L’Encyclopédie/1re édition/CORNET
CORNET, s. m. en Anatomie, nom de quelques parties qui ressemblent à-peu-près à la figure d’un morceau de papier qu’on roule en maniere de cofre, & qu’on appelle cornet.
Les cornets de l’os éthmoïde sont ces trois lames situées l’une sur l’autre, qu’on remarque à la partie latérale interne & postérieure de chaque portion de cet os. Voyez Ethmoïde.
Les cornets inférieurs du nez, appellés aussi conques ou coquilles & lames spongieuses inférieures du nez, sont au nombre de deux, situés dans les fosses nasales. (L)
Cornet. Voyez Calmar & Coquille.
Cornets pour l’ouïe, (Acoustique.) instrumens à l’usage de ceux qui ont l’oreille dure. Le son se conserve dans ces instrumens, parce qu’en traversant leurs parois il ne peut se répandre circulairement, & le son ainsi ramassé frappe l’organe avec plus de force. On peut encore augmenter l’effet du son, en donnant à ces tuyaux une forme en partie parabolique, parce que le son est refléchi & comme ramassé en un seul point appellé foyer, où l’oreille est placée. Voyez Cabinets secrets, Echo, & Porte-voix. Ces cornets sont à-peu-près à l’égard de l’oreille, ce que les lunettes d’approche sont par rapport à la vûe. On peut les perfectionner comme on fait les lunettes. Mais nous croyons avec M. de Buffon, qu’il faut, pour que les cornets ayent tout l’effet possible, que l’oreille soit dans un endroit desert, ou du moins tranquille ; autrement, comme le son ne se propage pas en ligne droite ainsi que la lumiere, le bruit des objets voisins frappant l’oreille suivant toutes sortes de directions, altéreroit & affoibliroit le bruit augmenté par le cornet. (O)
Cornet d’épisse, (Marine.) Voyez Epissoir. (Z)
Cornet de mast, (Marine.) c’est une espece d’emboîtement de planches vers l’arriere du mât de divers petits bâtimens, qui est néanmoins ouvert du côté de l’arriere où s’emboîte le pié du mât qui se baisse du côté qui n’est point fermé, c’est-à-dire vers l’arriere, & qui se releve autant de fois qu’il en est besoin. (Z)
* Cornet, (Luth. & Musiq.) instrument à vent dont les anciens se servoient à la guerre. Les cornets faisoient marcher les enseignes sans les soldats, & les trompettes, les soldats sans les enseignes : les cornets & les clairons sonnoient la charge & la retraite ; & les trompettes & les cornets animoient les troupes pendant le combat. Nous ne nous servons plus guere du cornet dans les concerts ; nous en allons cependant expliquer la facture. Il y en a de plusieurs sortes ; celui qu’on voit Pl. VII. de Lutherie, fig. 11. s’appelle dessus de cornet : il a sept trous. Ceux qui se piquoient de bien joüer de cet instrument, lui donnoient la même étendue avec six, & ne se servoient pas du septieme. A est son bocal, il se sépare de l’instrument, & on l’en voit séparé en Aa. La taille de cornet est entierement semblable au-dessus de cornet, à l’exception d’un trou qu’on lui a ajoûté en-bas, & qui s’ouvre & se ferme à clé. Elle se brise en deux endroits pour la commodité. Elle a ses sept trous. L’étendue du dessus de cornet est d’une seizieme ; il n’y a que trois pouces de l’extrémité de l’instrument jusqu’au milieu du sixieme trou, & que dix pouces du bocal jusqu’au milieu du premier trou. Les trous sont éloignés de treize lignes, excepté le troisieme & le quatrieme, dont la distance est de dix-sept lignes. Le diametre de chaque trou est de quatre lignes ; celui du fond du bocal n’est que d’une ligne. Cet instrument va toûjours en s’élargissant depuis le bocal jusqu’à sa patte, dont le diametre est d’un pouce. La divergence des côtés est plus sensible du bocal au premier trou, que du premier sur le reste de la longueur. Il y en a qui pratiquent au derriere de l’instrument, à treize lignes plus haut que le premier trou d’en-haut, un autre trou. Il y a des dessus de cornet & des tailles de cornet droites & d’autres courbes. On les fait de cormier, de prunier, & autres bois. Il faut que le bois soit sec. On le couvre de cuir. Cet instrument est rude, & il faut le savoir adoucir. Le dessus de cornet va du c sol ut à l’s ut fa de la troisieme octave. Le serpent est une vraie basse de cornet ; voyez Serpent.
Le dessus de cornet donne le c sol ut tous les trous bouchés ; on fait le re, le mi, &c. en débouchant les trous les uns après les autres en montant. Sa tablature est la même que celle du flageollet, voyez. Quant à la basse de cornet, les trous en sont éloignés d’un pouce & , excepré le troisieme & le quatrieme qui sont éloignés de six pouces ; le sixieme & le troisieme de 6 pouces : il y a du septieme à la patte 10 pouces plus & du bocal au premier trou un pré 7 pouces ; la patte en est ouverte de 2 pouces. Le diametre du bocal est de 5 lignes à son orifice supérieur, & d’une ligne à l’inférieur ; l’instrument est divisé en trois tronçons ; le dernier a un pouce un quart de diametre en-haut ; celui du milieu 8 lignes en-haut ; ainsi le canal entier va toûjours en s’évasant du bocal jusqu’à la patte. Voyez toutes ces especes de cornet, Planche VII. de Lutherie, fig. 6. 7. 10. 11. 12. 13. & 15.
Cornet, (Orfévrer.) opération de l’essai de l’or ; la derniere forme que l’on donne à la plaque préparée pour faire l’essai. Quand on l’a rendue aussi mince qu’il convient, on la tourne sur un arbre de fer en forme de cornet ; c’est sous cette forme qu’on la met dans l’acide nitreux. C’est un terme tellement consacré à cette opération, que quand on en parle on dit : le cornet est beau, bien sain, ou il est détérioré.
Cornet, (grand) Lutherie, jeu d’orgue, un de ceux qu’on appelle composés, c’est-à-dire qui ont sur chaque touche plusieurs tuyaux qui parlent à la fois. Ce jeu est composé du dessus de bourdon de 8 piés A, d’un dessus de flûte B, d’un dessus de nazard C, d’un dessus de quarte nazard D, & d’un dessus de tierce E, fig. 3. Pl. d’Orgue. Les sons de ces tuyaux forment l’accord parfait, dans lequel l’octave est redoublée. Voyez la table du rapport & de l’étendue des jeux de l’Orgue, & Cornet d’écho, & Cornet de récit, dont celui-ci ne differe que parce qu’il est de plus grosse taille.
Cornet d’écho, (Lutherie.) est un jeu d’orgue de la classe de ceux qu’on appelle composés, c’est-à-dire de ceux qui ont plusieurs tuyaux sur chaque touche qui parlent tous à la fois. Les tuyaux sur une même touche font un dessus de bourdon, un dessus de flûte, un dessus de nazard, un dessus de quarte de nazard, & un dessus de tierce, qui parlent tous ensemble ; ce qui fait sur chaque touche l’accord parfait, dans lequel l’octave est redoublée, ut sol, ut mi. En montant il n’est composé que des dessus de ces jeux, parce qu’il n’a d’étendue que les dessus & les tailles du clavier ou les deux octaves supérieures. Voyez Clavier. Dans quelques orgues ce cornet descend jusqu’à l’f ut fa de la clé de fa. Voyez l’artic. Orgue, & la table du rapport de l’étendue des jeux de l’orgue, qui contient un cornet de deux octaves seulement, lequel commence à la clé de c sol ut, & la fig. 43. Pl. d’Orgue.
La place du cornet d’écho est dans le bas du fust de l’orgue, pour que ses sons soient étouffés en partie, & qu’ainsi il imite mieux l’écho. Pour la même raison on fait les tuyaux de plus menue taille que ceux du cornet de récit.
Ce jeu est ordinairement sur un sommier séparé, qui reçoit le vent du grand sommier par des porte-vents de plomb, qui prennent dans les gravures du sommier de l’orgue, & le vont porter aux gravures du sommier du cornet ; ou bien il a une loge particuliere, dont les soupapes sont ouvertes par un abregé dont les touches du troisieme clavier tirent les targettes. Voyez Orgue, Abregé, &c.
Cornet de récit, (Lutherie.) est un jeu de la classe de ceux qu’on appelle composés, c’est-à-dire qui ont sur chaque touche plusieurs tuyaux qui parlent à la fois ; voyez Cornet d’écho, dont il ne differe, que parce que ses tuyaux sont un jeu de plus grosse taille, quoiqu’ils soient à l’unisson, & qu’au lieu d’être renfermé dans le bas de l’orgue, il est au contraire placé au haut, derriere les tuyaux de la montre, en lieu où il puisse facilement se faire entendre. Ce jeu qui a deux octaves ou deux octaves & quinte d’étendue, est sur un sommier & un clavier séparé, dont les soupapes sont ouvertes par un abrégé séparé. Voyez Abregé & Orgue, où la facture de ce jeu est expliquée, & la table du rapport de l’étendue des jeux de l’orgue.
* Cornet, on donne ce nom à un morceau de papier, lorsqu’après l’avoir roulé sur lui-même, on en a formé une espece de vaisseau pointu par un bout & fort évasé par l’autre, où l’on peut renfermer des substances solides & même fluides, lorsqu’elles ont une certaine consistance, & qu’on ferme par le bout pointu en le tortillant, & par le côté évasé en en rabattant les bords de tous côtés sur la surface de la substance contenue dans le cornet.
Cornet, (Chasse.) piége pour des oiseaux voraces, comme corneilles, pies, & autres. Faites des cornets de fort papier gris ou bleu ; frottez-en le dedans avec de la glu, & mettez au fond quelque morceau de charogne ou autre apas qui les attire : en fourrant la tête dans le cornet, la glu s’attachera à leurs plumes, & ainsi ne pouvant pas voir, ils retomberont & on les prendra à la main.
* Cornet, c’est la partie d’un écritoire, qui contient l’encre. Comme cette partie étoit de corne dans les écritoires communes, on l’a appellée cornet, & ce nom a passé à tous les vaisseaux, ou de cuivre, ou d’argent, ou d’or, ou de verre, qui ont la même destination dans toutes sortes d’écritoires. Les cornets des écritoires de cornes se font avec la corne du bœuf. Se monter, être applatie, s’ouvrir & s’étendre, sont les premieres façons qu’on lui donne quand on la travaille. Voyez Galins, Ouvrir, Fendre, Etendre, Applanir, Cornetier-Tabletier
Cornet, (Pâtisserie.) espece de gaufre faite de farine & de sucre ou de miel délayés : on cuit le cornet entre deux fers gravés, qui y marquent en relief les traits qu’on y voit ; au sortir du fer on le tortille & on lui donne la forme d’un cornet d’épice.
Cornet, (Jeux de hasard.) espece de petit gobelet rond & délié, ordinairement de corne, & dont on fait usage pour agiter les dés quand on joüe.
Le cornet dont les anciens se servoient pour joüer aux dés & aux osselets, & qui peut être fut inventé pour empêcher les coups de main, étoit rond en forme d’une petite tour, plus large par le bas que par le haut, dont le cou étoit étroit. Ordinairement il n’avoit point de fond, mais plusieurs degrés au-dedans, qui faisoient faire aux dés & aux osselets plusieurs cascades avant que de tomber sur la table, comme il paroît par ce passage d’Ausone :
Alternis vicibus, quos præcipitante rotatu
Fundunt excussi per cava buxa gradus.
On l’appelloit chez les latins, turris, turricula, orca, phimûs, fritillus, &c. Ce sont les Tabletiers-Cornetiers qui font les cornets. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.