Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome VI.djvu/541

Cette page n’a pas encore été corrigée

les empêchait de croire ; il leur ouvrit donc l’intelligence polir leur faire comprendre les Écritures et il leur dit : « Ainsi est-il écrit et ainsi fallait-il que le Christ souffrit en ressuscitant d’entre les maris le troisième jour. »
Voilà pour le Chef ; voici maintenant pour le corps : « Et qu’on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés parmi toutes les nations, en commençant par Jérusalem [1]. » Ainsi donc l’Église peut dire à ses ennemis, elle peut leur dire, ou plutôt elle leur dit, car elle ne garde pas le silence, et c’est à eux de l’écouter : Mes frères, vous avez lu les témoignages qui me concernent, reconnaissez-moi enfin. « Sondez les Écritures, ait vous espérez puiser l’éternelle vie ; elles rendent témoignage de moi. » Ce que je viens de dire ne vient pas de moi, mais de mon Seigneur ; et toutefois vous vous éloignez encore, vous contestez encore. « Comment pouvez-vous me croire, en attendant votre gloire film de l’autre et en ne cherchant pas la gloire qui vient de Dieu seul ? » C’est qu’ignorant la justice de Dieu, vous avez dit zèle pour Dieu, mais pas selon la science. – En effet, parce que vous ignorez cette justice de Dieu et que vous voulez établir votre propre justice, vous n’êtes point soumis à la justice de Dieu. Or, qu’est-ce qu’ignorer la justice de Dieu et chercher à établir la sienne, sinon dire : C’est moi qui sanctifie, c’est moi qui justifie, je donne la sainteté même ? O homme, laisse à Dieu ce qui est à Dieu et ne t’attribue que ce qui est à toi. Tu ignores la justice de Dieu et veux établir la tienne ; tu prétends donc me justifier. Ah ! c’est assez pour toi d’être justifié avec moi.
7. Il est dit de l’Antéchrist et tous comprennent dans ce sens cette parole du Seigneur : « Je suis venu au nom de mon Père, et vous ne m’avez point reçu ; si un Autre vient en son propre nom, vous le recevrez. » Entendons aussi l’Apôtre Jean : « On vous a dit que l’Antéchrist vient, et il y a maintenant beaucoup d’Antéchrists[2]. » Mais que redoutons-nous dans l’Antéchrist, sinon l’honneur qu’il exigera pour son nom et le mépris qu’il fera du nom de Dieu ? Fait-on autre chose quand on dit : C’est moi qui justifie ? Je réponds : Je suis venu vers le Christ, non par le mouvement des pieds, mais par les sentiments du cœur ; dans le lieu où j’étais, j’ai entendu l’Évangile, là aussi j’ai cru et j’ai reçu le baptême ; je me suis effectivement attaché au Christ, attaché à Dieu effectivement. – Tu n’en es pas plus pur, réplique-t-on. — Pourquoi ? – Parce que je n’étais pas là. – Mais ce n’est pas m’expliquer pourquoi je ne suis pas justifié, moi qui ai reçu le baptême soit à Jérusalem, soit à Éphèse, où l’Apôtre a envoyé une lettre que tu lis tout en dédaignant d’être en communion avec cette Église ? Oui, l’Apôtre a écrit aux Éphésiens ; il a fondé leur Église et jusqu’aujourd’hui cette Église subsiste, s’enrichit de grâces, multiplie ses enfants, conserve la doctrine qu’elle a reçue de l’Apôtre, conformément à ce qu’il a dit lui-même : « Si quelqu’un vous enseigne autrement que vous avez été enseignés par nous ; qu’il soit anathème[3]. » Et toi, tu oses bien me dire que je ne suis pas purifié ? C’est là que j’ai reçu le baptême ; et je ne suis pas pur ? – Non, tu ne l’es pas. Pourquoi ? – Parce que je n’étais point là. – Mais Celui qui est partout s’y trouvait. Oui, Celui qui est partout y était, et c’est à son nom que j’ai donné ma foi. Et toi qui viens je ne sais d’où, ou plutôt qui ne viens de nulle part, mais qui prétends me faire aller vers toi, tu oses me dire ici : Tu n’es pas bien baptisé, parce que je n’étais pas là ? Mais considère dans Celui qui y était. Que fut-il dit à Jean-? « Celui-là baptise, sur qui tu verras l’Esprit descendre comme une colombe[4]. » C’est celui-là, qui te cherche ; ou plutôt, parce que tu me fais un reproche d’avoir été baptisé par lui, c’est-celui-là que tu as perdu.
8. Ainsi, mes fières, comparez notre langage avec le leur, et voyez quel choix vous devez faire. Nous vous disons, nous : Sommes-nous saints ? Dieu le sait. Sommes-nous pécheurs ? A lui surtout il appartient de le savoir ; mais, quels que nous soyons, ne mettez pas en nous votre espoir. Si nous sommes gens de bien, suivez cette recommandation : « Soyez mes imitateurs, comme je le suis du Christ[5]. » Si nous sommes méchants, ne désespérez pas non plus, vous n’êtes ni abandonnés, ni privés de conseil, écoutez Celui qui dit : « Faites ce qu’ils enseignent, mais gardez-vous de faire ce qu’ils font[6]. » Mais ces malheureux répondent : Si tous ne sommes justes, c’en est fait de vous. N’est-ce pas cet autre qui doit venir en son nom ? Ainsi, c’est de toi que viendra ma vie ? C’est de toi que viendra mon salut ? Crois-tu que j’aie oublié, jusqu’à ce point Celui qui a voulu me servir de fondement ? N’est-ce pas le Christ qui est la pierre[7], et celui qui

  1. Luc. 24, 45-47
  2. Jn. 2, 18
  3. Gal. 1, 9
  4. Jn. 1, 33
  5. 2Co. 4, 6
  6. Mat. 13, 3
  7. 1Co. 10, 4