Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 8, 1865.djvu/439

Cette page n’a pas encore été corrigée

jusqu’à se porter à le faire mourir, il eût été inutile de les attendre plus longtemps, eux qui le repoussaient avec tant d’opiniâtreté lorsqu’il se présentait à eux. En effet, ils le rejetèrent hautement, en disant : « Nous n’avons point d’autre roi que César ». (Jn. 19,15) Alors enfin le Sauveur les abandonna, parce qu’ils l’avaient abandonné les premiers. Voilà pourquoi il dit : « Combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants, et tu ne l’as pas voulu ? » (Mt. 23,37)
Que signifient ces paroles : « Si le grain de froment ne meurt après qu’on l’a jeté en terre ? » Le Sauveur parle de sa croix, de sa mort. Afin que ses disciples ne se troublassent point, voyant et pensant qu’on avait fait mourir leur Maître, lors même que les gentils venaient à lui, il leur dit : C’est ma mort même qui les attire et les fait plus promptement venir à moi. C’est ma mort qui va répandre ma prédication et mon Évangile. Ensuite, comme il ne les persuadait pas aussi bien par les paroles que par les exemples, il recourt à une image de ce qui se passe dans la nature : Le froment, dit-il, s’il meurt, porte plus de fruit ; or, si cela arrive pour les semences, à plus forte raison la même chose arrivera-t-elle pour moi. Mais les disciples ne comprirent pas ces paroles. C’est pourquoi l’évangéliste répète souvent que les disciples n’avaient point compris ce que Jésus avait dit, afin d’excuser leur fuite au temps de la passion. Saint Paul, parlant de la résurrection des corps, produit le même exemple de la mort et de la résurrection des semences.
3. Quelle excuse auront donc ceux qui ne croient point à la résurrection, puisque nous pouvons tous les jours lavoir et la contempler dans les semences, dans les plantes et même dans la propagation de notre espèce ? Il faut premièrement que la semence se corrompe et pourrisse en terre, pour qu’ensuite elle s’élève et produise du fruit. Mais, en général, quand Dieu fait quelque chose, on n’a nullement besoin de la raison humaine, elle doit se taire ; et en effet, comment le Seigneur nous a-t-il tiré du néant ? C’est aux chrétiens que je parle maintenant, aux chrétiens qui font profession de croire aux Écritures. Mais je veux bien emprunter au raisonnement humain une autre preuve de la résurrection. Parmi les hommes il y en a de bons, il y en a de méchants ; combien de ceux qui sont méchants ont vécu dans la prospérité jusqu’à l’extrême vieillesse ; et au contraire, combien de justes ont passé leur vie dans la misère et dans l’affliction ? Quand donc et en quel temps chacun recevra-t-il ce qui lui revient selon son mérite, selon ses œuvres[1] ? Cela est bon, dit-on, mais il n’y a point de résurrection des corps. Répondre de la sorte, ce n’est point écouter saint Paul, qui dit : « Il faut que ce corps corruptible soit revêtu de l’incorruptibilité ». (1Cor. 15,53) L’apôtre ne le dit pas de l’âme, car l’âme ne se corrompt point et ne meurt point, et la résurrection n’est que pour ce qui est mort : or le corps seul meurt et se corrompt.
Pourquoi ne voulez-vous pas qu’il y ait une résurrection des corps ? Est-ce que Dieu n’a pas le pouvoir de les ressusciter ? Mais n’y aurait-il pas une folie extrême à le nier ? Mais, direz-vous, cette résurrection ne convient point ? Et pourquoi ne convient-il pas que ce corps corruptible, qui a essuyé tant de peines et de travaux, pendant sa vie, qui enfin a souffert la mort, participe un jour aux couronnes et aux récompenses de l’âme ? Si cela n’était pas juste, Dieu ne l’aurait pas créé au commencement, et Jésus-Christ n’aurait pas pris une chair. Or, qu’il en ait pris une et qu’il l’ait ressuscitée, ces paroles le prouvent visiblement : « Portez ici vos doigts », dit-il à Thomas, « voyez et considérez qu’un esprit n’a ni chair ni os ». (Lc. 24,39 ; Jn. 20,27) Pourquoi Jésus a-t-il ressuscité Lazare, s’il était mieux de ressusciter sans corps ? Pourquoi opère-t-il cette résurrection comme un miracle et un bienfait ? Pourquoi enfin nous a-t-il donné les moyens de nous nourrir ? (Mc. 5,43) Ne vous laissez donc pas séduire par les hérétiques, mes chers enfants ; il y a une résurrection, il y a un jugement. Ce sont là des vérités que refusent d’avouer ceux qui ne veulent point rendre compte de leurs œuvres. Il faut que notre résurrection soit semblable à celle de Jésus-Christ (1Cor. 15,20), car il est les prémices et le premier-né des morts. (Col. 1,18)
Que si la résurrection consiste dans la purification de l’âme, dans la délivrance du péché, Jésus-Christ n’ayant point commis de péché, pourquoi est-il ressuscité ? Et si lui-même a

  1. Nous devons tous comparaître devant le Tribunal de Jésus-Christ, dit saint Paul, afin que chacun reçoive ce qui est dû aux bonnes ou aux mauvaises actions qu’il aura faites, pendant qu’il était revêtu de son corps.