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Changements de voyelles
§ 29. Changements de voyelles.

a Les changements de voyelles, soit par rapport aux voyelles primitives (§ 6 i), soit à l’intérieur de l’hébreu, sont extrêmement fréquents. La grande mobilité de la vocalisation est un trait caractéristique de l’hébreu. Cette mobilité est du reste très inégale, selon la quantité des voyelles et la nature des syllabes. Les changements de voyelles sont souvent dus au déplacement du ton. (De même les chutes de voyelles § 30).

b Les voyelles longues ọ̄ (provenant de ā ou de au̯), ū, ī sont généralement très stables[1]. Cependant ọ̄, en syllabe devenue atone, s’affaiblit souvent en ū (avec l’affaiblissement il y a un certain abrègement). Le phénomène est régulier dans la flexion du nifal נָקוֹם des verbes ע״ו au parfait : l’ọ̄ devient ū quand il est privé du ton principal ou secondaire : נָק֫וֹמָה, נְקֹֽמוֹתֶם, mais נְקוּמ֫וֹתִי (§ 80 l)[2]. On observe sporadiquement la même alternance dans certains doublets : מָנוֹחַ repos et מְנוּחָה, מָלוֹן lieu où l’on passe la nuit et מְלוּנָה, מָנוֹס fuite (avec suff. מְנוּסִי) et מְנוּסָה[3].

c La voyelle moyenne ◌ָֽ, en devenant atone, devient normalement ◌ַ : דָּבָר, état cst. דְּבַר ; יָם mer, יַמִּים.

La voyelle moyenne ◌ֹ, en devenant atone, devient normalement ◌ָ ou (surtout en syllabe aiguë) ◌ֻ : כֹּל, כָּל־ ; יָסֹב, וַיָּ֫סָב ; יָסֹ֫בּוּ, תְּסֻבֶּ֫ינָה ; חֹק, חֻקִּי.

La voyelle moyenne ◌ֵ, en devenant atone, devient normalement ◌ֶ ou (surtout en syllabe aiguë) ◌ִ : אֵת, אֶת־ ; יָסֵב, וַיָּ֫סֶב ; יָסֵ֫בּוּ, תְּסִבֶּ֫ינָה ; אֵם, אִמִּי.

d L’affaiblissement de ◌ֵ en ◌ֶ a été parfois trouvé excessif ; alors le ◌ֵ devient simplement ◌ַ. Ainsi, au piel, קִטֵּל est la forme normale et pausale, קִטַּל est une forme secondaire de liaison (§ 52 c). Dans

  1. Voir une exception pour ọ̄ § 89 i, pour ī § 89 f.
  2. Cette alternance ọ̄ > ū a pu être favorisée par l’alternance fréquente > u, p. ex. יָסֹ֫בּוּ, תְּסֻבֶּ֫ינָה ; חֹק, חֻקִּי.
  3. Dans certains mots, pour lesquels il n’existe pas de doublet, p. ex. תְּבוּנָה intelligence, l’ū semble provenir d’un ọ̄ (et donc d’un ā primitif) ; cf. Biblica 1, 369. Voir aussi p. ex. des mots comme מוּסָר § 88 L e.