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<section begin="Morgues"/>toutes les médisances d’un historien de ce cardinal ; il n’eût donc pas jugé comme il fallait de la qualité de cette histoire ; car pour être équitable il ne faut être prévenu ni d’amitié, ni d’inimitié. À plus forte raison doit-on dire que Matthieu de Morgues n’était pas propre à faire l’histoire dont il s'agit. Il avait été persécuté de cette éminence : il la haïssait mortellement ; il eût donc empoisonné les faits ; tout lui eût paru criminel ; et si quelque chose lui eût paru belle, il l’eût supprimée ou ternie. Il est certain que ceux qui ont eu des relations à ce cardinal nous en ont laissé de mauvais portraits ; les uns en ont dit trop de bien, et les autres trop de mal. Les uns voulaient reconnaître ou s’attirer ses bienfaits, et les autres se venger de ses injures : ils manquaient tous du désintéressement qui est essentiel à un bon historien ; ils espéraient, ou ils craignaient, ou ils haïssaient <ref>{{lang|la|''Statui res gestas populi romani… perscribere, eò magis quòd mihi à spe, metu, partibus reip. animus liber erat.'' Sallustius, ''in'' Proæm. Belli Catilin.}}</ref>. Matthieu de Morgues aurait eu néanmoins cet avantage, que la plupart des lecteurs eussent donné un beau nom à la licence qu’il aurait prise. Vous trouverez ci-dessus <ref>''Dans l’article'' {{sc|Marillac}} (Louis de), ''{{abr|citat.|citation}}'' (14), ''dans ce volume, {{abr|pag.|page}}'' 298.</ref> dans un passage de Tacite, une exposition de ce que j’ai dit. Convenons qu’on est naturellement plus porté à soupçonner les historiens qui louent, que ceux qui blâment. Voyez la remarque (A) de l’article du maréchal de {{sc|Marillac}}.
<section begin="Morgues"/>toutes les médisances d’un historien de ce cardinal ; il n’eût donc pas jugé comme il fallait de la qualité de cette histoire ; car pour être équitable il ne faut être prévenu ni d’amitié, ni d’inimitié. À plus forte raison doit-on dire que Matthieu de Morgues n’était pas propre à faire l’histoire dont il s'agit. Il avait été persécuté de cette éminence : il la haïssait mortellement ; il eût donc empoisonné les faits ; tout lui eût paru criminel ; et si quelque chose lui eût paru belle, il l’eût supprimée ou ternie. Il est certain que ceux qui ont eu des relations à ce cardinal nous en ont laissé de mauvais portraits ; les uns en ont dit trop de bien, et les autres trop de mal. Les uns voulaient reconnaître ou s’attirer ses bienfaits, et les autres se venger de ses injures : ils manquaient tous du désintéressement qui est essentiel à un bon historien ; ils espéraient, ou ils craignaient, ou ils haïssaient<ref>{{lang|la|''Statui res gestas populi romani… perscribere, eò magis quòd mihi à spe, metu, partibus reip. animus liber erat.'' Sallustius, ''in'' Proæm. Belli Catilin.}}</ref>. Matthieu de Morgues aurait eu néanmoins cet avantage, que la plupart des lecteurs eussent donné un beau nom à la licence qu’il aurait prise. Vous trouverez ci-dessus<ref>''Dans l’article'' {{sc|Marillac}} (Louis de), ''{{abr|citat.|citation}}'' (14), ''dans ce volume, {{abr|pag.|page}}'' 298.</ref> dans un passage de Tacite, une exposition de ce que j’ai dit. Convenons qu’on est naturellement plus porté à soupçonner les historiens qui louent, que ceux qui blâment. Voyez la remarque (A) de l’article du maréchal de {{sc|Marillac}}.
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