L’Encyclopédie/1re édition/COMMISSAIRES

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COMMISSAIRES, sub. m. pl. (Jurisprud.) est le nom que l’on donne à certains officiers qui sont commis, soit par le Roi directement, soit par quelque juge, pour faire certaines fonctions de justice ou police. Il y en a de plusieurs sortes : les uns qui sont en titre d’office ou commission permanente, qui sont établis par le Roi pour faire ordinairement certaines fonctions ; les autres qui n’ont qu’une simple commission pour un tems limité & pour une affaire particuliere, soit que la commission émane du Roi, ou qu’elle soit seulement émanée de quelque juge.

La premiere ordonnance où l’on trouve le terme de commissaire employé, commissarii, est celle de saint Louis en 1254 ; depuis ce tems il est devenu d’un usage fréquent ; nous expliquerons dans les subdivisions suivantes les fonctions des différentes sortes de commissaires qui ont rapport à la justice. (A)

Commissaires au Chastelet, (Jurisprud.) qu’on appelle aussi commissaires-enquéteurs-examinateurs, sont des officiers de robe longue établis pour faire certaines instructions & fonctions de justice & police, à la décharge des magistrats du châtelet.

Le commissaire de la Mare qui étoit fort zélé pour l’honneur de sa compagnie, prétend dans son traité de la police, tome I. liv. I. tit. 12. que les enquêteurs-examinateurs sont plus anciens que les conseillers au Châtelet.

Mais il est certain, comme nous le prouverons ci-après au mot Conseillers au châtelet, que ceux-ci sont plus anciens ; que c’étoit eux qui faisoient autrefois les enquêtes, informations, partages, & toute l’instruction ; que ce qui est dit dans les anciens auteurs & dans les registres publics jusque vers l’an 1300 au sujet des auditeurs & enquêteurs, ne doit point s’entendre d’officiers qui fussent en titre pour ces fonctions, mais de conseillers ou avocats qui étoient délégués à cet effet par le prévôt de Paris, & autres juges ; il n’est donc pas étonnant qu’il soit dit en plusieurs endroits que les auditeurs & enquêteurs avoient séance & voix délibérative au châtelet, puisque c’étoient ordinairement des conseillers qui faisoient cette fonction ; & c’étoit comme conseillers qu’ils avoient cette séance.

On ne trouve point de preuve certaine qu’avant l’an 1300, il y eût au châtelet des enquêteurs ou examinateurs en titre, & dont la fonction fût permanente, & séparée de celle des conseillers. (A)

Les examinateurs, appellés depuis commissaires au châtelet, ont eux-mêmes reconnu dans deux arrêts que les conseillers du châtelet étoient plus anciens qu’eux.

On voit dans le premier de ces arrêts, qui est du 5 Août 1434, qu’il fut dit par Chauvin & consorts examinateurs au châtelet, qu’ab antiquo il n’y avoit nombre d’examinateurs qui fût ordinaire ; mais que les conseillers du châtelet, qui sont douze, étoient comme les conseillers de la cour ; qu’eux-mêmes faisoient les enquêtes, & ne postuloient point en maniere d’avocats ; & que depuis fut mis certain nombre d’examinateurs.

Le second arrêt, qui est du 10 Mai 1502, fut rendu entre les seize examinateurs d’une part, & les lieutenans civil & criminel, & les conseillers au châtelet d’autre part. Les examinateurs reconnurent, du moins tacitement, que leur érection ne remontoit pas plus haut que vers l’an 1300. En effet à l’audience du 2 Mai 1502, leur avocat parla seulement de l’ordonnance qui avoit établi les seize examinateurs, sans la dater : l’avocat des conseillers au châtelet dit qu’on avoit d’abord érigé au châtelet le prevôt de Paris & douze conseillers ; que depuis furent commis deux lieutenans, l’un civil, l’autre criminel : & l’avocat du lieutenant criminel dit que de tout tems & d’ancienneté, plus de deux cents ans, & long-tems avant l’érection des examinateurs, les lieutenans civil & criminel de la prevôté avoient accoûtumé de faire les enquêtes ; qu’il n’y avoit qu’eux qui les fissent, n’étoient les conseillers ou avocats auxquels ils les commettoient ; que depuis pour le soulagement des lieutenans, qui ne pouvoient bonnement entendre à faire les enquêtes & expéditions des procès pendans au châtelet, pour la grande multitude des causes & affluence du peuple, il fut ordonné par le roi qu’il y auroit seize examinateurs dans cette ville ès seize quartiers, sous lesdits lieutenans, pour eux s’enquérir des vagabonds & maléfices, & le rapporter au châtelet ; & aussi pour faire nettoyer les rues, visiter les boulangers, & entendre sur le fait de la police ; qu’il fut aussi dit qu’ils feroient les enquêtes des procès pendans au châtelet.

Tels sont les faits énoncés dans cet arrêt, qui ne paroissent point avoir été contredits par les examinateurs ; ce qui confirme que les conseillers ont été établis avant les examinateurs en titre, & que ces derniers l’ont eux-mêmes reconnu.

Il paroît par des lettres de Philippe-le-Bel du mois d’Avril 1301, que les notaires du châtelet se plaignirent de ce que le prevôt, les auditeurs, & les enquêteurs ou examinateurs, faisoient écrire leurs expéditions par d’autres personnes qu’eux ; & Philippe-le-Bel leur ordonne de se servir du ministere des notaires.

Au mois de Mai 1313, ce même prince trouvant que les examinateurs qui étoient alors en place avoient abusé de leurs charges, les supprima, & ordonna que les enquêtes seroient faites par les notaires, ou par d’autres personnes qui seroient nommées par les auditeurs ou par le prevôt.

Philippe V. au mois de Février 1320, ordonna que les notaires du châtelet pourroient examiner témoins en toutes les causes mûes & à mouvoir au châtelet, selon ce que le prevôt & les auditeurs du châtelet leur commettroient, & spécialement ceux que les parties requéreroient & nommeroient de commun accord.

Il ordonna cependant en même tems qu’il y auroit au châtelet huit examinateurs seulement, qui seroient loyaux & discretes personnes choisies par les gens des comptes ; que ces examinateurs pourroient examiner les témoins en toutes causes, ayant chacun pour adjoint un notaire. Leur salaire est aussi reglé par la même ordonnance.

Celle de Philippe de Valois, du mois de Février 1327, fixa le nombre des examinateurs du châtelet à douze, qui étoient distribués deux à deux en six chambres, où l’un interrogeoit les témoins, & l’autre écrivoit les dépositions. Cette ordonnance défend aux examinateurs de se mettre au rang du siége du prevôt de Paris : elle leur défend aussi d’être avocats, notaires, pensionnaires, ni procureurs, & de tenir aucun autre office au châtelet. Elle regle aussi leurs salaires, & la maniere de leur donner les faits & articles.

Il se trouva quelques années après jusqu’à vingt-deux examinateurs pourvûs par le roi ; c’est pourquoi Philippe de Valois, par des lettres du 24 Avril 1337, en fixa le nombre à seize, qu’il choisit parmi ceux qui exerçoient alors, & ordonna que les six surnuméraires rempliroient les places qui deviendroient vacantes.

Ce nombre de seize fut confirmé par des lettres du roi Jean, du premier Juin 1353 ; de Charles V. du mois de Juin 1366 ; & de Charles VI. du mois de Juin 1380.

Ces charges étoient recherchées avec tant d’empressement, que Louis XI. en attendant qu’il y en eût de vacantes, en créa quatre extraordinaires, par édit du mois de Janvier 1464 : il en donna deux aux nommés Assailly & Chauvin, pour récompense des services qu’ils lui avoient rendus. Mais les seize ordinaires s’étant opposés à leur réception, cela donna lieu à une longue contestation ; ce qui engagea Louis XI. à supprimer les quatre nouveaux offices, par un édit du mois de Mars 1473.

Assailly eut cependant le crédit de faire rétablir pour lui un de ces offices, & y fut reçû.

Comme il s’éleva encore à ce sujet des difficultés, Louis XI. au mois de Juin 1474, créa quatre offices d’examinateurs ordinaires, & en donna un à ce nouveau pourvû. Il y eut opposition à l’enregistrement, & cette nouvelle création n’eut pas lieu.

Au mois de Décembre 1477, Louis XI. créa encore deux nouvelles charges d’examinateurs, & au mois de Février suivant un office d’examinateur extraordinaire.

Mais Charles VIII. par des lettres du 27 Septembre 1493, rétablit l’ancien nombre de seize, & supprima les surnuméraires : & Louis XII. au mois d’Octobre 1507, ordonna que ce nombre demeureroit fixe, sans pouvoir être augmenté.

Cependant François I. par son édit du mois de Février 1521, en créa seize nouveaux, & leur donna à tous le titre de commissaires, qui renferme tous les autres titres qu’ils portoient autrefois. Il y eut plusieurs contestations entre les anciens & les nouveaux, qui furent terminées par arrêt du grand conseil du premier Août 1534, portant que les uns & les autres joüiroient des mêmes droits & prérogatives.

Il fut créé le 7 Septembre 1570 un trente-troisieme office de commissaire au châtelet, & au mois de Juin 1586 huit autres, qui par une déclaration du même mois furent réduits à sept ; ce qui fit en tout le nombre de quarante.

Dans la suite ce nombre ayant paru excessif, eu égard à l’état où étoit alors la ville de Paris, il fut ordonné par édit d’Octobre 1603, que ceux qui vaqueroient seroient supprimés, jusqu’à ce qu’ils fussent réduits à trente-deux ; mais il n’y en eut qu’un qui fut remboursé.

Au mois de Décembre 1635 Louis XIII. créa vingt-un offices de commissaires au châtelet, pour faire avec les trente-neuf qui subsistoient le nombre de soixante. Par des lettres du mois de Juillet 1638, les vingt-un nouveaux offices furent réduits à neuf, au moyen dequoi il y avoit alors quarante-huit commissaires.

Ils prennent tous le titre de maîtres ; & depuis 1668 ils prennent aussi le titre de conseillers du Roi, en vertu de lettres patentes du mois de Juin de ladite année, qui leur ont donné le titre de conseillers du Roi, commissaires enquêteurs examinateurs au châtelet de Paris.

Ces lettres leur accordent aussi le droit de parler couverts aux audiences, le droit de vétérance au bout de vingt années d’exercice, la confirmation de leur franc-salé, & l’extension de leurs priviléges à leurs veuves. Le roi accorda aussi une pension à la compagnie, & en fit espérer de particulieres à ceux qui se distingueroient dans leur emploi.

En 1674, lorsque l’on créa le nouveau châtelet, on créa en même tems dix-neuf commissaires qui furent incorporés aux anciens, pour servir en l’un & l’autre siége. Par une déclaration du 23 d’Avril de la même année, les dix-neuf nouveaux offices furent réduits à sept, pour ne composer qu’un même corps avec les quarante-huit anciens. Enfin par succession de tems le nombre des charges a été réduit à cinquante, dont deux ont été acquises par la compagnie, ensorte qu’il ne reste que quarante-huit titulaires.

La fonction des commissaires, en matiere civile, consiste à apposer & lever les scellés dans la ville, faubourgs, & banlieue de Paris, & par suite dans toute l’étendue du royaume : ils font les enquêtes & interrogatoires sur faits & articles, entendent les comptes de tutelle, de communauté, d’exécution testamentaire, font les partages entre héritiers, les ordres & contributions, les liquidations de dommages & intérêts, & les taxes des dépens.

Par rapport à la police ils sont distribués dans les vingt-un quartiers différens de la ville, pour veiller au bon ordre & à la sûreté publique. Il y en a communément deux ou trois dans chaque quartier. Ils sont aussi préposés pour tenir la main à l’exécution des reglemens de police, & peuvent faire assigner les contrevenans à la police pour être condamnés en l’amende, & en telle autre peine qu’il y échet.

En matiere criminelle ils ont aussi plusieurs fonctions, qui consistent entre autres à recevoir les plaintes qui leur sont portées, à faire d’office les informations, interrogatoires, & procès-verbaux préparatoires, lorsque l’accusé est pris en flagrant délit : ils peuvent même le faire conduire en prison, mais ils ne peuvent pas le faire écroüer. Ils font aussi, en vertu d’ordonnance du lieutenant criminel, toutes informations, procès verbaux, interrogatoires de ceux qui sont decretés d’ajournement personnel. Ils rendent des ordonnances pour faire assigner les témoins en vertu d’ordonnance du juge qui permet d’informer, & pour assigner à comparoître au tribunal dans certains cas, comme pour répondre au rapport d’une plainte, soit au civil ou au criminel, & pour assigner en leur hôtel dans les matieres de comptes, partages, ordres, &c.

Enfin ils sont préposés pour exécuter tous les ordres, mandemens, & commissions des lieutenans civil, de police & criminel.

Ils joüissent de plusieurs prérogatives & priviléges, tels que le droit d’avoir une séance marquée aux audiences aux piés des juges, & à toutes les assemblées générales de police ; & ils peuvent se couvrir en faisant leur rapport.

Ils ont aussi le droit de garde-gardienne, committimus aux requêtes de l’hôtel & du palais, le franc-salé, exemption du droit d’aides & autres impositions pour les vins & grains de leur cru ; exemptions de tailles, emprunts, & autres subsides ordinaires & extraordinaires ; exemption de logement de gens de guerre & de suite de la cour, de toutes charges de ville & publiques, de tutelle & curatelle. Le Roi les dispense de payer leur paulette, au moyen d’un acquit patent qui leur est délivré, ainsi qu’à plusieurs autres officiers du châtelet. Ils joüissent aussi du droit de vétérance, & de plusieurs autres.

On trouvera un plus ample détail de ce qui concerne l’établissement, les fonctions & priviléges des commissaires au châtelet, dans le tr. de la pol. tome I. liv. I. tit. xij.

Commissaires du Conseil, voyez ci-ap. Conseil du Roi, à l’article commissaires.

Commissaires conservateurs généraux des decrets volontaires, étoient des officiers établis par édit du mois de Janvier 1708 dans toutes les justices royales, pour avoir inspection sur tous les decrets volontaires qui se feroient dans leur ressort, conserver les droits des vendeurs & acquéreurs des héritages & autres immeubles decretés volontairement, & empêcher que par dol, fraude, collusion, ni autrement, ces decrets volontaires ne devinssent forcés. L’acquéreur qui poursuivoit un decret volontaire, étoit obligé de faire enregistrer sa saisie réelle & son contrat d’acquisition au bureau de ces commissaires, avant de faire procéder aux criées. On leur donna des contrôleurs, & on attribua aux uns & aux autres des droits sur les decrets, & différens priviléges. Mais les contrôleurs furent réunis aux commissaires pour toutes les justices de la ville, faubourgs, & généralité de Paris, par une déclaration du 19 Février 1709 ; & par une autre déclaration du 9 Avril suivant, il fut ordonné que les offices de commissaires des decrets volontaires anciens, alternatifs, & triennaux, dans les cours & jurisdictions de la ville, faubourgs, & généralité de Paris, & ceux de leurs contrôleurs, seroient exercés sous les titres d’anciens mi-triennaux, & d’alternatifs mi-triennaux.

Ces offices de commissaires furent supprimés pour la Bourgogne par un édit du mois de Mai 1708 ; & par un autre édit du mois d’Août 1718, ils furent supprimés dans tout le reste du royaume. Cet édit a seulement reservé la moitié du droit qui se payoit pour les decrets volontaires. Voyez ce qui est dit de ces offices dans le traité de la vente des immeubles par decret de M. d’Héricourt, partie I. chap. dernier, n. 8.

Commissaires des Décimes, furent créés par édit de Novembre 1703, pour faire dans chaque diocese le recouvrement des décimes : mais par déclaration du 4 Mars 1704, ils furent réunis aux offices de receveurs généraux & particuliers.

Commissaires aux Decrets volontaires, voyez ci-dev. Commissaires conservateurs généraux des decrets volontaires.

Commissaires départis par le Roi dans les provinces, voyez Intendans.

Commissaires enquêteurs, examinateurs, (Jurisprud.) sont des officiers de robe longue établis pour faire certaines instructions & fonction de justice & police, à la décharge des juges tant civils que criminels, & de police.

De la Mare, en son tr. de la police, tome I. liv. I. tit. xij. fait remonter l’origine de ces officiers jusqu’aux tems les plus reculés : il y avoit, selon lui, de semblables officiers chez les Hébreux, chez les Grecs, & chez les Romains ; il prétend que chez tous ces peuples, & en particulier chez les Romains, il y avoit deux sortes d’officiers principaux établis auprès des magistrats, & qui entroient en participation de leurs soins & de leurs fonctions ; que les uns, qui sont toûjours nommés assessores magistratuum, étoient établis pour assister le magistrat au tribunal, & lui donner avis & conseil dans le jugement & la décision des affaires les plus importantes, & que c’est de-là que le nom de conseiller tire son origine ; que les autres étoient destinés à veiller sur le peuple, à faire une partie des instructions nécessaires, & à décharger les magistrats de certaines fonctions auxquelles ils ne pouvoient suffire ; que ces officiers étoient préposés pour faire les enquêtes & entendre les témoins, & en général pour la recherche des preuves ; que c’étoient eux que l’on appelloit adjutores magistratuum, servatores loci, curatores urbis, vicarii magistratuum, defensores civitatis, quæsitores, inquisitores, auditores, discussores.

Il ajoûte que les Romains ayant conquis les Gaules, & y ayant établi le même ordre que dans l’empire pour l’administration de la justice, y instituerent des enquêteurs examinateurs ; & que nos rois ayant trouvé cet usage établi dans les Gaules, le conserverent.

Il cite un édit de Clotaire II. de l’an 615, & plusieurs autres ordonnances rendues en différens tems, & qui sont rapportées dans les capitulaires, où il est parlé de ces officiers, appellés missi, discussores, inquisitores, adjutores, seu vicarii comitum, &c.

De-là il passe au détail des différentes fonctions de police qui étoient remplies par ces officiers, dont les principales étoient, dit-il, de recevoir les lois & les ordonnances par les mains des comtes, pour les faire ensuite entendre & observer aux citoyens ; de veiller à ce que rien ne fût entrepris, ni aucuns discours tenus contre le service du roi ou le bien public ; de maintenir le bon ordre & la discipline en toutes choses, ensorte que les gens de mauvaise volonté fussent contenus dans leur devoir, les vagabonds chassés, les pauvres protégés, & que les gens de bien vécussent en sûreté & en paix ; de rechercher tous les abus, malversations, & crimes qui se commettoient dans le public ; de faire arrêter les coupables, en informer, & faire les autres instructions pour parvenir à les faire corriger ou punir ; d’interroger les malfaiteurs qui étoient arrêtés, & devoient d’abord être conduits devant eux ; d’empêcher le port des armes défendues, & qu’on n’en transportât aux étrangers sans ordre du roi ; de veiller sur les étrangers qui arrivoient dans leurs départemens, en tenir registre, & ne les y souffrir demeurer que le tems permis par les lois ; d’avoir l’inspection sur le Commerce, les Arts & Métiers, pour y faire observer l’ordre établi par les reglemens ; visiter les marchés, y procurer l’abondance des vivres & autres denrées nécessaires à la subsistance des citoyens ; empêcher qu’il ne se commît aucune fraude, soit en la qualité ou au prix, soit au poids ou en la mesure, & sur-tout pour les grains, le pain, le vin, & la viande ; faire entretenir le pavé, nettoyer les rues, réparer les grands chemins.

Enfin, selon lui, ces commissaires avoient toute l’autorité des comtes en leur absence, & les représentoient dans toutes leurs fonctions : ils tenoient même, à ce qu’il dit, leurs audiences, mais ils ne connoissoient que des causes pures personnelles, & jusqu’à une certaine somme seulement.

M. de la Mare convient que dans ce même tems les comtes avoient des conseillers qui assistoient au jugement des affaires, au nombre de sept ou de douze, selon l’importance de la matiere ; que ceux-ci furent nommés en certains lieux scabini, & en d’autres rachimburgi, noms dérivés de la langue Allemande : mais, selon lui, les commissaires ou enquêteurs étoient des officiers différens des conseillers.

Depuis l’an 922, tems auquel finissent les capitulaires, jusqu’au regne de Philippe Auguste, l’état fut si agité de troubles domestiques ou de guerres étrangeres, que l’administration de la justice fut fort négligée : les juges établis par les seigneurs en changerent la forme ; & M. de la Mare tient que ce ne fut plus que dans les villes royales, ou dans celles que nos rois donnoient en partage aux princes de leur sang, que l’usage des commissaires examinateurs & des conseillers des magistrats fut conservé.

Pour preuve de ce qu’il avance, il cite deux auteurs, savoir Ughellus contemporain d’Henri I. qui écrivoit l’an 1033, & Baldricus sous Philippe I. l’an 1039 ; lesquels rapportent que de leur tems il y avoit des officiers établis pour aider les juges dans la recherche & la découverte de la vérité ; que les affaires leur étoient renvoyées pour les instruire ; qu’ils entendoient les témoins, en référoient aux juges, assistoient ensuite avec eux au jugement ; & que par rapport à leurs fonctions ils étoient nommés inquisitores & auditores.

M. de la Mare suppose donc comme certain que dès le commencement de la monarchie il y avoit à Paris des auditeurs ou enquêteurs examinateurs, & que la fonction de ces officiers étoit distincte & séparée de celle des conseillers, qu’il prétend n’avoir été établis qu’en 1327. Mais nous avons déjà observé ci-devant au mot Commissaires au Chatelet qu’il n’y a point de preuve certaine qu’il y eût des commissaires en titre avant l’an 1300 ; & l’on établira ci-après au mot Conseillers au Chatelet que ceux-ci sont beaucoup plus anciens que les enquêteurs examinateurs.

Il y a donc lieu de croire que tout ce qui est dit dans les anciens auteurs des enquêteurs & examinateurs, ne doit s’entendre que des assesseurs ou conseillers des juges, qui réunissoient alors les fonctions de conseillers & celles de commissaires enquêteurs examinateurs ; & que ce ne fut que vers l’an 1300 que la fonction de ces derniers commença à être séparée à Paris, à cause de la grande affluence des affaires ; que dans les provinces ces diverses fonctions demeurerent encore long-tems unies ; enfin que si l’on nommoit quelquefois pour faire les enquêtes d’autres personnes que des conseillers, la fonction de ces commissaires n’étoit que momentanée, & que ce n’étoient point des officiers ordinaires ni en titre. Voyez ce qui est dit ci-devant au mot Commissaires.

Nous ne nous étendrons pas davantage ici sur ce qui concerne les commissaires enquêteurs-examinateurs de Paris, ayant déjà traité cet objet au mot Commissaires au Chatelet.

A l’égard des autres commissaires enquêteurs-examinateurs, les différentes créations de ces offices sont marquées dans le dictionnaire des arrêts, au mot commissaires, n. 13. leurs fonctions sont à-peu-près les mêmes que celles des commissaires au châtelet ; les reglemens intervenus à ce sujet sont rapportés par Joly, tome II. liv. III. tit. xvj.

Il y a eu des commissaires examinateurs créés pour les élections, & d’autres pour les greniers-à-sel, mais ces offices ont été supprimés. (A)

Commissaires envoyés par le Roi. Voyez Intendans. (A)

Commissaires-experts ; on donne quelquefois aux experts la qualité de commissaires, parce qu’en effet ils sont commis par justice pour faire leur rapport sur quelque chose. Voyez la pratique d’Imbert, liv. I. ch. lxj. & aux notes. (A)

Commissaires des Foires ou des Gardes des Foires de Champagne & de Brie, étoient des officiers députés par le Roi aux foires de Champagne & Brie pour la conservation des priviléges de ces foires : ils avoient à leur tête un maître ou garde des foires, comme on voit par des lettres de Philippe VI. du mois de Décembre 1331. ils étoient chargés de faire exécuter les mandemens du maitre des foires, comme il est dit dans une ordonnance du même roi, du mois de juillet 1344. art. xvj. (A)

Grands Commissaires. Voyez Parlement & Commissaires. (A)

Commissaires aux Inventaires, étoient des officiers créés pour la confection des inventaires qui se font des biens des défunts. Par édit des mois de Mai 1622 & Décembre 1639, il en fut créé dans les ressorts des parlemens de Toulouse, Bordeaux & Aix, & des greffiers pour écrire sous eux ces inventaires. Il n’y eut qu’un très-petit nombre de ces offices qui furent levés, & cette création n’eut point lieu dans le ressort des autres parlemens. Ces premiers offices de commissaires aux inventaires & leurs greffiers furent supprimes par édit du mois de Mars 1702 ; lequel, au lieu de ces offices, en créa d’autres sous le titre de conseillers du Roi commissaires aux inventaires, dans tous les lieux où la justice appartient au Roi, à l’exception de la ville de Paris, où les Notaires furent confirmés dans la possession où ils sont de faire seuls les inventaires. On créa quatre de ces nouveaux commissaires dans les villes ou il y a cour supérieure, deux dans chacune des autres villes où il y a présidial, bailliage ou sénéchaussée ressortissantes cours, & un dans chaque ville & bourg ou il y a jurisdiction royale ordinaire, pour procéder seuls, à l’exclusion de tous autres officiers, lorsqu’ils en seroient requis, à l’apposition & levée des scellés & aux inventaires des biens-meubles & immeubles, titres, papiers & enseignemens des défunts, même aux inventaires qui seroient ordonnés par justice lors des banqueroutes & faillites des marchands, négocians, ou autres cas semblables, à l’effet de quoi ils devoient avoir chacun leur sceau pour l’apposition des scellés. On créa par le même édit pareil nombre de greffiers dans chaque ville pour écrire les inventaires. Cet édit ne fut pas exécuté dans quelques provinces, comme en Artois ; & les inconvéniens que l’on reconnut par la suite dans ces offices, déterminerent à les supprimer par une déclaration du 5 Décembre 1714. (A)

Commissaires aux Main-mises, sont ceux établis aux saisies féodales qui se font en Flandre & dans le Haynaut, que l’on appelle main-mise au lieu de saisie-féodale. Par l’édit de Février 1692, on créa des commissaires receveurs des saisies réelles en Flandre & Haynaut ; & par une déclaration du 2 Janvier 1694, il fut ordonné que ces mêmes commissaires seroient établis à toutes les main-mises qui se feroient tant en Haynaut qu’en Flandre. (A)

Commissaires jurés de la Marée, ont ceux qui ont inspection & jurisdiction sur les vendeurs de marée ; il en est parlé dans une ordonnance du roi Jean, du mois de Février 1350, art. 99. Voyez Chambre de la marée. (A)

Commissaires députés sur le fait des Monnoies. Voyez Monnoies. (A)

Commissaires nommés par le Roi, sont des magistrats commis par S. M. pour certaines affaires, comme pour la vente, échange ou autre aliénation de quelques domaines, de rentes assignées sur les revenus du Roi, ou pour connoître d’une affaire particuliere, soit civile ou criminelle, ou de toutes les affaires d’une certaine nature. Voyez ci-après Conseil à la subdivision Commissaires. (A)

Commissaires sur les Ordonnances du Roi, étoient des gens du conseil, que le Roi commettoit pour déliberer avec le parlement sur les nouvelles ordonnances. Le roi Jean finit une ordonnance de 1351, en disant que s’il y a quelque chose à y ajoûter, changer ou interpréter, cela se fera par des commissaires qu’il députera à cet effet, & qui en délibereront avec les gens du parlement. Ordonnances de la troisieme race, tome II. page. 380. (A)

Commissaires du Parlement. Voyez à l’article Parlement le § Commissaires. (A)

Commissaires ad partes, sont ceux que l’on choisit dans le lieu même où se doit remplir la commission, à la différence de ceux qui se transportent à cet effet sur les lieux. On nomme autant que l’on peut des commissaires ad partes pour éviter aux parties les frais du transport. Cela se pratique en plusieurs cas, comme lorsqu’il s’agit de faire une enquête ou une information, un interrogatoire sur faits & articles, un procès-verbal. L’ordonnance de Philippe V. du mois de Février 1318, art. 2. dit qu’au cas que les parties seront d’accord en parlement, de prendre des commissaires en leur pays, qu’il leur en sera octroyé, afin que chacun puisse poursuivre sa cause à moins de frais, &c. Voyez la pratique d’Imbert, liv. I. ch. xxxjx. (A)

Petits Commissaires. Voyez Parlement au § Commissaires. (A)

Commissaires de Police, sont des officiers de robe établis dans certaines villes pour aider le juge de police dans ses fonctions, comme pour faire la police dans les rues & marchés, faire des visites & procès-verbaux. Les commissaires au châtelet de Paris & les commissaires enquêteurs & examinateurs établis dans plusieurs autres villes, sont des commissaires de police qui ont des titres plus ou moins étendus, selon les édits de création de leurs charges. Voyez ce qui est dit ci-devant aux mots Commissaires au Chatelet & aux mots Commissaires enquêteurs examinateurs. (A)

Commissaires-receveurs et gardes-dépositaires dans les sieges d’Amirauté, furent supprimés par l’édit du mois d’Octobre 1716. (A)

Commissaires-réformateurs. Voy. Réformateurs. (A)

Commissaires aux Requêtes du Palais. Voyez Parlement & Requêtes du Palais. (A)

Commissaires aux Saisies-réelles. Voyez Saisies-réelles. (A)

Commissaires-sequestres. Voyez Sequestres. (A)

Commissaires du Roi contre les usures, étoient ceux à qui le Roi donnoit commission de reprimer les usures des Lombards, Italiens & autres qui prêtoient à un intérêt plus fort que celui qui étoit permis par les ordonnances. On trouve dans le second volume des ordonnances de la troisieme race un mandement du roi Jean, du mois d’Avril 1350, adressé à l’abbé de saint Pierre d’Auxerre, commissaire sur le fait des Lombards & Italiens usuriers. (A)

Commissaires des Tailles, furent créés par édit du mois de Juin 1702, pour faire dans chaque élection l’exécution de toutes les contraintes décernées par les receveurs des tailles & leurs commis pour le recouvrement des tailles, cruës y jointes & autres impositions. Ces commissaires furent substitués aux huissiers des tailles, pour la faculté que ceux-ci avoient de faire tous exploits en matiere de tailles : ils ont depuis été supprimés. (A)

Commissaire vérificateur des roles des Tailles ; ce titre étoit attaché à l’office de conseiller lieutenant-criminel créé dans chaque élection par édit du mois d’Août 1693 ; sa fonction en qualité de commissaire-vérificateur, étoit de faire la vérification & signature des rôles des tailles, taillon, subsides, &c. faits par les asséeurs & collecteurs ; mais ces offices de lieutenant-criminel commissaire-vérificateur ont été supprimés par édit du mois d’Août 1715. (A)

Commissaires Provinciaux, dans l’Artillerie, sont des officiers qui commandent les équipages de l’artillerie en l’absence des lieutenans, & qui doivent être présens à tous les mouvemens qui se font dans les arsenaux. Leurs principaux soins sont

De voir si les armes de guerre sont bien claires & bien entretenues ;

Si les magasins sont bien fermés de portes & de fenêtres ;

S’il ne manque rien aux affuts des pieces, & si l’on pourroit s’en servir dans le besoin ;

Si les armes pour les pieces sont en bon état ; Si les pieces ne sont point engorgées ou chambrées ;

S’il y a suffisamment de poudre dans la place pour sa défense en cas d’attaque ; enfin il doit examiner si toutes les choses qui concernent l’artillerie sont en bon état & en quantité suffisante.

Il doit avoir une clé du magasin ; le gouverneur une autre ; le contrôleur, s’il y en a un dans la place, la troisieme ; & le garde-magasin la quatrieme. Ils ne doivent pas entrer dans le magasin les uns sans les autres.

Après les commissaires provinciaux il y a les commissaires ordinaires, qui ont les mêmes fonctions, & qu’on répand indifféremment dans les places & dans les équipages.

Il y a aussi des commissaires extraordinaires qui servent de même. (Q)

Commissaire général des Fontes, est un titre, qui, dans l’Artillerie, est ordinairement la récompense des anciens & habiles fondeurs. Il dépend, aussi-bien que les appointemens & les priviléges qui s’y attachent, de la pure volonté du grand-maître. (Q)

Commissaire général de la Cavalerie, est un officier, qui est le troisieme de la cavalerie, n’ayant au-dessus de lui que le mestre-de-camp général & le colonel général. La principale fonction du commissaire général est de tenir un état de la cavalerie, d’en faire la revûe lorsqu’il lui plaît ; de rendre compte au Roi de la force des regimens, & de la conduite des officiers. Il commande ordinairement la cavalerie dans l’armée, où il sert avec la même autorité que le colonel général & le mestre-de-camp général ; il a les mêmes honneurs & les mêmes appointemens de campagne. Cette charge vaut six mille liv. par an sans le casuel. Il a un régiment qui lui est affecté sous le nom de régiment de commissaire général. (Q)

Commissaire des Guerres, sont des officiers chargés de la conduite, police & discipline des troupes, & de leur faire observer les ordonnances militaires. Ils peuvent procéder contre ceux qui contreviennent aux ordonnances, par interdiction d’officiers, arrêts d’appointemens, & même des personnes, suivant l’exigence des cas : ces interdictions & arrêts des personnes ne peuvent être levées sans ordre de Sa Majesté.

Ils marchent en toute occasion à la gauche du commandant de la troupe dont ils ont la conduite & police. Dans une place de guerre ils marchent après le lieutenant de roi, & en son absence après celui qui commande dans la place.

Ceux qui sont employés dans les armées ont le détail des hôpitaux, du pain, de la viande, &c. sous les ordres de l’intendant. Ils font les inventaires du grain qui se trouve dans les lieux voisins de l’armée, & ils ont la conduite des convois qui se font par voiture. M. Dhericourt, élem. de l’art milit. (Q)

Commissaire général des Vivres, c’est à l’armée celui qui est chargé de tout ce qui concerne la subsistance des troupes. Il doit faire les magasins dans les lieux les plus convenables, pour être prêt à faire ses fournitures lors de l’ouverture de la campagne. Il prend l’ordre du général pour la marche des convois : il fait faire la distribution du pain de munition par des commis qui sont à la suite des caissons, ou dans les villes, lesquels commis tiennent des registres de ce qu’ils délivrent aux majors ou aux aides-majors des régimens, suivant la revûe des commissaires. Le pain de munition doit peser trois livres ; il sert pour deux jours. Il a deux tiers de froment & un tiers de seigle, dont on tire trois livres de son & quinze livres de farine qu’on pêtrit avec dix livres d’eau. (Q)

Commissaire des Montres, (Marine.) officier dont la fonction est de faire des revues sur les vaisseaux Hollandois, au défaut d’un conseiller de l’amirauté.

On appelle encore en Hollande, commissaire des ports, ceux qui ont l’inspection sur tout ce qui entre ou sort des ports des Pays-bas ; & commissaires des ventes, ceux qui ont soin d’annoncer les ventes des choses confisquées, & d’y veiller. Chambers.

Commissaire général des Revues, (Art milit.) est, en Angleterre, celui qui se fait rendre un compte exact de l’état de chaque régiment ; les passe en revue ; prend soin que les cavaliers soient bien montés, & que toutes les troupes soient bien armées & bien équipées. Ibid.

Nous n’avons point en France de pareil officier, il n’y a que le commissaire général de la cavalerie, qui a bien les mêmes fonctions, mais pour la cavalerie seulement. Voyez Revue. (Q)

Commissaire de la Chambre des Assurances : on nomme ainsi en Hollande des juges commis pour regler les affaires de la chambre des assurances, établie à Amsterdam en 1598. Ces juges sont au nombre de trois, qui doivent juger conformément aux réglemens statués touchant le fait des assûrances, particulierement sur ce qui regarde les avaries, dont ils ne peuvent charger les assûreurs au-delà de ce qui est porté dans ces réglemens. Ils ont néanmoins le pouvoir de condamner aux dépens. Dict. de Comm. Voyez Chambre des Assurances.

Commissaires des Manufactures ; ce sont ceux qui sont commis de la part du Roi à Paris & dans les provinces, pour tenir la main à l’exécution des réglemens concernant la fabrique des étofes & des toiles. Ils sont plus connus sous le nom d’inspecteurs des manufactures. Voyez Inspecteurs. Id. ibid.

Commissaire des Pauvres, (Hist. mod.) bourgeois chargé de recueillir les deniers de la taxe pour les pauvres. Cette taxe se fait tous les ans à un bureau général. Chaque paroisse a son commissaire. Il est le distributeur d’une partie des aumônes de cette paroisse. Il a soin, quand un pauvre meurt, de faire vendre les meubles & d’en porter les deniers au bureau. On donne le titre de commissaire du grand bureau des pauvres, à ceux qui ont voix active & passive à ce bureau. Le commissariat des pauvres conduit au titre de marguillier ; & le commissariat du grand bureau conduit à la direction d’hôpital.