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père seulement quand il caresse son fils, mais aussi quand il le chasse de la maison, qu’il le réprimande, qu’il le châtie ; il n’est pas moins père alors que quand il récompense. Aussi sachant que Dieu nous aime mieux que tous les médecins, ne vous inquiétez pas, ne lui demandez pas compte des moyens qu’il emploie ; mais qu’il veuille user d’indulgence ou de sévérité, abandonnons-nous à lui ; par l’un comme par l’autre de ces moyens, c’est toujours pour nous sauver, pour nous unir à lui qu’il agit ; il sait ce dont chacun a besoin, ce qui est utile à chacun, comment et de quelle manière chacun se sauvera et c’est dans cette route qu’il nous conduit. Marchons donc où il veut nous mener, marchons sans hésitation, que la route soit douce et facile ou bien rude et âpre, tout comme a fait ce paralytique. Le premier bienfait que Dieu lui accorda, ce fut de purifier par une si longue maladie son âme qu’il jetait en quelque sorte dans un creuset où le feu des tentations devait la dépouiller de toute souillure. Un second, non moindre que celui-là, ce fut de lui être présent dans ses épreuves et de lui procurer de vives consolations. C’est lui qui le soutenait et le dirigeait, qui lui tendait une main secourable sans jamais le laisser tomber. Et en entendant dire que Dieu lui venait ainsi en aide, n’allez pas retirer votre admiration ni à ce paralytique ni à tout autre qui dans l’épreuve montre de la force. Car fussions-nous mille fois parfaits, fussions-nous plus forts et plus puissants que tous les hommes, si le bras de Dieu nous abandonne, nous ne pourrons plus résister à la première tentation venue. Et que parlé-je de nous, faibles et pauvres ? Quand ce serait un autre Pierre, un autre Paul, un autre Jacques, un autre Jean, si Dieu ne vient à son secours, il est facile de l’attaquer, de l’ébranler, de le terrasser. Et à ce propos, je vous rappellerai une parole du Christ ; il dit à Pierre : Voici que Satan a demandé de vous cribler comme le froment ; et j’ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille point. (Luc. 22, 31-32)
Qu’est-ce à dire, vous cribler ? C’est vous entraîner, vous agiter, vous précipiter, vous tourmenter, vous frapper, vous torturer, comme ce qui passe au crible ; mais, ajoute-t-il, je l’ai empêché : je savais que vous n’auriez pu supporter cette épreuve car dire pour que ta foi ne défaille point, c’est montrer que, s’il l’avait permis, sa foi aurait défailli. Mais si Pierre qui a tant aimé le Christ, qui a exposé mille fois sa vie pour lui, qui était toujours plus ardent que les autres apôtres, qui a été appelé bienheureux par le Maître et surnommé Pierre, parce qu’il avait une foi inébranlable et invincible, eût succombé et renié la foi, en supposant que le Christ eût permis au démon de le tenter autant qu’il le voulait, quel autre pourra résister sans le secours du ciel ? Aussi saint Paul dit : Dieu est fidèle et il ne souffrira pas que vous soyez tentés au-dessus de vos forces ; mais il vous fera tirer profit de la tentation même afin que vous puissiez persévérer. (1Co. 10, 13) non seulement il ne permettra pas, dit-il, que nous soyons tentés au-dessus de nos forces, mais même quand la tentation est proportionnée à nos forces, il est près de nous, nous soutenant, combattant avec nous, pourvu que nous apportions à la lutte ce qui dépend de nous, comme le zèle, l’espérance en lui, la reconnaissance, la force, la patience. Car ce n’est pas seulement dans les périls qui excèdent nos forces, mais encore dans celles qui ne les dépassent pas que nous avons besoin du secours d’en haut, si nous voulons résister avec courage. Ailleurs le même apôtre dit : Comme les souffrances du Christ abondent en nous, c’est aussi par le Christ que notre consolation abonde, afin que nous puissions nous-mêmes, par l’encouragement que Dieu nous donne, consoler aussi ceux qui sont sous le poids de toute sorte de maux. (2Co. 4, 5) En sorte que celui qui a consolé le paralytique, c’est celui-là même qui avait permis qu’il fût éprouvé. Mais voyez, après la guérison, quelle sollicitude il lui ; montre. Il ne le renvoie pas pour ne plus s’en occuper, mais le rencontrant dans le temple il lui dit : Voilà que vous êtes guéri, ne péchez plus de peur qu’il ne vous arrive encore pis. (Jn. 5, 14) Si c’eût été par haine qu’il, eût permis la tentation, il ne l’aurait pas délivré, il ne l’aurait pas prémuni pour l’avenir ; car lui dire de peur qu’il ne vous arrive encore pis, c’est vouloir prévenir les maux futurs. Il a mis fin à la maladie, mais non au combat ; il a chassé l’infirmité, mais non banni la crainte, afin que le bienfait ne fût pas oublié. Il est d’un médecin soigneux de ne pas seulement guérir les maux présents, mais de prémunir coutre les maux à venir ; c’est ce que fait le Christ, en fortifiant l’âme du paralytique par le souvenir du passé. Car, comme d’ordinaire nos maux