La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité/P3/Conclusions

Gauthier-Villars et fils (1p. 487-488).
Conclusions de la troisième période

CONCLUSIONS DE LA TROISIÈME PÉRIODE.
1877 à 1892

Nous prions instamment le lecteur de se reporter à la page 96 et à la page 212 de cet Ouvrage, et de relire les conclusions de la première et de la deuxième périodes.

À ces conclusions il ne nous reste à ajouter que les résultats des progrès réalisés depuis 1877, résultats d’ailleurs de la plus haute valeur. Les voici, en continuant la notation des séries précédentes. Aux 391 dessins des deux premières périodes, l’observation assidue de la planète vient d’en ajouter 180 autres, ce qui nous représente un ensemble de 571 vues télescopiques ou cartes aréographiques.

28. Nous adopterons pour le diamètre le plus probable de la planète celui qui résulte de la discussion de Hartwig (p. 287 et 320) : 9″,35. Pour la parallaxe 8″,82, ce diamètre = 0,530, celui de la Terre étant 1. Le volume qui en résulte est 0,149 du globe terrestre.

29. La masse est fixée à 1/3093500 de celle du Soleil ou à 0,105 de celle de la Terre.

30. La densité qui en résulte est 0,705, celle de la Terre étant 1, et la pesanteur à la surface est 0,376. Un kilogramme terrestre transporté sur Mars n’y pèserait que 376 grammes. Tout y est plus léger qu’ici.

31. La géographie de Mars, ou l’aréographie, s’est complétée par des découvertes inattendues. Aux continents, aux mers, aux îles, aux lacs, aux golfes, aux neiges polaires, aux neiges intermittentes, l’observation télescopique a ajouté un réseau de tracés rectilignes allant d’une mer à l’autre et auxquels on a donné le nom de canaux.

32. La nature de ces lignes n’est pas encore déterminée par l’observation. Cependant, leur emplacement, correspondant avec celui de fleuves arrivant à des embouchures connues, leur jonction avec les mers, leur couleur, leurs variations de largeur et parfois même de cours, tout conduit à penser qu’elles sont dues à un élément mobile, analogue à l’eau. Sont-ce vraiment des canaux ? Est-ce la même eau qu’ici ? Ne s’y ajoute-t-il pas des formations météoriques aqueuses ou de la végétation ? C’est ce que les observations futures décideront sans doute.

33. En certaines circonstances, vers les équinoxes de printemps et d’automne, ces canaux sont vus doubles. Le phénomène est peut-être causé par une réfraction atmosphérique, comme il arrive dans notre atmosphère par les cristaux de glace qui produisent les halos et parhélies et rappelant la double réfraction du spath d’Islande. Cependant la substance qui forme les mers, lacs et canaux paraît douée de la propriété de se séparer parfois en deux parties à peu près égales. Nous ne connaissons rien d’analogue sur la Terre.

34. Des variations incessantes sont observées dans les mers, lacs et canaux, comme étendue, comme couleur et même comme positions pour ces derniers. La planète Mars est un monde vivant.

35. Le ton général des continents est la couleur jaune-roux des blés mûrs. C’est sans doute celle de la végétation quelconque qui doit recouvrir ces surfaces.

36. La carte de la planète est construite par une triangulation géométrique aussi précise que les cartes terrestres. 114 points ont été mesurés micrométriquement.

37. L’inclinaison de l’axe est de 24° 52′ : les saisons sont donc très peu différentes des nôtres.

38. La rotation de Mars est fixée avec précision à 24h 37m 22s,65. La durée du jour solaire est de 24h 39m 35s,0.

39. La planète est accompagnée de deux petits satellites, dont le diamètre ne paraît pas excéder 12 kilomètres pour le premier et 10 pour le second, qui tournent autour d’elle, le premier, Phobos, en 7h 39m 14s, c’est-à-dire beaucoup plus rapidement que la planète, le second, Deimos, en 30h 17m 54s, aux distances respectives de 6 000 kilomètres de la surface pour Phobos et 20 000 pour Deimos. Le premier offre un petit disque de 7′ et le second un plus petit encore, de 2′ 1/2. Vu de Mars, le Soleil offre, en moyenne, un disque de 21′.

40. Le premier satellite et le Soleil peuvent produire de légères marées sur les plages unies des mers martiennes et peut-être dans les canaux.

41. L’atmosphère de Mars est plus légère et généralement plus pure que la nôtre. Les nuages y sont rares. Cependant, outre les neiges polaires, fort étendues en hiver et très réduites en été, il paraît exister en certaines régions continentales ou insulaires des neiges et de la gelée blanche. La climatologie martienne est, parmi toutes les planètes, celle qui ressemble le plus à la climatologie terrestre.

42. Le monde de Mars paraît habitable au même degré que le monde terrestre. Il est plus ancien, cosmogoniquement, et son humanité peut être plus avancée que la nôtre.

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