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pide et prompt au combat, Rodriguez Lobo foule le mont et la plaine, et avec lui s’avance Fernando Correa de la Cerda. Pour renforcer le parti d’Apollon, le grand don Antonio de Ataide, arriva plein d’ardeur.

Apollon compare ses forces à celles de l’ennemi, et il se décide à livrer bataille, il demande le combat. Le son rauque de plusieurs trompes, instruments de chasse et de guerre, frappe de plus près les oreilles de Phœbus. La terre tremble sous les pas d’un nombre infini de poëtes, qui livrent assaut à la haute montagne sacrée.

Le redoutable général de la troupe audacieuse, dont la bannière représente un corbeau, c’est Arbolanches, cet incorrigible bélître. Les deux armées, dont l’aspect fait trembler Mars lui-même, se trouvaient en présence, l’une au pied, et l’autre au sommet de la montagne. En ce moment, quelques soldats de la bande orthodoxe, gens habiles en apparence, passèrent à l’ennemi, au nombre de vingt environ. Je suis des yeux leur marche, et voyant le but de leurs mouvements, je m’adresse en ces termes à Apollon, d’une voix troublée : « Quel est donc ce prodige, cet étrange événement, ou pour mieux dire, ce mauvais présage qui m’ôte la respiration et l’énergie ? Ce transfuge, qui a le premier tourné les talons, je le regardais, non-seulement comme un poëte, mais encore comme un bavard intrépide. Celui qui, d’un pied léger, courait après lui, je l’ai entendu dans maints cercles à Madrid, parlant avec