La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité/P2/1862-1871

Gauthier-Villars et fils (1p. 172-212).
Période 1862-1871

LIV. 1862-1864. — Green et W.-L. Banks.

MM. Green et W.-L. Banks, artistes peintres et amateurs d’Astronomie, habitant en Angleterre, près de Londres, le premier à Saint-John’s Wood, le second à Ealing, ont observé chacun séparément la planète pendant ses oppositions de 1862 et 1864 ; le premier à l’aide d’une lunette française de 4 pouces 1/4 munie d’oculaires grossissant de 160 à 240 fois, le second à l’aide d’une lunette anglaise de 3 pouces 3/4. Ils en ont pris une centaine de dessins dont 24 ont été publiés dans l’ancien journal astronomique The Astronomical Register, février 1865.

Ces petits dessins sont charmants, et nous regrettons de ne pouvoir vraiment tout reproduire ici. Leur comparaison met en évidence deux faits incontestables : le premier, c’est que, malgré l’habileté pratique des dessinateurs, ils ne s’accordent pas toujours dans leur appréciation des aspects de la planète, et le second, c’est que la permanence des configurations géographiques martiennes n’exclut pas des variations assez considérables dues, au moins en partie, à des causes atmosphériques martiennes, lesquelles produisent parfois des traînées claires ou foncées en forme de bandes équatoriales.

Dans plusieurs de ces figures, on reconnaît admirablement la mer du Sablier et sur l’un d’eux notamment, sur celui du 24 novembre 1864, à 10h 30m, fait par M. Green, on remarque la région brumeuse indécise qui, dans ces dernières années surtout, a été signalée par plusieurs observateurs comme soumise à des variations d’aspects pouvant être dues à des inondations.

LV. 1862-1864. — J. Joynson, Noble, Williams.

Pendant les oppositions de 1862 et 1864, M. Joynson, dont l’observatoire était situé à Waterloo, près Liverpool, en Angleterre, a présenté à la Société royale astronomique de Londres[1] une série de 92 dessins de la planète, pris durant l’opposition de 1862, et de 104 autres pris pendant celle de 1864. Les Monthly Notices (10 mars 1865) n’ont reproduit que deux croquis que l’auteur signale pour la bande grise qui contourne la planète. Ces deux dessins sont des 8 et 12 décembre 1864. On y reconnaît la mer Terby, très noire ; la bande est formée par la succession des mers Schiaparelli, Maraldi, Flammarion, Herschel II et de la Rue.

L’observateur a employé pour ces études, en 1862, un objectif de trois pouces et demi et, en 1864, un objectif de six pouces. Dans les deux cas, le grossissement employé a été de 350. L’auteur croit que la bande tracée sur ces deux dessins fait le tour de la planète sans interruption. À la même séance de la Société, M. Lockyer a fait remarquer que cette mer n’est pas continue, mais traversée en plusieurs points par des terres. Il ajoute que les différentes taches de la planète offrent divers degrés d’intensité et que certaines d’entre elles sont beaucoup plus foncées que d’autres. Ces différences de tons ont été constatées en 1862 par cet observateur, ainsi que par MM. Phillips et Frankland, exactement telles qu’elles avaient été marquées par Beer et Mädler en 1830. En combinant ses croquis de 1862, l’auteur trouve, pour la période de rotation, 24h 37m 37s.

En Angleterre, M. Noble a fait un certain nombre de dessins à l’aide d’une lunette de 4 pouces. Il en avait pris dès l’opposition de 1858, et les a continués jusqu’en 1877. M. Williams a obtenu six dessins pour l’opposition de 1862, douze pour celle de 1864 et douze pour celle de 1867 (voy. Monthly Notices, XXV, p. 170 et Terby, Aréographie, p. 27) à l’aide d’un télescope de 4 pouces 1/4 les principales taches de la planète y sont représentées avec leurs caractères les plus saillants. Cette période de 1862 à 1864 a été très féconde. Le travail le plus important est celui auquel nous arrivons ici, celui de Kaiser, directeur de l’Observatoire de Leyde.

LVI. 1862-1864. — Kaiser[2].

Ce laborieux astronome a fait, pendant les oppositions de 1862 et 1864, de très importantes recherches sur la planète dont nous écrivons ici la monographie. Le Mémoire qu’il a publié dans les Annales de l’Observatoire de Leyde est partagé en plusieurs sections qui ont pour objet, d’abord l’étude des anciens dessins de la planète Mars de 1636 à 1864 et ensuite les observations faites à Leyde sur les configurations géographiques de ce globe, sur la durée de sa rotation, sur les taches polaires et sur l’aplatissement. Ce Mémoire est accompagné de dessins et de cartes dont nous allons offrir les principaux à l’attention de nos lecteurs.

Ces dessins, que nous reproduisons ici, portent leurs dates respectives. Étudions-en les aspects :

Voici d’abord quatre dessins de 1862.

Le premier nous montre les mers du Sablier, Flammarion, Hooke et Maraldi, l’océan Dawes, la mer Zöllner, le continent Beer, le continent Herschel Ier, l’isthme de Niesten, les terres de Cassini et Dreyer ; on devine même

Fig. 111. — Dessins de Mars par Kaiser, en 1862,
la terre de Lockyer. Le pôle supérieur ou austral est marqué par un petit cercle de neige. À gauche de la mer du Sablier, la région est brumeuse. Ce dessin est complet, en conformité parfaite avec notre carte construite sur l’ensemble des observations (fig. 31). Il semble donc que ce jour-là (5 octobre 1862, à minuit 35m) l’aspect de la planète n’était modifié par aucun nuage. Les tons eux-mêmes sont notés.

Le deuxième dessin nous montre la mer Terby, l’océan de la Rue qui la surmonte, la mer Schiaparelli à droite. Au lieu de la Manche, on voit une traînée brumeuse. La neige polaire est détachée du bord.

Sur le troisième dessin, nous trouvons le détroit d’Herschel II et la baie du Méridien : ce ruban sombre se montre tout à fait détaché du fond clair, comme au temps de Mädler, seulement, au lieu d’être circulaire, la baie est rectangulaire et terminée par deux pointes. Cette baie a été vue fourchue pour la première fois par Dawes, le 22 septembre 1862, à l’aide d’un objectif d’Alvan Clark de 8 pouces 3/4. Au-dessus, la mer Lambert ; à gauche, la mer du Sablier. L’île Phillips est très claire.

Le quatrième figure semble réunir la première et la troisième.

On peut comparer avec intérêt la fig. 1, du 5 octobre, à la fig. 98 de Lockyer du 3 octobre, à 11h 23m, et à la fig. 4 de lord Rosse du 6 octobre : elles s’accordent toutes les trois, en laissant la marge qu’il convient aux facultés d’observations de chaque astronome et aux divergences inévitables du dessin. On éprouvera la même impression en comparant la fig. 2 à celles de Lockyer du 17 septembre. Toutes ces configurations existent, sans l’ombre d’un doute. Mais on les distingue plus ou moins bien.

Ainsi se précise graduellement dans notre esprit la forme géographique réelle de la surface martienne. Son analogie avec la Terre comme distribution de cette surface en continents et en mers s’affirme de plus en plus avec le progrès des observations.

Cette précision va s’accroître encore et très rapidement, par les six excellents dessins de 1864, que nous mettons maintenant sous les yeux de nos lecteurs (fig. 112 à 117).

Dans le premier (fig. 112), nous retrouvons la baie du Méridien, élargie et confondue avec la mer voisine, la baie Burton, élargie et doublée, la baie Christie. Tout cela paraît trop large.

Dans le deuxième (fig. 113), nous reconnaissons la mer du Sablier, très foncée, et au-dessus l’océan Dawes, la terre de Lockyer. Au-dessous de la mer du Sablier, la passe de Nasmyth. Sur la droite du disque, une traînée inconnue (qui pourrait être l’Euphrate de M. Schiaparelli, avec lequel nous ferons plus loin connaissance).



Fig. 112. — Vue télescopique de Mars par Kaiser, le 11 novembre 1864, à 10h 30m.



Fig. 113. — Vue télescopique de Mars par Kaiser, le 22 novembre 1864, à 10h 45m.

Dans le troisième dessin de Kaiser : l’Œil ou mer Terby, la terre Copernic, au-dessous, une traînée sombre ; à droite, la mer Schiaparelli (fig. 114).

Dans le quatrième, à droite, la mer Terby, et au-dessous la traînée sombre, dont nous venons de parler, la terre de Kepler, l’océan de la Rue avec la baie Christie, le détroit Arago avec la baie Burton double, la baie du Méridien tout à fait à gauche.



Fig. 114. — Vue télescopique de Mars, par Kaiser, le 10 décembre 1864, à 10h 10m.



Fig. 115. — Vue télescopique de Mars, par Kaiser, le 18 décembre 1864, à 10h 0m.

Dans le cinquième (fig. 116), le détroit Herschel II, très foncé et bien détaché, l’île Phillips (presqu’île), le détroit Arago ; en bas, la mer Delambre.



Fig. 116. — Vue télescopique de Mars, par Kaiser, le 23 décembre 1864, à 9h 25m.



Fig. 117. — vue télescopique de mars, par kaiser, le 28 décembre 1864, à 8h 0m.

Dans le sixième (fig. 117), la mer du Sablier avec son appendice, la mer Main, diffuse, et toutes les configurations précédemment décrites.

Nous sommes donc désormais inébranlablement affermis dans la certitude que les configurations de Mars sont fixes, c’est-à-dire de nature géographique, mais variables d’aspects, notamment sans doute par suite de variations atmosphériques qui s’y superposent.

L’astronome de Leyde a tiré de tous ses dessins une carte géographique de la planète. Nous la reproduisons également ici (fig. 118) en fac-similé. On la comparera avec intérêt à celle que nous avons publiée plus haut (fig. 31). Plusieurs différences sont manifestes. Ainsi, nous n’avons pas détaché le détroit Herschel II comme Kaiser, parce que pour nous ce croquis de l’astronome de Leyde ne représente pas une configuration permanente : généralement ce détroit se confond avec la mer (océan Dawes) ; généralement aussi le détroit Arago est moins large à son extrémité. Il y a là deux régions spéciales de variabilité, soit que l’eau qui forme ces mers se retire ou s’évapore, soit qu’elle change de ton et soit tantôt foncée et bleu sombre, tantôt jaunâtre et claire. Plus nous avançons dans notre étude, plus l’idée de variations d’eaux, évaporations inondations, précipitations aqueuses plus ou moins durables s’impose à notre esprit.

Dans les observations de Kaiser, la tache caractéristique la plus remarquable pour lui a été la tache ovale par laquelle il fait passer son premier méridien, et qui se trouve à la longitude 0 et à 26° de latitude australe. L’auteur l’identifie avec la tache d de Beer et Mädler. (Voir leur carte, fig. 68). C’est le lac circulaire qui porte le nom de mer Terby sur notre carte. Remarquons sa forme ovale sur la carte de Kaiser. Cette forme change selon les années. Elle est quelquefois tout à fait ovale, comme ici, quelquefois parfaitement circulaire. Or, ce lac a l’étendue de la France.

La mer du Sablier descend en pointe au-dessous de l’équateur, obliquement, vers 150°. La tache ronde circulaire prise par Beer et Mädler pour origine de leurs longitudes est carrée dans le dessin de Kaiser et à 90° à gauche de la tache ovale prise par lui pour méridien initial. On voit que les longitudes de Kaiser diffèrent de 90° de celles que nous adoptons.

Le même astronome a entrepris pendant les années 1862, 1863, 1864 et 1865, à l’aide du réfracteur de 7 pouces de l’Observatoire de Leyde, muni du micromètre à double image d’Airy, une série de mesures des diamètres polaires et équatoriaux de la planète Mars[3]. L’ensemble de ces mesures donne :

Diamètre équatorial
9″,468
Diamètre polaire
9″,387
Aplatissement
1/117

La mesure de l’aplatissement de Mars reste, comme on le voit, tout à fait problématique :

W. Herschel a trouvé
1/18
Schrœter
1/81
Arago
1/30
Bessel
0
Main
1/62, 1/38, 1/46, 1/71 et 1/36
Winnecke, Dawes et Johnson, un allongement polaire.

Kaiser s’est également occupé de la rotation de la planète, en comparant ses observations aux meilleures choisies parmi celles de ses prédécesseurs et en identifiant avec raison la tache verticale dessinée par Hooke dans ses deux observations du 3 mars 1666 à la tache marquée f dans les observations de Beer et Mädler en 1830 et désignée sous le nom de « mer du Sablier », the Hour-glass sea.

L’observation de Hooke du 3 mars 1666 (ancien style) correspond au 13 mars du calendrier grégorien, qui n’a été adopté en Angleterre qu’en 1752. Elle a été faite, la première à minuit 20m, la seconde à minuit 30m. La tache n’était pas encore au milieu du disque : elle y est arrivée à 2h 46m, Dans ses observations de 1862, Kaiser a constaté le passage de la même tache au méridien central de Mars le 1er novembre, à 6h 10m. Il en conclut le calcul suivant :

Passage de la mer du Sablier par le méridien central du disque de Mars.
Hooke, 1666, mars 14, à 2h 56m.
Kaiser, 1862, nov. 41, à 6h 10m.
Différence : 71 821 jours 3h 14m.

Pendant cet intervalle, la planète a fait 70 004 rotations, ce qui donne pour la durée de la rotation :

24h 37m 22s,735.

Par l’observation de Hooke et celle de Beer et Mädler du 30 septembre 1830, à 17h 22m, le même astronome a obtenu :

Différence 60 101 jours 14h 26m. 58 581 rotations.
Rotation = 24h 37m 22s,706.

Par l’observation de Hooke et celle de Huygens du 13 août 1672, à minuit 11m :

Différence 2 344 jours 9h 14m. 2 285 rotations.
Rotation = 24h 37m 22s,62.

La concordance est remarquable, malgré les doutes de Kaiser sur l’identité

Fig. 118. — CARTE GÉOGRAPHIQUE DE LA PLANÈTE MARS, CONSTRUITE PAR KAISER EN 1864
de la tache verticale de Hooke avec la mer du Sablier. Il ne doute pas de l’identité de cette mer avec la tache triangulaire du dessin d’Huygens du 13 août 1672, par laquelle il trouve d’autre part :

Huygens, 1672, août 13, à 12h 10m.
Huygens,Kaiser, 1862, nov. 31, à 16h 10m.
Différence : 69 476 jours 18h.

Pendant cet intervalle, la planète a effectué 67 719 rotations ; d’où l’auteur conclut pour la durée de rotation :

24h 37m 22s,643.

Cette même observation de Huygens, combinée avec celle de Beer et Mädler du 30 septembre 1830, à 17h 22m, lui donne comme résultat :

Différence 57 757 jours 5h 12m. 56 296 rotations.
Rotation = 24h 37m 22s,595

En résumé, la rotation de la planète Mars est fixée, depuis 1864, à

24h 37m 22s,6.

à un dixième de seconde près.

LVII. 1862-1864. — Analyse spectrale de l’atmosphère de Mars, par Huggins, Miller, Rutherfurd et Vogel.

Dans le cours de l’année 1862, M. William Huggins, membre de la Société royale astronomique de Londres, et M. A. Miller, professeur de Chimie à King’s-College de Londres, essayèrent pour la première fois d’appliquer l’analyse spectrale à l’étude des planètes Vénus, Jupiter, Mars et Saturne. Les résultats obtenus ont été publiés dans les Philosophical Transactions de l’année 1864. Aux États-Unis, Rutherfurd entreprit en même temps la même recherche[4].

Nous n’avons pas à nous occuper ici des autres planètes. En ce qui concerne Mars, son spectre fut observé notamment le 6 novembre 1862 et le 17 avril 1863. Les principales raies du spectre solaire s’y montrèrent nettement marquées et l’on n’y découvrit aucune autre ligne un peu forte.

Les 10 et 29 août 1864, les mêmes savants examinèrent de nouveau la planète à l’aide d’un spectroscope perfectionné. Ils ne découvrirent dans le rouge aucune des raies d’absorption qu’ils avaient constatées dans les spectres de Jupiter et Saturne, mais tout à fait à l’extrémité du rouge, vers les raies B et a du spectre solaire, ils constatèrent la présence de trois lignes fortes.

Vers la raie F du spectre solaire, c’est-à-dire au commencement du bleu, immédiatement après le vert, le spectre de Mars montre un grand nombre de bandes d’absorption qui diminuent considérablement son éclat. Ces bandes fortes sont à peu près équidistantes, et se continuent jusqu’à l’extrémité violette du spectre. L’absorption de ces bandes est évidemment la cause de la prédominance des rayons rouges dans la lumière de cette planète. L’appareil spectral à grand pouvoir dispersif résout ces bandes en groupes de lignes.

La conclusion de cet examen est que, d’abord, Mars ne brille que par la lumière solaire réfléchie, et renvoie comme un miroir une image du spectre solaire. Ensuite, son atmosphère donne naissance aux raies d’absorption dont nous venons de parler. Qu’est-ce que ces raies spectrales indiquent ? Nous le saurons bientôt.

Au mois d’août 1864, MM. Huggins et Miller ont remarqué que l’éclat du spectre de Mars avait diminué d’une manière remarquable vers la ligne F, par suite d’une série de groupes de lignes assez fortes et équidistantes commençant vers la raie F et se continuant vers la ligne la plus réfrangible du spectre. Au mois de novembre 1864, ces lignes étaient beaucoup plus faibles et pouvaient à peine être distinguées des lignes nombreuses appartenant au spectre solaire. L’impression de M. Huggins a été que la lumière de Mars, les 10 et 27 août, se montrait plus rouge et que les taches se voyaient plus distinctement qu’au mois de novembre. « Si cette opinion, dit-il, était contrôlée par les autres observations, on pourrait admettre que, vers la fin de l’année, l’atmosphère de Mars a été plus chargée de brouillards et de vapeurs. Ces brumes réfléchiraient une partie considérable de la lumière incidente, et par là ombreraient et cacheraient les couches inférieures de l’atmosphère de la planète ainsi que la surface du sol d’où provient probablement la couleur rouge ; c’est cette couleur qui donne probablement naissance aux lignes d’absorption qui affaiblissent les rayons bleus et violets du spectre de Mars. Par une série d’observations télescopiques et prismatiques correspondantes, on pourrait sans doute faire des études efficaces sur la météorologie de la planète. »

Les recherches faites en Allemagne, par Vogel, s’accordent avec celles faites en Angleterre et aux États-Unis, sur les lignes d’absorption du spectre atmosphérique de Mars.

En réponse à une question de M. Pritchard : si un simple brouillard produirait dans le spectre de la planète des lignes indicatrices des substances qui le composeraient, M. Huggins répond que le brouillard n’a aucune faculté d’absorption sélective pour produire des lignes définies. Les petites particules du brouillard étant grandes relativement aux ondulations de la lumière, diminuent l’intensité des rayons bleus et verts en proportion plus grande que pour l’extrémité rouge du spectre. La lumière réfléchie d’une masse de brouillard offrirait une couleur bleuâtre.

À propos des remarques précédentes, M. Lockyer rappelle que la planète Mars a paru, en 1862, plus rouge à l’œil nu qu’en 1864. D’autre part, l’atmosphère de Mars s’est montrée, sans contredit, meilleure et plus transparente en 1862 qu’en 1864. Cette observation concorde avec ce que vient de dire M. Huggins. On pourrait en conclure que, lorsque l’atmosphère de Mars est pure de nuages et de brumes, la lumière de la planète est plus rouge, en même temps que ses taches se montrent plus distinctement.

Nous examinerons la suite de ces recherches en 1867.

Nous voici arrivés dans le cours de cette étude à l’année 1864, qui a été en quelque sorte la continuation de l’opposition de 1862 par la proximité à laquelle la planète s’est présentée, quoique pourtant elle ait été un peu moins proche qu’en 1862 et surtout qu’en 1860 ; mais l’attention des astronomes y était particulièrement dirigée, et l’on espérait arriver à quelque découverte capitale.

Nous venons déjà d’étudier les importantes observations de Kaiser et des spectroscopistes. Continuons cette période par l’analyse des observations de l’astronome anglais Dawes, l’observateur « à l’œil d’aigle ».

LVIII. 1864. — Observations du Rév. W.-R. Dawes[5].

Cet habile et éminent observateur a présenté à la Société royale astronomique de Londres, dans sa séance du 9 juin 1865, huit magnifiques dessins que nous reproduisons ici et qui proclament un progrès considérable dans l’étude de notre planète. Ces observations ont été faites de novembre 1864 à janvier 1865, à l’aide d’un excellent objectif de 8 pouces construit par Cooke and Sons.

« Plusieurs détails curieux et intéressants que je n’avais jamais reconnus aussi distinctement, dit l’auteur, se sont manifestés pendant cette opposition (de 1864). L’un des plus remarquables est un détroit long et mince qui court dans la direction N.-E. et S.-W., dans l’hémisphère nord, et qui se voit distinctement dans les dessins des 12 et 14 novembre, et plus faiblement dans celui du 10 novembre ainsi que dans celui du 21 janvier. J’avais déjà remarqué et dessiné ce détroit dès l’année 1852, le pôle nord étant alors également tourné vers nous, mais quoique la planète ait été alors en excellentes conditions d’observation (ayant une déclinaison nord de 24°), je ne l’ai pas vu aussi distinctement avec l’instrument de 6 pouces 1/3 de Munich, dont je me servais alors, qu’à l’aide de mon 8 pouces actuel.

« Un autre objet intéressant a été l’ombre fourchue, dessinée notamment le 14 novembre ainsi que le 20 et le 12 (moins distinctement). Je l’avais souvent remarquée en 1852 sous la forme d’une baie ovale avec un rivage régulier et n’ai pas soupçonné une seule fois qu’elle pût être partagée ou irrégulière dans son contour, Mais, le 22 septembre 1862, j’ai constaté très nettement son aspect fourchu et il en a été de même pendant toute la durée de la dernière opposition. Cet aspect donnait l’impression de deux embouchures de fleuves très larges ; mais je n’ai jamais pu reconnaître ces fleuves. Les excellents dessins faits par M. Lockyer en 1862 montrent plusieurs fois cette baie, mais ne la montrent pas ainsi partagée en deux pointes. Il sera fort intéressant, dans les oppositions futures, de vérifier si cette forme est permanente ou variable, Il peut se faire que la mer se soit retirée de cette partie du rivage et ait laissé une langue de terre visible.

« Il est très difficile de noter avec certitude des variations dans l’aspect des différentes taches qui peuvent être dues à des causes atmosphériques dans la planète elle-même. Cette difficulté pourrait sans doute être diminuée si l’on prenait soin de comparer les vues télescopiques aux configurations déjà connues des régions observées ; mais il me paraît préférable de s’abstenir de toute référence et de toute idée préconçue, afin de faire des dessins absolument indépendants. L’atmosphère doit néanmoins jouer un certain rôle dans les causes de variations. Ainsi, pendant trois soirs consécutifs, les 20, 21 et 22 janvier, j’ai observé une tache très blanche se montrant exactement à la même place au point marqué a sur le dessin du 21 janvier. Cette tache blanche n’était certainement pas visible les 10 et 12 novembre. Cette tache donnait l’impression d’une énorme masse de neige et était aussi brillante que la tache polaire australe de 1862. Malheureusement, une série de nuits nuageuses m’empêcha de continuer ces observations.

» Rien ne me paraît mieux prouver que la teinte rouge de Mars n’est pas produite par l’atmosphère de la planète que ce fait que la coloration rougeâtre est toujours plus marquée vers le centre du disque, précisément où l’enveloppe atmosphérique est la plus mince. Vers les bords du disque, les taches grises sont presque entièrement effacées par la densité de l’atmosphère, et la couleur réfléchie de ses bords est blanche ou blanche verdâtre, cette dernière coloration étant peut-être un effet de contraste avec le rouge du centre.

» Le 1er décembre, quelques heures après l’opposition, j’ai obtenu quelques mesures du disque à l’aide d’un excellent micromètre à double image. Il ne m’a pas été possible de reconnaître aucune trace d’aplatissement ; au contraire, j’ai trouvé le diamètre polaire plutôt plus grand que le diamètre équatorial,

Fig. 119. — Dessins de Mars, par Dawes, en 1804-65.
d’une quantité insignifiante d’ailleurs (0,02). Ce résultat rappelle les mesures de Mars faites par M. Johnson avec l’héliomètre d’Oxford[6].

» Mon impression est que l’atmosphère de la planète Mars n’est pas habituellement très nuageuse. Pendant la dernière opposition, les principales configurations se sont presque constamment montrées clairement et nettement.

Fig. 120. — Dessins de Mars, par Dawes, en 1864-65.
Je n’ai pas une seule fois pu constater qu’il y ait eu avec certitude des régions masquées par du brouillard et des nuages. La seule exception à cette permanence consiste dans les taches très blanches notées en quelques rares circonstances et qui donnent l’impression soit de masses de neige, soit de masses nuageuses dont la surface réfléchit vivement la lumière solaire. On pourrait ajouter aussi à ces variations le fait assurément remarquable que l’on constate en comparant le dessin du 14 novembre à ceux du 10 et du 12 pour le pôle inférieur : il y avait au point marqué a dans les dessins du 10 et du 12 une petite traînée grise bien évidente le 14 novembre, à minuit ; elle n’existait certainement pas aux deux autres dates, où cependant les détails voisins étaient parfaitement visibles. »

À ces observations si intéressantes, Dawes ajoute en post-scriptum les remarques suivantes :

En recourant à mon registre et à mes dessins de l’année 1852, je vois que, cette année-là, j’ai souvent observé une traînée particulièrement blanche le long du rivage marqué a sur le dessin du 20 novembre 1864 comme attirant particulièrement l’attention par son éclatante blancheur. Il semble donc qu’il y aurait là quelque cause permanente ou du moins assez fréquente amenant cet éclat particulier. Cependant, comme cette région est voisine de l’équateur, il ne paraît pas vraisemblable d’attribuer cette blancheur à des nuages et encore moins à de la neige, à moins qu’il n’y ait là des plateaux très élevés au-dessus du niveau de la mer[7].

Ces magnifiques dessins de Dawes constituent, comme nous l’avons remarqué plus haut, un progrès considérable dans notre connaissance des détails de la topographie martienne : la baie fourchue du Méridien y est découverte dans sa forme normale, ainsi que le détroit Herschel II, les rivages de la mer du Sablier, et la plupart des configurations représentées sur notre carte. À la baie du Méridien, qui donne naturellement l’idée de l’embouchure de deux fleuves, l’observateur a cherché ces fleuves sans parvenir à les découvrir : M. Schiaparelli les a découverts treize ans après, en 1877.

L’île blanche observée le 21 janvier se trouve sur notre carte, à l’intersection du 60e méridien et du cercle polaire austral. Elle n’est pas toujours visible, non plus que sa voisine.

Remarquons aussi ce qu’il dit de la coloration de Mars et de son atmosphère. La coloration rougeâtre de la planète est toujours plus marquée dans la région centrale du disque que vers les bords. Donc elle n’est pas produite par l’atmosphère, puisque c’est justement ver le centre du globe que la lumière réfléchie par la surface a la moindre épaisseur d’air à traverser. C’est ce qu’Arago avait déjà conclu (p. 133).

La visibilité presque constante des taches de Mars, la rareté des nuages, la faiblesse de la pesanteur à la surface du globe, conduisent à penser que l’atmosphère de Mars est très faible. Celle de la Terre est si dense que les détails de la surface terrestre doivent être bien moins visibles de loin que ceux de Mars. D’après les recherches de Langley, 40 pour 100 des rayons solaires qui arrivent verticalement sur notre atmosphère sont absorbés par elle. Des 60 qui arrivent à la surface du sol, moins du quart peut être réfléchi par le sable jaune même, et ce quart doit encore perdre 40 pour 100 en traversant l’atmosphère. Il n’y aurait donc, pour la Terre, pas plus de 8 ou 9 pour 100 des rayons lumineux qui pourraient atteindre l’œil d’un observateur lunaire. De loin, la Terre doit donc paraître blanchâtre même par le ciel le plus pur[8].

La comparaison de ces dessins avec notre carte conduit à une conclusion identique à celle que nous avons tirée tout à l’heure des observations de Kaiser. La mer Terby est allongée au lieu d’être ronde : elle ressemble à une feuille au-dessous, une seconde tache, offrant le même aspect, est beaucoup trop vaste ; le détroit Herschel II se détache nettement, mais la baie du Méridien n’est pas ronde et isolée comme dans les observations de Beer et Mädler. Tout conclut en faveur de variations certaines dans ces aspects géographiques.

LIX. 1864. — John Phillips.

Le professeur émérite de l’Université d’Oxford, dont nous avons déjà remarqué les observations de l’année 1862, a continué l’étude de Mars pendant l’opposition de 1864 et en a présenté les résultats à la Société royale de Londres dans sa séance du 12 janvier 1865[9].

Il constate d’abord que les aspects géographiques se sont présentés en 1864 à peu près tels qu’on les avait dessinés en 1862. On en a fait de nouveau plusieurs dessins, du 14 novembre au 13 décembre, et l’on en a construit un planisphère que nous reproduisons ici. L’auteur donne le nom de terre (land) aux régions orangées, et de mer (sea) aux régions verdâtres, comme on l’admet généralement, mais, à l’opposé de ce que l’on voit, en général, il note les premières plus foncées que les secondes. Un certain état brumeux (fogginess) a été noté en plusieurs circonstances, entre autres les 18 et 20 novembre. Les mers ont paru moins vertes qu’en 1862. En général, tout était moins net. Mais la planète était plus loin de nous en 1864 qu’en 1862.

« Des taches blanches, sans doute des neiges, ont été vues d’une part entre 45° et 50° de latitude sur le 30e méridien de la carte construite par l’auteur, d’autre part au 50e degré de latitude, à la longitude 225°. Il y avait moins de neiges autour du pôle sud qu’en 1862. »

Phillips se demande ensuite si les couches atmosphériques inférieures ne jouent pas un rôle dans la coloration de la planète, qui rappellent souvent celle des nuages éclairés par le soleil couchant. « Il faut, du reste, qu’il y ait de grands transports de vapeur d’eau pour amener les neiges d’un pôle à l’autre, suivant l’alternance des saisons. »

L’auteur a observé des neiges jusqu’à 50° ou même 45° de latitude ; M. Warren de la Rue jusqu’à 40° au mois d’avril 1856. C’est à peu près comme sur la Terre en hiver. L’étendue des neiges se ressemble parfois beaucoup en des années martiennes différentes, comme on peut le reconnaître en comparant le dessin de sir John Herschel du 16 août 1830 (voyfig. 71) avec celui de l’auteur du 27 septembre 1862 (fig. 105).

« Les climats de Mars paraissent presque identiques à ceux de notre monde, car là comme ici, de 50° de latitude aux pôles, la vapeur d’eau donne naissance à des neiges périodiques, et de l’équateur à 40° environ la température Fig. 121

Planisphère de Mars, en projection équatoriale, par le professeur Phillips.
reste toujours assez élevée pour produire une évaporation normale : atmosphère généralement pure dans les régions équatoriales et tropicales, neiges variables jusqu’à une certaine distance des pôles. C’est sans doute la constitution de l’atmosphère qui permet ces climats quasi-terrestres sur une planète plus éloignée du Soleil que la nôtre dans le rapport de 152 à 100, et pour laquelle la chaleur reçue de l’astre central n’est que dans le rapport de 231 à 100. L’atmosphère, en atténuant le rayonnement, en conservant la chaleur solaire, rend les hivers et les nuits moins froids qu’ils ne le seraient sans elle. L’influence atmosphérique paraît être la même sur Mars que chez nous, et plus importante encore. Il en résulte que, selon toute probabilité, nous pouvons regarder Mars comme habitable. »

Tel est le résultat des observations du professeur Phillips. Nous reproduisons ici, en fac-similé, le planisphère qui accompagne ce Mémoire.

Ces observations paraissent avoir été faites avec le même instrument que celles de 1862.

Il n’est pas très facile de se reconnaître sur cette carte. D’abord, il faut par la pensée voir foncé ce qui est pâle, et réciproquement. On devine alors la mer du Sablier dans la configuration pâle triangulaire qui descend presque verticalement sur le 20e méridien. Au-dessus de cette mer, la grande tache blanche est la terre de Lockyer. Le continent sur lequel est écrit Land est le continent Herschel I. Le 0° ou le premier méridien de ce planisphère correspond à peu près au méridien 315° de notre carte. Les méridiens sont comptés de la droite vers la gauche, de l’Est à l’Ouest, au lieu de l’être de l’Ouest à l’Est. Notre zéro se trouve sur le 315e méridien de cette carte, à l’extrémité du ruban clair qui prolonge comme un golfe long et étroit la mer du Sablier à droite. Il y a 45° de différence entre les deux méridiens initiaux.

LX. Même année. — Félix von Franzenau.

M. de Franzenau a fait à l’Observatoire de Vienne une étude fort intéressante accompagnée de six dessins remarquables que nous reproduisons ici. Nous traduisons textuellement ce petit Mémoire[10].

La situation assez favorable de la planète Mars, pendant sa dernière opposition, m’a engagé à faire les observations qu’on va lire, et que j’ai effectuées à l’aide du réfracteur de 6 pouces qui m’a été gracieusement prêté par l’Observatoire. Je me proposais d’obtenir des représentations aussi fidèles que possible de la surface de la planète, de la forme de ses taches, et de ses conditions atmosphériques. Malheureusement, le temps extraordinairement mauvais qui n’a cessé de sévir a entravé un grand nombre de mes observations. En somme, je n’ai pu en effectuer que sept, et encore la dernière a-t-elle dû être laissée de côté comme imparfaite.

Ces quelques dessins permettent de constater la permanence des taches de Mars, et leur ressemblance saisissante avec celles des dessins de Mädler.

Pour l’éclaircissement de ces dessins, il est entendu que N. S. P. signifient Pôle Nord, Pôle Sud et Phase ; par s je désigne la neige ou du moins ce qui y ressemble, au pôle nord.

I. 8 novembre 1864, 9h 30m, heure de Vienne. a, b sont deux grandes taches très sombres séparées par v. La couleur noire et la netteté des contours des trois pointes de a est tout à fait remarquable ; les environs c, g, h, i, k sont des ombres grises à peine visibles, sans contours nettement arrêtés ; x, y, z, sont les parties rouge clair de la planète.

8 novembre, à 9h 30m.
10 novembre, à 9h 30m.
15 novembre, à 9h 30m.
Fig. 122. — Observations de la planète Mars, par von Franzenau, en 1864.

20 novembre, à 7h 45m.
20 novembre, à 9h 20m.
22 novembre, à 9h.
Fig. 123. — Observations de la planète Mars, par von Franzenau, en 1864.

II. 10 novembre, 9h 30m. Les taches sont restées les mêmes, modifiées seulement par la rotation. La tache b s’est beaucoup augmentée en d ; la bande f, que je n’avais fait que soupçonner, apparaît très distinctement. Quant à la neige polaire inférieure, elle se montre divisée en deux parties séparées par un intervalle sombre.

III. 15 novembre, 9h 30m. Les progrès de la rotation commencent à influer beaucoup sur la forme des taches. La tache a a perdu complètement son aspect primitif et descend beaucoup plus vers le Nord ; b s’est encore agrandie vers c ; quant à cette dernière partie, elle est, ainsi que d, très faiblement éclairée dans les environs de b ; le continent rougeâtre x est arrivé vers le milieu de la figure et a atteint son plus grand développement ; s semble à peu près disparue, car les environs du pôle nord sont presque aussi sombres que h et f. Tout l’hémisphère nord semble couvert d’innombrables petits nuages gris.

IV. 20 novembre, 7h 45m, La tache a est tout près de disparaître, b a atteint le milieu de la figure et, dans la partie ouest, c est ainsi que d plus nettement visible qu’auparavant. u est une partie claire entre les taches b, c et d ; quant à w, c’est une nouvelle tache rouge clair.

À remarquer l’extraordinaire obscurité de la tache f, qui semble se rencontrer avec d.

V. 20 novembre, 9h 20m. Ce dessin a été fait le jour même, deux heures plus tard ; les taches principales sont plus rapprochées du méridien central de la planète et présentent, par conséquent, plus de détails à observer ; c est bien plus vaste et plus net ; u se distingue plus facilement, comme une séparation ; f se réunit à d au point q, une nouvelle tache, p, est apparue.

VI. 22 novembre, 9h. L’intervalle entre ce dessin et le dessin no IV embrasse presque deux périodes de rotation de Mars. La seule modification est en r : la neige du pôle nord semble s’étendre beaucoup plus vers le Sud, mais sans limites bien définies, À remarquer la teinte sombre des parties nord de la tache b et de la pointe de d.

Telles sont les observations de von Franzenau. Ce qu’elles offrent de plus remarquable, c’est, d’une part, leur conformité avec celles de Beer et Mädler, conduisant à l’opinion de la permanence des configurations, et, d’autre part, un détail assez curieux, celui d’un isthme blanc au-dessus de la mer du Sablier, visible sur les dessins IV et VI, des 20 et 22 novembre. (Nos lecteurs ont reconnu cette mer dans la tache d.) Était-ce une bande de nuages ? Ce n’est pas probable, car on retrouve cette même solution de continuité sur des dessins de Mädler en 1841 (voy. fig. 70), W. de la Rue en 1856 (fig. 76), lord Rosse en 1862 (fig. 108). Est-ce une profondeur moindre, et variable, de la mer ? Ces divergences seront discutées plus loin. Les dessins de Franzenau nous conduisent donc encore à notre double conclusion : permanence et variations.

LXI. Même année, 1864. — Talmage. Secchi, Rudolf Wolf.

Pendant cette même opposition de 1864, M. Talmage[11], observateur anglais, a remarqué, principalement à la date des 14 et 18 novembre, que le pôle sud présentait une élévation très accentuée au-dessus du disque de la planète, élévation causée sans doute par un effet d’irradiation de cette intense lumière blanche, réfléchie par la neige, et qui, mesurée au micromètre, atteignait 2″,5. L’auteur fait remarquer que cette observation est identique à celles faites par William Herschel, les 17 avril 1777 et 20 mai 1783 (voir plus haut, p. 51, fig. 17 et p. 57, fig. 13).

Le 24 novembre, les taches de Mars ont paru plus distinctes que jamais, et pourtant, ce jour-là, notre atmosphère était assez trouble ; l’observateur croit pouvoir en conclure que plus notre atmosphère est claire et moins les détails de la planète Mars sont visibles. (Il avait observé Mars sans grand succès en 1862, sous le beau climat de Nice.) Nous aurons lieu de discuter cette assertion qui n’est pas tout à fait paradoxale.

Le P. Secchi a réobservé Mars pendant cette même opposition de 1864. Nous avons signalé plus haut ces observations (p. 149).

Remarquons encore, parmi les études de 1864, celles de M. Wolf, de Zurich[12]. Dans le but d’obtenir une nouvelle détermination de la durée de rotation de la planète, le savant directeur de l’Observatoire de Zurich a comparé un dessin fait par lui le 19 novembre 1864, à 10h 30m, avec un dessin de Secchi du 26 septembre 1862, à 9h 45m (Voir plus haut, p. 146, fig. 86, B) et a trouvé pour cette durée

24h 37m 22s,9.

LXII. Même année, 1864. — J. c. Zöllner, Seidel, Schmidt, Photométrie.

Zöllner et Seidel, physiciens allemands, ont fait, pendant cette même opposition de Mars, des observations photométriques[13] d’où il résulte que Mars ressemble à la Lune quant à la variation de lumière réfléchie suivant les phases et quant au grand éclat des portions marginales du disque. D’autre part, Zöllner trouve que l’albedo de Mars, c’est-à-dire son pouvoir réfléchissant moyen, n’est guère plus grand que celui de la Lune, à peine de moitié en plus. Jupiter et Saturne ont, au contraire, un grand pouvoir réfléchissant. La cause paraît due à ce que, sur ces deux planètes, ce sont les nuages de leurs atmosphères qui réfléchissent la lumière solaire, tandis que, sur Mars, c’est surtout le globe planétaire lui-même. Ces deux planètes ont un albedo respectivement quatre et trois fois plus grand que celui du sol lunaire.

La dégradation d’éclat de la Lune, avant comme après la Pleine Lune, tout aussi bien que le grand éclat du bord, peuvent être expliqués par les inégalités de la surface. Zöllner trouve que, pour que ces inégalités produisent les variations d’éclat observées, l’angle d’élévation moyen de ces inégalités devrait être de 52° pour le sol lunaire. Dans la même hypothèse, les changements beaucoup plus rapides de l’éclat de Mars demanderaient pour ses montagnes un angle de 76° en moyenne.

Zöllner donne la Table suivante pour exprimer l’albedo ou le pouvoir réfléchissant, autrement dit l’éclat moyen, de chaque planète

La Lune renvoie 0,174 de la lumière reçue.
Le Sable blanc renvoie» 0,237 de la lumière reçue.»
Mars renvoie» 0,267 de la lumière reçue.»
Saturne renvoie» 0,498 de la lumière reçue.»
Jupiter renvoie» 0,624 de la lumière reçue.»
Le papier blanc renvoie» 0.700 de la lumière reçue.»

On voit que, d’après ces évaluations, Mars garderait les 733 millièmes ou plus des 7 dixièmes de la lumière solaire qui lui arrive, et n’en renverrait dans l’espace que les 267 millièmes, tandis que Jupiter avec son atmosphère nuageuse paraît presque aussi brillant que du papier blanc et renvoie plus des 6 dixièmes de la lumière qu’il reçoit. Mars utiliserait donc pour lui bien plus de rayons solaires que Jupiter.

Seidel[14] avait trouvé pour l’éclat de Mars relativement aux étoiles :

Mars en opposition = 2,97 × Véga,

soit près de trois fois celui de Véga, observations faites à l’aide du photomètre objectif de Steinheil. Relativement au Soleil, Zöllner a trouvé avec son photomètre :

Mars en opposition = 1/6 994 000 000 × Soleil.

Cette détermination de Zöllner correspond à une grandeur d’étoiles −2,25.

Jules Schmidt[15] a déterminé, par de nombreuses observations, les dates auxquelles Mars devient égal en éclat à diverses étoiles de première grandeur. Appelant le rayon vecteur de la planète à un moment donné et sa distance à la Terre au même instant, il trouve, par exemple, que

Mars = Sirius, quand = 1,944
= Aldébaran,  1,258.

LXIII. 1864 à 1875. — Le Dr Terby.

M. F. Terby, docteur ès sciences, à Louvain, auquel l’Aréographie est redevable de travaux si persévérants et si considérables, a fait une observation assidue de la planète Mars depuis l’opposition de 1864 jusqu’au moment où nous écrivons ces lignes, et a pris soin d’en publier régulièrement les résultats dans les Bulletins de l’Académie des Sciences de Belgique. Les premières observations de cet astronome ont été obtenues à l’aide d’une excellente lunette Secrétan de 108mm, munie de grossissements de 120 et 180 fois, et parfois même 240. Nous parlerons d’abord ici de celles qui sont antérieures à l’opposition de 1877, qui a commencé un nouveau cycle dans l’étude de notre

Fig. 124. — Croquis de Mars, par M. Terby, en 1873.
planète. Les Notices présentées à l’Académie de Belgique par notre éminent collègue sont accompagnées de 23 dessins pour 1864 et 1867, 36 pour 1871, 12 pour 1873 et 22 pour 1875. Les croquis de ces deux dernières années sont ceux qui offrent le plus de détails. On y reconnaît notamment la mer du Sablier, la mer Maraldi, le détroit Herschel II, la tache polaire boréale, ainsi que l’australe. Parmi ces nombreuses figures, nous en reproduirons d’abord six de l’année 1873 comme particulièrement intéressantes. Elles ont été prises aux dates indiquées au-dessous de chaque dessin.

Dans ces dessins, la lettre a indique la mer Knobel ; la lettre b, l’océan de la Rue ; la lettre c, la baie du Méridien et le détroit Herschel II ; la lettre d, la mer du Sablier ; la lettre e, la mer Delambre et ses environs ; la lettre f, la mer Maraldi. Dans le dessin du 24 mai, on voit en mn une séparation, qui est assez curieuse, observée également le 22 mai. Cette division existe également sur deux dessins de 1875, faits le 20 juillet. Sur le dessin du 20 mai 1873, on aperçoit en eh la passe de Nasmyth.

En 1871 et 1873, la tache la plus foncée et la mieux visible a été (comme d’habitude d’ailleurs), la mer du Sablier. L’atmosphère de Mars a paru plusieurs fois assez trouble, notamment en 1871, pour effacer les configurations et interdire tout dessin.

Plusieurs dessins de 1875 offrent également un intérêt particulier. Le premier, du 14 juin (fig. 125, A), fait à 11h 30m, montre en m une dentelure et en Fig. 125.

Croquis de Mars, par M. Terby, en 1875.
d une pointe anguleuse très foncée. Cette longue tache grise, formée par les mers Hooke, Maraldi et du Sablier, se retrouve sur un dessin presque identique fait par Schrœter le 9 septembre 1798, à 9h 55m (Voir plus haut, p. 74, fig. 55). Or, cette pointe anguleuse sombre est la région droite de la mer du Sablier, alors plus foncée que la région inférieure, comme on le voit sur la figure suivante, faite par M. Terby une demi-heure plus tard. On distingue alors la partie inférieure que l’on n’avait pas aperçue plus tôt, et l’on s’explique, en regardant ce dessin d’un peu loin, que parfois on ait pu arrêter la mer du Sablier à cette région plus foncée, comme dans le premier des deux dessins. C’est encore là un témoignage incontestable en faveur des variations de tons qui arrivent dans les mers martiennes, car parfois cette même région s’est montrée plus claire que l’axe vertical de cette mer.

Le troisième montre à gauche de la mer du Sablier (d) une dentelure m et une langue de terre en n, rappelant la séparation signalée tout à l’heure pour 1873, et que nous avons remarquée aussi dans les dessins de Franzenau (fig. 123). Cette même séparation se retrouve dans les deux figures du 20 juillet.

Les pôles sont marqués par une tache neigeuse ; il y en avait même deux au pôle inférieur, le 20 juillet, à 10h 20m, ce qui rappelle encore un dessin de Franzenau du 10 novembre 1864, et un de Secchi du 16 novembre 1862 (fig. 87).

Le dernier croquis montre la mer Maraldi et la baie de Huggins et rappelle une observation de Schrœter.

Ces observations de M. Terby conduisent aussi à notre conclusion perpétuelle : permanence des taches fondamentales, mais variations réelles dans les détails.

Si l’on se reporte à notre carte, on reconnaît la nécessité de tracer un banc de sable, une ligne de fond parfois découverte au-dessus de la mer du Sablier, à gauche, obliquement, à travers la mer Flammarion. L’ensemble des observations donne l’impression que ces eaux ne doivent pas être très profondes.

LXIV. 1865. — C. Flammarion. Recherches sur la planète Mars.[16]

L’interprétation des observations de Mars est soumise à discussion. Dans la revue scientifique le Cosmos du 26 juin 1863, nous avions discuté les observations de neiges polaires et émis l’idée que ces neiges pouvaient être dues à une eau chimiquement différente de la nôtre ; et nous avions en même temps exprimé l’espérance de voir bientôt une mappemonde méridienne complète de Mars succéder aux projections polaires de Beer et Mädler (Cosmos, 1863, t. I, p. 751). En 1865, revenant sur le même sujet, nous constations que, d’après les observations de 1861, la ligne isotherme de 0° oscille comme sur la Terre, pour les deux hémisphères, jusqu’à 45° de latitude, ce qui paraît indiquer une température moyenne peu différente de notre globe, malgré la plus grande distance de Mars au Soleil. Mais, ajoutions-nous, « qui nous assure que le degré de congélation de l’eau terrestre et de cristallisation de notre neige soit celui auquel se produisent sur cette planète les mêmes phénomènes ? On pourrait plutôt penser le contraire, puisque l’ébullition dépend du rapport spécial qui existe entre la vapeur du liquide et la pression atmosphérique et que la congélation diffère semblablement selon les substances. C’est aller trop vite et trop loin que de transporter les phénomènes terrestres sur une région étrangère à celle où ils se produisent, » (Cosmos, 1865, t. II, p. 315).

LXV. 1867. — Huggins, Secchi : Analyse spectrale de l’atmosphère de Mars.

Nous avons vu plus haut (1862, p. 182), les premières recherches sur le spectre de Mars, faites par Rutherfurd, Huggins, Miller et Vogel. M. Huggins y constata la présence des principales lignes du spectre solaire, et Rutherfurd, notamment, les raies C, D, E, b et G de Fraunhofer. À la séance de la Société royale astronomique de Londres du 8 mars 1867, M. William Huggins présenta sur ce sujet un nouveau mémoire dont voici le résumé.

Mars ne brille que par la réflexion de la lumière solaire. Son atmosphère absorbe une partie de cette lumière et indique par son spectre quelles substances la composent. Dans la région bleue et indigo de ce spectre, les raies ont paru trop faibles pour pouvoir être sûrement identifiées. Dans la région rouge, la raie C du spectre de Fraunhofer est parfaitement visible et son identité a été certifiée par les mesures du micromètre. À partir de cette ligne jusqu’à l’extrémité la moins réfrangible du spectre, on aperçoit un grand nombre de raies sombres. Une ligne très forte a été mesurée micrométriquement au quart de la distance de C à B. Comme on ne voit rien d’analogue en ce point du spectre solaire, on peut la considérer comme résultant de l’absorption causée par l’atmosphère de la planète. Les autres raies dans le rouge peuvent être identifiées, au moins en partie, avec B et a, ainsi qu’avec les lignes voisines du spectre solaire.

Le 14 février 1867, l’observateur remarqua des raies faibles des deux côtés de la ligne D. Celles du côté le plus réfrangible étaient plus fortes que celles de l’autre côté. Elles occupent des positions qui paraissent coïncider avec les groupes que l’on voit lorsque la lumière solaire traverse les couches inférieures de l’atmosphère et qui sont produites par l’absorption de gaz ou de vapeurs, notamment de la vapeur d’eau. Ces lignes indiquent probablement l’existence de substances semblables dans l’atmosphère de la planète. Elles n’étaient pas causées par l’atmosphère terrestre, car elles étaient absentes au même moment du spectre de la Lune, quoique celle-ci fût alors à une moindre altitude que Mars.

M. Huggins a également observé le spectre des portions les plus sombres du disque de Mars, c’est-à-dire des mers. Leur spectre est beaucoup plus faible dans toute sa longueur. Les matières qui forment ces régions foncées absorbent également tous les rayons du spectre. Nous pouvons en conclure que, comme couleur, elles sont neutres ou à peu près.

La couleur rouge de Mars ne doit pas être attribuée à une absorption élective, c’est-à-dire à une absorption de certains rayons seulement qui produiraient des intervalles sombres dans son spectre. D’ailleurs, il n’est pas probable que cette coloration si caractéristique ait son origine dans l’atmosphère de la planète, car la lumière réfléchie des régions polaires reste blanche, quoiqu’elle ait traversé une plus longue épaisseur d’atmosphère que celle qui nous arrive des régions centrales du disque ; c’est dans ces régions centrales que la couleur est la plus marquée. Elle tire certainement son origine de la surface de la planète.

Les observations photométriques de Seidel et Zöllner confirment cette interprétation. Elles montrent que Mars ressemble à la Lune, quant à la valeur anormale de la variation de la lumière réfléchie selon l’accroissement ou le décroissement de la phase, et également pour le plus grand éclat des régions marginales du disque. De plus, Zöllner a trouvé (p. 196) que l’albedo de Mars, c’est-à-dire le pouvoir réfléchissant des différentes parties de son disque, est seulement une fois et demie plus grand que celui de la surface lunaire. Ces caractères optiques s’accordent avec l’observation télescopique pour montrer que, dans le cas de Mars, la lumière solaire réfléchie vient presque entièrement de la vraie surface de la planète, et non pas d’une enveloppe de nuages comme pour Jupiter et Saturne. Dans ces deux dernières planètes, le disque est moins brillant sur les bords que dans la région centrale. Nous avons vu plus haut que ces deux planètes ont un albedo quatre et cinq fois plus grand que la Lune.

En même temps que Huggins s’occupait de cette question en Angleterre, et Zöllner en Allemagne, en Italie, le P. Secchi étudiait de son côté les planètes Jupiter, Saturne, Uranus, Mars et Neptune dans ses recherches spectroscopiques sur les corps célestes[17].

« Mars, écrit-il, a montré des raies atmosphériques terrestres, assez faibles au centre du disque, mais fortes vers le bord ; ce qui prouve l’existence d’une atmosphère analogue à la nôtre. » L’auteur donne plus loin deux observations, des 11 février et 28 avril 1869, qui se bornent à témoigner d’une zone nébuleuse voisine de la raie C et d’une autre dans le rouge extrême. Les atmosphères de Jupiter, Saturne et Uranus diffèrent beaucoup plus de la nôtre.

L’atmosphère de Mars paraît faible et raréfiée : « La sua atmosfera è assai piccola e sotile. »

La même recherche a été reprise en 1872 par Vogel en Allemagne, et les résultats ont confirmé ceux de Huggins et Secchi, quant à l’existence sur Mars d’une atmosphère analogue à la nôtre au point de vue de la vapeur d’eau qui donne naissance aux raies observées. Nous retrouverons plus loin, en 1872, les recherches de Vogel sur le même sujet.

LXVI. 1867-1873. — John Browning, Barnes, Johnson, Elger, Grover, Knight, Backhouse, Noble et Williams.

Le premier de ces observateurs, John Browning, excellent constructeur d’instruments d’optique à Londres, a publié dans The Intellectual Observer huit chromo-lithographies de Mars, d’après ses dessins faits du 8 janvier au 24 février 1867.

Il a également présenté à la Société astronomique de Londres, le 10 mai 1867, une série de treize dessins coloriés (y compris ceux dont nous venons de parler), faits par lui, du 29 décembre 1866 au 24 février 1867, à l’aide d’un télescope à verre argenté de 8 pouces 1/2, construit par Barnes. La coloration du disque varie depuis le rose jusqu’à l’ocre, la nuance étant d’autant plus rouge qu’il y a plus d’humidité dans notre atmosphère. Les bords du disque sont très pâles. Les taches sombres sont d’un gris bleuâtre ou verdâtre.

On a vu assez fréquemment de légères taches blanches paraître sur le disque, être emportées par la rotation et devenir presque aussi blanches que les neiges polaires en approchant du bord du disque. Ces nuages étaient, en général, mal définis dans leurs contours et de formes circulaires. On les a toujours observés dans la région de l’équateur.

Le 31 mars, à 7 heures, on a fait un dernier dessin qui correspond exactement à celui qui avait été obtenu le 23 février, à 9 heures. « Dans ces deux dessins, écrit l’auteur, la tache désignée habituellement sous le nom de mer du Sablier (Hour-Glass Sea), est représentée comme venant de passer au centre du disque de la planète. »

Le constructeur Barnes a fait en même temps des dessins de Mars qui s’accordent très bien avec ceux de Browning. Dans cette double série, on retrouve également deux vues identiques à celles de Warren de la Rue, reproduites plus haut ; mais elles n’offrent qu’une lointaine ressemblance avec celles de Secchi, et pas la moindre avec celles de Beer et Mädler.

Browning a construit en 1868 un globe de la planète Mars, d’après la carte de Proctor, dont nous allons parler, et en a tiré des vues stéréoscopiques assez curieuses. Depuis plusieurs années, Warren de la Rue avait obtenu d’excellentes vues stéréoscopiques directes de la Lune, en combinant entre elles des époques de libration correspondant aux mêmes phases et donnant un angle suffisant pour le relief. (L’angle est même un peu trop grand sans doute, car nous ne voyons pas d’autre cause à laquelle nous puissions attribuer la forme ovale trop allongée de ces vues stéréoscopiques de la Lune.)

Parmi les autres observations faites en 1867, signalons celles de MM. Joynson, Elger, Grover et Knight en Angleterre. On trouve dans The Astronomical Register des études faites pendant l’opposition de 1867 par les observateurs dont nous venons de citer les noms. La conclusion des premières est que, près du pôle sud, il y a une bande permanente. M. Elger remarque que la coloration du disque est toujours plus forte dans la région centrale que vers les contours et que les taches s’effacent vers ces bords. Rien de nouveau.

La bande australe que M. Joynson croit continue est celle que nous avons remarquée dans les dessins de M. Terby, de 1875. Elle est formée par la presque continuité des mers Maraldi, Hooke, Flammarion, du Sablier, océan Dawes, océan de la Rue, mer Cottignez et mer Schiaparelli (voyfig. 31).

Signalons encore pour cette époque les observations de T.-W. Backhouse, faites pendant les oppositions de 1867, 1869, 1871 et 1873. Elles n’ajoutent rien de nouveau aux précédentes.

MM. Noble et Williams, dont nous avons déjà parlé plus haut (p. 173), ont Fig. 126.

Croquis de Mars, par Williams, le 11 janvier 1867 à 11h40.
pris cette même année 1867 de nouveaux croquis, peu détaillés en général. Nous signalerons, parmi ceux de M. Williams, celui que nous reproduisons ici, du 11 janvier (fig. 126). Télescope de 4 pouces 1/4 d’ouverture. On y remarque une solution de continuité dans le détroit d’Herschel, correspondant probablement à celle qui est indiquée sur la carte de Kaiser (fig. 118), au 130e degré de longitude. La neige polaire inférieure ou boréale était fort étendue.

LXVII. 1867-1877. — R.-A. Proctor.

Nous devons à Richard-Anthony Proctor, né en 1837, mort en 1888, de très importants travaux sur l’Aréographie. Il commença, en 1867, par construire une carte[18] d’après les dessins de Dawes dont nous avons présenté plus haut (p. 186-187) les principaux.

Nous avons vu (fig. 68) le premier essai de cartographie de la planète Mars dû aux travaux de Beer et de Mädler, d’après leurs observations de 1830 à 1837, en Allemagne, et plus tard (fig. 118), le planisphère construit par Kaiser d’après ses observations faites en Hollande en 1862 et 1864, ainsi que celui de Phillips, d’Oxford, d’après ses observations faites en Angleterre la même année (fig. 121). À ces trois essais, nous pourrions ajouter celui du P. Secchi, d’après ses observations faites à Rome en 1858, et celui que nous avons tracé, pour l’hémisphère le mieux connu de Mars, dans la deuxième édition de notre ouvrage sur la Pluralité des Mondes habités (1864).

Les dessins de l’astronome anglais Dawes ayant apporté une précision nouvelle dans la connaissance du monde de Mars, Proctor, son compatriote, voulut les appliquer à une cartographie aussi complète que possible, et construisit, d’après eux exclusivement, la carte que nous reproduisons ici (fig. 127), et qui est la première carte publiée avec un système de nomenclature déterminé.

Une nomenclature, des dénominations fixes, s’imposaient d’ailleurs. Tant que, sur la représentation d’une planète par le dessin, il n’y a qu’un très petit nombre d’objets, quelques lettres suffisent pour les désigner. On peut dire la tache a, la tache b, la tache c, etc. Mais, lorsque les détails se multiplient, de telles désignations deviennent insuffisantes et impropres aux comparaisons. Des noms se fixent incomparablement mieux dans l’esprit.

C’est d’ailleurs ce qui arrive également en Géographie. L’indication d’une contrée par une lettre, par un chiffre, par sa position précise même, est tellement insuffisante pour l’esprit, que, dès sa découverte, l’île la plus médiocre se voit baptisée d’un nom déterminé qui la distingue de toutes ses sœurs. Les noms sont indispensables en tout, même, et peut-être surtout, dans la grande famille humaine. On ne s’imagine pas facilement les hommes existant sans noms !

Malheureusement, il y a toujours une grande part laissée à l’arbitraire dans la conception des nomenclatures géographiques, comme pour les autres d’ailleurs. Il a paru tout naturel, dans le cas de la planète Mars, de suivre le système qui a prévalu dans la nomenclature lunaire. La Lune a été le premier globe céleste dont on ait pu tracer des cartes géographiques ; Mars est le second, car ce que l’on a essayé, dès le XVIIe siècle, pour Vénus, est extrêmement incertain, et Mars est la seule planète dont on connaisse assez sûrement les configurations géographiques pour en dresser la carte. Il a semblé qu’en donnant des noms aux continents et aux mers de cette planète pour les distinguer, les reconnaître, les limiter et en étudier les formes exactes, on devait choisir de préférence ceux des astronomes célèbres et ceux des savants qui se sont le plus occupés de l’étude de la planète, sans distinction de nationalités terrestres, naturellement.

On a reproché à Proctor d’avoir fait la part un peu trop large aux astronomes

Fig. 127. — Carte de la planète Mars, par R.-A. Proctor, en 1867.
de son pays, et d’avoir répété les mêmes noms. Le premier reproche serait excusable. Mais ce qui n’est pas sans inconvénient pour la clarté, c’est-à-dire pour le but même de la nomenclature, c’est que certains noms y sont répétés plusieurs fois, ce qui peut amener des confusions que l’adoption d’une nomenclature a précisément pour but d’éviter. Ainsi, le nom de Dawes n’y est pas inscrit moins de six fois (Dawes Océan, Dawes Continent, Dawes Sea, Dawes Strait, Dawes Isle, Dawes Bay) ; Beer deux fois (Beer Sea et Beer Bay) ; Lockyer deux fois (Lockyer Land et Lockyer Sea) ; Phillips deux fois (Phillips Sea et Phillips Island), etc ; doubles emplois qui auraient pu être occupés par des noms d’une valeur non moindre, tels que ceux de Galilée, Halley, Lalande, Lambert, Leverrier, ou d’observateurs de Mars, tels que Galle, Schmidt, Lassell, Knott, Green, Franzenau, Vogel, etc. Ces défectuosités dans la nomenclature expliquent que plusieurs astronomes aient été portés à la modifier.

Mais c’est là une considération insignifiante au point de vue de la géographie intrinsèque de la planète, autrement dit de l’aréographie. Proctor a rendu un service éminent à la science en construisant la première carte aréographique bien délimitée, en jetant pour ainsi dire les bases de l’Aréographie, et, ne serait-ce que pour ce progrès — auquel se joignent un nombre considérable d’autres travaux, — le nom de Proctor restera inscrit en caractères ineffaçables dans l’histoire de la première des Sciences.

Ce laborieux astronome s’est occupé, dès l’origine de ses travaux sur Mars, d’obtenir une détermination aussi précise que possible de la durée de rotation de la planète. À la séance de la Société astronomique de Londres du 14 juin 1867, il présenta un premier essai sur ce sujet. Reprenant des comparaisons analogues à celles que nous avons eu plus haut sous les yeux dans les déterminations de Cassini, Maraldi, Herschel, Schrœter, Beer et Mädler, Kaiser, etc., et comparant entre elles les vues dessinées par Dawes, il trouve pour cette durée

88643 secondes,  ou  24h 37m 23s.

Assuré que ce nombre est très rapproché de la réalité, il compare les observations de Dawes avec celles d’Herschel, puis avec celles de Hooke, et trouve définitivement

24h 37m 22s,745 ± 0s,005.

79 révolutions sidérales de la Terre sont égales à 42 de Mars, à deux jours près.

Le même auteur est revenu sur le même sujet à la séance du 10 janvier 1868. Comparant les dessins pris par Browning en janvier et février 1867 avec ceux de Dawes en 1864 et 1856, il en choisit trois bien nets et bien précis (Dawes, 24 avril 1856 et 26 novembre 1864, et Browning, 23 février 1867) dans lesquels la mer du Sablier est proche du méridien central, et comparant ensuite ces trois croquis avec celui de Hooke du 12 mars 1666 (voy. fig. 15), il trouve :

22. Intervalle
en secondes.
Correction
pour la longitude
géocentrique.
Correction
pour la phase.
Intervalle corrigé. Nombre de rotations. Période résultante.
1 5 999 524 200 -24 −12° 5 999 521 246 67 682 88 642s,737
2 6 270 650 760 −248° −1 6 270 589 696 70 740 88 642s,734
3 6 341 394 300 −273° +1 6 341 326 590 71 538 88 642s,734

Le nombre qui résulte de ces comparaisons, comprenant 201 années d’intervalle, est donc la moyenne des trois périodes ainsi conclues, c’est-à-dire de

88 642,735  ou  24h 37m 22s,735.

L’erreur probable de ce calcul ne dépasse pas 0s,005.

Reprenant encore la même question en 1869, le même auteur trouve, à l’aide d’un dessin fait spécialement dans ce but par Browning, le 4 février 1869,

24h 37m 22s,736.

Il en conclut que le premier nombre doit être adopté.

Kaiser avait trouvé 24h 37m 22s,62 ; mais cette différence de 0s,115 produirait pour l’année 1666 un différence de 2h 20m, ce qui aurait éloigné la mer du Sablier à 50° du centre, tandis que sur le croquis de Hooke elle n’en est qu’à 18° : cette mer n’aurait pas été visible du tout sur le croquis de Hooke et aurait été perdue dans la brume des bords du disque.

Proctor reprit encore la même question en 1873. Cette différence de 1/10 de seconde a été l’objet d’une recherche nouvelle. Il a trouvé qu’elle est due à une légère erreur de calcul. En comptant le nombre de jours écoulés entre le 13 août 1672 et le 1er novembre 1862, le directeur de l’Observatoire de Leyde a trouvé 69 476 jours : c’était deux jours de trop, parce que l’auteur avait oublié que les années 1700 et 1800 n’ont pas été bissextiles.

De plus, Kaiser aurait écrit pour l’observation de Hooke 14 mars au lieu de 13 mars. L’auteur reproduit la figure de Huygens que nos lecteurs ont vue à sa date (13 août 1672, fig. 19) ainsi que celles de Hooke (12 et 13 mars 1666, à minuit 20m et minuit 40m, fig. 15), les considère de nouveau comme pouvant tout à fait servir de base sérieuse pour la détermination de la rotation par la mer du Sablier qu’elle représentent, et conclut que la durée de la rotation diurne de la planète est certainement comprise entre

24h 37m 22s,71

et

24h 37m 22s,72.

Nous pouvons donc adopter, comme période très approchée de la réalité, et en nous bornant aux dixièmes de seconde :

24h 37m 22s,7

ll s’agit là du jour sidéral, de la vraie durée de rotation, et non du jour solaire. Le jour sidéral terrestre étant de 23h 56m 4s,09, on voit que la période de rotation de Mars est de 41m 18s,6 plus longue que la nôtre.

Proctor s’est occupé de la planète Mars dans la plus grande partie de ses ouvrages, jusqu’au dernier, dont la publication venait de commencer lorsque la mort arrêta ses travaux. Nous y reviendrons plus loin.

LXVIII. 1871-1873. — Lehardelay, Crosley, Gledhill, Burton, Denning, Wilson, Guyon, Lowdon, Joynson, Spear.

M. Lehardelay, observateur à Fontenay (Normandie), a fait en cette année 1871, si troublée d’ailleurs, un certain nombre d’observations à l’aide d’un objectif de Steinheil de 162mm d’ouverture[19]. Ces observations ont eu lieu les 2, 11, 13, 23, 24 mars et 23 avril. La neige polaire boréale était bien visible. Fig. 128.

Croquis de Mars par M. Lehardelay, 23 mars 1871, 10h 30m.
La soirée du 23 mars a été l’une des meilleures. On apercevait aussi la neige polaire australe. La planète paraissait couverte par deux taches en forme de lobes arrondis, très légèrement festonnés sur leurs bords contigus, de couleur jaunâtre, et séparés par une ligne grise d’une grande ténuité. Nous reproduisons ici le dessin de ce jour, publié par M. Terby[20] ; il a été obtenu à l’aide d’un grossissement de 547 fois. Ce qu’il offre de plus curieux, c’est un fleuve, ou plutôt un canal qui porte le nom de baie Burton sur notre carte (voy. fig. 31) et celui d’Isthme sur les dessins de Secchi (voy. fig. 80).

À l’Observatoire d’Halifax, MM. Crosley et Gledhill se sont consacrés à Fig. 129.

Mars le 4 avril 1871, à 11h. Dessin de M. Gledhill.
l’observation de Mars pendant cette opposition peu favorable de 1871 et en ont publié six croquis dans The Astronomical Register[21]. La tache polaire inférieure ou boréale est relevée vers la Terre et se montre ronde et brillante. On reconnaît la mer du Sablier, et la région circumpolaire australe se montre entourée, vers le 30e degré de latitude, d’une bande sombre, d’où trois langues descendent vers le Nord. Sur deux croquis on remarque, contiguë à la tache polaire inférieure ou boréale, une tache sombre en forme de ballon, dont la pointe toucherait la neige polaire. (Cette figure ressemble un peu à celle de Burton du 23 mars 1871, que l’on verra tout à l’heure, celle de Gledhill est du même jour et de la même heure : la configuration était donc cerlaine.) Nous indiquons ces six dessins sans les reproduire, on les retrouvera, cn lithographie, dans la publication précitée ; nous donnons seulement (fig. 129) celui du 4 avril 1871 (11h) : les deux caps polaires sont en vue ; la mer du Sablier est au méridien central.

Le solstice d’été de l’hémisphère nord de Mars est arrivé le 2 mars ; l’opposition, le 19 mars.

M. C.-E. Burton a fait à Longhlinstone en Irlande, à l’aide d’un télescope newtonien de 12 pouces[22], d’excellentes observations en 1871 et 1873, et les a continuées pendant l’opposition de 1879. Nous aurons lieu plus loin, dans notre troisième période, comprenant le cycle fécond de 1877-1892, de nous occuper des dernières et de la carte qui en est résultée. Mais nous devons signaler dès à présent les dessins de 1871 et 1873.

Le point capital des observations de M. Burton est qu’il conclut à des changements considérables à la surface de la planète. Trois dessins de 1871 et quatre de 1873, et, en général, tous ceux qui représentent ce côté de la planète, portent une immense tache sombre en forme de poire ou de ballon, correspondant à la mer Tycho. Elle est voisine du pôle nord et appartient au cercle polaire boréal.

À l’époque des observations, Mars tournait en effet vers nous son pôle inférieur ou boréal. Cette tache paraissait très sombre, d’un vert bleuâtre. « Si c’est une mer, écrivait l’auteur, l’affaissement a considérablement surpassé en étendue et en vitesse ce qui est jamais arrivé d’analogue à la surface de la Terre depuis les temps historiques. »

Cette curieuse observation confirme encore nos déductions précédentes.

Nous reproduisons ici (fig. 130-131) deux des dessins de M. Burton représentant cette mer, faits le 23 mars 1871 et le 7 avril 1813. Plusieurs observateurs ont vu la même forme, notamment M. Terby, à Louvain, le 12 mai 1873, et l’auteur l’a revue constamment pendant les observations de 1873. Cette tache, remarque-t-il, était aussi apparente et aussi caractéristique que la mer du Sablier.

M. Burton a également dessiné la mer du Sablier en d’excellentes circonstances, par exemple dans ses vues du 7 avril et du 4 mai 1871, que nous Fig. 130, 131.

Dessins de Mars, par Burton. La mer Tycho en 1874 et 1873.
reproduisons aussi (fig. 132, 133). On remarque dans la première, à gauche de la mer du Sablier, une région variable sur laquelle l’attention sera appelée plus Fig. 132, 133.

Dessins de Mars, par Burton. La mer du Sablier en 1871.
tard, et à droite, un cap très pointu (le cap Banks) qui se présente généralement sous l’aspect figuré sur notre carte (fig. 31).

On a vu souvent, sur la droite du rivage de la mer du Sablier, au point indiqué par un cercle ponctué sur la fig. 134, une tache blanche extrêmement brillante. L’auteur pense qu’elle indique la présence d’un plateau très élevé, situé non loin du tropique, et couvert de neiges, « Summits of a cluster of lofty mountains, or an high Table-land ». Ce plateau alpestre serait situé dans la zone tropicale.



Fig. 134. — Croquis de Mars, par Burton, 24 mai 1873, indiquant la position d’un plateau neigeux sous les tropiques.

Signalons encore le dessin du 29 mai 1873 (fig. 135), sur lequel on constate

Fig. 135. — Vue de Mars, le 29 mai 1873 (Burton), montrant le banc de sable au-dessus de la mer du Sablier.
une ligne de séparation entre la mer du Sablier et la mer Hooke, à travers la mer Flammarion. Nous avons déjà parlé de cette ligne à propos des dessins de Franzenau et Terby et nous l’avons reconnue sur des dessins antérieurs (voy. p. 194 et 199). Il y a certainement là un banc de sable parfois découvert.

M. Wilson a fait en 1871 à l’Observatoire de Rugby un certain nombre

Fig. 136. — Mars le 4 mai 1871, à 9h 20m. Dessin de M. Wilson.
de dessins fort intéressants aussi. Nous reproduisons (fig. 136) celui du 4 mai 1871, à 9h 30m, à l’aide d’un réfracteur de 8 1/4 pouces, muni d’un grossissement de 300. M. Wilson a fait pendant cette opposition, ainsi qu’en 1877, plusieurs dessins de Mars, qui rappellent surtout ceux de Beer et Mädler.

À ces études ajoutons encore pour 1871 et 1873, celles de MM. Denning, Guyon, Lowdon, également en Angleterre. M. Guyon a fait notamment six dessins en 1871 et dix en 1873. Ces croquis ne changent rien aux données précédentes.

Signalons aussi, pendant cette même opposition, les observations de M. John Joynson à Waterloo, près Liverpool, et celles de M. J. Spear, à Churkrata, au Bengale[23]. Le premier remarque que la neige polaire boréale était beaucoup moins étendue qu’en 1867 et offrait à peu près l’aspect de celle du pôle sud en 1862. « Le canal en forme de verre de vin, « Wine-glass shaped « channel », ajoute l’auteur, est certainement permanent, ainsi que la mer qui le domine. »

Au Bengale, M. Spear remarque, à la date du 9 novembre 1870, que « la neige du pôle nord offre un éclat d’une intensité remarquable. »

  1. On the appearance of Mars, Monthly Notices of the royal astronomical Society, 1865, p. 66 et 166.
  2. Untersuchungen über den planeten Mars bei dessen oppositionen in der Jahren 1862 und 1864. — Annalen der Sternwarte in Leiden. Dritter band, Haag, 1872, p. 1-87.
  3. Durchmesser des Planeten Mars, gemessen im Jahre 1862-1863-1864, mit Airy’s Doppelbild Micrometer am 7 zölligen Refractor. — Annalen der Sternwarte in Leiden. Dritter Band. — Haag, 1872, p. 227, 241, 65.
  4. Rutherfurd, Astronomical observations with the spectroscope (Amer. Journal of Science, janvier 1863). — Miller et Huggins, On the spectrum of Mars (Phil. Trans., 1864). — Vogel, Beobachtungen auf der Sternwarte zu Bothkamp. Heft I, p. 66 (Astr. Nach., no 1864).
  5. Hopefield Observatory, Haddenham. Bucks, Angleterre.
  6. Ces mesures publiées au tome XI, page 292, de l’Observatoire de Radcliffe, donnent, pour la distance moyenne de la planète au Soleil :
    Diamètre équatorial = 5″,91
    Diamètre polaire 6″,503

    Ici le diamètre polaire est sensiblement supérieur au diamètre équatorial.

  7. Royal astronomical Society, Monthly Notices, t. XXV, et Memoirs, t. XXXIV.
  8. American Journal of Science, t. XXVIII, p. 163.
  9. Proceedings of the Royal Society, 1865, p. 42-46.
  10. Mars in November 1864. Sitzungsberichte der K. K. Acad. der Wissenschaften Wien, 1865, LIII. Band ; p. 509.
  11. On an appearance presented by the spots on the planet Mars (Monthly Notices of R. A. S., 1865, p. 193).
  12. Astronomische Mittheilungen, no 22, p. 57.
  13. Photometrische Untersuchungen ; Leipzig, 1865.
  14. Bayerische Akademie der Wissenschaften, München. 1859.
  15. Astr. Nach., t. XCVII. 1880, p. 93.
  16. Cosmos des 6, 20 septembre et 11 octobre 1865.
  17. Sugli Spettri prismatici di Corpi celesti. 1 br. in-8 ; Rome, 1868. 1 br. in-4 ; Rome, 1872.
  18. Chart of Mars, from 27 drawings by Mr Dawes. — Half-hours with the telescope, London, 1869, pl. VI. — Other Worlds than Ours, London, 1870, p. 92. — The orbs around us, London, 1872, frontispice. — Essays on Astronomy, London, 1872, p. 61. — Flowers of the Sky, p. 167.
  19. Bulletin de l’Association Scientifique de France, 31 décembre 1871, p. 219.
  20. Aréographie, Pl. III.
  21. Octobre 1871, p. 233.
  22. Transactions of the royal Irish Academy, vol. XXVI, p. 427.
  23. Monthly Notices, 1871, p. 208 et 262.