La Planète Mars et ses conditions d’habitabilité/P2/1830-1840

Gauthier-Villars et fils (1p. 102-126).

XXXIV. 1830-1841. — Beer et Mädler[1].

La planète passait en 1830 à l’une de ses moindres distances de la Terre. L’opposition de cette année-là était une opposition périhélique, comme nous l’avons vu au chapitre préliminaire. C’est la raison principale qui engagea les observateurs à entreprendre les études que nous allons examiner. Voici un exposé succinct de leur grand travail :

Notre but principal, écrivent les auteurs, a été de déterminer exactement la période de rotation sur laquelle on a des opinions sensiblement diverses. Herschel père avait déduit de ses observations de 1778 et 1780 une période de 24h 39m 21s, Huth à Mannheim (voy. plus haut, p. 89), en avait trouvé une de 24h 43m, et les observations de Kunowsky dans l’hiver de 1821 à 1822, qui manquent cependant d’une détermination exacte du temps, donnent 24h 36m 40s. Dans les observations d’Herschel, le nombre des rotations entières était douteux et, en outre, il n’avait pas eu égard à l’aberration et à la phase ; les deux autres données ne sont que le résultat d’une seule opposition. Il importait avant tout de déduire d’une opposition la période avec un degré d’exactitude qui permît de déterminer avec assez de certitude le nombre des rotations entières qui devaient avoir lieu jusqu’à l’opposition suivante. L’erreur moyenne du premier résultat ne devait donc pas dépasser 30 à 40 secondes, et on ne pouvait espérer d’atteindre ce but que lors d’un rapprochement de la Terre aussi grand qu’il a eu lieu cette fois.

Puis, en même temps, des observations prolongées devaient démontrer si les taches que présente la surface de Mars sont variables ou non dans leur forme, leur grandeur et leur couleur, si elles ont un mouvement propre et si l’on doit les regarder comme des condensations ou des obscurcissements semblables à nos nuages ou comme des parties fixes appartenant à la surface. Des observateurs précédents avaient déjà laissé là-dessus des données importantes. Déjà Maraldi, à Paris, avait en 1716 distingué la tache blanche au bord boréal de Mars, et presque tous les observateurs subséquents en font mention. Cette tache s’était aussi montrée au bord austral de la planète, et même quelquefois les deux taches avaient été visibles en même temps. Même avant Herschel, on avait déjà conçu l’idée qu’il y avait là des neiges comme aux pôles de la Terre. Quelques-uns avaient cru remarquer que ces taches formaient comme de petites élévations qui ressortaient en dehors du bord moyen de la planète, ce que d’autres attribuèrent avec beaucoup de vraisemblance à l’éclat considérable de ces taches. La plupart des observateurs regardaient aussi les autres taches comme variables ; cependant M. Kunowsky, à Berlin, assura qu’elles sont permanentes. Plusieurs observateurs font mention d’un éclat particulier du bord oriental et du bord occidental de la planète, ce qui donne l’idée de ménisques étroits entourant le globe, particulièrement à ces endroits. Les contradictions qui se présentaient dans ces observations faites avec des instruments différents, ou, si l’on veut, les changements physiques qui s’opèrent avec le temps, étaient par conséquent très considérables.

Depuis le 10 septembre jusqu’au 20 octobre 1830, nous fîmes des observations pendant 17 nuits plus ou moins favorables, dans lesquelles tous les côtés de Mars visibles dans cette opposition se présentèrent plusieurs fois à notre vue. Nous obtînmes 35 dessins de son disque. Nous n’avons pas trouvé à propos d’employer le micromètre, car la faiblesse des taches aperçues ne nous aurait permis de prendre aucune mesure proprement dite, et une appréciation d’après les parties du diamètre du disque nous parut promettre une certitude d’autant plus grande que la tache blanche du pôle austral, qui se montra dès le commencement avec beaucoup de précision, était bien propre à déterminer un méridien divisant le disque. Il s’écoula ordinairement un certain temps jusqu’à ce que la masse de taches, que l’on apercevait d’abord vague et indéterminée, présentât des formes parfaitement distinctes. Le dessin a été exécuté immédiatement devant le télescope : les coordonnées des points les plus distincts ont été déterminées par l’appréciation et représentées graphiquement, le reste du détail a été dessiné plus tard.

La tache la plus caractéristique qui ait frappé les observateurs est la petite tache ronde paraissant suspendue à un ruban ondulé que l’on voit sur les dessins nos  1, 2, 3, 14, 15 et 16 de 1830 et 4 de 1832 (voyez la fig. 67). Cette tache est la baie du Méridien de notre carte, à proximité du détroit Herschel II. Mais écoutons les observateurs eux-mêmes.

Une petite tache a, d’un noir très prononcé, se distingua si fortement des autres dès la première observation, par ses limites bien marquées, et fut si rapprochée de l’équateur supposé, que nous crûmes devoir la choisir pour notre tache normale dans la détermination de la rotation[2]. Elle parut à 9h 30m (fig. 1) à la faible distance de 7° d’arc de Mars du méridien central. Le 14, nous la vîmes depuis 10h (fig. 2) jusqu’à 15h 15m (fig. 4) s’avancer depuis l’hémisphère oriental jusque dans la proximité du bord occidental ; nous en avons pris cinq dessins. Le 15, à 8h 50m (fig. 5), elle n’était pas encore visible ; elle ne le fut qu’à 13h 15m. Le 16, à 9h, elle ne l’était également pas ; en revanche, à minuit, elle était très distincte. Alors nous pûmes déduire la période de rotation : il était évident que le 19 et les soirs suivants, jusqu’au milieu d’octobre, la tache ne pourrait plus être observée dans les heures commodes de la nuit. Le 19 (fig. 6 et 7), l’image étant parfaitement distincte, il se montra deux places rouges (limitées sur le dessin général par des points), semblables à la belle couleur rouge des crépuscules de notre Terre. Au bout d’une heure, elles étaient déjà plus faibles, et plus tard elles furent encore assez claires, mais jamais elles ne reparurent avec une couleur rouge distincte. En outre, il se montra (à 10h 6m) une petite tache g, peu foncée, à côté de la pointe f (voir, pour les lettres, la carte fig. 68), mais que plus tard on cessa d’apercevoir. Probablement elle n’avait été visible qu’à cause de la grande sérénité de l’air, ou lorsqu’elle reparut, ce fut toujours réunie à f, car l’espace qui les sépare fut toujours extrêmement difficile à distinguer.

Dans les observations du 26 septembre au 5 octobre (fig. 10 à 12), il se montra plusieurs taches d’une couleur passablement sombre, s’étendant sur le disque en forme de zone, qui étaient très fortement limitées, surtout du côté du Nord et y formaient un contraste très prononcé, avec cet espace tout à fait libre de taches et présentant une lumière entièrement claire. Une saillie de ces taches, au point m, était distincte et large, surtout au côté boréal ; au côté austral, au contraire, elle était si étroite qu’on ne pouvait l’apercevoir qu’avec beaucoup de peine. La tache pm était très noire, surtout à son extrémité occidentale p qui était arrondie. Entre cette tache et la tache blanche du pôle austral, se montra constamment une bande q, assez large, mais d’une teinte blafarde. Du 5 au 12 octobre, des nuages suspendirent nos observations. Le 13 seulement, nous aperçûmes de nouveau une petite tache foncée près du bord occidental (fig. 13), et le 14, à 7h 37m (fig. 14), nous nous assurâmes que c’était la tache a de la première observation. Maintenant, il importait de distinguer dans les soirées suivantes, avec la plus grande précision possible, son passage par le centre, et c’est ce que nous pûmes faire les 19 et 20, par une atmosphère remarquablement pure (fig. 15 et 16).

Ces observations constituent vraiment le premier essai méthodique sur la géographie martienne. Nous offrons à nos lecteurs (fig. 68) la carte que Mädler et Beer ont construite d’après ces précieuses observations. Cette figure reproduit les deux hémisphères dessinés par ces astronomes, et représente l’ensemble de la planète d’après leurs propres observations de 1830 à 1839. (Nous publions ici la figure même qui accompagne le mémoire de ces observateurs.) C’est là, en fait, la première carte géographique qui ait été tracée du monde de Mars. Elle est restée seule pendant trente ans, et est devenue pour ainsi dire classique pour tous les observateurs subséquents.

L’hémisphère boréal contient évidemment une erreur : l’extrémité de la tache ehf (tache qui n’est autre que la mer du Sablier) qui ressort, en ponctué,

Fig. 67 — Dessins de Mars par Beer et Mädler en 1830 et 1832.
en dehors de l’hémisphère austral, entre 62° et 73° de longitude, est tracée, dans cet hémisphère boréal, entre 92° et 110°. Il y a eu là quelque méprise. Il eût fallu la tracer entre 62° et 73° et la continuer suivant le ponctué indiqué en dehors de l’hémisphère austral[3].

Les astronomes hanovriens ont choisi la petite tache ronde foncée a comme origine des méridiens. Nous avons agi de même dans la construction de notre carte, et c’est à cause de cette origine que nous avons proposé le nom de « Baie du Méridien » pour cette tache caractéristique.

Les longitudes de Beer et Mädler sont comptées de la droite vers la gauche, lorsqu’on regarde l’équateur en ayant le pôle sud en haut. Nous les comptons en sens contraire, c’est-à-dire de la gauche vers la droite, dans le sens du mouvement de rotation, le méridien 0 passant avant le méridien 10.

Les auteurs arrivent ensuite au calcul de la rotation qu’ils ont obtenue. Ils la trouvent, par les observations de 1830, de 24h 37m 9s,9 ; par 1830 à 1832, 24h 37m 23s,7 ; par 1830 avec 1835, 24h 37m 20s,4 ; la seconde leur paraît la plus sûre, et c’est celle qu’ils adoptent.

On ne peut pas avec certitude établir de comparaison avec les observations faites neuf ans auparavant par Kunowsky, dans lesquelles la même tache fut bien distincte, car les limites de l’incertitude devraient être quatre fois moindres qu’elles ne le furent pour qu’on pût penser qu’il n’y a pas d’erreur. En revanche, ces observations confirment évidemment la constance des taches que nous avons aperçues, du moins pour a et pour l’arc fortement recourbé qui s’étend en serpentant de a à c. Les taches qui se trouvent plus au Sud ne furent aperçues alors que dans des positions tout à fait défavorables, ou même quelques-unes ne le furent pas du tout, et il en apparut d’autres vers le Nord qui, en 1830, ne furent plus visibles ; tandis que cette tache normale s’était montrée entièrement identique depuis le mois de novembre 1821 jusqu’en mars 1822 et, cette fois-ci, du 10 septembre au 20 octobre 1830 : elle n’était donc pas analogue à nos nuages.

Au reste, surtout lorsqu’on observe la planète pour la première fois et qu’on ne répète pas souvent les observations, on peut facilement remarquer dans ces taches une variation que l’on regardera comme variation physique. L’état atmosphérique de la Terre, et peut-être aussi de Mars, est plus ou moins favorable, c’est pourquoi quelques erreurs d’appréciation et de dessin, petites en elles-mêmes, mais considérables relativement à leur objet, sont inévitables : une tache qui s’approche du bord disparaît avant de l’avoir atteint (ce qui provient sans doute, comme pour Jupiter, de l’atmosphère de la planète) ; enfin, on n’a pas souvent l’occasion d’apercevoir une seconde fois dans la même opposition exactement le même côté de la planète, qui était auparavant tourné vers la Terre.

Fig. 68. — Carte générale de la planète Mars, construite par Beer et Mädler en 1840.
En outre, les distances des oppositions varient, la planète n’arrive que très rarement aussi près de la Terre qu’en 1830, et à des distances plus considérables il est nécessaire d’avoir des grossissements plus forts et une puissance optique plus grande que la plupart des observateurs précédents n’en avaient à leur portée.

La tache blanche du pôle austral s’était montrée distinctement dans chaque observation, même lors des circonstances atmosphériques les moins favorables, mais sa grandeur a été très variable. Déjà le 31 août, lors d’une observation tout à fait superficielle, elle avait été appréciée de 1/8 à 1/10 du diamètre de Mars. Le 10 septembre, l’appréciation (faite dans la direction de l’Est à l’Ouest) donna pour résultat 1/10, le 15 septembre 1/16, le 2 octobre 1/18, le 5 octobre 1/20 et le 20 octobre 1/15. Admettons pour le 31 août la valeur 1/9, on aura pour les jours indiqués, qui correspondent pour la saison aux mois de juin et de juillet de notre hémisphère boréal, les limites suivantes de la tache blanche, supposé que le pôle soit à son centre :

31 août 83° 37′ de latitude ; répondant au 16 juin de la Terre.
10 septembre  84° 15′ de latitude ;» répondant au» 23 juillet» de la Terre»
15 septembre» 86° 25′ de latitude ;» répondant au» 26 juillet» de la Terre»
2 octobre 86° 50′ de latitude ;» répondant au» 07 juillet de la Terre»
5 octobre» 87° 07′ de latitude ;» répondant au» 09 juillet» de la Terre»
20 octobre» 85° 59′ de latitude ;» répondant au» 19 juillet» de la Terre»

C’est-à-dire que les limites se rétrécirent toujours jusqu’à une saison de Mars qui répond au milieu de notre mois de juillet, et de ce point-là elles commencèrent de nouveau à s’élargir successivement ; fait qui vient fortement à l’appui de l’hypothèse que le pôle de Mars est réellement couvert de neige. En outre, presque tous les observateurs donnent la grandeur de cette tache comme variable, et, lorsqu’elle est plus éloignée du maximum de chaleur, elle est considérablement plus grande qu’on ne l’a vue en 1830.

L’hémisphère boréal de la planète, autant qu’il fut visible cette année-là, ne présenta en revanche aucune trace de tache blanche, quoiqu’il se trouvât au milieu de son hiver. La forte inclinaison de l’axe de Mars explique ce fait et en reçoit en même temps une confirmation indirecte.

Les observateurs donnent ici un tableau de leurs dessins et des longitudes aréographiques des taches.

L’opposition de 1832 se présenta dans des circonstances atmosphériques constamment si défavorables et l’éloignement beaucoup plus grand de la planète eut une influence si fâcheuse qu’on ne put obtenir que des observations peu nombreuses et très imparfaites. De seize essais de dessiner les détails du disque, quatre seulement méritent d’être comparés à ceux de 1830. (on les trouvera au bas de la fig. 67). La tache a, si remarquée et si caractéristique deux ans auparavant, n’a pu être reconnue qu’une seule fois et encore à un assez grand éloignement du centre (16 décembre).

Cependant, écrivent les auteurs, ces observations, quoique peu nombreuses, nous ont paru suffisantes pour nous convaincre qu’aucune des taches bien visibles n’avait changé de position depuis 1830. Cela fut parfaitement évident pour les trois taches principales, en particulier pour la région pm, et pour la faible bande q. Cette dernière était du reste si rapprochée de la partie qui formait alors le bord austral, qu’on ne put l’apercevoir qu’avec beaucoup de difficulté, et celles qui étaient encore plus rapprochées des pôles, qui sont comprises dans les dessins de 1830, ne purent cette fois être aperçues, par des raisons faciles à concevoir. Le pôle austral n’était, en suivant les éléments d’Herschel, le 20 novembre, qu’à 10° en deçà du bord apparent, et ainsi la plus grande partie de la lumière, si éclatante en 1840, ne fut que très faible ; elle ne fut même aperçue que deux fois avec certitude (nov. 20, 9h, et nov. 23, 8h 14m) ; pendant toutes les autres soirées, elle resta incertaine ou n’apparut pas du tout. Sur l’hémisphère boréal, environ depuis 180° jusqu’à 230° de longitude et de 0° à 35° de latitude nord, se montra deux fois une bande faible, large et concave du côté de pm, mais son extrémité boréale seule fut distincte. Entre cette bande et pm apparaissaient souvent des lueurs rouges. En général, la lumière de l’hémisphère boréal, dans la partie qui ne contient pas de taches, ne paraissait pas être aussi pure et aussi uniforme que deux années auparavant. On ne voyait pas de trace de lumière blanche dans les environs du pôle boréal (ce pôle était encore caché à la vue).

Les oppositions de 1834-35 et 1837 furent également, comme les deux précédentes, très peu favorisées par les circonstances atmosphériques, et comme en outre l’éloignement de Mars atteignait alors son maximum (pour les oppositions), « les résultats de nos observations, écrivaient les auteurs, auraient été très insignifiants, si nous n’eussions pu avoir recours au grand télescope établi en 1835 à l’Observatoire royal. »

Cet instrument, dans toutes ses dimensions parfaitement égal à celui de Dorpat, permettait un grossissement au moins du double plus fort et fournit six fois plus de lumière que le nôtre ; un mécanisme très commode lui communique un mouvement par lequel, sans le concours de l’observateur, il suit le cours des planètes. Depuis le 12 janvier jusqu’au 22 mars, nous avons obtenu, pendant 15 nuits en partie sereines, 32 dessins qui toutefois ne nous ont fait particulièrement connaître que l’hémisphère boréal, et encore avec beaucoup moins de détails que nous en avions en 1830 pour l’hémisphère austral. Dans toutes les observations sans exception, la tache blanche du pôle boréal fut visible avec un degré de clarté que nous ne nous rappelons pas avoir jamais vu dans celle du pôle austral ; en même temps, elle était considérablement plus grande que celle de 1830 et apparut, surtout pendant les mois de janvier et février, tellement distincte des autres parties du globe, qu’au premier coup d’œil on n’aurait pu croire que la planète fût en cet endroit couverte par une autre planète.

La vraie grandeur de la tache du pôle austral, aux mois de février et de mars 1837, a surpassé de plusieurs fois celle des mois de septembre et d’octobre 1830.

La tache du pôle boréal, dans la première observation du 12 janvier, fut si bien limitée qu’on put apprécier son étendue avec assez de certitude ; elle comprenait, le long du bord de Mars, 0,27 du diamètre de la planète, et sa largeur fut de 0,13. La première donnée nous fait conclure à un demi-diamètre de 15°,7 du globe de Mars ou à une latitude nord de son bord de 74°,3 ; la seconde, en admettant les éléments de rotation donnés par Herschel et en admettant que le pôle a occupé le centre de la tache circulaire, nous conduit à une latitude nord de 78°,7, car le pôle boréal s’était avancé de 18° 13′ en dedans. La première de ces données a au moins le double du poids de l’autre. En tout cas, on voit évidemment par là que la tache du pôle boréal, dans l’opposition de 1837, fut considérablement plus grande que la tache du pôle austral en 1830, et beaucoup plus petite que la tache du pôle austral en 1837. Dans les observations suivantes, son étendue ne parut cependant pas se disposer à diminuer ; ce qu’on remarqua avec plus de certitude, c’est que la netteté de sa délimitation devint plus faible après l’opposition.

Nous avions le projet de mesurer, avec le micromètre, l’angle de position de la tache blanche, pour obtenir les données nécessaires à un examen direct de la position de l’axe de Mars. Le temps défavorable a, en grande partie, stérilisé notre intention. Le peu de mesures qui aient réussi nous apprennent seulement que l’excentricité de la tache polaire est, dans tous les cas, très faible. Cette distance au pôle a été estimée à 4° en 1837 pour la tache boréale, et à 8° pour l’australe, mais d’une manière très incertaine.

Nous ne pouvons pas cependant passer sous silence la circonstance que, dans le peu d’observations où nous avons distingué une trace de la tache du pôle austral, cette tache ne s’est pas montrée directement opposée à celle du pôle boréal : le 7 février, à 16h 14m, elle s’écartait d’environ 12° du point opposé à cette tache boréale, et à 18h 16m seulement de 8° à l’Est ; le 7 mars, à 10h 34m, elle s’en écartait d’environ 5° à l’Est ; enfin, le 18 mars, à 7h 56m, de 3° à 5° à l’Ouest.

De toutes les taches de l’hémisphère austral observées avec quelque précision en 1830, une seule, marquée pm, put être reconnue avec certitude. Nous la vîmes d’abord le 7 février, à 16h 4m (fig. 6), avec précision ; ensuite le 28 février, à 6h49 m (fig. 7), et dans trois observations pendant la nuit du 7 mars (fig. 14, 15, 16) ; enfin, un peu moins déterminée le 10 mars, de 7h 7m à 9h 22m et le 11 mars, à 8h 22m (fig. 11). La latitude aréographique de l’extrémité occidentale p fut déterminée, d’après onze observations, à +43° 29′ ; en 1830, nous l’avions trouvée entre 39° et 42° par trois observations, et ce fait, aussi bien que l’accord de la figure, parle en faveur de l’identité des deux taches. Un essai de réunir la longitude observée cette fois-ci avec celle de 1830 donna 24h 37m 29s,0 ; ce résultat, quoique suffisant pour en confirmer l’identité aussi sous ce rapport, n’est pas propre à corriger la rotation calculée précédemment, à cause de la position fortement excentrique de la tache. Cependant on peut être assuré qu’il ne s’est pas glissé d’erreur dans le nombre des rotations entières.

Une seconde tache, marquée efh sur notre carte, a été reconnue le 12 janvier

Fig. 69. — Dessins de Mars, faits par Beer et Mädler en 1837.
et le 22 février, ainsi que le 12 mars ; mais aucun point n’en a été assez fortement marqué pour qu’on pût en tirer une détermination précise.

Cette remarque est curieuse et digne d’une attention toute particulière, car cette tache efh est la mer du Sablier, qui, généralement est, au contraire, si nette et si bien caractérisée. Pendant l’opposition dernière (1890), par exemple, elle frappait la vue chaque fois que l’hémisphère qui la renferme était tourné vers nous.

Quant à l’opposition de 1839, toutes les observations ont été faites avec le grand télescope de l’Observatoire royal. Mars exigeait un fort grossissement et, par conséquent, une grande tranquillité dans l’atmosphère. Cette dernière condition se réalisa rarement dans l’hiver de 1838 à 1839, ce qui fait que les observations n’ont pu être nombreuses. L’hémisphère austral cachait 62° de sa surface à la vue, de sorte qu’il était en grande partie non observable, et aucune des taches de cet hémisphère ne put être distinguée avec précision.

Les dix dessins publiés pour cette année 1839 par les auteurs sont tellement pâles et indécis qu’il serait absolument inutile de les reproduire ici.

Voici les conclusions générales qu’ils tirent de l’ensemble de leurs observations sur les pôles et les saisons :

La couleur des taches polaires, toutes les fois qu’on put les apercevoir distinctement, fut toujours un blanc pur et brillant, en aucune façon semblable à la couleur des autres parties de la planète. En 1837, il arriva une fois que Mars fut, pendant l’observation, complètement obscurci par un nuage, à l’exception de la tache polaire qui se montrait distinctement à la vue. Cette grande différence est aussi cause que son étendue et sa figure peuvent être appréciées avec beaucoup plus de certitude que pour aucune autre tache de la planète, et même il ne serait pas impossible qu’on n’appliquât avec succès sur elle des mesures au micromètre en l’observant avec de puissants instruments.

Il faut aussi remarquer la diminution et l’accroissement de ces taches qui conservèrent malgré cela toujours la même figure, ainsi que la circonstance que les pôles de rotation formèrent ordinairement les centres de ces taches ou du moins ne s’en éloignèrent jamais que de quelques degrés. Nous avons déjà indiqué plus haut les variations de la tache du pôle austral, ainsi que les saisons de Mars qui répondent aux données de l’observation et que nous avons exprimées dans leur rapport avec les saisons de la Terre. La tache du pôle boréal de son côté présenta les variations suivantes :

Limites à… .
1837  Janv. 12. 
Limites à
74° 18′ ;  saison correspondante au 14 mai.
Mars 7.
Limites» à
76° saison» correspondante au» 14 juin.
1839 Févr. 26.
Limites» à
78° 33′ saison» correspondante au» 17 juin.
Avril 1.
Limites» à
80° 48′ saison» correspondante au» 14 juillet.
Avril 16.
Limites» à
82° 20′ saison» correspondante au» 12 juillet.
Mai 1.
Limites» à
81° saison» correspondante au» 20 juillet.

D’après cela, le minimum pour les deux taches tombe environ 1/18 d’année après le solstice d’été, ce qui correspond au 12 juillet (et 12 janvier) de notre Terre. Mais, tandis que la tache du pôle austral a diminué jusqu’à 6° de diamètre, celle du pôle boréal avait encore à son minimum 12° à 14° de diamètre, c’est-à-dire une surface environ cinq fois plus considérable que la première.

Réciproquement, la tache du pôle austral, en 1837, pendant son hiver (les jours d’observation correspondent, pour la saison, aux 4 et 10 décembre), a pris une telle extension sur la planète, qu’on put encore la distinguer, lors même que le pôle était déjà à 18° au delà du bord extrême, ce qui conduit à environ 55° de latitude et ainsi à un diamètre de la tache de 70°.

Nous n’avons jamais aperçu un cas semblable au bord boréal, pendant que le bord austral avait son été. Les variations de la tache du pôle austral sont, d’après cela, vers ses deux limites, considérablement plus grandes que celles de la tache du pôle boréal.

Par suite de la position de l’axe de Mars, le pôle austral est le plus exposé au Soleil, lorsque la quantité de la lumière (et de la chaleur) qu’il en reçoit, peut être exprimée par 0,52 de la lumière que reçoit la Terre, et le pôle boréal, lorsque cette quantité est de 0,37. Mais cette différence est, en ce qui concerne l’année dans son ensemble, complètement détruite par le rapport contraire qui a lieu en hiver ; et même pour les différentes saisons, on trouve une compensation partielle, en ce que la longueur du semestre d’été, dans l’hémisphère boréal, est à celle de l’hémisphère austral dans le rapport de 19 à 15 ; cependant, dans les points culminants de chaleur et de froid, il reste évidemment une différence très considérable. D’après cela, le pôle austral a des étés plus chauds et des hivers plus froids que le pôle boréal, et cette différence est beaucoup plus considérable que celle qui se présente sur notre Terre : chez nous elle est très peu sensible, mais l’excentricité de Mars est cinq fois plus grande que celle de la Terre.

Les différences que nous avons remarquées s’accordent ainsi parfaitement avec l’idée que ces taches blanches représentent un précipité analogue à notre neige ; et il est en effet presque impossible de rejeter une explication qui se confirme d’une manière aussi surprenante. Notre Terre, vue de la distance d’une planète, doit présenter des phénomènes tout à fait semblables ; seulement, chez nous, le rapport réciproque de l’hémisphère boréal et de l’hémisphère austral est moins inégal.

Les autres taches de la planète paraissent pour l’essentiel appartenir à la surface. Vu la position et l’éloignement de Mars, nous n’aurions pu, en aucune circonstance imaginable, distinguer des ombres produites par des montagnes, quelque gigantesque que fût leur élévation (la forme sphérique toujours bien prononcée du disque leur prescrit du moins un maximum) ; ces ombres sont donc des différences dans la réflexion de la lumière, qui peuvent très bien provenir des mêmes causes que celles qui ont lieu sur notre Terre. C’est dans l’opposition de 1330 que s’est montrée la plus grande précision relative à la délimitation dans les taches de l’hémisphère austral, qui étaient situées entre l’équateur et 45° de latitude nord ; cependant aussi alors la noirceur et la netteté relatives des taches ne sont pas restées constamment les mêmes, et ce fut encore moins le cas en 1837 et 1839. Ainsi, quoique ces taches elles-mêmes ne paraissent pas être analogues à nos nuages, toutefois elles présentent certaines analogies optiques avec des condensations semblables à des nuages, car elles se montrent plus déterminées, plus précises et plus intenses dans leur été, et au contraire plus vagues, plus pales et plus confondues pendant leur hiver.

Quelquefois nous avons aperçu une coloration rougeâtre en certaines régions particulières du disque. Mars apparaît à l’œil nu comme l’étoile la plus rouge du ciel. Avec le télescope, cela ne se montre pas au même degré et la couleur générale est tout au plus un rouge jaunâtre ; la coloration de ces régions rappelle celle d’un beau crépuscule de notre Terre.

Si tout cela nous conduit déjà avec beaucoup de certitude à admettre pour Mars une atmosphère très sensible et semblable à celle de notre Terre, cela explique aussi en même temps la remarque que nous avons faite qu’en s’approchant des bords les taches apparaissent toujours fondues ou s’effacent entièrement ; l’éclat du bord, que nous avons souvent aperçu, paraît aussi provenir de procédés atmosphériques particuliers.

Au reste, il ne faut pas s’attendre à ce que l’atmosphère de Mars, lors de l’immersion d’une étoile fixe ou d’autres corps célestes, puisse être rendue sensible par la réfraction. Même aux époques où Mars est le plus rapproché de nous, une étendue de 20 lieues sur lui ne nous paraît que sous un angle de 0″,30 ; à une telle distance, la réfraction est entièrement insensible, lors même qu’elle serait à la surface considérablement plus forte que sur la Terre.

Les observations nous font admettre la plus grande variation, aussi bien pour la grandeur et la forme que pour l’intensité, dans la tache sombre voisine de la zone polaire boréale, et cela s’explique probablement d’une façon particulière. Si les taches polaires sont véritablement de la neige, leur diminution à l’approche l’été ne peut avoir lieu que par la fonte et l’évaporation continuelles ; l’épaisseur de cette neige est, selon toute vraisemblance, très considérable ; ces parties de la surface, se disposant à s’évaporer, doivent par conséquent être extrêmement humides : or un sol vaporeux et marécageux est certainement de toutes les parties d’une surface celle qui est la moins susceptible de réflexion et qui doit par conséquent nous paraître la plus foncée. Le maximum de cette noirceur doit arriver à l’époque où la fonte s’opère avec le plus de rapidité, c’est-à-dire, pour les hautes latitudes, entre l’équinoxe et le solstice d’été. Ainsi s’explique pourquoi la tache sombre, qui environne le pôle boréal, qui n’avait pas du tout été aperçue auparavant, se présenta en 1837 avec une intensité et une étendue si considérables et en 1839, au contraire, fut très pâle et au commencement très petite.

Ce n’est pas aller trop loin que de regarder Mars comme présentant une très grande ressemblance avec notre Terre, même sous le rapport physique, comme une image de la Terre telle qu’elle nous apparaîtrait au firmament, vue une grande distance (environ une distance double de celle où se présente la Lune à l’œil nu). Les différences les plus essentielles entre Mars et la Terre consistent dans la petitesse de son volume et la forte excentricité de son orbite. En revanche, la durée des jours est sensiblement la même.

L’inégalité que l’excentricité amène dans la durée des saisons peut se déterminer de la manière suivante, si l’on admet la position de l’axe d’après Herschel et notre période de rotation :

Une année de Mars contient
6692/3 rotations,
Par conséquent
6682/3 jours solaire de Mars.
Le printemps de l’hémisphère boréal contient
1911/3 jours de Mars.
L’été
181 »»
  3721/3
L’automne
1491/3 »»
L’hiver
147 »»
  2961/3

de telle sorte que le printemps et l’été réunis ont 76 jours de plus dans l’hémisphère boréal que dans l’hémisphère austral. Les deux moitiés de l’année séparées par les équinoxes sont donc dans le rapport de 19 à 15.

Beer et Mädler terminent leur mémoire par l’examen de la durée de la rotation de la planète, comparée aux résultats obtenus par William Herschel. Nous avons vu plus haut (p. 106) qu’ils ont trouvé 24h 37m 23s,7 pour la période la plus sûre.

La période de rotation que nous avons trouvée, remarquent-ils, diffère de 2 minutes de celle d’Herschel qu’on avait admise jusqu’à présent, et comme cette période est aussi basée sur la combinaison de deux oppositions, une aussi grande différence peut étonner. Cependant cette différence disparaîtrait presque entièrement si l’on voulait admettre dans l’une des deux années une erreur d’une seule révolution entière, si l’on voulait diviser l’intervalle des oppositions d’Herschel avec un diviseur augmenté d’une unité, ou le nôtre avec un diviseur diminué d’une unité. Toutefois, comme une période de 24h 39m 22s est inconciliable avec nos observations comparées entre elles, et supposerait des erreurs que nous ne pouvons pas regarder comme possibles, il ne sera peut-être pas sans intérêt de se reporter aux observations d’Herschel et d’examiner quel résultat elles présentent lorsqu’on les réduit avec une plus grande exactitude.

En 1777, du 8 au 26 avril, il avait observé différentes taches, qui n’offraient cependant seules aucune combinaison certaine, c’est pourquoi il résolut d’attendre l’opposition suivante. Elle arriva le 12 mai 1779 et Mars atteignit alors un diamètre de 13″,5, grandeur qui diminua jusqu’au 19 juin où il fut de 11″.

Le 11 mai, à 11h 43m il aperçut au centre une tache qu’il avait déjà vue le 9 mai, à 11h 0m 45s, mais du peu en dehors du centre. La même tache se montra le 19 juin où Mars avait déjà une position très basse. Voici son observation :

Juin 19, 11h 30m. The figure of mai 11 is not come to the position ; it was then at 11h 43m, but cannot be far from it. I fear as Mars approaches to horizon, I shall not be able to follow him till the figure comes to the centre.

11h 47m. The state of the air near the horizon is very unfavorable. With much difficulty I can but just see that the la figure is not quite so far advanced as it was mai 11 at 11h 44m, but can certainly not be above two or three minutes from it.

En trois minutes une tache de Mars s’écarte du centre d’un espace égal à 1/153 du diamètre de Mars ; elle ne se meut ainsi, avec la grandeur apparente qu’elle avait alors, que de 1/14 de seconde d’arc, et Mars n’était qu’à 9° au-dessus de l’horizon ! Cependant, admettons l’appréciation d’Herschel, ainsi que le passage de la tache à 11h 49m 30s. Le calcul se présente de la manière suivante :

Juin
19  11h 49m 30s
Mai
11 11h 43m00s
Intervalle
39j 10h06m 30s
Correction I
+37m 36s  à cause du changement de la longitude géocentrique.
Correction II
−16m 14s  à cause de la phase de Mars.
Correction III
00m 49s  à cause de l’aberration.
  39j 00h 27m03s
38 rotations de 24h 38m 36s,4

Herschel observa une autre tache le 11 mai, à 10h 17m 41s et le 13, à 11h 25m 51s, après quoi elle reparut le 17 juin à 9h 12m 20s. Toutefois il dit :

Juin 17, 9h 12m (clock 20s slow). The dark spot is rather more advanced than it was mai 11, 10h 18m.

Et Herschel admet encore une correction de 3m, d’après quoi le moment véritable est 9h 9m 20s. Cela donne les résultats suivants :


Juin
17  09h09m 20s

Mai
11 10h 17m 48s
36j 22h 51m 32s
Correction I
+37m 28s
Correction II
−15m00s
Correction III
00m 44s
  36j 23h 13m 16s
  36j 24h 38m 42s,9
 

Juin
17  09h09m 20s

Mai
13 11h 25m 51s
34j 21h 43m 29s
Correction I
+34m 31s
Correction II
−15m00s
Correction III
00m 43s
  34j 22h02m 17s
  34j 24h 38m 53s,4

La moyenne de ces trois déterminations extrêmement incertaines est donc

24h 38m 44s,2.

et, au lieu de cela, Herschel, n’ayant égard qu’en passant à la correction qui provient du changement de la longitude et ne faisant pas du tout attention aux autres, admet comme résultat final pour 1779

24h 39m 22s,1.

Il faut cependant encore avoir égard à une circonstance qui ne peut guère être soumise au calcul. Nous calculons la grandeur de la phase au moyen de l’angle que forment la Terre et le Soleil avec le centre de Mars, mais l’expérience nous apprend, dans Vénus et Mercure, que la largeur de la partie obscurcie se trouve être toujours un peu plus grande que le calcul ne le demande. En outre, avec un instrument d’une irradiation aussi forte qu’a dû l’être le télescope d’Herschel, le bord entièrement éclairé s’avancera beaucoup plus dans la partie obscurcie que le bord opposé ; or, comme les 11 et 13 mai le disque complet a été aperçu, mais que les 17 et 19 juin il manquait déjà au bord oriental 28° 16′ et 29° 22′, il faut donc d’après toute vraisemblance augmenter la correction II et diminuer par conséquent la période de rotation.

Herschel, prenant pour base la période de 24h 39m 22s,1, qu’il avait trouvée, admit qu’entre les jours suivants, où les mêmes taches furent aperçues,

1777 avril 8  et 1779 juin 6,  il s’était écoulé 768 rotations ;
1777 avril» 17  et 1779 juin» 15,  il s’était» écoulé» 768 rotations ;»
1777 avril» 26  et 1779 juin» 19,  il s’était» écoulé» 763 rotations ;»

d’où résulta alors la période :

24h 39m 23s,03
24h 39m 18s,94
24h 39m 23s,04
Moyenne
24h 39m 21s,67.

En augmentant les diviseurs d’une unité et en ayant égard aux corrections exigées, on obtient :

24h 37m 28s,5
24h 38m 22s,3
24h 37m 28s,0
Moyenne
24h 37m 26s,27 ;

de sorte que la différence de 2 minutes qui se trouve entre le résultat d’Herschel et le nôtre se trouve réduite à 21/2 secondes.

Il est évident que, pour le résultat exact des observations, les deux diviseurs sont également à peu près possibles et vraisemblables, tandis qu’une diminution du diviseur que nous avons appliqué dans la combinaison de 1830 et 1832 ferait supposer une erreur moyenne de 1h 15m dans les intervalles observés en 1830, ce qui est inadmissible.

Il est bien loin de notre pensée de vouloir mettre en doute l’exactitude et le talent d’observation d’Herschel ; seulement les circonstances de beaucoup plus favorables qui ont accompagné nos observations en 1830, ainsi que la stricte exactitude que nous avons mise dans le calcul, paraissent décider en faveur de notre résultat qui, comme on le voit, peut être mis d’accord avec les observations d’Herschel.

Nous adopterons cette correction, d’autant plus que les déterminations récentes les plus précises confirment la période de Beer et Mädler, la durée de rotation de Mars étant, sans aucun doute possible, de 24h 37m 22s,6. La période de Beer et Mädler est, avons-nous dit, de 24h 37m 23s,7. Elle approchait donc de 1s,1 de la précision absolue.

Les observations qui précèdent ont été continuées par Mädler, à l’observatoire de Dorpat, pendant l’opposition de 1841, et le résumé en a été publié dans le numéro 434 des Astronomische Nachrichten, année 1842, accompagné d’une planche de 40 dessins. Il est assez difficile d’identifier ces dessins aux précédents. Nous avons choisi dans cette planche, pour être reproduits en fac-similés, une série de neuf croquis parmi les meilleurs et les plus voisins de l’opposition ; ce sont les fig. 6, 7, 8, 14, 15, 16, 22, 23 et 24 de la planche que nous venons de citer ; ils se rapportent aux dates suivantes (l’opposition a eu lieu le 1er avril : distance à la Terre = 0,591 ; diamètre = 15″,1) :

Fig. 06 ou 1 : 1er avril, à minuit 8m, temps moyen de Paris.

Fig. 07 ou 2 à gauche : 5 avril, 9h 13m, temps moyen de Paris.

Fig. 08 ou 3 : Même jour, à 10h 13m, temps moyen de Paris.

Fig. 14 ou 1re du 2e rang : 26 avril, à 9h 12m.

Fig. 15 : Même jour, à 9h 52m.

Fig. 16 : 29 avril, à 8h 50m.

Fig. 22 ou 1re du 3e rang : 8 mai, à 8h 41m.

Fig. 23 : 9 mai, à 8h 11m.

Fig. 24 ou dernière : 11 mai, à 7h 54m.

Ces observations complètent les précédentes sans y ajouter de nouveaux documents.

Telles furent les recherches de l’astronome Mädler, auquel s’était associé son ami Guillaume Beer (frère de Meyerbeer), passionné comme lui pour l’étude du ciel. Ces recherches sont les plus fécondes de toutes celles qui aient été faites jusqu’à leur époque, car elles inaugurent réellement la connaissance de la géographie martienne, ou l’aréographie.

La durée de la rotation, déterminée avec une précision supérieure à toutes les évaluations précédentes et adoptée, est 24h 37m 23s,7.

Les glaces polaires sont spécialement étudiées, ainsi que les saisons de chaque hémisphère. On sait désormais que l’hémisphère austral a des étés plus chauds et des hivers plus froids que l’hémisphère boréal, à cause de la plus grande excentricité de la planète et de l’inclinaison de l’axe : les variations des glaces polaires australes sont plus grandes que celles des glaces polaires boréales, et elles correspondent aux saisons. L’hémisphère sud a des étés courts et brûlants et des hivers longs et rigoureux ; l’hémisphère nord, au contraire, a des étés longs et tempérés et des hivers courts et doux.



Fig. 70. — Dessins de Mars faits par Mädler en 1841.

Les mesures de distance des pôles de froid aux pôles géographiques ne concordent pas avec celles d’Herschel (voy. p. 97), quoiqu’il reste constant que les deux calottes polaires ne sont pas diamétralement opposées, Peut-être les pôles du froid ne sont-ils pas fixes.

Les taches foncées de la planète ont une certaine fixité, une certaine permanence. Cependant il y a des changements incontestables, Ce que nous avons pressenti depuis le commencement de cet ouvrage est confirmé.

Comme stabilité, la tache a, prise pour origine des méridiens, paraît aux observateurs la plus sûre. Elle est la mieux marquée de la planète, la plus foncée. (C’est la baie du Méridien de notre carte.) Si nos lecteurs veulent bien remonter aux figures 17 et 31 de cet ouvrage, ils trouveront cette région à droite de l’hémisphère renfermant la mer du Sablier et remarqueront que l’aspect n’est plus le même que celui de la carte de Beer et Mädler : le ruban ne se détache plus sur un fond clair et est moins étroit ; il s’opère incontestablement là des variations d’aspects, peut-être périodiques.

Ce détroit d’Herschel II a paru stable aux auteurs, comme ayant été observé aussi par Kunowsky en 1821 (voy. fig. 65). Ainsi l’arc serpentant ac et la tache a leur paraissent appartenir sûrement à la surface de la planète. La longue et large tache pm de leur carte est également considérée comme fixe (c’est la mer Maraldi). Du reste, malgré les incertitudes et la confusion de certaines images, ils écrivent en 1832 qu’aucune des taches bien visibles en 1830 n’a changé de position. En 1837, ils reconnaissent de nouveau avec certitude la mer Maraldi. Toutefois il n’y a pas moyen de se soustraire à l’impression de variations considérables, dans la teinte comme dans la forme et l’étendue de ces taches sombres. Les auteurs seraient disposés à attribuer ces variations, du moins dans les latitudes élevées, aux effets de la fonte des neiges, le sol devenant marécageux et sombre aux endroits où les neiges sont fondues.

L’atmosphère martienne doit également jouer un grand rôle dans ces variations d’aspects. Il semble bien que nous devions admettre sur Mars deux espèces de taches sombres, les unes dues à des mers, les autres à des brumes ou brouillards. Peut-être même arriverons-nous à la déduction que l’eau n’est pas dans le même état qu’ici, n’y forme pas, à proprement parler, des mers liquides, mais plutôt des nappes de brouillards très denses, visqueux, voisins de l’état liquide sans l’être tout à fait. Ces nappes aqueuses varieraient d’étendue et d’intensité suivant les conditions atmosphériques et suivant les saisons.

On le voit, la connaissance de la planète avance graduellement, d’année en année, avec le progrès des observations. Nous pouvons affirmer dès maintenant ce qui n’était que probable précédemment : Stabilité, mais variations. L’étude géographique de la planète Mars devient une étude de précision ; Mars est un globe géographique comme la Terre, non pas nuageux comme Jupiter et Saturne ; il a sûrement des continents et des mers ; mais ces mers ne ressemblent pas aux nôtres : elles subissent des variations énigmatiques qui feront l’objet des études futures de la Science.


XXXV. 1830. — Sir John Herschel.

Après avoir donné sur Mercure et Vénus l’opinion suivante (Outlines of Astronomy) : « La conséquence la plus naturelle à tirer de l’extrême ténuité des taches, qui ne sont même que passagères, c’est que nous ne voyons pas, comme dans la Lune, la surface réelle de ces planètes, mais seulement leurs atmosphères très chargées en nuages et qui peuvent servir à adoucir l’éclat d’ailleurs très intense de leur clarté », l’illustre astronome ajoute :

« Le cas est très différent pour Mars. Dans cette planète, nous distinguons avec une parfaite netteté les contours de ce que nous pouvons regarder comme des continents et des mers (voyez fig. 71 où Mars est représenté tel qu’il a été vu, le 16 août 1830, dans le réflecteur de 20 pieds de Slough). Les continents se distinguent par cette couleur rougeâtre qui caractérise la lumière de cette planète et qui annonce, à n’en pas douter, une teinte d’ocre dans le sol en général (comme les carrières de pierre à sablon rouge dans quelques lieux de la Terre peuvent en offrir l’image aux habitants de Mars) ; seulement le ton est plus prononcé ; par un contraste qu’expliquent les lois générales de l’optique, les mers, comme nous pouvons les appeler, paraissent verdâtres.

Fig. 71. — Vue de Mars, par Sir John Herschel, le 16 août 1830
Ces taches cependant ne se voient pas toujours d’une manière également distincte, quoique, quand on les voit, elles offrent toujours la même apparence. Cela peut venir de ce que la planète n’est pas entièrement dépourvue d’atmosphère et de nuages ; et ce qui donne beaucoup d’autorité à cette hypothèse, c’est la présence de taches blanches et d’un vif éclat à ses pôles (dont une est représentée dans notre dessin). On a soupçonné, avec beaucoup de probabilité, que ce sont là des neiges : elles disparaissent lorsqu’elles ont été longtemps exposées au Soleil, et sont au plus haut degré de leur grandeur lorsqu’elles ne font que sortir de la longue nuit de leur hiver polaire. »

En 1828, le 22 juin, le Dr Pearson avait observé sur le disque de Mars une tache sombre allongée verticalement, non loin du bord gauche ou occidental, et, quatre jours après, il revoyait cette tache, non plus verticale, mais horizontale et allongée le long du bord supérieur. Il en écrivit à sir John Herschel qui lui-même communiqua le fait à Smyth. Celui-ci en parle dans son ouvrage Cycle of Celestial objects et en donne même la figure. Il s’agissait certainement là de deux taches différentes, car la planète ne tourne pas dans ce sens : nous ne sommes pas dans la direction du pôle.

Nous retiendrons de sir John Herschel deux faits. Le premier, c’est que dès cette époque, 1830, l’opinion que les régions jaunes représentent des continents et les grises des mers devient à peu près générale ; le second, c’est que le ton jaune des continents est celui de la surface du sol. Mais l’explication du fils de William Herschel est soumise à caution. Pour l’admettre, il faudrait supposer qu’il n’y ait aucun genre de végétation à la surface du sol de Mars. Une telle supposition n’est guère acceptable, puisqu’il y a comme ici de l’air, de l’eau et du soleil, Si la surface du sol est rougeâtre, cela ne proviendrait-il pas de ce qu’elle serait recouverte d’une végétation de cette nuance ? Cette coloration n’est pas rouge d’ailleurs, c’est un jaune chaud que nous ne saurions plus exactement comparer qu’à celui des blés mûrs.

XXXVI. 1830 à 1837. — Bessel[4].

Le grand astronome-mathématicien Bessel a fait de 1830 à 1837 à l’observatoire de Kœnigsberg une série d’observations de Mars qui n’avaient point pour objet sa constitution physique, mais seulement la mesure de son diamètre et de son aplatissement. Il trouva pour le diamètre, à la distance 1 (celle de la Terre au Soleil), 9″,33. L’aplatissement polaire lui parut tout à fait insensible.

Les mêmes mesures ont donné pour l’excentricité de la tache polaire australe 6° 36′. On se souvient que William Herschel avait trouvé en 1783, pour cette même tache australe 8°,8, Beer et Mädler 8°.

Oudemans, de Leyde, a publié en 1852 une nouvelle réduction de ces mesures[5]. Il conclut pour le demi-diamètre 4″,664, ce qui, combiné avec la parallaxe solaire alors adoptée de 8″,571, donne 0,544 pour le diamètre de Mars relativement à la Terre, et 0,161 pour le volume. Il trouva par les mêmes observations de Bessel :

Longitude céleste où pointe le pôle nord de Mars.
319° 01′[6]
ou ascension droite
317° 34′
Latitude
061° 09′
ou déclinaison
050° 05′

XXXVII. 1831-1832. — Sir James South[7].

L’astronome anglais sir James South, auquel nous devons d’intéressantes mesures d’étoiles doubles, a présenté à la Société royale de Londres, le 16 juin 1831, puis le 13 décembre 1832, une série d’observations sur l’atmosphère de Mars, montrant que cette atmosphère n’a pas l’extension que lui avait fait supposer l’interprétation des observations de l’occultation de l’étoile ψ du Verseau par Mars, le 1er octobre 1672.

Cassini avait observé à Briare : « Le 1er octobre 1672, dit-il, à 2h 45m du matin, Mars, vu par une lunette de 3 pieds, semblait toucher par son bord septentrional la ligne droite tirée par la première et par la seconde étoile de l’eau d’Aquarius marquée ψ, d’où il n’était éloigné que de 6 minutes. Cette étoile paraissait si diminuée et affaiblie de lumière qu’on ne la pouvait distinguer ni à la vue simple ni par une lunette un peu faible. »

L’étoile ψ du Verseau est de 5e grandeur. Nous avons déjà parlé de cette observation p. 60 (en note).

Cette même occultation fut observée à l’Observatoire de Paris par Rœmer : « Les nuages ne permirent pas d’en voir la sortie, et l’on ne sait même pas si l’on aurait pu la voir immédiatement, car, trois quarts d’heure après, le ciel s’étant découvert, M. Rœmer la chercha attentivement autour de Mars et il ne la trouva qu’après l’attention de deux minutes, quand elle était déjà éloignée du bord oriental de Mars de deux tiers de son diamètre. Il commença de la voir sans difficulté quand elle était éloignée de Mars des trois quarts de son diamètre ». (Mém. de l’Acad., t. VII, p. 359).

Voilà donc une étoile de 5e grandeur qui aurait subi à la distance de six minutes l’influence de la planète. « Cette difficulté de voir cette étoile de la 5e grandeur très proche de Mars est considérable, d’autant qu’il n’y a point de difficultés à voir des étoiles de la même grandeur au bord de la Lune. Ce qui pourrait faire juger que Mars est environné de quelque atmosphère. »

Sir James South remarque d’abord que William Herschel a fait une observation contraire le 27 octobre 1783, puisqu’il a pu suivre une étoile de 13e à 14e grandeur à la distance de 2′ 56″ de la planète : « Not otherwise affected by the approach of Mars than what the brightness of its superior light might account for. » Nous avons signalé cette observation.

« Le 19 février 1822, dit sir James South, j’ai observé à Londres, à Blackmanstreet, une étoile de 9e à 10e grandeur qui n’a pas subi de diminution d’éclat à 1′ 43″ du bord de la planète.

« La nuit suivante, continue-t-il, l’étoile 42 du Lion, de 6e grandeur, s’est approchée de Mars ; à 4h du matin, elle était tout proche et présentait une belle couleur bleue. Elle a été occultée. Je n’ai pas pu saisir le moment précis de l’occultation, mais à l’émersion j’ai revu l’étoile à environ une minute et demie du bord ; elle était nette, indigo bleu, ce qui faisait un contraste exquis avec la couleur de Mars. La planète n’était qu’à 47 heures de son opposition, et son diamètre était de 16″,6. »

Le 17 mars 1831, le même astronome fit encore une observation analogue à propos de l’occultation de l’étoile 37 du Taureau par Mars. L’étoile ne subit aucune diminution d’éclat ni de couleur. Il n’y avait pas de contraste de couleur comme dans le cas de 42 du Lion. L’étoile 37 du Taureau a à peu près la couleur de Mars.

Le 28 novembre 1832, sir James South fit encore une observation analogue. Une étoile de 6e à 7e grandeur précédait Mars au Sud. Elle offrait une belle couleur bleue, en contraste frappant avec celle de la planète. L’objectif de l’équatorial mesurait 11,85 pouces anglais et supportait bien un grossissement de 520 fois. On suivit l’étoile (α = 3h 29m 19s, δ = +20° 22′) jusqu’au bord de la planète : il n’y a pas eu l’ombre d’un changement optique dans l’éclat de l’étoile, pas plus que dans sa couleur, ni à l’immersion ni à l’émersion.

La planète avait passé son opposition depuis 9 jours.

L’auteur conclut que l’ancienne hypothèse d’une atmosphère considérable est insoutenable. C’est aussi ce que Flaugergues avait conclu en 1796 d’une observation analogue (voy. p. 84, en note).

XXXVIII.1837-1839. — J.-G. Galle.

Cet astronome a fait en 1837 et 1839, à l’aide du réfracteur de 9 pouces de l’observatoire de Berlin, une série d’observations et de dessins fort remarquables. Dix-huit de ces dessins ont été reproduits par M. Lohse dans le tome I des publications de l’Astrophysikal. Observatorium zu Potsdam (1878).

Parmi ces croquis nous reproduisons, entre autres, les suivants :

Fig. 72 A : 12 mars 1837, à 10h 37m,

Fig. 72 B : 12 mars 1839, à 10h0m. — Dans ces deux vues, on remarque, en bas, la tache polaire boréale, très petite dans le deuxième dessin. Ce dessin de 1839 offre une ressemblance remarquable avec celui de Kunowsky, du 15 mars 1822 : la tache supérieure représente le détroit d’Herschel II et la baie du Méridien.

Fig. 73 C : 12 mars, à 11h 30m.

A. — 12 mars 1837, à 10h 37m.B. — 12 mars 1839, à 10h 0m.
Fig. 72. — Dessins de Mars par Galle, 1837-1839.

Fig. D : 13 mars, à 9h 41m.

Fig. E : 14 mars 1839, à 10h0m. — Cette sorte de tête de canard représente également la baie du Méridien. Remarquer cet aspect fourchu, sur lequel nous reviendrons plus tard.



C. — 12 mars, à 11h 30m.A — 30 mars à 9h4mD. — 13 mars.A — 30 mars à 9h4mE. — 14 mars.F. — 30 mars, à 9h 40m.
Fig. 73. — Dessins de Mars par Galle, en 1839.

Fig. F : 30 mars. — La tache noire a est passée à 10h 40m au méridien central. Cette figure a été prise à 9h 40m, et la suivante (G) à 11h 10m.



G. — 30 mars, 11h 10m.A — 30 mars à 9h4mH. — 31 mai.A — 30 mars à 9h4mI. — 1er juin.J. — 7 juin, à 9h 40m.
Fig. 73. — Dessins de Mars par Galle, en 1839.

Fig. H : 31 mai, à 14h 30m. — On distingue les deux taches polaires, qui ne sont pas à l’extrémité d’un même diamètre. On remarque en a une échancrure assez singulière. (Nous avons déjà vu une observation analogue dans Schrœter.)

Fig. I : 1er juin, à 14h 15m. — La traînée sombre, qui descend d’un pôle à l’autre, paraît correspondre à la mer du Sablier, qui est encore mieux reconnaissable sur les croquis B, D, E et H.

Fig. J : 7 juin, à 14h 22m.

Ces dessins de Galle signifient également : stabilité, mais variations de tons.

XXXIX. 1839. — Napoléon III.

Nous avons découvert cette observation dans un ouvrage où nous ne l’aurions certainement pas cherchée[8], et nous la signalons plutôt pour sa curiosité que pour son importance.

Au mois de juin 1839, le prince Louis-Napoléon et M. d’Abbadie, aujourd’hui membre de l’Institut et du Bureau des Longitudes, qui l’accompagnait, étant en visite à l’observatoire de sir James South, à Londres, observèrent Mars et remarquèrent surtout la calotte polaire supérieure, alors très accentuée. M. d’Abbadie en fit un petit croquis qu’il serait superflu de reproduire, et Louis-Napoléon Bonaparte en écrivit une courte description qu’il signa Napoléon III (en 1839). La planète offrait une phase marquée. La tache polaire était si brillante qu’elle allongeait le disque de Mars en forme de pointe et lui donnait l’aspect d’une poire.

C’était sans doute une semaine ou deux après le dernier dessin qui précède.

  1. Fragments sur les corps célestes du système solaire (Paris, 1840). Beitrage, etc. (Weimar, 1841) et Astronomische Nachrichten, 1831 à 1842.
  2. Cette petite tache si caractéristique a été observée pour la première fois le 3 septembre 1798, par Schrœter. (Voy. plus haut, p. 74 la fig. 52 de cet astronome.) Elle a été observée aussi le lendemain 4 septembre (fig. 53) et le 2 octobre. Elle est aussi sur les deux dessins de Kunowsky, en 1821-22 (voy. fig. 65, p. 93). Mais quelles différences d’aspects !
  3. Tous les traités d’Astronomie, et même l’excellente Astronomie populaire d’Arago, ont reproduit, depuis 1840, cette carte avec cette erreur sans s’en apercevoir.
  4. Kœnigsberg Beobachtungen, t. XXIII, 1847, p. 94, 95.
  5. Astronomische Nachrichten, no 838, 1852, p. 351.
  6. Nous avons vu que Herschel avait trouvé :
    Longitude
    347° 47′
    Latitude
    159° 42′

    et Schrœter :

    Longitude
    352° 55′
    Latitude
    160° 33′
  7. On the extensive atmosphere of Mars. Philosophical Transactions, 1831, p. 417, — id. 1833, p. 15.
  8. Révolutions de la Mer, par Adhémar. 2e édition, p. 242. Paris, 1860.