L’Encyclopédie/1re édition/BASSIN

BASSIN, s. m. se dit en général ou d’un réservoir d’eau, ou d’un vaisseau destiné à en puiser ou à en contenir. Voy. ci-dessous des définitions & des exemples des différentes sortes de bassins.

Bassin (en Architecture), c’est dans un jardin un espace creusé en terre, de figure ronde, ovale, quarrée, à pans, &c. revêtu de pierre, de pavé, ou de plomb, & bordé de gason, de pierre ou de marbre, pour recevoir l’eau d’un jet, ou pour servir de réservoir pour arroser. Les Jardiniers appellent bac, un petit bassin avec robinet, comme il y en a dans tous les petits jardins du potager à Versailles.

Bassin de fontaine, s’entend de deux manieres, ou de celui qui est seulement à hauteur d’appui au-dessus du rez-de-chaussée d’une cour ou d’une place publique : ou de celui qui est élevé sur plusieurs degrés, avec un profil riche de moulures & de forme réguliere, comme ceux de la place Navone à Rome.

Bassin figuré, est celui dont le plan a plusieurs corps ou retours droits, circulaires ou à pans, comme ceux de la plûpart des fontaines de Rome.

Bassin à balustrade, celui dont l’enfoncement plus bas que le rez-de-chaussée, est bordé d’une balustrade de pierre, de marbre ou de bronze, comme le bassin de la fontaine des bassins d’Apollon à Versailles.

Bassin à rigole, celui dont le bord de marbre ou de caillou, a une rigole taillée, d’où sort d’espace en espace un jet ou bouillon d’eau, qui garnit la rigole, & forme une nappe à l’entour de la balustrade, comme à la fontaine du rocher de Belvéder à Rome.

Bassin en coquille, celui qui est fait en conque ou coquille, & dont l’eau tombe par nappes ou gargouilles, comme la fontaine de Palestrine à Rome.

Bassin de décharge, c’est dans le plus bas d’un jardin, une piece d’eau ou canal, dans lequel se déchargent toutes les eaux après le jeu des fontaines, & d’où elles se rendent ensuite par quelque ruisseau ou rigole dans la plus prochaine riviere.

Bassin de partage ou de distribution, c’est dans un canal fait par artifice, l’endroit où est le sommet du niveau de pente, & où les eaux se joignent pour la continuité du canal. Le repaire où se fait cette jonction est appellé point de partage. Il y en a un beau à Versailles au-dessus des réservoirs du parc au cerf, & un autre à Chambly, appellé le bassin des sources.

Bassin de port de mer, c’est un espace bordé de gros murs de maçonnerie, où l’on tient des vaisseaux à flot. Voyez plus bas Bassin (Marine.)

Bassin de bain, c’étoit dans une salle de bain chez les anciens, un enfoncement quarré long où l’on descendoit par degrés pour se baigner ; c’est ce que Vitruve appelle labrum.

Bassin à chaux, vaisseau bordé de maçonnerie, & plancheyé de dosses ou maçonné de libages, dans lequel on détrempe la chaux. Mortarium dans Vitruve, signifie autant le bassin que le mortier. (P)

Construction des bassins des Jardins. On ne sauroit apporter trop de soin à la construction des bassins & pieces d’eau ; la moindre petite fente qui augmente toûjours de plus en plus, peut devenir, par la pesanteur de l’eau, une fente considérable.

On place ordinairement les bassins à l’extrémité ou dans le milieu d’un parterre : ils ne font pas moins bien dans un potager, dans une orangerie & dans les bosquets. Leur forme ordinaire est la circulaire, il y en a cependant d’octogones, de longs, d’ovales, & de quarrés : quand ils passent une certaine grandeur, ils se nomment pieces d’eau, canaux, miroirs, viviers, étangs & réservoirs.

Pour la grandeur des bassins, on ne peut guere déterminer de juste proportion, elle dépend du terrein ; & celle qui est entre le jet & le bassin, est déterminée par la chûte & la force des eaux : leur profondeur ordinaire est de 15 à 18 pouces, ou deux piés tout au plus, & s’augmente quand ils servent de réservoirs.

On construit les bassins de quatre manieres, en glaise, en ciment, en plomb, & en terre franche : soit le bassin A (fig. 1. Jardin.) qu’on veut construire en glaise, de six toises de diametre dans œuvre ; faites ouvrir la place tracée sur le terrein, de ce qu’il convient pour les épaisseurs du pourtour & du plafond ; le mur de terre B doit avoir un pié au moins ; le mur de douve, ou d’eau C, dix-huit pouces, & le corroi de glaise entre-deux, dix-huit de large, ce qui fait en tout quatre piés, dont il faut augmenter de chaque côté le diametre pour la fouille : on a donc huit piés en tout ; on creusera aussi, pour le fond ou plat-fond du bassin, deux piés plus bas que la profondeur qu’on lui voudra donner ; ces deux piés de fouille seront pareillement occupés par le corroi de glaise de dix-huit pouces, & les autres six pouces seront pour le sable & le pavé qu’on répandra dessus la glaise ; ainsi ce bassin creuse de sept toises deux piés de diametre, & de quatre piés de bas, reviendra à six toises d’eau dans œuvre, & deux piés de creux, qui sont l’étendue & la profondeur requises. Elevez & adossez, contre les terres, le mur B d’un pié d’épaisseur depuis le bas de la fouille, jusqu’à fleur de terre ; bâtissez de moellons, libages, ou pierres de meuliere avec du mortier de terre ; faites ensuite apporter la glaise dans le fond du bassin, que vous préparerez en la rompant par morceaux, en y jettant de l’eau, & la labourant deux ou trois fois sans y souffrir aucunes ordures ; faites ensuite jetter par pelletées la glaise contre le mur, & pétrir à piés nuds, de dix-huit pouces d’épaisseur, & de sept à huit piés environ de large, tout au pourtour de ce mur, pour y poser, à dix-huit pouces de distance, le mur de douve C, qui doit porter sur une plate-forme & racinaux DD. Prenez du chevron de trois pouces d’épaisseur, ou des bouts de planches de bateau, épais de deux pouces, & larges de cinq à six ; enfoncez-les à fleur de glaise, de trois piés en trois piés, ensorte qu’ils débordent un peu le parement du mur en dedans le bassin, c’est ce que l’on nomme les racinaux ; mettez ensuite dessus de longues planches de bateau dont deux, jointes ensemble, seront de la largeur du mur, lesquelles vous cloüerez ou chevillerez sur les racinaux ; vous poserez ensuite la premiere assise du mur de douve, que vous éleverez à la hauteur de l’autre, & de dix-huit pouces d’épaisseur, bâti avec du mortier de chaux & sable. On remplira le vuide, ou l’espace entre les deux murs E, appellé le corroi, d’une glaise bien préparée, & on la pétrira jusqu’à fleur de terre.

Pour travailler au plat-fond F, on remplira de glaise toute l’étendue du bassin pour y faire un corroi de dix-huit pouces de haut, en recommençant à pétrir les glaises que l’on a d’abord étendues au-delà des racinaux, & les liant avec celles du plat-fond, qu’on couvrira ensuite de sable, de cinq à six pouces de hauteur, avec un pavé garni d’une aire GG, d’un pouce d’épaisseur de ciment, ou une blocaille de pierres plates posées de champ & à sec dans le sable pour nettoyer plus proprement le bassin, & empêcher le poisson de fouiller.

Les bassins de ciment (fig. 2.) sont construits d’une maniere bien différente. On recule la trace du bassin, d’un pié neuf pouces dans le pourtour, & autant dans le plat-fond, ce qui est suffisant pour retenir l’eau ; ainsi pour un bassin de six toises de diametre, on fouillera six toises trois piés & demi, & on creusera un pié neuf pouces plus bas que la profondeur qu’on a dessein de lui donner. Elevez & adossez contre la terre le mur de maçonnerie H, depuis le fond jusqu’au niveau de la terre, & bâti de moellons & libages, avec du mortier de chaux & sable tout autour ; ensuite commencez le massif du fond I, d’un pié d’épaisseur, & construit des mêmes matériaux & mortier ; on joindra au mur, & au plat-fond, un massif ou chemise de ciment K, de neuf pouces d’épaisseur bâti de petits cailloux de vigne mis par lits, & couverts de mortier de chaux & ciment, qu’il ne faut point épargner, de maniere que les cailloux ne se touchent point, & regorgent de mortier partout ; il faudra enduire le tout avec du mortier plus fin, c’est-à-dire, avec du ciment passé au sas avant que de le délayer avec la chaux, unir cet enduit avec la truelle, & le frotter ensuite plusieurs jours avec de l’huile.

Les bassins de plomb (fig. 3.) n’ont de singulier, dans leur construction, que les murs faits du mortier de plâtre, parce que la chaux mine le plomb ; on fera le mur de terre L, du double d’épaisseur de celui du plat-fond M, & l’on assûrera dessus ces murs les talles de plomb n, n, n, qui seront jointes ensemble avec des nœuds de soudure o, o, o.

Les bassins en terre franche sont à peu près construits comme ceux de glaise, à l’exception que les corrois seront plus larges, ayant trois & quatre piés, & les murs d’un pié & demi ou deux, seront en mortier de terre seulement, & fondés sur la masse de terre franche qui regne dans tout le terrein. Ces bassins se peuvent faire avec un seul mur du côté de l’eau, en délayant la terre franche sur le bord, & la coulant dans le corroi.

On aura soin d’entourer le pourtour des bassins, de bordures de gason, afin de préserver les corrois de l’ardeur du soleil. (K)

Bassin (Marine.) on donne ce nom, dans les ports de mer, au lieu où l’on retire les vaisseaux pour les mettre plus à l’abri, les radouber, les armer & desarmer avec plus de facilité, ou y faire les réparations nécessaires. Voyez Pl. VII. fig. 1. Mar. un bassin coté AA, & sa disposition au milieu de l’arsenal. Il y a deux sortes de bassins ; les uns qu’on peut emplir & mettre à sec à volonté, au moyen d’une écluse qui en ferme l’entrée ; & d’autres qui sont tout ouverts, & dont le fond étant de vase molle, se remplit d’eau quand la mer monte, & se vuide quand elle descend. Voyez Darse. (Z)

Bassin, en terme d’Anatomie, est la partie la plus inférieure de la cavité de l’abdomen : il est ainsi appellé de sa ressemblance à un bassin ou à une aiguiere, appellée pelvis en Latin. Voyez Abdomen.

Le bassin est toûjours plus large ou plus grand dans les femmes que dans les hommes, pour faire place à l’accroissement du fœtus. Voyez Matrice.

Cette cavité est très-bien fortifiée par les os, pour mettre à couvert des injures du dehors les parties qui y sont contenues. Le bassin est formé ou environné par les os des hanches, le coccyx, & l’os sacrum. Voyez Hanche, Coccyx.

Le bassin des reins est un grand sinus ou cellule membraneuse dans la partie concave des reins. Voy. l’article Anat. les Planch. & leur explic. Voy. Reins. Des douze mammelons des reins sortent douze canaux appellés tuyaux membraneux, fistulæ membranaceæ ; ils se réunissent ensuite en trois grosses branches, d’où enfin il en résulte une seule qui forme le bassin ; ce bassin venant encore à se contracter, se termine en un canal membraneux appellé l’urétere. Voy. Mammelon & Uretere.

L’urine étant séparée du sang par les canaux urinaires, auxquels elle a été apportée par les mammelons, les tuyaux membraneux la reprennent pour la reporter dans le bassin, d’où elle se décharge dans l’urétere, & de-là dans la vessie, &c. Voy. Urine, &c.

Bassin oculaire, instrument de Chirurgie, petite soûcoupe ovale très-commode pour laver l’œil. Sa matiere est d’argent ; sa construction consiste en une petite gondole qui a environ un pouce cinq lignes de long, sur dix ou onze lignes de diametre, plus élevé par les angles que dans le milieu, afin de s’accommoder à la figure globuleuse de l’œil : elle n’a pas plus de cinq lignes de profondeur, & est montée sur un pié artistement composé, comme on peut le voir dans la fig. 16. Pl. XXIII. ce pié a environ deux ou trois pouces de hauteur.

Pour se servir de cet instrument, il faut le remplir à moitié de la liqueur avec laquelle on veut bassiner l’œil, puis on le prend par le pié, & l’on baisse la tête, afin de faire entrer le globe de l’œil dans la soûcoupe, qui est construite de façon à occuper toute la circonférence de la cavité orbitaire : on ouvre ensuite l’œil, & la liqueur contenue dans ce bassin le mouille parfaitement.

Fabrice d’Aqua-pendente, célebre Medecin-Chirurgien, & professeur d’Anatomie à Padoue, a le premier imaginé l’application des remedes aqueux sur l’œil : il se servit d’abord de ventouses communes que l’on tenoit sur l’œil avec la main, comme le bassin oculaire dont on vient de parler ; ce qu’il remarqua être fort incommode : il en fit faire avec des anses sur chaque côté, dans lesquelles on passoit un cordon pour attacher le vase derriere la tête. Ces petits vaisseaux de crystal faits de façon à s’appliquer exactement sur la circonférence de l’orbite, lui parurent exiger encore une perfection ; car les liqueurs tiedes faisant transpirer la partie, & la matiere de cette transpiration ne trouvant aucune issue, l’œil & les parties qui l’avoisinent pouvoient se gonfler par l’usage de ces remedes. Pour prévenir les fluxions, & autres accidens qui seroient l’effet du défaut de transpiration, il fit ajoûter au-dessus de la gondole un petit tuyau percé, par lequel on pût aussi verser les liqueurs convenables au moyen d’un entonnoir, après avoir mis le vase en situation. L’auteur la nomme phiole oculaire, & assûre avoir dissipé des cataractes commençantes par l’usage des remedes convenables appliqués par le moyen de cet instrument. (Y)

Bassin (vente au) Comm. nom que l’on donne à Amsterdam aux ventes publiques qui se font par autorité de justice, & où préside un officier commis par les bourgue-mestres, qu’on nomme vendu-meester, c’est-à-dire, maître de la vente. On appelle cette vente vente au bassin, parce qu’avant que de délivrer les lots ou cavelins au plus offrant & dernier enchérisseur, on frappe ordinairement sur un bassin de cuivre, pour avertir qu’on va adjuger. Voyez Vendu-meester. (G)

Bassins d’une balance, sont deux especes de plats qu’on suspend au bout des bras d’une balance, & dans lesquels on met les poids qu’on veut peser. V. Balance. (O)

Bassin, terme de Boulanger, est une espece de casserole à queue de tole blanche, ou fer-blanc épais, dont on se sert pour puiser l’eau dans la chaudiere, & la mettre dans le pétrin en quantité convenable. Voy. Pl. du Boulanger, fig. 4.

Bassin, instrument de Chapelier, c’est une grande plaque ronde de fer ou de fonte, qui se place sur un fourneau, pour bâtir les étoffes dont on compose les chapeaux.

Les Chapeliers ont aussi des bassins à dresser les bords des chapeaux : ces bassins ont au milieu une ouverture ronde, assez grande pour y faire entrer les formes les plus larges. Ces bassins sont ordinairement de plomb, & ont par-dessus deux mains, afin que le chapelier puisse les mettre sur les bords des chapeaux, & les enlever facilement. V. Chapeau. Voyez la fig. 4. Pl. du Chapelier.

Bassin a barbe, est une espece de plat creux, rond, & quelquefois ovale, dont les Barbiers-Perruquiers se servent pour savonner le visage des personnes qu’ils rasent. Ce plat est toûjours échancré par un de ses côtés, afin de pouvoir être serré près du cou de la personne qu’on savonne, de peur que l’eau de savon qui tombe du visage ne coule le long du cou & sur les habits.

Les bassins à barbe se font de plusieurs sortes de matieres ; il y en a de fayence, de porcelaine, d’étain, de cuivre, d’argent, &c. Voyez sa fig. Plan. du Perruquier.

Bassin, s. m. (Lunetier.) les Miroitiers-Lunetiers se servent de divers bassins de cuivre, de fer ou de métal composé, les uns grands, les autres plus petis, ceux-ci plus profonds, ceux-là moins, suivant le foyer des verres qu’ils veulent travailler. Voyez les fig. 1. & 2. Pl. du Lunetier ; la premiere représente un bassin de six pouces de foyer ; B le bassin, A son profil : la seconde représente un bassin de trois pouces de foyer ; B est le bassin, & C son profil. Ces bassins sont représentés dans les figures scellées sur la table de l’établi.

C’est dans ces bassins que se font les verres convexes : les spheres, qu’on nomme autrement des boules, servent pour les verres concaves ; & le rondeau, pour les verres dont la superficie doit être plane & unie. Voyez ces deux derniers outils à leurs lettres.

On travaille les verres au bassin de deux manieres : pour l’une l’on attache le bassin à l’arbre d’un tour, & l’on y use la piece, qui tient avec du ciment à une molette de bois, en la présentant & la tenant ferme de la main droite dans la cavite du bassin, tandis qu’on lui donne avec le pié un mouvement convenable : pour l’autre, on affermit le bassin sur un billot ou sur un établi, n’y ayant que la molette garnie de son verre qui soit mobile. Les bassins pour le tour sont petits, & ne passent guere six à sept pouces de diametre : les autres sont très-grands, & ont plus de deux piés de diametre.

Pour dégrossir les verres qu’on travaille au bassin, on se sert de grès & de gros émeri : on les adoucit avec les mêmes matieres, mais plus fines, & tamisées : le tripoli & la potée servent à les polir : enfin on en acheve le poliment au papier, c’est-à-dire, sur un papier qu’on colle au fond du bassin. Quelques-uns appellent ces bassins des moules, mais improprement. Voyez Miroitier & Lunette.

La maniere la plus convenable pour faire ces bassins, est le fer & le laiton, l’un & l’autre le plus doux qu’on puisse trouver : car comme ils doivent être formés sur le tour, la matiere en doit être traitable & douce, mais pourtant assez ferme pour bien retenir sa forme dans le travail des verres. Ces deux sortes de matieres sont excellentes, & préférables à toutes les autres : le fer néanmoins est sujet à la rouille, & le laiton ou cuivre jaune à se piquer & verdir par les liqueurs acres & salées ; c’est pourquoi ces deux matieres demandent que les instrumens qui en sont faits soient proprement tenus, bien nettoyés & essuyés après qu’on s’en est servi. L’étain pur & sans alliage est moins propre pour le premier travail de verre qui est le plus rude, à cause que sa forme s’altere aisément : on peut cependant l’employer utilement après l’avoir allié avec la moitié d’étain de glace. Le métal allié, qu’on ne peut former au tour à cause de sa trop grande dureté, comme celui des cloches qui est composé d’étain & de cuivre, ne vaut rien pour les formes dont nous parlons.

On peut préparer ces deux matieres à recevoir la forme de deux manieres, suivant qu’elles sont malléables ou fusibles : elles demandent toutes deux des modeles sur lesquels elles puissent être formées, au moins grossierement d’abord, pour qu’on puisse ensuite les perfectionner au tour. La matiere malléable demande pour modele des arcs de cercle, faits de matiere solide sur les diametres des spheres desquelles on veut les former. Celle qui est fusible demande des modeles entiers de matiere aisée à former au tour ; comme de bois, d’étain, &c. pour en tirer des moules dans lesquels on puisse la jetter pour lui donner la forme la plus approchante de celle qu’on desire ; car il est ensuite fort aisé de la rendre réguliere, & de la perfectionner au tour.

Quoiqu’on puisse forger les formes de laiton ou cuivre jaune à froid au marteau, je conseille cependant de les mouler en fonte, & de leur donner même une épaisseur convenable à la grandeur de la sphere dont on veut les former, aussi bien qu’à la largeur de la superficie qu’on veut leur donner : premierement à cause qu’étant forgées & écrouïes à froid, elles feroient aisément ressort sur leur largeur, & qu’elles altéreroient par ce moyen leur forme dans l’agitation du travail ; en second lieu, pour empêcher par cette épaisseur convenable que ce métal s’échauffant sur le tour, ne se roidisse contre l’outil, comme il fait pour l’ordinaire, se rejettant dehors avec violence jusqu’à s’applanir, ou même devenir convexe de concave qu’il étoit, s’il n’a pas une épaisseur suffisante pour résister à son effort.

Pour faire les modeles qui doivent servir à faire les moules de ces platines, on ne sauroit employer de meilleure matiere que l’étain, à cause qu’on peut le fondre avec peu de feu, & le tourner nettement sans altérer sa forme. Le bois néanmoins qui est plein, comme le poirier ou le chêne, qui est gras & moins liant étant bien sec, y peut servir assez commodément : pour l’empêcher même de s’envoiler, & de se déjetter à l’humidité de la terre ou du sable qui servent à les mouler, aussi-bien que dans les changemens de tems, il convient de l’enduire & imbiber d’huile de noix, de lin, ou d’olive au défaut de ces deux premieres, laissant doucement sécher ces modeles d’eux-mêmes, dans un lieu tempéré & hors du grand air.

La meilleure maniere de mouler ces modeles, est celle où l’on employe le sable. Tout cuivre n’est pas propre pour faire ces formes : on doit choisir celui qui est jaune, & qu’on nomme laiton doux ; on peut aussi se servir d’étain pur d’Angleterre, ou de celui d’Allemagne, allié avec moitié d’étain de glace. Le fer bien doux est aussi fort propre pour faire les bassins à travailler les verres.

M. Goussier a trouvé une méthode de donner aux bassins & aux moules dans lesquels il fond les miroirs de télescopes, telle courbure qu’il peut souhaiter, soit parabolique, elliptique, hyperbolique, ou autre dont l’équation est donnée. Cette méthode sera expliquée dans un ouvrage particulier qu’il doit donner au public, sur l’art de faire de grands télescopes de réflexion, d’en mouler les miroirs, de maniere qu’ils sortent du moule presque tout achevés.

Nous allons expliquer la machine dont il se sert pour concaver les formes ou bassins concaves de courbure sphérique : cette machine est la même que celle dont il se sert pour donner aux bassins ou aux moules toute autre courbure, en y faisant seulement quelques additions dont nous donnerons l’idée à la fin de cet article.

Cette machine représentée fig. 9-15. Pl. du Lunetier, est proprement un tour en l’air, dont l’axe FH est vertical ; il passe dans deux collets F & H, fixés l’un à la table & l’autre à la traverse inférieure d’un fort établi, qui est lui-même fortement attaché au mur de l’attelier.

Le premier de ces collets F est ouvert en entonnoir, pour recevoir la partie conique de l’axe représenté en F fig. 15. le second H est seulement cylindrique.

Vers la partie inférieure de l’axe, à deux ou trois pouces du collet H, est fixée une poulie G, sur laquelle passe la corde sans fin qui vient de la roue horisontale I, que l’on met en mouvement au moyen du bras L, qui se meut librement sur les pivots de l’arbre RS. Ce bras comunique par le lien LK à la manivelle excentrique de l’axe de la roue. Cette méchanique est la même que celle du moulin des Lapidaires. Voyez Moulin.

La partie supérieure de l’axe HF est armée d’un cercle de fer exactement tourné & centré sur l’axe qui est soûtenu par trois ou quatre branches, qui partant de l’axe, vont s’attacher à sa circonférence. Il appelle cette piece main, qui est représentée séparément fig. 15. on en va voir la raison, & combien il est essentiel qu’elle soit exactement centrée.

Aux deux côtés de la main sont fixées sur l’établi deux poupées DD ; la ligne qui joint ces deux poupées doit passer le centre de l’anneau de la main : c’est sur ces deux poupées que l’on fixe la regle de fer MM, au moyen de deux vis nn, en sorte qu’une de ses arrêtes soit un diametre de la main dans laquelle on place le bassin, représenté fig. 13. & 14. cette derniere le représente en profil, aa est un rebord qui s’applique sur l’anneau de la main ; on y fait un repaire commun pour pouvoir replacer le bassin au même point où on l’a placé la premiere fois. Le bassin doit être de laiton fondu, & tourné auparavant sur le tour en l’air. Voyez Tour en l'air.

Au-dessus du bassin, dans la direction de l’axe HF, est fortement scellée dans le mur une potence de fer AB, à la surface supérieure de laquelle est un petit trou de forme conique : ce trou doit être précisément dans la direction de l’axe HF, & autant éloigné de la surface du bassin F, que l’on veut que le foyer du même bassin le soit.

Le trou dont nous venons de parler reçoit la pointe b de la vis a, fig. 10. qui traverse la partie supérieure de l’ouverture O du compas B C, fig. 9. Ce compas est formé par quatre regles de fer ou de bois, assemblées comme on voit en b, même fig. La partie inférieure C du compas BC, représentée en grand fig. 11. est quarrée, & garnie de deux frettes de fer OP, qui servent, au moyen des vis qui les traversent, à assujettir le burin ab, qui est aigu en b ; l’autre burin représenté fig. 12. est arrondi, & sert à effacer les traits que le premier peut avoir laissé sur le bassin.

Toutes choses ainsi disposées, on applique le dos du burin contre la regle de fer MM, qui est courbée en arc de cercle dont le centre est la pointe de la vis a. Pour qu’elle soit parallele à la surface du bassin, on avance ou on recule cette regle, en sorte que lorsque le dos du burin glisse contre son arrête, la pointe du burin décrive exactement un diametre du bassin.

Maintenant si on fait mouvoir l’extrémité inférieure du compas le long de la regle de fer MM, en même tems que le bassin E est mis en mouvement par le moyen de la roue I, comme il a été expliqué, on conçoit que la pointe du burin dont le compas est armé, doit emporter toutes les parties de métal du bassin qui excedent la surface sphérique concave qui a pour centre le point autour duquel le compas se meut, qui est la pointe du pivot de la vis a : mais comme la pointe de cette vis est par la construction dans la direction de l’axe de rotation HF, & que la pointe du burin décrit un arc de cercle, cela produit le même effet que si un secteur de cercle tournoit sur la ligne qui passe par le centre & le milieu de l’arc du secteur, qui, comme il est démontré en Géométrie, décrit une surface sphérique.

Après que la pointe du burin a enlevé les parties du métal qui excédoient la surface sphérique concave, on efface les traits qu’elle peut avoir laissés avec le burin arrondi représenté fig. 12. que l’on met en place du premier.

Pour décrire une surface paraboloïdale, hyperboloïdale, ou autre, il suffit, comme on voit, de trouver le moyen de faire décrire à l’extrémité du burin la parabole, l’hyperbole, ou autre courbe dont le secteur, à cause du mouvement de rotation du bassin, décrira la surface que la courbe engendreroit en tournant sur son axe : c’est ce que M. Goussier exécute par le moyen de plusieurs leviers, qui font hausser ou baisser le point de suspension a du compas, à mesure que son extrémité inférieure C avance de côté ou d’autre. Cette machine sera représentée & expliquée dans l’ouvrage annoncé dans cet article.

Bassin d’empli, en terme de rafinerie de sucre, est un vase de cuivre qui ne differe du bassin de cuite que par son embouchure qui fait le demi-cercle. Voy. Bassin de cuite. On l’appelle bassin d’empli, parce qu’il sert effectivement à faire les emplis, & à transporter la cuite du rafraîchissoir dans les formes. Voyez Forme & Rafraichissoir.

Bassin de cuite est, parmi les Rafineurs de sucre, un vase de cuivre tenant à peu près deux seaux, de figure oblongue, arrondi vers son extrémité où il est le plus profond, & angulaire vers son embouchure. Il est garni de deux poignées, & surmonté de deux hauts bords, qui diminuent jusqu’à l’embouchure où ils n’excedent plus le fond. Ce bassin sert à transporter la cuite dans le rafraîchissoir. Voyez Cuite & Rafraichissoir.

Bassin à clairée, parmi les Rafineurs de sucre, est un vase rond, & également surchargé de bords tout autour, & qui représente assez la figure d’un seau : vers son fond il y a un commencement de tuyau, qui fait même piece avec le bassin, dans lequel on emmanche la dale. Voyez Dale. Ce bassin sert à passer la clairée. Voyez Clairée & Passer.

Bassins, Bassinets, ou Boutons d’or, elychrysum, fleur basse de diverses couleurs, ordinairement jaunes, à dix feuilles assez larges, & un godet au milieu de la même couleur, & qui porte sa graine. Cette fleur demande beaucoup d’eau & de soleil, avec de la terre à potager : on la leve au bout de trois ans pour en ôter le peuple. Il y en a de plusieurs especes ; le simple à fleur jaune, le bassinet à fleur d’écarlate, le double à fleur jaune, le bassinet à feuilles frangées, & le bassinet rond. Ils fleurissent tous au printems. (K)