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par un spectacle différent de la piece, soit qu’on laisse cet espace absolument vuide.

Entr’acte, dans un sens plus limité, est un divertissement en dialogue ou en monologue, en chant ou en danse, ou enfin mêlé de l’un & de l’autre, que l’on place entre les actes d’une comédie ou d’une tragédie. L’objet de ce divertissement isolé & de mauvais goût, est de varier l’amusement des spectateurs, souvent de donner le tems aux acteurs de changer d’habits, & quelquefois d’allonger le spectacle ; mais il n’en peut être jamais une partie nécessaire : par conséquent il n’est qu’une mauvaise ressource qui décele le manque de génie dans celui qui y a recours, & le défaut de goût dans les spectateurs qui s’en amusent.

Les Grecs avoient des entr’actes de chant & de danse dans tous leurs spectacles : il ne faut pas les en blâmer. L’art du théatre, quoique traité alors avec les plus belles ressources du génie, ne faisoit cependant que de naître ; ils ne l’ont connu que dans son enfance, mais c’étoit l’enfance d’Hercule qui joüoit avec les lions.

Les Romains, en adoptant le théatre des Grecs, prirent tous les défauts de leur genre, & n’atteignirent à presqu’aucune de leurs beautés. En France, lorsque Corneille & Moliere créerent la tragédie & la comédie, ils profiterent des fautes des Romains pour les éviter ; & ils eurent assez de génie & de goût pour se rendre propres les grandes beautés des Grecs, & pour en produire de nouvelles, que les Sophocles & les Aristophanes n’auroient pas laissé échapper, s’ils avoient vécu deux mille ans plus tard.

Ainsi le théatre françois, dans les mains de ces deux hommes uniques, ne pouvoit pas manquer d’être à jamais débarrassé d’entr’actes & d’intermedes. Voyez Intermede.

L’entr’acte à la comédie françoise, est composé de quelques airs de violons qu’on n’écoute point.

A l’opéra le spectacle va de suite ; l’entr’acte est une symphonie que l’orchestre continue sans interruption, & pendant laquelle la décoration change. Cette continuité de spectacle est favorable à l’illusion, & sans l’illusion il n’y a plus de charme dans un spectacle en musique. Voyez Illusion.

Le grand ballet sert d’entr’acte dans les drames de collége. Voyez Ballet de Collége.

L’opéra italien a besoin d’entr’actes ; on les nomme en Italie intermezzi, intermedes. Oseroit-on le dire ? auroit-on besoin de ce malheureux secours dans un opéra qu’un intérêt suivi ou qu’une variété agréable soûtiendroient réellement ? On parle beaucoup en France de l’opéra italien : croit-on le connoître ? Voyez Opera. Les Italiens eux-mêmes, toûjours amoureux & jaloux de ce spectacle, l’ont-ils jamais examiné ? On avance ici une proposition que l’expérience seule ne nous a pas suggerée ; elle nous a été confirmée par des personnes sages & instruites, dont aucune nation ne peut récuser le suffrage. Il n’y a pas un homme en Italie qui ait écouté de suite une seule fois en sa vie tout l’opéra italien. On a eu recours aux intermedes de bouffons ou à des danses pantomimes, pour combattre l’ennui presque continuel de plus de quatre heures de spectacle ; & cette ressource est un défaut très-grand du génie, comme il sera démontré à l’article Intermede. (B)

ENTRAGE, s. m. (Jurispr.) signifie quelquefois entrée ou commencement de possession & joüissance ; plus souvent il signifie un droit en argent que le nouveau possesseur est obligé de payer au seigneur : il en est parlé dans la coûtume de Nivernois, tit. xxij. art. 8. Bourbonnois, art. 274 & 442. Voyez Issue. (A)

ENTRAIGUES, (Géog. mod.) ville du comté du

Rouergue en France ; elle est située à l’endroit où la Truyere se jette dans le Lot.

ENTRAILLES, s. f. plur. (Anatomie.) intestins, boyaux. Avoir les entrailles échauffées, rafraîchir les entrailles. Il se prend quelquefois dans un sens plus général, pour tous les visceres, toutes les parties renfermées dans le corps des hommes & des animaux. L’inspection des entrailles des victimes a aidé à connoître la structure du corps sain.

L’oblation des victimes étoit une cérémonie religieuse de nos premiers parens, comme on le voit par l’histoire d’Abel dans la Genese, & par les plus anciennes fables de l’âge d’or. On auroit crû déplaire à la divinité, & ne pouvoir appaiser sa colere, si la victime eût été souillée de la moindre maladie ; c’est pourquoi nous lisons dans le Lévitique qu’on n’immoloit que les animaux les plus sains & les plus purs, & c’est ainsi que les prêtres commencerent à s’appliquer à connoître les marques distinctives de la santé & de la maladie. Voyez Anatomie. Chambers. (L)

* Entrailles, (Mythol.) c’étoient les parties des animaux que les aruspices consultoient particulierement. Il faut voir avec quelle impiété Cicéron parle de cette pratique de sa religion. Il suit de son discours que l’inspection des entrailles est la derniere des extravagances ; & que ceux qui en sont chargés, sont assez communément des imposteurs. C’est à cette occasion qu’il rapporte un mot de Caton, qui auroit pû avoir lieu dans une infinité d’autres cas, si la prévention n’eût point fasciné les yeux & les esprits. Caton disoit « qu’il étoit toûjours étonné qu’un aruspice qui en rencontroit un autre, ne se mît pas à rire ».

ENTRAIT, s. m. (Charpent.) est une poutre sur laquelle portent les solives des galetas, & les arbalestriers. Voyez les figures des Planches du Charpentier.

Entrait, (double) il se dit de ceux qui sont dans les enrayures.

ENTRAVAILLÉ, adj. terme de Blason, qui se dit des oiseaux qui, ayant le vol éployé, ont un bâton ou quelqu’autre chose passée entre les aîles & les piés. Dictionn. de Trévoux.

ENTRAVER un Cheval, (Manége, Maréch.) lui mettre des entraves ; expressions également usitées dans un seul & même sens. Voyez Entraves.

Entraver, v. neut. (Faucon.) c’est raccommoder les jets de l’oiseau, de sorte qu’il ne peut se déchaperonner.

ENTRAVES, s. f. (Man. Maréchall.) espece de liens par le secours desquels nous pouvons nous assûrer & nous rendre maîtres des chevaux, soit qu’il s’agisse de les retenir dans les pâturages, ou de leur ôter la liberté, dans l’écurie, d’élever leurs piés de devant sur l’auge ou contre les rateliers ; soit que nous soyons dans l’obligation de les assujettir ou de les abattre pour leur faire quelques opérations.

Les entraves dont nous faisons usage dans le premier cas, sont composés de deux entravons qui sont unis par des anneaux ou par une chaîne de fer, ou quelquefois par une laniere non moins forte que celles qui forment les entravons. Voyez Entravon. On doit avoir la précaution d’en délivrer l’animal, pour lui laisser plus de liberté lorsqu’il veut se coucher. Il est bon aussi de faire attention que les jambes du cheval entravé très-long-tems, peuvent insensiblement s’arquer, & que souvent par cette même raison l’animal devient panard.

Dans le second cas nous n’employons que des entravons non unis, mais séparés ; nous les fixons, ainsi que les premieres entraves, dans le pli des paturons des quatre jambes ensemble, ou d’une ou de deux seulement, selon le besoin ; en observant de les boucler de façon que les boucles soient en-dehors.