Grammaire de l’hébreu biblique/Syntaxe/Pronom/Paragraphe 145

Paul Joüon
Institut biblique pontifical (p. 447-449).
§ 145. Pronom relatif.

a I. Quelle que soit son origine, אֲשֶׁר (§ 38 ; 158 f N) est d’abord, au point de vue syntaxique, une conjonction relative : que. Cette valeur apparaît dans les propositions relatives complètes, à savoir ayant le pronom rétrospectif (ou pronom de rappel)[1] : Jér 28, 9 הַנָּבִיא אֲשֶׁר שְׁלָחוֹ יְהֹוָה littéralement « le prophète que Jéhovah l’a envoyé » = le pr. que J. a envoyé ; dans une proposition nominale : Gn 7, 2 הַבְּהֵמָה אשׁר לֹא טְהֹרָה הִיא littt « l’animal que lui n’est pas pur » = l’animal qui n’est pas pur.

Peu à peu la conjonction relative a été sentie comme pronom relatif : « le prophète que Jéh. a envoyé », « l’animal qui n’est pas pur »[2]. Bien plus, ce pronom a pu être employé absolument, à savoir sans nom précédent : Gn 15, 4 אשׁר יֵצֵא מִמֵּעֶ֫יךָ celui qui sortira de tes entrailles ; Nb 22, 6 אשׁר תְּבָרֵךְ celui que tu béniras (§ 158 l).

b II. Bien que שֶׁ◌ּ soit originairement différent de אֲשֶׁר, il semble avoir été senti comme une forme abrégée de אשׁר. Au point de vue syntaxique, les deux mots sont traités de la même façon.

c III. En poésie on trouve assez souvent le démonstratif זֶה (adverbe et pronom § 143 a) employé comme relatif (sans distinction de genre ni de nombre) : Job 19, 19 וְזֶה־אָהַ֫בְתִּי נֶהְפְּכוּ־בִי et ceux que j’aime se sont tournés contre moi ; 15, 17 ; Ps 74, 2 ; 78, 54 ; 104, 8 (§ 129 q) ; Pr 23, 22. On trouve encore plus souvent la forme זוּ (§ 36 b ; Ps 132, 12 זוֹ) qui n’est guère employée comme démonstratif : Ps 17, 9 רְשָׁעִים זוּ שַׁדּ֫וּנִי les méchants qui m’ont tourmenté, 9, 16 ; 10, 2 ; 31, 5 ; 32, 8 ; 68, 29 ; 143, 8 ; Ex 15, 13 ; Is 42, 24 ; 43, 21.

d IV. Dans Chron. et Esdr. on trouve quelquefois l’article en fonction de relatif : 1 Ch 26, 28 כֹּל הַֽהִקְדִּישׁ שְׁמוּאֵל tout ce que S. avait consacré. En fait, les 8 exemples sont avec le parfait 3e p. : 1 Ch 29, 8 הַנִּמְצָא, 17 הַנִּמְצְאוּ ; 2 Ch 1, 4 avec préposition בַּֽהֵכִין ; 29, 36 עַל הַֽהֵכִין ; Esd 8, 25 הַֽהֵרִ֫ימוּ ; 10, 14 הַֽהשִׁיב, 17 הַֽהשִׁ֫יבוּ[3].

e L’existence de l’article comme relatif dans les textes plus anciens est très improbable. Certaines formes vocalisées ou simplement accentuées comme des parfaits étaient très probablement des participes dans l’intention de l’écrivain. Formes vocalisées en parfait : 1 R 11, 9 (Dn 8, 1) הַנִּרְאָה ; Is 56, 3 הַנִּלְוָה (l. ◌ֶה du participe). — Formes avec le ton mileʿel du parfait : Ruth 1, 22 (2, 6 ; 4, 3) הַשָּׁ֫בָה qui est revenu au lieu de הַשָּׁבָ֫ה la revenue. L’accentuation mileʿel ne se trouvant guère que dans des cas où l’action est passée, on peut croire que les Naqdanim ont préféré le parfait pour mieux exprimer le passé : opposer p. ex. Job 2, 11 הַבָּ֫אָה au sens du passé : qui est venu et Ruth 4, 11 הַבָּאָ֫ה au sens du futur prochain : qui va entrer. Autres ex. : Gn 18, 21 ; 46, 27 ; Is 51, 10 ; Éz 26, 17 (peut-être participe pass. du qal ; cf. § 56 c).

Le détail concernant le pronom relatif est donné à propos de la Proposition relative § 158 e sqq.

  1. Voir aussi l’emploi de אשׁר comme équivalent de כּי dans les propositions substantivales syndétiques § 157 a sqq.
  2. La tendance à sentir אשׁר comme un pronom a dû augmenter à l’époque postérieure où l’on tend à omettre le pronom rétrospectif.
  3. Il faut probt ajouter le ה devant בּאוּ 1 Ch 12, 23, הביאוּ 2 Ch 15, 11 (cf. Mélanges Beyrouth, 6, p. 132, n. 3). Par contre sont fautifs Jos 10, 24 ; 1 S 9, 24. — Le phénomène a pu naître à la 3e p. sg. du parfait dans les cas où la forme était semblable à celle du participe, p. ex. הַבָּא, הַנִּמְצָא, puis se propager à la 3e pl. L’évolution a pu continuer, mais nos textes ne la manifestent pas.