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ques-unes qui se rencontrent en tout tems dans tous les corps naturels, & qui sont toûjours les mêmes ; il y en a d’autres encore qui, quoiqu’elles soient toûjours dans les corps, ont pourtant des degrés d’augmentation ou de diminution. Celles de la premiere classe sont l’étendue, l’impénétrabilité, la force d’inertie, la mobilité, la possibilité d’être en repos, la figurabilité, &c. Celles de la seconde classe sont la gravité ou pesanteur, & la force d’attraction.

Il ne s’est trouvé jusqu’à présent, selon M. Musschenbroeck, aucun corps, soit grand ou petit, solide ou liquide, qui ne renfermât en lui-même ces propriétés. Il n’a même jamais été possible d’ôter ou de faire disparoître par quelqu’art que ce soit, aucune de ces propriétés, que nous appellons pour cette raison propriétés communes. Plusieurs physiciens excluent pourtant la derniere. Voyez Attraction.

Les autres propriétés des corps sont la transparence, l’opacité, la fluidité, la solidité, la colorabilité, la chaleur, la froideur, la saveur, l’insipidité, l’odeur, le son, la dureté, l’élasticité, la mollesse, l’âpreté, la douceur, &c. Ces propriétés ne se remarquent que dans certains corps, & on ne les trouve pas dans d’autres, de sorte qu’elles ne sont pas communes.

Il y a encore une autre sorte de propriétés qui tiennent le milieu entre les premieres & les dernieres. Ces propriétés sont aussi communes, mais seulement à certains égards. Expliquons cela par un exemple. Tous les corps qui sont en mouvement, ont la force de mettre aussi en mouvement les autres corps qu’ils rencontrent ; cette propriété doit être mise par conséquent au rang de celles qui sont communes. Cependant comme tous les corps ne sont pas en mouvement en tout tems, il s’ensuit que cette propriété commune ne devra avoir lieu, & ne pourra être regardée comme telle, que dans les cas où l’on suppose les corps en mouvement ; mais les corps ne sont pas toûjours en mouvement, & par conséquent cette propriété ne peut passer pour commune, puisqu’elle n’est pas toûjours dans tous les corps.

Rien n’est plus propre que les observations, pour nous faire conclure que nous ne connoissons pas en effet la nature des corps ; car si nous la connoissions, ne pourrions-nous pas prédire par avance un grand nombre d’effets que les corps qui agissent l’un sur l’autre devroient produire ? C’est ainsi que les Mathématiciens déduisent plusieurs choses de la nature du cercle. Mais nous ne connoissons d’avance aucun effet, il faut que nous en venions aux expériences pour faire nos découvertes. Dans tous les cas ou les observations nous manquent, nous ne pouvons pas commencer à raisonner sur ce que nous ne connoissons pas encore des corps ; & si nous le faisons, nous nous exposons à tirer des conséquences fort incertaines. Nieuwentit a commencé à démontrer cette vérité dans ses Fondemens de la certitude, & nous pourrions aussi confirmer la même chose par cent exemples. Ces philosophes qui croyent connoître la nature des corps, ont-ils jamais pû prédire par la seule réflexion qu’ils ont faite sur les corps, un seul des effets qu’ils produisent en agissant l’un sur l’autre ? En effet, quand même on leur accorderoit que la nature des corps consiste dans l’étendue, ils n’en seroient pas pour cela plus avancés, parce que nous ne pouvons rien déduire de-là, & que nous ne pouvons rien prévoir de ce qui arrive dans les corps, puisqu’il faut que nous fassions toutes nos recherches en recourant aux expériences, comme si nous ne connoissions point du tout la nature des corps. Mussch. Essais de Physiq. l. I. ch. 1. Voyez Etendue & Impénétrabilité. Par rapport à la couleur des corps, voyez l’article Couleur. (O)

Corps, en Géométrie, signifie la même chose que

solide. Voyez Solide. Nous avons expliqué dans le Discours préliminaire de cet Ouvrage, comment on se forme l’idée des corps géométriques. Ils different des corps physiques, en ce que ceux-ci sont impénétrables ; au lieu que les corps géométriques ne sont autre chose qu’une portion d’étendue figurée, c’est-à-dire une portion de l’espace terminée en tout sens par des bornes intellectuelles. C’est proprement le phantôme de la matiere, comme nous l’avons dit dans ce discours ; & on pourroit définir l’étendue géométrique, l’étendue intelligible & pénétrable. Voyez Etendue.

Les corps réguliers sont ceux qui ont tous leurs côtés, leurs angles & leurs plans égaux & semblables, & par conséquent leurs faces régulieres.

Il n’y a que cinq corps réguliers, le tétrahedre composé de quatre triangles équilatéraux ; l’octaedre de huit ; l’icosaedre de vingt ; le dodécaedre de douze pentagones réguliers ; & le cube de six quarrés. Quand on dit ici composé, cela s’entend de la surface ; les figures que nous venons de dire, renferment ou contiennent la solidité, & composent la surface de ces corps. Voyez Régulier, Irrégulier, &c. (O)

Corps. (Physiq.) Corps élastiques, sont ceux qui ayant changé de figure parce qu’un autre corps les a frappés, ont la faculté de reprendre leur premiere figure ; ce que ne sont point les corps qui ne sont point élastiques.

De quelque façon qu’on ploie un morceau d’acier, il reprendra sa premiere figure : mais un morceau de plomb reste dans l’état où on le met. Voyez Elasticité.

Corps mous, sont ceux qui changent de figure par le choc, & pe la reprennent point. Voy. Mollesse.

Corps durs, sont ceux que le choc ne sauroit faire changer de figure. Voyez Dureté.

Corps fluide, est celui dont les parties sont détachées les unes des autres, quoique contiguës, & peuvent facilement se mouvoir entre elles. Voyez Fluide. (O)

Corps, (Med.) dans les animaux, c’est l’opposé de l’ame, c’est-à-dire cette partie de l’animal qui est composée d’os, de muscles, de canaux, de liqueurs, de nerfs. Voyez Ame.

Dans ce sens, les corps sont le sujet de l’anatomie comparée. Voyez Anatomie.

Corps, dans l’Œconomie animale, partie de notre être étendue suivant trois dimensions, d’une certaine figure déterminée propre au mouvement & au repos. Boerhaave.

Quelques Medecins modernes Allemands ont admis pour troisieme partie un certain genre d’archée ; mais je ne sais ce qu’ils veulent dire, & je pense qu’ils ne se sont pas entendus eux-mêmes. Voyez Archée.

Le corps humain est composé de solides & de fluides. Voyez Solide & Fluide.

Il y a quelques variétés dans les corps des hommes ; c’est ce que prouvent les divers effets des remedes, sur-tout en différens pays : c’est de-là que vingt grains, par exemple, de jalap lâchent à peine le ventre, & dix suffisent dans un autre où l’on transpire moins. Il n’en faut pas conclure de-là qu’il y ait une diversité sensible, dans la nature même des parties qui le composent, & qu’ainsi on ne puisse compter sur aucune pratique générale. L’homme qui mange des alimens de toute espece, & le bœuf qui ne vit que d’herbe, ont à-peu-près le même sang : l’analyse chimique ne montre aucune différence que les sens puissent appercevoir, si ce n’est une odeur de poisson dans les brebis qui vivent de poisson au détroit de Perse, & dans les hommes qui vivent de même. Aussi Tabor dit-il que le sang de l’homme & du bœuf ont le même poids & les mêmes propriétés. Ceci