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doit être élu par cette partie, au lieu où la prison est située, le tout à peine de nullité.

Ce procès-verbal doit aussi être signifié, & copie laissée au prisonnier en parlant à sa personne, & l’huissier doit faire mention du tout dans son procès-verbal, à peine de nullité.

La recommandation peut être faite sur un homme emprisonné pour dettes, ou sur un homme détenu pour crime.

Celui qui est emprisonné pour dettes, peut être recommandé par d’autres dettes, & par d’autres créanciers, mais il ne peut être recommandé pour crime & vice versâ. Celui qui est emprisonné pour crime, ne peut être recommandé pour dette civile. Néanmoins, lorsque le prisonnier qui a eu quelque administration se trouve condamné pour crime capital, s’il est recommandé pour une dette qui dérive du fait de son administration, on differe l’exécution jusqu’à ce qu’il ait rendu compte.

Un prisonnier détenu pour crime, peut être recommandé pour d’autres crimes, & dans ce cas on préfere la recommandation qui est faite pour le crime le plus grave.

Quand l’emprisonnement pour dettes est déclaré nul par quelque défaut de forme, cela emporte aussi la main levée des recommandations ; mais quand l’emprisonnement est valable en la forme, les recommandations tiennent avant leur effet, quoique l’élargissement du prisonnier ait été ordonné par le mérite du fond sur le premier emprisonnement. V. le tit. 13 de l’ordonn. de 1670 ; Bornier sur ce titre & les mots Écrou, {Emprisonnement, Élargissement, Prisonnier, Prison. (A)

Recommandation, lettre de, (Littérat.) Voyez Lettre de recommandation.

J’ajouterai seulement, que Cicéron répondant à Trébatius, qui se plaignoit que César ne lui faisoit point de bien, quoique lui Cicéron l’eût recommandé par plusieurs lettres. « Vous vous rebutez, dit-il, comme si vous eussiez porté à votre général, non pas une lettre de recommandation, mais une obligation pour recevoir de l’argent, & vous en retourner promptement chez vous ». Tanquam enim syngraphum ad imperatorem, non epistolam attulisses. (D. J.)

RECOMMANDER, v. act. (Gramm.) il se dit des choses & des personnes. On recommande à son enfant de fuir les mauvaises compagnies. On recommande un homme à un autre. On se recommande à Dieu & à la sainte Vierge. On se recommande à tous les saints dans le péril, &c.

Recommander, (Jurisprud.) Voyez l’article Recommandation.

Recommander, (Commerce.) Voyez l’article suiv.

Recommander une chose volée, (Comm.) c’est faite courir chez les marchands qui pourroient l’acheter, des billets contenant sa nature, sa qualité, sa forme, &c. afin que si elle leur étoit apportée, ils pussent la retenir & en donner avis. On m’a volé une montre d’or à répétition ; je l’ai fait recommander chez les horlogers. Dictionn. de Comm. & Trév.

RECOMMENCER, v. act. (Gramm.) c’est reprendre une occupation interrompue ; & l’on dit en ce sens, on recommence à travailler au louvre. La pluie recommence. Les troubles recommencent.

RECOMPENSE, s. f. prix accordé pour quelque action qu’on juge bonne & utile. Dans la croiance des Chrétiens, & même des Déistes, il y a des châtimens & des recompenses à venir. Il y a des philosophes qui nient l’immortalité de l’ame & la vie future, admettant l’existence de Dieu, parce que la vertu, selon eux, est suffisamment recompensée par elle-même, & le vice suffisamment puni dès ce monde-ci. Ils croyent que la loi qui anéantit les êtres sans retour, est universelle & s’exécute sur l’homme, ainsi

que sur tous les autres animaux. Rien ne dégoute plus de bien faire, que les récompenses mal placées. Quelle bizarrerie dans nos lois ! Tous les crimes ont leur punition ; aucune vertu n’a sa recompense ; comme si les citoyens n’avoient pas autant de besoin d’être encouragés à la vertu, qu’effrayés du vice. En cela les Chinois sont plus sages que nous. On dit, pourquoi vous recompenser ? Vous avez fait votre devoir. Mais ne m’en a-t-il rien coûté pour faire ce devoir ?

Recompenses militaires, (Hist. anc.) prix ou marques d’honneur accordés par l’état aux guerriers, en reconnoissance de leur bravoure. On peut les distinguer chez les anciens en deux especes générales, savoir en recompenses honorables, & en recompenses lucratives.

Les premieres étoient celles auxquelles les peuples avoient attaché des idées de gloire, & qui étoient moins précieuses par les marques de distinction prises en elles-mêmes, que par la réputation qu’elles procuroient. De ce genre étoient chez les Grecs, les statues, les inscriptions, &c. & chez les Romains, les différentes couronnes & l’honneur du triomphe. Voyez Couronne & Triomphe.

Les recompenses lucratives étoient, ou des sommes d’argent, ou des terres conquises distribuées aux vieux soldats, ou des pensions données après leur mort à leurs femmes & à leurs enfans. Cette distinction supposée, il est facile de l’appliquer aux différens genres de recompenses militaires usitées chez les anciens.

Les Grecs pour exciter l’émulation & l’amour de la gloire, avoient imaginé grand nombre de ces distinctions flateuses, dont les hommes sont toujours avides : une statue, une inscription honorable sur son tombeau, engageoient un citoyen à se sacrifier pour la patrie. A Athènes on exposoit pendant trois jours les ossemens de ceux qui avoient été tués dans le combat, & chacun s’empressoit à leur venir jetter des fleurs, offrir de l’encens & des parfums ; on les ensevelissoit ensuite avec pompe dans autant de cercueils qu’il y avoit de tribus dans la république, & avec un concours infini de peuple. Enfin quelques jours après un citoyen ou un orateur des plus qualifiés d’Athènes prononçoit publiquement leur oraison funebre.

Outre cela la république nourrissoit les veuves de ces illustres morts, lorsqu’elles étoient dans le besoin, faisoit élever leurs enfans jusqu’à ce qu’ils fussent parvenus à l’adolescence, & alors on les renvoyoit chez eux avec cette cérémonie singuliere. Pendant les fêtes de Bacchus, un héraut les produisoit sur le théâtre, couverts d’une armure complette, & les renvoyoit avec cette formule qu’il prononçoit, & qu’Eschine nous a conservée. « Ces jeunes orphelins, à qui une mort prématurée avoit ravi au milieu des hasards leurs peres illustres par des exploits guerriers, ont retrouvé dans le peuple un pere qui a pris soin d’eux jusqu’à la fin de leur enfance. Maintenant il les renvoye armés de pié en cap, vacquer sous d’heureux auspices à leurs affaires, & les convie de mériter chacun à l’envi les premieres places dans la république. »

Ceux qui survivoient aux dangers de la guerre, & qui avoient rendu des services importans à l’état, étoient honorés d’une couronne dans l’assemblée du peuple ; elle étoit d’abord d’un olivier sacré qu’on conservoit dans la citadelle, ensuite on décerna des couronnes d’or. Souvent ils étoient nourris aux dépens du public dans le pritanée, & souvent aussi gratifiés d’une certaine quantité de terres dans les colonies.

Les Romains employerent à-peu-près les mêmes recompenses, comme on peut voir au mot Couronne. Mais ils avoient, outre cela, pour les généraux, les honneurs du grand & du petit triomphe, distinctions que les Grecs n’accorderent jamais à leurs plus