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en douceur, d’une voix suave et très-satisfaits de leurs vers melliflus, sur un ton calme, grave et tendre, disaient des églogue pastorales, genre où se déploie le brillant de l’esprit. D’autres, en vers d’une douceur ineffable, chantaient les matières que rejetait la bouche bien-aimée de leur belle. Tel d’entre eux, si fort était son amour, alla jusqu’à chanter les reins de sa maîtresse avec infiniment de goût, et non sans élégance. Un autre prétendait que la flamme amoureuse l’incendiait au milieu des flots, et beuglait comme un taureau blessé par le crochet. Ainsi passait la poésie, de l’un à l’autre, sous toutes les formes, celui-ci parlant latin et l’autre charabia.

La galère cependant, fendant la mer d’une grande vitesse, allait si légèrement que le vent avait peine à la suivre. Bientôt apparut dans sa grandeur désolée, la côte de Valence, belle naturellement et par un effet de l’art ; et incontinent se montra aux yeux ravis de le voir le grand Don Luis Ferrer, la poitrine couverte des insignes de l’honneur, et l’âme imbue d’une science divine. Le dieu débarqua, et marchant droit à lui, le serra quatre mille fois et plus dans ses bras, satisfait de sa présence et de son aide. Il tourna les yeux d’un autre côté, et prodigua de nouveaux embrassements à Don Guillen de Castro, désireux de se voir dans ses bras. À la suite venait Christoval de Virués, avec Pedro de Aguilar, couple renommé des bords du Turia. Certes, Mercure ne pouvait souhaiter