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que fait le novice, & l’engagement qu’il contracte solennellement d’observer la regle de l’ordre régulier dans lequel il entre. La mort civile du religieux profès se compte du jour de l’émission de ses vœux, de même que les cinq ans dans lesquels il peut reclamer contre ses vœux, lorsque sa profession n’a pas été libre. Voyez Profession, Religieux, Réclamation, Vœux. (A)

EMISSOLE, s. f. (Hist. nat. Ichthiol.) galeus lævis, poisson du genre des chiens de mer. Il n’a point d’aiguillons comme celui qui est appellé aiguillat, & qui a été décrit sous le nom de chien de mer. Voyez Chien de mer. L’émissole a le museau plus long & plus large que l’aiguillat, & l’ouverture de la bouche plus étroite. Ce poisson est de couleur cendrée ; il n’a point de dents, mais les mâchoires sont rudes. Il a des trous au-devant de la bouche à la place des narines, & d’autres plus petits derriere les yeux. Il ressemble à l’aiguillat par les oüies, les nageoires, & les parties intérieures ; mais il en differe par la queue qui est composée de trois nageoires. Rondelet, XIII liv. des poissons. Voyez Poisson. (I)

EMITES, (Hist. nat. Lytholog.) c’est une pierre qui est de la couleur de l’ivoire, & qui ressemble au marbre blanc, sinon qu’elle n’est point si dure. Boëce de Boot conjecture que c’étoit une espece d’albâtre. Voyez Boétius de Boot, de lapidibus & gemmis.

* EMITHÉE, s. f. (Myth.) divinité de Castabé, village de Carie. On prétendoit que les malades qui s’endormoient dans son temple, s’étoient souvent réveillés guéris de leurs maux ; d’où l’on peut conjecturer que c’étoit un de ceux de la Grece que l’on fréquentoit le plus, auquel on faisoit le plus de présens, & où l’on célébroit le plus de sacrifices. Emithée soulageoit aussi les femmes enceintes qui l’invoquoient dans les douleurs de l’enfantement ; elle étoit en si grande vénération, que les richesses dont ses autels étoient chargés ne furent point pillées, quoiqu’elles ne fussent gardées ni par des murailles, ni par des hommes. Cette demi-déesse, la seule dont il soit fait mention, fut respectée des brigands & des vainqueurs, pour qui les autres temples de la Grece ne furent pas également sacrés. Je ne suis pas trop étonné de cette distinction ; les portes qui ferment un temple, les gardes qui veillent autour, & les murs qui en empêchent l’approche, semblent annoncer que la divinité qui y préside a besoin de la protection des hommes, ce qui ne porte pas à redouter sa puissance. Il n’en est pas ainsi de celle dont rien d’humain ne garantit les autels des insultes de la méchanceté ; il semble qu’elle se soit chargée elle-même de les défendre.

EMMAILLONNÉ, (Rubann.) Voyez Lisses & Maillons.

EMMAILLOTTER, terme de Sage-femme & de Nourrice, c’est envelopper un enfant de langes par plusieurs couches circulaires, pour préserver son corps délicat des injures de l’air, & le tenir dans une position fixe, qu’on croit nécessaire à son bien-être & à la conservation de ses jours. Cette méthode est en usage chez la plûpart des peuples de l’Europe : nous verrons bien-tôt ce qu’il en faut penser.

A peine l’enfant est-il sorti du sein de sa mere, dit l’auteur de l’histoire naturelle de l’homme (tome II. page 457. édition in-4°.) ; à peine l’enfant joüit-il de la liberté de mouvoir & d’étendre ses membres, qu’on lui donne de nouveaux liens ; on l’emmaillotte, on le couche la tête fixe & les jambes allongées, les bras pendans à côté du corps ; il est entouré de linges & de bandages de toute espece, qui ne sauroient lui permettre de changer de situation ; heureux si on ne l’a pas serré au point de l’empêcher de respirer, & si on a eu la précaution de le coucher sur le côté, afin que les eaux qu’il doit

rendre par la bouche puissent tomber d’elles-mêmes, car il n’auroit pas la liberté de tourner la tête sur le côté pour en faciliter l’écoulement.

Les Siamois, les Japonois, les Indiens, les Negres, les sauvages du Canada, ceux de Virginie, du Bresil, & la plupart des peuples de la partie méridionale de l’Amérique, couchent les enfans nuds sur des lits de coton suspendus, ou les mettent dans des especes de berceaux couverts & garnis de pelleteries ; ils se contentent de couvrir & de vêtir ainsi leurs enfans sans les emmaillotter. Je ne déciderai point si leur usage conviendroit également aux nations européennes ; je crois seulement qu’il a moins d’inconvéniens que le nôtre, qu’il est plus simple, plus judicieux, & plus raisonnable : j’ajoûte que les peuples qui le suivent s’en trouvent très-bien, & qu’en général la nature réussit mieux dans cette occasion, que toutes nos sages-femmes & nos nourrices.

En effet notre méthode d’emmaillotter a de grands inconvéniens, & plusieurs desavantages. 1°. On ne peut guere éviter en emmaillottant les enfans, de les gêner au point de leur faire ressentir quelque douleur. Les efforts qu’ils font pour se débarrasser, sont alors plus capables de corrompre l’assemblage de leur corps, que les mauvaises situations où ils pourroient se mettre eux-mêmes s’ils étoient en liberté. Les bandages du maillot peuvent être comparés aux corps de baleine que l’on fait porter aux filles dans leur jeunesse : cette espece de cuirasse, ce vêtement incommode qu’on a imaginé pour soûtenir la taille & l’empêcher de se déformer, cause cependant plus d’incommodités & de difformités, qu’il n’en prévient. Bonne remarque de MM. Winslou & de Buffon.

2°. Si le mouvement que les enfans veulent se donner dans le maillot peut leur être funeste, l’inaction dans laquelle cet état les retient, peut aussi leur être nuisible. Le défaut d’exercice est capable de retarder l’accroissement des membres, & de diminuer les forces du corps. Ainsi les enfans qui ont la liberté de mouvoir leurs membres à leur gré, doivent être plus forts que ceux qui sont emmaillottés : c’est pour cette raison que les Péruviens laissoient les bras libres aux enfans dans un maillot fort large ; lorsqu’ils les en tiroient, ils les mettoient dans un trou fait en terre & garni de quelque chose de doux, dans lequel trou ils les descendoient jusqu’à la moitié du corps : de cette façon ils avoient les bras en liberté, & ils pouvoient mouvoir leur tête & fléchir leur corps à leur gré, sans tomber & sans se blesser.

3°. La position naturelle des épaules, des bras, & des mains d’un enfant qu’on emmaillotte, celle des piés, des jambes, & des genoux, se dérange très souvent, parce que l’enfant ne cesse de remuer ; de sorte que quelque attention que les nourrices ayent de bien placer & de bien contenir ces parties, il peut arriver, & il n’arrive que trop souvent que les piés se trouvent l’un sur l’autre, de même que les jambes & les genoux : alors ces membres étant mal posés, on les serre, on les bande dans cette position, de maniere que la grande compression que l’on fait sur des parties encore molles, tendres, & délicates, dérange leur ordre, change leur figure & leur direction, empêche leur extension naturelle, & par là donne occasion à des difformités qu’on éviteroit, si on laissoit à la nature la liberté de conduire & de diriger elle-même son ouvrage sans peine & sans contrainte.

4°. Cette compression forte sur des parties susceptibles d’impression & d’accroissement, telles que sont les membres d’un enfant nouveau-né, peut causer plusieurs autres accidens. Des embarras dans les visceres, des obstructions dans les glandes, des en-