Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste/Chap.11

Gauthier-Villars et Fils (2p. 47-73).

CHAPITRE XI.

APPLICATION AU PROBLÈME DES TROIS CORPS.


Difficulté du problème.

133.Dans le cas du Problème des trois Corps, une difficulté spéciale se présente et rend plus difficile l’application des méthodes du Chapitre IX.

En effet, ne dépend plus des six variables de la première série

mais seulement de deux d’entre elles

Parmi les quantités que nous avons appelées

il y en a donc quatre qui sont nulles, à savoir

La condition pour que les conclusions du Chapitre subsistent, à savoir qu’il n’y ait entre les aucune relation linéaire à coefficients entiers, n’est donc pas satisfaite.

Cette difficulté ne se présenterait pas, au moins si les trois Corps se meuvent dans un plan, avec toute autre loi d’attraction que celle de Newton ; en effet, ces équations

ont une signification évidente. Elles veulent dire que dans le mouvement képlérien les périhélies et les nœuds sont fixes ; nous avons en effet les équations

Dans le mouvement képlérien se réduit à et sont des constantes.

Or dans le cas du Problème des deux Corps et avec une loi différente de celle de Newton, les nœuds sont encore fixes, mais les périhélies ne le sont plus. Il en résulte que si le mouvement a lieu dans un plan, et si l’on n’a plus à s’inquiéter des nœuds, la méthode du Chapitre IX est applicable sans modification.

Extension de la méthode du Chapitre IX à certains cas singuliers.

134.Examinons donc le cas où ne contient pas toutes les variables

Supposons, pour fixer les idées, qu’il y ait 3 degrés de liberté et que contienne deux des variables de la première série et et ne contienne pas la troisième

On a alors

Nous supposons toujours

est une fonction de périodique par rapport à et

Je considère un instant comme une fonction de et de seulement ; c’est une fonction périodique de ces deux variables et j’appelle la valeur moyenne de cette fonction périodique qui dépend encore de et

Je considère d’abord le cas où ne dépend que de et et est au contraire indépendant de

Nous cherchons encore à trouver une fonction,

de même forme que la fonction envisagée dans le no 125 et qui satisfasse formellement à l’équation

(4)

étant une constante que nous pourrons écrire

étant des constantes arbitraires.

Nous poserons d’abord

Les constantes et seront liées par la relation

Mais, comme la constante est arbitraire, et seront eux-mêmes arbitraires.

Je poserai ensuite

Il vient

étant une fonction arbitraire de qu’il reste à déterminer. En égalant dans l’équation (4) les coefficients de il vient, comme au no 125,

(5)

Quelle que soit la fonction arbitraire le second membre de l’équation (5) sera une fonction périodique de et de et la valeur moyenne de cette fonction sera

Nous voulons que la fonction soit de la forme suivante

fonction périodique de et

Pour que cela soit possible, il faut et il suffit, comme nous l’avons vu au no 125, que la valeur moyenne du second membre de (5) se réduise à une constante que nous appellerons Nous aurons alors, pour déterminer la fonction arbitraire l’équation suivante

(6)

J’ai supposé plus haut que ne dépendait pas de il suffira donc pour satisfaire à cette équation (6) de prendre

étant une constante qui peut encore être regardée comme arbitraire, puisque la constante l’est elle-même ; on aura alors,

En égalant dans l’équation (5) les valeurs moyennes des deux membres, il vient

Comme est arbitraire, je ferai ce qui me permettra de faire comme au no 125,

L’équation (5) permet alors de déterminer à une fonction arbitraire près de

Cela posé, imaginons que l’on ait déterminé complètement les fonctions

et qu’on ait calculé à une fonction arbitraire près de supposons que l’on se propose d’achever la détermination de et de calculer à une fonction arbitraire près de

Égalons dans les deux membres de (4) les coefficients de il viendra

(7)

étant une fonction qui ne dépend que des et des dérivées de ainsi que de et de Les fonctions sont connues. Nous connaissons à une fonction arbitraire près de  ; nous connaissons donc et Donc on peut regarder comme une fonction connue des et cette fonction sera périodique.

Étant donnée une fonction périodique de et nous désignerons par la valeur moyenne de considérée un instant comme fonction de et seulement. Il en résulte que est encore une fonction de

On verrait, comme plus haut, que la valeur moyenne du second membre de (7) doit se réduire à une constante d’où

Comme ne dépend pas de il vient

d’où
(8)

Connaissant à une fonction arbitraire près de nous connaissons

Le second membre de (8) est donc entièrement connu. D’autre part, est une fonction connue de et où ces variables sont remplacées par les constantes connues et Nous connaissons donc et l’on pourra tirer de l’équation (8) et par intégration

Pour que soit une fonction périodique de il faut que la valeur moyenne du second membre de (8) soit nulle ; or on peut toujours disposer de la constante arbitraire pour qu’il en soit ainsi.

La détermination de est ainsi achevée ; l’équation (7) nous permettra ensuite de déterminer à une fonction arbitraire près de Pour que la valeur de tirée de (7) soit périodique en et il faut que la valeur moyenne du second membre soit nulle. Or cette valeur moyenne est et, comme la constante reste arbitraire, nous pouvons prendre

Ainsi l’on pourra toujours déterminer les fonctions par récurrence. Les conclusions du no 125 subsistent donc ; la seule différence, c’est que le développement de suivant les puissances de au lieu de commencer par un terme tout connu, commence par un terme en

Supposons maintenant qu’il y ait 4 degrés de liberté et huit variables  ; que ne dépende que de et et de

Les mêmes conclusions subsisteront encore pourvu que :

1o Il n’y ait entre et (c’est-à-dire entre et ) aucune relation linéaire à coefficients entiers ;

2o Il n’y ait non plus entre et aucune relation linéaire à coefficients entiers.

En effet, l’équation analogue à (8) qui sert à déterminer s’écrit alors

(8 bis)

et pour que l’on puisse tirer de là en fonction périodique des et il faut et il suffit qu’il n’y ait entre et aucune relation linéaire à coefficients entiers.

135.Nous avons supposé jusqu’ici que ne dépendait que des variables de la première série et (en supposant, comme à la fin du numéro précédent, qu’il y a 4 degrés de liberté et que ne dépend que de et de )

Imaginons maintenant que dépende non seulement de et mais encore de et de

Si nous remplaçons et par les constantes et et et par et et que nous égalions ensuite à une constante nous aurons l’équation suivante

(1)

qui définira une fonction des deux variables et

Supposons que l’on ait trouvé une fonction satisfaisant à cette équation ; que cette fonction dépende en outre des deux constantes et et de deux constantes d’intégration nouvelles que j’appellerai et

La fonction

satisfera alors à l’équation

De plus les relations

définiront un changement de variables, les variables anciennes étant les et les et les variables nouvelles étant les et les

D’après ce que nous avons vu au no 4, ce changement de variables n’altérera pas la forme canonique des équations.

On voit aisément que

et, par conséquent, qu’après le changement de variables ne dépendra que de et de

Si l’on suppose (ce que nous ferons) que la fonction est telle que (ou ), (ou ) soient des fonctions des et des périodiques par rapport aux la fonction après le changement de variables sera périodique par rapport aux

Nous avons appelé la valeur moyenne de considérée comme fonction périodique de et Je dis que, si après le changement de variables nous regardons comme une fonction périodique de et sa valeur moyenne sera encore

En effet, on a par définition

et je me propose de démontrer que

On a en effet

or, dans les relations

et et n’entrent pas ; ce qui montre que, quand on exprimera les variables nouvelles en fonction des anciennes et ne dépendront ni de ni de

Donc, si l’on remplace, dans et par leurs valeurs en fonction de et on aura

d’où

et de même

On a donc


C.Q.F.D.

De plus, la quantité qui doit être une constante ne pourra dépendre que des constantes d’intégration, c’est-à-dire des de sorte que ne dépendra [en vertu de l’équation (1)] que de et

Nous sommes donc ramené au cas traité dans le paragraphe précédent, et nous devons conclure que les équations canoniques

peuvent être satisfaites formellement par des séries de la forme suivante

où les sont des constantes, où les et les sont des fonctions périodiques des dépendant en outre des constantes d’intégration où les sont autres constantes d’intégration ; où enfin les quantités dépendent encore des constantes

Revenant aux variables primitives, on verra ensuite que les équations canoniques

peuvent être satisfaites formellement par des séries de la forme suivante

les et les étant des fonctions périodiques des

Quant au coefficient il peut être égal à 0 ou à 1. Il est toujours égal à 1 pour 1 ou 2 ; il est égal à 1 ou à 0 pour 3, selon que c’est ou qui est périodique par rapport aux et de même, il es égal à 1 ou 0 pour 4, selon que c’est ou qui est périodique par rapport aux

Tout est donc ramené à l’intégration de l’équation aux dérivées partielles (1), ou, ce qui revient au même, à l’intégration des équations canoniques

Application au Problème des trois Corps.

136.Appliquons ce qui précède au Problème des trois Corps ; nous avons mis les équations de ce problème sous la forme

(1)
avec

étant un paramètre très petit, et la fonction perturbatrice. Nos variables sont celles du no 11,

(2)

ou bien encore celles du no 12,

(3)

ne dépend que de et de dépend des douze variables, mais est périodique par rapport à et Si l’on considère donc comme fonction périodique de et de et que l’on appelle la valeur moyenne de cette fonction, ne sera pas autre chose que la fonction que nous avons désignée ainsi dans le Chapitre précédent. Elle dépend de dix variables, à savoir des douze variables (2) à l’exception de et de ou bien des douze variables (3) à l’exception de et de Si l’on adopte les variables (2), elle sera périodique par rapport à et

La méthode des nos 134 et 135 sera donc applicable aux équations (1) et en permettra l’intégration formelle pourvu que l’on sache intégrer les équations

(4)

où les variables et sont les quatre dernières paires de variables conjuguées (2) ou les quatre dernières paires de variables conjuguées (3), et où et sont regardées comme des constantes.

Or ces équations (4) sont précisément celles que nous avons appris dans le Chapitre précédent à intégrer formellement. On conçoit donc comment la méthode de M. Lindstedt peut être applicable au cas général du Problème des trois Corps.

L’application de cette méthode que je viens d’exposer succinctement sera l’objet des pages qui vont suivre.

Changement de variables.

137.Nous allons donc faire un changement de variables analogues à celui du no 131.

Nous poserons pour cela

et étant les angles définis au no 131.

Nous ferons ensuite, comme dans le même numéro,

et nous reconnaîtrons que la forme canonique des équations n’est pas altérée si l’on remplace les variables anciennes

par les variables nouvelles

Les variables et ont déjà été déterminées en fonctions des des des des et des dans le Chapitre précédent.

Il me reste à voir quelle est la forme de la relation qui lie les nouvelles variables et à et

Il vient

et étant des formes quadratiques des et des dont les coefficients dépendent de et de et qui s’écrivent

et étant les angles que nous avons appelés ainsi au no 131.

On verrait alors, en raisonnant comme au no 135, que toute fonction périodique en et est encore, après le changement de variables, périodique en et et que la valeur moyenne est la même dans les deux cas.

Nous pouvons tirer de là quelques conclusions au sujet de la forme de la fonction

dépend d’une manière quelconque de et de mais elle est périodique en et de plus elle est développable suivant les puissances des et des

J’ajouterai qu’elle ne doit pas changer quand on change et e, et et quand les et les changent de signe à la fois. Il suffit, pour s’en rendre compte, de se reporter à ce que nous avons dit au no 12 et d’observer que quand

se changent en

les quantités et se changent en et et que les variables etc., changent de signe.

Nous allons enfin faire un dernier changement de variables en posant, comme au no 131,

ce qui, en vertu de la remarque du no 6, n’altère pas la forme canonique.

devient alors développable suivant les puissances des et il vient d’ailleurs

Cas des orbites planes.

138.Après ce changement de variables les équations du mouvement prennent la forme suivante.

Les deux séries de variables conjuguées sont

et l’on a

ne dépend que de et de et qui sont périodiques par rapport à et sont développables suivant les puissances de

De plus, ces fonctions ne changent pas quand on augmente et d’une même quantité ; elles ne dépendent donc que des différences,

Si dans nous remplaçons par et que nous égalions à une constante, en regardant d’ailleurs et comme des constantes données, nous obtiendrons une équation aux dérivées partielles

(1)

D’après ce que nous avons vu aux nos 134 et 135, il suffit de savoir intégrer cette équation pour pouvoir former des séries développées suivant les puissances croissantes de et satisfaisant formellement aux équations du mouvement,

(2)

Il est un cas particulier où l’intégration de l’équation (1) est relativement facile : c’est celui où l’on étudie le mouvement de trois corps seulement se mouvant dans un même plan.

Dans ce cas en effet, le nombre des quantités se réduit à 2, de sorte que, si l’on regarde et comme des constantes, ne dépend plus que de quatre variables et mais il y a plus : nous avons vu plus haut que ne dépendait que des différences Donc ne dépendra que des trois variables et de sorte que l’équation (1) s’écrira

Si nous posons et que nous prenions pour variables nouvelles et l’équation devient

Si nous donnons alors à une valeur constante arbitraire que j’appellerai l’équation ne contient plus que et On en tirera donc en fonction de de la constante et de et l’on aura

d’où

Voyons quelle est la forme de cette fonction

J’observe que est développable suivant les puissances de et de que le terme de degré 0 se réduit à une constante que j’appellerai et que les termes de degré 1 se réduisent à

Je poserai alors (en introduisant deux nouvelles constantes d’intégration et à la place de et de )

Nous aurons alors pour déterminer et les deux équations simultanées

Le déterminant fonctionnel des deux premiers membres par rapport à et se réduit pour à Il n’est donc pas nul.

Donc, d’après le théorème du no 30, on pourra tirer de ces équations et sous la forme de séries ordonnées suivant les puissances croissantes des les termes de degré 0 seront nuls, les termes du premier degré se réduiront respectivement à et les termes de degré supérieur auront pour coefficients des fonctions périodiques de

La fonction du no 135 pourra alors s’écrire

et nous aurons

et étant deux constantes dépendant de et et étant une fonction périodique de et

Nous allons faire le changement de variables défini au no 4, en prenant pour variables nouvelles de la première série

liées aux variables anciennes et par les relations

(3)

Les variables conjuguées que j’appellerai

seront alors définies par les équations

(4)

Je suppose que dans qui dépendait des constantes et on ait remplacé ces constantes en fonctions de et C’est dans ce sens qu’il faut entendre

Pour que les conclusions du no 135 soient applicables, il faut que les variables anciennes

ainsi que les variables

soient des fonctions uniformes des variables nouvelles

et que ces fonctions soient périodiques, par rapport à et à

Cherchons d’abord les expressions de et en fonctions des variables nouvelles, nous avons pour cela les deux équations

(5)

Nous devons d’abord nous demander si les valeurs de et de tirées de ces équations seront des fonctions uniformes des variables nouvelles. Pour qu’elles cessassent de l’être, il faudrait que le déterminant fonctionnel des seconds membres par rapport à et s’annulât, c’est-à-dire que l’on eût

J’écrirai, pour abréger, cette équation sous la forme suivante

J’observe d’abord que et seront dans les applications des quantités très petites de l’ordre du carré des excentricités.

Ces quantités sont liées aux par les relations suivantes

Or peut être développé suivant les puissances croissantes des il n’y a pas dans ce développement de terme tout connu et les termes du premier degré se réduisent à

On tirera de là, par le théorème du no 30,

et étant des séries développées suivant les puissances de et de dont les coefficients dépendent d’ailleurs d’une manière quelconque de

et

Les termes de degré 0 seront nuls, ceux du premier degré se réduiront respectivement à et à

Il résulte de là que et seront, comme et de l’ordre du carré des excentricités.

D’après la définition de et ces quantités pourront être développées suivant les puissances de et les coefficients du développement dépendant d’une manière quelconque de et de ces développements ne contiendront pas de termes de degré 0 et les termes du premier degré se réduiront respectivement à et à

Il résulte de là :

1o Que et sont de l’ordre du carré des excentricités ;

2o Qu’on peut inversement développer et suivant les puissances de et de et qu’on a alors

et ne contenant que des termes du second degré au moins par rapport à et

3o Que peut se développer suivant les puissances croissantes de et de et ne contient alors que des termes du deuxième degré au moins par rapport à ces deux quantités ;

4o Que le développement de et de suivant les puissances croissantes de et de commençant par des termes du premier degré, ces deux dérivées sont du même ordre de grandeur que le carré des excentricités ;

5o Qu’il en est de même des dérivées secondes et par conséquent de

étant très petit, ne peut être nul.

Nous devons donc conclure que et et par conséquent sont des fonctions uniformes des variables nouvelles.

J’ajoute que sont des fonctions périodiques de et de si, en effet, nous augmentons et de , et de et étant des entiers, les équations (5) ne cesseront pas d’être satisfaites, puisque est périodique en et et ne changeront pas.

En substituant ces valeurs de et de dans les équations (3) et (4) on verrait que les variables anciennes

sont des fonctions uniformes des variables nouvelles, périodiques par rapport aux

Nous nous trouvons donc dans des conditions où les résultats du no 135 sont applicables.

Exprimons la fonction à l’aide des nouvelles variables. J’observe d’abord que reste exprimé en fonction de et de seulement. De plus, est périodique par rapport aux variables de la seconde série et

La valeur moyenne de considérée comme fonction périodique de et se réduit à D’autre part, se réduit en vertu de l’équation (1) à la constante ou bien encore à

ou à

Ainsi dépend seulement de et et ne dépend pas des variables de la seconde série.

Nous retombons donc sur le cas étudié au no 134.

Je dis maintenant que ne change pas quand et augmentent d’une même quantité. En effet, nous savons déjà que ne change pas quand et augmentent d’une même quantité et que ne dépend que de la différence

Les équations (4) et (5) montrent alors que, quand et augmentent d’une même quantité et augmentent de cette même quantité donc quand ces quatre variables nouvelles augmentent de ne change pas.

La façon dont dépend de et de est assez compliquée, parce que avant le changement de variables, contenait les radicaux et

Soit

ce que devient la fonction après le changement de variables. Nous avons à intégrer l’équation

(6)

Nous voulons satisfaire formellement à cette équation en faisant

et

et doivent être nos quatre constantes d’intégration. On n’a pour cela, comme nous l’avons vu, qu’à appliquer la méthode du no 134.

Étude d’une intégrale particulière.

139.On trouve une intégrale particulière remarquable en supposant que les deux dernières constantes et soient nulles.

Il suffit pour cela de faire dans l’équation (6)

Il arrive alors que le premier membre de cette équation ne dépend plus ni de ni de

En effet, avant le dernier changement de variables que nous venons de faire, était développable suivant les puissances de

et

et ne dépendait d’autre part que des autres variables

et

Si donc on fait

ne dépend plus que de et

Si, d’autre part, on fait

qui est développable suivant les puissances croissantes des et ne contient que des termes du second degré au moins par rapport à ces quantités, s’annulera ainsi que ses dérivées du premier ordre. De même et s’annuleront et il viendra

De même

Il résulte de là que et s’annulant et, d’autre part, et se réduisant à et il résulte, dis-je, que ne dépend plus que des quatre variables

et

Si donc on fait

le premier membre de l’équation (6) ne contient plus que

Cette équation est alors très facile à intégrer ; on n’aurait pour y parvenir qu’à appliquer les procédés du no 125 ; mais il y a ici quelque chose de plus.

L’intégrale n’est plus purement formelle et la série développée suivant les puissances de à laquelle on parvient est convergente.

En effet, ne dépend que de la différence puisque nous avons vu que ne doit pas changer quand et augmentent d’une même quantité et qu’ici a cessé de dépendre de et de

Il résulte de là que les deux équations

(où et sont deux constantes quelconques) sont compatibles ; on en tirera et et, par conséquent, sous la forme de séries ordonnées suivant les puissances de

L’intégrale ainsi obtenue dépend de deux constantes arbitraires et mais ces deux constantes peuvent s’exprimer à l’aide de deux des quatre constantes primitivement choisies, à savoir de et de les deux autres constantes et étant nulles par hypothèse.

Nous appellerons cette intégrale particulière de l’équation (6),

(7)

Si les constantes et sont convenablement choisies (Cf. 125), sera de la forme suivante

fonction périodique de

La discussion de cette intégrale particulière ne conduirait pas, ainsi qu’on serait tenté de le croire, à des solutions particulières simples du Problème des trois Corps.

Forme des développements.

140.L’existence de la fonction étant ainsi démontrée, on peut en déduire le résultat suivant, en raisonnant comme au no 125.

Il existe des séries

(1)

ordonnées suivant les puissances de et qui satisfont formellement aux équations du Problème des trois Corps.

et sont des constantes ; on a

Les les les les sont des fonctions périodiques des qui dépendent en outre des constantes

D’autre part, les quantités (qui dépendent en outre des constantes ) sont développables suivant les puissances croissantes de de telle sorte que l’on a

Le point sur lequel je désire attirer l’attention, c’est que l’on a

Les coefficients des séries qui précèdent auraient pu être calculés d’une façon plus rapide et sans passer par toute cette série de changements de variables, si je ne m’étais attaché surtout à établir simplement et rigoureusement la possibilité même du développement.

Il y a plus : les variables primitives peuvent être développées en séries de même forme, c’est-à-dire en séries dont les termes sont des fonctions périodiques de et Il suffit, pour s’en convaincre, de remplacer dans les expressions des variables primitives en fonctions des variables nouvelles, d’y remplacer, dis-je, ces variables nouvelles par leurs expressions (1) ; et alors on pourra avoir avantage à calculer directement les coefficients des développements des variables primitives, sans passer par l’intermédiaire des variables nouvelles qui ont servi à démontrer la possibilité de ce développement.

Je ne veux pas insister ici sur les procédés qui peuvent permettre le calcul direct de ces coefficients. Ce que j’ai dit au no 127 suffit pour en faire comprendre l’esprit, et j’aurai d’ailleurs l’occasion d’y revenir au Chapitre XIV.

J’indiquerai seulement un moyen d’éviter le dernier changement de variables, celui par lequel on passe des et des aux et aux ce serait là, dans les cas où l’on ne pourrait l’éviter, la partie la plus pénible du calcul.

Il suffit pour cela de grouper convenablement les termes et cela est possible pourvu que les excentricités soient petites.

Nous pouvons distinguer dans deux sortes de termes :

1o Ceux qui sont de degré 0, 1, 2 ou 3 par rapport aux excentricités et aux inclinaisons ;

2o Ceux qui sont de degré 4 au moins par rapport aux excentricités et aux inclinaisons.

Les termes de la seconde sorte sont beaucoup plus petits que ceux de la première. Soit alors l’ensemble des termes de la première sorte et l’ensemble des termes de la seconde sorte ; nous pourrons supposer que est une constante très petite et que est fini, et écrire

Rien n’empêchera alors de réunir les termes aux termes puisque est beaucoup plus petit que ou de chercher à développer suivant les puissances de et de

Alors on conserve les variables

la valeur moyenne de se réduit à

(Cf. no 131), et est par conséquent indépendante des variables de la seconde série. Or le dernier changement de variables n’avait d’autre but que de rendre indépendant des variables de la seconde série. Il est donc maintenant inutile.

Cas général du Problème des trois Corps.

141.Passons maintenant au cas du Problème des trois Corps dans l’espace. Le nombre des variables et est alors égal à 4 et l’équation (1) du no 135 s’écrit

(1)

Elle n’est plus susceptible d’être intégrée par le procédé que nous avons employé au no 138 ; on ne connaît même pas de moyen de l’intégrer exactement, mais on peut trouver une méthode simple d’intégration formelle, ce qui peut nous suffire au point de vue où nous nous sommes placé.

Les quantités

sont de l’ordre du carré des excentricités ; si donc nous posons

étant une constante de l’ordre du carré des excentricités, les dérivées seront finies.

La fonction est développable suivant les puissances croissantes des et nous avons

représentant l’ensemble des termes de degré par rapport aux ( ne diffèrent pas des quantités appelées ainsi au no 131). Si je désigne par ce que devient quand on y remplace par l’équation (1) pourra s’écrire

ou bien

ne dépend que de et de et, comme nous regardons momentanément ces quantités comme des constantes, sera aussi une constante.

Si alors nous posons

l’équation (1) deviendra

(2)

Nous sommes ainsi conduit à intégrer une équation aux dérivées partielles dont le premier membre dépend des dérivées et est d’ailleurs périodique par rapport aux variables indépendantes Ce premier membre dépend d’un paramètre et quand ce paramètre s’annule, il se réduit à

Pour le premier membre ne dépend donc plus des mais seulement des dérivées

Nous nous trouvons donc dans les conditions où l’analyse du no 125 est applicable et nous pouvons conclure qu’il existe une série

développée suivant les puissances de et qui, substituée à la place de satisfait formellement à l’équation (2), et que cette série est telle que les dérivées

soient périodiques par rapport aux

Nous poserons

étant nos quatre constantes d’intégration ; et la constante devra satisfaire à l’équation

On vérifie sans peine que est un polynôme entier de degré par rapport aux quatre constantes

Il en résulte que

se présente sous la forme d’une série développée suivant les puissances entières croissantes des quatre quantités

que j’appellerai pour abréger

Cette série, développée suivant les puissances des quatre constantes qui sont de l’ordre du carré des excentricités, satisfait formellement à l’équation (1).

Posons, comme au no 138,

étant périodique par rapport aux et les étant des constantes développables suivant les puissances croissantes des

Les sont inversement développables suivant les puissances des on peut aussi développer T suivant les puissances des et la série ainsi obtenue satisfait encore formellement à l’équation (1).

Nous allons maintenant faire un changement de variables analogue à celui du no 138 [[[Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste/Chap.11#Eq.138-3|équations (3)]], (4) et (5)].

Nous poserons donc

En remplaçant les variables anciennes

par les nouvelles

on n’altère pas la forme canonique des équations.

On démontrerait comme dans le no 138 :

1o Que les sont de l’ordre du carré des excentricités ;

2o Que les quantités sont des fonctions périodiques des

3o Que est développable par rapport aux puissances croissantes de des et des les étant eux-mêmes développables suivant les puissances croissantes des

4o Que est une fonction périodique des de et

5o Que la valeur moyenne de considérée comme fonction périodique des deux variables et est égale à et ne dépend que de et des

Nous sommes donc dans les conditions où l’analyse du no 135 est applicable.

Soit donc

ce que devient la fonction après le changement de variables ; on pourra trouver une série développable suivant les puissances de satisfaisant formellement à l’équation

et dépendant de six constantes que j’appellerai

Nous arrivons ainsi aux mêmes conclusions que dans les nos 138 et 140.

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