CHAPITRE XIII.
DIVERGENCE DES SÉRIES DE M. LINDSTEDT.
146. Dans le Chapitre IX, nous avons reconnu que les
équations canoniques
(1)
|
|
|
peuvent être satisfaites formellement par des séries de la forme
suivante
(2)
|
|
|
où les et les sont des fonctions périodiques des quantités
et sont représentées par des séries ordonnées suivant les sinus et
cosinus des multiples des de façon que l’on ait
(3)
|
|
|
La valeur moyenne de ces fonctions périodiques peut d’ailleurs
être choisie arbitrairement.
Il s’agit maintenant de reconnaître si ces séries sont convergentes.
Mais la question se subdivise ; on peut demander en effet :
1o Si les séries partielles (3) sont convergentes, et si la convergence
est absolue et uniforme.
2o En admettant qu’elles ne convergent pas absolument, si l’on
peut grouper les termes de façon à obtenir des séries semi-convergentes.
3o En admettant que les séries (3) convergent, si les séries (2)
convergeront et si la convergence sera uniforme.
Discussion des séries (3).
147.Rappelons de quelle manière nous avons obtenu les
séries (3). Nous sommes arrivés à des équations de la forme suivante
[équations (12) du no 127] et nous en avons tiré
(3 bis)
|
|
|
étant une constante arbitraire.
La série (3 bis) converge-t-elle absolument et uniformément ?
S’il en était ainsi, la somme de cette série devrait rester finie pour
toutes les valeurs du temps. Or, j’ai démontré, dans le Bulletin
astronomique (t. 1, p. 324), que la somme des termes d’une
pareille série ne pouvait constamment rester inférieure à la moitié
d’un quelconque de ses coefficients.
Donc, pour que la série (3 bis) converge uniformément, il faut
que la valeur absolue du coefficient
soit limitée.
Supposons, pour fixer les idées, deux degrés de liberté seulement
et soit la série (3 bis) devient
et la valeur absolue des coefficients
(4)
|
|
|
doit être limitée.
Il est clair d’abord que cela ne peut pas avoir lieu pour les
valeurs commensurables de à moins que ne soit nul toutes
les fois que
Nous sommes donc conduits à nous occuper du cas où est
incommensurable et envisager spécialement ceux des diviseurs
qui correspondent aux réduites successives de
Je dis d’abord que, quelle que soit la série des nombres
on peut trouver un nombre incommensurable (aussi voisin que
l’on veut d’un nombre donné) et qui soit tel que la valeur absolue
des coefficients (4) ne soit pas limitée.
Soient, en effet,
les réduites successives de
Soient
une suite quelconque de nombres positifs indéfiniment croissants.
Je dis qu’on peut toujours choisir le nombre de telle façon que
(5)
|
|
|
Nous avons, en effet, d’après la définition des réduites,
étant un entier positif que nous pouvons choisir arbitrairement,
sans altérer en rien les premières réduites.
On a, d’autre part,
Nous pouvons donc choisir l’entier de telle façon que la
valeur absolue de soit aussi petite que nous le voudrons,
et, par conséquent, de façon à satisfaire à l’inégalité (5), quels que
soient les nombres et
Comme les nombres sont assujettis seulement à être indéfiniment
croissants, nous pouvons choisir arbitrairement les premiers
de ces nombres (quel que soit ), et par conséquent les
premières réduites ; le nombre peut donc être aussi voisin que
l’on veut d’un nombre quelconque donné.
En revanche, on peut souvent trouver un nombre tel que la série (3 bis) soit convergente ; supposons, en effet, que la série
converge et, ce qui arrivera d’ordinaire, de telle façon que l’on ait,
pour toutes les valeurs de et de
(6)
|
|
|
étant un nombre positif quelconque, et et deux nombres
positifs plus petits que 1.
Prenons et étant deux entiers premiers entre eux
et tels que ne soit pas carré parfait. Il vient alors
d’où
ce qui prouve que la série (3 bis) converge.
Mais on peut évidemment choisir les entiers et de telle
sorte que soit aussi voisin que l’on veut d’un nombre
quelconque donné.
Nous sommes donc conduits au résultat suivant, que j’énonce
en l’étendant tout de suite au cas général.
Soient un nombre positif quelconque, des
nombres positifs plus petits que 1.
Je suppose que l’on ait une inégalité analogue à (6), et que j’écrirai
c’est ce qui arrivera d’ordinaire.
Dans ce cas, on pourra choisir les nombres
de telle sorte :
1o Qu’ils soient aussi voisins que l’on veut de nombres donnés, et en même temps que la série (3 bis) ne converge pas uniformément ;
2o Mais on pourra les choisir également de telle sorte qu’ils
soient encore aussi voisins que l’on veut des mêmes nombres
donnés, et que la série (3 bis) converge uniformément.
On conçoit aisément l’importance de cette remarque. En effet,
les observations, quelle que soit d’ailleurs leur précision, ne peuvent
faire connaître les moyens mouvements qu’avec une certaine
approximation. On pourra donc toujours, en restant dans les
limites de cette approximation, s’arranger de façon que les séries
(3 bis) convergent.
D’un autre côté, on peut se demander s’il peut se faire que les
séries (3 bis) convergent pour les valeurs des constantes d’intégration
comprises dans un certain intervalle (on se rappelle
que les dépendent des ). D’après ce que nous venons de voir,
cela ne serait possible que si la série
ne contenait qu’un nombre limité de termes, c’est-à-dire si, dans
la fonction
chacune des fonctions dans son développement suivant
les sinus et les cosinus des multiples des ne contenait qu’un
nombre fini de termes.
Il n’en sera pas ainsi en général, et la fonction par exemple,
sera une série d’une infinité de termes. Mais, dans la pratique, on
dirigera le calcul de façon à être ramené au cas où les fonctions
n’ont qu’un nombre fini de termes. En effet, la série étant convergente,
tous les termes, à l’exception d’un nombre fini d’entre
eux sont extrêmement petits. Il serait donc sans intérêt d’en tenir
compte dès la première approximation.
Voici donc ce qu’on sera conduit à faire : dans la série tous
les termes, sauf un nombre fini d’entre eux, pourront être regardés
comme du même ordre de grandeur que mais il y en aura qui
seront du même ordre de grandeur que d’autres, plus petits
encore, qui seront du même ordre de grandeur que etc. Dans les autres séries on trouvera de même des termes de ces
divers ordres de grandeur.
Nous pourrons donc écrire en général
représentant ceux des termes des qui peuvent être regardés
comme du même ordre de grandeur que Ces termes sont en
nombre fini. Cette manière de décomposer comporte évidemment
un assez grand degré d’arbitraire.
Soit maintenant une quantité qui soit du même ordre de
grandeur que et posons
Tous les termes de seront finis et nous pourrons écrire
Grâce à cet artifice, dépend maintenant de deux paramètres,
et ne contient qu’un nombre fini de termes. Comme les deux
paramètres et sont du même ordre de grandeur, nous ferons
et nous aurons
ne contenant qu’un nombre fini de termes.
Cet artifice, que j’ai peut-être exposé un peu longuement, mais
dont l’application peut se faire très rapidement, montre que dans
la pratique on pourra toujours se supposer ramené au cas où chacune
des fonctions ne contient qu’un nombre fini de termes.
Discussion des séries (2).
148.La question de la convergence des séries (3) étant ainsi
tranchée, il y a lieu de se demander si les séries (2) convergent.
Mais cette question se subdivise.
Les séries (2) dépendent, en effet, de et des constantes d’intégration
On peut donc se demander :
1o Si les séries (2) convergent uniformément pour toutes les
valeurs de et des comprises dans un certain intervalle.
2o Si les séries (2) convergent uniformément pour les valeurs suffisamment petites de quand on donne aux des valeurs convenablement
choisies.
À la première question on doit répondre négativement.
En effet, supposons que les séries (2) convergent uniformément
et écrivons-les sous la forme suivante
(7)
|
|
|
et étant des fonctions développables suivant les puissances
croissantes de et périodiques par rapport aux dépendant
d’ailleurs des d’une manière quelconque.
Résolvons les équations (7) par rapport aux et aux On
pourra tirer de ces équations les et les sous la forme de
séries ordonnées suivant les puissances de et dont les coefficients
dépendent des et des
Il est facile de s’en assurer ; on n’a, en effet, pour voir que le
théorème du no 30 est applicable, qu’à remarquer que, pour
les équations se réduisent à
et que le déterminant fonctionnel des premiers membres est égal
à 1. On n’a d’ailleurs qu’à appliquer la formule de Lagrange généralisée.
On trouve ainsi
(8)
|
|
|
(9)
|
|
|
et étant des fonctions développables suivant les puissances
de uniformes par rapport aux et aux et périodiques par
rapport aux
Les équations (8) définissent ainsi intégrales uniformes de
nos équations différentielles.
D’un autre côté, nous avons posé
et les coefficients ainsi définis dépendent de et des si ces
quantités peuvent varier entre certaines limites, on pourra en disposer de façon que les coefficients soient commensurables
entre eux.
Dans ce cas, on pourra trouver un nombre tel que les
soient des multiples de Par conséquent, quand on donnera
à et aux ces valeurs particulières, les équations (7) représenteront
une solution périodique de période L’existence de
intégrales uniformes nous forcerait à conclure que des exposants
caractéristiques relatifs à cette solution périodique sont nuls.
Mais il y a plus.
Les séries (7), par hypothèse, doivent satisfaire aux équations
différentielles
(1)
|
|
|
Nous avons vu qu’en donnant aux constantes d’intégration certaines
valeurs particulières, les séries (7) représentent une solution
périodique de ces équations. Pour achever de déterminer
cette solution, nous donnerons également aux constantes d’intégration
certaines valeurs particulières.
Soit
(10)
|
|
|
la solution périodique ainsi obtenue. Posons
et formons les équations aux variations des équations (1) (Cf. no 53).
Les séries (7) devant satisfaire aux équations différentielles,
quelles que soient les constantes et on obtiendra
solutions particulières linéairement indépendantes de nos équations
aux variations en faisant
Dans les fonctions
(11)
|
|
|
les constantes et doivent être remplacées par les valeurs qui
correspondent à la solution périodique (10) ; les fonctions (i i)
deviennent ainsi périodiques en
IL en résulte que les exposants caractéristiques sont nuls.
Or nous savons qu’il n’en est pas ainsi en général.
Donc, en général, les séries (2) ne convergeront pas uniformément
quand µ et les x_i^0 varieront dans un certain intervalle.
C.Q.F.D.
149.Il nous reste à traiter la deuxième question ; on peut
encore, en effet, se demander si ces séries ne pourraient pas converger
pour les petites valeurs de quand on attribue aux
certaines valeurs convenablement choisies.
Ici nous devons distinguer deux cas.
En général, les dépendent non seulement des mais encore
de et sont développables suivant les puissances de
Nous avons vu, en outre, que l’on peut choisir arbitrairement
les valeurs moyennes des fonctions et nous avons vu, de
plus, que l’on peut choisir ces valeurs moyennes de façon que
l’on ait
c’est-à-dire que les ne dépendent plus de
Nous pouvons donc distinguer le cas où les dépendent de
et celui où les ne dépendent pas de
Supposons d’abord que les dépendent de et en même temps
qu’il n’y ait que 2 degrés de liberté.
Soit alors
D’autre part, et devraient être développables suivant les puissances de et de telle sorte que
soient périodiques en et
Cela devrait avoir lieu pour les valeurs suffisamment petites
de Or, parmi les valeurs de inférieures à une certaine limite,
on peut toujours en trouver de telles que le rapport soit commensurable,
puisque ce rapport est une fonction continue de
Or, si le rapport est commensurable, les séries (2) représentent
une solution périodique des équations (1) et cela, quelles
que soient les deux constantes d’intégration et .
Si les séries (2) convergeaient, à cette valeur commensurable
de correspondrait une double infinité de solutions périodiques
des équations (1).
Or nous avons vu au no 42 que cela ne peut avoir lieu que dans
des cas très particuliers.
Il semble donc permis de conclure que les séries (2) ne convergent pas.
Toutefois le raisonnement qui précède ne suffit pas pour établir
ce point avec une rigueur complète.
En effet, ce que nous avons démontré au no 42, c’est qu’il ne
peut pas arriver que, pour toutes les valeurs de inférieures à une
certaine limite, il y ait une double infinité de solutions périodiques,
et il nous suffirait ici que cette double infinité existât pour
une valeur de déterminée, différente de 0 et généralement très
petite.
Ainsi nous aurions une infinité de solutions périodiques pour
et pour et nous n’en aurions qu’un nombre fini
(en ne regardant pas comme distinctes les solutions qu’on déduit
les unes des autres en changeant en ) pour les valeurs de
comprises entre 0 et
Il est très invraisemblable qu’il en soit ainsi, et cela suffit déjà
pour rendre fort improbable la convergence des séries (2).
Mais il y a plus : il n’y aurait d’intérêt à constater la convergence
des séries (2) que si cette convergence avait lieu pour une
infinité de systèmes de valeurs des constantes de façon qu’on
puisse toujours trouver un de ces systèmes qui diffère aussi peu
que l’on veut d’un système de valeurs quelconque donné de ces mêmes constantes. Or si un pareil fait se présentait, il y aurait une
infinité de valeurs de pour lesquelles les solutions périodiques
qui correspondent à une valeur commensurable donnée du rapport
sont en nombre infini.
On pourrait d’ailleurs trouver une infinité de pareilles valeurs
de dans tout intervalle, si petit qu’il soit, pourvu qu’il soit assez
voisin de 0. Les exposants caractéristiques devraient être nuls
pour toutes ces valeurs de (Cf. no 54), et comme ces exposants
sont des fonctions continues de (Cf. no 74) ils devraient être
identiquement nuls.
Nous avons vu qu’il n’en est pas ainsi en général, et nous devons
donc conclure que la convergence des séries (2), en admettant
qu’elle se produise pour certains systèmes de valeurs des ne
pourra pas avoir lieu pour une infinité de ces systèmes.
C’est une raison de plus de regarder comme invraisemblable
dans tous les cas la convergence des séries (2) ; car on ne voit pas
bien ce qui distinguerait des autres les valeurs des pour lesquelles
cette convergence aurait lieu.
On peut enfin se demander ce qui arriverait si l’on choisissait
les valeurs moyennes des fonctions et de telle sorte que
Dans ce cas, les ne dépendent plus de mais seulement
des
Ne peut-il pas arriver que les séries (2) convergent quand on
donne aux certaines valeurs convenablement choisies ?
Supposons, pour simplifier, qu’il y ait deux degrés de liberté ;
les séries ne pourraient-elles pas, par exemple, converger quand
et ont été choisis de telle sorte que le rapport soit incommensurable,
et que son carré soit au contraire commensurable
(ou quand le rapport est assujetti à une autre condition analogue
à celle que je viens d’énoncer un peu au hasard) ?
Les raisonnements de ce Chapitre ne me permettent pas d’affirmer que ce fait ne se présentera pas. Tout ce qu’il m’est permis
de dire, c’est qu’il est fort invraisemblable.
Comparaison avec les méthodes anciennes.
150. Je n’ajouterai qu’un mot : quel est, à défaut d’un moyen
d’assurer la convergence des séries, le meilleur choix à faire des
valeurs moyennes des et des ? Je crois qu’il convient de
choisir ces valeurs moyennes de telle façon que les et les
(à partir de et de ) s’annulent pour de telle façon que
les représentent les valeurs initiales des et les les valeurs
initiales des
Si ensuite, on considère les séries ainsi obtenues
(1)
|
|
|
les les et les dépendront de si l’on développe ces
quantités suivant les puissances de puis qu’on ordonne suivant
les puissances croissantes de les seconds membres des équations (1),
on obtiendra le développement selon les puissances de
de celle des solutions particulières de nos équations différentielles
qui admet et pour valeurs initiales des et des
On sait que ce développement est convergent pour les valeurs
de suffisamment petites.
Soit
(2)
|
|
|
les et les sont des fonctions du temps non périodiques, mais
ne dépendent plus de de plus, ces fonctions s’annulent de
même que les et les pour
De la façon dont nous venons de déduire le développement (2)
du développement (1), il est permis de tirer quelques conséquences
au sujet de la forme du développement (2).
Ainsi, pour obtenir il suffit de faire dans l’expression
de Rappelons comment dépend de est une fonction périodique des quantités que nous avons appelées
et l’on a d’ailleurs
est une constante d’intégration et dépend de si donc on
fait se réduit à puisqu’on a
Par conséquent, se réduit à et reste une fonction
périodique des quantités
Donc ne contient pas de terme séculaire.
Pour obtenir il suffit de faire dans
En raisonnant comme nous venons de le faire, on verrait qu’en
faisant dans on n’y introduit pas de terme séculaire. On
a, d’autre part,
ou, pour
On voit ainsi que l’expression de contient des termes séculaires,
mais il faut faire une distinction ; j’appellerai termes séculaires
mixtes les termes de la forme
et termes séculaires purs les termes de la forme
Je puis écrire
En effet, le premier membre est une fonction périodique des et pour
on a Si est nui, l’expression ne contient pas de termes séculaires purs, mais peut contenir des
termes séculaires mixtes. Si n’est pas nul, l’expression contient
des termes séculaires purs.
Il est un cas où est certainement nul, c’est celui où aucune
des quantités n’est nulle, et où il n’y a entre les aucune relation
linéaire à coefficients entiers (cas du no 125). En effet, on a alors
en désignant par la valeur moyenne d’une
fonction périodique
de
Mais voici un autre cas où est encore nul.
Je suppose que
et que, d’autre part, le rapport de à soit incommensurable.
Posons
étant des entiers et et des constantes quelconques.
Telle est, en effet, la forme du développement de puisque
cette fonction est périodique par rapport aux
Il vient alors
où
Pour il vient
où
D’après les hypothèses faites plus haut ne peut être nul que si
Il vient donc
la sommation s’étendant à tous les termes tels que
Soit maintenant
et étant des fonctions de Telle doit être la
forme de la fonction qui est périodique par rapport aux
Soient et ce que deviennent et quand on y remplace
par Soit
ce que devient quand on y remplace par et par La
fonction sera définie par l’équation
d’où
d’où
Si ou s’annule quand on a et est nul.
Donc et contiendront des termes séculaires mixtes, mais ne
contiendront pas de termes séculaires purs.
Au contraire les expressions
pourront contenir des termes séculaires purs.
Appliquons cela au Problème des trois Corps.
Reprenons les séries du no 140.
Les sont nuls, à l’exception de et
Développons les quantités et suivant les puissances croissantes
de il viendra
les et les sont des fonctions de indépendantes de et
s’annulant avec
D’après les considérations qui précèdent, les ne contiendront
pas de terme séculaire ; c’est le théorème de Lagrange sur
l’invariabilité des grands axes quand on néglige les carrés des
masses.
Les contiendront des termes séculaires mixtes, mais pas
de terme séculaire pur ; c’est le théorème de Poisson sur l’invariabilité
des grands axes quand on néglige les cubes des masses.
Les ne contiendront pas de termes séculaires, mais les
contiendront des termes séculaires, tant purs que mixtes.
Revenons au cas où les sont tous différents de 0 et ne sont
liés par aucune relation linéaire à coefficients entiers. On a alors
On verrait comme plus haut que ne donne pas de terme séculaire
et que ne donne pas de terme séculaire pur. On a, d’autre part,
Le second membre peut s’écrire
Nous avons donc encore des termes séculaires mixtes, mais nous
n’avons pas de termes séculaires purs parce que la valeur moyenne
des dérivées est toujours nulle.
Le même raisonnement s’appliquerait évidemment aux termes
suivants du développement, c’est-à-dire aux
Ainsi, dans le cas particulier du Problème des trois Corps, défini
au no 9, le grand axe demeure invariable, au sens de Poisson,
quelque loin que l’on pousse l’approximation.
De même, avec toute autre loi d’attraction que celle de Newton,
les développements des quantités qui correspondent aux grands
axes ne contiennent pas de termes séculaires purs, quelque loin
que l’on pousse l’approximation. Ces quantités sont donc invariables
au sens de Poisson.
Ainsi se trouvent rattachés à la méthode de M. Lindstedt les
théorèmes fameux de Lagrange et de Poisson.
C’est à M. Tisserand que l’on doit l’idée de la possibilité de ce
rattachement.
Ces considérations m’amènent à une dernière remarque.
Il peut sembler que des développements que nous avons établis
dans les Chapitres précédents, on ne puisse tirer aucune conclusion
puisqu’ils sont tous divergents.
Considérons, en effet, le développement de et écrivons
nous pouvons en déduire
Comme les puissances peuvent facilement se développer
suivant les sinus des multiples de ne semble-t-il pas
que l’on puisse en déduire le développement, au moins formel, de
la fonction en série trigonométrique ?
Il en serait de même évidemment de de et
de tous les termes que l’on peut rencontrer dans le développement (2).
Par conséquent, dire que les fonctions représentées par ces
séries (2) peuvent être développées en séries purement trigonométriques,
du moment qu’il s’agit d’un développement purement
formel, c’est, à ce qu’il semble, ne rien affirmer et cela
ne peut rien nous apprendre au sujet de la forme de ces séries (2).
Ce serait se méprendre ; si l’on voulait, en employant l’artifice
grossier que je viens d’appliquer à la fonction (je n’oserais
affirmer que personne ne l’a jamais fait) réduire les développements
(2) à une forme purement trigonométrique, on introduirait une infinité d’arguments différents. Ce que nous apprennent
les théorèmes des Chapitres précédents, c’est que les développements
formels sont possibles avec un nombre limité d’arguments.
C’est cela qu’on ne pouvait prévoir et d’où il est permis de tirer
de nombreuses conclusions au sujet des coefficients des séries (2)
ou de ceux des autres séries analogues que l’on rencontre dans le
Problème des trois Corps.