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Livre:Discorso filosofico-politico sopra la carcere de' debitori.djvu

-îmrL GstPiô Umcdu - l’A’ r A’
-rDISCOURS PHILOSOPHIQUE
+DISCOURS PHILOSOPHIQUE
-POLITIQUE sur l’emprisonnement pour dettes, Traduit de 1 Italien, Non a Trcetoriâ Edicté ut pUrujuenunc, rve-que a XU. TabuLà ut Supertore^x- sedpenùtuf ea>j intima Fhdosophta haurïmdamjurù) dùctplinam puto Cicero dt L^ii.ub z. HARLEM, /g^y-’vr: Et s, vend G|)£j APARIS, %pf^ Chez, JVtolmi Libraire
+POLITIQUE SUR L’EMPRISONNEMENT POUR DETTES. Traduit de l’Italien. Non a Prætoris Edicto, ut plerique nunc, neque a XII Tabulis, ut Superiores, sed penitus ex intima Philosophia hauriendam juris disciplinam puto. Cicero de Legib. Lib. I. HARLEM, Et se vend A PARIS, Chez Molini Libraire
-de lixB&pe, j t w’j-a-vzJ la
+de la Harpe, vis-à-vis la
-la Parc/iemûierie M.DCC.LXXI .
+la Parcheminerie. M · DCC · LXXI.
-A AVERTISSEMENT
+AVERTISSEMENT
-a traduitce petitouvrage parcequ’ona cru y voirdesidées neuvesfurunematiereintéreffante, qu’ilpeutêtreutiled’agiterau tribunaldupublic.Quoiqu’onfoitde l’avisdel’auteurfur le fondmême de la queftion>on neprétendpas approuverfansreftri&iontous les principesfurlefquelsilfefonaepour profcrirel’emprifonnementpour dettes.Il y
+a traduit ce petit ouvrage, parce qu’on a cru y voir des idées neuves sur une matiere intéressante, qu’il peut être utile d’agiter au tribunal du public. Quoiqu’on foit de l’avis de l’auteur sur le fond même de la question, on ne prétend pas approuver sans restriction tous les principes sur lesquels il se fonde pour proscrire l’emprisonnement pour dettes. Il y
-a quelques-unsqui paroiffenthafardés ou avoirbe«
+a quelques-uns qui paroissent hasardés, ou avoir be-
-<) foind’explications.Teleft particuliérementce qu’ilavancedu droit naturelque tout hommea, felon lui,à fafubfiftancenéceffairemaximequipeutmenertroploin, & quifemblepouvoirdonneratteinte à l’ordrecivil, en bleffantle droit depropriétédanslesautrescitoyens, fousprétextede leconferverdans la perfonnedu débiteur.On peut fairequelquesautresdifficultésfondéescontrela doôrinede l’auteur Italien,& nousfouhaitonsqu’onles luifaffe.Cettedifcuffionnepeutêtre qu’utile,&c’eflprincipalement dans lavuedelafairenaîtrequ’ondonne cet eflaiaupublic.On peutlejoin-
+soin d’explications. Tel est particuliérement ce qu’il avance du droit naturel que tout homme a, selon lui, à sa subsistance nécessaire : maxime qui peut mener trop loin, & qui semble pouvoir donner atteinte à l’ordre civil, en blessant le droit de propriété dans les autres citoyens, sous prétexte de le conserver dans la personne du débiteur. On peut faire quelques autres difficultés fondées contre la doctrine de l’auteur Italien, & nous souhaitons qu’on les lui fasse. Cette discussion ne peut être qu’utile, & c’est principalement dans la vue de la faire naître qu’on donne cet essai au public. On peut le join-
-U) Aij eueautraitedei dtlmiedellepêne; quiparoîtfaitdansle mêmeefprit & quia étéuniversellement accueil li.On ignorelenomdel’auteurde celui-ci maison ne peuts’eînpê* cherdy reconnoître,commedans letraitédesdélits&despeines,des vuesprofondes& l’amourdel’humanité.
+dre au traité de i delitti e delle pene ; qui paroît fait dans le même esprit, & qui a été universellement accueilli. On ignore le nom de l’auteur de celui-ci ; mais on ne peut s’empêcher d’y reconnoître, comme dans le traité des délits & des peines, des vues profondes & l’amour de l’humanité.
-Ait) DISCOURS
+DISCOURS
-POLITIQUE Surremprifonnementpour dettes. JLj a richefle& lapauvreté,parmi lescitoyensd’unétat, fontdesinconvéniensnéceffaires delafociété» Chercherà empêchercet effet ce feroitcourirrifquede conduirele corpspolitiqueà laléthargie,dans lavued’y modérerle mouvement. Siledefird’acquérirlesricheffesn’étoitpas encouragépar la certitude d’enjouirà l’abride la prote&ion de laforcepublique legénieperdroittout fon reflbrt& toutefon aâivité il neferoitplusdeprogrès on ne profiteroitplusdefes tx*
+POLITIQUE Sur l’emprisonnement pour dettes. LA richesse & la pauvreté, parmi les citoyens d’un état, sont des inconvéniens nécessaires de la société. Chercher à empêcher cet effet, ce seroit courir risque de conduire le corps politique à la léthargie, dans la vue d’y modérer le mouvement. Si le desir d’acquérir les richesses n’étoit pas encouragé par la certitude d’en jouir à l’abri de la protection de la force publique, le génie perdroit tout son ressort & toute son activité : il ne seroit plus de progrès : on ne profiteroit plus de ses er-
-(7) AIY reursmêmes qui fontfi fouveat utilesil nefeferaitplusdedécouvertes,&lesarts& lesfciencesne fe communiqueroientplus d’une nationà uneautrenation. Ceftunbien,& nonpasunmal, queleshommescivilifésregardent l’or&l’argentcommeunericheffe cetteiUuuojieftd’uneutilitébien générale,parce qu’ellemaintient entre les nationsune dépendance réciproque.Si tous
+reurs mêmes, qui sont si souvent utiles ; il ne se seroit plus de découvertes, & les arts & les sciences ne se communiqueroient plus d’une nation à une autre nation. C’est un bien, & non pas un mal, que les hommes civilisés regardent l’or & l’argent comme une richesse ; cette illusion est d’une utilité bien générale, parce qu’elle maintient entre les nations une dépendance réciproque. Si tous
-étoient uniquementagriculteurs, le fuperflude chaquepays périroitdanslelieu mêmeoù il a étéproduit,& cetteclaflede citoyens,dontlestravauxfontftérilesen cefensqu’ilsneconcourent pas
+étoient uniquement agriculteurs, le superflu de chaque pays périroit dans le lieu même où il a été produit, & cette classe de citoyens, dont les travaux sont stériles en ce sens qu’ils ne concourent pas
-la production feroitpeu nombreufe& circonfcritedansla fpheredespremiers&despluspreffansbefoins.Le commercequine formedetouteslesnationsqu’une
+la production, seroit peu nombreuse & circonscrite dans la sphere des premiers & des plus pressans besoins. Le commerce, qui ne forme de toutes les nations qu’une
-(9) feulefamille,deviendroitnul, & nous perdrionsavec lui
+seule famille, deviendroit nul, & nous perdrions avec lui
-les avantagesqu’il apporteà l’humanité. La claffedes riches& la clafle despauvresentrentdonc néceffairementdansl’organifationdetoute fociétépolitique l’illufionqui fait regarderl’argent comme une richeffey eft néceffaire,& l’intérêt desdépositairesde;l’autoritépubliqueeft d’encourager touslesmoyens licitesd’acquérirces métauxprécieux,en laiffantà tous
+les avantages qu’il apporte à l’humanité. La classe des riches & la classe des pauvres entrent donc nécessairement dans l’organisation de toute société politique ; l’illusion qui fait regarder l’argent comme une richesse y est nécessaire, & l’intérêt des dépositaires de l’autorité publique est d’encourager tous les moyens licites d’acquérir ces métaux précieux, en laissant à tous
-liberté d’enfaireufage au grédeleursfantaifies& de leursdefirs.Lesprivilègesqu’onaccorderoiten celaà quelqnescitoyens à l’exclufiondesautres, feroientautant d’ares d’inr jufticepour le refte de
+liberté d’en faire usage, au gré de leurs fantaisies & de leurs desirs. Les privilèges qu’on accorderoit en cela à quelqnes citoyens, à l’exclusion des autres, seroient autant d’actes d’injustice pour le reste de
-nation. Touslesfujetsdufouveraindoivent êtreégauxà fesyeux.Il peutconfidçrerle pauvre&le richefousles
+nation. Tous les sujets du souverain doivent être égaux à ses yeux. Il peut considérer le pauvre & le riche sous les
-Il rapportsquecettedifférenceétablit entreeux maisl’un & l’autredoiventêtreégalementfournisà la volontégénérale.Celuiqui tient en fesmainsla puiffanceexécutriceeft dansl’obligationde veillerà leur conduite& d’empêcherque le richen’opprimele pauvre.
+rapports que cette différence établit entre eux ; mais l’un & l’autre doivent être également soumis à la volonté générale. Celui qui tient en ses mains la puissance exécutrice est dans l’obligation de veiller à leur conduite, & d’empêcher que le riche n’opprime le pauvre.
-genre d’opprefiionfoit quelquefoisl’effetde cetinftinâ:qui conduitl’hommeà rapportertoutà lui le mal eft dans
+genre d’oppression soit quelquefois l’effet de cet instinct qui conduit l’homme à rapporter tout à lui, le mal est dans
-des choiesmaisque lesloixtravaillent à l’augmenter,c’eftlà de quoipercerun cœur fenfible& le fairegémirfurles malheursde l’humanité. C’eftl’objetaffligeantque préfententlesloixdeprefquetouslespays, contrelesdébiteursinfolvables. Uncitoyenpauvrecontracteune detteavecun hommeriche & prometde le
+des choses ; mais que les loix travaillent à l’augmenter, c’est là de quoi percer un cœur sensible, & le faire gémir sur les malheurs de l’humanité. C’est l’objet affligeant que présentent les loix de presque tous les pays, contre les débiteurs insolvables. Un citoyen pauvre contracte une dette avec un homme riche, & promet de le
-certain tems à fa premièrefomjttation,
+certain tems, à sa première sommation,
-13 parcequ’ilprévoitou efperequ’il buradesmoyenspour cela.Il eft trompédans fon efpérance & fe [voitjettedansuneprifonpourune ettecontraôéede bonne.foiavec on concitoyen.Je n’ai jamaispu comprendre&je necomprendrai amaiscommentcetteviolencepeut ptreautoriféeparlaloi, nicomment n peut confondrecelui qui ne banqueà faparolequeparimpuifance,& non parmauvaifevolonté avecceluiquis’eftefforcéd’enever ou
+parce qu’il prévoit ou espere qu’il aura des moyens pour cela. Il est trompé dans son espérance, & se voit jetté dans une prison pour une dette contractée de bonne foi avec son concitoyen. Je n’ai jamais pu comprendre, & je ne comprendrai jamais comment cette violence peut être autorisée par la loi, ni comment on peut confondre celui qui ne manque à sa parole que par impuissance, & non par mauvaise volonté, avec celui qui s’est efforcé d’enlever, ou
-a enlevéen effetdu épôtpublic la portiondeliberté qu’ily avoitmife & quien abufe udétrimentdelafociété. I L’axiomequi non habetin are Vuatin corponeeu une maximede arbares,Sebleifetropcruellement l’humanité.Les Romains de qui noustenonsnotre jurifprudence, pefurentque desconquérons.S1
+a enlevé en effet du dépôt public, la portion de liberté qu’il y avoit mise, & qui en abuse au détriment de la société. L’axiome qui non habet in ære luat in corpore est une maxime de Barbares, & blesse trop cruellement l’humanité. Les Romains, de qui nous tenons notre jurisprudence, ne furent que des conquérans. Si
-«5) nousvoulonsabsolumentlesregardercommedes légiflateursnous ne devonsprendred’eux que les principesgénérauxdu jufte & de. rinjufte & nonl’applicationdeces principesauxcasparticuliers;applicationdanslaquelleilsont commis uneinfinitédefautesgroffieresen felaiffantguiderpar la férocitéqui entrenéceffairementdansle caractered’unpeupleguerrier(1). Sil’onveut un exemplefrappant de la véritéde ce reproche,on n’a qu’àjetterlesyeux furles loixromainesqui regardentle pouvoir paternel& la fervitude.Le psre pouvoitvendrefesenfans,& avoit fureuxle droit
+nous voulons absolument les regarder comme des législateurs, nous ne devons prendre d’eux que les principes généraux du juste & de l’injuste, & non l’application de ces principes aux cas particuliers ; application dans laquelle ils ont commis une infinité de fautes grossieres, en se laissant guider par la férocité qui entre nécessairement dans le caractere d’un peuple guerrier. Si l’on veut un exemple frappant de la vérité de ce reproche, on n’a qu’à jetter les yeux sur les loix romaines qui regardent le pouvoir paternel & la servitude. Le pere pouvoit vendre ses enfans, & avoit sur eux le droit
-de morr. Le maître avoitle mêmedroitfur fes efclaves &
+de mort. Le maître avoit le même droit sur ses esclaves, &
-malheureux étoientregardéscomme deschofes i (0 Voy.Hotomannus diflert.defhidiolegum.
+malheureux étoient regardés comme des choses Voy. Hotomannus dissert. de studio legum.
-( 17)J 6 & noncommedespersonnes.Que peut-onimaginerde pluscontraire auxdroitsde la nature& de l’humanité? C’eftd’aprèslesmêmesprincipes quetous lesfoinsde ce gouvernementavoientpour objetl’avantage des créanciers &
+& non comme des personnes. Que peut-on imaginer de plus contraire aux droits de la nature & de l’humanité ? C’est d’après les mêmes principes que tous les soins de ce gouvernement avoient pour objet l’avantage des créanciers, &
-a toujoursperdude vue lesintérêtsdes débiteurs& ceux
+a toujours perdu de vue les intérêts des débiteurs & ceux
-leurs héritiers(i). 1 r rr~rrnr ~M (i) LesRomainsavoientune loi qui autorifoitles créanciersà réduireleursdébiteursen fervitude.Les créanciersrendanttrop pefant lejougde l’efclavageles Plébéienste révoltèrentplusd’une fois pouren obtenirl’abolition.Valerius,fils dePublicola, & Servilius foutinrentles intérêtsdupeuplecontreAppius Claudius pamfandéclarédesPatriciens.La loi fut abolielorsde la premièrerévolte du peuple,maisle pouvoirdes Patriciensla fit revivre.Vetturius réduitenfervitudeparPlotius,pourdesdettesqu’il avoitcontractéespour fairelesfunéraillesde fon père fut l’occafion deladerniererévolte&dela retraitedûpeuple auJanicule.Alorsle fenat effrayé feVitforci
+leurs héritiers . Les Romains avoient une loi qui autorisoit les créanciers à réduire leurs débiteurs en servitude. Les créanciers rendant trop pesant le joug de l’esclavage, les Plébéiens se révolterent plus d’une fois pour en obtenir l’abolition. Valerius, fils de Publicola, & Servilius soutinrent les intérêts du peuple contre Appius Claudius, partisan déclaré des Patriciens. La loi fut abolie lors de la première révolte du peuple, mais le pouvoir des Patriciens la fit revivre. Vetturius, réduit en servitude par Plotius, pour des dettes qu’il avoit contractées pour faire les funérailles de son père, fut l’occasion de la derniere révolte & de la retraite du peuple au Janicule. Alors le sénat effrayé se vit forcé
-io) Bi) Undébiteurmouroit fil’héritier légitimerenonçoità lafucceflïonà raifondes dettesJaifleespar le défunt,c’étoitunetacheà famémoire. Siunefclaveétoitconftituéhéritier, il
+Un débiteur mouroit ; si l’héritier légitime renonçoit à la successon, à raison des dettes laissées par le défunt, c’étoit une tache à sa mémoire. Si un esclave étoit constitué héritier, il
-de requérirla fucceffion.Il devenoitliher & heresneceffarïuslibre& héritiernéceflaire. Il recouvroitfa liberté maisles vexationsdes créanciersen étoient leprix. Lorfquele défuntlaiflbitdes enfansaprèslui, ils étoient{qshéritiersnécejfaires& fi dans la fuite ilsfurent admisà s’abilenirde requérirla fucceflîon,ce n’étoitqu’en vertud’unédit du préteur,Senon par la difpofitionmêmede la
+de requérir la succession. Il devenoit liber & heres necessarius : libre & héritier nécessaire. Il recouvroit sa liberté ; mais les vexations des créanciers en étoient le prix. Lorsque le défunt laissoit des enfans après lui, ils étoient ses héritiers nécessaires ; & si dans la suite ils furent admis à s’abstenir de requérir la succession, ce n’étoit qu’en vertu d’un édit du préteur, & non par la disposition même de la
-Bien plus le créancierpouvoir mettre en fequeftre & garder ~r~r -4 .t de nommerun diltafeut’’1 heureusement« choixtombafur Q. Hortenfiusqui revêtu de cepouvoirfuDrômeabolitenfinla loi*l
+Bien plus, le créancier pouvoir mettre en sequestre, & garder de nommer un dictateur ; heureusement le choix tomba sur Q. Hortensius, qui, revêtu de ce pouvoir suprême, abolit enfin la loi.
-v21 Biij commeun gagede fadettele cadavredefondébiteur;&empêcher qu’ilne fûtenfeveli. Cefyftême,quinepeutquepa* roîtrebarbareà touthommequia quelquefentimentd’humanité a paffédansnosloix;& on
+comme un gage de sa dette le cadavre de son débiteur ; & empêcher qu’il ne fût enseveli. Ce systême, qui ne peut que paroître barbare à tout homme qui a quelque sentiment d’humanité a, passé dans nos loix ; & on
-trouvé deshommesqui en ontfaitl’apo* logie,parcequ’onrefpe&etroples` préjugésétablis. Cefl un grandmalpolitiquede croirequ’unetelleloi faitedans telles&tellesciiconltances & dans tel& telpays,peutêtreadmifeen d’autrestems &en d’autreslieuxy & qu’adoptéeune fois elledoit êtreinvariable&éternelle.Lesloix doiventchanger,puifquelestems & lesmœurschangent.Cetteimportantevéritén’a paséchappéau célebreLocke,qui, en propofant uncodepour la Caroline,voulut en mêmetemsqu’iln’eûtdeforce
+trouvé des hommes qui en ont fait l’apologie, parce qu’on respecte trop les préjugés établis. C’est un grand mal politique de croire qu’une telle loi, faite dans telles & telles circonstances & dans tel & tel pays, peut être admise en d’autres tems & en d’autres lieux, & qu’adoptée une fois, elle doit être invariable & éternelle. Les loix doivent changer, puisque les tems & les mœurs changent. Cette importante vérité n’a pas échappé au célebre Locke, qui, en proposant un code pour la Caroline, voulut en même tems qu’il n’eût de force
-(*3) Biv quependantun fiecle.On nedevroitporterque des loixà tems qui aprèsun certainnombred’années, ferenouvelleroientlorfque l’expérience enauroitfaitconnoître futilité.Le peuplefe plaindroit moinsdesvicesdelalégiuation& lesloixelles mêmes obtiendroient conftammentle refpe£qu’onleur doit & quieftbienmoindrelorfqu’ellespeuventêtre abrogéesou réformées avantqueleurempireait ceffé. Lesbanqueroutiers fontenTofcanel’objetd’uneloi cruelle.Le banqueroutierquidérobefaperfonneauxpourfuitesdefescréanciers,eft préfuméfrauduleux Se commetel outreles peinesqu’il. encourt fesenfans& fesdefeendansmâlesen lignedire&enésau temsdefabanqueroute,fontobligés,leursbiens& leurspçrfonnest
+que pendant un siecle. On ne devroit porter que des loix à tems, qui, après un certain nombre d’années, se renouvelleroient, lorsque l’expérience en auroit fait connoître l’utilité. Le peuple se plaindroit moins des vices de la législation, & les loix elles-mêmes obtiendroient constamment le respect qu’on leur doit, & qui est bien moindre lorsqu’elles peuvent être abrogée sou réformées avant que leur empire ait cessé. Les banqueroutiers sont en Toscane l’objet d’une loi cruelle. Le banqueroutier, qui dérobe sa personne aux poursuites de ses créanciers, est préfumé frauduleux ; & comme tel, outre les peines qu’il encourt, ses enfans & ses descendans mâles en ligne directe, nés au tems de sa banqueroute, sont obligés, leurs biens & leurs personnes,
-c*î) à payerlesdettesdeleurpere&de leuraïeulpaternel,fansqu’ilspuiffentfairevaloir, ou une émancipationantérieureou le
+à payer les dettes de leur pere & de leur aïeul paternel, sans qu’ils puissent faire valoir, ou une émancipation antérieure, ou le
-la fucceffion d’où il arriveque cesmalheureux& leursdefcendans nésavant& depuislabanqueroute, demeurentà jamais tachésde la honteattachéeauxbanqueroutiers. Mais d’abord, commentde la feuleabfencedu débiteurpeut-on conclurela fraude,
+la succession : d’où il arrive que ces malheureux & leurs descendans nés avant & depuis la banqueroute, demeurent à jamais tachés de la honte attachée aux banqueroutiers. Mais d’abord, comment de la seule absence du débiteur peut-on conclure la fraude,
-la caufedi.fafuitepeutêtrela crainte dela prifon,fuite naturellede l’amourdelaliberté? Etcommentla peinequ’ont méritéele pere ou îayeul doit-elleenvelopperauffi des enfansqui n’ont
+la cause de sa fuite peut être la crainte de la prison, suite naturelle de l’amour de la liberté ? Et comment la peine qu’ont méritée le pere ou l’ayeul doit-elle envelopper aussi des enfans qui n’ont
-de partauxengagemensdeleurpère? Il fepeutqu’unepareilleloi ait été regardéecommeutiledansun Etat dont la profpéritédépendoitdu commerce6c où lesricheffesque
+de part aux engagemens de leur père ? Il se peut qu’une pareille loi ait été regardée comme utile dans un État dont la prospérité dépendoit du commerce, & où les richesses que
-*7!q4 cettefourceavoitfourniesàla mai* fondesprinces, qui,
+cette source avoit fournies à la maison des princes, qui,
-la conditionde(impiesparticuliers,s’étoient élevésjufqu’autrône, étoient autant d’obftaclesà l’ambitiondes autrescitoyens.Mais ces raifons n’ayantplus lieu la paix& Tordre ayantfuccédéaux troubles& à la fédition & l’autoritéchancelante ayantpris une confîitanceaffurée la loidevoitêtreabolie & on dèvoittâcherd’en éteindrejufqu’àla mémoire,pourl’honneurd’unefamillefi illurtre. Cependant après deux fiecles écouleslescréanciersexigentqu’on en maintiennel’observation,& les magiftratseux-mêmes,en plufieurs cas n’ont pasle couragede s écarter d’unejurifprudencequefonanciennetérend caduque.
+la condition de simples particuliers, s’étoient élevés jusqu’au trône, étoient autant d’obstacles à l’ambition des autres citoyens. Mais ces raisons n’ayant plus lieu, la paix & l’ordre ayant succédé aux troubles & à la sédition, & l’autorité chancelante ayant pris une consistance assurée, la loi devoit être abolie, & on dèvoit tâcher d’en éteindre jusqu’à la mémoire, pour l’honneur d’une famille si illustre. Cependant, après deux siecles écoulés, les créanciers exigent qu’on en maintienne l’observation, & les magistrats eux-mêmes, en plusieurs cas, n’ont pas le courage de s’écarter d’une jurisprudence que son ancienneté rend caduque.
-faut fans doute punirle banqueroutierfrauduleux& le
+faut sans doute punirle banqueroutier frauduleux & le
-:*?:1 teur de mauvaifefoi maisil faut êtrebienafluréde la mauvaifefoi &de la
+teur de mauvaise foi, mais il faut être bien assuré de la mauvaise foi & de la
-& Tune& rature ne fepréfumentpoint &
+& l’une & l’autre ne se présument point, &
-prouvées alors
+prouvées ; alors
-le débiteurcomme débiteur, mais commecriminel,parce que. la fraudeétant le réfultatd’un ditcoursou d’un fait oppoféà la
+le débiteur comme débiteur, mais comme criminel, parce que la fraude étant le résultat d’un discours ou d’un fait opposé à la
-& dontle but eft detromper celui qui emploiede femblables moyenseft dangereuxpour la fociété,& doit êtreregardédu même
+& dont le but est de tromper, celui qui emploie de semblables moyens est dangereux pour la société, & doit être regardé du même
-que celuiqui vole.
+que celui qui vole.
-qui contra&eune dette
+qui contracte une dette
-de bonnefoi, doit conferverla liberté defaperfonne &
+de bonne foi, doit conserver la liberté de sa personne, &
-devenir efclavedela peineau gré d’unparticulier. Lebut du pa&focial,ou ce qui eftla mêmechofe, de
+devenir esclave de la peine au gré d’un particulier. Le but du pact social, ou, ce qui est la même chofe, de
-réunion deshommesen fociété eftle bonheur
+réunion des hommes en société, est le bonheur
-bien commun.Le par-
+bien commun. Le par-
-(30 tagedesbiens& la propriétédela portionde chacuna été l’undes moyenspourarriverà ce
+tage des biens & la propriété de la portion de chacun a été l’un des moyens pour arriver à ce
-Mais quellesfontlesbornes du
+Mais quelles sont les bornes du
-de propriété?Dansfaplusgrandeétendue, il
+de propriété ? Dans sa plus grande étendue, il
-être reftreint parledroit & la néceffitédevivre pourchaqueindividu.Tout homme tientcedroitdela nature s’iljouit de quelquechofede plus au-delà dece néceffaire il
+être restreint par le droit & la nécessité de vivre pour chaque individu. Tout homme tient ce droit de la nature ; s’il jouit de quelque chose de plus au-delà de ce nécessaire, il
-cet excédentà la fociétéqui protegefapropriété pourcetteprote&ionilfaut uneforceplus grandeque cellede chaqueindividu,& cetteforcepubliquen’eftrienautrechofeque la fommedesforcesde tous les particuliers.Chacuncontribueà la formerpar festalens fon travail fou a&ivité fon induftrie comment donc l’autoritépeut-ellepermettre que
+cet excédent à la société qui protege sa propriété ; pour cette protection, il faut une force plus grande que celle de chaque individu, & cette force publique n’est rien autre chose que la somme des forces de tous les particuliers. Chacun contribue à la former par ses talens, son travail, son activité, son industrie ; comment donc l’autorité peut-elle permettre que
-dépôt communon en fouftraieuneportionen faveurd’un
+dépôt commun on ensoustraie une portion en faveur d’un
-33 c créancierpour 1 employercontre un débiteurau préjudicede l’état
+créancier pour l’employer contre un débiteur au préjudice de l’état
-trouvera peut-êtreque j’avanceiciunparadoxe,& on m’oppoferaquecette fouftra&ioneft une fictionmétaphyfique.Maisje foutiensqu’elleeftvraie& réelle c’eft unevérité aujourd’huidémontrée gu’unefaee adminiftrationeft la forcedesétats & quedes bonnes loixéconomiquesdépendle bonheurdescitoyens.Desphilofophes quife font occupésdu bien des hommes ont partagéchaque nationen trois clafles;cellesdes^ropriétaires3 la claffe’qu’ils ont ap* pelléeproductive &
+trouvera peut-être que j’avance ici un paradoxe, & on m’opposera que cette soustraction est une fiction métaphysique. Mais je soutiens qu’elle est vraie & réelle ; c’est une vérité aujourd’hui démontrée qu’une sage administration est la force des états, & que des bonnes loix économiques dépend le bonheur des citoyens. Des philosophes qui se sont occupés du bien des hommes, ont partagé chaque nation en trois classes ; celles des propriétaires, la classe qu’ils ont appellée productive &
-qu’ils ontnomméeftèrik formanttoutes lestrois enfemblel’objet de l’économiepolitique. Si
+qu’ils ont nommée stérile, formant toutes les trois ensemble l’objet de l’économie politique. Si
-ces troisclafïeseft réduiteà l’inaftiont lesautress’enreffentent&la parta-
+ces trois classes est réduite à l’inaction, les autres s’en ressentent & la parta-
-(3s Cij gentavecelle.Le propriétairene Fournitplus ou fournitmoinsaux dépenfesque la cultureexige le travailde l’agriculteurdevenant moindreenraifondela diminution desdépenfesqu’ilpeutfaire la reprodu&ions’anéantitou devient moindreaufli les
+gent avec elle. Le propriétaire ne fournit plus, ou fournit moins aux dépenses que la culture exige ; le travail de l’agriculteur devenant moindre en raison de la diminution des dépenses qu’il peut faire, la reproduction s’anéantit ou devient moindre aussi ; les
-les travauxde 1’induftriedonnenteuxmêmesalorspeuoupointdeprofit &leshommesinduftrieuxprennent lepartides’expatrier.Ily aungrand nombred’arts dansLefquels onem* ploielesmatièresquelefolnational fournit& reproduitfanscefle 6c lesbras induftrieuxne reçoivent leurmouvementquede la repro* du&ion.Siunecertaineétenduede terredemandele travailde vingt hommes,pourdonnerlaplusgrande reproduâionpoffible,lorfqu’onen emploieun moindrenombre, on privelepropriétaired’unepartiedu
+les travaux de l’industrie donnent eux-mêmes alors peu ou point de profit & les hommes industrieux prennent le parti de s’expatrier. Il y a un grand nombre d’arts dans lesquels on emploie les matières que le sol national fournit & reproduit sans cesse, & les bras industrieux ne reçoivent leur mouvement que de la reproduction. Si une certaine étendue de terre demande le travail de vingt hommes, pour donner la plus grande reproduction possible, lorsqu’on en emploie un moindre nombre, on prive le propriétaire d’une partie du
-37 jw• ç jji revenu
+revenu
-avoir. H trouvequele produiteft trop
+avoir. Il trouve que le produit est trop
-en proportionde la grandeurdes dépenfesi le cultivateurfe plaint que fes travauxlui fournifféntà peineune étroitefubfiftance Fartifle &le manufacturierlanguiffent envoyantdiminuerles demandes
+en proportion de la grandeur des dépenses ; le cultivateur se plaint que ses travaux lui fournissént à peine une étroite subsistance ; l’artiste & le manufacturier languissent en voyant diminuer les demandes
-en retirantfort peu deprofitde leurinduftrie l’étatdemeureprivé d’une richeffeplus grande, & fa toibleffeaugmenteà mefure que cettericheffediminue.Or tous ces effetsfuneftesréfultent d’une loi. tropdurecontrelesdébiteurs.Lorfqu’onarracheun hommeà Tunede cestrois claffespour le
+en retirant fort peu de profit de leur industrie ; l’état demeure privé d’une richesse plus grande, & sa foiblesse augmente à mesure que cette richesse diminue. Or tous ces effets funestes résultent d’une loi. trop dure contre les débiteurs. Lorsqu’on arrache un homme à l’une de ces trois classes pour le
-en prifonfontravaileftfufpendupendant tout
+en prison, son travail est suspendu pendant tout
-au créancierde Yyretenir l’état
+au créancier de l’y retenir ; l’état
-les avantagesqu’il auroit tirés de. l’a&ivitéde ce citoyen fi on l’eût laifféà fes affaires& le
+les avantages qu’il auroit tirés de l’activité de ce citoyen, si on l’eût laissé à ses affaires, & le
-59^) Cîy lui mêmenefaitquele mettreencoredansuneplusgrandeimpuif. fancedefatisfaireà fes engagemens» Etqu’onnedifépas la uupenfioh du travaild’un fettihommen’eft pourTétâtqu’unepertelégère& à peineévaluable;car qu’ellefoitfi petitequ’onvoudra,il fauttoujours la mettreenlignede compte;^’économiepolitiqueeft une affairede calcul,& le calcul,pourn’êtrepas incomplet,doitembraffertousles élémens. e emens. Ilfaut encoreconfidérerqu’un débiteurmisenprifon,&dansl’impoffibilitéd’employerfan induflrie pourvivre,y fubfifteauxdépens d’autrui& dupublic,& non-feulementlui maisfafamillequieftréduiteà demanderl’aumône& qui s’accoutume enfuiteàcetteoifivëtè*. Or ces aumônespotrfïoientêtre employéesplusutilement,fil’dfi’&
+lui même ne fait que le mettre encore dans une plus grande impuissance de satisfaire à ses engagemens. Et qu’on ne dise pas : la suspension du travail d’un seul homme n’est pour l’étât qu’une perte légère & à peine évaluable ; car qu’elle foit si petite qu’on voudra, il faut toujours la mettre en ligne de compte ; l’économie politique est une affaire de calcul, & le calcul, pour n’être pas incomplet, doit embrasser tous les élémens. Il faut encore considérer qu’un débiteur mis en prison, & dans l’impossibilité d’employer son industrie pour vivre, y subsiste aux dépens d’autrui & du public, & non seulement lui, mais sa famille qui est réduite à demander l’aumône, & qui s’accoutume ensuite à cette oisiveté. Or ces aumônes pourroient être employées plus utilement, si l’on di-
-4i minuoitlenombredesobjetsde la compaffionpublique & on lesdiminueroiten effet fi les débiteurs avoientla libertéde ltur perfonne. Lorfqueje nuisà la fociété je mériteun châtiment parcequeje me fuisfouftraità l’empiredelavolonté généralemaisfi je ne manquepas à l’obéiffancedue à l’autorité,il ne doitêtrepermisà perfonnede me fairefouffrirunepeinecorporelle, fansblefferl’égalitéquieftle fondementdela fociété.Laprifoneffcune peine &
+minuoit le nombre des objets de la compassion publique ; & on les diminueroit en effet, si les débiteurs avoient la liberté de leur personne. Lorsque je nuis à la société, je mérite un châtiment, parce que je me suis soustrait à l’empire de la volonté générale ; mais si je ne manque pas à l’obéissance due à l’autorité, il ne doit être permis à personne de me faire souffrir une peine corporelle, sans blesser l’égalité qui est le fondement de la société. La prison est une peine, &
-peine très-grande puifqu’elle enlevéau citoyence rcfle delibertéréfervépar chaqueindividudansle partagedel’étatde natureà celuidefociété.Quandun de mesconcitoyensa le pouvoirde m’endépouiller,lefyftêmepolitique eilaltéré, tout l’avantageeft d’un côté &
+peine très-grande, puisqu’elle enleve au citoyen ce reste de liberté réservé par chaque individu dans le partage de l’état de nature à celui de société. Quand un de mes concitoyens a le pouvoir de m’en dépouiller, le systême politique est altéré, tout l’avantage est d’un côté, &
-les inconvéniensde l’autre.
+les inconvéniens de l’autre.
-(43 ) Quelmalfais-jedoncàlafbciété encontraint unedettecivile,pour mériterunepeine?Aucontraire,je luiapporteun avantage,enmettant dansla circulationun argentque moncréancieren avoitfouftrait maisce débiteurne donne-t-ilpas atteinteà lapropriétéquel’autorité doitprotégerfanscelle?Non, afliirémentparce,quec’efivolontairementque le créanciera faitpaffer danslesmainsdu débiteurla chofe dontilavoitla propriété. Envainpour éluderla forcede ceraifonnement,dira-t -onqueI’em*
+Quel mal fais-je donc à la société en contractant une dette civile, pour mériter une peine ? Au contraire, je lui apporte un avantage, en mettant dans la circulation un argent que mon créancier en avoit soustrait ; mais ce débiteur ne donne-t-il pas atteinte à la propriété que l’autorité doit protéger sans celle ? Non, assurément, parce que c’est volontairement que le créancier a fait passer dans les mains du débiteur la chose dont il avoit la propriété. En vain pour éluder la force de ce raisonnement, dira-t-on que l’em-
-45<< prifonnementdu débiteurneft pas unepeineinfligéeparleparticulier, maispar le magiftrat.Au fond, ce n’eftqu’à la requêtedu particulier quele magiftratla prononce;or le maigiftratpeut bien permettreFemprifonnementd’uncitoyenpréfumé coupable,à la requêted’un particulier,
+prisonnement du débiteur n’est pas une peine infligée par le particulier, mais par le magistrat. Au fond, ce n’est qu’à la requête du particulier que le magistrat la prononce ; or le maigistrat peut bien permettre l’emprisonnement d’un citoyen présumé coupable, à la requête d’un particulier,
-non pasceluid’un innocent maisfilemagiftratm’ordonne defatisfairemon créancierdans un certaintemsdonné, &queje n’exécutepasfesordresparimpuiflance, je
+non pas celui d’un innocent ; mais si le magistrat m’ordonne de satisfaire mon créancier dans un certain tems donné, & que je n’exécute pas ses ordres par impuissance, je
-puni commedéfobéj1fant,puifque,pourêtre regardé commetel, ilfaudroitde mapartle concoursdu pouvoir& de la volonté.Si avois le pouvoirfans la volontéje mériteroisd’êtrepuni, parceque je devroisêtre regardé commedébiteurde mauvaifefoi la volontéeft en moi le pouvoir dépendde plufieursautrescirconf-
+puni comme désobéissant, puisque, pour être regardé comme tel, il faudroit de ma part le concours du pouvoir & de la volonté. Si j’avois le pouvoir sans la volonté, je mériterois d’être puni, parce que je devrois être regardé comme débiteur de mauvaise foi ; la volonté est en moi, le pouvoir dépend de plusieurs autres circons-
-(47 ) tancesfanslesquellesla volontéde* meurefanseffet. Il fautconfidérerd’ailleursque chaque citoyen,dansla formation desibciçtés,a engagéfaperfonneà toutela nation & nonpasà aucun individuen particulier;cetteobligation,quoiqued’unedatetrès-ancienne,renaîtcontinuellement au momentdela naiflancede chacun de nous parla naturemêmedu contratquilaftipule& parcequ’il eft néceflaire qu’ellefeperpétuepour laconfervationde la fbciété& de l’ordrepublic.Or il fuitde-làqu’un citoyennepeutengagerfaperfbnne à un particulier fanscontrevenir aupaftfociaiquiétablit pourtous &pourchacunun lieuréciproque. Dansla vérité la ftipulationde
+tances sans lesquelles la volonté demeure sans effet. Il faut considérer d’ailleurs que chaque citoyen, dans la formation des sociétés, a engagé sa personne à toute la nation, & non pas à aucun individu en particulier ; cette obligation, quoique d’une date très-ancienne, renaît continuellement au moment de la naissance de chacun de nous, par la nature même du contrat qui la stipule, & parce qu’il est nécessaire qu’elle se perpétue pour la conservation de la société & de l’ordre public. Or il fuit de-là qu’un citoyen ne peut engager sa personne à un particulier, sans contrevenir au pact social qui établit pour tous & pour chacun un lieu réciproque. Dans la vérité, la stipulation de
-49 D la contrainteparcorpsn’eftpas le motifvéritablede la confiancedu prêteurc’eftuniquementl’opinion quele créanciera de la furetéde l’emplcidel’argentqu’ilprête.Cette aflVrtiondemeureprouvéepour touthommequi voudrafe/endre comptedesmotifsquile déterminentàconfierfonargent.Jeneprétendspascependantexclurelesautrescaufes commela compaffion pourlesbefoinsd’un malheureux$ 6cc.je neveuxraifonnerici queilu4lescasles plus fréquenspouren déduiredesrégiesgénérales. La craintede la prifonn’eftpas nonplusunmotifptfeffafttpourle débiteurdepayerfoncréancierles" motifsextérieurspeuventêtre né* ceffaires^lorfque desmotifsinternet Ip r~s)o,rfque. ,#~ motifsinternes n’agifferitpas déjàtrès-fortement maisquandtobte la volontéde l’hommeleporteversun but
+la contrainte par corps n’est pas le motif véritable de la confiance du prêteur, c’est uniquement l’opinion que le créancier a de la sûreté de l’emploi de l’argent qu’il prête. Cette assertion demeure prouvée pour tout homme qui voudra se rendre compte des motifs qui le déterminent à confier son argent. Je ne prétends pas cependant exclure les autres causes, comme la compassion pour les besoins d’un malheureux, & c. je ne veux raisonner ici que sur les cas les plus fréquens, pour en déduire des régles générales. La crainte de la prison n’est pas non plus un motif pressant pour le débiteur de payer son créancier ; les motifs extérieurs peuvent être néceffaires lorsque des motifs internes n’agissent pas déjà très fortement ; mais quand toute la volonté de l’homme le porte vers un but
-i*i Dijl laplusgrandeforce la contrainte efttoutà fait inutile& iuperflue l’actionde cesmotifsintérieurseft continuelle celledes motifsextérieurseft très- éloignée& momentanée un légerexamendela nature de l’homme& un retour fur.foimêméfufïit pourConvaincre decette vérité..Geluiqui contra&eunedette contraâeune obligationenversfon créancierqui le renddépendantde lui; cette dépendance, quellequ’elle fôitj-’ëfficontraire à là nature,& doit être toutefeuleuivmotifcontinuel* lementagiffant&ic|uiporte fans ceffe .rhqmme à fg^j}41ivrer de
+la plus grande force, la contrainte est tout à fait inutile & superflue ; l’action de ces motifs intérieurs est continuelle, celle des motifs extérieurs est très-éloignée & momentanée : un léger examen de la nature de l’homme & un retour sur soi mêmé suffit pour convaincre de cette vérité. Celui qui contracte une dette contracte une obligation envers son créancier qui le rend dépendant de lui ; cette dépendance, quelle qu’elle soit, est contraire à là nature, & doit être toute seule un motif continuellement agissant & qui porte sans cesse l’homme à se délivrer de
-état de-là la peine.quele débiteur fouffreà’voirfôhcrèîfiicîerlorsqu’il ne
+état : de-là, la peine que le débiteur souffre à voir son creancier lorsqu’il ne
-le ï^sfeire & quH éprôtiveà fa préfefiwe uneagitation intériej«r«quiyiejifcdece^qu’ilne ~A~ quil a de lé payer.
+le satisfaire, & qu’il éprouve à sa présence une agitation intérieure qui viens de ce qu’il ne peut pas réduire à l’acte la volonté qu’il a de le payer.
-» DiiJL Siremprifonnementdu débiteur étoitun moyen de payerla dette du créancier,il feroitde l’intérêt publicd’adoptercettefévérité mais puifquelaprifonne fertà rienautre, chofequ’à ajouter une calamitéà une autre calamité une
+Si l’emprisonnement du débiteur étoit un moyen de payer la dette du créancier, il seroit de l’intérêt public d’adopter cette sévérité ; mais puisque la prison ne sert à rien autre chose qu’à ajouter une calamité à une autre calamité, une
-de corpsà une peined’efprit jedirai toujoursque la jurifprudenceqm autorifecette dureté eft contre le. bienpublic& contrelesdevoirsde l’homme envers fes Semblables. Quelquesexemples,de créanciers, payésen eonféquencede Pempri- . îbnnementdu débiteurne font rien
+de corps à une peine d’esprit, je dirai toujours que la jurisprudence qui autorise cette dureté est contre le bien public & contre les devoirs de l’homme envers ses semblables. Quelques exemples de créanciers payés en conséquence de l’emprisonnement du débiteur ne sont rien
-la queftionj j’y vois,feulement unefamilleréduiteà la
+la question ; j’y vois seulement une famille réduite à la
-créancier une femmedontle marieftemprisonné fe dépouillede fa dot,
+créancier : une femme dont le mari est emprisonné se dépouille de sa dot,
-qu’elle poffcde& jufqu’à îoïi lit
+qu’elle possede & jusqu’à son lit
-le délivrer & demeure, enfuitepériJTantde mifereavecUt
+le délivrer, & demeure ensuite périssant de misere avec le
-M) Div pere& les enfons qu’on conduite undecescréanciers.inhumainsàun pareilfpe&acie,& qu’ilvoie s’ille peut, d’un oeilfec une pauvrefamilleà laquelleil ôte le néceffaire pouravoirlui-mêmelefuperflu.On pourroitfaireiciletableautouchant d’unmalheureuxquin’aqu’un monceau depain pour foutenirfa vie., & un hommeà fes.côtésqui regorgeantdericheffeslelui arrache dela main tout le mondecrieroit à
+pere & les enfans ; qu’on conduise un de ces créanciers inhumains à un pareil spectacle, & qu’il voie, s’il le peut, d’un œil sec une pauvre famille à la quelle il ôte le nécessaire pour avoir lui-même le superflu. On pourroit faire ici le tableau touchant d’un malheureux qui n’a qu’un morceau de pain pour soutenir sa vie, & un homme à ses côtés qui, regorgeant de richesses, le lui arrache de la main ; tout le monde crieroit à
-au barbaremais commeles originauxfont-des’imr greffionsplus vivesqueles copies oc que les exemplesréek de cette mifére& de cette inhumaniténe fontpas rares, je m’abftiendraide peindrece qu’onpeutvoirà chaque
+au barbare ; mais comme les originaux font des impressions plus vives que les copie, & que les exemples réels de cette misére & de cette inhumanité ne sont pas rares, je m’abstiendrai de peindre ce qu’on peut voir à chaque
-Tous leshommesfontnaturelle* mentportésà la compafîlonparce quela naturelesa douésde fenfibw
+Tous les hommes sont naturellement portés à la compassion, parce que la nature les a doués de sensibi-
-57 lité la fenfibilitédiminueou croît en raifonde la distanceplus ou moinsgrandedes(ituationsde celui quieft l’objetde la compaffionbc deceluiqui l’éprouve parce que celuiqui eitplusvoifindeFétat du malheureuxle metplusfacilement à iaplace 6çquela nnfered’autrui devientalors pour ainfi dire une fenfationquiluieftperfonneileau lieuqueceluiqu’unegrandediftance d’étatféparedel’hommefoufrant nepouvantimaginerlapoffibilitéde l’événementquilemettroitàlaplace dumalheureux,ne peutpaséprouver les mêmesfentimens de-là la fenfibilitéplusgrandeSela compaf(ionplusvivedans lespauvresque dans les riches.Si quelqu’un de ceux-cife fent ému
+lité ; la sensibilité diminue ou croît en raison de la distance plus ou moins grande des situations de celui qui est l’objet de la compassion & de celui qui l’éprouve, parce que celui qui est plus voisin de l’état du malheureux se met plus facilement à sa place, & que la misere d’autrui devient alors pour ainsi dire une sensation qui lui est personnelle ; au lieu que celui qu’une grande distance d’état sépare de l’homme souffrant, ne pouvant imaginer la possibilité de l’événement qui le mettroit à la place du malheureux, ne peut pas éprouver les mêmes sentimens : de-là la sensibilité plus grande & la compassion plus vive dans les pauvres que dans les riches. Si quelqu’un de ceux-ci se sent ému
-la vued’un malheureuxil chercheà fe débar^ raflerde cette impreffiondoulou-^ reufe,en s’&oignantdel’objetq^uih
+la vue d’un malheureux, il cherche à se débarrasser de cette impression douloureuse, en s’éloignant de l’objet qui la
-59 caufe & en rappellantà fonefprit tousles motifsquipeuventTaftoiblir ilferepréfentelepauvrecomme \indiffipateurde tout ce qu’ilpofiedoit, commeun pareffeuxquiveut vivrefansrienfaire,auxdépensd’autrui, enfincommeun homme qui neméritequele méprisau lieu de compaffion parce que fa mifere eftfon propreouvrage & qu’ilne tientqu’à lui de lafaireçeffer,Sans douteces reprochesfontquelquefoisfondés,maislenombredeceux quiles méritentn’eft pas
+cause, & en rappellant à son esprit tous les motifs qui peuvent l’assoiblir ; il se représente le pauvre comme un dissipateur de tout ce qu’il possédoit, comme un paresseux qui veut vivre sans rien faire, aux dépens d’autrui, enfin comme un homme qui ne mérite que le mépris au lieu de compassion, parce que sa misere est son propre ouvrage, & qu’il ne tient qu’à lui de la faire cesser. Sans doute ces reproches sont quelquefois fondés, mais le nombre de ceux qui les méritent n’est pas
-grand & d’ailleursceshommes-là mêmedoit-onleslaifferpérir? Dans tout gouvernementbien réglé,les diffipateurs fontfujetsàl’animadverfiondu magiftrat & Jes-raendians fontenfermésdansdes maifonsde. force,où on
+grand ; & d’ailleurs ces hommes-là même doit on les laisser périr ? Dans tout gouvernement bien réglé, les dissipateurs sont sujets à l’animadversion du magistrat, & les mendians sont enfermés dans des maisons de force, où on
-rend utilesà euxmêmes& à l’état fansrechercher lescaufesdeleurmifereaftuelle,qui
+rend utiles à eux-mêmes & à l’état, sans rechercher les causes de leur misere actuelle, qui
-*i eftun motiffumfantpour attire? les foins de
+est un motif suffisant pour attirer les soins de
-gouverne commeun pèrecommun. Les cauiesqui amenentles di* versévénemensdela viefont eniî grandnombre &
+gouverne comme un pere commun. Les causes qui amenent les divers événemens de la vie sont en si grand nombre &
-nature qu’ileft fouventimpoffiblede les prévoir& de
+nature qu’il est souvent impossible de les prévoir & de
-défendre de-là toutmalheureuxa droit
+défendre : de-là tout malheureux a droit
-la compaffion,& l’humanitéexige que nousvenionsà fon fecours parce quetouthommetientde la
+la compassion, & l’humanité exige que nous venions à son secours, parce que tout homme tient de la
-droit inconteftableà fa fuhfiftance. Lescréanciersqui formenttoujoursle plus petit nombredes citoyensd’un état ne confientà leursdébiteurse leur fuperflu &leuraccorderle privilègeodieux défaireempriforiner leursdébiteurs, eftunechofequirépugneà lajuftice &àrhumanjt^fentimensauxquels Fautorité,daïu pourte bienpublic,
+droit incontestable à sa subsistance. Les créanciers qui forment toujours le plus petit nombre des citoyens d’un état, ne confient à leurs débiteurs que leur superflu ; & leur accorder le privilège odieux de faire emprisonner leurs débiteurs, est une chose qui répugne à la justice & à l’humanité ; sentimens aux quels l’autorité doit, pour le bien public,
-:«3 rappellerleshommesfanscefle.Le parfagede l’humanitéà la barbarie n’eftquetropfacile,lesimpreffions fréquentesau même objet fur les fensémouffentla fenfibilité,fans laquelleon ne
+rappeller les hommes sans cesse. Le passage de l’humanité à la barbarie n’est que trop facile, les impressions fréquentes au même objet sur les sens émoussent la sensibilité, sans la quelle on ne
-être humain; &fi malheureufementla puifiance légillatrice. ne la nourritpas, le plus grandnombreferabientôtopprimé parle pluspetit. pp LelageSolonprévitcet inconvénienten donnantdesloixàAthènes. Ilprofcriviti’emprifbnnementpour caufede dettesciviles maismalheureufementpourlegenrehumain iln’a pasétéimité on ne peutplus attendrequedeslumieresde notre iîeclela ceifationde cettebarbarie autoriféepar lesloix( i ). (i) Il
+être humain ; & si malheureusement la puissance législatrice ne la nourrit pas, le plus grand nombre sera bientôt opprimé par le plus petit. Le sage Solon prévit cet inconvénient en donnant des loix à Athenes. Il proscrivit l’emprisonnement pour cause de dettes civiles ; mais malheureusement pour le genre humain il n’a pas été imité ; on ne peut plus attendre que des lumieres de notre siecle la cessation de cette barbarie autorisée par les loix . Il
-a quelquesannéesqu’ilfutdéfenduà Florenced’emprifonneraucundébiteurpour uneCommeau deflbusdedeuxécus; on p<,• voitauparavantcontraindrepar corpspour pluspetite dette. C’eft là un premierpas • ait enfaveurde l’humanité.
+a quelques années qu’il fut défendu à Florence d’emprisonner aucun débiteur pour une somme au dessous de deux écus ; on pouvoit auparavant contraindre par corps pour plus petite dette. C’est là un premier pas fait en faveur de l’humanité.
-6i E Uneame élevée .placéefur le trônepourle bonheur de fespeupies & quilesconduità lalumière dela plusfainephilosophieCatherine,impératricede touteslesRu£ fies s’eftoccupéede cet objet important.Danslesinftru&ionsqu’elle a donnéesaux députés de fesprovincespour la formationd’un nou» veaucode ellemetfousleursyeux l’examende la loide Solon appliquéeaux dettes civilescontradées horsdes cas de commerce.En indiquantque la prifonpour dettes
+Une ame élevée, placée sur le trône pour le bonheur de ses peuples, & qui les conduit à la lumiere de la plus saine philosophie, Catherine, impératrice de toutes les Russies, s’est occupée de cet objet important. Dans les instructions qu’elle a données aux députés de ses provinces pour la formation d’un nouveau code, elle met sous leurs yeux l’examen de la loi de Solon, appliquée aux dettes civiles contractées hors des cas de commerce. En indiquant que la prison pour dettes
-trop cruelle elle prendainfîladéreniede l’humanité, & méritelesbénédi&ionsdes peuples.Plaifeau ciel
+trop cruelle, elle prend ainsi la défense de l’humanité & mérite les bénédictions des peuples. Plaise au ciel
-autres Souverains l’imitenten cela1 & ils recevrontles hommagesdus aux bienfaiteursdugenrehumain.Tous lesprincesqui gouvernentaujourd’huilesétatsdel’Europe^fontau**
+autres souverains l’imitent en cela ! & ils recevront les hommages dus aux bienfaiteurs du genre humain. Tous les princes qui gouvernent aujourd’hui les états de l’Europe, sont au-
-(«7) Eij tantde peresde femillequiregaf* dentleursfujetscommeleursenfans,& quijoignentauxtalensnéceffaires pourgouverner,lesvertus quigagnentlescœurs ilsont réforméplusieursabus nuifiblesau biengénéral,& penfentà enréfor* merd’autres(1). On voit difparoître peu
+tant de peres de famille qui regardent leurs sujets comme leurs enfans, & qui joignent aux talens nécessaires pour gouverner, les vertus qui gagnent les cœurs ; ils ont réformé plusieurs abus nuisibles au bien général, & pensent à en réformer d’autres . On voit disparoître peu
-nations £ & fi nous pouvons conje&urer par
+nations ; & si nous pouvons conjecturer par
-qui s’elt déjà fait ce qui fe fera
+qui s’est déjà fait, ce qui se fera
-pouvons efpérer de
+pouvons espérer de
-fait bannie; c’en eit un refte que remprifonnement (t) La défenfed*acquétirfaite aux geds dd ttainmorte & la libertédu commercedes grainsétabliedans quelquesétats, fb*t des preuvescertainesqu’oncommenceà connoître lesvéritablesintérêtsdes peuples,
+fait bannie ; c’en est un reste que l’emprisonnement La défense d’acquérir faite aux gens de main morte, & la liberté du commerce des grains établie dans quelques états, sont des preuves certaines qu’oncommence à connoître les véritables intérêts des peuples,
-ces loi* fontl’élogedes princes
+ces loix sont l’éloge des princes
-portées, puifquecesobjetsfontles plusdignes del’attentiondu miniftereéclairé& des vuesd’un monarque bienfiùfaot.
+portées, puisque ces objets sont les plus dignes de l’attention du ministere éclairé & des vues d’un monarque bienfaisant.
-:<: J Enj pourdettes & cet abus,ferafans douteréforméaveclesautresj’aime dumoinsà m’enflatter,& à croire queje n’auraipasperduentièrement cefoibleeffaiqui, tel qu’ileft*,eft l’effetdemafenfibilitepourlesmau~ demesfemMatyes. Je prévoiscependantque quelques perfonnespourronts’élever contremoi& medécriercommeun fanatique& commecherchantà ébranlerla foi publiquçen défenr dantla caufedesdébiteursmaisje demanderaià ces détraâeursfi la foipubliquepeut fubfifterfansla juftice& fansL’humanité? Siquel-
+pour dettes, & cet abus sera sans doute réformé avec les autres ; j’aime du moins à m’en flatter, & à croire que je n’aurai pas perdu entièrement ce foible essaiqui, tel qu’il est, est l’effet de ma sensibilité pour les maux de mes semblables. Je prévois cependant que quelques personnes pourront s’élever contre moi & me décrier comme un fanatique & comme cherchant à ébranler la foi publique en défendant la cause des débiteurs ; mais je demanderai à ces détracteurs si la foi publique peut subsister sans la justice & sans l’humanité ? Si quel-
-(7* )1 Eiy qu’unme répond oui je
+qu’un me répond oui, je
-dirai quel’état de la fociétécivilen’eft pasbonpourlui & qu’ilfautqu’il s’en ailledemeurerparmiles iauvagesdesiflesMariannesqui.vivent dansune défianceuniverfelle& réciproque,& quin’ont aucuneidée dejuftice. Maisfi l’on
+dirai que l’état de la société civile n’est pas bon pour lui, & qu’il faut qu’il s’en aille demeurer parmi les sauvages des isles Mariannes, qui vivent dans une défiance universelle & réciproque, & qui n’ont aucune idée de justice. Mais si l’on
-vertus doiventêtre ellesmêmesrefpe&ées*ma juftification eftfacile.J’ébranterois en effetlafoi. publique,fije difoisquelesdébiteurs ne doiventpas.être contraintsà fa- . tisfaireleurs créanciers maisme préfervele cielde proférer
+vertus doivent être elles-mêmes respectées, ma justification est facile. J’ébranterois en effet la foi publique, si je disois que les débiteurs ne doivent pas être contraints à satisfaire leurs créanciers ; mais me préserve le ciel de proférer
-pareil biafphêmeUn débiteurpeut êtreexécutédansfesbiens>quidoivent êtredonnésen paiementauxcréanciers,ficefontdeseffetsmobiliers, en réfervanttoutefoisau débiteur ceuxquilui font abfolument.•iceffaires.Quant aux immeublesSe terres qui par kur étendueoui*
+pareil blasphême ! Un débiteur peut être exécuté dans ses biens, qui doivent être donnés en paiement aux créanciers, si ce sont des effets mobiliers, en réservant toutefois au débiteur ceux qui lui sont absolument nécessaires. Quant aux immeubles & terres, qui par leur étendue ou la
-73.) -vii••.11il/: fertilitédu folfourniflentaupoffeffeurau-delàdunéceflairetoutl’excédentdoit appartenirau créancier. Cetteréfervedu néceffairepourla fubfiftancedu créanciers’obferve pour
+fertilité du sol fournissent au possesseur au-delà du nécessaire, tout l’excédent doit appartenir au créancier. Cette réserve du nécessaire pour la subsistance du créancier s’observe pour
-biens fubftitués&: dans d’autrescas.Or, pourquoin’auroitellepas lieu
+biens substitués & dans d’autres cas. Or, pourquoi n’auroit-elle pas lieu
-les biensd’une autre efpece qui font également fousla gardede l’autoritépublique &
+les biens d’une autre espece, qui sont également sous la garde de l’autorité publique &
-la loi? Je
+la loi ? Je
-qu’en vertude l’autoritépubliqueceuxlà font inaliénables& qu’on
+qu’en vertu de l’autorité publique ceux-là sont inaliénables, & qu’on
-vendre, mêmepour iatisfaireaux engagemensde celui quien a lapofleffionactuelleinftitutionqui a
+vendre, même pour satisfaire aux engagemens de celui qui en a la possession actuelle : institution qui a
-objet l’intérêtde ceuxqui fontappellesà la fubftitution, & qu’au contraireles biens nonfubftituéspeuvents’aliéner& fevendre maiscette différencene faitpas qu’on doivediftraireune
+objet l’intérêt de ceux qui sont appellés à la substitution, & qu’au contraire les biens non substitués peuvent s’aliéner & se vendre ; mais cette différence ne fait pas qu’on doive distraire une
-7$ portionalimentairepourceluiqui a contractédes dettes feulement lorfquefesbiensfontfubftitués,& nonlorfqu’ilsne le fontpas.L’une &l’autreefpecede biensne font, aprèstout que desportionsdu territoireoccupéespar anticipation pardesparticuliers, ou quileurfont échuesau momentde l’établiflementde la fociétécivile pour la fubfiftancenéceflaire,à laquelle touthommea un droitqu’iltient dela nature.Perfonnene peutrenoncerà ce droit, parcequ’unpareilrenoncementemporteroitladeC tru&ionde celuiqui le feroit,& quelavolontéde tout hommeeft néceffairement dirigéeà fa propre
+portion alimentaire pour celui qui a contracté des dettes, seulement lorsque ses biens sont substitués, & non lorsqu’ils ne le sont pas. L’une & l’autre espece de biens ne sont, après tout, que des portions du territoire occupées par anticipation par des particuliers, ou qui leur sont échues au moment de l’établissement de la société civile, pour la subsistance nécessaire, à laquelle tout homme a un droit qu’il tient de la nature. Personne ne peut renoncer à ce droit, parce qu’un pareil renoncement emporteroit la destruction de celui qui le feroit, & que la volonté de tout homme est nécessairement dirigée à sa propre
-On obje&eraencore, qu’enobfervantcettemaxime,le créancierne pourraêtrepayéqu’avecbeaucoupdetems.Sansdoute; maisje prétends<ju*onrendrapar-
+On objectera encore, qu’en observant cette maxime, le créancier ne pourra être payé qu’avec beaucoup de tems. Sans doute ; mais je prétends qu’on rendra par--
-(77] J làla conditiondu créanciermeilleure, & qu’il fe trouveramieux debiffer à fon débiteurle néceffaire,que de le facrifierà fon avidité.Dans le premiercas, il
+là la condition du créancier meilleure, & qu’il se trouvera mieux de laisser à son débiteur le nécessaire, que de le sacrifier à son avidité. Dans le premier cas, il
-a beaucoupd’accidensfavorablesau créancier comme l’augmentation dupatrimoine du débiteurparvoie d’héritageou par fon induftrie dansle fecond1)il perd tout & l’étatlui-mêmes’enrefirent. La difpo(îtionénoncéedans le chapitreOdoardus,eu jufte, en ce qu’elleveut qu’aprèsavoirprélevé lenéceflairefur les biensdu débiteurpour fa fubfiilance le furplus entierappartienneau créancier;& on pourroit regardercette claufe commefefentantde l’efpritphilofophique,fi elle ne paroiffoitpas di&éeparleségardspourle rang,qui nedoitcependantêtrecomptépour rienlorfqu’il eft en queftiondes
+a beaucoup d’accidens favorables au créancier, comme l’augmentation du patrimoine du débiteur par voie d’héritage, ou par son industrie : dans le second, il perd tout, & l’état lui-même s’en ressent. La disposition énoncée dans le chapitre Odoardus, est juste, en ce qu’elle veut qu’après avoir prélevé le nécessaire sur les biens du débiteur pour sa subsistance, le surplus entier appartienne au créancier ; & on pourroit regarder cette clause comme se sentant de l’esprit philosophique, si elle ne paroissoit pas dictée par les égards pour le rang, qui ne doit cependant être compté pour rien lorsqu’il est en question des
-79 droitsde la nature qui appui* tiennentà touségalement.Lesjurifconfultesquiont étenducette jurisprudence du clergéà quelques autresordresdeperfonnesnefont pas
+droits de la nature, qui appartiennent à tous également. Les jurisconsultes, qui ont étendu cette jurisprudence du clergé à quelques autres ordres de personnes, ne sont pas
-aux principesdes chofes & ont encoreconfidéré davantagele rang des perfonnes quelaqualitédecitoyen,à laquelle lesmêmesdroitsdoiventêtre attachés.En général un
+aux principes des choses, & ont encore considéré davantage le rang des personnes que la qualité de citoyen, à laquelle les mêmes droits doivent être attachés. En général, un
-une jouifiance accordéà un particulierà l’exciufiondes autrescitoyens qui
+une jouissance, accordé à un particulier, à l’exclusion des autres citoyens, qui
-droit égal eftuneatteinteà la juftice& à l’humanitéà la juftice parce qu’onblefTele droitde propriété dechaqueindividuqui s’étendà toutce quieflnécefTaire à fafubfiftanceà l’humanité,parcequ’à lacompaffionquireiferrele nœud focialon fubftitueunecruautéqui lerompt.
+droit égal, est une atteinte à la justice & à l’humanité : à la justice, parce qu’on blesse le droit de propriété de chaque individu qui s’étend à tout ce qui est nécessaire à sa subsistance ; à l’humanité, parce qu’à la compassion qui resserre le nœud social, on substitue une cruauté qui le rompt.
-Si F Quelquedéfenfeurde la caufe descréanciersdiraenfinqu’enôtant la prifon,la contraintepar corps & en laiffantau débiteurfur Ces biensfafubfiftancenéce/Taireon ne trouveraplus perfonnequi veuille prêter &
+Quelque défenseur de la cause des créanciers dira enfin qu’en ôtant la prison, la contrainte par corps, & en laissant au débiteur sur ses biens sa subsistance nécessaire, on ne trouvera plus personne qui veuille prêter, &
-le pluspreffantbefoind’argentferont privésdufeulmoyenqu’ilsavoient des’enprocurer.Maisceuxquifont cette obje&ionconnoiflentmal la naturede l’homme,& ne fontpas bonsobfervateursdesfaits.L’homme eftfaitde manierequ’ilne connoît aucuneborne à fesdeiîrs & leplusviolentde fesdefirseftd’accroîtrefonfuperflu.Le prêt eft un moyenpour cela, moyenquelquefoistrompeur,maisleplusfouvent fuivides bons effetsqu’on attend ce qui fuffitpour éloignerde l’efpritdu capitalisela craintedespertesqui peuventarriverà la fuitedu
+le plus pressant besoin d’argent seront privés du seul moyen qu’ils avoient de s’en procurer. Mais ceux qui sont cette objection connoissent mal la nature de l’homme, & ne sont pas bons observateurs des faits. L’homme est fait de maniere qu’il ne connoît aucune borne à ses desirs ; & le plus violent de ses desirs est d’accroître son superflu. Le prêt est un moyen pour cela, moyen quelquefois trompeur, mais le plus souvent suivi des bons effets qu’on attend ; ce qui suffit pour éloigner de l’esprit du capitaliste la crainte des pertes qui peuvent arriver à la fuite du
-81) Fij prêt.Lestaitsconfirmentcette ob fervation.Une nationeftcompofée deplufieursdattesdeperfonnesqui jouiffentdu privilègede la réferve de leur nécelfairedans les
+prêt. Les faits confirment cette observation. Une nation est composée de plusieurs classes de personnes qui jouissent du privilège de la réserve de leur nécessaire dans les
-où leursbiensfont faiiispour dettes &
+où leurs biens sont saisis pour dettes, &
-de l’exemptionde la contrainteparcorps eft-cequeces gensne trouvent
+de l’exemption de la contrainte par corps : est-ce que ces gens ne trouvent
-des dettes? Au contraire,ce font ceux
+des dettes ? Au contraire, ce sont ceux
-en contractentle plus. Auflitôtqueleshommesfe furentréuni? en fociété il naquit entreeuxune quantitéde rapportsqu’ilsn’avoient point
+en contractent le plus. Aussitôt que les hommes se furent réunis en société, il naquit entre eux une quantité de rapports qu’ils n’avoient point
-qui font cependantnéceffairesparcequ’ils dériventde la nature mêmede la fociétéquiplacel’hommedansdes circonftancesoù il a befoinde fori femblable.Les hommes en leur qualitéd’êtres taifonnablesf fon| plusou moinsobligésà la pratiqua desvertusfocialespour leurpropre
+qui sont cependant nécessaires, parce qu’ils dérivent de la nature même de la société, qui place l’homme dans des circonstances où il a besoin de son semblable. Les hommes, en leur qualité d’êtres raisonnables, sont plus ou moins obligés à la pratique des vertus sociales pour leur propre
-«ï) F««* intérêt.Rétablirl’hommedans le droitnaturelquechaqueindividua à fafubiiftance& lui rendrecette portionde libertéqu’ils’étoitréfervéeau momentde l’unionfociale, n’eftpasun a£e dedefpotifme,mais dejuftice& d’humanité. Obfervonsencore que la jurisprudencea&ueilene fait que fomenterles haines& les
+intérêt. Rétablir l’homme dans le droit naturel que chaque individu a à sa subsistance, & lui rendre cette portion de liberté qu’il s’étoit réservée au moment de l’union sociale, n’est pas un acte de despotisme, mais de justice & d’humanité. Observons encore que la jurisprudence actuelle ne fait que fomenter les haines & les
-les famillesdes débiteurs& descréancierseffetfunefte& inévitablede l’ufagede cedroitrigoureux.Toute l’occupationdes ages eftaujourd’huidirigéeà perfe&ionneren mêmetemslapolitique& la morale.Un desmoyensd’atteindre à cebut, eft dediminuerlescaufes des inimitiésentre les individus parce
+les familles des débiteurs & des créanciers : effet funeste & inévitable de l’usage de ce droit rigoureux. Toute l’occupation des sages est aujourd’hui dirigée à perfectionner en même tems la politique & la morale. Un des moyens d’atteindre à ce but, est de diminuer les causes des inimitiés entre les individus, parce
-l’union faciale acquiertplusde confiftanceSedefolidité,8tlesmœursdeviennentplus paifibles& plusdouces..Otez aux
+l’union sociale acquiert plus de consistance & de solidité, & les mœurs deviennent plus paisibles & plus douces. Otez aux
-( «7) Fiv créancierslepouvoirdecontraindre le débiteurpar corps confervez mêmeaudébiteurlur fesbiens,fa fubfiftance néceflaireil en reviendra certainementcet avantageà l’état qu’enretranchantlescaufes. desinimitiés,vousfortifierezcelles quiportentà la compaffionqui forceepour ainfidire à fon origine,s’étendraenfuited’elle-même librement,parleprogrèsnaturel auxchofeshumaines &
+créanciers le pouvoir de contraindre le débiteur par corps ; conservez même au débiteur, sur ses biens, sa subsistance nécessaire : il en reviendra certainement cet avantage à l’état, qu’en retranchant les causes des inimitiés, vous fortifierez celles qui portent à la compassion, qui, forcée, pour ainsi dire, à son origine, s’étendra ensuite d’elle-même & librement, par le progrès naturel aux choses humaines, &
-cercle quela naturetraceà tous
+cercle que la nature trace à tous
-événemens. Malheureufement pourle genre humainil n’y a qu’unbienpetit nombredeloixpoutivesquifoient vraimentdirigéesàl’intérêtgénéral &à l’avantageduplusgrandnombre, parce qu’ellesfont prefque toutesl’ouvragedesfieclesd’ignoranceoudestemsd’anarchie,deux étatsdechofesoùledroitpolitique
+événemens. Malheureusement pour le genre humain, il n’y a qu’un bien petit nombre de loix positives qui soient vraiment dirigées à l’intérêt général & à l’avantage du plus grand nombre, parce qu’elles sont presque toutes l’ouvrage des siecles d’ignorance ou des tems d’anarchie, deux états de choses où le droit politique
-:89: .41 n’eftpasconnu. C’en à
+n’est pas connu. C’est à
-tems femblables qu’il
+tems semblables, qu’il
-rapporter l’originede plufieursloix locales,
+rapporter l’origine de plusieurs loix locales,
-peut affimileraux édits dupréteurdans l’anciendroit romain, par lefquelson prétendoit Suppléerle défautde loix, ou corrigerou confirmercellesquiétoient en vigueur.Ces ordonnancesne fontqu’unmélangeinformedesloix des peuplesbarbares &
+peut assimiler aux édits du préteur dans l’ancien droit romain, par lesquels on prétendoit suppléer le défaut de loix, ou corriger ou confirmer celles qui étoient en vigueur. Ces ordonnances ne sont qu’un mélange informe des loix des peuples barbares &
-loix romaines.Lesinvafîonsdesnations du
+loix romaines. Les invasions des nations du
-le midide l’Europe changerentnotremaniered’être,& influèrentfur nos ufages& nos mœurs; de
+le midi de l’Europe changerent notre maniere d’être, & influèrent sur nos usages & nos mœurs ; de
-de connoîtrele cara&ere d’unenation,eft l’examende fa légiflation.Ceftun tableauoù fepeignent, comme
+de connoître le caractere d’une nation, est l’examen de sa législation. C’est un tableau où se peignent, comme
-les inclinationsd’unpeuple& legéniç defeslégiflateurs. Relativementau fujet que
+les inclinations d’un peuple & le génie de ses législateurs. Relativement au sujet que
-91 941 traitonsici cette législationpré» fentedeux difpofitionsdifférentes fur les héritages.L’une re donne
+traitons ici, cette législation présente deux dispositions différentes sur les héritages. L’une ne donne
-choix entrel’acceptation libre
+choix entre l’acceptation libre
-la fucceflîon le refus formel& la libertéde s’abt tenirde la requérir.L’autrepermet de fe porter héritierpar bénéfice d’inventaire.La premiereeft à l’avantagedes créanciers& au
+la succession, le refus formel & la liberté de s’abstenir de la requérir. L’autre permet de se porter héritier par bénéfice d’inventaire. La premiere est à l’avantage des créanciers & au
-des héritiersdu débiteur.La deuxiememetà couvertl’intérêtdes uns& desautres d’où nous fommesen droit de conclureque cellelà eft injufte >&l’autre équitable. S’ilm’étoitpermisdeconje&urerles motifsde ces deux difpofitionsje diroisquecellequiexclutla fucceffionparbénéficed’inventairea dû fonorigineà l’efpritd’aftuce& de mauvaifefoidupeuple,pourlequel ellea été faite.Il r>cfaut pascroire pourcelaquelesnationsconquifes,
+des héritiers du débiteur. La deuxieme met à couvert l’intérêt des uns & des autres : d’où nous sommes en droit de conclure que celle-là est injuste, & l’autre équitable. S’il m’étoit permis de conjecturer les motifs de ces deux dispositions, je dirois que celle qui exclut la succession par bénéfice d’inventaire, a dû son origine à l’esprit d’astuce & de mauvaise foi du peuple, pour lequel elle a été faite. Il ne faut pas croire pour cela que les nations conquises,
-C93) auxquellesellea étéétendue euf. fentle mêmecarattereque le peupleconquérant maisplutôt que lesvainqueursont jugéd’aprèseuxmêmesles vaincus car d’ailleurs c’eftuneobfervationconfianteque l’accentdu cœur fe conferveauffi biendansun paysque celuide la langue.Il eft vraique cettemême legiflationaccordeauxmineurs,aux veuves,&c. lebénéficed’inventaire mais
+auxquelles elle a été étendue, eussent le même caractere que le peuple conquérant ; mais plutôt, que les vainqueurs ont jugé d’après eux-mêmes les vaincus ; car d’ailleurs c’est une observation constante que l’accent du cœur se conserve aussi bien dans un pays que celui de la langue. Il est vrai que cette même legislation accorde aux mineurs, aux veuves, & c. le bénéfice d’inventaire ; mais
-comprendre pourquoicet avantagene pourroit
+comprendre pour quoi cet avantage ne pourroit
-tous. C’eft,dira-t-onpeut-être,que ces perfonnesfavoriféesfontincapables dedoljmaisû ellesen fontincapablespar elles-mêmes,leurstuteurs, leurs-curateurs,quifontle plusfouventleursparensou leursamis,ne lefont pas. Cependantavec quelquesprécautionson prévient ou l’oncroitprévenirlesinconvéniens
+tous. C’est, dira-t-on peut-être, que ces personnes favorisées sont incapables de dol ; mais si elles en sont incapables par elles-mêmes, leurs tuteurs, leurs curateurs, qui sont le plus souvent leurs parens ou leurs amis, ne le sont pas. Cependant avec quelques précautions on prévient, ou l’on croit prévenir les inconvéniens
-95 quipeuventenrésulterOr pourquoine pourroit-onpas les prévenirde la même manièredans tousles cas. Il eft bien
+qui peuvent en résulter ! Or pourquoi ne pourroit-on pas les prévenir de la même manière dans tous les cas. Il est bien
-de pareillesloix ont
+de pareilles loix ont
-faites dansdestemsoù lafciencedegouvernern’écoitpas encoreformée. L’efpritoccupédesdétailsétoitincapabledevoirlesobjetsengrand. Pourempêcherla fraude,on perdoitun hommecommele chirurgienignorant,qui, pouvantfauver un brasou une jambepar desremedesfalutaires,ne faitquecouper lapartiemalade.Nos loixnefont pastout-à -faitficruelles;maisony voitencoremalheureufement quelquesdifpofitionsmal entendues. Nousfommesdansun fiecleoù le nombredesréformateurseftinfini onenfantetouslesjoursdesprojets,pourdonnerune formenouvelleau fyttêmepolitique& éco-
+faites dans des tems où la science de gouverner n’étoit pas encore formée. L’esprit occupé des détails étoit incapable de voir les objets en grand. Pour empêcher la fraude, on perdoit un homme ; comme le chirurgien ignorant, qui, pouvant sauver un bras ou une jambe par des remedes salutaires, ne fait que couper la partie malade. Nos loix ne sont pas tout-à-fait si cruelles ; mais on y voit encore malheureusement quelques dispositions mal entendues. Nous sommes dans un siecle où le nombre des réformateurs est infini ; on enfante tous les jours des projets, pour donner une forme nouvelle au systême politique & éco-
-97 G Monique,on fâitpar-toutdescn~1It. gemensfouventenmalplutôtqu’en bien maisil fe trouvepeu de ces hommesà projets qui s’occupent férieufementdu bonheurdes nations leur premierobjet eft ordinairementleur intérêt particulier. Quelquesphilofophesélevent la voixen faveurde l’humanité;mais c’eftur hafards’ils font écoutés parcequel’accèsdu trôneeftinter* dità tout hommequi veut démafquerTerreurcachéefous leshabits dela vérité»Que la naiffance& les richeffesd’unfimplecitoyenne lui donnentplus aucun droit fur un autrecitoyen, que lesvertusSt les lumieresformentdéformaisla diftinftionla pluséclatanted’unhonv tneà un autrehomme,& on verra bientôtles loix fe ’dirigerà l’avantagegénéral.Cellesqui favorifent 1?créanciercontrele débiteur,font
+nomique ; on fait par-tout des changemens souvent en mal plutôt qu’en bien ; mais il se trouve peu de ces hommes à projets, qui s’occupent sérieusement du bonheur des nations ; leur premier objet est ordinairement leur intérêt particulier. Quelques philosophes élevent la voix en faveur de l’humanité ; mais c’est un hasard s’ils sont écoutés, parce que l’accès du trône est interdit à tout homme qui veut démasquer l’erreur cachée sous les habits de la vérité. Que la naissance & les richesses d’un simple citoyenne lui donnent plus aucun droit sur un autre citoyen, que les vertus & les lumieres forment désormais la distinction la plus éclatante d’un homme à un autre homme, & on verra bientôt les loix se diriger à l’avantage général. Celles qui favorisent le créancier contre le débiteur, sont
-c9914 GU manuellementen faveurdu plus petitnombre,& contrairesà l’intérêtduplusgrand.Sousunelégiflationquin’accordepasle bénéfice d’inventaire,dixfucceffions vacantes peuvententraînerla ruinede quaranteperfonnes,à compterquatretêtesparfamille,& la mortde quatrechefsde famille.Selonles obfervationsnécrologiquesabftraftionfaitedes annéesde maladiesépidémiquesle nombredes mortsen uneannéeeftà celuides vivanscommei eftà 33 c’eft-àdire, que fur 33 perfonnesil en meurtune.D’aprèscela on voit combienil doits’ouvrirdefuccef. fionsen une.annéedansun pays quia unegrandepopulation. La jufticeveutfansdouteque pelfonnene trouvedu profità la perted’autrui maisc’eftauffiune injufticequeceluiquinepeut.pré*
+manifestement en faveur du plus petit nombre, & contraires à l’intérêt du plus grand. Sous une législation qui n’accorde pas le bénéfice d’inventaire, dix successions vacantes peuvent entraîner la ruine de quarante personnes, à compter quatre têtes par famille, & la mort de quatre chefs de famille. Selon les observations nécrologiques, abstraction faite des années de maladies épidémiques, le nombre des morts en une année est à celui des vivans comme 1 est à 33 ; c’est-à-dire, que sur 33 personnes il en meurt une. D’après cela on voit combien il doit s’ouvrir de successions en une année dans un pays qui a une grande population. La justice veut sans doute que personne ne trouve du profit à la perte d’autrui ; mais c’est aussi une injustice, que celui qui ne peut pré-
-1101 tendreauxavantagesd’une fucce£ {ion foitexpoféàdespertesàcette mêmeoccafion.Ceftprécifémentla fituationde celuiquela loiforcede feporter comme héritiervolontaire. Ellelui permetà la véritéde s’en abftenir ou d’y renoncerformellement maisquoiquel’un ou l’autre decesdeux partisle metteà couvertdesinconvéniensdesdettesdu défunt,ilefttropdur auffiqu’ilfoit privédesavantagesqu’ilavoitdroit d’attendredelui s’ily en a. Lebénéficed’inventaire,qui eft un parti mitoyenégalementconformeà l’intérêtde tous doit être admisdanstoutgouvernementbien réglé &
+tendre aux avantages d’une succession, soit exposé à des pertes à cette même occasion. C’est précisément la situation de celui que la loi force de se porter comme héritier volontaire. Elle lui permet à la vérité de s’en abstenir, ou d’y renoncer formellement ; mais quoique l’un ou l’autre de ces deux partis le mette à couvert des inconvéniens des dettes du défunt, il est trop dur aussi qu’il soit privé des avantages qu’il avoit droit d’attendre de lui s’il y en a. Le bénéfice d’inventaire, qui est un parti mitoyen également conforme à l’intérêt de tous, doit être admis dans tout gouvernement bien réglé ; &
-loi contrairebannie commeinhumaine& injulle* Je finiraien implorantla juftice & la clémencedes fouverainsqui nousgouvernent, pour réformer l’abuscontre,lequelje m’élèveici,
+loi contraire bannie, comme inhumaine & injuste. Je finirai en implorant la justice & la clémence des souverains qui nous gouvernent, pour réformer l’abus contre lequel je m’élève ici.
-tio3] Heureuxfi les crisde l’hufnanit) arriventjuiqu’àleurtrôneycar la confiancequej’aià latendrefledes peresdespeuples medonnelieu d’espérerune heureuferévolution dans le fyftêmede la législation pournotre bonheur& celui de notrepollérité. i FI N.
+Heureux si les cris de l’humanité arrivent jusqu’à leur trône, car la confiance que j’ai à la tendresse des peres des peuples, me donne lieu d’espérer une heureuse révolution dans le systême de la législation pour notre bonheur & celui de notre postérité. F I N.
-APPROBATION, 3’ki lu
+APPROBATION. J’AI lu
-de Monfeigneurlé Chancelier,un manufcritintitulé Di/t coursphilofophiqut&politiquefur? empri* fonnementpourdates traduitdel’Italien, je croisqu’onenpeutpermettrerimpreffion.A Paris, ce dernierd’Odobre 1770. ROUSSELET»
+de Monseigneur le Chancelier, un manuscrit intitulé : Discours philosophique & politique sur l’emprisonnement pour dettes, traduit de l’Italien, & je crois qu’on en peut permettre l’impression. A Paris, ce dernier d’Octobre 1770. ROUSSELET.
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