L’Encyclopédie/1re édition/ELECTION
ELECTION, (Arithm. & Alg.) dans les nombres & les combinaisons, est la différente maniere de prendre quelques nombres ou quantités données, ou séparément, ou deux à deux, ou trois à trois, sans avoir égard à leurs places. Ainsi les quantités a, b, c, peuvent être prises de sept façons différentes, comme abc, ab, ac, bc, & a, b, c. Voyez Combinaison, Alternation, Permutation. (O)
Election, electio, en Théologie, signifie quelquefois prédestination à la grace & à la gloire, & quelquefois à la grace seulement, ou à la gloire seulement. Voyez Prédestination.
C’est un article de foi, que l’élection à la grace est purement gratuite & absolument indépendante de la prévision des mérites de l’homme. Mais c’est une question sur laquelle les Théologiens sont partagés, que de savoir si l’élection à la gloire est antécédente ou conséquente à la prévision des mérites de l’homme.
Ceux qui soûtiennent qu’elle est conséquente à cette prévision, ont pour eux plusieurs textes de l’Ecriture qui paroissent décisifs. Leurs adversaires trouvent dans la tradition, & sur-tout dans les écrits de S. Augustin, un grand nombre de passages favorables à l’élection antécédente à la prévision de nos bonnes œuvres : c’est ce qu’on appelle en termes d’école, electio ou prædestinatio ante vel post prævisa merita. Voyez Prédestination. (G)
Election impériale. Voyez Empereur & Electeurs.
Election d’ami ou en ami (Jurisprud.) ; ce terme est usité dans quelques provinces pour exprimer la déclaration que celui qui paroît être acquéreur ou adjudicataire d’un immeuble fait du nom du véritable acquéreur pour éviter doubles droits seigneuriaux. Le style usité dans quelques provinces est que l’acquéreur ou adjudicataire déclare dans le contrat ou dans l’adjudication, qu’il acquiert pour lui, son ami élû ou à élire ; ce qu’il stipule ainsi, afin de pouvoir faire ensuite son élection en ami ou déclaration du nom de celui au profit duquel l’acquisition doit demeurer. Les élections en ami sont usitées dans toutes les adjudications de biens qui se font par justice, ces sortes d’adjudications se faisant toûjours à un procureur, lequel à l’instant ou par un acte séparé déclare que l’adjudication à lui faite est pour un tel : ces élections en ami ont aussi lieu dans les ventes volontaires.
Au moyen de la déclaration ou élection en ami, il n’y a qu’une vente, & il n’en est point dû doubles droits ; mais il faut pour cela que l’élection en ami ou déclaration soit faite dans le tems fixé par la loi, coûtume ou usage des lieux ; autrement la déclaration seroit regardée comme une revente qui produiroit de nouveaux droits au profit du seigneur. Suivant le président Faber, l’acquéreur ou adjudicataire ne doit avoir que quarante jours pour faire sa déclaration, conformément aux lois du code, liv. jv. tit. 50. Si quis alteri vel sibi sub alterius nomine vel alia pecuniâ emerit. Dans quelques endroits, l’acquéreur a un an pour faire l’élection en ami ; dans d’autres, deux ans ou plus. (A)
Election en matiere bénéficiale (Jurisp.) est le choix qui est fait par plusieurs personnes d’un ecclésiastique, pour remplir quelque bénéfice, office ou dignité ecclésiastique.
Cette voie est la plus ancienne de toutes celles qui sont usitées pour remplir ces sortes de places, & elle remonte jusqu’à la naissance de l’Eglise.
La premiere élection qui fut faite de cette espece, fut après l’ascension de J. C. Les apôtres s’étant retirés dans le cénacle avec les autres disciples, la sainte Vierge, les saintes femmes, & les parens du Seigneur, S. Pierre leur proposa d’élire un apôtre à la place de Judas. Après avoir invoqué le Seigneur, ils tirerent au sort entre Barsabas & Mathias, & le sort tomba sur ce dernier. L’assemblée où cette élection fut faite, est comptée pour le premier concile de Jérusalem : tous les fideles, même les femmes, eurent part à l’élection.
Au second concile de Jérusalem, tenu dans la même année, on fit l’élection des premiers diacres.
Ce fut aussi dans le même tems & par voie d’élection que S. Jacques, surnommé le Mineur ou le Juste, fut établi premier évêque de Jérusalem.
A mesure que l’on établit des évêques dans les autres villes, ils furent élûs de la même maniere, c’est-à-dire par tous les fideles du diocèse assemblés à cet effet, tant le clergé que le peuple. Cette voie parut d’abord la plus naturelle & la plus canonique pour remplir les siéges épiscopaux, étant à présumer que celui qui réuniroit en sa faveur la plus grande partie de suffrages du clergé & du peuple, seroit le plus digne de ce ministere, & qu’on lui obéiroit plus volontiers.
Optat dit de Cécilien, qui fut Evêque de Carthage en 311, qu’il avoit été choisi par les suffrages de tous les fideles.
Ce fut le peuple d’Alexandrie qui voulut avoir S. Athanase, lequel fut fait évêque de cette ville en 326 ; & ce saint prélat dit, en parlant de lui-même, que s’il avoit mérité d’être déposé, il auroit fallu, suivant les constitutions ecclésiastiques, appeller le clergé & le peuple pour lui donner un successeur.
S. Léon, qui fut élevé sur le saint siége en 440, dit qu’avant de consacrer un évêque il faut qu’il ait l’approbation des ecclésiastiques, le témoignage des personnes distinguées, & le consentement du peuple.
S. Cyprien, qui vivoit encore en 545, veut que l’on regarde comme une tradition apostolique, que le peuple assiste à l’élection de l’évêque, afin qu’il connoisse la vie, les mœurs & la conduite de celui que les évêques doivent consacrer.
Cet usage fut observé tant en Orient que dans l’Italie, en France & en Afrique : le métropolitain & les évêques de la province assistoient à l’élection de l’évêque ; & après que le clergé & le peuple s’étoient choisi un pasteur, s’il étoit jugé digne de l’épiscopat, il étoit sacré par le métropolitain qui avoit droit de confirmer l’élection. Celle de métropolitain étoit confirmée par le patriarche ou par le primat, & l’élection de ceux-ci étoit confirmée par les évêques assemblés comme dans un concile ; le nouvel évêque, aussi-tôt après sa consécration, écrivoit une lettre au pape pour entretenir l’union de son église avec celle de Rome.
L’élection des évêques fut ainsi faite par le clergé & le peuple pendant les douze premiers siecles de l’Eglise. Cette forme fut autorisée en France par plusieurs conciles, notamment par le cinquieme concile d’Orléans en 549, par un concile tenu à Paris en 614 ; & Yves de Chartres assûre dans une de ses lettres, qu’il n’approuvera pas l’élection qui avoit été faite d’un évêque de Paris, à moins que le clergé & le peuple n’ait choisi la même personne, & que le métropolitain & les évêques ne l’ayent approuvée d’un consentement unanime.
On trouve néanmoins beaucoup d’exemples dans les premiers siecles de l’Eglise, d’évêques nommés sans élection ; le concile de Laodicée défendit même que l’évêque fût élû par le peuple.
Il y eut aussi un tems où les élections des évêques furent moins libres en France ; mais elle fut rétablie par un capitulaire de Louis le Débonnaire de l’an 822, que l’on rapporte au concile d’Astigni, n’ignorant pas, dit l’empereur, les sacrés canons ; & voulant que l’Eglise jouisse de sa liberté, nous avons accordé que les évêques soient élûs par le clergé & par le peuple, & pris dans le diocèse, en considération de leur mérite & de leur capacité, gratuitement & sans acception de personnes.
Les religieux avoient part à l’élection de l’évêque de même que les autres ecclésiastiques, tellement que le vingt-huitieme canon du concile de Latran tenu en 1139, défend aux chanoines (de la cathédrale) sous peine d’anathème, d’exclure de l’élection de l’évêque les hommes religieux.
Il faut néanmoins observer que dans les tems même où les évêques étoient élûs par le consentement unanime du clergé, des moines, & du peuple, les souverains avoient dès-lors beaucoup de part aux élections, soit parce qu’on ne pouvoit faire aucune assemblée sans leur permission, soit parce qu’en leur qualité de souverains & de protecteurs de l’Eglise ils ont intérêt d’empêcher qu’on ne mette point en place sans leur agrément, des personnes qui pourroient être suspectes ; le clergé de France a toûjours donné au Roi dans ces occasions des marques du respect qu’il lui devoit.
On trouve dès le tems de la premiere race, des preuves que nos rois avoient déjà beaucoup de part à ces élections. Quelques auteurs prétendent que les rois de cette race conféroient les évêchés à l’exclusion du peuple & du clergé, ce qui paroît néanmoins trop général. En effet, les lettres que Dagobert écrivit au sujet de l’ordination de Saint-Dizier de Cahors, à S. Sulpice & aux autres évêques de la province, font mention expresse du consentement du peuple ; & dans les conciles de ce tems on recommandoit la liberté des élections, qui étoit souvent mal observée ; ainsi l’usage ne fut pas toûjours uniforme sur ce point.
Il est seulement certain que depuis Clovis jusqu’en 590, aucun évêque n’étoit installé, sinon par l’ordre ou du consentement du Roi.
Grégoire de Tours, qui écrivoit dans le même siecle, fait souvent mention du consentement & de l’approbation que les rois de la premiere race donnoient aux évêques qui avoient été élûs par le clergé & par le peuple ; & Clotaire II. en confirmant un concile de Paris qui déclare nulle la consécration d’un évêque faite sans le consentement du métropolitain, des ecclésiastiques & du peuple, déclara que celui qui avoit été ainsi élû canoniquement, ne devoit être sacré qu’après avoir obtenu l’agrément du roi.
Dans les formules du moine Marculphe qui vivoit dans le septieme siecle, il y en a trois qui ont rapport aux élections. La premiere est l’ordre ou précepte par lequel le roi déclare au métropolitain, qu’ayant appris la mort d’un tel évêque, il a résolu, de l’avis des évêques & des grands, de lui donner un tel pour successeur. La seconde est une lettre pour un des évêques de la province. La troisieme est la requête des citoyens de la ville épiscopale, qui demandent au roi de leur donner pour évêque un tel dont ils connoissent le mérite ; ce qui suppose que l’on attendoit le consentement du peuple, mais que ce n’étoit pas par forme d’élection.
Il y eut même sous la premiere race plusieurs évêques nommés par le roi sans aucune élection précédente, comme S. Amant d’Utrecht & S. Leger d’Autun. La formule du mandement que le roi faisoit expédier sur cette nomination, est rapportée par Marculphe. Il y est dit que le roi ayant conféré avec les évêques & principaux officiers de sa cour, avoit choisi un tel pour remplir le siége vacant.
Cette maniere de pourvoir aux évêchés étoit quelquefois nécessaire, pour empêcher les brigues & la simonie : c’étoit aussi souvent la faveur seule qui déterminoit la nomination.
Charlemagne & Louis le Débonnaire firent tous leurs efforts pour rétablir l’ancienne discipline sur les élections. Le premier disposa néanmoins de plusieurs évêchés, par le conseil des prélats & des grands de sa cour, sans attendre l’élection du clergé & du peuple. Plusieurs croyent qu’il en usa ainsi du consentement de l’Eglise, pour remédier aux maux dont elle étoit alors affligée : il rendit même à plusieurs églises la liberté des élections, par des actes exprès.
Il y eut sous cette seconde race plusieurs canons & capitulaires, faits pour conserver l’usage des élections ; mais ce fut toûjours sans donner atteinte aux droits. On tenoit alors pour principe qu’en cas de trouble & d’abus le roi pouvoit nommer à l’évêché ; tellement que l’évêque-visiteur avertissoit ceux qui devoient élire, que s’ils se laissoient séduire par quelque moyen injuste, l’empereur nommeroit sans contrevenir aux canons.
Les choses changerent bien de forme sous la troisieme race ; les chapitres des cathédrales s’attribuerent le droit d’élire seuls les évêques, privativement au reste du clergé & au peuple. Au commencement du xiij. siecle ils étoient déjà en possession d’élire ainsi seuls l’évêque & les métropolitains ; de confirmer seuls l’élection, sans appeller leurs suffragans, comme il paroît par le concile de Latran, tenu en 1215. Les papes, auxquels on s’adressoit ordinairement lorsqu’il y avoit contestation sur la confirmation des évêques, firent de ce droit une cause majeure réservée au saint siége : les droits du roi furent cependant toûjours conservés.
Lorsque Philippe Auguste partit pour son expédition d’outre-mer, entre les pouvoirs qu’il laissa pour la régence du royaume à sa mere & à l’archevêque de Reims, il marqua spécialement celui d’accorder aux chapitres des cathédrales la permission d’élire un évêque.
S. Louis accorda le même pouvoir à la reine sa mere, lorsqu’il l’établit régente du royaume. Il ordonna cependant par la pragmatique sanction qu’il fit dans le même tems, en 1268, que les églises cathédrales & autres auroient la liberté des élections.
L’élection des abbés étoit reglée sur les mêmes principes que celle des évêques. Les abbés étoient élûs par les moines du monastere qu’ils devoient gouverner. Ils étoient ordinairement choisis entre les moines de ce monastere ; quelquefois néanmoins on les choisissoit dans un monastere voisin, ou ailleurs. Avant de procéder à l’élection, il falloit obtenir le consentement du roi ; & celui qui étoit élû abbé, ne pouvoit aussi avoir l’agrément du roi, avant d’être confirmé & beni par l’évêque.
Les autres bénéfices, offices & dignités étoient conférés par les supérieurs ecclésiastiques ; savoir les bénéfices séculiers par l’évêque, & les réguliers par les abbés, chacun dans leur dépendance. Les uns & les autres n’agissoient dans leur choix qu’avec connoissance de cause, & ne se déterminoient que par le mérite du sujet. L’évêque choisissoit ordinairement des prêtres & des clercs entre les plus saints moines ; les abbés y consentoient pour le bien général de l’église, qu’ils préféroient à l’avantage particulier de leur monastere.
Il y avoit dans le xij. siecle une grande confusion dans les élections pour les prélatures ; chaque église avoit ses regles & ses usages, qu’elle changeoit selon les brigues qui prévaloient.
Ce fut pour remédier à ces desordres, que le quatrieme concile de Latran, tenu en 1215, fit une regle générale, suivant laquelle on reconnoît trois formes différentes d’élections, qui sont rapportées aux decrétales, liv. I. tit. vj. capit. quia propter.
La premiere est celle qui se fait par scrutin.
La seconde est de nommer des commissaires, auxquels tout le chapitre donne pouvoir d’élire en son lieu & place.
La troisieme forme d’élection est celle qui se fait par une espece d’inspiration divine, lorsque par acclamation tous les électeurs se réunissent pour le choix d’un même sujet.
Ce même concile de Latran, celui de Bourges en 1276, celui d’Ausch en 1300 ; les conciles provinciaux de Narbonne & de Toulouse, tenus à Lavaur en 1368, déclarent nulle toute élection faite par abus de l’autorité séculiere ou ecclésiastique.
La liberté des élections ayant encore été troublée en France par les entreprises des papes, sur-tout depuis que Clément V. eut transféré le saint siége à Avignon, le concile de Constance en 1418, & celui de Basle en 1431, tenterent toutes sortes de voies pour rétablir l’ancienne discipline.
Les difficultés qu’il y eut par rapport à ces conciles, firent que Charles VII. convoqua à Bourges en 1438 une assemblée de tous les ordres du royaume, dans laquelle fut dressée la pragmatique sanction, laquelle entr’autres choses rétablit les élections dans leur ancienne pureté. L’assemblée de Bourges permit aux rois & aux princes de leur sang, d’employer leurs recommandations auprès des électeurs, en faveur des personnes qui auroient rendu service à l’état.
Nos rois continuerent en effet d’écrire des lettres de cette nature, & de nommer des commissaires pour assister à l’élection.
Les papes cependant firent tous leurs efforts pour obtenir la révocation de la pragmatique, ainsi qu’on le dira au mot Pragmatique.
Enfin en 1516 François I. voulant prévenir les suites fâcheuses que les différends de la cour de France avec celle de Rome pouvoient occasionner, fit avec Léon X. une espece de transaction, connue sous le nom de concordat.
On y fait mention des fraudes & des brigues qui se pratiquoient dans les élections, & il est dit que les chapitres des églises cathédrales de France ne procéderont plus à l’avenir, le siége vacant, à l’élection de leurs évêques ; mais que le roi sera tenu de nommer au pape, dans les six mois de la vacance, un docteur ou licentié en Théologie ou en Droit canonique, âgé de 27 ans au moins, pour en être pourvû par le pape ; que si la personne nommée par le roi n’a pas les qualités requises, le roi aura encore trois mois pour en nommer une autre, à compter du jour que le pape aura fait connoître les causes de récusation ; qu’après ces trois mois il y sera pourvû par le pape ; que les élections qui se feront au préjudice de ce traité, seront nulles ; que les parens du roi, les personnes éminentes en savoir & en doctrine, & les religieux mandians, ne sont point compris dans la rigueur de cet article ; que pour les abbayes & prieurés conventuels vraiment électifs, il en sera usé comme aux évêchés, à l’exception de l’âge, qui sera fixé à vingt-trois ans ; que si le roi nomme aux prieurés un séculier ou un religieux d’un autre ordre, ou un mineur de vingt-trois ans, le pape se réserve le droit de le refuser, & d’en nommer un autre après les neuf mois passés, en deux termes, comme dans les évêchés. Il est dit que l’on n’entend pas néanmoins déroger par cet article, aux priviléges dont joüissent quelques chapitres & quelques monasteres qui se sont maintenus en possession d’élire leurs prélats & leurs supérieurs, en gardant la forme prescrite par le chapitre quia propter.
Sur la maniere dont le Roi en use pour les nominations, voyez Evêchés & Nomination royale.
Le clergé de France a renouvellé en plusieurs occasions ses vœux pour le rétablissement des élections à l’égard des évêchés, abbayes & autres prélatures, comme on le voit dans le cahier qu’il présenta aux états d’Orléans en 1560 ; dans celui qu’il dressa pour être présenté aux états de Blois ; dans le concile de Roüen en 1581, celui de Reims en 1583, le cahier de l’assemblée générale du clergé en 1595, & celui de l’assemblée de 1605.
L’article 1. de l’ordonnance d’Orléans, en 1560, porte que les archevêques & évêques seront desormais élûs & nommés ; savoir, les archevêques par les évêques de la province & par le chapitre de la métropole ; les évêques, par l’archevêque, les évêques de la province, & les chanoines de l’église cathédrale appellés avec eux ; douze gentilshommes qui seront élûs par la noblesse du diocèse, & douze notables bourgeois élûs en l’hôtel de la ville archiépiscopale ou épiscopale : tous lesquels s’accorderont de trois personnages de qualités requises, âgés au moins de trente ans, qu’ils présenteront à Sa Majesté, qui choisira l’un des trois.
L’exécution de cette ordonnance a été commandée par l’art. 36 de celle de Roussillon ; cependant cet article de l’ordonnance d’Orléans & plusieurs autres ne s’observent point.
Ainsi les évêchés ne sont plus électifs.
A l’égard des abbayes, toutes celles qui étoient électives, sont assujetties par le concordat à la nomination royale, à l’exception seulement des chefs d’ordre & des quatre filles de Cîteaux. On suit encore dans ces abbayes, pour les élections, les regles prescrites par la pragmatique sanction.
Pour ce qui est des dignités des chapitres, qui sont électives, des généraux d’ordres réguliers qui n’ont pas le titre d’abbés, & des abbayes triennales électives, les élections dépendent en partie des usages & statuts particuliers de chaque église, congrégation ou communauté.
Il y a néanmoins plusieurs regles tirées du droit canonique, qui sont communes a toutes les élections.
On ne peut valablement faire aucun acte tendant à l’élection d’un nouvel abbé, ou autre bénéficier ou officier, jusqu’à ce que la place soit vacante, soit par mort ou autrement.
Avant de procéder à l’élection dans les abbayes qui sont électives, il faut que le chapitre obtienne le consentement du roi, lequel peut nommer un commissaire pour assister à l’élection, à l’effet d’empêcher les brigues, & de faire observer ce qui est prescrit par les canons & les ordonnances du royaume.
Pour que l’élection soit canonique, il faut y appeller tous ceux qui ont droit de suffrage ; les absens doivent être avertis, pourvû qu’ils ne soient pas hors du royaume.
Ceux qui sont retenus ailleurs par quelqu’empêchement légitime, ne peuvent donner leur suffrage par lettres ; mais ils peuvent donner leur procuration à cet effet à un ou plusieurs des capitulans, pourvû néanmoins qu’ils donnent à chacun d’eux solidairement le droit de suffrage ; & dans ce cas le chapitre peut choisir entr’eux celui qu’il juge à-propos, pour représenter l’absent. Celui-ci peut aussi donner pouvoir à quelqu’un qui n’est pas de gremio, si le chapitre veut bien l’agréer. Le fondé de procuration ne peut nommer qu’une seule personne, soit que la procuration marque le nom de la personne qu’il doit nommer, ou qu’elle soit laissée à son choix.
Si l’on omettoit d’appeller un seul capitulant, ou qu’il n’eût pas été valablement appellé, l’élection seroit nulle, à moins que pour le bien de la paix il n’approuvât l’élection.
Il suffit au reste d’avoir appellé à l’élection ceux qui y ont droit de suffrage ; s’ils négligent de s’y trouver, ou si après y avoir assisté, ils se retirent avant que l’élection soit consommée, & même avant d’avoir donné leur suffrage, ils ne peuvent sous ce prétexte contester l’élection.
Les chapitres des monasteres doivent procéder à l’élection de l’abbé dans les trois mois de la vacance, à moins qu’il n’y ait quelqu’empêchement légitime ; autrement le droit d’y pourvoir est dévolu au supérieur immédiat.
Le tems fixé par les canons pour procéder à l’élection, court contre les électeurs, du jour qu’ils négligent de faire lever l’empêchement qui les arrête.
Le concile de Basle veut que les électeurs, pour obtenir du ciel les lumieres & les graces dont ils ont besoin, entendent avant l’élection la messe du saint Esprit ; qu’ils se confessent & communient ; & que ceux qui ne satisferont pas à ces devoirs, soient privés de plein droit de la faculté d’élire, pour cette fois.
Chaque électeur doit faire serment entre les mains de celui qui préside, qu’il choisira celui qu’il croira en conscience pouvoir être le plus utile à l’Eglise pour le spirituel & le temporel, & qu’il ne donnera point son suffrage à ceux qu’il saura avoir promis ou donné directement ou indirectement quelque chose de temporel pour se faire élire. L’abus ne seroit pas moins grand de donner ou promettre dans la même vûe quelque chose de spirituel.
Ceux qui procedent à l’élection, doivent faire choix d’une personne de bonnes mœurs, qui ait l’âge, & les autres qualités & capacités prescrites par les canons, & par les autres lois de l’église & de l’état.
Il est également défendu par les canons, d’élire ou d’être élû par simonie : outre l’excommunication que les uns & les autres encourent par le seul fait, les électeurs perdent pour toûjours le droit d’élire ; & ceux qui sont ainsi élûs, sont incapables de remplir jamais la dignité, le bénéfice ou office auxquels ils ont aspiré.
Lorsque les suffrages ont été entraînés par l’impression de quelque puissance séculiere, l’élection est nulle : les électeurs doivent même être suspens pendant trois années de leur ordre & bénéfices, même du droit d’élire ; & si celui qui a été ainsi élû, accepte sa nomination, il ne peut sans dispense être élû pour une autre dignité, office ou bénéfice ecclésiastique. Mais on ne regarde point comme un abus les lettres que le roi peut écrire aux électeurs, pour leur recommander quelque personne affectionnée au service de l’église, du roi & de l’état.
Les novices ni les freres convers ne donnent point ordinairement leurs voix pour l’élection d’un abbé ou autre supérieur : il y a néanmoins des monasteres de filles, tels que ceux des Cordelieres, où les sœurs converses sont en possession de donner leur voix pour l’élection de l’abbêsse.
Quant à la forme de l’élection, on doit suivre une des trois qui sont prescrites par le jv. concile de Latran, suivant ce qui a coûtume de s’observer dans chaque église ou monastere.
On distingue dans les élections la voix active & la voix passive ; la premiere est le suffrage même de chaque électeur, considéré par rapport à celui qui le donne, & en tant qu’il a droit de le donner ; la voix passive est ce même suffrage considéré par rapport à celui en faveur duquel il est donné. Il y a des capitulans qui ont voix active & passive, c’est-à-dire qui peuvent élire & être élûs ; d’autres qui ont voix active seulement, sans pouvoir être élûs, tels que ceux qui ont passé par certaines places auxquelles ils ne peuvent être promûs de nouveau, ou du moins seulement après un certain tems : enfin ceux qui sont de la maison, sans être capitulans, n’ont point voix active ni passive ; ceux qui sont suspens ne peuvent pareillement élire ni être élûs.
Ceux qui ont voix active, doivent tous donner leurs suffrages en même tems & dans le même lieu.
Les suffrages doivent être purs & simples ; on ne reçoit point ceux qui seroient donnés sous condition, ou avec quelqu’alternative ou autre clause qui les rendroit incertains.
L’élection doit être publiée en la forme ordinaire, aussi-tôt que tous les capitulans ont donné leurs suffrages, afin d’éviter toutes les brigues & les fraudes ; & ce seroit une nullité de différer la publication, pour obtenir préalablement le consentement de celui qui est élû.
L’élection étant notifiée à celui qui a été élû, il doit dans un mois, à compter de cette notification, accepter ou refuser ; ce délai expiré, il est déchû de son droit, & le chapitre peut procéder à une nouvelle élection.
Ce délai d’un mois ne court à l’égard des réguliers élûs, que du jour qu’ils ont pû obtenir le consentement de leur supérieur.
Quand le scrutin est publié, les électeurs ne peuvent plus varier ; & ceux qui ont donné leur voix à celui qui est élû, ou qui ont consenti à l’élection, ne peuvent l’attaquer sous prétexte de nullité, à moins que ce ne soit en vertu de moyens dont ils n’avoient pas conoissance lorsqu’ils ont donné leur suffrage ou consentement.
Il ne suffit pas pour être élû, d’avoir le plus grand nombre de voix, il faut en avoir seul plus de la moitié de la totalité. Si les voix sont partagées entre plusieurs, de maniere qu’aucun d’eux n’en ait plus de la moitié, il faut procéder à une nouvelle élection, quand même la plus grande partie du chapitre se réuniroit depuis la publication du scrutin, en faveur de celui qui avoit seulement le plus grand nombre de voix.
Néanmoins dans l’élection d’une abbêsse, quand le plus grand nombre de voix données à une même personne, ne fait pas la moitié, les autres religieuses peuvent s’unir au plus grand nombre, même après le scrutin ; & s’il y en a assez pour faire plus de la moitié des voix, celle qui est élûe peut être confirmée par le supérieur, sauf à faire juger l’appel, si les opposantes à l’élection & confirmation veulent le soûtenir.
Si dans ce même cas les religieuses ne se réunissent pas jusqu’à concurrence de plus de la moitié, le supérieur, avant de confirmer & benir celle qui a eu le plus de voix, doit examiner l’élection, & les raisons de celles qui ne veulent pas s’unir ; & néanmoins par provision la religieuse nommée par le plus grand nombre, gouverne le temporel & le spirituel ; mais elle ne peut faire aucune aliénation, ni recevoir de religieuses à la profession.
La plus grande partie du chapitre nommant une personne indigne, est privée pour cette fois de son droit d’élire ; & dans ce cas l’élection faite par la moindre partie, subsiste.
Quoiqu’un des capitulans ait nommé une personne indigne, il n’est point privé de son droit d’élire, si le scrutin où il a donné sa voix, n’est point suivi d’une élection valable.
Quand les électeurs ont nommé un ou plusieurs compromissaires, ils doivent reconnoître celui que les compromissaires ont nommé, pourvû qu’il ait les qualités requises.
Les compromissaires ayant commencé à procéder à l’élection, le chapitre ne peut plus les révoquer, attendu que les choses ne sont plus entieres.
Si les compromissaires choisissent une personne indigne, le droit d’élire retourne au chapitre : il en est de même lorsque celui qui est nommé refuse d’accepter.
Mais lorsque les compromissaires négligent de faire l’élection dans le tems prescrit par les canons, alors le droit d’élire est dévolu au supérieur, & non au chapitre, qui doit s’imputer de s’en être rapporté à des mandataires négligens.
L’élection étant faite par des compromissaires, un d’entr’eux doit aussi-tôt la publier.
S’il arrive que l’élection soit cassée par un défaut de forme seulement, & non pour incapacité de la personne élûe, la même personne peut être élûe de nouveau.
En cas d’appel de l’élection, on ne peut procéder à une nouvelle, qu’il n’ait été statué sur la premiere.
Quand la premiere élection n’a pas lieu, sans que les électeurs soient déchûs de leur droit, ils ont pour procéder à une nouvelle élection, le même délai qu’ils avoient eu pour la premiere, à compter du jour qu’il a été constant que celle-ci n’auroit point d’effet.
Ceux qui ne peuvent être élûs peuvent être postulés, c’est-à-dire demandés au supérieur, quand les qualités qui leur manquent sont telles, que le supérieur en peut dispenser ; mais le même électeur ne peut pas élire & postuler une même personne. Voyez Postulation.
Il n’est pas permis à celui qui est élû, de faire aucune fonction avant d’être confirmé, à peine de nullité. Le pape est le seul qui n’ait pas besoin de confirmation. Voyez au mot Pape.
Avant de confirmer celui qui est élû, le supérieur doit d’office examiner s’il est de bonnes mœurs & de bonne doctrine ; s’il a les qualités & capacités requises, quand même personne ne critiqueroit l’élection.
Cette information de vie & mœurs doit se faire dans les lieux où celui qui est élû demeuroit depuis quelques années.
Il y a des abbés dont l’élection doit être confirmée par l’évêque diocésain, d’autres par leur général, d’autres par le pape dont ils relevent immédiatement.
Le chapitre, sede vacante, a droit de confirmer les élections que l’évêque auroit confirmées.
Les abbés triennaux n’ont pas besoin de confirmation pour gouverner le spirituel, non plus que pour le temporel.
La confirmation doit être demandée par celui qui est élû, dans les trois mois du jour du consentement qu’il a donné à l’élection, à moins qu’il ne soit retenu par quelqu’empêchement légitime ; autrement il est déchû de son droit, & l’on peut procéder à une nouvelle élection.
Telles sont les regles générales que l’on suit pour les élections ; elles reçoivent néanmoins diverses exceptions, suivant les statuts particuliers, priviléges & coûtumes de chaque monastere, pourvû que ces usages soient constans, & qu’ils n’ayent rien de contraire au droit naturel ni au droit divin.
Il y a des bénéfices électifs, sur lesquels il faut la confirmation du supérieur ; d’autres qui sont purement collatifs ; d’autres enfin qui sont électifs-collatifs, c’est-à-dire que le chapitre confere en élisant, sans qu’il soit besoin d’autre collation.
Sur les élections, voyez aux decrétales le titre de electione & electi potestate ; la bibliotheque canonique de Bouchel, & les définitions canoniques & la jurisprudence canonique, au mot Election ; l’hist. du droit ecclésiastique, par M. Fleury, tome I. chap. x. les lois ecclésiastique de M. d’Héricourt, titre de l’élection. (A)
Election de Domicile, (Jurispr.) est le choix que l’on fait d’un domicile momentané ou ad hoc, c’est-à-dire qui n’est pas le vrai & actuel domicile, mais qui a seulement pour objet d’indiquer un lieu où on puisse faire des offres ou autres actes. Ces élections de domicile se font dans les exploits, dans les contrats. Voyez Domicile élu.
Election d’héritier, (Jurispr.) est le choix de celui qui doit recueillir une succession. Ce choix est ordinairement fait par celui qui dispose de ses biens par son testament : quelquefois il est fait par contrat de mariage ; ou bien le pere mariant un de ses enfans, se réserve la liberté de nommer pour héritier tel de ses enfans qu’il jugera à-propos.
Quelquefois le testateur défere par testament le choix de son héritier à une autre personne, soit en lui indiquant plusieurs personnes entre lesquelles elle pourra choisir, soit en lui laissant la liberté entiere de choisir qui bon lui semblera ; & quelquefois cette même personne à laquelle le testateur donne pouvoir d’élire, est par lui d’abord instituée héritiere, à la charge de remettre l’hoirie à un de ceux qui sont indiques, ou à telle personne qu’elle jugera à-propos.
Le testateur peut aussi instituer héritier celui qui sera nommé par la personne à laquelle il donne ce pouvoir.
Ces sortes de dispositions sont fort usitées dans les pays de droit écrit, où il est assez ordinaire que le mari & la femme s’instituent réciproquement héritier, à la charge de remettre l’hoirie à tel de leurs enfans que le survivant jugera à-propos.
Lorsque celui qui avoit le pouvoir d’élire, décede sans avoir fait son choix, tous les héritiers présomptifs succedent également.
Le conjoint survivant qui avoit le pouvoir d’élire, ne le perd point en se remariant.
Quand un des enfans éligibles vient à décéder, le pere ou la mere qui a le droit d’élire, peut choisir l’enfant de celui qui étoit éligible. Voyez la trente-quatrieme consultation de Cochin, tome II.
L’élection étant une fois consommée par un acte entre-vifs, celui qui l’a faite ne peut plus varier ; mais si c’est par testament, l’élection est révocable jusqu’au décès de celui qui l’a faite, de même que le surplus de son testament. Voyez Henrys, tome I. liv. IV. ch. vj. quest. 67. & liv. V. quest. 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. 61. 62. & tome II. liv. V. quest. 10. 12. 51. 52. 53. 58. & liv. VI. quest. 52. & son quatrieme plaidoyer ; le traité des élections d’héritier contractuelles & testamentaires, par M. Vulson conseiller au parlement de Grenoble. (A)
Election de Tuteur ou Curateur, est le choix qui est fait d’un tuteur ou curateur par les parens & amis de celui auquel on le donne. Voyez Curateur & Tuteur. (A)
Election d’un Officier, est la nomination qui est faite de quelqu’un à un office public par le suffrage de plusieurs personnes.
Romulus accorda au peuple le droit de se choisir ses magistrats, même les sénateurs, ce qui se faisoit dans ces assemblées publiques appellées comices ; & lorsque l’état monarchique de Rome fut changé en république, le peuple élisoit aussi lui-même les consuls, qui étoient chargés du gouvernement général de l’état.
Comme il étoit difficile d’assembler souvent le peuple, il n’élisoit que les grands officiers, & ceux-ci commettoient chacun dans leur département les moindres officiers qui leur étoient subordonnés.
Les empereurs ayant ôté au peuple le droit d’élection, conféroient les grands offices par l’avis des principaux de leur cour, afin de conserver encore quelque forme d’élection, c’est pourquoi ils appelloient suffrages les avis & recommandations des courtisans.
On en usa d’abord de même en France pour les offices, c’est-à-dire que nos rois y nommoient par l’avis de leur conseil, ce qui étoit une espece d’élection.
Quand le parlement eut été rendu sédentaire à Paris, Philippe de Valois, par des lettres du mois de Février 1327, donna pouvoir au chancelier, en appellant avec lui quatre conseillers au parlement & le prevôt de Paris, de nommer, c’est-à-dire d’élire entr’eux les conseillers au châtelet.
Charles V. ordonna en 1355, que le chancelier, les présidens, & conseillers du parlement seroient élus par scrutin au parlement ; Charles VI. ordonna encore la même chose en 1400, ce qui dura jusqu’au mariage d’Henri roi d’Angleterre avec Catherine de France fille de Charles VI ; alors le parlement nomma trois personnes au roi qui donnoit des provisions à l’un des trois ; mais comme le parlement pour se conserver l’élection nommoit ordinairement deux sujets inconnus & incapables afin de faire tomber la nomination sur le troisieme, Charles VII. lui ôta les élections, & rentra en possession de nommer aux places vacantes du parlement de même qu’aux autres offices, & nos rois choisissoient les officiers de l’avis de leur conseil, ce qui dura ainsi jusqu’à la vénalité des charges.
Dès le premier tems de la monarchie, il y avoit dans chaque ville & bourg des officiers municipaux qui étoient électifs, appellés en quelques endroits échevins, en d’autres jurés ou jurats, en d’autres consuls, & à Toulouse capitouls. Ces officiers sont encore la plûpart élûs par le peuple, conformément aux intentions du roi.
Les élûs qui étoient autrefois choisis par les trois états pour le gouvernement des aides & tailles, ont depuis été érigés en titre d’office : il y a néanmoins encore des élûs dans les pays d’états qui sont électifs. Voyez Elections, Elus, & Etats. (A)
Election, (Jurisprud.) ce sont des jurisdictions royales, ainsi nommées à cause des élûs qui y connoissent en premiere instance des contestations qui s’élevent au sujet des tailles, de toutes matieres d’aides, & autres impositions & levées des deniers du roi, tant aux entrées des villes que des fermes du roi, à l’exception des domaines & droits domaniaux, droits de gabelle, capitation, dixieme, vingtieme, cinquantieme, & deux sous pour livre, lorsque ces impositions ont lieu.
Ils connoissoient cependant aussi autrefois des gabelles ; mais depuis long tems il y a des juges particuliers pour cet objet, excepté dans quelques endroits où les greniers à sel sont unis aux élections.
Il y a aussi en certains endroits des juges des traites foraines, & des juges pour la marque des fers.
Avant l’institution des élûs c’étoient les maire & échevins des villes qui se mêloient de faire l’assiete & levée des impositions, ils en étoient même responsables ; mais dans la suite ne pouvant vaquer à cette levée, & étant occupés à d’autres affaires de la commune, on fit choix dans le peuple d’autres personnes pour prendre soin de l’assiete & levée des impositions ; & ces personnes furent nommées élûs à cause qu’on les établissoit par élection.
L’origine des élections est la même que celle des élûs ou juges, dont ces tribunaux sont composés.
Quelques uns rapportent ce premier établissement des élûs à celui des aides du tems du roi Jean ; il est néanmoins certain qu’il y avoit déjà depuis long-tems des élûs pour veiller sur les impositions ; mais comme il n’y avoit point encore d’impositions ordinaires, & que nos rois n’en levoient qu’en tems de guerre ou pour d’autres dépenses extraordinaires, la commission de ces élûs ne duroit que pendant la levée de l’imposition.
Dès le tems de Louis IV. Denis Hesselin étoit élû à Paris, ainsi que le remarque l’auteur du traité de la pairie, pag. 158.
S. Louis voulant que les tailles fussent imposées avec justice, fit en 1270 un réglement pour la maniere de les asseoir dans les villes royales ; il ordonna qu’on éliroit trente hommes ou quarante plus ou moins, bons & loyaux par le conseil des prêtres, c’est-à-dire des curés de leurs paroisses, & des autres hommes de religion, ensemble des bourgeois & autres prudhommes, selon la grandeur des villes ; que ceux qui seroient ainsi élus jureroient sur les saints évangiles d’élire, soit entr’eux ou parmi d’autres prudhommes de la même ville, jusqu’à douze hommes, qui seroient les plus propres à asseoir la taille ; que les douze hommes nommés jureroient de même de bien & diligemment asseoir la taille, & de n’épargner ni grever personne par haine, amour, priere, crainte, ou en quelqu’autre maniere que ce fût ; qu’ils asseoiroient ladite taille à leur volonté la livre également ; qu’avec les douze hommes dessus nommés seroient élus quatre bons hommes, & seroient écrits les noms secretement ; & que cela seroit fait si sagement, que leur élection ne fût connue de qui que ce fût jusqu’à ce que ces douze hommes eussent assis la taille. Que cela fait, avant de mettre la taille par écrit, les quatre hommes élus pour faire loyalement la taille n’en devoient rien dire jusqu’à ce que les douze hommes leur eussent fait faire serment pardevant la justice de bien & loyalement asseoir la taille en la maniere que les douze hommes l’auroient ordonné.
Il paroît suivant cette ordonnance, que les trente ou quarante hommes qui étoient d’abord élus, sont aujourd’hui représentés par les officiers des élections ; les douze hommes qu’on élisoit ensuite étoient proprement les asséeurs des tailles, dont la fonction est aujourd’hui confondue avec celle des collecteurs ; enfin les quatre bons hommes élus étoient les vérificateurs des rôles.
Les tailles furent donc la matiere dont les élûs ordonnerent d’abord ; mais outre que les tailles n’étoient pas encore ordinaires, la forme prescrite pour leur assiete ne fut pas toûjours observée ; car Philippe III, dans une ordonnance du 29 Novembre 1274, dit que les consuls de Toulouse devoient s’abstenir de la contribution qu’ils demandoient aux ecclésiastiques pour les tailles, à moins que ce ne fût une charge réelle & ancienne : il sembleroit par-là que c’étoient les consuls qui ordonnoient de la taille, soit ancienne ou nouvelle lorsqu’elle avoit lieu, ce qui fait penser qu’il y avoit alors des tailles non royales imposées de l’ordre des villes pour subvenir à leurs dépenses particulieres, ce qui est aujourd’hui représenté par les octrois.
Louis Hutin, dans une ordonnance du mois de Décembre 1315, & Philippe V. dans une autre du mois de Mars 1316, disent que les clercs non mariés ne contribueront point aux tailles, & que les officiers du roi, officiales nostri, entant qu’à eux appartient, ne les y contraindront point & ne permettront pas qu’on les y contraigne. Ces ordonnances ne font point mention des élus, ce qui donne lieu de croire qu’ils n’avoient point encore de jurisdiction formée, & que pour les contraintes on s’adressoit aux juges ordinaires ; & en effet on a vû que c’étoit devant eux que les élûs prêtoient serment.
Il y avoit encore des élus du tems de Philippe de Valois pour la taille non royale qui se levoit dans certaines villes, comme il paroît par une ordonnance de ce prince du mois de Mars 1331, touchant la ville de Laon, où il est parlé des élus de cette ville : ces officiers n’étoient pas seulement chargés du soin de cette taille ; l’ordonnance porte que dorénavant, de trois en trois ans, le prevôt fera assembler le peuple de Laon, & en sa présence fera élire six personnes convenables de ladite ville, dont ils en feront trois leurs procureurs pour conduire toutes les affaires de la ville, que les trois autres élus avec le prevôt visiteroient chaque année autant de fois qu’il seroit nécessaire les murs, les portes, les forteresses, les puits, fontaines, chaussées, pavés, & autres aisances communes de la ville, & verroient les réparations nécessaires, &c.
Que toutes les fois qu’il seroit métier de faire taille, le prevôt avec ces trois élus exposeroit au peuple les causes pour lesquelles il conviendroit faire taille, qu’ensuite le prevôt & lesdits élus prendroient de chaque paroisse deux ou trois personnes de ceux qui peuvent le mieux savoir les facultés de leurs voisins ; lesquelles personnes & lesdits élus ayant prêté serment sur les saints évangiles de ne charger ni décharger personne à leur escient, contre raison, le prevôt feroit imposer & asseoir la taille sur toutes les personnes qui en sont tenues ; que l’imposition seroit levée par les trois élus, qui en payeroient les rentes & les dettes de la ville ; qu’à la fin des trois années susdites ils compteroient de leur recette, tant des tailles que d’ailleurs, pardevant le prevôt ou bailli de Vermandois, qui viendroit oüir ce compte à Laon & y appelleroit les bonnes gens de la ville ; enfin que le compte rendu & appuré seroit envoyé par le bailli en la chambre des comptes pour voir s’il n’y avoit rien à corriger. On voit que ces élus faisoient eux-mêmes la recette des tailles pendant trois ans, c’est pourquoi ils étoient comptables, & en cette partie ils sont représentés par les receveurs des octrois, qui comptent encore aujourd’hui à la chambre.
A l’égard des subventions qui se levoient pour les besoins de l’état par le ministere des élus de chaque ville ou diocese, on établissoit quelquefois au-dessus d’eux une personne qualifiée, qui avoit le titre d’élu de la province, pour avoir la surintendance de la subvention ; c’est ainsi que lors de la guerre de Philippe de Valois contre les Anglois, Gaucher de Chatillon connétable de France fut élu par la province de Picardie, pour avoir la surintendance de la subvention qu’on y levoit, ce qu’il accepta sous certains gages ; l’auteur du traité de la pairie, pag. 58, dit en avoir vû les quittances, où il est qualifié d’élû de la province.
Il est encore parlé de tailles dans des lettres de Philippe de Valois, du mois d’Avril 1333, mais il n’y est pas parlé d’élus. Ces lettres, qui ont principalement pour objet la répartition d’une imposition de cent cinquante mille livres sur la sénéchaussée de Carcassonne, ordonnent seulement au sénéchal de faire appeller à cet effet pardevant lui ceux des bonnes gens du pays qu’il voudra.
On établit aussi des députés ou élus à l’occasion des droits d’aides, dont la levée fut ordonnée sur toutes les marchandises & denrées qui seroient vendues dans le royaume, par une ordonnance du roi Jean, du 28 Décembre 1355. Il y avoit bien eu déjà quelques aides ou subventions levées en tems de guerre sur tous les sujets du roi à proportion de leurs biens ; mais ces nouveaux droits d’aides auxquels ce nom est dans la suite demeuré propre, étoient jusqu’alors inconnus.
L’ordonnance du roi Jean porte que pour obvier aux entreprises de ses ennemis (les Anglois), il avoit fait assembler les trois états du royaume, tant de la Languedoïl que du pays coûtumier, que la guerre avoit été résolue dans l’assemblée des états ; que pour faire l’armée & payer les frais & dépens d’icelle, les états avoient avisé que par tout le pays coûtumier il seroit mis une gabelle sur le sel, & aussi sur tous les habitans marchandans & repairans en icelui, il seroit levé une imposition de huit deniers pour livre sur toutes choses qui seroient vendues audit pays, excepté vente d’héritages seulement, laquelle seroit payée par le vendeur ; que ces gabelle & imposition seroient levées selon certaines instructions qui seroient faites sur ce ; que par les trois états seroient ordonnées & députées certaines personnes bonnes & honnêtes, solvables, loyales, & sans aucun soupçon, qui par les pays ordonneroient les choses dessus dites, qui auroient receveurs & ministres selon l’ordonnance & instruction qui seroit sur ce faite ; qu’outre les commissaires ou députés particuliers des pays & des contrées seroient ordonnés & établis par les trois états neuf personnes bonnes & honnêtes, qui seroient généraux & superintendans sur tous les autres, & qui auroient deux receveurs généraux.
Qu’aux députés dessus dits, tant généraux que particuliers, seroient tenus d’obéir toutes manieres de gens de quelque état ou condition qu’ils fussent & quelque privilége qu’ils eussent ; qu’ils pourroient être contraints par lesdits députés par toutes voies & manieres que bon leur sembleroit ; que s’il y en avoit aucun rebelle que les députés particuliers ne pussent contraindre, ils les ajourneroient pardevant les généraux superintendans, qui les pourroient contraindre & punir selon ce que bon leur sembleroit, & que ce qui seroit fait & ordonné par les généraux députés vaudroit & tiendroit comme arrêt de parlement.
Il est encore dit un peu plus loin, que lesdites aides & ce qui en proviendroit ne seroient levées ni distribuées par les gens (du roi) ni par ses thrésoriers & officiers, mais par autres bonnes gens, sages, loyaux, & solvables, ordonnés, commis, & députés par les trois états, tant ès frontieres qu’ailleurs où il conviendroit de les distribuer ; que ces commis & députés jureroient au roi ou à ses gens, & aux députés des trois états, que quelque nécessité qui advînt, ils ne donneroient ni ne distribueroient ledit argent au roi ni à autres, fors seulement aux gens d’armes & pour le fait de la guerre susdite.
Le roi promet par cette même ordonnance, & s’engage de faire aussi promettre sur les saints évangiles par la reine, par le dauphin, & tous les grands officiers de la couronne, superintendans, receveurs généraux & particuliers, & autres qui se mêleront de recevoir cet argent, de ne le point employer à d’autres usages, & de point adresser de mandemens aux députés, ni à leurs commis, pour distribuer l’argent ailleurs ni autrement ; que si par importunité ou autrement quelqu’un obtenoit des lettres ou mandemens au contraire, lesdits députés, commissaires ou receveurs jureront sur les saints évangiles de ne point obéir à ces lettres ou mandemens, & de ne point distribuer l’argent ailleurs ni autrement ; que s’ils le faisoient, quelques mandemens qui leur vinssent, ils seroient privés de leurs offices & mis en prison fermée, de laquelle ils ne pourroient sortir ni être élargis par cession de biens ou autrement jusqu’à ce qu’ils eussent entierement payé & rendu tout ce qu’ils en auroient donné ; que si par avanture quelqu’un des officiers du roi ou autres sous prétexte de tels mandemens vouloient ou s’efforçoient de prendre ledit argent, lesdits députés & receveurs leur pourroient & seroient tenus de résister de fait, & pourroient assembler leurs voisins des bonnes villes & autres, selon ce que bon leur sembleroit, pour leur résister comme dit est.
On voit par cette ordonnance qu’il y avoit deux sortes de députés élus par les états, savoir les députés généraux, & les députés particuliers ; les uns & les autres étoient élus par les trois états, c’est pourquoi les députés généraux étoient quelquefois appellés les élûs généraux ; mais on les appelloit plus communément les généraux des aides : ceux-ci ont formé la cour des aides.
Les députés particuliers furent d’abord nommés commis, commissaires ou députés particuliers sur le fait des aides : ils étoient commis ou ordonnés, c’est-à-dire élûs par les trois états, c’est pourquoi dans la suite le nom d’élûs leur demeura propre.
On en établit dès-lors en plusieurs endroits du royaume, tant sur les frontieres qu’ailleurs où cela parut nécessaire.
Ils prêtoient serment tant au roi qu’aux états, étant obligés de conserver également les intérêts du roi & ceux des états qui les avoient préposés.
Il ne paroît pas qu’ils fussent chargés de la recette des deniers, puisqu’ils avoient sous eux des receveurs & ministres à cet effet.
Leur fonction étoit seulement d’ordonner de tout ce qui concernoit les aydes, & de contraindre les redevables par toutes voies que bon leur sembleroit ; ils connoissoient aussi alors de la gabelle, du sel, & de toutes autres impositions.
Ces députés particuliers ou élus, avoient pour cet effet tout droit de jurisdiction en premiere instance ; l’ordonnance dont on vient de parler, semble d’abord supposer le contraire en ce qu’elle dit que s’il y avoit quelques rebelles que les députés ne pûssent contraindre, ils les ajourneroient devant les généraux superintendans ; mais la même ordonnance donnant pouvoir aux députés d’ordonner & de contraindre par toutes sortes de voies, il est évident qu’elle entendoit aussi leur donner une véritable jurisdiction, & qu’elle n’attribua aux généraux superintendans que le ressort.
Ce ne fut pas seulement pour les aides qui se levoient sur les marchandises que les trois états élûrent des députés ; ils en établirent de même pour les autres impositions.
En effet, les états tenus à Paris au mois de Mars suivant, ayant accordé au roi une aide ou espece de capitation qui devoit être payée par tous les sujets du roi, à proportion de leurs revenus ; il fut ordonné que cette aide seroit levée par les députés des trois états en chaque pays, la gabelle fut alors abolie : ainsi les élus n’avoient plus occasion d’en ordonner. Les généraux députés de Paris avoient le gouvernement & ordonnance sur tous les autres députés : il devoit y avoir en chaque ville trois députés particuliers ou élus, qui auroient un receveur & un clerc avec eux, & ordonneroient certains collecteurs par les paroisses, qui s’informeroient des facultés de chacun ; que si les députés en faisoient quelque doute, les collecteurs assigneroient ceux qui auroient fait la déclaration, par-devant les trois députés de la ville, lesquels pourroient faire affirmer devant eux la déclaration : mais les collecteurs pouvoient faire affirmer devant eux les gens des villages afin de ne les point traduire à la ville ; ceci confirme bien ce qui a déja été dit de la jurisdiction qu’avoient dès-lors les élus. L’on doit aussi remarquer à cette occasion, que les collecteurs avoient alors entant qu’asséieurs des tailles une portion de jurisdiction, puisqu’ils faisoient prêter serment devant eux aux gens de la campagne, par rapport à la déclaration de leurs facultés.
Il y eut en conséquence de l’ordonnance dont on vient de parler, des députés ou élus commis par les états dans chaque diocèse, & notamment en la ville de Paris, tant pour la ville que pour tout le diocèse.
Ces commissaires députés des états pour la ville & diocèse de Paris, donnerent le 20 Mars 1355, sous leurs sceaux une instruction pour les commis qu’ils envoyoient dans chaque paroisse de ce diocèse ; elle est intitulée, ordinatio per deputatos trium statuum generalium data : & à la marge il y a, declaratio subsidii, & personarum quæ tenentur ad subsidium. La piece commence en ces termes ; les députés pour faire lever & cueillir en la ville & diocèse de Paris le subside dernierement octroyé ; à tel, &c. & plus loin il est dit, pour ce est-il que par vertu du pouvoir à nous commis ; vous mandons & commettons que tantôt & sans délai ces lettres vûes, vous appelliez avec vous le curé de..... & par son conseil élisiez ou preniez trois ou quatre bonnes personnes de bon état de ladite paroisse avec lesquels vous alliez dans toutes les maisons demander la déclaration de leur état & vaillant ; c’est ainsi que se faisoit l’assiete de ces sortes d’impositions.
Le roi Jean par la même ordonnance dont on a déja parlé, établit aussi des élus pour le fait des monnoies ; il dit en l’article vij. nous par le conseil des superintendans élus par les trois états, élirons & établirons bonnes personnes & honnêtes, & sans soupçon pour le fait de nos monnoies, lesquelles nous seront serment en la présence desdits superintendans que bien & loyaument ils exerceront l’office à eux commis. Ces commissaires ou députés furent établis par lettres du 13 Janvier 1355.
Les députés particuliers sur le fait des aides furent qualifiés d’élûs dans une ordonnance que Charles dauphin de France, qui fut depuis le roi Charles V. donna au mois de Mars 1356, en qualité de lieutenant général du royaume pendant la captivité du roi Jean.
Il ordonne d’abord par le conseil des trois états, afin que les deniers provenans de l’aide ne soient point détournés de leur destination, qu’ils ne seront point reçûs par les officiers du roi ni par les siens, mais par bonnes gens sages, loyaux & solvables à ce ordonnés élus & établis par les gens des trois états tant ès frontieres qu’ailleurs où besoin sera ; que ces commis & députés généraux lui prêteront serment & aux gens des trois états ; que les députés particuliers feront de même serment devant les juges royaux des lieux & que l’on y appellera une personne ou deux de chacun des trois états. Il paroît que ces députés devoient avoir la même autorité que ceux qui avoient été établis dans les provinces par l’article ij. de l’ordonnance du 28 Décembre 1355.
Il devoit y en avoir trois dans chaque diocèse, cependant la distribution de leurs départemens étoit quelquefois faite autrement : en effet on voit par une commission donnée en exécution de cette ordonnance, que le diocèse de Clermont & celui de S. Flour avoient les mêmes élus. Cette même commission les autorisoit à assembler à Clermont, à S. Flour, ou ailleurs ; dans ces diocèses, tous ceux des trois états desdits diocèses que bon leur sembleroit pour raison de l’aide.
Le dauphin Charles promit que moyennant cette aide, toute taille, gabelle, & autres impositions cesseroient.
Et comme il avoit eu connoissance que plusieurs sujets du royaume avoient été fort grevés par ceux qui avoient été commis à lever, imposer & exploiter la gabelle, imposition & subsides octroyés l’année précedente ; que de ce que les commis levoient, il n’y en avoit pas moitié employée pour la guerre, mais à leur profit particulier ; pour remédier à ces abus, faire punir ceux qui avoient malversé, & afin que les autres en prissent exemple, le dauphin ordonna par la même loi que les élus des trois états par les diocèses sur le fait de l’aide, lesquels il commit à ce, verroient le compte des élus, impositeurs, receveurs, collecteurs de l’année précedente ; qu’ils s’informeroient le plus diligemment que faire se pourroit, chacun en leur diocèse, de ce qui auroit été levé de ces impositions, en quelle monnoie, & par qui, & le rapporteroient à Paris le lendemain de quasi-modo par-devers le roi & les gens des trois états, pour y pourvoir le mieux qu’il seroit possible.
Il est encore dit par la même ordonnance, que comme ceux qui étoient venus à Paris aux dernieres assemblées d’états, avoient encouru la haine de quelques officiers qui s’étoient efforcés de les navrer, blesser ou mettre à mort, & qu’il en pourroit arriver autant à ceux qui viendroient dans la suite à ces sortes d’assemblées, le prince déclare qu’il prend ces personnes sous la sauve-garde spéciale du roi son pere & de lui, & leur accorde que pour la sûreté & défense de leur vie, ils puissent marcher avec six compagnons armés dans tout le royaume toutes fois qu’il leur plaira. Il défend à toutes personnes de les molester, & veut qu’au contraire ils soient gardés & conservés par tout le peuple, & enjoint à tous juges de les laisser aller eux & leur compagnie par tout où il leur plaira, sans aucun empêchement pour raison du port d’armes, & de leur prêter main-forte en cas de besoin s’ils en sont requis, pour les causes dessus dites. On voit par-là que le port d’armes étoit dès-lors défendu. Cette ordonnance paroît aussi être la premiere qui ait établi la distinction des asséeurs & des collecteurs d’avec les élus.
L’instruction qui fut faite par les trois états de la Languedoïl sur le fait de cette aide, porte qu’il y auroit en la ville de Paris dix personnes, & dans chaque évêché trois personnes des états élus tant par les gens de Paris que des évêchés & diocèses autorisés de M. le duc de Normandie, (c’étoit le dauphin.)
Les bonnes villes & paroisses doivent élire trois, quatre, cinq, ou six personnes (qui sont en cet endroit les asséeurs) comme bon leur semblera, qui assoiront par serment ladite cueillete.
Il est aussi ordonné qu’il sera établi par les trois élus un ou plusieurs receveurs ès villes & évêchés de leur département (ce sont les collecteurs), qui recevront l’argent de ce subside en la maniere & au lieu ordonné par les élus.
Que les élus feront aussi-tôt publier que les gens d’église & les nobles ayent à donner la déclaration de leurs biens. Que les maires & échevins, & autres officiers des communes, ou les curés dans les lieux où il n’y a pas de commune, leur donneront aussi la déclaration du nombre de feux ; que les élus prendront note des bénéfices & de leur revenu, du nom des nobles & de leurs possessions, du nombre de feux de chaque lieu.
Enfin que les élus feront contraindre toutes lesdites personnes par leurs commis & députés, comme pour les propres dettes du roi, savoir, les gens du clergé vivans cléricalement, par les juges ordinaires de l’église ; & il semble par-là que les élus n’eussent pas alors de jurisdiction sur les ecclésiastiques.
Comme l’aide établie par l’ordonnance du roi Jean, du 28 Décembre 1355, n’avoit lieu que dans le pays coûtumier, les états de la Languedoil accorderent de leur part au mois de Septembre 1356, une aide au roi ; & à cette occasion le dauphin Charles rendit encore une ordonnance au mois de Février suivant, portant que les états entretiendroient pendant un an 10000 hommes armés ; que pour l’entretien de ces troupes, chacun payeroit une certaine somme qui étoit une espece de capitation ; qu’en outre les sujets des prélats & des nobles, & les autres habitans qui auroient douze ans, & qui seroient aisés, payeroient un autre subside à proportion de leurs biens.
Que sur les sommes provenantes de ces impositions, la solde des gens de guerre leur seroit payée par quatre thrésoriers généraux choisis par les trois états, & que ces quatre thrésoriers généraux en nommeroient d’autres particuliers dans chaque sénéchaussée, pour lever les impositions.
Que le payement des gens de guerre seroit fait par les quatres thrésoriers généraux, sous les ordres de vingt-quatre personnes élues par les trois états, ou de plusieurs d’entr’eux ; que ces vingt-quatre élus seroient appellés au conseil du lieutenant du roi lorsqu’il le jugeroit à propos ; qu’eux seuls pourroient donner une décharge suffisante aux thrésoriers.
Que les trois états députeroient douze personnes, quatre de chaque ordre pour recevoir les comptes, tant des quatre thrésoriers généraux que des particuliers, & leur feroient prêter serment à eux & à leurs commis : que les thrésoriers généraux & particuliers ne rendroient compte à aucun officier du roi, quel qu’il fût, mais seulement aux douze députés des états qui feroient aussi passer en revûe les gendarmes & les autres troupes, & leur feroient prêter serment.
Telle fut l’origine des élus qui sont encore nommés dans les pays d’états ; mais dans ces pays il n’y a pas communément de tribunaux d’élections, excepté dans quelques-uns comme dans les généralités de Pau, Montauban & Bourgogne ; il y a aussi dans ces mêmes pays d’états des juges royaux qui connoissent des matieres d’élection, & dont l’appel en ces matieres ressortit aux cours des aydes chacune en droit soi.
Les trois états de la Languedoïl assemblés à Compiegne, ayant accordé au dauphin Charles une nouvelle aide en 1358, le dauphin fit encore une ordonnance le 14 Mai de ladite année, par laquelle il revoque toutes lettres & commissions par lui données sur le fait des subsides & aides du tems passé, tant aux généraux de Paris qu’aux élus particuliers par les diocèses & autrement ; que les prélats & autres gens d’église, nobles & gens des bonnes villes avoient élû & éliroient des personnes pour gouverner l’aide qui venoit d’être octroyée.
Il ordonne ensuite que les élus des pays (de la Languedoïl) pourroient quant aux gens autres que de sainte église, faire modération loyalement, de bonne foi, sans fraude, comme ils verroient être à faire ; & que quant aux gens d’église demeurant dans lesdits plats pays connus, & qui y auroient leurs bénefices, les prélats du lieu appellés, avec eux les élus & le receveur pourroient les modérer quant au dixieme desdits bénéfices, après avoir oüi lesdits élus & receveur.
Que certaines personnes, c’est-à-savoir une de chaque état, seroient élûs par les gens d’église, nobles & bonnes villes & commis de par le dauphin pour le fait desdites aydes ordonner & mettre sur & gouverner ès lieux où ils seroient des commis & receveurs qui recevroient les deniers de cette aide. Que ces receveurs seroient ordonnés par les élus, par le conseil des bonnes gens du pays. Que les élus & receveurs feroient serment au roi ou à ses officiers, de bien & loyalement se comporter sur ce fait. Il n’est plus parlé en cet endroit de serment envers les états.
Les élus étoient alors au nombre de trois ; car le même article dit qu’ils ne pourroient rien faire de considérable sur ce fait l’un sans l’autre, mais tous les trois ensemble.
Ces élus avoient des gages & regloient ceux des receveurs : en effet l’article suivant porte que les autres aides du tems passé avoient été levées à grands frais & qu’elles avoient produit peu de chose à cause des grands & excessifs gages & salaires des élus particuliers, receveurs généraux à Paris. C’est pourquoi le dauphin ordonne que chacun des élus aura pour ses gages ou salaires 50 livres tournois pour l’année, & les receveurs au-dessous de ladite somme, selon ce que les élus regleroient par le conseil des bonnes gens du pays.
A l’occasion de cette aide le dauphin donna encore des lettres le même jour 14 Mai 1358, portant que dans l’assemblée des états de la Languedoil, Messire Sohier de Voisins, chevalier, avoit été élu de l’état des nobles pour ladite aide, mettre sus & gouverner en la ville & diocèse de Paris, excepté la partie de ce diocèse qui est de la prevôté & ressort de Meaux ; que pour l’état de l’église, ni pour les bonnes villes & plats pays aucuns n’avoient été élus pour la ville de Paris ; & en conséquence il mande au prevôt de Paris ou son lieutenant qu’ils fassent assembler à Paris les gens d’église & de la ville de Paris, & les contraindre de par le roi & le dauphin d’élire, savoir l’état de l’église, une bonne & suffisante personne ; & pour les gens de la ville de Paris & du pays, un bon & suffisant bourgeois, pour gouverner l’aide avec le susdit chevalier ; que si ces élus étoient refusans ou délayans de s’acquitter de ladite commission,ils y seroient contraints par le prevôt de Paris, savoir lesdits chevalier & bourgeois par prise de corps & biens, & celui qui seroit élu par l’église, par prise de son temporel ; que si lesdits gens d’église & bourgeois refusoient ou différoient de faire l’élection, le prevôt de Paris ou son lieutenant éliroit par bon conseil deux bonnes & suffisantes personnes à ce faire, c’est-à-savoir de chacun desdits états avec ledit chevalier. L’exécution de ces lettres ne fut pas adressée aux généraux des aides, attendu que par d’autres lettres du même jour toutes les commissions de ces généraux avoient été revoquées comme on l’a dit ci-devant.
Enfin il est dit que les élus feront l’inquisition & compte du nombre des feux des bonnes villes & cités, & par le conseil des maires des villes ou atournés, dans les lieux où il y en a, sinon des personnes les plus capables.
Le roi Jean ayant, par son ordonnance du 5 Décembre 1360, établi une nouvelle aide sur toutes les marchandises & denrées qui seroient vendues dans le pays de la Languedoïl ; le grand conseil fit une instruction pour la maniere de lever cette aide, & ordonna que pour gouverner l’aide en chaque cité, & pour le diocèse,il y auroit deux personnes notables, bonnes & suffisantes : ainsi le nombre des élus fut réduit à deux, au lieu de trois qu’ils étoient auparavant.
Il fut aussi ordonné que l’imposition de douze deniers pour livre sur toutes les marchandises & denrées, autres que le sel, le vin & les breuvages, seroit donnée à ferme. Les cautions prises & les deniers reçus de mois en mois par les élus & députés en chaque ville, pour toute la ville & diocese d’icelle, tant par eux que par leurs députés.
Les députés dont il est parlé dans cet article, & qui dans une autre ordonnance du 1er Décembre 1383, & autres ordonnances postérieures, sont nommés commis des élûs ; étoient des lieutenans, que les élus de chaque diocèse envoyoient dans chaque ville de leur département, pour y connoître des impositions. Ces élus particuliers furent depuis érigés en titre d’office par François I. ce qui augmenta beaucoup le nombre des élections, qui étoit d’abord seulement égal à celui des diocèses.
L’instruction du grand-conseil de 1360, portoit encore que les élus établiroient des receveurs particuliers en chaque ville, où bon leur sembleroit, pour lever l’aide du vin & des autres breuvages.
Que tous les deniers provenans de cette aide, tant de l’imposition des greniers à sel, que du treizieme des vins & de tout autre breuvage, seroient apportés & remis aux élus & à leur receveur, pour ce qui en auroit été levé dans la ville & diocèse de leur département ; que les deniers ainsi reçus, seroient mis par eux chaque jour en certaines huches, escrins, coffres, ou arches, bons & forts, & en lieu sûr ; & qu’à ces huches, coffres, &c. il y auroit trois serrures fermantes à trois diverses clés, dont chacun desdits élus & receveur en auroit une ; & qu’ils donneroient, sous leurs sceaux, lettres & quittances des deniers reçus à ceux qui les payeroient.
Que lesdits élus & receveurs seroient tenus d’envoyer à Paris tous les deux mois par-devers les thrésoriers généraux ordonnés, & le receveur général, pour le fait de l’aide dessus-dite, tous les deniers qu’ils auroient par-devers eux ; & qu’ils en prendroient lettres de quittance desdits thrésoriers & receveur généraux.
S’il étoit apporté quelque trouble aux élus en leurs fonctions, ou qu’ils eussent quelque doute, l’ordonnance dit qu’ils en écriront aux thrésoriers généraux à Paris, lesquels en feront leur déclaration.
Enfin il est dit qu’il leur sera pourvû, & à leurs receveurs & députés, de gages ou salaires suffisans.
L’instruction, qui est ensuite, sur l’aide du sel, porte que dans les villes où il n’y aura point de grenier établi, l’aide du sel sera vendue & donnée à ferme par les élus dans les cités, ou par leurs députés, par membres & par parties, le plus avantageusement que faire se pourra ; & que les fermiers seront tenus de bien applegier leurs fermes, c’est-à-dire, de donner caution, & de payer par-devers les élus & leur receveur, le prix de leurs fermes : sçavoir, pour les fermes des grandes villes, à la fin de chaque mois ; & pour celles du plat-pays, tous les deux mois.
Il sembleroit, suivant cet article, que les élus n’avoient plus d’inspection sur la gabelle, que dans les lieux où il n’y avoit point de grenier à sel établi : on verra cependant le contraire dans l’ordonnance de 1279, dont on parlera dans un moment.
Charles V. par une ordonnance du 19 Juillet 1367, regla que les élus de chaque diocèse aviseroient tel nombre d’entre les sergens royaux, qui leur seroit nécessaire pour faire les contraintes ; & qu’ils arbitreroient le salaire de ces sergens. C’est sans doute là l’origine des huissiers attachés aux élections, & peut-être singulierement celle des huissiers des tailles.
Ce même prince ordonna au mois d’Août 1370, que les élus, sur le fait des subsides, dans la ville, prevôté, vicomté & diocèse de Paris, ne seroient point garants des fermes de ces subsides qu’ils adjugeroient, ni de la régie des collecteurs qu’ils nommeroient pour faire valoir la ferme de ces subsides, qui auroient été abandonnés par les fermiers.
Par deux ordonnances des 13 Novembre 1372,& 6 Décembre 1373, il défendit aux élus de faire commerce public ou caché d’aucune sorte de marchandises, à peine d’encourir l’indignation du roi, de perdre leurs offices, & de restitution de leurs gages ; il leur permit seulement de se défaire incessamment des marchandises qu’ils pourroient avoir alors.
Il ordonna aussi que les généraux diminueroient le nombre des élus.
Et dans l’article 18. il dit que pour ce qu’il est voix & commune renommée, que pour l’ignorance, négligence ou défaut d’aucuns élus & autres officiers, sur le fait des aides, & pour l’excessif nombre d’iceux, dont plusieurs avoient été mis plûtôt par importunité, que pour la suffisance d’iceux, les fermes avoient été adjugées moins sûrement, & souvent moyennant des dons ; que quelques-uns de ces officiers, les avoient fait prendre à leur profit, ou y étoient intéressés ; qu’ils commettoient de semblables abus dans l’assiete des foüages, le chancelier & les généraux enverroient incessamment des réformateurs en tous les diocèses de Languedoc, quant au fait des aides ; que les élus & autres officiers (apparemment ceux qui auroient démérité) seroient mis hors de leurs offices ; qu’on leur en subrogeroit d’autres bons & suffisans ; que ceux qui seroient trouvés prud’hommes, & avoir bien & loyalement servi, seroient honorablement & grandement guerdonnés, c’est-à-dire récompensés, & employés à d’autres plus grands & plus honorables offices, quand le cas y écheroit.
L’instruction & ordonnance qu’il donna au mois d’Avril 1374, sur la levée des droits d’aides, porte que l’imposition de douze deniers pour livres seroit donnée à ferme dans tous les diocèses par les élus ; qu’ils affermeroient séparément les droits sur le vin : que ceux qui prendroient ces fermes, nommeroient leurs cautions aux élus : que ceux-ci ne donneroient point les fermes à leurs parens au-dessous de leur valeur : qu’ils feroient publier les fermes dans les villes & lieux accoûtumés, par deux ou trois marchés ou Dimanches, & les donneroient au plus offrant : que le bail fait, seroit envoyé aux généraux à Paris : qu’aucun élu ne pourra être intéressé dans les fermes du roi, à peine de confiscation de ses biens : que le receveur montrera chaque semaine son état aux élus : enfin, ce même réglement fixe les émolumens, que les élus peuvent prendre pour chaque acte de leur ministere, & fait mention d’un réglement fait au conseil du roi, au mois d’Août précédent sur l’auditoire des élûs.
Cette piece est la premiere qui fasse mention de l’auditoire des élûs ; mais il est constant qu’ils devoient en avoir un, dès qu’on leur a attribué une jurisdiction.
Celui de l’élection de Paris étoit dans l’enclos du prieuré de S. Eloy en la cité ; comme il paroît par les lettres de Charles VI. du 2 Août 1398, dont on parlera ci-après en leur lieu. Il est dit au-bas de ces lettres, qu’elles furent publiées à S. Cloy ; mais il est évident qu’il y a en cet endroit un vice de plume ; & qu’au lieu de S. Cloy, il faut lire S. Eloy, qui est le lieu où sont présentement les Barnabites.
Il paroît en effet que c’étoit en ce lieu où les élus tenoient d’abord leurs séances, avant qu’ils eussent leur auditoire dans le palais, où il est présentement.
Il y avoit anciennement dans l’emplacement qu’occupent les Barnabites & les maisons voisines, une vaste, belle & grande maison, que Dagobert donna à S. Eloy, lequel établit en ce lieu une abbaye de filles, appellée d’abord S. Martial, & ensuite S. Eloy. Les religieuses ayant été dispersées en 1107, on donna aux religieux de S. Maur-des-Fossés cette maison, qui fut réduite sous le titre de prieuré de S. Eloy : ce prieuré avoit droit de justice dans toute l’étendue de sa seigneurie, qui s’étendoit aussi sur une coulture, appellée de S. Eloy, où est présentement la paroisse S. Paul : elle avoit près du même lieu sa prison, qui subsiste encore, appellée la prison de S. Eloy ; mais la justice du prieuré qui appartenoit depuis quelque tems à l’évêché de Paris, fut supprimée en 1674, en même tems que plusieurs autres justices seigneuriales qui avoient leur siége dans cette ville.
On ignore en quel tems précisément les élus commencerent à siéger dans l’enclos du prieuré de S. Eloy, mais il y a apparence que ce fut dès le tems de S. Louis, lequel établit des élus pour la taille : ce prince habitoit ordinairement le palais situé proche S. Eloy. Philippe-le-Bel y logea le parlement en 1302 : mais comme ce prince & plusieurs de ses successeurs continuerent encore pendant quelque tems d’y demeurer, il n’est pas étonnant qu’on n’y eût pas placé dès-lors l’élection, non plus que bien d’autres tribunaux qui y ont été mis depuis.
D’ailleurs, comme la fonction des élus n’étoit pas d’abord ordinaire, ils n’avoient pas besoin d’un siége exprès pour eux : c’est apparemment la raison pour laquelle ils choisirent le prieuré de S. Eloy, pour y tenir leurs assemblées & séances ; & lorsque leur fonction devint ordinaire, & que le droit de jurisdiction leur fut accordé, ils établirent leur siége dans le prieuré de S. Eloy ; sans doute pour être plus à portée du palais, & de rendre compte de leurs opérations aux généraux des aides.
Il y avoit dans l’ancienne église de S. Eloy, une chapelle fondée en 1339, par Guillaume de Vanves & Sanceline sa femme, en l’honneur de S. Jacques & de S. Maur, à laquelle Guillaume Cerveau, élu des aides, fit du bien en 1417 ; ce qui donna lieu de croire que les élus de Paris avoient encore leur siége dans ce Prieuré.
On ne voit pas s’il y avoit un siége exprès pour eux. Il est probable qu’ils tenoient leurs séances dans l’auditoire de la justice du prieuré ; de même qu’ils se servoient de la prison de cette justice, pour y renfermer ceux qui étoient detenus en vertu de leurs ordres ; en effet, cette prison est encore celle où l’on écroue les collecteurs, que l’on constitue prisonniers pour la taille, & autres personnes arrêtées à la requête du fermier général du roi, & en vertu des jugemens de l’élection ; & la cour des aides envoye ses commissaires faire la visite de cette prison toutes les fois qu’il y a séance aux prisons.
Ce ne fut probablement qu’en 1452, que l’auditoire de l’élection de Paris fut transféré dans le palais, & en conséquence de l’ordonnance du mois d’Août de ladite année, portant que le siége des élections seroit établi au lieu le plus convenable de leur ressort.
Comme toutes les impositions, dont les élus avoient la direction, étoient levées extraordinairement, pour subvenir aux dépenses de la guerre ; c’est de-là que dans des lettres de Charles V. du 10 Août 1374, ils sont nommés élûs & receveurs sur le fait de la guerre ; ce qui est une abréviation du titre qu’on leur donnoit plus souvent d’élûs sur le fait de l’aide ordonnée pour la guerre.
On voit par une ordonnance du 13 Juillet 1376, que c’étoient les élus qui donnoient à ferme l’imposition foraine dans chaque élection ; mais il paroît aussi par des lettres du roi Jean, du 27 Novembre 1376, adressées aux élus sur l’imposition foraine, qu’il y avoit des élus particuliers pour cette sorte d’imposition.
Au mois de Novembre 1379, Charles V. fit une autre ordonnance sur le fait des aides & de la gabelle. portant, qu’attendu les plaintes faites contre les élus & autres officiers, ils seroient visités, & leurs œuvres & gouvernement sûs ; que ceux qui ne seroient pas trouvés suffisans en discrétion, loyauté & diligence, ou n’exerceroient pas leurs offices en personne, en seroient mis dehors ; & qu’en leur place il en seroit mis d’autres, que le roi feroit élire au pays, ou qui seroient pris ailleurs, si le cas se présentoit.
Il défendit aux élus de mettre ès villes & paroisses du plat-pays des asséeurs des foüages ou collecteurs, mais que ces asséeurs & collecteurs seroient élus par les habitans des villes & paroisses ; que pour être mieux obéis, ils prendroient, s’il leur plaisoit, des élus commission de leur pouvoir, qui leur seroit donnée sans frais.
Que si l’on ne pouvoit avoir aucun sergent royal pour faire les contraintes, les élûs ou receveurs donneroient à cet effet commission aux sergens des hauts-justiciers.
Que si dans les villes fermées il y avoit quelques personnes puissantes, qui ne voulussent pas payer, ou que l’on n’osât pas exécuter, elles seroient exécutées par les élus, leurs receveurs ou commis de la maniere la plus convenable, & contraintes de payer le principal & accessoires sans déport.
Le nombre des élus s’étant trop multiplié, Charles V. ordonna qu’il n’y en auroit que trois à Paris, deux à Roüen, pour la ville & vicomté ; un à Gisors, un à Fescamp, & deux en chacun des autres diocèses.
Qu’aucun receveur ne feroit l’office d’élû.
Il révoqua & ôta tous les élûs receveurs généraux, excepté le receveur général de Paris.
Il ordonna encore qu’en chaque diocèse ou ailleurs où il y auroit des élus, il y auroit aussi avec eux un clerc (ou greffier) qui seroit gagé du roi, feroit le contrôle des livres des baux des fermes, des encheres, tiercemens, doublemens, amendes, tant du fait du sel, que des autres taxations, défauts, & autres exploits ; qu’il feroit les commissions du bail des fermes, & autres écritures à ce sujet, sans en prendre aucun profit, autre que ses gages ; que les élus ne scelleroient ni ne délivreroient aucune commission ou lettre, si le clerc ne l’avoit d’abord signée, & qu’il en enregistroit auparavant la substance pardevers lui.
Que les œuvres, c’est-à-dire les registres, qui seront envoyés en la chambre des comptes, quand le receveur voudroit compter, seroient clos & scellés des sceaux des élus, & signés en la fin du total de chaque subside, & aussi à la fin du total du livre, du seing manuel des élus & de leur clerc.
Si le grenetier d’un grenier à sel trouvoit quelques marchands ou autres personnes en contravention, il devoit requérir les élus du lieu qu’ils en fissent punition ; si c’étoit en lieu où il n’y eût point d’élus, mais seulement grenetier & contrôleur, ils en pouvoient ordonner selon la qualité du délit, &c.
Dans chaque diocèse, il devoit être mis certains commissaires (ou gardes des gabelles) par les élus grenetiers & contrôleurs des lieux. Ces gardes devoient préter serment tous les ans aux élus & grenetiers de prendre les délinquans, & de les leur amener ; ou s’ils ne pouvoient les prendre, de relever leurs noms aux élus & grenetiers.
Ceux-ci devoient aussi tous les ans faire préter serment sur les saints évangiles aux collecteurs des foüages de chaque paroisse, de leur donner avis des fraudes qui pouvoient se commettre pour le sel.
Les élus, grenetiers, clercs, contrôleurs, & chacun d’eux, devoient aussi s’informer diligemment de toutes les contraventions au sujet du sel ; & après information, punir les coupables ; ou s’ils n’en vouloient pas connoître, les faire ajourner pardevant les généraux à Paris.
Les états d’Artois, du Boulonnois, du comté de Saint-Pol, ayant accordé une aide, commirent aussi des élus dans leur pays pour recevoir le payement de cette aide ; & ces élus furent autorisés par Charles VI. comme il est dit dans une ordonnance du mois de Juin 1381.
Il y avoit aussi en 1382 des élus dans la province de Normandie : car les habitans du Vexin-François obtinrent le 21 Juin de ladite année, des lettres de Charles VI. portant qu’ils payeroient leur part de l’aide qui avoit été établie à des personnes préposées par eux, qui ne seroient point soûmises aux élus établis par les trois états de Normandie.
Le 26 Janvier de la même année 1382, Charles VI. donna des lettres, par lesquelles il autorisa les généraux des aides, toutes les fois que le cas le requerroit, de mettre, ordonner, & établir les élûs, de les substituer ou renouveller, si besoin étoit, en toutes les villes, diocèses, & pays, où les aides avoient cours. Il y eut encore dans la suite d’autres lettres & réglemens, qui leur confirmerent le même pouvoir.
Dans le même tems, c’est-à-dire le 21 Janvier 1382, Charles VI. fit une instruction pour la levée des aides, qui contient plusieurs réglemens par rapport aux élûs, pour la maniere dont ils devoient adjuger les fermes à l’extinction de la chandelle, & pour la fixation de leurs droits. Mais ce qui est plus remarquable, c’est ce qui touche leur jurisdiction. Il est dit que les élus auront connoissance sur les fermiers ; qu’ils feront droit sommairement & de plain (de plano), sans figure de jugement (ce qui s’observe encore) ; qu’en cas d’appel, les parties seront renvoyées devant les généraux sur le fait des aides à Paris, pour en ordonner & déterminer par eux ; que les élus feront serment d’exercer leurs offices en personne ; que si aucun appelle des élus, l’appellation viendra pardevant les généraux, comme autrefois a été fait : ce qui est dit ainsi, parce que l’on avoit cessé pendant quelques années, à cause des troubles, de lever des aides dans le royaume, & que cela avoit aussi interrompu l’exercice de toute jurisdiction sur cette matiere.
Ce que porte ce réglement au sujet de la jurisdiction des élus & de l’appel de leurs jugemens, est répété mot pour mot dans une autre instruction faite sur la même matiere au mois de Février 1383.
L’ordonnance que Charles VI. fit en la même année, qualifie les élûs de collége, tant ceux des siéges généraux, que des siéges particuliers ; étant dit qu’en cas d’empêchement, ils pourront collégialement assemblés établir un commis (ou lieutenant), homme de bien, lettré, & expérimenté au fait de judicature.
Le même prince, par son ordonnance du mois de Fév. 1387, réduisit encore le nombre des élus, voulant qu’en chaque diocèse il n’y en eût que deux, un clerc, & un lai, excepté en la ville de Paris où il y en auroit trois, & que l’on y mettroit les plus suffisans par élection, appellés à ce, les gens du conseil du roi, & les généraux des aides.
L’instruction qu’il fit pour la levée des aides le 11 Mars 1388, portoit que dans les plus grands diocèses il n’y auroit qu’un élu pour le clergé, & deux élus lais ; que dans les lieux de recette où il n’y avoit pas d’évêché, il n’y auroit qu’un élu, moyennant que le receveur des aides seroit avec l’élu toutes les fois qu’il seroit nécessaire ; que cependant les élus qui étoient à Paris, y demeureroient jusqu’à ce que les généraux eussent fait leur rapport au roi des pays où ils devoient aller, & qu’alors il en seroit ordonné par le roi.
Que les clercs (greffiers) des élûs seroient mis à leurs périls, salaires, & dépens, sans prendre aucuns frais ni gages sur le roi ni sur le peuple, à cause de leurs lettres ou autrement, excepté ce qui leur étoit permis par l’instruction ancienne.
Que comme plusieurs élûs & autres officiers des aides y avoient été mis par faveur ; que plusieurs ne savoient lire ni écrire, ou n’étoient point d’ailleurs au fait des aides & des tailles qui avoient été mises en sus ; que les généraux réformateurs qui avoient été ordonnés depuis peu, feroient leur rapport au conseil de ceux qu’ils auroient appris à ce sujet, & que les élus qui seroient trouvés capables, seroient conservés dans leurs offices : les autres en seroient privés.
Une autre instruction que ce même prince fit le 4 Janvier 1392, veut que les élus lais & commis par le roi, connoissent du fait des aides comme par le passé, & pareillement l’élu pour le clergé. Il semble par-là que le roi ne commit que les élus lais, & que l’autre fut commis par le clergé.
Au mois de Juillet 1388, Charles VI. fit encore une nouvelle instruction sur les aides, portant, entre autres choses, que si quelques officiers des aides étoient maltraités dans leurs fonctions par quelque personne que ce fût, noble ou non-noble, les élus ou grenetiers en informeroient ; que s’ils avoient besoin pour cet effet de conseil ou de force, ils appelleroient les baillifs & juges du pays, & le peuple même s’il étoit nécessaire ; qu’ils auroient la punition ou correction des cas ainsi advenus, ou bien qu’ils pourroient la renvoyer devant les généraux conseillers, lesquels pourroient aussi les évoquer & en prendre connoissance, quand même les élus ou grenetiers ne la leur auroient pas renvoyée.
Il est aussi défendu aux élus & à leurs commis de prendre sur aucun fermier ni autre, douze deniers pour livre, comme quelques-uns s’ingéroient de prendre pour vinage ou pot-de-vin, ni aucun profit sur les fermes, à peine d’amende arbitraire & de privation de leurs offices. C’est sans doute ce qui a donné occasion de charger les baux des fermes envers les cours des aides & élections, de faire chaque année certains présens aux officiers.
Le même prince, par son ordonnance du 28 Mars 1395, portant établissement d’une aide en forme de taille, ordonna que cette aide ou taille seroit mise par les élus sur le fait des aides, ès cités, diocèses, & pays du royaume, qu’il avoit commis à cet effet par d’autres lettres.
Celles du 28 Août 1395, par lesquelles il institua trois généraux des finances, portent que ces généraux pourroient ordonner, commettre, & établir tous élus ; les destituer & démettre de leurs offices s’ils le jugeoient à-propos, sans que les généraux, pour le fait de la justice, pussent s’en entremettre en aucune maniere.
Le roi laissoit quelquefois aux élus le choix d’affermer les aides, ou de les mettre en régie ; comme on voit par des lettres du même prince du 2 Août 1398, adressées à nos amés les élûs sur le fait des aides ordonnées pour la guerre dans la ville & diocèse de Paris. Ces lettres continuent pour un an l’imposition de toutes denrées ou marchandises vendues, l’imposition des vins & autres breuvages vendus en gros, le quatrieme du vin & autres breuvages vendus en détail, l’imposition foraine, & la gabelle du sel ; & le roi mande aux élûs de Paris, de les faire publier & donner à ferme le plus profitablement que faire se pourra, ou de les faire cueillir & lever par la main du roi, c’est-à-dire par forme de régie. Il est marqué au bas de ces lettres, qu’elles ont été publiées à Saint-Eloi, devant les élûs de Paris.
Charles VI. fit encore plusieurs réglemens concernant les élûs ; par son ordonnance du 7 Janvier 1400, il régla qu’il n’y auroit à Paris sur le fait des aides que trois élûs, & un sur le fait du clergé, c’est-à-dire pour les décimes qui se levoient sur le clergé.
Qu’en chacune des autres bonnes villes du royaume, & autres lieux où il y avoit ordinairement siége d’élûs, il n’y aura dorénavant que deux élus au plus avec celui du clergé ; dans les lieux où il y en avoit ordinairement un, que le nombre des élûs seroit encore moindre, si faire se pouvoit, selon l’avis des généraux ; & afin que lesdites élections fussent mieux gouvernées, que les élûs seroient pris entre les bons bourgeois, riches, & prud’hommes des lieux où ils seroient établis élûs. Cette ordonnance est, à ce que je crois, la premiere qui ait qualifié d’élection le siége des élus ; & depuis ce tems, ce titre est devenu propre à ces tribunaux. On dit pourtant encore quelquefois indifféremment une sentence des élûs, ou une sentence de l’élection.
La même ordonnance porte encore que ceux qui seroient ordonnés pour demeurer dans ces offices, ou qui y seroient mis de nouveau, auroient des lettres du roi sur ce, passées par les trois généraux & scellées du grand sceau.
Que comme on avoit proposé de donner à ferme au profit du roi les offices des clergiés des élus, & aussi les offices des greffes de leurs auditoires, cette affaire seroit débattue pour savoir ce qui seroit le plus avantageux. Cette disposition fait juger que les élus avoient alors deux greffiers, l’un pour les affaires contentieuses dont ils étoient juges, l’autre pour les opérations de finances dont ils étoient chargés.
Les commissions d’élus furent enfin érigées en titre d’office formé sous le regne de Charles VII. lequel, dans une ordonnance du mois de Juin 1445, appelle les élûs ses juges ordinaires.
Les élus particuliers dont nous avons déjà touché quelque chose, furent aussi érigés en titre d’office par François I. L’appel de ces élus se relevoit d’abord devant les élus en chef. Par une déclaration de Charles VII. du 23 Mars 1451, il fut ordonné qu’il seroit relevé en la cour des aides ; mais par un édit du mois de Janvier 1685, les élus particuliers ont été supprimés & réunis aux élus en chef, & toutes les commissions furent érigées en élection en chef.
Il y a présentement 181 élections dans le royaume, qui sont distribuées dans les provinces & généralités, qu’on appelle pays d’élection. Savoir :
Dans la généralité de Paris, vingt-deux élections. | |
Paris. | Pontoise. |
Beauvais. | Vezelay. |
Compiegne. | Joigny. |
Senlis. | Saint-Florentin. |
Meaux. | Tonnerre. |
Rozoy. | Nemours. |
Coulommiers. | Melun. |
Provins. | Etampes. |
Montereau. | Mantes. |
Nogent-sur-Seine. | Montfort-Lamaury. |
Sens. | Dreux. |
Amiens, six. | |
Amiens. | Peronne. |
Abbeville. | Montdidier. |
Dourlens. | Saint-Quentin. |
Soissons, sept. | |
Soissons. | Crespy. |
Laon. | Clermont. |
Noyon. | Guise. |
Château-Thierry. | |
Orléans, douze. | |
Orléans. | Blois. |
Petiviers. | Romorantin. |
Beaugency. | Dourdan. |
Montargis. | Chartres. |
Gien. | Vendôme. |
Clamecy. | Château-Dun. |
Bourges, sept. | |
Bourges. | Issoudun. |
Château-Roux. | Saint-Amand. |
Leblanc. | La Charité-sur-Loire. |
La Châtre. | |
Moulins, sept. | |
Moulins. | Evaux. |
Gannat. | Nevers. |
Montluçon. | Château-Chinon. |
Gueret. | |
Lyon, cinq. | |
Lyon. | Roanne. |
Saint-Etienne. | Villefranche en Beaujolois. |
Mont-Brison. | |
Riom, six. | |
Riom. | Brioude. |
Clermont. | Saint-Flour. |
Issoire. | Aurillac. |
Grenoble, six. | |
Grenoble. | Valence. |
Vienne. | Gap. |
Romans. | Montelimart. |
Poitiers, neuf. | |
Niort. | Châtillon. |
Saint-Maixant. | Les Sables d’Olonne. |
Poitiers. | Châtellerault. |
Fontenay. | Confolens. |
Thoüars. | |
La Rochelle, cinq. | |
La Rochelle. | Marenne. |
Saintes. | Coignac. |
Saint-Jean-d’Angely. | |
Limoges, cinq. | |
Limoges. | Bourganeuf. |
Tulles. | Angoulesme. |
Brives. | |
Bordeaux, cinq. | |
Bordeaux. | Agen. |
Périgueux. | Condom. |
Sarlat. | |
Tours, seize. | |
Tours. | Saumur. |
Amboise. | Château-Gontier. |
Loches. | Baugé. |
Chinon. | La Fleche. |
Loudun. | Le Mans. |
Richelieu. | Mayenne. |
Angers. | Laval. |
Montreuil-Bellay. | Château-du-Loir. |
Pau & Ausch, six. | |
Ausch ou Armagnac. | Comenge. |
Lomagne. | Astarac. |
Riviere-Verdun. | Les Lannes. |
Montauban, six. | |
Montauban. | Villefranche. |
Cahors. | Rhodez. |
Figeac. | Milhault. |
Champagne, douze. | |
Châlons. | Langres. |
Rhetel. | Bar-sur-Aube. |
Sainte-Menehould. | Troyes. |
Vitry. | Epernay. |
Joinville. | Sezanne en Brie. |
Chaumont. | Rheims. |
Roüen, quatorze. | |
Roüen. | Andely. |
Arques. | Evreux. |
Eu. | Pont-de-l’Arche. |
Neufchatel. | Pont-l’Evêque. |
Lions. | Ponteau-de-mer. |
Gisors. | Caudebec. |
Chaumont & Magny. | Montivillier. |
Caën, neuf. | |
Caën. | Carentan. |
Bayeux. | Valognes. |
Saint-Lo. | Coutances.
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Avranches. | Mortain. |
Vire. | |
Alençon, neuf. | |
Alençon. | Domphront. |
Bernay. | Falaise. |
Lizieux. | Argentan. |
Conches. | Mortagne. |
Verneuil. | |
Bourgogne, deux. | |
L’élection de Bresse ou de Bourg, séante à Bourg. | |
L’élection de Bugey ou de Bellay, séante à Bellay, qui est tant pour le Bugey que pour les pays de Gex & Valromey. |
Dans les autres villes du duché de Bourgogne où il y a bailliage royal, le bailliage connoît des matieres d’élection ; & l’appel de leurs jugemens dans ces matieres va aux cours des aides, chacun selon leur ressort.
Les justices du Clermontois connoissent aussi des matieres d’élection, & l’appel de leurs jugemens dans ces matieres est porté à la cour des aides de Paris.
Chaque élection comprend un certain nombre de paroisses plus ou moins considérable, selon leur arrondissement. L’ordonnance faite au bois de Siraine en Août 1452, portoit que le ressort de chaque élection ne seroit que de cinq à six lieues au plus, afin que ceux qui seroient appellés devant les élus, pussent y comparoître & retourner chez eux en un même jour.
Dans les pays d’états il n’y a point d’élection, si ce n’est dans quelques uns, comme on l’a marqué ci-devant.
Les officiers dont chaque élection est composée, sont deux présidens, un lieutenant, un assesseur, & plusieurs conseillers ; un procureur du roi, un greffier, plusieurs huissiers, & des procureurs.
L’office de premier président fut créé en 1578, supprimé en 1583, & rétabli au mois de Mai 1585.
L’office de second président fut créé d’abord en 1587, ensuite supprimé, puis rétabli par édit du mois de Mai 1702 ; & depuis, en quelques endroits, cet office a été réuni ou supprimé. A Paris il a été acquis par la compagnie de l’élection ; le président a néanmoins conservé le titre de premier président, quoiqu’il soit présentement seul président ; ce qui fut ainsi ordonné par un édit du mois de Janvier 1703, en faveur du sieur Nicolas Aunillon, en considération de ses services, & ce titre fut en même tems attaché à sa charge.
Le lieutenant, qui est officier de robe-longue, fut créé en 1587, pour siéger après les présidens, avec le même pouvoir que les élûs.
L’assesseur dans les élections où cet office subsiste, siége après le lieutenant.
Le nombre des conseillers n’est pas par-tout le même ; à Paris il y en a vingt, outre le président, le lieutenant & l’assesseur. Dans les autres grandes villes il devoit y en avoir huit, présentement il n’y en a que quatre. La création des deux premiers en titre d’office, est du tems de Charles VII. le troisieme fut créé par édit du 22 Juillet 1523.
Les contrôleurs des tailles, qui furent établis par édit de Janvier 1522, & autres édits postérieurs, faisoient aussi dans plusieurs élections la fonction d’élûs, & en pouvoient prendre la qualité, suivant l’édit du mois de Mai 1587 : c’est ce qui a formé le quatrieme office d’élûs. Ces offices de contrôleurs ont depuis été réunis aux élections, ensorte que tous les élûs peuvent prendre le titre de contrôleur ; mais il y a eu depuis d’autres contrôleurs, créés pour contrôler les quittances des tailles.
Les qualités de président, lieutenant, & de conseiller, furent supprimées par édit de l’an 1599, avec défenses à eux de prendre d’autre qualité que celle d’élûs, & le nombre de ces officiers réduit à trois élus & un contrôleur, vacation advenant par mort ou forfaiture ; que jusqu’à ce ils se partageroient par moitié, pour exercer alternativement autant d’officiers en une année qu’en l’autre ; mais en 1505 les qualités de président, lieutenans & de conseillers furent rétablies, & tous furent remis en l’exercice de leurs charges, comme auparavant, pour servir continuellement & ordinairement, ainsi qu’ils font encore présentement.
Une des principales fonctions des élûs est d’asseoir la taille sur les paroisses de leur département, & pour cet effet ils font chacun tous les ans, au mois d’Août, leur chevauchée ou tournée dans un certain nombre de paroisses, pour s’informer de l’état de chaque paroisse ; savoir si la récolte a été bonne, s’il y a beaucoup d’exempts & de privilégiés, & en un mot ce que la paroisse peut justement porter. Voyez ce qui en a été dit ci-devant au mot Chevauchée des Elus.
Suivant l’article 12. de la déclaration du 16 Août 1683, les élus vérifiant les rôles faits par les collecteurs, n’y peuvent rien changer, sauf aux cottisés à s’opposer en surtaux.
Le même article leur défend de retenir les rôles plus de deux ou trois jours pour les calculer & vérifier, à peine de payer le séjour des collecteurs, & de demeurer responsables des deniers de la taille en leurs propres & privés noms.
L’article 13 du réglement de 1673, & l’article 11 de la déclaration de 1683, leur ordonnent de remettre au greffe de l’élection les rôles, trois jours après la vérification qu’ils en auront faite, à peine de radiation de leurs gages & droits, & d’interdiction de leurs charges pour trois mois.
Ils connoissent entre toutes sortes de personnes, de toutes contestations civiles & criminelles pour raison des tailles & autres impositions, excepté de celles dont la connoissance est attribuée spécialement à d’autres juges, comme les gabelles. La déclaration du 11 Janvier 1736, attribue au président la faculté de donner seul la permission d’informer & décerner seul les decrets ; & en son absence le plus ancien officier, suivant l’ordre du tableau, a le même pouvoir. L’exécution de cette déclaration a été ordonnée par arrêts du conseil des 29 Mai & 20 Novembre 1736 ; & le 16 Octobre 1743 il y a eu une nouvelle déclaration qui confirme celle de 1736. La déclaration du 16 Octobre 1743, l’autorise aussi à faire les interrogatoires, rendre les jugemens à l’extraordinaire, & les jugemens préparatoires ; procéder aux recollemens & confrontations, & généralement faire toute l’instruction & rapport du procès, & rendre toutes les ordonnances qui peuvent être données par un seul juge dans les siéges ordinaires qui connoissent des matieres criminelles. En cas d’absence ou autre empêchement du président, toutes ces fonctions sont attribuées au lieutenant, ou autre plus ancien officier.
L’appel des sentences & ordonnances des élections, est porté aux cours des aides, chacune dans leur ressort.
L’édit du mois de Janvier 1685 avoit uni les greniers à sel & les élections établis dans les mêmes villes, pour ne faire qu’un même corps d’élection & grenier à sel ; mais par édit d’Octobre 1694, les greniers à sel ont été desunis des élections.
Les officiers des élections joüissent de plusieurs privileges, dont le principal est l’exemption de la taille, chacun dans l’étendue de leur élection. L’édit de Juin 1614 n’accordoit ce privilege qu’à ceux qui résidoient en la ville de leur jurisdiction : ils furent ensuite exemptés par le réglement du mois de Janvier 1634, sans être assujettis à la résidence.
La déclaration du mois de Novembre 1634 révoqua tous leurs priviléges.
Mais par une autre déclaration du mois de Décembre 1644, vérifiée en la cour des aides au mois d’Août 1645, le roi les a rétablis dans l’exemption de toutes tailles, crûes, emprunts, subventions, subsistances, contribution d’étapes, logement de gens de guerre, tant en leur domicile, maison des champs, que métairies ; payement d’ustensiles, & de toutes levées pour lesdits logemens, & autres contributions faites & à faire, pour quelque cause & occasion que ce soit ; même en la joüissance de toutes autres impositions qui seroient faites par les habitans des lieux où lesdits officiers se trouveroient demeurans, soit par la permission de Sa Majesté ou autrement, pour quelque cause & occasion ; pour en joüir eux & leurs veuves ès lieux de leurs résidences, pourvû qu’ils ne fassent acte dérogeant ausdits priviléges, commerce, ou tiennent ferme d’autrui ; leur laissant la liberté d’établir leur demeure où bon leur semblera, nonobstant les édits contraires.
La déclaration du 22 Septembre 1627, leur donnoit aussi droit de committimus au petit sceau ; mais n’ayant pas été enregistrée, ils ne joüissent pas de ce droit, excepté ceux de l’élection de Paris, auxquels il a été attribué en particulier, tant par l’ordonnance de 1669, que par une déclaration postérieure du mois de Décembre 1732.
Ils ont rang dans les assemblées publiques, après les juges ordinaires du lieu, soit royaux ou seigneuriaux ; ils précedent tous autres officiers, tels que ceux des eaux & forêts, les maire & échevins.
Les offices de judicature, soit royaux ou autres, sont compatibles avec ceux des élections, suivant la déclaration du mois de Décembre 1644. Voyez les décisions sur les ordonnances des tailles & de la jurisdiction des élus, par Dagereau ; traité des élections, par Vieville ; Chenu, des offices, tit. des élections. Voyez aussi les auteurs qui traitent de la cour des aides & des tailles, & au mot Tailles. (A)
Election se dit aussi d’une partie de la Pharmacie, qui est celle qui apprend à choisir les drogues medicinales & les simples, & à distinguer les bonnes & les mauvaises. Voyez Pharmacie.
Il y a des auteurs qui distinguent une élection génerale, qui donne les regles & les caracteres des remedes en général, & une particuliere pour chaque remede en particulier. Chambers.