Cours d’agriculture (Rozier)/NIELLE. (Maladie des grains)

Hôtel Serpente (Tome septièmep. 85-87).


NIELLE. (Maladie des grains) Quelques écrivains regardent la nielle comme une maladie différente du charbon : la nielle, disent-ils, ne laisse à l’épi, que le filet ou axe, auquel les grains étoient auparavant attachés, tandis que dans le charbon, le grain reste attaché à l’axe, il conserve sa forme, & reste rempli, au lieu de farine, d’une matière noire & pulvérulente : quoiqu’il en soit de cette distinction, cette maladie du blé, de l’orge, de l’avoine &c. reconnoît le même principe ; & peut-être n’auroit-on pas fait cette distinction, si l’on avoit suivi l’épi depuis son développement. N’auroit-on pas vu, à sa première époque, le grain déjà formé & charbonné ? ne l’auroit-on pas encore vu dans le même état, plusieurs semaines après ? S’il tombe ensuite, s’il se sépare de son axe, cette séparation n’est-elle pas encore due à sa parfaite dessiccation & au dessèchement complet de la synovie de l’articulation du grain, au fond de la balle ? En effet, la base du blé est mamelonnée dans la partie par laquelle elle tient à l’axe ou filet de l’épi. (Voyez fig. 4 Pl. IX. page 287 du tome second, au mot BLÉ ; & Pl. X. fig. 18. GG.) On se convaincra que c’est une vraie articulation qui subsiste tant que la synovie, qui sert de lien à l’emboîtement, n’est pas détruite ou desséchée. D’après cela, je regarde la nielle & le charbon, comme une seule & même maladie, puisque dans le même champ, & sur la même touffe, on voit l’épi charbonné avec son grain, l’axe de l’épi entièrement dépouillé de grains. Dira-t-on que, les épis de la même touffe ont des maladies différentes ? La chute du grain niellé n’est pas un caractère suffisant pour multiplier la nomenclature des maladies des grains ; surtout quand le principe & le résultat sont les mêmes, c’est-à-dire, la matière farineuse convertie en poussière noire, complètement viciée — Voyez ce qui a été dit au mot froment. Tome 5 page 136, des maladies des blés en herbe, & des moyens de les prévenir, tels que les lessives & le chaulage. (Voyez ces mots) J’ajouterai ici quelques mots, sur ce dernier article. Les lessives faites avec des cendres, & aiguisées par la chaux dans les proportions indiquées, sont excellentes & leur efficacité est confirmée par les expériences de tous les jours & de tous les lieux ; mais dans plusieurs endroits, les cendres reviennent à un prix trop haut, à cause de la cherté du bois. Je me trouve dans ce cas ; & depuis que l’article chaulage est imprimé, j’ai voulu essayer si la chaux seule ne seroit pas suffisante ; puisque dans l’un & l’autre cas il est bien démontré que l’alcali, (voy. ce mot) de ces substances, est le seul principe qui agit. J’ai pris de la chaux récemment sortie du four, & je l’ai faite éteindre dans l’eau. J’ai pris dans un fossé, de la chaux anciennement éteinte & recouverte, & après avoir séparément dissous l’une & l’autre, jusqu’à ce qu’elles formassent un lait assez épais, j’ai fait verser ces deux laits chacun dans un vaisseau presque rempli de grain, de manière que le lait le recouvroit de quelques pouces ; le grain s’est approprié une partie de l’eau, il s’est renflé, & a occupé toute la capacité du vaisseau : il a resté, dans ce bain, pendant quatre à six heures.

La chaux, anciennement éteinte, se divise difficilement dans l’eau ; on ne peut bien l’y délayer que petit-à-petit, en ajoutant peu d’eau à la fois.

Le blé avant d’être mis au bain avoit été auparavant fortement lavé & agité dans de l’eau courante ; la même opération a eu lieu après le bain, de manière que le grain ne blanchissoit plus, ou presque plus l’eau. L’expérience a prouvé que les deux bains ont eu le même succès ; ainsi, au défaut de cendres, & sans prendre la peine de faire une lessive, on peut très-bien n’employer que la chaux, & il est aisé de s’en pourvoir à l’avance, puisque la chaux, anciennement éteinte, produit l’effet qu’on désire.

Nielle. Maladie des arbres & des plantes : Il y a ici encore confusion de mots & d’idée : quelques auteurs la décrivent comme rouille : (voyez le mot froment, p. 133, Tome V.) d’autres comme le blanc ; enfin, d’autres, comme la brûlure. (Voyez ces mots) Lorsque les taches sont livides & de couleur canelle, c’est la rouille ; si elles sont blanches comme sur les courges, les melons, &c., c’est le blanc.