Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 2/741-750

Fascicules du tome 2
pages 731 à 740

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 2, pages 741 à 750

pages 751 à 760


celui du Rapporteur, & sur lequel un procès a été partagé. Auctor sententia ad partiendam litem prævalentis.

☞ Dans ce cas l’affaire est portée dans une autre Chambre, pour y être, sur l’examen des raisons de part & d’autre, départagée & jugée précisément en faveur de l’une des deux opinions, sans y rien ajouter ni diminuer.

☞ Le Rapporteur soûtient son avis par les motifs & les raisons qui l’ont déterminé à le donner.

☞ Le Compartiteur expose les raisons de l’avis contraire.

☞ Les raisons de part & d’autre pesées & examinées, la Chambre juge.

Ces mots viennent du Latin partior, de pars.

COMPARUIT, terme de Palais. Ce mot est purement latin, & veut dire, il a comparu. On le trouve dans les livres de Droit, pris substantivement ; alors il signifie un acte délivré par un Juge à une des parties pour certifier sa comparution, lorsque l’autre partie est défaillante ou décédée ; pour faire appeler de nouveau en cause le défaillant ou ses héritiers.

COMPARUTION. s. f. Présentation en Justice. Obitus vadimonii. Une comparution personnelle, est celle qui se fait au Greffe en personne. Une comparution en état de prise de corps, ne se fait qu’étant prisonnier, ou ayant un écroue à la main. Comparution par Procureur, est celle qui se fait en faisant présenter un Procureur pour occuper sur des affaires civiles. En tous les Procès-verbaux on donne acte aux Procureurs & aux parties de leur comparution, dire & remontrances, & défaut contre les absens. Ce mot vient de compareo.

COMPAS. s. m. instrument de Mathématique, qui sert à décrire des cercles, & à mesurer les distances de deux points, de deux lignes. Circinus. Il est composé de deux branches de fer ou de cuivre, pointues par en bas, & attachées, par un clou rivé sur lequel elles sont mobiles dans une charnière. Un compas à quatre pointes, ou à pointes changeantes, est celui qui a des pointes d’acier ; un porte-crayon, un coupe-cercle, qu’on change, & qu’on attache avec une vis à une des branches. Les Poëtes nous ont voulu faire croire qu’Icare étoit l’inventeur du compas. C’est Calus, fils de la sœur de Dédale qui l’inventa, & Dédale en conçut une telle jalousie, qu’il le tua.

On dit figurément, faire les choses avec règle & compas ; marcher avec règle & compas ; pour dire, avec grande précaution & exactitude, avec une proportion étudiée, ne faire rien à l’étourdi. Metiri omnia suis rationibus. Il pèse toutes ses paroles, & crache même avec compas. Main. Tout son corps est fait au compas. Voit. On dit qu’un homme a le compas dans l’œil ; pour dire, qu’il mesure aussi juste à l’œil, qu’il le pourroit faire avec un compas.

Son discours, ses gestes, ses pas,
Sont tous mesurés au compas. Gomb.

En pareil jour, que chomons ici-bas ;
Prêtre sacré baptisoit une Muse,
Qui les surpasse autant par ses appas,
Que par le don d’une science infuse,
De bien rimer, d’ajuster au compas,
Tendre chanson, ou plaintive Elégie,
Et qui plus est composer Tragédie.

Nouv. choix de vers.

Ce mot vient de compartir, compartissement. On peut aussi le faire venir de compes. En effet le compas a deux piés, dont l’un tourne pendant que l’autre est fixe.

Compas brisé. Les Doreurs sur tranche se servent de ce compas pour placer l’or en feuilles sur l’assiette, dont ils couvrent la tranche du livre qu’ils veulent dorer.

Compas de division, est un compas, qui par le moyen d’une vis tarodée de deux grosseurs, l’une plus déliée que l’autre, & traversant deux petits cylindres mobiles dans le milieu de ses branches, s’ouvre & se ferme tant & si peu que l’on veut, pour diviser une ligne en autant de parties qu’on fait faire de mouvemens à la vis. Circinus divisiones adjuvans.

Compas à tracer des ellipses & des ovales. Le Gentilhomme de Bretagne qui a donné la méthode de tracer des courbes rampantes pour les escaliers, donne à la fin la figure & la description de cet instrument. Il est composé d’une règle de bois carrée, bien droite & bien égale, d’environ sept à huit piés de longueur, sur laquelle sont ajustées deux boîtes pour couler au long de la règle ; au dessous de ces boîtes est un petit cône autour, & au dessus une petite vis à oreille, pour l’arrêter sur la règle, à l’extrémité de laquelle s’ajuste aussi une pointe d’acier au dessous de la boîte, qui coule librement, & s’arrête aussi par le moyen d’une vis à oreille pour tracer l’ovale, soit avec la pointe ou un crayon. Les deux boîtes s’ajustent au long des branches d’une croix, sur laquelle porte la règle, & au dedans de laquelle il y a une coulisse en forme de queue d’aronde. Cette croix doit être faite bien carrément, c’est-à-dire, bien exactement à angles droits, & les coulisses doivent être également profondes & également larges ; car c’est en cela que consiste toute la justesse. On met la règle dans les coulisses ; on arrête les boîtes ; on tourne la règle, qui faisant aussi tourner les boîtes dans la coulisse, en avançant & reculant au long de la croix & l’autre boîte dans l’autre branche de la croix. Il faut mettre aussi des pointes de clou par dessus la croix aux quatre coins, pour l’arrêter fixement sur un plancher, ou sur un enduit. Il y a une petite platine mince pour ajuster dans la mortoise sous la vis à oreille, afin d’affermir les boîtes sur la grande règle que l’on fait mouvoir, comme on l’a dit, dans les coulisses, pour tracer l’ovale que l’on demande, & selon qu’on la veut, plus grande ou plus petite, ou si l’on en veut deux concentriques l’une à l’autre s’il n’y a qu’à avancer ou reculer sur la règle la pointe d’acier, qui sert à tracer l’ovale.

Le compas à ellipse est, selon Frézier, un instrument composé du compas à verge, & de deux poupées de plus, qu’on fait mouvoir dans une coulisse, pratiquée dans une figure de croix pour une ellipse entière, ou de T pour tracer une demi-ellipse sur des arcs donnés. Cet Auteur donne la description de cet instrument dans sa Stéréotomie, p. 138.

Le Compas à ovale est une simple équerre, sur les côtés de laquelle on fait couler deux pivots attachés à certaine distance à une règle, au bout de laquelle est un crayon pour le tracer : d’où il suit que pour une ellipse entière il faut assembler quatre équerres séparées par une coulisse, pour laisser le passage de ces pivots ; supposant qu’on ne veuille tracer qu’une demi-ellipse, il faut un instrument composé de deux équerres avec une coulisse entre deux. Frézier.

Compas de proportion, est un instrument de Géométrie composé de deux règles plates, mobiles dans une charnière avec des pinules. Circinus proportionibus inveniendis aptatus. Il sert à observer les longueurs, largeurs & distance des corps, & pour plusieurs usages de l’Altimétrie. Il y a des lignes divisées qui sont marquées sur les branches plattes, dont deux sont de parties égales, d’autres qui marquent la mesure ou la corde des angles, d’autres la proportion du poids des métaux, &c. Stauffler, Henrion, Ozanam, & plusieurs autres Auteurs, ont écrit des livres entiers de l’usage du compas de proportion.

Compas de réduction, est un compas qui étant composé de deux branches croisées & mouvantes sur un centre fixe, forme quatre pointes ou jambes, dont les deux petites opposées aux deux plus grandes, servent à réduire toute mesure capable de la plus grande ouverture à la moitié, au tiers, ou au quart, selon la longueur proportionnée de ses jambes. Circinus cujus decussata crura quadruplex acumen exhibent, quorum minora duo majoribus opposita, vel mediam, vel tertiam, vel quartam mensuræ partem, quam præferunt, majori complectuntur.

Compas de trissection. En Géométrie on regarde la trissection de l’angle par la règle & par le compas comme une chose impossible. Plusieurs grands hommes ont travaillé à la solution de ce problème sans y avoir satisfait pleinement, parce que leurs manières étoient purement méchaniques. En 1688, M. Tarragon, Professeur de Mathématiques à Paris, donna dans le Journal des Savans du 23e Septembre, la conntruction d’un compas de trissection, par lequel on résout ce problème d’une manière purement Géométrique. Il est composé de deux règles centrales ; d’un arc de cercle de 120 degrés, qui est immobile avec son rayon. Le rayon doit être attaché avec une des règles centrales comme les deux bras d’un compas de proportion, afin que cette règle centrale puisse parcourir tous les points de la circonférence de l’arc. Le rayon & la règle doivent être le moins épais qu’il est possible, & la règle attachée avec le rayon doit être battue à froid, pour acquérir du ressort. La largeur de l’autre règle centrale, qui est la plus grande, doit être triple de la largeur du rayon. Il faut sur la grande règle une coulisse à queue d’aronde de la largeur du rayon qui y doit être attaché, afin qu’il puisse se mouvoir. Il faut aussi un petit trou au centre de chaque règle. La figure fera mieux comprendre ceci. Voyez le journal cité.

Compas à verge, est un instrument pour tracer de grands arcs de cercle, qu’on ne peut faire avec les compas d’Appareilleur. Il consiste en une longue règle qu’on fait passer au travers de deux morceaux de bois ou de fer, qu’on appelle poupées, qui peuvent s’approcher ou s’éloigner comme l’on veut, & être fixées par le moyen des vis. Chacune de ces poupées est terminée à un bout par une pointe de fer, qui sert l’une à fixer au centre, & l’autre à tracer l’arc. Cet instrument vaut mieux qu’un cordeau, parce qu’il ne peut ni se ralonger, ni se raccourcir, dès qu’il est une fois réglé à la longueur. Frézier.

Compas d’Appareilleur, est un compas dont chaque branche, longue d’environ deux piés, est plate & droite, avec une pointe ; il est aux Appareilleurs & Tailleurs de pierres. Circinus lapicidæ, vel præfecto signandis lapidibus deserviens. Il sert aussi à prendre la mesure des angles gras & maigres. C’est pourquoi on l’appelle communément fausse-équerre.

Compas de fondeurs de Cloches. Voy. Cloche.

Compas de Cordonnier, est un instrument de bois avec lequel on prend la mesure du pié pour faire des souliers, mensura sutoria. Il est marqué de plusieurs divisions qu’on appelle points.

Compas courbe, terme d’horlogerie. Instrument qui sert à mesurer un corps rond.

Compas droit, instrument qui sert à couper les plaques.

Les Chirurgiens se servent aussi d’un compas à pointes pour couper l’os du crâne.

Compas de Tonnelier, est un compas de bois pointu par en bas, & rond par en haut, qui s’ouvre ou se serre avec une vis pour marquer les fonds de leurs tonneaux. Circinus qui dolarii in usu est. Les vis en sont tournées les unes à droite, & les autres à gauche, afin qu’il se puisse ou ouvrir ou fermer des deux côtés.

Compas de Tourneur, est un compas dont les jambes sont courbées en rond pour prendre les diamètres des globes, les épaisseurs des corps. Circinus cujus crura arcuata tornando deserviunt. Les. Sculpteurs & Graveurs s’en servent aussi.

Compas de Bijoutier, C’est un instrument avec lequel les Bijoutiers mesurent les pièces lorsqu’ils les taillent. Norma quam ad exigendos angulos gemmarum scalptores adhibent. Cet instrument est un morceau de bois, comme le fût d’un rabot fendu par dessus jusques à la moitié de sa longueur. Dans cette fente il y a une petite règle de laiton qui tient par un bout dans le milieu du rabot avec une cheville, en sorte que cette règle se meut comme une équerre pliante. Elle sert à prendre les angles des pierres que l’on pose sur le fût du rabot, à mesure qu’on les taille. Ce fût est quelquefois de laiton, comme la règle.

☞ Il y a un grand nombre d’autres compas à l’usage des différens ouvriers, dont il est inutile de faire le détail.

COMPAS est aussi un terme de Manufacture, qui signifie modèle, mesure. On dit, faire une étoffe sur le compas d’une autre ; pour dire, la faire de la même largeur, avec le même nombre de fils, & autant de portées, que celle qu’on prend pour modèle.

COMPAS, en termes de Marine, signifie la boussole dont se servent les Pilotes pour conduire leur vaisseau, qu’on appelle compas de mer & volet. Pixis nautica. On appelle compas de route, un instrument composé d’un carton mince, coupé circulairement, divisé en 32 parties égales, représentant l’horison avec les 32 vents, au centre duquel est un cône concave de laiton, appelé chapelle, avec un aiguillon en lozange, de bon fer ou d’acier, cloué au dessus du carton, & touché d’une pierre d’aimant. Tout ce composé s’appelle rose. On la met sur un pivot, & puis dans une boëte couverte de verre, & cette boëte est renfermée dans une autre qui sert à soûtenir un ou deux cercles de cuivre ou de laiton, qu’on nomme balanciers, qui servent à tenir horisontalement le compas ou la boussole. Le compas de variation, est un instrument qui, outre tout ce que l’on vient d’exposer, a un cercle divisé en 360 degrés, & un fil qui traverse par dessus la vitre, partant au dessus du centre, & tombant perpendiculairement d’un côté & d’autre le long de la boëte, qui est ouverte en cet endroit-là avec une vitre, & tout cela pour aider à observer la variation de l’aimant. Un compas renversé est une boussole suspendue, que l’on voit par le dessous, comme l’autre par le dessus. Compas mort, est une boussole qui a perdu la vertu de l’aimant. Compas de carte, est un compas qui s’ouvre en le pressant du côté de la tête ; les Pilotes s’en servent à compasser les cartes marines.

COMPASSEMENT. s. m. Action de compasser, ou l’effet de cette action. Voyez Compasser. Ce terme est peu usité.

COMPASSEMENT de feux, terme de Mineur. Règle qui s’observe pour espacer les fourneaux des mines, de façon qu’ils fassent tous leur effet dans le même temps. Collocatio, dispositio subfossarum formacularum.

COMPASSER. v. n. Prendre ses mesures avec un compas. Circino describere, dimetiri. Le dessein de ce bâtiment est bien compassé. Cette carte est exacte & bien compassée. Compasser les degrés, les distances dans une carte.

Compasser un Livre. C’est ainsi que les Relieurs s’expriment ; pour dire, mesurer un livre avec le compas, afin de le bien rogner. Librum circino dimetiri. Ce livre est-il compassé.

Compasser sa Carte, terme de Marine, c’est trouver avec la pointe d’un compas où peut être le vaisseau. voyez Pointer la carte.

Compasser des Feux, en termes de Mine, c’est les disposer de maniere qu’ils prennent tous ensemble. Ita disponere, collocare cuniculos, ut eodem tempore ignem concipiant ; autrement il en arriveroit comme des efforts que feroient trois hommes pour lever un fardeau ; à moins qu’ils n’agissent tous en même temps, ils ne le pouroient lever séparément.

Compasser la Mèche, c’est la mettre sur le serpentin dans une disposition propre à tirer, Funiculum igniarium aptare, disponere.

Compasser, dans le langage ordinaire, se prend plus souvent comme synonyme de proportionner une chose, que dans la signification de mesurer avec le compas ; ainsi l’on dit compasser des allées, compasser un parterre, compasser les appartemens d’une maison, les bien proportionner. Voyez Proportionner.

Compasser se dit figurément des actions, des démarches ; pour dire, les bien régler ; cette femme compasse toutes ses actions, ad normam exigere, ad regulam.

☞ Il se dit aussi pour peser, examiner mûrement les choses. Expendere, excutere.

Et quant à moi je trouve, ayant tout compassé,
Qu’il vaut mieux être encor cocu que trépassé. Mol.

COMPASSÉ, ÉE. part. On dit qu’un homme est fort compassé, quand il est fort réglé, fort exact, tant en ses mœurs qu’en ses paroles. Compositus.

☞ Dans l’usage ordinaire ce mot se prend presque toujours en mauvaise part. On entend par un homme compassé, un homme exact jusqu’à l’affectation.

Un dévot orgueilleux n’admet de sainteté,
Qu’en ceux dont les vertus avec art compassées,
Par la démarche & l’air sont d’accord annoncées. Vill.

COMPASSEUR. s. m. Celui qui compasse, qui mesure avec un compas. Ce mot est de Montagne.

COMPASSION. s. f. Mouvement de l’ame qui nous porte à avoir quelque pitié, quelque douleur, en voyant souffrir un autre. Sentiment de pitié que fait naître en nous la vue, le récit, ou le souvenir des maux de quelqu’un. Miseratio, commiseratio. La marque d’une belle ame, c’est d’avoir de la compassion pour les affligés, d’être ému de compassion. La compassion de la plûpart des hommes n’est que dans les sens : ils sont émus par les objets, & ne peuvent refuser ce ressentiment à la nature. Fléch. Quiconque se promet beaucoup de la compassion des hommes, connoît mal leur cœur ; il ne sait pas que les larmes tarissent bientôt. Vaug. Les longues lamentations donnent plus de mépris pour la foiblesse, que de compassion pour la douleur. S. Evr. C’est par orgueil que nous plaignons les malheurs de nos ennemis ; & nous ne leur donnons des marques de compassion, que pour leur faire sentir que nous sommes au dessus d’eux. Rochef. Pour bien sentir la compassion, il faudroit en avoir été digne. S. Evr. La véritable compassion ne s’arrête point à des attendrissemens extérieurs, ni à de simples larmes ; elle demande des secours effectifs. Dac. La compassion qui accompagne l’aumône est un don plus grand que l’aumône même. Fl. Il y a des compassions insultantes, qui redoublent la douleur des misérables. S. Evr. La compassion sert d’aiguillon à la clémence. Mont. Ceux-là sont plus susceptibles de compassion, qui ont éprouvé, ou qui appréhendent les mêmes malheurs qu’ils voient arriver aux autres. S. Evr. Non ignara mali miseris succurrere disco.

Ce mot & les suivans viennent de compassio, compatior, mots impropres, souffrir avec, compatir.

On dit figurément, faire compassion, en parlant de certaines choses qu’on désaprouve, qui sont mauvaises dans leur genre, pitoyables. Voyez ce mot. Voilà un raisonnement qui fait compassion. Ce que vous dites-là fait compassion.

☞ La Compassion de la Sainte Vierge est une fête que l’on célèbre dans l’Eglise Romaine, le vendredi de la semaine de la passion, en mémoire des vives douleurs dont la Sainte Vierge fut pénétrée à la vue du crucifiement de J. C. son fils.

COMPATIBILITÉ. s. f. Qualité des choses qui ne sont pas contraires, qui peuvent subsister ensemble. Le chaud & le sec sont des accidens qui ont de la compatibilité ensemble. Calor & siccitas in eodem esse subjecto possunt. On le dit aussi en parlant de Charges & de Bénéfices. Ces deux charges ou ces deux bénéfices ont de la compatibilité, peuvent être possédés par une même personne sans dispense. Duo hæc munera ab eodem exerceri, duo hæc beneficia ab eodem possideri possunt. Il se dit encore en Morale, compatibilité d’humeurs, mais plus souvent avec la négative. Il n’y a guère de compatibilité d’esprit, d’humeur entr’eux.

On appelle, Lettre de compatibilité, des Lettres-Patentes par lesquelles le Prince permet à un homme de posséder en même temps deux charges qui ne peuvent pas être exercées par une même personne. Obtenir des Lettres de compatibilité.

COMPATIBLE. adj. m. & f. Qui peut demeurer avec un autre sans le détruire. Le froid & le chaud ne sont pas compatibles en même sujet.

Compatible se dit aussi en Morale, des personnes de deux humeurs différentes, qui se peuvent accorder ensemble, conveniens, congruens. Cet homme veut se séparer d’avec sa femme, parce que leurs humeurs ne sont pas compatibles. Non congruunt inter se, moribus, naturâ discrepant.

Compatible se dit aussi des charges & des bénéfices qui peuvent être possédés ensemble, par une même personne, sans dispense. Une charge de Secrétaire du Roi & de Trésorier sont compatibles. Un bénéfice simple est compatible avec une Cure. Une charge de Conseiller au Parlement est compatible avec celle de Prévôt des Marchands.

COMPATIR, v. n. se dit des choses & des personnes qui conviennent l’une avec l’autre & peuvent se trouver ensemble. Posse simul consistere ; non repugnare inter se. Ces deux caractères ne peuvent compatir ensemble. La grandeur de l’ame ne peut compatir avec les ordures & l’avarice. S. Evr. L’ambition & le repos ne peuvent compatir ensemble. Mont. La triste indigence ne compatit point avec l’enjouement & avec les plaisirs. Font. Personne ne peut compatir avec lui, & il ne sauroit compatir avec personne. L’esprit de Dieu ne sauroit compatir avec celui du monde ; il est presque toujours employé avec la négative.

Compatir signifie en Morale, être sensible à la douleur, à l’affliction d’autrui, avoir pitié de lui. Alicujus dolore commoveri, alicujus misericordiâ capi. Un cœur vraiment chrétien doit compatir aux maux de son prochain, & les soulager de tout son possible. L’air contraint & forcé nous incommode, & nous tourmente, parce que naturellement nous compatissons au mal que nous voyons souffrir. Ch. de Mer.

Compatir signifie aussi, ☞ souffrir les fautes, les foiblesses de son prochain avec indulgence, au lieu de s’en fâcher. Indulgere, ignoscere. Il faut compatir aux foiblesses de la nature humaine, souffrir ses défauts.

Je ne compatis point à qui dit des sornettes,
Et dans l’occasion, mollit, comme vous faites. Mol.

COMPATISSANT, ANTE. adj. verbal. Qui compatit, qui témoigne de la compassion. Commiserans. Cœur compatissant, ame compatissante. Jeter un regard compatissant.

COMPATRIOTE. s. m. & f. Qui est de même pays. Popularis, conterraneus. On a de l’affection pour ses compatriotes. Quand on est en pays étranger, les compatriotes ont bientôt fait connoissance, se secourent volontiers les uns les autres.

Ce mot vient de la préposition com ou con & de patrie, pays ; compatriote, qui est du même pays.

COMPENDIUM. s. m. emprunté du mot Latin, fort en usage dans les Ecoles de Philosophie & de Théologie. Compendium. Il signifie abrégé, précis. C’est la coutume dans l’Université de Paris de donner, avant le corps de la Philosophie, le compendium de Logique, un abrégé des principales matières qui y sont traitées,.

COMPENSATION. s. f. Estimation par laquelle on compense une chose avec une autre ; action par laquelle une chose tient lieu d’une pareille ou d’une équivalente. Compensatio. En termes de Palais, compensation est proprement un moyen de droit, par lequel le débiteur poursuivi pour le payement d’une dette, demande qu’elle soit compensée avec ce qui lui est dû par son créancier, jusqu’à concurrence. La compensation est un moyen qui peut s’opposer en tout état de cause, même après la condamnation. L’équité naturelle a établi le moyen de compensation, le Droit civil en a prescrit les règles. La compensation équipolle à un payement. La compensation est de droit, de liquide à liquide.

☞ On appelle claire & liquide, une dette certaine, non sujette à contestation, & dès à présent exigible ; ainsi on ne peut pas compenser une dette exigible ; présentement avec celle qui ne le sera que dans un certain temps, ou sous condition.

Pour que la compensation ait lieu, il faut qu’il se rencontre une ressemblance & une identité parfaite dans les choses que l’on veut compenser. On obtenoit ci-devant des Lettres de Chancellerie pour faire des compensations. La compensation des dépens se fait, quand chacune des parties réussit en quelques-unes de ses prétentions.

Compensation se dit aussi au figuré, de tout ce qui tient lieu d’une autre chose, ☞ de l’estimation des choses, dont le bien & le mal étant mis en balance, le désavantage se trouve réparé par l’avantage. Il faut faire compensation des défauts de nos amis avec leurs bonnes qualités. B. Rab.

COMPENSER. v. a. Donner en payement à un créancier une somme qu’il doit, pareille à celle qu’il demande : ou demander à la déduire, si elle n’est pas égale. Rem unam cum alia recompensare. Nous avons compensé ce que je lui devois avec ce qu’il me devoit.

Compenser, se dit aussi des choses équivalentes qui partent l’une pour l’autre, quand il intervient l’autorité des Juges, ou l’accord des parties. On a compensé la somme qu’il devoit à son maître avec les services qu’il lui avoit rendus.

Compenser signifie aussi faire l’estimation des choses dont le bien & le mal étant mis en balance, le désavantage se trouve réparé par l’avantage. Ce fermier a eu de bonnes & de mauvaises années ; les unes compensent les autres ; les bonnes qualités compensent les mauvaises. Compensare bonis vitia. Compenser les crimes avec les bonnes actions. Beneficiis maleficia pensare.

Compensée, ée, part.

COMPÉRAGE. s. m. C’est l’action par laquelle on devient compere de la personne dont on tient l’enfant sur les Fonts, ou de la personne avec laquelle on tient l’enfant de quelqu’un. Mutua affinitas, ex sacri Baptismi fontibus exorta. Ce comperage lui tient au cœur. Pat.

On dit proverbialement, tout se fait par compèrage. Le mot de compèrage exprime proprement la relation, l’affinité qui se trouve entre le parrain & la marraine d’un enfant, ainsi qu’entre le pere & la mere de l’enfant. Sous ce point de vue le compérage est regardé comme une alliance spirituelle. Voyez Parrain, Marraine.

☞ COMPERE. s. m. Patrinus. Nom qui se donne par le pere & la mere d’un enfant à celui qui a tenu cet enfant sur les fonts de Baptême ; par la marraine, à celui avec qui elle a tenu cet enfant ; & par le parrain & la marraine, au pere de l’enfant. Celui qui tient un enfant avec une fille est son compere. Il est aussi compere à l’égard des pere & mere de l’enfant, & il contracte une alliance spirituelle avec eux. On ne contracte cette alliance qu’à cause du Sacrement même du Baptême, & non point à cause des cérémonies qui l’accompagnent. Le Pape Etienne IX appelle souvent dans ses lettres le Roi Philippe I son compere, & la Reine Bertrade sa commere, & les deux Princes, leurs fils, ses enfans spirituels : ce qui fait croire qu’il fut leur parrain, & montre en même temps que ces noms sacrés par la Religion, étoient alors des titres d’honneur, loin d’être du style bas & familier, comme aujourd’hui.

Ce mot vient de compater, comme commère de commater.

Compere se dit, en discours ordinaire, de ceux qui sont bons amis & familiers ensemble. Amici, familiares. Ce sont des comperes qui sont toujours ensemble. Ce sont des festins de comperes & de commeres. La plûpart des Bourgeois se nomment comperes, & rien n’est plus ordinaire entr’eux que ces termes d’alliance. Caill.

On dit d’un homme, que c’est un bon compere, pour dire, que c’est un bon compagnon, un homme de bonne humeur & agréable. Ac. Franç.

On dit aussi burlesquement de quelqu’un, c’est un compere ; pour dire, c’est un homme fin, habile & intelligent en son métier.

On dit, en ce monde, tout se fait par comperes & par commeres, c’est-à-dire, par intrigues & par sollicitations.

Compere se dit aussi des animaux que l’on introduit parlant dans les apologues. Amicus.

Compere le Renard se mit un jour en frais,
Et retint à diner commere la Cicogne. La Font.

COMPERRE, vieux verbe act. Ce mot ne se dit plus depuis long temps, il signifie acquérir ; il est formé de comparare, qui signifie la même chose.

COMPERSONNIER. s. m. terme de Coutume. C’est ainsi que se nomment les associés dans un ménage ou dans une famille, où tous les biens sont communs ; ce qui arrive souvent dans les familles de main-morte, pour conserver ses biens dans une parenté. Eorumdem bonorum socii.

Compersonnier se dit plus particulièrement de celui qui tient un héritage avec un ou plusieurs autres, à la charge de payer une redevance au Seigneur. Tous les compersonniers sont solidairement obligés. Il s’en trouve encore plusieurs en Bourgogne, en Champagne, dans le Nivernois.

☞ COMPES. s. m. plur. terme de Manufacture. Sortes de Droguets croisés, drapés qui se fabriquent en France.

Compes. s. m. terme d’Antiquité. Sortes d’entraves de fer dont étoient chargés les Esclaves Romains.

☞ C’étoit aussi un instrument pour donner la torture aux criminels.

COMPÉTANT, ANTE. adj. Voyez Compétent.

COMPÉTEMMENT. adv. D’une manière compétente, suffisamment. Legitimè, legitimo jure, ex legitima auctoritate. Il étoit âgé competemment pour intenter cette action. Ce Prévôt a jugé compétemment, après avoir fait juger sa compétence. Ce mot se dit peu.

☞ COMPÉTENCE. s. f. D’autres écrivent COMPÉTANCE. Droit qui appartient à des Juges de connoître des affaires, dont la connoissance ou l’attribution leur est donnée. On entend ici par compétence le droit qu’ont des Juges ordinaires de connoître de toutes sortes d’affaires entre les parties qui sont sujettes à leur Juridiction. Judicis legitima potestas, Jurisdictio. Les Prévôts des Maréchaux & les Lieutenans-Criminels ne jugent en dernier ressort qu’après avoir fait juger leur compétence. La compétence en matière criminelle se règle entre les Titres par le lieu du délit ou par la qualité du délinquant.

☞ Compétence en fait de Juge Ecclésiastique. Voyez Juge d’Eglise.

Compétence des Juges des Seigneurs. Voyez Justice seigneuriale.

Compétence se dit, au figuré, de la capacité ou science d’un homme en quelque chose. Captus, facultas. Il ne faut pas que le Cordonnier juge de la peinture, cela n’est pas de sa compétence. Les mystères les plus relevés de la loi ne sont point de la compétence de la raison. Il y a des Auteurs qui prétendent que le mot de compétence ne se peut dire qu’en riant dans le sens figuré.

Compétence se dit aussi de la comparaison des rangs, des dignités, quand il y a prétention d’égalité. Comparatio, æqualitas. Un Avocat ne disputera pas le rang, le pas à un Président ; il n’y a point de compétence, de concurrence entr’eux. ☞ Il n’y a point de compétence entre le Prince & son sujet. Mettre quelqu’un en compétence avec un autre. Entrer en compétence avec quelqu’un. Façons de parler assez usitées, qui me déplaisent.

COMPÉTENT, ENTE. adj. L’Académie écrit compétant. Qui a le pouvoir de juger, de contester. Idoneus, conveniens, legitimus. Les Juges ordinaires des lieux sont les Juges compétens pour juger ceux qui n’ont point de privilège qui les exempte. Le Parlement est le seul Juge compétent pour les duels. Un Prêtre peut demander son renvoi par devant un Juge compétent, son Official. Il n’y a que le mari qui soit partie compétente pour accuser sa femme d’adultère. C’est une bonne exception de dire qu’une partie n’est pas compétente.

On appelle partie compétente, une partie capable de contester en justice. Acad. Fr.

On le dit aussi figuré, de celui qui est habile dans Une profession dont il est question de juger. Idoneus, aptus. Il faut être Astronome pour parler des Comètes ; les autres ne sont pas compétens pour cela.

Compétent signifie aussi, qui est légitime, raisonnable, suffisant. Legitimus. Ce garçon est en âge compétent de se marier, de jouir de son bien. On a établi les délais compétens par l’Ordonnance, pour se présenter, pour défendre, pour produire.

Compétent signifie encore la partie qui peut appartenir à quelqu’un en quelque chose où il a droit ; ce qui lui est dû, ce qui lui revient. Legitimus, conveniens. On a partagé cette terre, on a donné à chacun des enfans leur partie compétente. Voyez Compéter, autre mot barbare.

COMPÉTENT, ENTE. s. m. & f. Dans l’Histoire Ecclésiastique, c’est le nom d’un degré ou ordre de Catéchumènes. Competens. Voyez Catéchumenes.

COMPÉTER, v. n. ☞ mot barbare, consacré au Palais, & qui n’est point d’usage ailleurs. Appartenir. Pertinere. Ce garçon a dissipé tout ce qui lui peut compéter & appartenir en la succession de son père.

COMPÉTITEUR. s. m. Concurrent, celui qui prétend à un même rang, à un même emploi, à une même fortune. Competitor. Ceux qui prétendent à la gloire ont beaucoup de compétiteurs.

Compétiteur, dans la primitive Eglise, est la même chose que Compétent. C’étoit un Catéchumene qui avoit passé par toutes les épreuves, qui avoit toutes les dispositions nécessaires à recevoir le Baptême. Voyez Catéchumenes.

COMPÉTITRICE. s. f. Celle qui aspire aux mêmes honneurs, aux mêmes dignités, aux mêmes avantages qu’un autre. Competitrix. Ce mot se trouve dans la Mothe le Vayer. Je doute qu’il se trouve ailleurs.

COMPIEGNE. Compendium. Ville de l’Isle de France, sur l’Oise, proche du confluent de l’Aisne. Compiegne a été le séjour de quelques-uns de nos Rois. Clotaire I mourut à Compiegne en 564. Charles le Chauve fit rebâtir & aggrandir Compiegne l’an 877, à cause que Louis le Débonnaire, son pere, Charlemagne, son aïeul, & Charles Martel, son bisaïeul y avoient demeuré. Il la fit nommer Carlopolis, c’est-à-dire, Charleville ; Louis II & Louis V sont inhumés à Compiegne dans l’Abbaye de S. Corneille. C’est au siège de Compiegne, en 1431, que la Pucelle d’Orléans fut prise dans une sortie.

COMPILATEUR. Auteur qui a recueilli & ramassé plusieurs choses qu’il a lues dans les ouvrages des autres, ou qui a recueilli tout ce que les autres ont dit sur certaines matières. Qui res varias variis è scriptoritus collegit. La science des compilateurs est aride & ennuyeuse ; ce sont pourtant ceux que le Vulgaire confond avec les Sçavans ; mais les gens sages les renvoient au pédantisme. La Bruy. Comme les compilateurs ne pensent point, ils rapportent ce que les autres ont pensé, & se déterminent plutôt à recueillir beaucoup de choses, que d’excellentes. Id.

COMPILATION. s. f. Recueil ☞ de plusieurs choses, tirées d’un ou différens Auteurs, mises en corps d’ouvrage. Compilatio. La compilation du Droit Canon par Gratien. La compilation des Poëtes grecs a été faite en trois volumes. Nos Historiens Ont chargé leurs compilations de circonstances ennuyeuses, & qui laissent languir l’Histoire, en n’offrant que de petits objets qui ne touchent point. P. Dan. La compilation des loix faites par les Rois de Rome fut faite sous le règne de Tarquin le Superbe, par Papirius, d’où on l’appelle Jus Papirianum. Du temps de Jules César, Osilius commença la compilation des Edits des Préteurs ; elle fut achevée par Julianus du temps de l’Empereur Adrien. La compilation des Constitutions des premiers Empereurs Romains fut faite vers le temps de Constantin, ou un peu après. Dans le sixième siècle Justinien fit faire une compilation générale des plus belles Constitutions des Empereurs, depuis Adrien jusqu’à son temps. Instit. du Droit, &c.

COMPILER, v. a. Faire un recueil, un assemblage, ou compilation de plusieurs ☞ choses écrites ou publiées dans les ouvrages des Auteurs, & les mettre en corps d’ouvrage. Compilare. Du Chêne a compilé les anciens Historiens françois. Baronius a compilé l’Histoire Ecclésiastique, en a fait un corps. Fontanon & Guerrois ont compilé les Ordonnances, en ont fait des recueils. Escobar a compilé une Théologie morale. Les Allemans se figurent que pour se mettre au rang des Auteurs célèbres, il suffit d’avoir compilé un gros volume. S. Evr. Le Droit Romain compilé par Justinien dura trois cens ans en Orient sans recevoir d’autre changement que celui du langage. Instit. du droit, &c.

COMPISSER. v. a. Vieux mot qui signifioit pisser dessus, ou priser souvent & par tout. Meire in aliquid. Il est augmentatif de pisser.

COMPITALES. s. f. pl. Fêtes qui se célébroient chez les Anciens en l’honneur des Dieux Lares. Compitalitia. Ce mot vient du latin compitum, un carrefour ; & cette Fête fut ainsi appelée, parce qu’elle se célébroit dans les carrefours. Les Compitales furent instituées par Servius Tullius, sixième Roi de Rome, c’est-à-dire, qu’il les établit à Rome. Quoique Dion dise dans son quatrième Livre que cette fête se célébroit peu de temps après les Saturnales, & que le Calendrier Romain la mette au douzième de Janvier, il paroît néanmoins qu’elle n’avoit point de jour fixe, au moins au temps de Varon, comme l’a remarqué Casaubon sur Suet. Aug. C. 31. Il n’y avoit non plus alors de Compitales qu’une fois l’année. Auguste en fit célébrer deux fois. Comme c’étoit une fête mobile, le jour qu’on la devoit célébrer, s’annonçoit tous les ans. Elle se faisoit ordinairement vers le quatrième des Nones de Février, c’est-à-dire le second jour de ce mois. On y farcissoit une truie. Proper. L. IV, El. I. Les Prêtres qui célébroient ces têtes étoient des esclaves & des affranchis. Ils furent institués, dit Macrobe, Saturnal. 1, C. 7. non seulement à l’honneur des Lares, mais aussi de la Manie, leur mère. Tarquin le Superbe les rétablit ; & sur la réponse de l’oracle, qui ordonna que l’on sacrifiât des têtes pour les têtes, c’est-à-dire, pour la santé & la prospérité des gens de chaque famille, on y sacrifioit des enfans. Mais Brutus, après avoir chassé les Rois, ☞ interpréta les paroles de l’oracle, de ordonna qu’au lieu de têtes d’enfans, on immoleroit à ces Dieux des têtes de Pavots. Durant les Compitales, chaque famille mettoit à la porte de la maison la statue de la Déesse Manie. On suspendoit aussi aux portes des maisons des figures de laine qui représentoient des hommes & des femmes, pour prier les Lares & la Manie de se contenter de ces figures, & d’épargner les gens de la maison ; pour les esclaves, au lieu de figures d’hommes, on offroit des balles ou pelotes de laine. Scaliger, Poet. L. I, c. 28. Le Roi Tullius établit que les esclaves qui célébroient les compitales, jouiroient de la liberté pendant tout le temps que dureroit la Fête ; c’étoit en effet un moyen très-propre à procurer l’avantage des familles, que de gagner l’affection des esclaves, en les faisant jouir quelque-temps de la liberté. Auguste ordonna qu’on orneroit de fleurs deux fois l’année, au printemps & en été, les statues des Dieux Lares qui étoient dans les carrefours. Voyez Varron, Festus, Macrobe, Denys d’Halicarnasse, Suétone, Rosinus, le Calendrier Romain, &c. Voyez encore Aulu-Gelle, L. X, c. 24.

COMPITALICE. adj. m. & f. Compitalitius. Qui appartient aux Fêtes compitales. Le jour compitalice, Dies compitalitius, étoit celui auquel on célébroit les Compitales. Les Jeux compitalices, Ludi compitalitii, étoient les jeux qui se faisoient à cette fête.

Ces noms viennent de compitum, comme on l’a dit, ou competum, qui vient de competo, qui signifie concourir ; c’est un endroit où plusieurs rues concourent, aboutissent. Avant la fondation de Rome, ces Compitales se célébroient dans les carrefours des villages car cette fête est plus ancienne que Rome.

COMPLAIGNANT, ANTE adj. terme de Palais. ☞ Celui qui se plaint en Justice du tort qu’on lui a fait ; demandeur & accusateur en matière criminelle. Actor, petitor. Il s’est rendu complaignant. La partie complaignante. Tous les Arrêts, en matière criminelle, portent, entre un tel, demandeur, & complaignant contre tels & tels, défendeurs, accusés.

☞ On dit substantivement le complaignant, la complaignante.

COMPLAINTE. s. f. Plainte & doléance d’une personne qui souffre. Querela, querimonia. Dans les Pastorales il y a d’ordinaire des complaintes de Bergers. On entendit cette triste complainte. Ce mot vieillit. Il est demeuré dans le style des Monitoires. Cor. Je ne le rejeterois point si absolument. On ne le dit guère qu’au pluriel. De grandes complaintes.

Complainte, en termes de Palais, en matière prophane, se dit des actions possessoires, qui appartiennent à un propriétaire pour se maintenir en possession de son héritage d’un droit réel quelconque. Vindiciarum petitio, postulatio. On forme une complainte en cas de saisine & de nouvelleté ; ce qui signifie en vieux langage, en cas de trouble de possession, comme quand un autre usurpe un héritage dont on est en possession depuis un an & jour. Alors on forme une complainte possessoire, & il faut juger la réintégrance avant que de plaider au fond. Ce fut M. Simon de Bucy, Président au Parlement de Paris, qui inventa, & mit en usage la complainte en cas de saisine & de nouvelleté. Il faut intenter la complainte dans l’an de la possession du détenteur. On dit matière de complainte, cas de complainte ; former, intenter, exécuter, prendre complainte. Ramener la complainte sur les lieux, se dit, lorsque le Juge ou un Commissaire se transporte sur un héritage contentieux, & entend les parties.

Pour intenter légitimement une demande en complainte, il faut un trouble, une entreprise, un attentat, de la part de celui contre qui cette demande est dirigée. Aubry, Mém. pour le Chap. de Reims.

Complainte, en matière bénéficiale, se dit d’une action qu’on forme pour être maintenu en un Bénéfice après en avoir seulement pris possession, en vertu des provisions du Collateur. Vindiciarum postulatio in beneficio ecclesiastico. On peut intenter Complainte dans l’an du trouble contre celui qui a un titre coloré. ☞ Comme cette action est une action possessoire, il n’y a que les Juges séculiers qui en puissent connoître ; le possessoire étant une affaire de fait qui regarde la puissance séculière,

☞ Mais la connoissance du pétitoire des bénéfices appartient de droit au Juge d’Eglise, à l’exception des affaires de régale dont le Parlement de Paris connoît au pétitoire, privativement à tous autres Juges.

☞ Celui qui a perdu sa cause au possessoire, ne peut plus se pourvoir au pétitoire par devant le Juge d’Eglise ; parce que les Juges laïques ne jugent pas le possessoire sur le fait de possession seulement, mais par le mérite du fonds & des titres des contendans, dont ils examinent la validité, d’où il s’en suit qu’il seroit inutile de les faite examiner de nouveau par les Juges d’Eglise, avec risque de voir réformer quelquefois par eux les arrêts de la Cour ; ce qui seroit absurde. Ferriere.

☞ Les complaintes pour les bénéfices doivent être poursuivies par devant le Juge Royal, qui ressortit nuement au Parlement ; auquel la connoissance en appartient privativement aux juges inférieurs & des Seigneurs Haut-Justiciers, quand même ils seroient fondateurs, collateurs ou présentateurs des bénéfices.

Les complaintes se jugent le maltin, & ne sont pas des procès de Commissaires. La complainte n’a pas lieu contre le Roi, parce que la complainte est une espèce d’accusation contre celui par lequel nous prétendons avoir été injustement troublés ; & cette accusation ne convient point à un sujet à l’égard de son Roi.

Ces mots viennent du verbe latin plangere, dont on a fait complangere.

COMPLAIRE, v. n. Se rendre agréable à quelqu’un, en déférant à ses volontés & à ses sentimens. Obsequi ; indulgere, morem gerere. Les Courtisans ne tâchent qu’à complaire aux Princes & aux Puissances. On gagne le cœur des personnes les plus difficiles, à force de les flatter, & de leur complaire. Il a fait cela pour vous complaire.

On dit, se complaire ; pour dire, se plaire, se délecter en soi-même, en ses productions, en ses ouvrages, y mettre sa satisfaction, son plaisir. Il se complait en lui-même. Il se complaît en sa personne. Il se complaît dans tous ses ouvrages, dans tout ce qu’il fait,

COMPLAISANCE. s. f. déférence aux sentimens & aux volontés d’autrui. Obsequium, obsequentia. ☞ La complaisance est une condescendance honnête par laquelle nous plions notre volonté, pour la rendre conforme à celle des autres. Elle consiste à ne contrarier le goût de qui que ce soit, dans tout ce qui est indifférent pour les mœurs, à s’y prêter même autant qu’on le peut, & à le prévenir lorsqu’on l’a su deviner. Les mœurs.

☞ Il semble que l’esprit doux & l’humeur égale réunis, fassent l’homme complaisant. Il est vrai qu’ils y contribuent ; mais il est vrai aussi que la complaisance ajoûte à la douceur & à l’égalité. A l’esprit doux, à l’humeur égale, joignez l’envie de plaire & de petits soins, vous serez complaisant.

☞ L’homme égal & doux est celui qui, toujours le même, toujours tranquille & sûr, évite toute occasion de me faire de la peine. L’homme complaisant fait quelque chose de plus pour moi. Il est disposé à penser comme je pense, à agir comme j’agis ; il entre dans mes vues & dans mes goûts, & profite de la moindre occasion de me faire plaisir. Mais aussi il faut avouer que la douceur de l’esprit & l’égalité de l’humeur ne sauroient devenir des vertus suspectes ; à quelque usage qu’on les emploie, elles seront toujours des vertus. Il n’en est pas de même de la complaisance, qui n’est vertu que par l’usage qu’on en fait.

☞ Pour faire une définition un peu exacte de cette affection que quelques-uns ont de plaire à tout le monde, il faut dire avec la Bruyère, que c’est une manière de vivre où l’on cherche beaucoup moins ce qui est vertueux & honnête, que ce qui est agréable.

On se flatte les uns & les autres, & le monde ne subsiste que par cette complaisance mutuelle. Flech. Dans le monde, il faut avoir de la complaisance, même pour les sots ; ils sont le plus grand nombre. Les personnes qui hantent la Cour, reconnoissant combien les humeurs contredisantes sont incommodes, prennent une route, qui est de ne contredire rien, & de louer tout indifféremment ; c’est ce qu’on appelle complaisance. Cette humeur qui est plus commode pour la forme, est très-désavantageuse pour le jugement. Port-R. La complaisance qui sacrifie tout aux autres, semble être la destruction de l’amour propre, & n’est bâtie que sur ses ruines. M. Esp. La complaisance qui est une vertu paisible, & très-nécessaire à la société, devient un vice, quand elle n’a point de bornes. M. Scud. La véritable complaisance est celle qui compatit avec liberté, qui cède sans foiblesse, qui loue sans flatterie, & qui, sans affectation & sans bassesse, rend la société agréable, & la vie plus commode & plus divertissante. Id. Rien de plus ennuyeux que la fade complaisance de ces gens qui se récrient sur tour. Bell. La fausse complaisance de nos amis nous endort, & nous jette dans une confiance ridicule. Maleb.

Complaisance se prend aussi quelquefois pour un vain plaisir qu’on prend en soi-même, & qui naît de la plus grande opinion qu’on a de soi. Inanis de se cum sensu voluptatis opinio. Avec quelle complaisance ambitieuse Luther ne se regardoit-il point lui-même, faisant le personnage de Héros sur le théâtre de l’Eglise ! Boss.

Complaisances au pluriel, se prend pour l’effet & les marques de la complaisance. Ses complaisances pour un tel lui coûtent cher. Acad. Fr.

Complaisances, en termes de l’Ecriture ; signifie quelquefois amour, affection. C’est dans ce sens que Dieu dit qu’il a mis toutes ses complaisances en son Fils ; pour dire, que son Fils est l’objet de son amour.

Complaisance, terme de Palais. C’est le payement fait des loyaux aides ☞ par le vassal à son Seigneur, dans les quatre cas marqués ; savoir, au cas de chevalerie du fils aîné, de mariage d’enfans, de voyage d’outre-mer, & de rançon du Seigneur. Voyez Aides, terme de Jurisprudence féodale.

COMPLAISANT, ANTE. adj. Qui tâche de plaire & de se conformer à l’humeur & à la volonté d’autrui. Obsequens, obsequiosus, placendi cupidus. Ce n’est pas être complaisant que de donner aveuglément dans le caprice de tout le monde : c’est être adulateur ou imbécille. Bell. Voyez Complaisance.

Complaisant est aussi s. & dans cette acceptation, on dit qu’un homme est le complaisant d’un autre ; pour dire, qu’il est assidu auprès de lui, & qu’il s’attache à lui plaire dans quelque vue d’intérêt. C’est le complaisant, un des complaisans d’un tel. On dit dans le même sens, qu’une femme est la complaisante d’une autre. Acad. Fr.

Les complaisans semblent vouloir s’oublier eux-mêmes, afin de s’appliquer & de se tourner uniquement à tout ce que veulent les autres. M. Esp. Pour être un complaisant habile & éclairé, il ne faut pas l’être toujours, ni paroître entièrement asservi. M. Esp.

Ces mots viennent du latin complacere, qui signifie la même chose.

COMPLANT. s. m. terme d’Agriculture. Lieu planté d’arbres, de vignes. Locus arboribus, vel vitibus consitus. J’ai fait un complant d’arbres dans ce parc. Il y a deux complans de vignes en ce quartier-là. On le dit aussi de la chose même qui est plantée. Voilà un complant de morillon de Bar sur Aube ; un complant de maronnier d’Inde. Oa le dit particulièrement des vignes.

☞ On a proprement appelé complant, la jouissance que l’on accorde à quelqu’un, à titre d’usufruit, d’un champ, à la charge d’y planter des arbres, & particulièrement des vignes, & à condition de rendre au bailleur par chaque année, une certaine portion des fruits. Donner une terre à complant.

Ce mot vient du latin complantare.

COMPLANTER, v. a. terme d’Agriculture, peu usité. Planter des vignes, des arbres, &c. Complantare.

Complanter, v. n. percevoir le droit de complant. Coutume de Poitou. Il n’est permis d’enlever les fruits sujets à ce droit, qu’après que le Seigneur a complanté.

COMPLANTERIE. s. f. terme de Coutumes. Lieux, terre, district sur lequel le Seigneur perçoit le droit de complant.

☞ COMPLÉMENT. s. m. C’est en général ce qui s’ajoûte à une chose, pour lui donner sa perfection, du mot latin complementum.

Complément, terme de Géométrie. C’est ce qui reste d’un quart de cercle, lequel est de 90 degrés, après qu’on en a retranché un certain arc. Complementum. L’arc, & son complément sont relatifs, & ne se disent que de l’un à l’égard de l’autre. Cet angle, ou cet arc est de 60 degrés, son complément est de 300. Ce mot est de grand usage dans la Trigonométrie.

Complément d’un angle à 180 degrés. C’est aussi l’excès de 180 degrés sur cet angle. Ainsi le complément à 180 degrés d’un angle de 100 degrés, est 80.

Complémens (Les) d’un parallélogramme sont les deux plus petits parallélogrammes que l’on fait en tirant deux lignes droites parallèles à chacun des côtés du grand parallélogramme, & qui se coupent à angle droit dans un point de la diagonale. On démontre en Géométrie que les deux complémens d’un parallélogramme sont égaux entr’eux.

En Astronomie, on appelle complément d’un astre, sa distance jusqu’au zénith, ou l’espace qu’il y a depuis le point où est un astre élevé sur l’horison jusqu’au zénith. La hauteur & le complément d’un astre sont le quart du cercle qu’il y a depuis l’horison jusqu’au zénith.

En termes de Navigation, ☞ on appelle complément de route, le complément de l’angle, que la route ou le rhumb que l’on suit fait avec le méridien du lieu où l’on est, c’est-à-dire la différence de cet angle à 90 degrés.

Complément de courtine, en termes de fortification, est la partie du côté intérieur, qui est composée de la courtine & de la demi-gorge ; c’est-à-dire, c’est le côté intérieur, diminué d’une demi-gorge. Cortinæ complementum.

Le Complément de la ligne de défense, en termes de fortification, est le reste de la ligne de défense, après avoir ôté l’angle du flanc.

Complément d’un intervalle, en termes de musique, est la quantité qui lui manque pour arriver à l’octave. Ainsi la seconde & la septième sont complémens l’une de l’autre. Il en est de même de la tierce & de la sixte, de la quatre & de la quinte.

Complément de béatitude, en Théologie, est un surcroît de béatitude dont jouiront les bienheureux dans le Ciel après la résurrection. Le comble de la béatitude. Complementum beatitudinis. La résurrection des corps, & l’éclat dont ils seront accompagnés dans le Ciel, sera pour les âmes bienheureuses un complément de béatitude. Le complément de béatitude n’est qu’une béatitude accidentelle, & suppose la béatitude essentielle, qui consiste dans la joie immense qu’auront les Bienheureux en voyant clairement Dieu, & en l’aimant d’une manière proportionnée à cette claire vision.

COMPLET, ÈTE. adj. Qui a toutes ses parties, tout ce qu’il lui faut. Omnibus suis partibus expletus, perfectus. Il lui a donné un service complet de vaisselle d’argent ; des armes complètes. Abl. Un habit complet ; nombre complet ; année complète & révolue.

On dit en Droit, qu’une année commencée est tenue pour complète en plusieurs cas, comme en la promotion aux Ordres.

☞ Une chose est entière, dit M. l’abbé Girard, lorsqu’elle n’est ni mutilée, ni brisée, ni partagée, & que toutes ses parties sont jointes ou rassemblées de la façon dont elles doivent l’être. Elle est complète, lorsqu’il ne lui manque rien, & qu’elle a tout ce qui lui convient.

☞ Le premier de ces mots a plus de rapport à la totalité des portions qui servent simplement à constituer la chose dans son intégrité essentielle. Le second en a davantage à la totalité des portions qui contribuent à la perfection accidentelle de la chose.

☞ Les Seigneurs occupent à Paris des maisons entières, & les Bourgeois n’ont pas toujours des appartemens complets.

On l’emploie aussi quelquefois substantivement dans ces phrases. Le complet d’un régiment. Le non-complet des troupes.

☞ En Botanique, on appelle fleur complète, flos completas, celle qui renferme toutes les parties de la fleur, calice, pétales, étamines & pistil.

COMPLÉTEMENT. adv. d’une manière complète. Omnino, perfectè. Mot que la Fontaine a peut-être hazardé le premier dans une épitre à feu M. de Vendôme, mais aujourd’hui autorisé par l’usage.

Venons au fait : En Piémont notre armée,
Sous Catinat à vaincre accoutumée,
Complètement a battu l’ennemi,
Et la Victoire a pris notre parti.

☞ COMPLÉTER, v. a. rendre complet, ajouter ce qui manque. Ce mot est assez nouveau, mais reçu par l’usage. Il vient du latin complere.

☞ On le dit dans le même sens en termes de Librairie. Ces mémoires ne peuvent servir à compléter les éditions défectueuses. J’ai besoin de tels & tels volumes pour compléter un exemplaire de la Bible.

Compléter se dit aussi en termes de guerre. Compléter une compagnie, un régiment, une armée. Les recrues, les remontes, les nouvelles levées servent à compléter l’armée.

☞ Il s’emploie de même dans tous les cas où il est question d’ajouter ce qui manque pour être complet. Compléter un recueil de médailles, une collection de cabinet. Cette Académie s’applaudit de voir compléter le nombre de ses membres par un Magistrat qui fait le bonheur de la ville.

☞ COMPLEXE. adj. terme de Logique, opposé à simple ; la même chose que composé. On le dit des proportions, des termes qui les composent, & des idées exprimées par les termes.

☞ L’idée complexe est celle qui renferme plusieurs idées simples, comme l’idée de Dieu juste, d’une montagne d’or.

☞ Le terme simple est celui qui ne désigne qu’une seule idée, comme Dieu, montagne, &c.

☞ Le terme complexe est celui qui comprend plusieurs idées : comme, Dieu juste, montagne d’or.

☞ La proposition complexe est celle qui a au moins un de ses termes complexe ou composé ; comme, Dieu juste ne peut laisser le crime impuni ; ou qui a plusieurs membres, comme les propositions causales. Si Dieu est juste, il ne peut laisser le crime impuni.

☞ En Algèbre, on appelle une quantité complexe, celle qui est composée de plusieurs parties jointes ensemble par les signes + & −, plus & moins. a + bc, c’est-à-dire, a plus b moins c.

COMPLEXION. s. f. Habitude, disposition naturelle du corps. Corporis habitus, constitutio. Les Médecins doivent appliquer les remèdes suivant les différentes complexions de leurs malades. Le vice & la vertu dépendent souvent de notre complexion, de notre tempérament. Les complexions bilieuses rendent les gens d’humeur martiale. Les Physiciens & les Médecins distinguent quatre complexions générales & principales dans l’homme. La complexion sanguine répond, selon eux, à l’air, elle en a les qualités, elle est chaude & humide. Complexio sanguinea. Elle est ainsi nommée, parce que le sang y domine. La complexion flegmatique qui tire son nom de la pituite, ou du flegme, en quoi elle abonde, répond à l’eau ; elle est froide & humide. Complexio phlegmatica. La complexion bilieuse est de la nature du feu ; elle est chaude & sèche. Complexio cholerica. La bile, χολή, lui a donné son nom. La complexion mélancholique tient de la nature de la terre ; elle est froide & sèche. Complexio melancholica. Son nom vient de mélancholie. Il avoit la complexion vive & ardente. Bouh.

Complexion signifie aussi humeur, inclination. Il est de complexion amoureuse. Un Ministre d’Etat ne montre ni humeur, ni complexion, de peur de laisser échapper son secret, ou par foiblesse, ou par l’action. La Bruy.

Complexion se dit en Physique pour amas, assemblage. La complexion de tous les nombres finis ne sauroit donner un nombre infini.

COMPLEXIONNÉ, ÉE. adj. Qui a une bonne ou une mauvaise complexion. Corpus benè vel malè constitutum. Il est bien, il est mal complexionné. Ce mot n’est pas d’usage, ou tout au plus il ne se dit qu’en Médecine.

Ces mots viennent du latin complector, complexio.

COMPLEXUS. s. m. terme d’Anatomie. Nom qu’on donne à un des muscles, parce qu’il semble composé de trois muscles. Il prend son origine de la septième vertèbre du cou, & de la première, troisième & quatrième du thorax, & va s’insérer au derrière de la tête.

COMPLICATION, s. f. ☞ signifie en général un assemblage de causes, d’effets ou de circonstances, dont il est difficile de voir distinctement tous les rapports, à cause de leur mêlange & de leur dépendance. Complexio, confusio.

Complication de maladies, en Médecine, se dit, ou lorsqu’une maladie est jointe à une autre maladie dans le même sujet, ou, selon quelques-uns, lorsque ces maladies, quoique considérées chacune en particulier, constituent des lésions de fonction dans l’économie animale de plusieurs manières, opposition aux maladies simples, qui ne troublent les fonctions que d’une manière.

☞ On peut encore appeler complication, la jonction, le concours de plusieurs symptomes d’une maladie. Rien n’embarrasse plus les Médecins que la complication des maux dont le remède de l’un est contraire à la guérison de l’autre.

Complication, terme de Jurisprudence, se dit en matière criminelle, lorsque l’accusé est prévenu de plusieurs crimes, & lorsque le civil se trouve mêlé au criminel. On le dit en général de toutes les affaires où il y a un grand nombre d’objets & de demandes respectives.

COMPLICE. adj. souvent employé substantivement. Qui a part, qui participe au crime d’un autre. Sceleris socius, particeps, conscius. On applique à la question les condamnés à mort, pour avoir révélation de leurs complices. On le croit complice de ce crime. ☞ Comme celui qui a été complice d’un crime, est souvent aussi coupable que celui qui l’a commis, ils doivent aussi être également punis, en cas de conviction. Les complices ne font point foi l’un contre l’autre, mais indices seulement, pour parvenir à tirer preuve par le moyen de la question.

☞ La déposition d’un seul complice sans autre adminicule, n’est point indice suffisant pour faire appliquer son complice à la question, il en faut deux ou trois.

☞ Les complices font pleine foi contre un autre, quand il s’agit de certains crimes, comme de Leze-Majesté, sacrilège, conjuration, fausse monnoie, hérésie & assassinat.

Vous me fuyez, Madame ? ah ciel quelle injustice !
Quoi ! de tous mes malheurs vous rendez-vous complice ? Capistron.

Ménage dérive ce mot de complice, ablatif de complex, qui signifie la même chose.

COMPLICITÉ. s. f. participation au crime d’un autre. Criminis communio, societas. Ce criminel n’est pas le principal assassin ; mais il est accusé de complicité.

COMPLIE, vieux adj. f. accomplie, remplie, parfaite.

COMPLIES. s. f. pl. Prière du soir, qui est la dernière partie de l’Ordre du Bréviaire, & qui se dit après Vêpres. Ecclesiasticarum precum ultima, completorium, completa. Les complies s’appellent ainsi, parce que c’est la fin & l’accomplissement de l’Office divin. C’est ainsi que l’on appelle completæ, les dernières oraisons de la Messe, que nous appelons Postcommunion, ainsi que l’ont remarqué les Bollandistes, & le P. Mabillon dans leurs Acta Sanctorum. S. Benoît est le premier Auteur Ecclésiastique qui ait parlé des complies. Il a établi dans sa règle que sur le soir les Moines s’assemblassent, qu’ils fissent en commun une lecture spirituelle, & ensuite quelques prières pour terminer la journée. C’est de cette pratique des Moines que la coutume de réciter complies est venue : on les commence, dans l’Office Romain seulement, par une courte leçon tirée de la sainte Ecriture : elle répond à la lecture spirituelle que faisoient les Moines ; on dit ensuite le Confiteor, ce qui convient très-bien à la dernière partie de l’Office divin. Dans la plûpart des Diocèses de France, qui ne suivent pas le Rit Romain, les complies commencent différemment, par exemple, à Paris, par Converte nos, &c. Les prières qu’on fait avant & après les Pseaumes, l’Hymne & les Pseaumes que l’on récite, tendent à exciter en nous les sentimens que nous devons avoir pour bien finir la journée, ou sont des moyens pour obtenir les graces nécessaires pour passer saintement la nuit. Voyez la règle de S. Benoît, Gavantus, Durand, le Cardinal Bona, &c.

Ce mot est dérivé de completa. Ménage.

☞ COMPLIMENT. s. m. discours obligeant, par lequel on témoigne à quelqu’un l’estime, la considération, les égards qu’on a pour lui. Verba officiosa. Il y a, peut-être, plus de rusticité que de politesse, à faire ce grand nombre de complimens, dont on est si peu avare dans le monde. Les complimens doivent être simples, & dégagés de ces ornemens vulgaires, qui sont si fréquens parmi la populace. Le commerce de la civilité consiste en complimens peu sincères, & à se rendre mille petits devoirs que la coutume a établis.

☞ Plaute, dans sa Comédie des Captifs, appelle plaisamment toutes ces vaines honnêtetés, verba sine pane, pecuniâ, paroles qui ne donnent pas de pain, ni de quoi en avoir.

☞ C’est, sur-tout, le premier jour de l’année que la convulsion des complimens agite le monde entier.

Là Martin dans un lit, entouré de flatteurs,
De cent sots complimens savouroit les douceurs. Vill.

Je veux que le cœur parle, & que vos sentiment
Ne se masquent jamais sous de vains complimens. Mol.

Dans le style familier, on dit qu’un compliment est bien troussé ; pour dire, qu’il est court & bien tourné.

On dit familièrement, rengainer son compliment, pour dire, s’abstenir de le faire, parce qu’il est inutile, ou hors de propos.

Sans compliment se dit pour franchement, ouvertement, sans détour.

Compliment est quelquefois opposé à l’intention réelle, aux promesses effectives. Les offres de service qu’il vous fait, c’est par compliment. Acad. Fr.

Compliment est aussi un témoignage de joie, ou de douleur, qu’on rend à ses amis, quand il leur est arrivé quelque bonne ou mauvaise fortune. ☞ Discours obligeant, par lequel on témoigne à quelqu’un, de vive voix ou par écrit, la part que l’on prend à ce qui lui arrive d’intéressant. Gratulatio, vel significatio lætitiæ ex aliena læetitia perceptæ. Pour la douleur, significatio dolorls ex alieno dolore suscepti. Compliment de condoléance.

Compliment est aussi une petite harangue qu’on fait à des personnes de marque, quand elles partent dans quelque ville, ou en quelques occasions notables. Ce Prince n’a point voulu de harangue, il s’est contenté d’un simple compliment. Salutatio.

Compliment signifie quelquefois par antiphrase, querelle. Rixa, alicujus denunciatio, significatio. Ce Capitaine reçut un appel, & il fut fort surpris de ce compliment. Je crois que vous ne trouverez pas mauvais le petit compliment que je viens vous faire ; c’est qu’il faut, s’il vous plaît, que nous nous coupions la gorge. Mol.

☞ On le dit quelquefois dans un sens approchant de celui-là, pour discours dur & fâcheux ; mais alors ce sens est toujours déterminé par l’épithète qui y est jointe. C’est un mauvais compliment à vous faire. C’est un compliment bien dur. Durus est hic sermo.

☞ On dit proverbialement compliment de la Place Maubert, invectives grossières, familières aux harangères.

COMPLIMENTAIRE, terme de Commerce. s. m. Les complimentaires sont ceux à qui l’on donne procuration générale pour faire la même fonction que les Maîtres, tant au fait des changes que des marchandises. Ils signent les lettres, comptes & promesses du nom du Maître ; ce qui a même force & vigueur que si le Maître même avoit signé. M. Le Prestre, cent. 26 chap. m. 77 & 82 de l’édition de 1695.

On appelle quelquefois le complimentaire d’une société, celui des associés, sous le nom duquel se fait tout le commerce de la société. Dict. de Comm.

COMPLIMENTER, v. a. faire compliment. Voyez Compliment. Le Roi a envoyé un Ambassadeur à un tel Prince, pour le complimenter sur la mort de sa femme, sur son mariage. Le Magistrat de la ville a été complimenter son nouvel Evêque. On l’emploie aussi absolument : c’est trop complimenter. Nous perdons le tems à complimenter.

Complimenté, ée, part.

☞ COMPLIMENTEUR, EUSE, adj. souvent employé substantivement ; femme complimenteuse. On le dit ordinairement en mauvaise part d’un homme qui se rend importun à force de faire trop de complimens. Importunus, putidus officiosæ urbanitatis affectator.

☞ COMPLIQUÉ, ÉE. adj. signifie en général tout ce qui contient un grand nombre de rapports, tellement liés les uns avec les autres, qu’il est difficile de les embrasser tous, & de les voir distinctement.

☞ Les affaires où les faits sont compliqués les uns avec les autres, par leur mêlange & par leur dépendance.

☞ Les choses extrêmement compliquées deviennent obscures à ceux qui n’ont ni assez d’étendue, ni assez de justesse d’esprit pour les démêler. Syn. Fr. Une affaire difficile & délicate n’est pas compliquée pour cela, parce qu’elle peut n’avoir qu’un petit nombre de rapports, au lieu que la seconde en a nécessairement beaucoup.

☞ Les personnes sont impliquées dans les faits ou dans les affaires, lorsqu’elles y trempent ou qu’elles y ont quelque part. Voyez ce mot.

Compliqué a un substantif qui est d’usage, & n’a point de verbe. On dit complication, & on ne dit point compliquer. Impliqué a un verbe, & n’a point de substantif. On dit impliquer, & on ne dit pas implication.

Compliqué se dit, dans le même sens, en parlant des pièces de Théâtre. Il n’y a point de pièces qui soient plus compliquées que les Comédies & les Tragédies angloises : elles sont chargées de reconnoissances, & bourrées d’incidens entassés les uns sur les autres. L’action est simple dans Bérénice ; elle est trop compliquée dans Heraclius.

Compliqué se dit de même en parlant des machines. Cette machine n’est pas assez simple, elle est trop compliquée.

Compliqué, terme de Jurisprudence, dans laquelle il y a des crimes mêlés, ou différentes branches, différens incidens, différentes demandes qui se croisent mutuellement.

Compliqué en médecine, Maladies compliquées, voyez Complication.

COMPLOT. s. m. dessein de nuire à quelqu’un, concerté secretement entre quelques personnes. Conjuratio, conspiratio. Ces voleurs avoient fait complot de voler la nuit une telle maison.

Celui qui met un frein à la fureur des flots,
Sait aussi des méchans arrêter les complots.

Seigneur, vous le savez, son avis salutaire,
Découvrit de Tharès le complot sanguinaire. Rac.

Ménage dérive ce mot de completum, qu’on a dit pour complexum.

COMPLOTER, v. n. & a. faire un complot, machiner quelque chose de noir. Contra aliquem conjurare, in aliquem conspirare. Quelques soldats avoient comploté de livrer une porte de la ville aux ennemis. Ils ont comploté sa ruine. Ablanc. Il s’emploie souvent absolument & sans régime. Ils avoient comploté ensemble.

Il complota avec un tel.

Comploté, ée, pass.

COMPLUTE. Complutum. C’est Alcala de Hénarez, ville de la nouvelle Castille. Ce mot s’est formé du nom latin, & nous le disons toujours dans notre langue, quand nous parlons de la Bible imprimée dans cette ville, au commencement du XVIe siècle par les soins & aux frais du fameux Cardinal Ximénèz : car, on l’appelle ordinairement la Bible de Complute, & non pas la Bible d’Alcala, comme a dit Larrey dans Henry VIII, p. 134.

M. Simon a aussi employé ce mot en parlant de l’Université ; mais on ne dit point l’Université de Complute, & l’usage veut qu’on dise l’Université d’Alcala.

Complute se dit encore d’un Monastère d’Espagne, Complutum, ainsi nommé, parce qu’il étoit dédié à S. Juste & à S. Pasteur, qui avoient souffert le martyre à Complute, ville du Royaume de Castille, qu’on a depuis appelée Alcala de Henarèz. P. Hélyot, t. V, p. 32.

COMPOIX. s. m. C’est dans le Languedoc ce qu’est ailleurs le cadastre. Ménage, Dict. Etym. Le mot de cadastre est en usage dans les provinces de Dauphiné & de Provence, où il signifie un registre qui contient la qualité, l’estimation des fonds de chaque Communauté, & le nom de ceux qui les possêdent. Richelet. Le Roi Louis XIV, par son Edit du mois de Juillet 1690, portant création des Procureurs du Roi & Greffiers des Hôtels de Ville, ordonne, p. 4 & 5, que les Secrétaires & Greffiers expédieront sous les Magistrats desdits Hôtels de Villes & Communautés, les bulletins des logemens des gens de guerre à pié & à cheval, toutes certifications, affectations, passeports & bulletins de santé ; tiendront les Livres des compoix ou cadastres desdites Villes & communautés, écriront & dresseront lesdits Livres de compoix & cadastres, lorsqu’ils seront renouvellés.

Il est étonnant que Ménage n’ait rien dit sur l’étymologie de compoix, qui, vraisemblablement vient du mot latin computatio, compte, calcul, supputation.

COMPONCTION. s. f. terme de Théologie. Une douleur qu’on a dans l’ame d’avoir offensé Dieu. Peccatorum admissorum dolor, dolor ex admissis peccatis, en style de Bible, compunctio. La componction de cœur est nécessaire pour la véritable pénitence. La marque assurée d’une véritable repentance, c’est de sentir une vive douleur, & d’avoir une forte componction de ses fautes passées. Il faut se préparer à la confession avec une véritable componction, Port-R..

Componction, dans la vie spirituelle, a une signification plus étendue ; elle se prend non-seulement pour la douleur qu’on a d’avoir offensé Dieu ; mais aussi pour un sentiment pieux de douleur, de tristesse, de dégoût, qui a différens motifs. Les miseres de la vie, le danger où l’on est de se perdre dans le monde, l’aveuglement des mondains, &c. sont pour les gens de bien, des sujets & des motifs de componction. On a un air humble & modeste, quand on a la componction dans le cœur. Compunctio, pia tristitia.

Ce mot vient de pungere, compungere, piquet.

☞ COMPON, f. m. terme de Blason. Voyez Componé.

COMPONÉ, ÉE. adj. terme de Blason, qui signifie, composé ; & se dit, par exemple, d’une bordure, d’un pal, ou d’une fasce, qui est composée de deux émaux différens, alternes, séparés & divisés par filets, excepté aux recoins, où les jointures sont faites en pié de chèvre. Quadratis ex colore ac metallo alternatis distinctus. Et on appelle compon, chaque pièce de la componure, dont l’un doit être de métal, & l’autre de couleur. Il portoit d’azur à la croix d’argent avec la bordure componée du premier & du second. On le dit aussi des croix, sautoirs, fasces, & autres pièces honorables de l’Ecu.

COMPONENDE. s. f. nom d’une espèce de Tribunal ou Bureau à Rome, dépendant du Dataire, & où l’on envoie toutes les Suppliques reçues & signées, qui doivent payer quelque grâce particulière. Componenda ; Tribunal apud quod de exigendo pro privilegiis atque immunitatitus pretio transigitur, componitur. On en convient avec cet Officier, & on la paye entre ses mains, avant que d’en pouvoir retirer l’expédition.

Pie IVe dispensa les Officiers de l’Ordre des Chevaliers Pies de ce qui seroit dû à la Componende pour les pensions ou pour les bénéfices qui leur seroient donnés. P. Hélyot, Tom. VIII, p. 393.