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titulé Idée de l’homme physique & moral. C’est de la plûpart de ces derniers ouvrages qu’a été extraite une bonne partie des matériaux de cet article. (d)

Génération, (maladies concernant la) Les lésions des fonctions qui servent à la génération dans l’espece humaine, doivent être considérées par rapport à chacun des sexes.

Ainsi il peut y avoir dans les hommes excès ou défaut dans les dispositions & dans les conditions qui sont nécessaires pour la génération. Telles sont la séparation de la semence & sa préparation dans les testicules, l’érection du membre viril, l’éjaculation de la liqueur spermatique. Voyez Testicule, Semence, Verge, Priapisme, Satyriasis, Impuissance, Frigidité

A l’égard des femmes, les vices physiques dont elles sont susceptibles relativement à la génération, regardent principalement les déréglemens du flux menstruel, les défauts de conformation de la matrice & du vagin, le tempérament trop ou trop peu sensible. Voyez Menstrues, Matrice, Vagin, Tempérament, Salacité, Stérilité, Fleurs-blanches, Fureur utérine, Faux-germe, Mole, &c. (d)

GÉNÉREUX, adj. GÉNÉROSITÉ, s. f. (Mor.) La générosité est un dévoüement aux intérêts des autres, qui porte à leur sacrifier ses avantages personnels. En général, au moment où l’on relâche de ses droits en faveur de quelqu’un, & qu’on lui accorde plus qu’il ne peut exiger, on devient généreux. La nature en produisant l’homme au milieu de ses semblables, lui a prescrit des devoirs à remplir envers eux : c’est dans l’obéissance à ces devoirs que consiste l’honnêteté, & c’est au-delà de ces devoirs que commence la générosité. L’ame généreuse s’éleve donc au-dessus des intentions que la nature sembloit avoir en la formant. Quel bonheur pour l’homme de pouvoir devenir ainsi supérieur à son être, & quel prix ne doit point avoir à ses yeux la vertu qui lui procure cet avantage ! On peut donc regarder la générosité comme le plus sublime de tous les sentimens, comme le mobile de toutes les belles actions, & peut-être comme le germe de toutes les vertus ; car il y en a peu qui ne soient essentiellement le sacrifice d’un intérêt personnel à un intérêt étranger. Il ne faut pas confondre la grandeur d’ame, la générosité, la bienfaisance & l’humanité : on peut n’avoir de la grandeur d’ame que pour soi, & l’on n’est jamais généreux qu’envers les autres ; on peut être bienfaisant sans faire de sacrifices, & la générosité en suppose toûjours ; on n’exerce guere l’humanité qu’envers les malheureux & les inférieurs, & la générosité a lieu envers tout le monde. D’où il suit que la générosité est un sentiment aussi noble que la grandeur d’ame, aussi utile que la bienfaisance, & aussi tendre que l’humanité : elle est le résultat de la combinaison de ces trois vertus ; & plus parfaite qu’aucune d’elles, elle peut y suppléer. Le beau plan que celui d’un monde où tout le genre humain seroit généreux ! Dans le monde tel qu’il est, la générosité est la vertu des héros ; le reste des hommes se borne à l’admirer. La générosité est de tous les états : c’est la vertu dont la pratique satisfait le plus l’amour-propre. Il est un art d’être généreux : cet art n’est pas commun ; il consiste à dérober le sacrifice que l’on fait. La générosité ne peut guere avoir de plus beau motif que l’amour de la patrie & le pardon des injures. La libéralité n’est autre chose que la générosité restreinte à un objet pécuniaire : c’est cependant une grande vertu, lorsqu’elle se propose le soulagement des malheureux ; mais il y a une économie sage & raisonnée qui devroit toûjours régler les hommes dans la dispensation de leurs bienfaits. Voici un trait de cette économie. Un prince[1] donne une somme d’argent

pour l’entretien des pauvres d’une ville, mais il fait ensorte que cette somme s’accroisse à mesure qu’elle est employée, & que bien-tôt elle puisse servir au soulagement de toute la province. De quel bonheur ne joüroit-on pas sur la terre, si la générosité des souverains avoit toûjours été dirigée par les mêmes vûes ! On fait des générosités à ses amis, des libéralités à ses domestiques, des aumônes aux pauvres[2].

GÉNERIQUE, adj. Les noms établis pour présenter à l’esprit des idées générales, pour exprimer des attributs qui conviennent à plusieurs especes ou à plusieurs individus, sont nommés appellatifs par le commun des Grammairiens. Quelques-uns trouvant cette dénomination peu expressive, peu conforme à l’idée qu’elle caractérise, en ont substitué une autre, qu’ils ont cru plus vraie & plus analogue ; c’est celle de génériques ; & il faut convenir que si cette derniere dénomination n’est pas la plus convenable, la premiere, quand on l’a introduite, devoit le paroître encore moins. Autant qu’il est possible, l’étymologie des dénominations doit indiquer la nature des choses nommées : c’est un principe qu’on ne doit point perdre de vûe, quand la découverte d’un objet nouveau exige qu’on lui assigne une dénomination nouvelle ; mais une nomenclature déjà établie doit être respectée & conservée, à-moins qu’elle ne soit absolument contraire au but même de son institution : en la conservant, on doit l’expliquer par de bonnes définitions ; en la réformant, il faut en montrer le vice, & ne pas tomber dans un autre, comme a fait M. l’abbé Girard, lorsqu’à la nomenclature ordinaire des différentes especes de noms, il en a substitué une toute nouvelle.

Les noms se divisent communément en appellatifs & en propres, & il semble que ces deux especes soient suffisantes aux besoins de la Grammaire ; cependant, soit pour lui fournir plus de ressources, soit pour entrer dans les vûes de la Métaphysique, on soûdivise encore les noms appellatifs en noms génériques ou de genre, & en noms spécifiques ou d’espece. « Les premiers, pour employer les propres termes de M. du Marsais, conviennent à tous les individus ou êtres particuliers de différentes especes ; par exemple, arbre convient à tous les noyers, à tous les orangers, à tous les oliviers, &c. Les derniers ne conviennent qu’aux individus d’une seule espece ; tels sont noyer, olivier, oranger, &c. ». Voyez Appellatif.

M. l’abbé Girard, tom. I. disc. v. pag. 219. partage les noms en deux classes, l’une des génériques, & l’autre des inviduels ; c’est la même division générale que nous venons de présenter sous d’autres expressions. Ensuite il soûdivise les génériques en appellatifs, abstractifs & actionnels, selon qu’ils servent, dit-il, à dénommer des substances, des modes, ou des actions. Mais on peut remarquer d’abord que le mot appellatif n’est pas appliqué ici plus heureusement que dans le système ordinaire, & que l’auteur ne fait que déroger à l’usage, sans le corriger. D’autre part, la soûdivision de l’académicien n’est ni ne peut être grammaticale, & elle devoit l’être dans son livre. La diversité des objets peut fonder, si l’on veut, une division philosophique ; mais une division grammaticale doit porter sur la diversité des services d’une même sorte de mots ; & cette diversité de service dépend, non de la nature des objets,

  1. Il s’agit dans cet endroit du Roi de Pologne Duc de Lorraine : ce Prince a donné aux magistrats de la ville de Bar dix mille écus qui doivent être employés à acheter du blé, lorsqu’il est à bas prix, pour le revendre aux pauvres à un prix médiocre, lorsqu’il est monté à certain point de cherté. Par cet arrangement, la somme augmente toûjours ; & bien-tôt on pourra la répartir sur d’autres endroits de la province.
  2. Ce n’est là qu’une partie des idées qui étoient renfermées dans un article sur la générosité, qu’on a communiqué à M. Diderot. Les bornes de cet Ouvrage n’ont pas permis de faire usage de cet article en entier.