi nommée, comme étant la loi des Francs Saliens, c’est-à-dire de ceux qui habitoient le long de la riviere de Sala, fleuve de l’ancienne Germanie.

D’autres enfin croient que les François Saliens du nom desquels fut surnommée la loi salique, étoient une milice ou faction de Francs qui furent appellés Saliens à saliendo, parce que cette milice ou nation faisoit des courses imprevûes hors de l’ancienne France sur la Gaule. Et en effet, les François Saliens étoient cités par excellence, comme les peuples les plus legers à la course, suivant ce que dit Sidon Apollinaire, sauromata clypeo, salius pede, falce gelonus.

Quoi qu’il en soit de l’étymologie du nom des Saliens, il paroît certain que la loi salique étoit la loi de ce peuple, & que son nom est dérivé de celui des Saliens ; c’étoient les plus nobles des Francs, lesquels firent la conquête d’une partie des Gaules sur les Romains.

Au surplus, telle que soit aussi l’étymologie du surnom de salique donné à cette loi, on entend par loi salique la loi des Francs ou premiers François, ce qui se prend en deux sens, c’est-à-dire ou pour le droit public de la nation qui comprend, comme disent les Jurisconsultes, tout ce qui sert à conserver la religion & l’état ; ou le droit des particuliers, qui sert à régler leurs droits & leurs différends les uns par rapport aux autres.

Nous avons un recueil des lois de nos premiers ancêtres : il y en a deux textes assez différens pour les termes, quoiqu’à peu de chose près les mêmes pour le fond ; l’un encore à moitié barbare, est celui dont on se servoit sous la premiere race, l’autre réformé & publié par Charlemagne en 798.

Le premier texte est celui qui nous a d’abord été donné en 1557 par Herold, sur un manuscrit de la bibliotheque de Fuld, qui, au jugement d’Herold, avoit 700 ans d’antiquité ; ensuite en 1720 par M. Eccard, sur un manuscrit de la bibliotheque du duc de Volfenbutel, écrit au commencement de la seconde race. Enfin, en 1727 par Schelter, sur un manuscrit de la bibliotheque du Roi, n°5189. Ce texte a 80 articles, ou plûtôt 80 titres dans le manuscrit de M. Fuld, 94 dans le manuscrit de Volfenbutel, 100 dans le manuscrit du Roi.

Le second texte est celui que nous ont donné du Tillet, Pithou, Goldast, Lindenbrog, le célebre Bignon & Baluse, qui l’avoit revû sur onze manuscrits. Il n’a que 71 articles, mais avec une remarque que ce nombre varie beaucoup dans divers exemplaires.

Goldast a attribué ce recueil à Pharamond, & a supposé en conséquence le titre qu’il lui a donné dans son édition. M. Eccard rejette avec raison cette opinion, qui n’est fondée sur aucune autorité : car l’auteur même des Gestes qui parle de l’établissement de cette loi, après avoir rapporté l’élection de Pharamond, ne la lui attribue pas, mais aux chefs de la noblesse & premiers de la nation. Quæ consiliarii eorum priores gentiles, ou, suivant une autre leçon, quæ eorum priores gentiles tractaverunt ; & de la façon dont sa narration est disposée, il fait entendre que l’élection de Pharamond & l’institution des lois, se firent en même tems. Après la mort de Sunnon, dit-il, ils résolurent de se réunir sous le gouvernement d’un seul roi, comme étoient les autres nations ; ce fut aussi l’avis de Marchomir ; & ils choisirent Pharamond son fils. C’est aussi alors qu’ils commencerent à avoir des lois qui furent dressées par leurs chefs & les premiers de la nation, Salogan, Bodogan & Widogan, au-delà du Rhin à Salehaim, Bodehaim & Widehaim. Cette loi fut dressée dans l’assemblée des états de chacune de ces provinces, c’est pourquoi elle n’est pas intitulée lex simplement, mais pactum legis salicæ.

L’ancienne préface du recueil, écrite à ce qu’il paroit sous Dagobert, ne reconnoît point non plus d’autre auteur de ces lois que ces mêmes seigneurs, & on ne peut raisonnablement aujourd’hui proposer une autre opinion, sans quelqu’autorité nouvelle.

Une note qui est à la fin du manuscrit de Volfenbutel, dit que le premier roi des François n’autorisa que 62 titres, statuit, disposuit judicare ; qu’ensuite, de l’avis de ses seigneurs, cum obtimalis suis, il ajouta les titres 63 & suivans, jusque & compris le 78 ; que longtems après Childebrand (c’est Childebert) y en ajouta 5 autres, qu’il fit agréer facilement à Clotaire, son frere cadet, qui lui-même en ajouta 10 nouveaux, c’est-à-dire jusqu’au 93, qu’il fit réciproquement approuver par son frere.

L’ancienne préface dit en général que ces lois furent successivement corrigées & publiées par Clovis, Thierry, Childebert & Clotaire, & enfin par Dagobert, dont l’édition paroît s’être maintenue jusqu’à Charlemagne.

Clovis, Childebert & Clotaire firent traduire cette loi en langue latine, & en même tems la firent réformer & amplifier. Il est dit aussi que Clovis étoit convenu avec les Francs de faire quelques additions à cette loi.

Elle ne paroît même qu’un composé d’articles faits successivement dans les parlemens généraux ou assemblées de la nation ; car son texte le plus ancien porte presque à chaque article des noms barbares, qui sont sans doute les lieux de ces parlemens.

Childebert & Clotaire, fils de Clovis, firent un traité de paix ; & dans ce traité de nouvelles additions à la loi salique, il est dit que ces résolutions furent prises de concert avec les Francs, & l’on regarde cela comme un parlement.

Cette loi contient un grand nombre d’articles, mais le plus célebre est celui qui se trouve au titre LXII. de alode, où se trouve prononcée l’exclusion des femelles en faveur des mâles dans la succession de la terre salique, de terrâ vero salicâ nulla portio hereditatis mulieri veniat, sed ad virilem sexum tota terræ hereditas perveniat.

Il s’agit ici en général de toute terre salique dont les filles étoient excluses à la différence des autres aleux non saliques, auxquels elles succédoient.

M. Eccard prétend que le mot salique vient de sala, qui signifie maison : qu’ainsi la terre salique étoit un morceau de terre autour de la maison.

Ducange croit que la terre salique étoit toute terre qui avoit été donnée à un franc lors du partage des conquêtes pour la posséder librement, à la charge seulement du service militaire ; & que comme les filles étoient incapables de ce service, elles étoient aussi excluses de la succession de ces terres. Le même usage avoit été suivi par les Ripuariens & par les Anglois de ce tems, & non pas par les Saxons ni par les Bourguignons.

L’opinion qui paroît la mieux établie sur le véritable sens de ce mot alode, est qu’il signifioit hereditas aviatica, c’est-à-dire un propre ancien. Ainsi les filles ne succédoient point aux propres : elles n’étoient pourtant excluses des terres saliques que par des mâles du même degré.

Au reste, dans les pays même où la loi salique étoit observée, il étoit permis d’y déroger & de rappeller les filles à la succession des terres saliques, & cela étoit d’un usage assez commun. C’est ce que l’on voit dans le II. liv. des formules de Marculphe. Le pere amenoit sa fille devant le comte ou le commissaire, & disoit : « Ma chere fille, un usage ancien & impie ôte parmi nous toute portion paternelle aux filles ; mais ayant considéré cette impiété, j’ai vû que, comme vous m’avez été donnés tous de Dieu également, je dois vous aimer de même. Ainsi, ma chere fille, je veux que vous héritiez par portion égale avec vos freres dans toutes mes terres, &c. ».

La loi salique a toujours été regardée comme une des lois fondamentales du royaume, pour l’ordre de succéder à la couronne, à laquelle l’héritier mâle le plus proche est appellé à l’exclusion des filles, en quelque degré qu’elles soient.

Cette coutume nous est venue de Germanie, où elle s’observoit déja avant Clovis. Tacite dit que dès-lors les mâles avoient seuls droit à la couronne ; il remarque comme une singularité que les peuples de Germanie, appellés Sitones, étoient les seuls chez lesquels les femmes eussent droit au trône.

Cette loi fut observée en France sous la premiere race, après le décès de Childebert de Cherebert & de Gontrant, dont les filles furent excluses de la couronne.

Mais la premiere occasion où l’on contesta l’application de la loi salique, fut en 1316, après la mort de Louis Hutin. Jeanne sa fille, qui prétendoit à la couronne, en fut excluse par Philippe V. son oncle.

Cette loi fut encore réclamée avec le même succès en 1328, par Philippe de Valois contre Edouard III. qui prétendoit à la couronne de France, comme étant fils d’Isabelle de France, sœur de Louis Hutin, Philippe-le-long & Charles IV. qui regnerent successivement & moururent sans enfans mâles.

Enfin le 28 Juin 1593, Jean le Maistre, petit-fils de Gilles le Maistre, prémier président, prononça le célebre arrêt par lequel la cour déclara nuls tous traités faits & à faire pour transférer la couronne en maison étrangere, comme étant contraires à la loi salique & autres lois fondamentales de ce royaume, ce qui écarta toutes les prétentions de la ligue.

La loi salique écrite contient encore une chose remarquable, savoir que les Francs seroient juges les uns des autres avec le prince, & qu’ils décerneroient ensemble les lois de l’avenir, selon les occasions qui se présenteroient, soit qu’il fallût garder en entier ou réformer les anciennes coutumes qui venoient d’Allemagne.

Nous avons trois éditions différentes de la loi salique.

La premiere & la plus ancienne est celle qui a été tirée d’un manuscrit de l’abbaye de Fulde, & publiée par Heroldus, sur laquelle Wendelinus a fait un commentaire.

La seconde est celle qui fut réformée & remise en vigueur par Charlemagne ; elle a été publiée par Pitou & Lindenbrog : on y a ajouté plusieurs capitulaires de Charlemagne & de Louis le debonnaire. C’est celle qui se trouve dans le code des lois antiques.

La troisieme est un manuscrit qu’un allemand nommé Eccard prétend avoir recouvré, beaucoup plus ample que les autres exemplaires, & qui contient la troisieme partie de cette loi, avec une chronologie de la même loi.

Au reste la loi salique est bien moins un code de lois civiles qu’une ordonnance criminelle. Elle descend dans les derniers détails sur le meurtre, le viol, le larcin, tandis qu’elle ne statue rien sur les contrats ni sur l’état des personnes & les droits des mariages, à peine effleure-t-elle la matiere des successions ; mais ce qui est de plus étrange, c’est qu’elle ne prononce la peine de mort contre aucun des crimes dont elle parle ; elle n’assujettit les coupables qu’à des compositions : les vengeances privées y sont même expressément autorisées ; car elle défend d’ôter les têtes de dessus les pieux sans le consentement du juge ou sans l’agrément de ceux qui les y avoient exposées.

Cependant sous Childebert on inséra par addition dans la loi salique, la peine de mort pour l’inceste, le rapt, l’assassinat & le vol : on y défendit toute composition pour les crimes, & les juges devoient en connoître hors du parlement.

Cette loi, de même que les autres lois des Barbares, étoit personnelle & non territoriale, c’est-à-dire qu’elle n’étoit que pour les Francs ; elle les suivoit dans tous les pays où ils étoient établis ; & hors les Francs elle n’étoit loi que pour ceux qui l’adoptoient formellement par acte ou déclaration juridique.

On suivoit encore en France la loi salique pour les Francs, du tems de Charlemagne, puisque ce prince prit soin de la réformer ; mais il paroit que depuis ce tems, sans avoir jamais été abrogée, elle tomba dans l’oubli, si ce n’est la disposition que l’on applique à la succession à la couronne ; car par rapport à toutes les autres dispositions qui ne concernoient que les particuliers, les capitulaires qui étoient des lois plus récentes, fixerent davantage l’attention. On fut sans doute aussi bien aise de quitter la loi salique, à cause de la barbarie qu’elle marquoit de nos ancêtres, tant pour la langue que pour les mœurs : de sorte que presentement on ne cite plus cette loi qu’historiquement, ou lorsqu’il s’agit de l’ordre de succéder à la couronne.

Un grand nombre d’auteurs ont écrit sur la loi salique ; on peut voir Vindelinus, du Tillet, Pithou, Lindenbrog, Chifflet, Boulainvilliers en son traité de la pairie, &c. (A)

Loi des Saxons, lex Saxonum, étoit la loi des peuples de Germanie ainsi appellés ; cette loi succéda au code théodosien, & devint insensiblement le Droit commun de toute l’Allemagne. L’édition de cette loi se trouve dans le code des lois antiques ; c’est le droit que Charlemagne permit à ces peuples de suivre après les avoir soumis. Voyez le code des lois antiques. (A)

Loi Scantinia, que l’on attribue à C. Scantinius, tribun du peuplé, fut publiée contre ceux qui se prostituoient publiquement, qui débauchoient les autres. La peine de ce crime étoit d’abord pécuniaire ; les empereurs chrétiens prononcerent ensuite la peine de mort. Voyez Zazius. (A)

Loi Sempronia ; il y eut un grand nombre de lois de ce nom, faites par Sempronius Gracchus, sçavoir :

Loi Sempronia agraria. Voyez Lois agraires.

Loi Sempronia de ætate militari, qui défendoit de forcer au service militaire ceux qui étoient au-dessous de 17 ans.

Loi Sempronia de coloniis, ordonna d’envoyer des colonies romaines dans toutes les parties du monde.

Loi Sempronia de fœnore, que l’on croit de M. Simpronius, tribun du peuple, ordonna que les intérêts de l’argent prêté aux Latins & aux autres alliés du nom romain, se régleroit de même qu’à l’égard des Romains.

Loi Sempronia de libertate civium ; elle défendit de décider du sort d’un citoyen romain sans le consentement du peuple.

Loi Sempronia de locatione agri Attalici & Asiæ, fut faite pour ordonner aux censeurs de louer chaque année les terres léguées au peuple romain par Attalus roi de Pergame.

Loi Sempronia de suffragiis, regle que les centuries auroient un nombre de voix, à proportion du cens qu’elles payoient.

Loi Sempronia de provinciis, régla que le sénat déféreroit le gouvernement des provinces.

Loi Sempronia de veste militari, ordonna que l’habit des soldats leur seroit donné gratuitement.

Loi Sempronia frumentaria, ordonne que le blé seroit distribué au peuple pour un certain prix.

Loi Sempronia judiciaria, fut celle qui ôta au sénat le pouvoir de juger, & le transmit aux chevaliers. Voyez Plutarque en la vie des Gracques.

Sur toutes ces lois en général, voyez Zazius & les auteurs qu’il cite. (A)

Loi Senilia ; on en connoît trois de ce nom ; sçavoir la

Loi Senilia agraria. Voyez ci-devant Lois agraires.

Loi Senilia judiciaria, faite par le consul Senilius, rendit au sénat le droit de participer aux jugemens avec les chevaliers, dont il avoit été privé par la loi Sempronia.

Loi Senilia repetundarum, fut faite par Senilius Glaucia, pour régler le jugement de ceux qui avoient commis des concussions dans la guerre d’Asie. Voyez Zazius. (A)

Loi simple. Voyez ci-devant Loi a perte.

Lois somptuaires, sont celles qui ont pour objet de reprimer le luxe, soit dans la table ou dans les habits, ameublemens, équipages, &c.

Lycurgue fut le premier qui fit des lois somptuaires pour reprimer l’excès du vivre & des habits. Il ordonna le partage égal des terres, défendit l’usage de la monnoie d’or & d’argent.

Chez les Romains, ce fut le tribun Orchius qui fit la premiere loi somptuaire ; elle fut appellée de son nom Orchia, de même que les suivantes prirent le nom de leur auteur ; elle régloit le nombre des convives, mais elle ne fixa point la dépense. Elle défendit seulement de manger les portes ouvertes, afin que l’on ne fît point de superfluités par ostentation : il est parlé de cette loi dans Aulugelle, c. xxiv. & dans Macrobe, l. II. c. xxviij.

Cette loi défendoit aussi à toutes les femmes, sans distinction de conditions, de porter des habits d’étoffes de différentes couleurs, & des ornemens d’or qui excédassent le poids d’une demi-once. Elle leur défendoit pareillement d’aller en carrosse, à moins que ce ne fût pour assister à une cérémonie publique, ou pour un voyage éloigné au-moins d’une demi-lieue de la ville, ou du bourg de leur demeure.

Les dames romaines murmurerent de cette loi, & vingt ans après l’affaire fut mise en délibération dans les comices ou assemblées générales. Les tribuns demanderent que la liberté fût retablie ; Caton fut d’avis contraire, & parla fortement en faveur de la loi ; mais l’avis des tribuns prévalut, & la loi Appia fut révoquée.

Le luxe augmenta beaucoup, lorsque les Romains furent de retour de leurs expéditions en Asie ; ce qui engagea Jules-Cesar, lorsqu’il fut parvenu à l’empire, à donner un édit, par lequel il défendit l’usage des habits de pourpre & de perles, à l’exception des personnes d’une certaine qualité, auxquelles il permit d’en porter les jours de cérémonie seulement. Il défendit aussi de se faire porter en litiere, dont la coutume avoit été apportée d’Asie.

Auguste voulut reprimer le luxe des habits, mais trouva tant de résistance, qu’il se réduisit à défendre de paroître au barreau ou au cirque sans habit long.

Tibere défendit aux hommes l’usage des habits de soie.

Néron défendit à toutes personnes l’usage de la pourpre.

Alexandre Severe eut dessein de régler les habits selon les conditions ; mais Ulpien & Paul, deux de ses conseillers, l’en détournerent, lui observant que ces distinctions feroient beaucoup de mécontens ; que ce seroit une semence de jalousie & de division ; que les habits uniformes seroient un signal pour se connoître & s’assembler, ce qui étoit dangereux par rapport aux gens de certaines conditions, naturellement séditieux, tels que les esclaves. L’empereur se contenta donc d’établir quelque distinction entre les habits des sénateurs & ceux des chevaliers.

Le luxe croissant toujours malgré les précautions que l’on avoit prise pour le réprimer, les empereurs Valentinien & Valens défendirent en 367 à toutes personnes privées, hommes & femmes, de faire broder aucun vêtement ; les princes furent seuls exceptés de cette loi. Mais l’usage de la pourpre devint si commun, que les empereurs, pour arrêter cet abus, se réserverent à eux-seuls le droit d’envoyer à la pêche du poisson qui servoit à teindre la pourpre : ils firent faire cet ouvrage dans leur palais, & prirent des précautions pour empêcher que l’on n’en vendît de contrebande.

L’usage des étoffes d’or fut totalement interdit aux hommes par les empereurs Gratien, Valentinien & Théodose, à l’exception de ceux qui auroient obtenu permission d’en porter. Il arriva de-là que chacun prit l’habit militaire ; les sénateurs même affectoient de paroître en public dans cet habit. C’est pourquoi les mêmes empereurs ordonnerent aux sénateurs, greffiers & huissiers, lorsqu’ils alloient en quelqu’endroit pour remplir leurs fonctions, de porter l’habit de leur état ; & aux esclaves de ne porter d’autres habits que les chausses & la cape.

Les irruptions fréquentes que diverses nations firent dans l’empire sur la fin du iv. siécle, & au commencement du v. y ayant introduit plusieurs modes étrangeres, cela donna lieu de faire trois lois différentes, dans les années 397, 399 & 416, qui défendirent de porter dans les villes voisines de Rome & à Constantinople, & dans la province voisine, des cheveux longs, des hauts-de-chausse & des bottines de cuir, à peine contre les personnes libres, de bannissement & de confiscation de tous biens, & pour les esclaves, d’être condamnés aux ouvrages publics.

L’empereur Théodose défendit en 424, à toutes personnes sans exception, de porter des habits de soie, & des étoffes teintes en pourpre, ou mélées de pourpre, soit vraie ou contrefaite : il défendit d’en receler sous peine d’être traité comme criminel de lése-majesté.

Le même prince & Honorius, défendirent, sous la même peine, de contrefaire la teinture de couleur de pourpre.

Enfin, la derniere loi romaine somptuaire qui est de l’empereur Léon en 460, défendit à toutes personnes d’enrichir de perles, d’émeraudes ou d’hyacinthes, leurs baudriers, le frein des brides, ou les selles de leurs chevaux. La loi permit seulement d’y employer toutes autres sortes de pierreries, excepté aux mords de brides ; les hommes pouvoient avoir des agraffes d’or à leurs casaques, mais sans autres ornemens, le tout sous peine d’une amende de 50 livres d’or.

La même loi défendit à toutes personnes, autres que ceux qui étoient employés par le prince dans son palais, de faire aucuns ouvrages d’or ou de pierres précieuses, à l’exception des ornemens permis aux dames, & des anneaux que les hommes & les femmes avoient droit de porter. Ceux qui contrevenoient à cette partie de la loi, étoient condamnés en une amende de 100 livres d’or, & punis du dernier supplice.

En France, le luxe ne commença à paroître que sous Charlemagne, au retour de ses conquêtes d’Italie. L’exemple de la modestie qu’il donnoit à ses sujets n’étant pas assez fort pour les contenir, il fut obligé de faire une ordonnance en 808, qui défendit à toutes personnes de vendre ou acheter le meilleur sayon ou robe de dessous, plus cher que 20 sols pour le double, 10 sols le simple, & les autres à proportion, & le rochet qui étoit la robe de dessus, étant fourré de martre ou de loutre, 30 sols, & de peau de chat, 10 sols, le tout sous peine de 40 sols d’amende.

Il n’y eut point d’autres lois somptuaires en France jusqu’à Philippe le Bel, lequel en 1294 défendit aux bourgeois d’avoir des chars, & à tous bourgeois de porter aucune fourrure, or, ni pierres précieuses, & aux clercs de porter fourrure ailleurs qu’à leur chaperon, à moins qu’ils ne fussent constitués en dignité.

La quantité d’habits que chacun pouvoit avoir par an, est réglé par cette ordonnance ; sçavoir, pour les ducs, comtes, barons, de 6000 livres de rente, & leurs femmes, quatre robes ; les prélats, deux robes, & une à leurs compagnons, & deux chapes par an ; les chevaliers de 3000 livres de rente, & les bannerets, trois paires de robes par an, y compris une robe pour l’été, & les autres personnes à proportion.

Il est défendu aux bourgeois, & même aux écuyers & aux clercs, s’ils ne sont constitués en dignité, de brûler des torches de cire.

Le prix des étoffes est réglé selon les conditions ; les plus cheres pour les prélats & les barons, sont de 25 sols l’aune, & pour les autres états à proportion.

Sous le même regne s’introduisit l’usage des souliers à la poulaine, qui étoient une espece de chaussure fort longue, & qui occasionnoit beaucoup de superfluités. L’église cria beaucoup contre cette mode ; elle fut même défendue par deux conciles, l’un tenu à Paris en 1212, l’autre à Angers en 1365, & enfin abolie par des lettres de Charles V. en 1368.

Les ouvrages d’orfévrerie au-dessus de 3 marcs, furent défendus par Louis XII. en 1506 ; cela fut néanmoins révoqué quatre ans après, sous prétexte que cela nuisoit au commerce.

Charles VIII. en 1485 défendit à tous ses sujets de porter aucuns draps d’or, d’argent ou de soie, soit en robes ou doublures, à peine de confiscation des habits, & d’amende arbitraire. Il permit cependant aux chevaliers ayant 2000 livres de rente, de se vêtir de toutes sortes d’étoffes de soie, & aux écuyers ayant pareil revenu, de se vêtir de damas ou satin figuré ; il leur défendit sous les mêmes peines le velours & autres étoffes de cette qualité.

Le luxe ne laissant pas de faire toujours des progrès, François I. par une déclaration de 1543, défendit à tous princes, seigneurs, gentilshommes, & autres sujets du roi, de quelque état qu’ils fussent, à l’exception des deux princes enfans de France, du dauphin & du duc d’Orléans, de se vêtir d’aucun drap, ou toile d’or ou d’argent, & de porter aucunes profilures, broderies, passemens d’or ou d’argent, velours, ou autres étoffes de soie barrées d’or ou d’argent, soit en robes, saies, pourpoints, chausses, bordure d’habillement, ou autrement, en quelque sorte ou maniere que ce soit, sinon sur les harnois, à peine de mille écus d’or sol d’amende, de confiscation, d’être punis comme infracteurs des ordonnances. Il donna néanmoins trois mois à ceux qui avoient de ces habillemens, pour les porter ou pour s’en défaire.

Les mêmes défenses furent renouvellées par Henri II. en 1547, & étendues aux femmes, à l’exception des princesses & dames, & demoiselles qui étoient à la suite de la reine, & de madame sœur du roi.

Ce prince fut obligé de donner en 1549 une déclaration plus ample que la premiere ; l’or & l’argent furent de nouveau défendus sur les habits, excepté les boutons d’orfévrerie.

Les habits de soie cramoisi ne furent permis qu’aux princes & princesses.

Le velours fut défendu aux femmes de justice & des autres habitans des villes, & aux gens d’église, à moins qu’ils ne fussent princes.

Il ne fut permis qu’aux gentilshommes de porter saie sur soie.

On régla aussi la dorure que l’on pourroit mettre sur les harnois.

Il fut dit que les pages ne seroient habillés que de drap, avec une bande de broderie en soie ou velours.

Les bourgeoises ne devoient point prendre le titre de damoiselles, à moins que leurs maris ne fussent gentilshommes.

Enfin il fut défendu à tous artisans, & gens de pareil état ou au-dessous, de porter des habillemens de soie.

Il y eut des explications données sur plusieurs articles de cette déclaration, sur lesquels il y avoit des doutes.

L’article 145 de l’ordonnance d’Orléans, qui paroît être une suite des remontrances que les députés de la noblesse & du tiers-état avoient fait sur le luxe, défendit à tous les habitans des villes d’avoir des dorures sur du plomb, du fer, ou du bois, & de se servir des parfums des pays étrangers, à peine d’amende arbitraire, & de confiscation des marchandises.

Cette disposition qui étoit fort abrégée, fut étendue à tous les autres cas du luxe par des lettres patentes du 22 Avril 1561, qui reglent les habillemens selon les conditions.

Cette ordonnance n’ayant point eu d’exécution, fut renouvellée par une déclaration du 17 Janvier 1563, qui défendit encore de nouveaux abus qui s’étoient introduits, entre autres de porter des vertugadins de plus d’une aune & demie de tour.

Cependant par une autre déclaration de 1565, le roi permit aux dames d’en porter à leur commodité, mais avec modestie.

Ceux qui n’avoient pas la liberté de porter de l’or & de l’argent, s’en dédommageoient en portant des étoffes de soie figurée, qui coûtoient aussi cher que les étoffes mêlées d’or ou d’argent, de sorte qu’on fut obligé de défendre cette contravention.

Henri III. ordonna en 1576, que les lois somptuaires de ses prédécesseurs seroient exécutées : il en fit lui-même de nouvelles en 1577, & 1583.

Il y en eut de semblables sous Henri IV. en 1599, 1601 & 1606.

Louis XIII. en fit aussi plusieurs en 1613, 1633, 1634, 1636 & 1640.

Louis XIV. prit aussi grand soin de réformer le luxe des meubles, habits, & des équipages, comme il paroît par ses ordonnances, édits & déclarations de 1644, 1656, 1660, 1661, 1663, 1664, 1667, 1672, 1687, 1689, 1700, 1704.

La multiplicité de ces lois, fait voir combien ou a eu de peine à les faire observer.

Quant aux lois faites pour reprimer le luxe de la table, il y en eut chez les Lacédémoniens, & chez les Athéniens. Les premiers étoient obligés de manger ensemble tous les jours à frais communs ; les tables étoient pour quinze personnes ; les autres mangeoient aussi ensemble tour à tour dans le prytanée, mais aux dépens du public.

Chez les Romains, après la seconde guerre punique, les tables étant devenues trop nombreuses, le tribun Orchius régla que le nombre des conviés ne seroit pas de plus de neuf.

Quelque tems après le sénat défendit à tous magistrats & principaux citoyens de dépenser plus de 120 sols pour chaque repas qui se donneroient après les jeux mégalésiens, & d’y servir d’autre vin que celui du pays.

Le consul Fannius fit étendre cette loi à tous les festins, & la loi fut appellée de son nom Fannia. Il fut défendu de s’assembler plus de trois, outre les personnes de la famille, les jours ordinaires, & plus de cinq les jours des nones ou des foires. La dépense fut fixée à cent sols par repas, les jours de jeux & fêtes publiques ; 30 sols, les jours des nones ou des foires, & 10 sols les autres jours. Il fut défendu de servir des volailles engraissées, parce que cette préparation coûtoit beaucoup.

La loi Didia, en renouvellant les défenses précédentes, ajoûta que non-seulement ceux qui inviteroient, mais encore ceux qui se trouveroient à un repas contraire aux lois, seroient punis comme prévaricateurs.

La dépense des repas fut encore réglée selon les jours & les occasions, par la loi Licinia. Mais comme elle permettoit de servir à discrétion tout ce que la terre produisoit, on inventa des ragoûts de légumes si délicats, que Cicéron dit les avoir préférés aux huitres & aux lamproies qu’il aimoit beaucoup.

La loi Cornelia renouvella toutes les précédentes, & régla le prix des vivres.

Jules César fit aussi une loi somptuaire ; mais tout ce que l’on en sait, est qu’il établit des gardes dans les marchés, pour enlever ce qui y étoit exposé en contravention, & des huissiers qui avoient ordre de saisir jusque sur les tables, ce qui étoit échappé à ces gardes.

Auguste mitigea les lois somptuaires, dans l’espérance qu’elles seroient mieux observées. Il permit de s’assembler jusqu’à douze ; d’employer aux repas des jours ordinaires 200 sols ; à ceux des calendes, ides, nones, & autres fêtes 300 ; & aux jours des noces & du lendemain, jusqu’à 1000 sesterces.

Tibere permit de dépenser depuis 300 sesterces jusqu’à 2000, selon les différentes solemnités.

Le luxe des tables augmenta encore sous Caligula, Claude & Néron. Les lois somptuaires étoient si mal observées que l’on cessa d’en faire.

En France, les capitulaires de la deuxieme race, & les ordonnances de S. Louis, défendent l’ébriété, ce qui concernoit plutôt l’intempérance que le luxe.

Philippe le Bel, par un édit de l’an 1294, défendit de donner dans un grand repas plus de deux mets & un potage au lard ; & dans un repas ordinaire, un mets & un entre-mets. Il permit les jours de jeûne seulement de servir deux potages aux harengs, & deux mets, ou un seul potage & trois mets. Il défendit de servir dans un plat plus d’une piece de viande, ou d’une seule sorte de poisson ; enfin il déclara que toute grosse viande seroit comptée pour un mets, & que le fromage ne passeroit pas pour un mets, s’il n’étoit en pâte ou cuit dans l’eau.

François I. fit un édit contre l’ivrognerie ; du reste il ne régla rien pour la table.

Mais par un édit du 20 Janvier 1563, Charles IX. mit un taux aux vivres, & régla les repas. Il porte qu’en quelques noces, festins ou tables particulieres que ce soit, il n’y aura que trois services ; sçavoir, les entrées, la viande ou le poisson, & le dessert ; qu’en toute sorte d’entrées, soit en potage, fricassée ou patisserie, il n’y aura au plus que six plats, & autant pour la viande ou le poisson, & dans chaque plat une seule sorte de viande ; que ces viandes ne seront point mises doubles, comme deux chapons, deux lapins, deux perdrix pour un plat ; que l’on pourra servir jusqu’à trois poulets ou pigeonneaux, les grives, becassines, & autres oiseaux semblables, jusqu’à quatre, & les alouettes & autres especes semblables, jusqu’à une douzaine ; qu’au dessert, soit fruits, patisserie, fromage ou autre chose, il ne pourra non plus être servi que six plats, le tout sous peine de 200 livres d’amende pour la premiere fois, & 400 livres pour la seconde.

Il ordonne que ceux qui se trouveront à un festin où l’on contreviendra à cette loi, le dénonceront dans le jour, à peine de 40 livres d’amende ; & si ce sont des officiers de justice qui se trouvent à de pareils festins, qu’ils ayent à se retirer aussi-tôt, & procéder contre les contrevenans.

Que les cuisiniers qui auroient servi à ces repas, seront condamnés pour la premiere fois en 10 livres d’amende, à tenir prison 15 ans au pain & à l’eau ; pour la seconde fois, au double de l’amende & du tems de la prison, & pour la troisieme, au quadruple, au fouet & au bannissement du lieu.

Enfin il défend de servir chair & poisson en un même repas.

La disette qui se fit sentir en 1573, donna lieu à une déclaration du 20 Octobre, par laquelle le roi mande aux gens tenans la police générale de Paris, que pour faire cesser les grandes & excessives dépenses qui se faisoient en habits & en festins, ils fissent de nouveau publier & garder inviolablement toutes ses ordonnances somptuaires ; & afin que l’on pût être averti des contraventions qui se commettroient à cet égard, que les commissaires de Paris pourroient aller & assister aux banquets qui se feroient. Une autre déclaration du 18 Novembre suivant, enjoignit aux commissaires du châtelet & juges des lieux, chacun en droit soi, de faire les perquisitions nécessaires pour la découverte des contraventions.

La ville de Paris étant bloquée en 1591, les magistrats dans une assemblée générale de police, rendirent une ordonnance portant défense de faire aucuns festins ou banquets en salles publiques, soit pour nôces ou autrement, jusqu’à ce que par justice il en eût été autrement ordonné ; & à l’égard des maisons particulieres, il fut défendu d’y traiter plus de douze personnes.

La derniere loi touchant les repas, est l’ordonnance de 1629, dont quelques articles concernent la réformation du luxe des tables. Il y est dit qu’il n’y aura que trois services d’un simple rang chacun, & de six pieces au plus dans chaque plat. Tous les repas de réception sont abolis ; enfin, il est défendu aux traiteurs de prendre plus d’un écu par tête, pour les nôces & festins.

Il seroit à souhaiter que toutes ces lois somptuaires fussent observées pour reprimer le luxe, tant des tables, que celui des meubles, habits & équipages. Voyez le traité de la police de la Marre, tom. I. liv. III. tit. 2. (A)

Lois Sulpitiennes, leges Sulpitiæ, furent l’ouvrage de P. Sulpitius, homme qui fut d’abord cher à tous les gens de bien, & célebre par son éloquence ; mais étant devenu tribun du peuple, l’ambition & l’esprit de parti l’aveuglerent tellement, qu’il perdit l’estime des grands, & que son éloquence même lui devint pernicieuse par le mauvais usage qu’il en fit. Lorsque César voulut de la place d’édile s’élever à celle de consul sans passer par la préture, ce qui étoit défendu par les lois annales, Sulpitius s’y opposa comme les autres tribuns du peuple ; il le fit d’abord avec modération, mais bientôt il en vint aux armes ; il fit quelques lois, une entr’autres contre le sénat, portant qu’un sénateur ne pouvoit emprunter plus de 2000 drachmes ; une autre loi, pour rappeller les exilés ; une portant que les affranchis & nouveaux citoyens seroient distribués dans les tribus ; la derniere loi fut pour destituer Sylla du commandement que le sénat lui avoit décerné pour la guerre contre Mithridate : cette loi fut une des causes de la guerre civile qui s’éleva, Sylla disant publiquement qu’il n’étoit pas tenu de se soumettre aux lois de Sulpitius, qui n’avoient été établies que par force ; & s’étant mis à la tête de l’armée, il prit Capoue, chassa Marius son compétiteur, tua Sulpitius, & révoqua tous ses décrets. Voyez Cicéron, Philip. VIII. & de resp. arusp. Appien. lib. I. Florus, &c.

Lois tabellaires étoient celles qui autoriserent à donner les suffrages sur des tablettes enduites de cire, dans laquelle on marquoit un point pour exprimer son avis.

Le peuple romain donnoit d’abord son avis de vive voix, soit pour le choix des magistrats, soit pour le jugement des coupables, soit pour la formation ou abrogation des lois.

Mais comme cette maniere d’opiner exposoit le peuple au ressentiment des grands, cela fit que l’on donna au peuple une table ou tablette pour marquer les suffrages, comme on vient de le dire.

Il y eut quatre différentes lois surnommées tabellaires, parce qu’elles établirent ou confirmerent cette maniere d’opiner.

La premiere fut la loi Gabinia, promulguée sous le consulat de Calphurnius Pison & de Popilius Lenate, par Gabinius, homme de néant & peu connu ; elle portoit que dans les comices où les magistrats seroient élus, le peuple n’opineroit point de vive voix, mais donneroit son suffrage sur une tablette ; & afin qu’il y eût plus de liberté, il fut défendu de regarder cette tablette, ni de prier ou appeller quelqu’un pour donner son suffrage.

Deux ans après vint une seconde loi tabellaire, appellée Cassia, de L. Cassius qui la proposa : celui-ci étoit de la famille patricienne ; il fit ordonner que, dans le jugement des accusés, on opineroit de même que pour l’élection des magistrats : cette loi passa contre l’avis de tous les gens de bien, pour prévenir jusqu’au moindre bruit que le peuple faisoit courir.

La troisieme loi tabellaire fut la loi Papyria, que proposa Carbon, homme séditieux & méchant, pour étendre l’usage des tablettes aux délibérations qui concernoient la démission ou reprobation des lois.

Cassius ayant excepté de sa loi le crime de trahison contre l’état, cela donna lieu à Cælius de faire une quatrieme loi tabellaire, appellée de son nom Cœlia, par laquelle l’usage des tablettes fut aussi admis dans cette matiere, au moyen de quoi tout suffrage de vive voix fut aboli.

Dans la suite, le droit de suffrage & de créer des magistrats ayant été ôte au peuple, soit par Jules César, ou, selon d’autres, par Tibere, & transféré au sénat, celui-ci qui usoit comme auparavant des suffrages vocaux, changea de maniere du tems de Trajan, & se servit aussi des tablettes pour l’élection des magistrats ; avec cette différence néanmoins que dans ces tablettes les sénateurs ne marquoient pas des points, mais les noms même des candidats. Cette méthode ne dura pas non plus long-tems dans le sénat, à cause de l’impudence & de la pétulance de quelques-uns. Voyez Pline, lib. IV. epist. & V. ad Maximum ; voyez aussi Zazius.

Loi des douze Tables est celle qui fut faite pour les Romains par les décemvirs.

Les lois faites par les rois de Rome & par les premiers consuls, n’ayant pas pourvu à tout & n’étant pas suffisantes pour en composer un corps de lois, on envoya trois députés à Athenes & dans d’autres villes grecques, pour y recueillir ce qu’il y avoit de meilleur dans les lois de Solon & de plusieurs autres législateurs. On nomma dix personnes qu’on appella les décemvirs, pour en composer un corps de lois ; ils y joignirent plusieurs dispositions tirées des usages non écrits des Romains.

A peine la premiere année du décemvirat étoit finie, que chacun des décemvirs présenta au peuple la portion de lois dont la rédaction lui avoit été confiée. Le peuple reçut ces lois avec applaudissement ; on les fit d’abord graver sur des tables de chêne, & non pas d’ivoire, comme quelques-uns ont cru. Chacun eut la liberté de proposer ses réflexions ; & cette critique ayant produit plusieurs changemens & augmentations, le sénat s’assembla pour examiner de nouveau ces lois, &, après que tous les ordres furent demeurés d’accord de les accepter, le sénat les approuva par un arrêt ; & pour les faire recevoir dans les comices assemblés par centuries, on ordonna des comices pendant trois jours de marché : & enfin les dix tables ayant été reçues solemnellement par le peuple, on les grava sur des colonnes d’airain, arrangées par ordre dans la place publique, & elles servirent de fondement à toutes les décisions.

Depuis que ces dix tables furent ainsi exposées en public, on trouva qu’il y manquoit beaucoup de choses nécessaires à la religion & à la société ; on résolut d’y suppléer par deux autres tables, & les décemvirs prirent de-là occasion de prolonger encore leur administration pendant une troisieme année ; les onzieme & douzieme tables furent donc présentées au peuple, aux ides de Mai de l’année suivante ; on les grava pareillement sur des tables d’airain, que l’on mit à côté des premieres. Et Diodore de Sicile dit que chaque table fut attachée à un des éperons de navire, dont le frontispice du sénat étoit orné.

Ces premieres tables furent consumées peu de tems après dans l’incendie de Rome par les Gaulois, mais elles furent rétablies, tant sur les fragmens qui en restoient, que sur les copies qui en avoient été tirées ; & pour en mieux conserver la teneur, on les fit apprendre par cœur aux enfans. Rittershusius, dans ses commentaires sur cette loi, prétend que les douze tables périrent encore lors de l’irruption des Goths. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’elles subsistoient encore peu de tems avant Justinien ; puisqu’on lit dans le digeste que Caïus les avoit toutes commentées, & en avoit rapporté tous les textes, dont la plus grande partie se trouve aujourd’hui perdue ; & il y a apparence que ce fut du tems de Justinien que les exemplaires de cette loi furent détruits, de même que les livres des jurisconsultes dont il composa le digeste.

Plusieurs auteurs ont travaillé à rassembler dans les écrivains de l’ancienne Rome les fragmens de la loi des douze tables, dont il nous reste encore cent cinq lois ; les unes, dont le texte s’est conservé en partie ; les autres, dont on ne sait que la substance.

Suivant les différentes inductions que l’on a tiré des auteurs qui ont parlé de cette loi, on tient que la premiere table traitoit des procédures civiles ; la seconde, des jugemens & des vols ; la troisieme, des dettes ; la quatrieme, de la puissance paternelle ; la cinquieme, des successions & des tutelles ; la sixieme, de la possession des biens & du divorce ; la septieme, des crimes ; la huitieme, des métiers, des biens de ville & de campagne, & des servitudes ; la neuvieme, du droit public ; la dixieme, des cérémonies funebres ; les onzieme & douzieme, servant de supplément aux dix autres, traitoient de diverses matieres.

Pour donner une idée de l’esprit de cette loi, nous remarquerons que quand le débiteur refusoit de payer ou de donner caution, le créancier pouvoit l’emmener chez lui, le lier par le col, lui mettre les fers aux piés, pourvu que la chaîne ne pesât que 15 livres : & quand le débiteur étoit insolvable à plusieurs créanciers, ils pouvoient l’exposer pendant trois jours de marché, & après le troisieme jour, mettre son corps en pieces, & le partager en plus ou moins de parties, ou bien le vendre à des étrangers.

Un pere auquel il naissoit un enfant difforme, devoit le tuer aussi-tôt. Il avoit en général le droit de vie & de mort sur ses enfans, & pouvoit les vendre quand il vouloit : quand le fils avoit été vendu trois fois, il cessoit d’être sous la puissance paternelle.

Il est dit que quand une femme libre avoit demeuré pendant un an entier dans la maison d’un homme, sans s’être absentée pendant trois nuits, elle étoit réputée son épouse, par l’usage & la cohabitation seulement.

La loi prononce des peines contre ceux que l’on disoit jetter des sorts sur les moissons, ou qui se servoient de paroles magiques pour nuire à quelqu’un.

Le latin de la loi des douze tables est aussi barbare que le sont la plûpart de ses dispositions.

Au surplus, on y découvre l’origine de plusieurs usages qui ont passé de cette loi dans les livres de Justinien, & qui sont observés parmi nous, en quoi les fragmens de cette loi ne laissent pas d’être curieux & utiles. Voyez le commentaire de Rittershusius, les trois dissertations de M. Bonamy, & le commentaire de M. Terrasson inséré dans son hist. de la jurisprud. rom.

Loi du Talion est celle qui veut que l’on inflige au coupable une peine toute semblable au mal qu’il a fait à un autre ; c’est ce que l’on appelle aussi la peine du talion.

Cette loi est une des plus anciennes, puisqu’elle tire son origine des lois des Hébreux. Il est dit en la Genese, chap. ix. n°. 6. « qui aura répandu le sang de l’homme, son sang sera répandu » ; & dans l’Exode, chap. xxj. en parlant de celui qui a maltraité un autre, il est dit qu’il « rendra vie pour vie, œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pié pour pié, brûlure pour brûlure, plaie pour plaie, meurtrissure pour meurtrissure » ; & dans le Lévitique, chap. xxiv. il est dit pareillement « que celui qui aura frappé & occis un homme, mourra de mort ; que celui qui aura occis la bête, rendra le pareil », c’est-à-dire bête pour bête ; que quand quelqu’un aura fait outrage à un de ses parens, il lui sera fait de même, fracture pour fracture, œil pour œil, dent pour dent, &c.

Il paroît que les Grecs adopterent cette loi ; car, selon les lois de Solon, la peine du talion avoit lieu contre celui qui avoit arraché le second œil à un homme qui étoit déja privé de l’usage du premier, & le coupable étoit condamné à perdre les deux yeux.

Entre les lois que les Romains emprunterent des Grecs, & dont ils formerent une espece de code, que l’on appella la loi des douze tables, fut comprise la loi du talion ; il étoit dit que tout homme qui auroit rendu un autre impotent d’un membre, seroit puni par la loi du talion, s’il ne faisoit pas un accommodement avec sa partie.

La loi du talion fut encore en usage long tems après les douze tables ; car Caton, cité par Priscien, liv. VI. parloit encore de son tems de la loi du talion, comme d’une loi qui étoit actuellement en vigueur, & qui donnoit même au cousin du blessé le droit de poursuivre la vengeance : talione proximus cognatus ulciscitur.

La loi des douze tables n’étendoit pas ainsi le droit de vengeance jusqu’au cousin du lésé ; ce qui a fait croire à quelques-uns que Caton avoit parlé de la loi du talion relativement à quelque autre peuple.

Il n’y a même pas d’apparence que la loi du talion ait guere eu lieu chez les Romains, le coupable ayant le choix de racheter la peine en argent ; elle n’auroit pû avoir lieu qu’à l’égard des misérables qui n’avoient pas le moyen de se racheter, encore n’en trouve-t-on pas d’exemple ; & il y a lieu de penser que, dans les tems polis de Rome, on n’a jamais mis en usage cette loi. Il est du-moins certain que long-tems avant Justinien, la loi du talion étoit abolie, puisque le droit du préteur, appellé jus honorarium, avoit établi que les personnes lésées feroient procéder à l’estimation du mal par-devant le juge ; c’est ce que nous apprend Justinien dans ses institutes, liv. IV. tit. IV. où il dit que, suivant la loi des douze tables, la peine pour un membre rompu étoit le talion, que pour un os cassé il y avoit une peine pécuniaire ; cela fait voir que le talion n’avoit pas lieu dans tous les cas. Justinien ajoute que la peine des injures introduite par la loi des douze tables, est tombée en désuétude, qu’on pratique dans les jugemens celles que les préteurs ont introduites.

Jesus-Christ, dans saint Matthieu, chap. v. condamne la loi du talion : « Vous avez entendu, dit-il, que l’on vous a dit, œil pour œil, dent pour dent ; mais moi je vous dis de ne point vous défendre du mal qu’on veut vous faire, & si quelqu’un vous frappe sur la joue droite, tendez lui la gauche ». Cette loi qui enseigne le pardon des injures est une doctrine bien plus pure que celle du talion.

Les meilleurs jurisconsultes ont même regardé la loi du talion comme une loi barbare, contraire au droit naturel. Grotius, de jure belli & pacis, l. III. c. ij. dit qu’elle ne doit avoir lieu ni entre particuliers, ni d’un peuple à un autre : il tire sa décision de ces belles paroles d’Aristide : « Ne seroit-il pas absurde de justifier & d’imiter ce que l’on condamne en autrui comme une mauvaise action » ?

Il faut cependant convenir que le droit de représailles, dont on use en tems de guerre envers les ennemis, approche beaucoup de la loi du talion. Voyez le jurisconsulte Paul, lib. sentent. V. tit. IV. Aulu-Gell. l. XX. c. j. institut. de injur. §. 7. Jurisprud. rom. de Terrasson, part. II. §. 9.

Loi Tarpeia, Voyez ci-devant Loi Aterina.

Loi Terentia & Cassia, fut une des lois frumentaires ; elle fut faite sous le consulat de M. Terentius & de Cassius Varus ; elle ordonna que l’on acheteroit du blé pour le distribuer au peuple dans les tems de disette, ce qui devint très-préjudiciable à la république. Le blé de Sicile devoit être distribué également à toutes les villes ; mais Verrès, gouverneur de cette province, fut plus occupé de son intérêt particulier que de celui du public, comme Cicéron le lui reproche.

Loi Terentilla, fut faite par Terentius Arsa, tribun du peuple, à l’occasion des mécontentemens du peuple romain qui se plaignoit de ce qu’il n’y avoit aucun droit certain, & que le sénat jugeoit tout arbitrairement ; elle ordonnoit que le peuple, après avoir assemblé légitimement des comices, choisiroit dix hommes d’un âge mûr, d’une sagesse consommée, & d’une réputation saine pour composer un corps de lois, tant pour l’administration publique que pour la décision des affaires particulieres, & que ces lois seroient affichées dans la place publique, afin que chacun pût en dire son avis. Cette loi excita de nouvelles divisions entre le sénat & le peuple ; enfin après cinq années de contestations au sujet de l’acceptation de la loi Terentilla, les plébéïens l’emporterent ; & ce qui est de singulier, c’est que ce fut Romilius, homme consulaire, qui poursuivit l’exécution de la loi Terentilla. On envoya donc trois députés en Grece pour y rassembler les meilleures lois, dont les décemvirs formerent ensuite la loi des 12 tables. Voyez le catalogue de Zazius, & ci-devant au mot Loi des douze tables. (A).

Lois testamentaires, on appelle ainsi les lois romaines qui concernent la matiere & la forme des testamens.

Lois théatrales chez les Romains étoient celles qui regloient les places que chacun devoit occuper au théâtre & dans les jeux publics, selon son rang & sa condition.

La premiere loi qui regla ainsi les places ne fut faite par Vatere que 656 ans après la fondation de Rome ; jusques-là personne ne s’étoit avisé de prendre place devant les sénateurs. Cependant, au rapport de Tite-Live, le peuple s’offensa de cette loi ; & lorsque Roscius eut fait faire la loi qui donna rang à part aux chevaliers dans le théâtre, ce qui arriva sous le consulat de Cicéron, cela occasionna au théâtre une grande sédition que Cicéron appaisa promptement par son éloquence, dont Plutarque le loue grandement. Auguste fit aussi quelques années après une loi théâtrale surnommée de son nom Julia. Voyez Tite-Live, liv. XXXIII. Loiseau, des ordres, c. j. n. 29.

Loi Thoria agraria, fut faite par le tribun Sp. Thorius, lequel déchargea les terres du fisc de toute redevance, au moyen de quoi le peuple fut privé de ce revenu qu’on lui distribuoit auparavant. Voyez Lois agraires.

Loi Titia, il y en a eu plusieurs de ce nom, savoir la

Loi Titia agraria, qui fut une des lois agraires, faite par Sextus Titius. Voyez Valere Maxime.

Loi Titia de donis & muneribus, défendoit de rien recevoir pour plaider une cause. Voyez Tacite, liv. VI. Quelques-uns croient que c’est la même que la loi Cincia ; cependant Ausone en fait mention. Voyez Zazius.

Loi Titia & Cornelia, défendit de jouer de l’argent à moins que ce ne fût pour prix de quelque exercice dont l’adresse, le courage ou la vertu fissent l’objet ; il en est parlé par le jurisconsulte Martien, ff. de Meatoribus.

Loi Titia de provinciis quæstoris, regla le pouvoir des questeurs dans les provinces où ils étoient envoyés.

Loi Titia de vocatione consulatus, fut faite par P. Titius, tribun du peuple du tems des triumvirs, pour ordonner que le consulat finiroit au bout de cinq ans. Voyez Appien, liv. IV. Sur toutes ces lois, voyez Zazius. (A)

Loi Tribunitia prima, étoit celle par laquelle le senat de Rome consentit, en faveur du peuple, à la création de cinq tribuns dont la personne seroit sacrée, c’est pourquoi cette loi fut nommée sacrata ; il étoit défendu de rien attenter sur leur personne. Elle fut surnommée prima, parce qu’il y eut dans la suite d’autres lois faites en faveur des tribuns, entre autres celle qui défendoit de les interrompre lorsqu’ils haranguoient le peuple. La loi Tribunitia défendoit aussi de consacrer une maison ou un autel sans la permission du peuple. Voyez Fulvius Ursinus dans ses notes sur le livre d’Antoine Augustin, & la Jurisprud. rom. de M. Terrasson, pag. 75.

Lois tribunitiennes, c’étoient les plébiscites qui étoient proposés par les tribuns & faits de l’autorité du peuple.

Loi Tullia, de ambitu, fut faite sous le consulat de M. Tullius Cicéron ; c’étoit un senatusconsulte, portant que celui qui aspireroit à la magistrature ne pourroit, dans les deux années qui précéderoient son élévation, donner au peuple des jeux ni des repas, ni se faire précéder ou accompagner de gens gages, sous peine d’exil. Voyez Cicéron, pro Murena.

Loi Valeria ; on en connoît plusieurs de ce nom, savoir la

Loi Valeria faite par M. Valerius, consul, collegue d’Apuleius ; elle défendoit de condamner à mort un citoyen romain, même de le faire battre de verges.

Loi Valeria de provocatione, étoit de P. Valerius, surnommé Publicola, lequel pendant son consulat fit plusieurs réglemens utiles à la république & favorable à la liberté du peuple ; une de ces lois entre autres fut que l’on pouvoit appeller de tous les magistrats au peuple.

Le même Valerius fit encore d’autres lois, portant que personne n’auroit de commandement à Rome, à moins qu’il ne lui eût été déféré par le peuple ; que l’on consacreroit aux dieux la personne & les biens de celui qui auroit conspiré contre l’état : il déchargea aussi le menu peuple des impôts, pensant que de tels gens sont assez chargés de leur famille qu’ils ont à élever.

Loi Valeria de ære alieno, étoit de Valerius Flaccus, lequel succéda, pour le consulat, à Marius ; elle autorisoit les débiteurs à ne payer que le quart de ce qu’ils devoient. Ce Valerius fit une fin digne de son injustice ; car il fut tué dans une sédition excitée par les troupes d’Asie où il commandoit. Voyez Zazius.

Loi Valeria, de proscriptione, étoit de L. Valerius Flaccus ; il ordonna que Sylla seroit créé dictateur, & qu’il auroit droit de vie & de mort sur tous les citoyens. Voyez aussi Zazius. (A)

Loi Varia, ainsi nommée de Qu. Varius tribun du peuple, ordonna d’informer contre ceux par le fait ou conseil desquels les alliés auroient pris les armes contre les Romains. Voyez Zazius.

Loi Vatinia, fut faite par Vatinius pour déférer à César le gouvernement des Gaules & de l’Illyrie avec le commandement de dix légions pendant cinq ans. Voyez l’Oraison de Cicéron contre Vatinius.

Loi viaire, lex viaria, faite par Curion, tribun du peuple, par laquelle il se fit attribuer l’inspection & la police des chemins. Appian, liv. II.

Loi viscellia ou visellia, défendit aux affranchis d’aspirer aux charges qui étoient destinées aux ingénus ou personnes de condition libre ; mais cette loi fut abrogée lorsqu’on supprima la distinction des affranchis & des ingénus. Voyez Bugnion, des lois abrogées, liv. I. n. 190.

Loi Voconia, faite par le tribun Voconius, contenoit plusieurs dispositions dont l’objet étoit de limiter la faculté de léguer par testament.

L’une défendoit à un homme riche de cent mille sesterces, de laisser à des étrangers plus qu’il ne laissoit à son héritier. Un autre chapitre de cette loi excluoit toutes les femmes & filles de pouvoir être instituées héritieres, & d’autres disent que les sœurs étoient exceptées ; d’autres encore prétendent qu’il n’y avoit que la femme & la fille unique du testateur qui étoient comprises dans la prohibition ; d’autres enfin soutiennent que la loi défendoit seulement de léguer à sa femme plus du quart de son bien.

L’exclusion des filles fut dans la suite révoquée par Justinien, mais elle continua d’avoir lieu pour les successions qui ne venoient pas de la famille.

Le jurisconsulte Paulus fait mention que cette loi défendoit aussi d’acquérir par usucapion des servitudes. Voyez la Dissertation de Perizonus sur la loi Voconia. (A)

Loi du vicomte, c’est le droit & l’usance du vicomte ; il en est parlé dans la coutume de Boulenois, art. 180, & dans celle de Monstreuil, art. 1.

Loi villaine, lex villana, c’est le nom qu’on donnoit autrefois aux lois des villageois ou plûtôt aux lois qui concernoient les gens de la campagne.

Loi Voleronia, fut faite par P. Volero, tribun du peuple ; elle portoit que les magistrats plébéïens seroient nommés dans les comices assemblés par tribus, dans lesquelles assemblées on ne s’arrêtoit point aux auspices, & l’autorité du sénat n’étoit point nécessaire ; cela arriva sous le consulat de T. Quintius & d’Appius Claudius. Voyez le catalogue de Zazius.

Loi des Wisigoths. Voyez ci-devant Loi gothique. (A)

Loi, à la monnoie, exprime la bonté intérieure des especes. Il n’y a que les ouvriers qui se servent de ce mot. Voyez Titre, Aloi.