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et en triomphant dans sa propre personne[1] ». Or, par la destruction du texte de mort sur la croix, nous avons été rendus à la vie. En effet, la mort en Jésus-Christ, à quoi a-t-elle donné lieu, sinon à la résurrection ? Or, la résurrection en Jésus-Christ confirme l’homme dans la croyance à sa propre résurrection. Reste à chacun le devoir de comprendre qu’il doit, dans sa vie, mettre un terme à ses crimes, comme un terme a été imposé à la mort publique. Puisque la mort est détruite, secouons notre sommeil spirituel, afin que personne ne demeure dans ses habitudes anciennes, maintenant que « les vieilles choses sont passées et que tout a été renouvelé[2] ». Réalisons cette parole de l’Apôtre attestant que Jésus-Christ est mort, « afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour Celui qui, pour eux, a bien voulu mourir et ressusciter[3] ».

10. « Voici donc le jour que le Seigneur a fait[4] » ; qu’il a réparé pour la gloire de ses saints ; dans lequel Jésus-Christ ressuscitant d’entre les morts ordonne à son corps mystique qui est l’Église d’espérer que les membres participeront à la gloire de leur chef. Écoutez l’Apôtre, lequel proclame que c’est Jésus-Christ lui-même qui parle par sa bouche : « En un moment, en un clin d’œil, au son de la dernière trompette, car la trompette sonnera, les morts ressusciteront incorruptibles, et nous serons changés[5] ». Toutefois ce grand jour de la résurrection dernière reçoit toute sa magnificence du jour que nous célébrons et qui a été illustré par la résurrection de Jésus-Christ, Alors nous aurons la réalité même de notre résurrection, aujourd’hui nous en possédons le principe ; nous avons comme le germe d’où sortiront tous ces fruits. Le Prophète personnifiant Jésus-Christ chantait à l’avance la gloire de ce jour : « J’ai dormi et pris mon sommeil, et je me suis levé parce que le Seigneur m’a reçu[6] ». « J’ai dormi », dit-il, afin de prouver que sa mort était bien l’œuvre de sa volonté propre, et non pas le résultat de la coaction. Telle est la pensée clairement formulée par l’Évangile dans ces paroles mêmes du Sauveur : « J’ai le pouvoir de quitter la vie, et j’ai aussi le pouvoir de la reprendre[7] ». Cette grande joie du matin est ailleurs décrite en ces termes : « La lumière est levée pour les justes, et la joie pour ceux qui ont le cœur droit[8] ». « Justes, réjouissez-vous dans le Seigneur[9] ». Et encore : « J’exalterai le matin vos merveilles, parce que vous êtes mon soutien, ô mon Dieu[10]. « Vous nous vivifierez après deux jours, le troisième jour vous nous ressusciterez[11] ». Enfin, dans un autre passage l’écrivain sacré décrit en un seul verset la lumière du soir et la joie du matin de la résurrection : « La douleur durera jusqu’au soir et la joie jusqu’au matin[12] ». Voilà pourquoi, comme le dit l’Apôtre, « la nuit a précédé, mais le jour s’est approché. Rejetons donc les œuvres de ténèbres, et revêtons-nous des armes de la lumière[13] », afin que, à l’aide de ces armes, nous triomphions de l’adversaire de notre salut, puisque Jésus-Christ en a déjà triomphé lui-même. Si la seule espérance nous procure tant de joie, que sera-ce donc de la réalité ? Si les membres sont si heureux du bonheur de leur chef, quel ne sera pas le bonheur dont ils jouiront avec leur chef dans ce lieu de délices où celui qui aura mérité d’être compté parmi les membres de ce corps magnifique n’aura plus à craindre d’en être retranché ? Toutefois, celui qui désire ressusciter et régner avec Jésus-Christ, doit auparavant être crucifié et mourir avec lui, en mortifiant sans délai ses désirs et ses passions, par Jésus-Christ Notre-Seigneur.

  1. Col. 2, 14,15
  2. 2 Cor. 5, 17
  3. Id.15
  4. Ps. 117, 24
  5. 1 Cor. 15, 52
  6. Ps. 3, 6
  7. Jn. 10, 18
  8. Ps. 96, 11
  9. Id. 31, 11
  10. Id. 58, 17
  11. Os. 6, 3
  12. Ps. 29, 6
  13. Rom. 13, 2