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sans aucun inconvénient. Mais une piquûre avec la lancette n’étant point dangereuse ; en la faisant, on évite aux malades des douleurs cruelles qui peuvent être l’effet de l’altération par laquelle la nature cherche à se débarasser de la matiere qui forme l’abscès.

L’appareil & la cure sont les mêmes que pour la cataracte. Voyez Cataracte & Hemalogie. (Y)

HYPORCHEME, s. m. (Littérature.) on appelloit ainsi chez les Grecs une sorte de poésie, faite non seulement pour être chantée & jouée sur la flûte & sur la cythare, mais encore pour être dansée au son des voix & des instrumens. C’est un chant accompagné de danse, dit Proclus : or cette danse, selon Athénée, étoit une imitation ou une représentation des choses mêmes exprimées par les paroles que l’on chantoit. Lucien semble insinuer que ces hyporchemes se dansoient le plus ordinairement au son de la lyre ou de la cythare ; aussi étoit-ce, comme l’assûre Athénée, lib. XIV. cap. vij. une des trois especes de poésie lyrique sur le chant desquelles on dansoit ; & cette danse hyporchémétique, continue-t-il, avoit beaucoup de rapport avec la danse comique appellée cordax, l’une & l’autre étant enjouée & badine. Voyez Cordax.

Cependant, s’il en faut croire le rhéteur Ménandre, l’hyporcheme, ainsi que le péan, étoit consacré au culte d’Apollon, & en ce cas-là sans doute la danse devenoit plus sérieuse. Elle se faisoit, dit l’auteur du grand Etymologique, autour de l’autel de la divinité, pendant que le feu consumoit la victime. Sur quoi il est bon de remarquer d’après Athénée, lib. XIV. cap. vj. qu’anciennement les Poëtes eux-mêmes enseignoient ces danses à ceux qui devoient les exécuter, leur prescrivoient les gestes convenables à l’expression de la poésie, & ne leur permettoient pas de s’écarter du caractere noble & mâle qui devoit regner dans ces sortes de danses. On peut consulter sur ce point Meursius dans son traité intitulé orchestra. Du reste, Plutarque, dans son traité de la Musique, dit qu’il y avoit de la différence entre les péans & les hyporchemes. Sur quoi il prend à témoin Pindare, qui a cultivé l’un & l’autre genre de poésie. Mais comme nous n’avons rien aujourd’hui de ce poëte, ni en l’un ni en l’autre, nous ne pouvons fixer cette différence, ni le nombre & la qualité des piés qui entroient dans la poesie hyporchématique ; on conjecture seulement que les vers étoient de mesure inégale, & que le pyrrhique y dominoit. Voyez Pyrrhique. Notes de M. Burette sur le traité de la musique de Plutarque. Mem. de l’acad. des belles-Lettr. tome X.

HYPOSPADIAS, s. m. terme de Chirurgie, nom grec qu’on donne à celui qui n’a pas l’orifice du canal de l’uretre directement à l’extrémité du gland. Quand on est ainsi conformé, l’ouverture de l’uretre est entre l’os pubis & le frein ; dans la direction naturelle de la verge, l’urine tombe perpendiculairement à terre, & pour pisser en-avant, il faut relever la verge de façon que le gland soit directement en-haut. Cette mauvaise conformation est très-préjudiciable à la génération, parce que l’éjaculation de l’humeur prolifique ne peut se faire en ligne directe : l’art peut quelquefois réparer le vice de la nature. Galien appelle aussi du nom d’hypospadias, ceux en qui le frein trop court fait courber la verge dans l’érection. On remédie facilement à ce petit inconvénient par la section du filet, qui n’exige qu’un pansement très-simple avec un peu de charpie qu’on laisse jusqu’à ce qu’elle tombe d’elle-même. Il suffit de laver la partie avec un peu de vin chaud, pour consolider les portions du filet que l’instrument tranchant a divisées. (Y)

HYPOSPATISME, s. m. terme de la Chirurgie des

anciens, c’étoit une opération qui consistoit à faire sur le front trois incisions jusqu’à l’os, d’environ deux pouces de long, pour couper tous les vaisseaux qui étoient entre deux. Le but de cette opération étoit d’arrêter les fluxions sur les yeux. Ce mot est grec, ὑποσπαθισμὸς, formé d’ὐπὸ, dessous, & σπάθη, spatule, parce que ceux qui pratiquoient cette opération, après avoir fait les trois incisions, passoient une spatule entre le péricrane & les chairs. Diction. de Trévoux.

Quelques auteurs proposent de couper ou détruire les gros vaisseaux du visage contre la maladie nommée goutte-rose, (voyez Goutte-rose), dans le dessein d’intercepter le cours du sang vers cette partie. Bayrus, pract. lib. VIII. cap. iij. dit que la rougeur du visage vient quelquefois de l’abondance du sang, qui, rapporté par la grande veine du front, se répand subitement dans tout le visage. Une comtesse l’ayant consulté à cette occasion, il apperçut que lorsqu’elle lui parloit, le sang se répandoit précipitamment de cette veine sur tout le visage. Il fit raser l’endroit de la veine un peu au-dessus de la suture coronale ; il cautérisa la peau, & comprima avec un bandage convenable la veine dont le cautere fit l’ouverture, & la malade fut délivrée pour toûjours de ses rougeurs, la face se trouvant privée par la destruction de cette veine, du sang qu’elle lui rapportoit. (Y)

HYPOSPHAGMA, (Medecine.) c’est un terme grec qui signifie la même chose qu’échymose, en général, mais qui est employé particulierement pour désigner celui de la membrane de l’œil, appellée conjonctive. Voyez Echymose, Œil.

On trouve aussi quelquefois des auteurs qui se servent du terme d’hyposphagma, comme synonyme d’hæmalops. Voyez Hæmalops.

HYPOSTASE, s. f. hypostasis, (Théolog.) est un mot grec qui signifie à la lettre substance ou essence, & en Théologie, personne. Voy. Personne. Ce mot est grec ὑπόστασις, & composé d’ὐπὸ, sub, sous, & ἵστημι, sto, existo, je suis, j’existe, d’où subsistentia.

On dit qu’il n’y a qu’une seule nature en Dieu, & trois Hypostases, ou Personnes. Voyez Trinité, &c.

Le mot d’hypostase est très-ancien dans l’Église. S. Cyrille le répete souvent, aussi-bien qu’union, selon l’hypostase. Il se trouve pour la premiere fois dans une lettre de ce pere à Nestorius, où il l’emploie au lieu de πρόσωπον, que nous rendons ordinairement par celui de personne, & qui n’étoit pas assez expressif. Les philosophes, dit S. Cyrille, ont reconnu trois Hypostases. Ils ont étendu la Divinité jusqu’à trois Hypostases, & employé même quelquefois le terme de Trinité ; de sorte qu’il ne leur manqueroit que d’admettre la consubstantialité des trois Hypostases, pour faire entendre l’unité de la nature divine à l’exclusion de toute triplicité par rapport à la distinction de nature, & de ne plus prétendre qu’il soit nécessaire de concevoir aucune infériorité respective des hypostases.

Ce mot excita autrefois de grands démêlés entre les Grecs, & puis entre les Grecs & les Latins.

Dans le concile de Nicée, hypostase est la même chose que substance ou essence. Ainsi c’étoit une hérésie de dire que Jesus-Christ est d’une autre hypostase que le Pere, parce que hypostase signifioit essence ; mais l’usage changea. Voyez Arien & Arianisme.

Dans le besoin qu’on eut de s’exprimer contre les Sabelliens, les Grecs choisirent le terme d’hypostase, & les Latins celui de personne, & ce changement fut la source de la contestation. La phrase τρεῖς ὑποστάσεις, dont se servoient les Grecs, scandalisa les Latins, qui ont accoûtumé de rendre le mot ὑπόστασις par celui de substantia. La stérilité de la langue latine,