Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 2/021-030

Fascicules du tome 2
pages 11 à 20

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 2, pages 21 à 30

pages 31 à 40


là la véritable leçon, quand on compare cet endroit du Pere avec celui du Dictionnaire des Basiliques, où il est écrit tout au long que follis pese ἔλκει δηνάρια διακόσια πεντήκοντα, deux cens cinquante deniers. Quand on a vu plusieurs manuscrits grecs, on convient aisément qu’il a été très-facile de prendre un H. pour un N. Mais de cette correction il s’ensuit que S. Epiphane ne parle que du follis pris pour un poids ; & en second lieu que le P. Petau a eu raison d’imprimer δηνάρια dans le fragment du Lexicon Nomique qu’il a cité, comme, dans S. Epiphane, & non pas δονάρια, comme le manuscrit sembloit avoir, & que cet ο apparent étoit un véritable η, peut-être un peu trop fermé ; qu’ainsi il n’y a plus à douter de ce que valent ces δηνάρια, & qu’Alciat l’a mal traduit par donos. Concluons donc qu’il n’y a que le Lexicon Nomique du P. Sirmond cité par le P. Petau, qui nous apprenne ce que c’étoit chez les Romains & les Grecs postérieurs, que le follis pris pour une somme, ou la bourse, & qu’elle étoit de 100 liv. 17 sols, un peu plus, de notre monnoie, en mettant le marc d’argent à 27 livres.

Bourse commune, est une société qui se fait entre deux, ou plusieurs personnes de même profession, pour partager les profits de leurs charges, ou de leur trafic, afin qu’ils n’envient point la pratique les uns des autres, & qu’ils ne courent point sur leur marché. Societas. Les Secrétaires du Roi, les Commissaires du Châtelet, les Huissiers du Parlement, font bourse commune. Les Marchands en société font bourse commune.

☞ Avoir, manier, tenir la bourse, c’est avoir le maniment de l’argent. On dit figurément d’un homme qui prête volontiers de l’argent à ses amis, dans le besoin, que sa bourse est ouverte à ses amis : & que toutes les bourses sont fermées, pour dire qu’on ne trouve point d’argent à emprunter. On dit encore figurément d’un homme qui relâche de ses droits pour l’amour de la paix, ou pour accommoder une affaire, qu’il s’est laissé couper la bourse ; & de celui qui l’a disposé à cet arrangement, qu’il lui a coupé la bourse. Et de ceux qui font la quête pour les pauvres, pour le prédicateur, &c ; on dit qu’ils viennent couper charitablement la bourse. On dit aussi, faire une affaire sans bourse délier, quand on fait un troc, faire un accommodement but-à-but, & sans qu’il en coûte de l’argent. On dit aussi, qu’il faut faire de la dépense selon sa bourse ; pour dire, qu’il la faut faire selon son revenu. Vivre sur la bourse d’autrui, c’est vivre aux dépens d’autrui. Avoir la bourse bien ferrée, c’est l’avoir bien garnie. Avoir la bourse platte, c’est être gueux, n’avoir point d’argent.

La mort en lui coupant la vie,
Coupa la bourse à bien des gens.

C’est-à-dire, appauvrit bien des gens. Quand on plaide sur un retrait lignager, on est obligé d’offrir à chaque acte de la cause, bourse & deniers à découvert, & à parfaire.

On dit proverbialement, au plus larron la bourse, quand on confie son argent à une personne infidèle ; ☞ ou quand on donne la dépense à faire à une personne dont on doit se méfier. On dit qu’un homme fait bon marché à sa bourse, lorsqu’il dit qu’une chose lui coûte moins qu’il ne l’a achetée.

Bourse, en termes de Collége, est une fondation faite pour entretenir de pauvres écoliers dans les études. Jus gratuitæ ac siatæ attributionis. Les bourses sont à la nomination des Patrons & Fondateurs. Les bourses des Collèges ne sont point des bénéfices, mais de simples places affectées à certains pays, & à certaines personnes. Il n’y a que les écoliers étudians qui puissent prétendre droit aux bourses des Collèges de l’Université de Paris. Il y a au Collège du Cardinal le Moine à Paris de grandes & de petites bourses ; les petites sont pour de jeunes écoliers qui n’en peuvent jouir que six années, c’est-à-dire, autant de tems à-peu-près qu’il en faut pour parvenir au degré de Maître-ès-Arts, & quand ils l’ont obtenu, ils cessent de jouir de leurs bourses : les grandes bourses ne peuvent être tenues que neuf ans par des Maîtres-ès-Arts, & finissent quand ils ont obtenu le degré de Docteurs. En quelques Collèges il y a des bourses qui se donnent à vie. Il y en a quelques-unes qui ne peuvent être possédées que par des Ecclésiastiques Docteurs, ou autres ; mais les bourses, de quelque nature qu’elles soient, ne sont point des bénéfices.

Bourse, se dit encore des sommes d’argent que l’on amasse, & que l’on destine à certains usages particuliers : ainsi au commencement du Séminaire de S. Nicolas du Chardonnet à Paris, on appela bourse cléricale, l’argent que l’on amassoit pour envoyer dans des Provinces les Prêtres qu’on y avoit formés, servir de Curés & de Vicaires. Ce Séminaire a fait dans la suite de si grandes acquisitions, que l’an 1695, les Assemblées de la bourse cléricale cesserent. L’Abbé de Choisy, Vie de Madame de Miramion. P. Hélyot, T. VIII. p. 142, 143.

Bourse, en termes de Négocians, est en plusieurs villes, ce qu’on appelle à Paris & à Lyon, le Change, c’est-à-dire, le lieu où les Marchands se trouvent pour négocier leurs billets. Forum argentarium. La bourse de Londres, d’Anvers, d’Amsterdam.

Guichardin rapporte que l’origine de ce mot vient de ce que la première place des Marchands qui s’est appellée bourse, a été celle de la ville de Bruges, au bout de laquelle il y avoit un grand Hôtel bâti par un Seigneur de la noble famille de Wander-Bourse, dont on voit encore les armoiries qui sont trois bourses gravées sur le couronnement du portail. Cet Hôtel donna le nom à la place où s’assembloient les Marchands, les Courtiers, les Commissionnaires, les Interprètes, & autres supports de négoce, pour faire leurs affaires & leur commerce. Catel, Hist. de Languedoc, p. 199, dit que ces Marchands d’Anvers acheterent pour s’assembler un logis où pendoit l’enseigne de la bourse. Quoi qu’il en soit, de cette ville, qui étoit autrefois la plus fameuse pour le trafic, les Marchands ont transporté ce nom aux places d’Amsterdam, d’Anvers, de Berghen en Norwége, & de Londres, qu’ils ont nommé bourse commune des Marchands. La Reine Elisabeth fit appeller Change Royal, la bourse de Londres, & depuis elle a retenu ce nom.

La bourse à Toulouse est le lieu où les Marchands rendent leur justice, suivant le pouvoir qui leur en a été donné par Edit de Henri II. à Paris au mois de Juillet 1548, par lequel il leur octroya d’établir dans Toulouse une bourse commune semblable au Change de Lyon, avec pouvoir d’élire tous les ans un Prieur & deux Consuls, qui jugeroient en première instance tous les procès entre les Marchands. D’autres disent que l’Edit de Henri II. n’est que de 1549 ; mais de la Faye, dans ses Annales de Toulouse, le rapporte à l’an 1548. L’établissement de ces sortes de Juridictions est dû au Chancelier Olivier, & non au Chancelier de l’Hôpital, comme l’a écrit Charles Loiseaux, Des Seigneuries, chap. 16. Ce qui l’a trompé, c’est qu’il a cru que la bourse de la ville de Paris, qui ne fut établie qu’à la fin de l’année 1563 sous Charles IX étoit la première en institution, ce qui n’est pas. La première est Lyon ; la deuxième Toulouse ; la troisième Rouen, & Paris la quatrième. L’Edit d’érection de celle de Paris, porte expressement que c’est tout ainsi que les places appelées le Change à Lyon, & bourses à Toulouse & à Rouen. De la Faye. On dit aussi la bourse à Nantes.

Bourse, signifie aussi la poche ou l’extrémité d’un filet dans lequel le poisson ou le gibier se trouve embarrassé sans pouvoir sortir.

En termes de Fauconnerie la bourse de l’oiseau, c’est sa gorge.

Bourse noire. C’est une partie qui se trouve dans les yeux des oiseaux, & ne se rencontre point dans les yeux des autres animaux. C’est M. Perrault qui lui a donné ce nom. Elle est placée en dedans de l’humeur vitrée, & tient par sa base au fond de l’œil, à l’endroit où le nerf optique entre dans l’œil. Elle est fort noire. M. Perrault dit dans la première partie de la Méchanique des animaux, que les oiseaux ayant besoin d’une meilleure vue que les autres animaux, à cause que leur vol les éloigne ordinairement des objets qu’ils ont intérêt de connoître, ont dans l’œil cette partie qui semble leur avoir été donnée pour rendre plus parfaite la fonction de la membrane uvée, en ce qui regarde la séparation & la réception des parties opaques du sang. M. de la Hire trouve cette raison mauvaise. Car, dit-il, les poules, les oies, qui sont toujours proche de la terre, ont la bourse noire comme les autres oiseaux ; il trouve encore que le nom de bourse ne convient point à cette partie ; selon lui c’est un muscle composé de plusieurs feuillets triangulaires, dont le plus petit côté est attaché sur une membrane ronde é fort dure, qui occupe toute la base du nerf optique à l’endroit où il entre dans l’œil ; & ces feuillets sont attachés comme sur des rayons, qui partent du centre de cette membrane. Ils tiennent aussi par un autre côté à un cordon, ou tendon, qui sortant du centre de la base, va s’attacher au cristallin par le côté vers le grand angle de l’œil. Le troisieme côte de ces feuillets, qui est le plus grand, est flottant dans l’humeur vitrée. Ce muscle est donné aux oiseaux pour tirer le cristallin vers le fond de l’œil par le côté qui répond au grand angle avec le cordon ou tendon commun des feuillets de ce muscle, & par là donner à l’œil une position plus perpendiculaire aux rayons des objets qui sont au devant de la tête, sans quoi les oiseaux, de la manière que leur yeux sont placés, ne pourroient distinguer les alimens qu’ils doivent prendre par le bec, ainsi que l’expérience d’une lentille de verre opposée obliquement à la lumière d’une chandelle, & les régles de l’optique le démontrent.

Bourse, ou Bouton, en termes de Botanique, est un bouquet de feuilles, ou une fleur qui n’est pas encore épanouie. Folliculus. Voyez Bouton. On appelle aussi bourse généralement tout ce qui sert à renfermer les graines des plantes, lorsqu’elles sont encore sur pied.

Bourse, volva, se dit particulièrement en Botanique d’une espèce de calyce ou enveloppe épaisse qui d’abord renferme certaines plantes de la famille des champignons, suivant Liundus. Elle s’ouvre ensuite pour laisser sortir le corps de la plante.

On appelle aussi bourses, de longues poches de rézeaux, qu’on met à l’entrée d’un terrier, pour prendre les lapins qu’on chasse au furet. Prendre les lapins dans les bourses.

On appelle encore bourses, deux sacs de cuir, qui se mettent des deux côtes au-devant de la selle du cheval. Ac. Fr.

Bouse, se dit aussi d’un petit sac de taffetas noir, où les hommes renferment leurs cheveux par derrière, qui se serre & se ferme par des rubans, comme une bourse, & s’attache par devant avec un ruban. Les bourses sont fort à la mode depuis quelques années. On en met aussi au derrière de certaines perruques. Perruque à bourse.

Bourse, veut dire aussi en termes d’Anatomine, petite vessie. Vesicula. La bourse du fiel.

Bourses, s. f. pl. Enveloppe extérieure des testicules. Scrotum. Les hernies ou descentes se font dans les bourses.

Bourse à Pasteur, ou Tabouret. Ce dernier mot est masculin. Bursa Pastoris. Plante très-commune ; sa racine est un pivot menu, blanc, fibreux, douceâtre d’abord, mais peu de tems après désagréable. Elle jete plusieurs feuilles disposées en rond, couchées sur la terre, oblongues, quelquefois entières, le plus souvent découpées sur les bords plus ou moins profondément comme celles de la dent de lion. La tige qui s’éléve d’entre ces feuilles, est haute plus ou moins : assez souvent elle n’excéde pas la hauteur d’un pied. Elle est branchue, garnie de quelques feuilles beaucoup plus petites que celles du bas. Cette tige & ses branches se terminent par des épis de fleurs blanches, composées chacune de quatre pétales, soûtenues par un calice à quatre petites feuilles verdâtres. Les fruits qui succédent aux fleurs sont des capsules divisées perpendiculairement en deux loges en manière de gousset, & renferment dans chacune de leurs loges quelques semences menues, arrondies & roussâtres. Ce fruit a quelque rapport à la bourse que portent à la campagne les bergers ; & c’est d’où vient le nom de toute la plante. Le tabouret est astringent ; on se sert de son eau distillée dans les potions astringentes pour arrêter des pertes, calmer des hémorrhagies, & guérir des dissenteries. Sa décoction a à-peu-près les mêmes usages, aussi bien que son suc.

BOURSEAU, ou BOURSAUT, s. m. est un enfaîtement de maisons couvertes d’ardoise, qui est de plomb, & qui regne le long du haut du toit. On n’en met plus guère sur les faîtes. Ainsi Bourseau est une moulure ronde sur la panne de brisis d’un comble d’ardoise coupé, qui est recouverte de plomb blanchi.

On appelle bourseau rond, un outil dont les Plombiers se servent pour battre les tables de plomb dont ils font des tuyaux.

BOURSET. s. m. Terme de Marine. Voyez Bourcet.

BOURSETTE. s. f. Petite bourse. Locellus, marsupiolum.

Ce mot n’est pas fort en usage.

Recevez en gré la boursette
Ouvrée de mainte couleur. Marot.

Boursettes. s. f. pl. Corgue. Ce sont de petites parties du sommier fort ingénieusement imaginées, pour pouvoir faire entrer un fil de fer dans la loge, sans que le vent dont elle est remplie, puisse sortir par le trou par où le fil de fer passe. Encyc.

BOURSIER, ière, s. m. & f. Ouvrier qui fait des bourses. Loculorum opifex. On donne aussi le nom à celui qui les vend.

Boursier dans les Colléges, est un écolier qui jouit d’une bourse. Jus nactus statæ attributionis. Les actions qui s’intentent pour les biens d’un Collége, se font au nom du Principale & des Boursiers. Voyez les réglemens pour les Boursiers, & leur réception dans les Mémoires du Clergé, tom. II.

On appelle aussi boursiers, les Notaires & Secrétaires du Roi qui sont à la suite de la grande Chancellerie, & qui ont part à la distribution des bourses ordinaires, qui sont distinguées des gages.

Boursier, se dit quelquefois pour Trésorier. Quæstor. Il y a dans Berne quatre Banderets, qui sont les chefs de la milice de tout le Canton, & deux boursiers, qui sont les Trésoriers généraux, l’un pour le pays Allemand, & l’autre pour le Roman, ou François. Maty. Corn. On trouve dans les états de la Maison des Ducs de Bretagne, un Officier qu’ils appeloient Boursier d’épargne. Voy. les Preuves de l’Hist. de Bret. p. 1111. 1186. 1191. 1196. 1207. Le Boursier & haut Commandeur du pays de Vaux. Gaz. 1723, p. 201.

C’est aussi dans ce sens qu’on le dit en France dans plusieurs Communautés où l’on fait bourse commune, comme les Boursiers des Mesureurs de sel, Mouleurs de bois, &c.

BOURSILLER. v. n. Fournir sa quote part d’une somme nécessaire pour faire quelque chose qu’on a entrepris, & qui coûte plus qu’on ne s’étoit imaginé. Pecunias in commune conferre. On croyoit qu’il ne falloit que tant d’avance pour cette ferme, mais il a fallu encore que chacun boursillât. Les Paroissiens ont boursillé pour achever le bâtiment de leur Eglise. Il est du style familier.

On le dit aussi de la première contribution que l’on fait avec d’autres pour faire quelque chose à frais communs, quand la contribution de chacun n’est pas grosse. Tous les écoliers de ce Collège ont boursillé pour plaider contre leur Principal. Tous les métiers bousillerent entr’eux pour faire chanter le Te Deum à la convalescence de Monseigneur, fils du Roi.

BOURSIN. s. m. Terme de Maçonnerie. C’est une espèce de croûte de terre attachée à la pierre de taille, qui n’est pas encore bien pétrifiée, & qu’il faut retrancher en la taillant, de même que l’aubier à l’égard du bois. Saxi recrementum, pars lapidis mollior. On dit aussi Bousin, qui est même plus usité.

BOURSON, ou BOURSERON. s. m. Petite poche attachée à la ceinture du haut-de-chausse, où on met son argent, ou sa bourse. Locellus.

BOURSOUFLER. v. a. Enfler de vent ou d’humidité. Tumescere. On peint les vents avec des visages qui sont boursouflés, qui ont les joues pleines & enflées. Les hydropiques paroissent gros, parce qu’ils sont boursouflés de mauvaises humeurs.

Boursoufler, se dit proprement de l’enflure qui survient à la peau, par quelque cause qu’elle soit produite.

Boursoufler, se dit aussi en parlant des Bouchers qui enflent les viandes en les soufflant, pour les faire paroître plus belles. Inflare.

Boursouflé, ée, part. ce mot s’employe aussi quelquefois dans le style bas & comique, pour marquer du mépris. C’est un gros boursouflé. C’est une grosse boursouflée. Ce qui se dit d’un homme gros & replet, qui a de grosses joues ; alors il est employé substantivement.

On le dit figurément du style & du discours. Inflatus. Un style enflé & bousrouflé déplaît infiniment aux gens de bon goût. S. Evr. Voyez Enflé, Enflure.

BOUSARD, ou BOUZARD. Terme de Chasse. Bouzard, ce sont fientes du cerf qui sont molles, en forme de bouzées de vache, dont elles ont pris ce nom, & qu’on nomme autrement fumées. Salnove.

BOUSE, ou BOUZE, s. f. Fiente des bœufs & des vaches. Stercus. On s’en sert contre les piqûres de mouches à miel, & pour résoudre les apostèmes.

Le P. Thomassin dérive le mot bouse de l’hébreu bouts, qui veut dire cœnum, lutum, limus, boue, limon ; mais le mot bouts, avant que de s’établir en France sous le nom de bouse, a passé en Saxe, en Angleterre, & dans les Pays-Bas ; & c’est de ces quartiers-là qu’il nous vient immédiatement ; car le même P. Thomassin dit que cœnum, lutum, boue, s’appelle en saxon Wase, en anglois oose, & Woose, en flamand Wase, d’où, sans doute, est venu le mot françois, vase, quand il signifie la boue qui est au fond d’un étang, d’un fosse. M. Huet dit que ce mot vient de βουστασία qui veut dire la même chose selon Eustathius. Fimus, bubulus.

Dans l’Inde on se sert de bouzes de vaches, comme on se sert en plusieurs endroits de tourbes au lieu de bois pour faire du feu. Cette coutume est fort ancienne dans l’Asie. Tite-live, Liv. XLVIII. chap. 18. dit que dans un pays d’Asie appelé Azyla, parce qu’il n’y avoit point de bois, on brûloit des bouzes, ou de la fient de bœuf.

En Anjou on dit, bouse & bouser, pour marquer excrementa hominum, & cacare.

Salnove, dans le Dictionnaire des Chasseurs, qu’il a mis à la fin de sa Vénerie Royale, dit Bouzées de vaches, comme on peut le voir ici au mot Bousard, mais l’usage est de dire bouze.

Bouse, en termes de Blâson, se dit d’une espèce de chanteplure qui sert à puiser l’eau en Angleterre, dont quelques Seigneurs Anglois ont chargé l’écu de leurs armes.

BOUSILLAGE. s. m. Construction faite avec de la terre & de la boue. Constructio lutea. Les cloisons des cabanes des paysans ne sont faites que de bousillage.

On dit figurément de tout ouvrage mal fait, que c’est du bousillage, que ce n’est que du bousillage. ☞ Il n’est pas noble.

Le mot bousillage, & le mot bousiller, bousilleur, selon le Pere Thomassin, ont la même origine que bouse.

BOUSILLER. v. a. Faire un mur, une maison avec de la terre détrempée, ou avec de la boue. Luto construere.

☞ Au figuré, bousiller un ouvrage, c’est le faire mal. Il a bousillé ce conte. C’est un ouvrage qu’on a bousillé. Il n’est que du style familier.

On dit aussi métaphoriquement, bousiller, pour gâter ; mais dans le style burlesque.

Sire Apollon dépité contre moi,
De ce qu’avoir fait écorne à sa gloire
En le quittant pour suivre une autre loi,
M’en joua d’une, & par malice noire
Durant la nuit de l’un à l’autre bout,
Gâta l’ouvrage, & le bousilla tout.

Bousillé, ée. part.

BOUSILLEUR. s. m. Maçon de campagne qui bâtit de terre & de boue. Structor luteus. On le dit figurément des mauvais ouvriers qui gâtent tout en toutes sortes d’ouvrages. Imperitus opifex. Cet ouvrier ne fait rien qui vaille, ce n’est qu’un bousilleur. Tout cela est familier.

BOUSIN. s. m. Terme de Maçonnerie. C’est la même chose que Boursin. Voyez ce mot.

BOUSQUIER. v. n. C’est un terme de Marine, dont on prononce fortement l’s. C’est la même chose que ce qu’on appelle sur terre Butiner, & il se dit de tout ce que le soldat gagne au pillage d’un vaisseau. On appelle même ainsi le plus souvent ce qu’on y vole, qu’on appelle bouliner dans les armées de terre.

BOUSSAC. Petite ville de France, en Berri, vers les frontières du Bourbonnois & de la Marche.

BOUSSOIR. s. m. Terme de Marine & de Charpenterie. Les boussoirs sont deux pièces de bois, dont une partie est posée & attachée au-dessus du château d’avant vers la proue, tant à stribord qu’à basbord, & le reste saillant hors du navire, sert à lever les ancres. Tignum tollendis anchoris aptum. Caron.

BOUSSOLE. s. f. Autrement compas, ou Cadran de mer. C’est une boîte où il y a une aiguille aimantée qui se tourne ordinairement vers les poles, à la réserve de quelque déclinaison qu’elle fait en divers endroits. Pixis nautica. Le cercle de carte que la boussole soutient est divisé d’avbord en 360 degrés, & au-dessous en 3é parties, qui marquent les 32 aires ou traits de vent, qu’on appelle aussi pointes. La boussole qui est en usage à terre a l’aiguille aimantée portée sur le pivot, & la rose des vents est tracée au fond de la boîte. Jean Gira, ou Goya, que quelques-uns nomment Flavio de Melphe, ou Flavio Gioia, Napolitain, l’inventa, dit-on, vers l’an 1302. & de-là vient que la terre de Principato, qui fait partie du Royaume de Naples, dont il étoit originaire, a pris pour ses armes une boussole. Quelques-uns croient que Marc Paul Vénitien, ayant voyagé à la Chine, en rapporta l’invention vers l’an 1260 ; & ce qui confirme cette conjecture, c’est qu’on s’en servoit au commencement de la même façon que font encore les Chinois qui la font flotter sur un petit morceau de liége. Ils disent que leur Empereur Chiningus, qui étoit un grand astrologue, en avoit la connoissance 1120 ans avant Jésus-Christ. Mais Fauchet rapporte des vers de Guyot de Provins qui vivoit en France vers l’an 1200, lequel en fait mention sous le nom de la marinette, ou pierre marinière : ce qui fait voir qu’on la connoissoit en France avant le Vénitien & le Melphitain. La fleur-de-lis que toutes les nations mettent sur la rose au point du nord, montre que les François l’ont inventée, ou l’ont mise dans sa perfection. Un Suédois, qui fit en 1699 une dissertation sur la boussolle, de Pixide Magnetica, seu, ut vocant, Compasso Nautico, imprimée à Upsal, prétend que les anciens Suédois en ont eu quelque connoissance.

L’aiguille de la boussole doit être faite d’une platine fort mince de bon acier en forme de losange, & vidée, ensorte qu’il n’en reste que les extrémités, & un diamétre au milieu, sur lequel la chapelle doit être appuyée. Pour l’animer, il la faut faire toucher par une pierre d’aimant fort généreuse ; & la partie qu’on veut faire tourner au nord, doit être touchée par le pole sud de la pierre : & au contraire, celle qu’on veut faire tourner au sud, doit être touchée du côté de l’aimant, qu’on appelle le nord. Voyez au mot Aimant. On peut faire aussi une boussole sans aimant, par le moyen d’une petite aiguille de fer délicatement posée sur l’eau, ou suspendue en l’air ; car elle se tournera au midi. De même une aiguille de fer délicatement posée sur l’eau, ou suspendue en l’air ; car elle se tournera au midi. de même une aiguille chauffée au feu, & qu’on laisse refroidir sur une ligne du midi, acquiert la vertu de la boussole, & se tourne vers les poles. On fait aussi des cadrans, des graphométres avec des boussoles, ou des aiguilles aimantées. L’aiguille de la boussole a beaucoup de variation vers le cap de Bonne Espérance. Elle nordoueste de 18 degrés à la vûe de Zocotora. Sur le grand Banc sa varitation est de 22 degrés 30 minutes. Il faut remarquer que l’aiguille, laquelle est en équilibre avant qu’elle soit aimantée, perd cette équilibre lorsqu’elle est touchée de l’aimant. Au deçà de la ligne, la pointe qui regarde le pole septentrional est inclinée vers la terre, & le contraire arrive dès qu’on passe la ligne. Mais sous la ligne, l’aiguille demeure en équilibre. Dal. Guillaume Denys, Professeur d’Hydrographie à Dieppe, a fait un Traité exprès de la variation de l’aiguille aimantée, ou boussole. Les Chinois divisent la boussole en vingt-quatre parties seulement, au lieu que nous y en marquins trente-deux. P. Le Comte. Voy. Aimant & déclinaison.

Ce mot vient du latin buxula, parce qu’elle ressemble à un boîte. Ménage. Pasquier dit qu’on l’appelle cadran, à cause qu’elle est mise dans une boîte carrée. On appelle boussole affolée, celle dont l’aiguille est défectueuse, à cause qu’elle a été frottée d’un aimant, qui ne lui a point donné sa véritable direction. La Boussole nous donne la connoissance du nouveau monde, & elle lie les peuples de la terre par le commerce. Nicol.

On appelle boussole de cadran, une boîte avec une aiguille au centre du cadran, pour montrer l’heure & les parties du monde.

Il se dit aussi au figuré, pour Guide, Conducteur. Vous êtes ma boussole.

BOUSTANGI, BOUSTANGI, BACHI. Voyez. BOSTANGI, BOSTANGI-BACHI.

BOUSTARIN. s. m. C’est le nom que l’on donne à un gros homme dans quelques Provinces de France. C’est un gros boustarin. Journ. des Sav. 1717.

☞ BOUSTROPHEDON. s. m. Mot emprunté du grec par les antiquaires, pour exprimer une manière d’écrire, particulière aux grecs, surtout dans les inscriptions. C’est la manière d’écrire alternativement de droite à gauche, & de gauche à droite, sans discontinuer la ligne, à l’imitation des sillons d’un champ que le bœuf forme, de façon qu’à la fin de l’un il passe à l’autre par un demi-cercle. Les plus anciennes inscriptions grecques sont en Boustrophedon. Βοῦς, bœuf, στροφὴ, article, ligne. Voyez Bustrophe.

☞ BOUT. s. m. Extrema pars. La dernière des parties qui constituent un corps étendu en longueur. Le mot de bout représente cette denrière partie comme celle jusqu’où la chose s’étend. Le bout répond à un autre bout. Ainsi on parcourt une chose d’un bout à l’autre. On dit le bout de l’allée. Le mot extrémité répond au centre. L’extrémité du Royaume. Le mot fin répond au commencement. La fin de la vie. M. l’abbé Girard. Syn. Voyez Extrémité & Fin.

Ménage dérive ce mot de bod, qui est un mot celtique, signifiant le fond, l’extrémité. Du Cange tient que bout & bouton sont venus de botones & bototinos : c’est ainsi que les Anciens appeloient ces mottes, & élévations de terre, dont les Arpenteurs se servoient pour marquer les bornes & les extrémités des héritages. Chorier prétend qu’il nous vient de bod, ancien mot allobrogique, c’est-à-dire, celtique. Bondincum, dit-il, signifie ce qui est sans fond, & le mot de bout en est venu ; inc signifioit sans, & bot, bout, ce qui étoit appliqué autant à ce qui n’avoit point de fond, qu’à ce qui n’avoit point de bout.

Bout, signifie aussi la fin, l’extrémité d’une chose. Finis. La chicane a tant de longueurs, qu’on ne voit jamais le bout, la fin d’un procès. Le sermon a été si long, que je n’en croyois jamais voir le bout. Je veux voir jusqu’au bout, si vous aurez la hardiesse de me trahir. Mol. Un esprit pénétrant voit d’abord le bout de toutes choses. S. Evr. Au bout de soixante jours, ils se rendirent. Vaug. Je vous prie de croire que je poursuivrai mon droit jusqu’au bout. Port-R. Cet homme auroit-il un million d’or, il en trouveroit le bout. Je vous prie d’écouter mes raisons jusqu’au bout.

Bout, signifie encore un sens, un côté. Ce Juge n’en interrogeant ce criminel l’a pris par tous les bouts, par tous les côtés, il n’en a pû tirer aucun éclaircissement. Undique.

Bout, se dit aussi d’une petite partie, ou d’un reste de quelque chose, & qui approche de ses extrémités. Particula. J’ai besoin d’un bout de corde, d’un bout de fil. Un bout de chandelle. ☞ On le dit aussi d’une partie, d’une chose qui ne doit pas être divisée. Il n’a pû entendre qu’un bout de messe.

On appelle par dérision, bout d’homme, un petit bout d’homme, un homme extrêmement petit.

On appelle le haut bout, princeps, summus locus ; le bas bout, postremus, imus locus, dans les séances & cérémonies, où les rangs sont distingués, les plus ou les moins honorables. Faire le bas bout à une table, c’est, selon Mézerai, y être assis le dernier. Les ambitieux veulent toujours tenir le haut bout par-tout. L’Evangile apprend aux humbles à prendre toujours le bas bout. Ronsard introduit dans sa Franciade le géant Phovère faisant cette promesse à Kiffe sa cavalle.

Je doublerai pour telle récompense
En tes vieux ans ton soin & ta dépense ;
Seul au haut bout je te ferai loger
De mon étable...

Sarrasin, dans la Préface de son Ode sur la bataille de Lens, a blâmé avec raison Ronsard d’avoir imité en cela les Anciens. Nos mœurs & notre goût ne souffrent plus ces sortes de discours dans des pièces sérieures.

On nomme figurément le bout du monde, un endroit-éloigné. Extrema pars. Il s’est allé loger au bout du monde, à l’autre bout de la ville. Il est au bout du monde ; pour dire, il est allé faire un voyage de long cours en un pays fort éloigné.

☞ On dit aussi, en parlant du plus haut où l’on puisse porter une chose dont on fait une espèce d’estimation, c’est tout le bout du monde si elle peut valoir tant. Ad summum.

En terme de Marine, on dit, Avoir vent de bout ; pour dire, Avoir vent contraire, ou le vent par proue ; adversum ventum experiri, & Aller de bout au vent ; pour dire, Aller contre le vent, Adverso vento navigare. On dit aussi, aborder un vaisseau de bout au corps ; pour dire, lui mettre l’éperon dans le flanc. On dit aussi, filer le cable bout pour bout ; pour dire, le lâcher entièrement, & l’abandonner avec son ancre. On appelle aussi, en termes de Marine, bout de vergue, la partie de la vergue qui excede la longueur de la voile, & qui sert quand on prend les ris. On appelle aussi, Bout de lof, ou Bout-lof, une pièce de bois ronde ou à pans, qu’on met au-devant des vaisseaux de charge qui n’ont point d’éperon. Elle sert à tenir les armures de misaine.

Bout, se joint encore à plusieurs mots où il change de signification.

Bout d’ailes, sont les plumes qui sont au bout des ailes des oiseaux. Penna. On se sert des bouts d’ailes pour écrire. Il y en a même qui les aiment mieux que les autres plumes, parce qu’elles sont plus fermes.

Bout de l’an, est un service qu’on fait faire solennellement pour un défunt au bout de l’année de sa mort. Anniversaria demortui parentalia.

Bout d’argent, Bout d’ivoire, ou d’autre matière, est une garniture qu’on met au bout d’une canne pour s’appuyer, ou d’un bâton de commandement. Caput.

On appelle aussi bout chez les Tireurs d’or, un morceau d’argent doré qu’ils passent par la filière, pour faire des filets d’or & d’argent.

Bout, est aussi un terme de Ceinturier. Il signifie une petite plaque d’argent que l’on met au bout des boucles d’un baudrier, afin de leur donner plus de grace.

On appelle aussi un bâton à deux bouts, un bâton garni de deux fers par les bouts. Utrinque præfixus baculus. C’est une bonne arme défensive & offensive.

Bout de Fleuret, est un bouton de cuir rembourré dont on garnit l’extrémité des fleurets ; afin qu’en escrimant on ne se blesse pas. Globulus.

Bout de la mammelle, du téton. C’est le bouton, le mammelon qui est au milieu de la mammelle, par où sort le lait. Papula. Voy. Téton, Mammelle. On dit qu’un enfant n’a pas encore pris le bout du téton.

On dit aussi, le bout de l’oreille, le bout du nez. On dit encore, toucher quelque chose du bout du doigt. Extremis digitis. Goûter quelque chose du bout des lévres. Primoribus labris.

On dit, rire du bout des dents ; pour dire, s’efforcer de rire quoiqu’on n’en ait nulle envie.

On dit aussi, qu’une garnison est sortie la méche allumée par les deux bouts : ce qui est une des conditions d’une capitulation honorable.

Bout-portant, se dit en termes de Guerre, des coups qu’on tire à brûle pourpoint, qui ne manquent point, comme si le bout de l’arme à feu portoit sur le pourpoint. Admotâ proximè catapultâ.

Bout-touchant. C’est la même chose que bout-portant, qui se dit quand on tire de si près, que le bout de l’arme à feu touche, pour ainsi dire, le but.

Bout-rimés, en termes de Poësie, sont des rimes disposées par ordre, qu’on donne à un Poëte avec un sujet, sur lequel il est obligé de faire des vers en se servant des mêmes mots & dans le même ordre. Extrema Rythmica. L’extravagance d’un Poëte, nommé Du Lot, donna lieu à cette invention, vers l’année 1649. On choisissoit des rimes bizarres, & qui ont le moins de rapport ensemble, & chacun se piquoit de les remplir heureusement. Au jugement des plus fins, ces rimes bizarres sont bien souvent celles qui embarrassent le moins, & qui fournissent le plus de choses nouvelles & surprenantes, pour ce style folâtre & burlesque. Sarrasin a fait un Poëme, qu’il a intitulé : La défaite des bouts-rimés.

Les Lanternistes de Toulouse ont trouvé le secret de relever les bouts-rimés ; car ils en proposent toutes les années pour être remplis à la gloire du Roi ; & le sonnet victorieux est récompensé par une médaille d’argent. P. Mourgues. Il faut observer trois choses dans les bouts-rimés. 1°. Que les rimes soient toutes bizarres. 2°. Qu’il ne soit pas permis de les altérer en leur substituant des termes ordinaires. 3°. Qu’on en déterminé le sujet. Id. Voici un exemple de bouts-rimés qui furent proposés par l’Académie de Toulouse, pour être remplis à la louange du Roi, & que le P. Commire remplit ainsi.

Tout es grand dans le Roi, l’aspect de son… buste
Rend nos fiers ennemis plus froids que des… glaçons.
Et Guillaume n’attend que le temps des… moissons,
Pour se voir succomber sous un bras si… robuste.

Qu’on ne nous vante plus les miracles d’… Auguste.
Louis de bien régner lui feroit des… leçons.
Horace en vain l’égale aux Dieux dans ses… chansons.
Moins que n’est mon Héros, il étoit sage &… juste.

Modeste sans foiblese, & ferme sans… orgueil,
Tandis qu’aux gens de bien il fait un doux… accueil,
Contre l’impiété ses loix servent de… digue.

Et seul de tout l’Etat conduisant les… ressorts,
Par le charmant secret des graces qu’il… prodigue,
Du Prince & des sujets il forme les… accords.

BOUT-RIMEUR. s. m. Celui qui fait des bouts-rimés, qui en fait faire.

De favoris de Mars, de nourrisson des Muses,
De Bout-rimeur charmant plein de graces infuses.

Bout-saigneux, est l’extrémité d’un quartier de veau, ou de mouton, du côté de la gorge, où il demeure toujours du sang de ces animaux quand on les tue. Jugulum.

On dit aussi, bout-saigneux de bœuf. Le bout-saigneux de bœuf mis au pot fait un très-bon potage. Le bout-saigneux de bœuf se mange aussi en haricot avec des navets, & se fait en le coupant par morceaux, & le faisant cuire avec de l’eau, du sel, du poivre, des oignons, & des clous de girofle, puis l’ôtant de ce bouillon, on le passe au roux avec du lard, après quoi on le met égouter ; puis on le sert avec un coulis de navets.

On appelle, en termes de Couvreurs, un remanié à bout, la recherche d’un toit, d’une couverture, pour y mettre les tuiles ou les lattes aux endroits où il en manque. Voy. Remanier.

Bout-dehors, Voy. Boute-hors.

Bout-rabattu. s. m. Terme de Charpenterie. C’est un bout de Charpente que l’on met au bout d’un pignon. Au lieu de prolonger & pousser le pignon jusqu’à la hauteur du faîte, on le laisse à la hauteur des murs du bâtiment, & le faîte, au lieu de venir jusqu’au niveau du pignon ordinaire, est rabattu en croupe, & forme ce qu’on appelle vulgairement bout-rabattu. Tous les pavillons sont en bout-rabattu.

☞ On dit adverbialement, à tout bout de champ, à chaque bout de champ, pour dire, à tout propos, à chaque instant. Il m’interrompt à tout bout de champ. Bon pour le style familier.

☞ Mettre des choses bout à bout, c’est en joindre les extrémités. On coud deux morceaux de toile bout à bout.

☞ En botanique, on dit que deux pièces sont assemblées bout à bout, lorsqu’elles se tiennent seulement par leur extrémité. On les dit articulées, quand il y a un peu de mouvement dans leur jonction.

☞ On le dit encore en parlant de l’assemblage de certaines choses qui ne sont presque rien quand on les prend séparément, mais qui prises ensemble font un objet considérable. Si l’on mettoit bout à bout le chemin qu’il fait tous les jours dans son jardin, on trouveroit au bout de l’année qu’il a fait bien des lieues.

☞ De bout en bout, d’un bout à l’autre, d’une extrémité à l’autre. Parcourir la ville d’un bout à l’autre.

☞ Au bout du compte, après tout, tout considéré. Je vous avois promis de faire telle chose ; mais au bout du compte je n’en ferai rien. Perpensis omnibus. Expression familière.

☞ A bout, locution adverbiale, il a différentes significations, suivant les différens mots qui l’accompagnent.

☞ Venir à bout d’un projet, c’est arriver au but qu’on s’étoit proposé, réussir. Perficere, assequi propositum.

☞ Venir à bout d’une chose, signifie encore parvenir à la faire, en trouver la fin ; il est venu à bout de l’éprouver après bien des difficultés.

☞ Je n’ai pu venir à bout de lire ce livre. Il est venu à bout de son argent, il n’en a plus.

☞ Venir à bout de quelqu’un, le réduire à la raison, à faire ce qu’on veut, ce qu’on en exige.

☞ Etre à bout, ne savoir plus que devenir. Mettre à bout la patience de quelqu’un, c’est l’obliger à se mettre en colère, à force d’abuser de sa patience ; pousser quelqu’un à bout, c’est le réduire à ne savoir plus que faire ni que dire. Ad incitas redigere.

☞ Voltaire remarque que cette expression, me pousse trop à bout, dont s’est servi Corneille dans Nicomede, est comique, du moins familière. Racine s’en est pourtant servi dans Bajazet… Poussons à bout l’ingrat. Mais le mot ingrat qui finit la phrase, la relève. Ce sont de petites nuances qui distinguent souvent le bon du mauvais.

☞ On dit, en terme de manège, qu’un cheval est à bout, quand il est outré par le travail.

Bout, se dit proverbialement en ces phrases. Au bout de l’aune faut le drap ; pour dire, il faut prendre d’une chose tout ce qu’on en peut tirer. On dit qu’un homme s’est mis sur le bon bout ; pour dire, qu’il est bien vêtu, bien équipé. On dit aussi, le bout de la rue fait le coin. On dit qu’un homme est au bout de son rollet, quand il ne sait plus que dire, ni que faire. On dit en ce sens, au bout de ses ruses, de ses finesses. On dit qu’un homme manque à chaque bout de champ ; pour dire à toute heure. On dit aussi, quand un homme hésite, ou demeure en parlant, apportez un bout de chandelle pour trouver ce qu’il veut dire. On dit aussi en ce sens, qu’il a une chose sur le bout de la langue, lorsqu’il la fait bien ; mais qu’il ne peut s’en souvenir à point nommé. On dit au contraire, qu’un écolier sait sa leçon sur le bout du doigt, quand il la sait fort bien pour la dire par cœur. On dit qu’une chose est demeurée au bout de la plume ; pour dire, qu’on a oublié de l’écrire. On dit, tenir le bon bout de son côté, pour dire, conserver toujours l’avantage de la possession de quelque chose ; & qu’un autre ne l’aura que par le bon bout ; pour dire, après avoir bien plaidé & contesté. On dit qu’un homme brûle sa chandelle par les deux bouts, lorsqu’il est mauvais ménager, qu’il fait des dépenses de plusieurs natures, qu’il joue de son côté, & sa femme de l’autre. On dit encore, qu’il faut finir par un bout ; pour dire, qu’il faut mourir d’une façon ou d’une autre. Il faut écouter jusqu’au bout, & puis dire, Amen ; pour dire, qu’il ne faut pas interrompre mal-à-propos, ni répondre à une personne, qu’on n’ait su tout ce qu’elle veut dire. On dit aussi d’une chose qui est proche, soit à l’égard du temps, ou du lieu, qu’on y touche du bout du doigt. Ainsi on dit à la Septuagésime, que le Carême est proche, qu’on y touche du bout du doigt. On dit aussi, c’est tout le bout du monde ; pour dire, le plus haut point où on puisse parvenir. Si vous trouvez dix mille écus de votre maison, c’est tout le bout du monde. On dit aussi, du profit ou revenant bon de quelque affaire ; il y a cent écus à gagner, & haie au bout. Au bout le bout ; pour dire, qu’il faut toujours se servir de ce qu’on a. Il n’importe quel bout en aille devant, d’un homme au désespoir qui n’a plus rien à ménager.

☞ BOUTA. Petite ville de la Prusse Royale, en Pologne, au territoir de Mirchaw, environ à six lieues de Dantzig.

☞ BOUTADE. s. f. Caprice, saillie d’esprit & d’humeur ; changement subit provenant d’une révolution d’humeur ou de façon de penser. On le dit presque toujours en mauvaise part. Præceps animi impetus. Avoir des boutades. Il lui prit une boutade. Cet homme est dangereux dans ses boutades. La plûpart des bons ouvriers ne travaillent que par caprice & par boutade. Toute sa fidélité se réduit à quelque boutade de tendresse, & à deux ou trois accès de désespoir. Dieu ne voulut pas que sa conversation se fît légèrement & par boutade. Bouhours. Ce mot signifioit autrefois, effort, impulsion, ou, selon le vieux style, une boutée, l’un & l’autre viennent de bouter : qui vouloit dire pousser.

☞ On donnoit aussi autrefois le non de boutade à de petits ballets qu’on paroissoit exécuter à l’impromptu. La boutade étoit le grand ballet en raccourci.

Boutade. Terme de Coutume. Droit que quelques Seigneurs ont en Berry, de prendre cinq pintes de vin de la mesure des lieux où ce droit est établi, ou la somme pour chacune pinte, pour chaque tonneau ou poinçon devin, que les habitans de ces lieux vendent en gros ou en détail, ou qu’ils achetent pour le revendre. Galland.

BOUTADEUX, s. m. BOUTADEUSE, s. f. Celui, ou celle qui n’agit que par boutade. Ingenio præceps. Il est vieux, & ne se peut dire qu’en mauvaise part. Il est absolument hors d’usage.

☞ BOUTAN. s. f. Etoffe qui se fait à Montpellier. L’on fait de fort belles futaines & boutanes blanches à Montpellier, dont les filles & les femmes vont quasi toute vêtues, principalement en été. Catel. Hist. de Lang. p. 47.

BOUTANT. adj. Terme d’Architecture, ☞ qui se joint toujours avec un autre mot comme, arc-boutant, pilier boutant ; & se dit par corruption pour butant. Un arc-boutant, c’est une arcade qui appuie une voûte élevée, & qui est elle-même appuyée sur une fort muraille de maçonnerie. Anteris. Erisma. Pilier boutant, est une grosse chaîne de pierre, qui est faite pour appuyer une muraille, une terrasse, une voûte. On fait aussi des arc-boutans avec des pièces de bois qui poussent, & qui arc-boutent.

On appelle aussi arc-boutant d’un carrosse, le morceau de fer qui soutient les moutons tant en dedans qu’en dehors.

On le dit aussi au figuré de ceux qui soutiennent, qui protègent une affaire, un parti. Propugnacula, præsidia, columina. Ce Ministre est un des principaux arc-boutans de l’Etat.

☞ BOUT-A-PORT, ou BOUTE-A-PORT, Officier sur les ports, chargé de faire mettre à port les vaisseaux qui arrivent & de les ranger. Voyez Débacleur.

BOUTARGUE. s. f. Mets qu’on prépare pour exciter à boire. Ce sont des œufs de poisson salé. Salsamenta piscium. Les Provençaux appellent boutargues, des œufs de muge, ou de mulet, confits avec de l’huile & du vinaigre, ou des œufs de poisson salé & séché, dont on fait une espèce de saucisse. Il s’en fait beaucoup à Tunis en Barbarie, & à Mortegue en Provence, où ce mets est fort en usage, ainsi qu’en Italie. De-là nous cheminâmes sur le bord du Méandre une demi-lieue jusqu’à son embouchure, où nous nous arrêtâmes à voir une cabane de ces pêcheurs qui prennent les poissons, dont les œufs servent à faire la boutargue, qui est une espèce de cervelas d’un goût fort bizarre, & néanmoins que quelques-uns trouvent fort délicieux. Du Loir, pag. 32.

Ménage dérive ce mot du grec ᾠὰ τάριχα.

☞ BOUT-AVANT. s. m. Officier de Saline, dont la fonction est de veiller à ce que l’emplissage du vaxel se fasse selon l’usage. Voyez Vaxel.

BOUTE. s. f. Terme de Marine. C’est la moitié d’un tonneau en manière de baquet. Cupa minor, cupula. Il sert à mettre la boisson qui est destinée chaque jour à l’équipage. On l’appelle aussi baille.

Boutes, sont aussi de grandes futailles où l’on met l’eau douce que l’on embarque pour faire voyage. Dolia.

☞ On donne aussi le nom de boutes aux tonneaux dans lequels on enferme en Guyenne les feuilles de tabac après qu’elles ont sué, & aux barriques dans lesquelles on met le caviac, ou œufs d’esturgeon & de mouronne qui viennent de la Mer noire.

BOUTÉ, ÉE. adj. Terme de Manège, qui se dit d’un cheval qui a les jambes droites depuis le genou jusqu’à la couronne ; ce qui arrive souvent aux chevaux-court-jointés.

BOUTEAUX, ou BOUT DE QUEVRE. Terme de Marine. C’est un petit filet attaché à un bâton fourchu, que les Pêcheurs poussent devant eux sur les sables. On s’en sert sur les côtes de l’Océan, pour prendre une espèce d’écrevisse, appelée cevette, ou salicot.

☞ BOUTE-DEHORS. Voyez Boute-hors.

BOUTÉE. s. f. Terme d’Architecture, qui se dit des ouvrages qu’on fait pour soutenir la poussée d’une voûte, d’une terrasse. Anteris. Il faut de fortes boutées pour résister à la poussée des voûtes des grandes Eglises.

BOUTE-EN-TRAIN. s. m. Qui pousse, qui excite, qui donne l’exemple. Dux, exemplum, incitator. On appelle aussi un petit oiseau qui sert à faire chantes les autres, & qu’on nomme autrement tarin.

☞ En termes de haras, c’est un cheval entier dont on se sert pour mettre les jumens en chaleur. Un boute-en-train se dit figurément d’un homme qui animes les autres, soit au plaisir, soit au travail. Ce mot en françois, lorsqu’on en use en riant, se doit écrire boute-en-train, & non pas bout-en-train, Gloss. Bourg. au mot Bôtré. Pour se divertir il faut un boute-en-train, qui lie la partie, qui excite & qui entraine les autres.

Chaque ville a son Boute-en-train,
Qui veut rire quoi qu’il en coûte ;
Nous l’avons vû par le chemin
Dans les villes de notre route ;
Boute-en-train de Château-Thierry,
C’est la Dame de Vassigny.

M. de la Monnoye, & l’Auteur du Dictionnaire Comique, en étendent la signification à tout ce qui peut exciter à l’amour, comme une belle gorce, &c.

BOUTE-FEU. s. m. Officier d’Artillerie qui met le feu au canon & aux mortiers. Qui ignem tormento subjicit. On appelle aussi du même nom la hampe, ou le bâton garni d’un serpentin, dans lequel on passe la méche, & avec lequel on y met le feu.

Boute-feu, est aussi un incendiaire, qui par malice, ou par vengeance, met le feu à quelque maison. Incendiarius. Il commanda de tuer tous les boute-feux. Ablanc.

Boute-feu, se dit figurément de ceux qui suscitent des séditions, des guerres civiles, qui mettent des dissensions entre les Princes, ou les particuliers, & qui donnent occasion aux guerres & aux procès. Seditionis auctor, fax.

☞ BOUTE-HORS, ou BOUTE-DEHORS. s. m. Espèce de Jeu qui n’est plus en usage : mais au figuré, on dit que deux hommes qui tâchent de se débusquer l’un l’autre de quelqu’emploi, de quelque charge, de se détruire, jouent au boute-hors.

BOUTE-HORS, se dit aussi de la facilité d’exprimer ses pensées, de faire connoître son mérite & son savoir dans les compagnies. Expedita & profluens in dicendo celeritas. Il y a bien des Savans qu’on n’estime pas, parce qu’ils n’ont point de boute-hors. Ce mot en ce sens est trivial.

Boute-hors, ou Boute-dehors. s. m. Terme de Marine. Ce sont des pièces de bois ou petites vergues qu’on ajoute par des anneaux de fer aux grandes vergues, pour porter des bonnettes ou coutelas lorsqu’on veut faire diligence. On appelle aussi boute-hors, ou défenses, de longues pièces de bois qu’on met en saillie en dehors du vaisseau, pour empêcher l’abordage d’un brûlot, ou que les vaisseaux ne s’endommagent en se heurtant les uns contre les autres. Boute-hors se dit encore d’un petit mât qui sert à la machine à mâter, pour mettre les chouquets & les hunes en leur place.

Boute-de-lof, ou Boute-lof. s. m. C’est une piéce de bois rondre à huit pans, qu’on met au-devant des vaisseaux de charge qui n’ont point d’éperon. Elle sert à tendre les armures de misaines.

BOUTERAME. s. f. On appelle ainsi en Flandres une tranche de pain, sur laquelle on étend du beurre, des pommes cuites, du fromage, & de la viande. Mén.

BOUTE-SELLE. s. m. Terme de guerre, signal qu’on donne aux cavaliers pour les avertir de monter à cheval. Signum buccinæ equitibus datum ut equos inscendant. On dit aussi, la levée du boute-selle, qui est le second signal.

☞ BOUTE-TOUT-CUIRE. s. m. Terme populaire qui se dit d’un dissipateur, qui s’accommode de tout, mange tout. C’est un franc boute-tout-cuire. Helluo. Barathrum.

BOUTEILLAGE. s. m. Ancien droit que les Bretons payoient à leurs Seigneurs sur le vin, & sur tous les autres breuvages. Vectigal vinarium. Le droit de bouteillage étoit un des plus considérables. Les Seigneurs levoient de grands droits sur la vente du vin & de tous les autres breuvages, comme la cervoise, le medon ou hydromel, le piment & le cidre. Lobineau. Outre les vins étrangers, la Province avoit les siens : il y avoit des vignes en plusieurs lieux plus propres à fournir du bois, du gland, & du charbon, que du vin ; cependant les Seigneurs de ces lieux n’étoient pas ceux qui fissent le moins valoir leur droit de bouteillage. Id. Les anciens titres appellent ce droit en latin Potagium, Buticulatio, Boutelagium, & Botelagium. Les plus anciens de ces titres sont du XIIe siècle. Le P. Lobineau, Hist. de Bret. T. II. p. 133, remarque que le bouteillage de Dole étoit de douze sous par barrique de vin.

☞ Le Bouteillage est aujourd’hui un droit sur la vente des vins étrangers, que le Bouteiller du Roi d’Angleterre prend, en vertu de sa charge, sur chaque vaisseau. Cette dernière manière de parler vient du bouchon de la bouteille qui est comme sa coëffe, qu’il faut ôter pour boire la liqueur.

Ce mot vient de buticula, diminutif de butta, d’où les Italiens ont fait botte, & qui signifie la même chose. Ménage. Les Bollandistes, Mart. T. I. p. 191, le tirent du latin buto ou buttonus, qui se trouve dans Anastase le Bibliothécaire. April. T. II. p. 828. Dans le procès des miracles du B. Simon, Religieux Augustin de Todi en Otalie, on trouve bottaglia au même sens. Le P. Papebrok, sur les Loix Palatines de Jacques II. Roi de Majorque, Acta SS. Junii, T. III. P. XVI. E. dit que l’on a dit botella, ou buticula, diminitif de boto, qui signifie vase, coupe ; que les Allemans en ont fait pot, auquel ils donnent néanmoins une signification plus étendue, le prenant pour olla, marmite, vase où l’on fait cuire la viande. Nous en usons de même, comme on le verra au mot Pot. On trouve encore buttis, Acta SS. Jun. T. III. p. 457. B.

On dit aussi en grec moderne βοῦττις, & βούττιον, βούτζιον & βούτης, dans le Mathématicien Héron, qui dit que βούτης est un vase qui a par en haut 6 pieds de diamètre, & huit par en bas. On dit que les Provençaux disent aussi boute, & les Italiens botte, comme l’a remarqué le P. Poussine dans ses Observ. sur Pachym. L. I. au mot βούτζην, que Pachymère, selon lui, a fait de ce mot Italien, qui approche de Butzi dans sa prononciation. Pachymère prend βούτζην pour une barrique, à ce qu’il paroît très-vraisemblablement au même Pere Poussine.

BOUTEILLE, se dit par extensio du vin qui est contenu dans la bouteille. Bacchus est appelé le Dieu de la bouteille. On a bu à ce repas trente bouteilles. Boire bouteille, ou vider bouteille, boire bouteille ensemble, expression populaire, mais fort en usage.

Bouteille, se dit aussi de ces espèces d’ampoules, ou balles remplies d’air qui se forment sur la surface d’un fluide, par l’addition d’un fluide semblable, comme quand il pleut ; ou dans sa substance, par une commotion de ses parties, comme quand le pot bout. Il se forme de ces bouteilles quand on savonne. Les enfans en font quand il soufflent de l’eau de savon, qui quelque liqueur onctueuse par un chalumeau. Il s’en forme sur la surface d’une liqueur sous le récipient de la machine pneumatique, quand on pompe l’air, semblables à celles qui sont produites par la pluie. Dans tous ces cas, ces bouteilles ou balles sont formées par l’air qui se dégage d’entre les particules du fluide où il étoit comprimé, & en se dilatant, étend les particules du fluide. Elles sont rondes, parce que l’air, en se dégageant, agit également en-dedans d’elles en tout sens, & comme elles ne font que très-peu de résistance, elles crevent bientôt, pour peu que l’air se dilate.

Bouteille, en termes de Marine, se dit des saillies qui sont au côté du vaisseau au lieu de galeries, qui sont défendues par la nouvelle Ordonnance. Elles ont deux pieds & demi au plus de large : elles sont conduites depuis les sabords de sainte Barbe jusqu’au couronnement, & sont ouvertes en-dedans dans des chambres. Ce coup de vent ne nous fit autre mal que d’enfoncer notre bouteille de bas bord. Frez. p. 6.

On dit proverbialement, quand un homme ivre a fait quelque crime ; qu’on pardonne au vin, mais que l’on pend la bouteille. On dit aussi, quand il a quelque bouton ou rougeur au visage, que c’est un coup de bouteille. On dit aussi d’un niais, d’un ignorant, qu’il n’a jamais rien vu que par le trou d’une bouteille. On dit aussi, quand on mange un morceau après avoir bu, que c’est pour boucher la bouteille. On dit proverbialement, être dans la bouteille, pour dire, être dans le secret d’une affaire.

BOUTEILLER. Voyez Boutillier.

☞ BOUTEILLETTE. s. f. Diminutif de bouteille. Buttula. Il est vieux. Il signifioit aussi de petite tumeur. Ch. Est. Dict.

☞ BOUTER. v. a. Synonyme avec mettre. Il est vieux, & n’est plus en usage que parmi les Paysans. Boutez cela là, mettez, boutez-vous là.

Dans le discours ordinaire il est d’usage dans quelques mots composés, comme on l’a vu ci-dessus en Boute-en-train, Boute-feu, Boute-hors, Boute-selle. Ablancour s’est servi de boute, boute, pour dire, fais, fais. Comme si on disoit en latin, age, age.

☞ En terme de Marine, bouter signifie mettre & pousser. bouter le cable au cabestan, bouter de lof, pour dire, aller à la bouline. Voyez Bouline. On dit aussi Bouter à l’eau, quand on fait sortir un bateau du port, ☞ quand on met le canot à la mer ; & bouter au large, le pousser au large.

En terme de Vénerie, on dit, bouter la bête ; pour dire, la lancer.

Bouter le cuir, terme de Corroyeur. C’est enlever avec le boutoir (Voyez Boutoir) la chair qui est demeurée attachée à la peau de l’animal au sortir de la tannerie.

Du Cange dérive ce mot de butare, qui s’est dit dans la basse latinité. Seroit-ce de-là que s’est fait dans le grec moderne βουτίζειν, plonger, mettre dans l’eau, & βουτίζης, nom d’un Officier de l’Eglise grecque, dont l’office étoit dans la cérémonie du baptême de plonger, ou de mettre dans l’eau le baptisé. Ces morts ont bien tourmenté le P. Goar. Ne sont-ce pas plutôt des corruptions de βαπτίζω, & βαπτίζης, βαπτίζω, βαϐτίζω, βαυτίζω ; & bouter viendroit-il de-là ?

BOUTERILE. s. m. Vieux mot. Nombril.

BOUTEROLLE. s. f. C’est la garniture qu’on met au bout du fourreau d’une épée, pour empêcher qu’elle ne perce. Extemiæ acinacis vagin’ munimentum. Une bouterolle de fer, d’agent.

Ce mot vient de bouts à réoles, emprunté des Espagnols, qui nomment ainsi les bouts des fourreaux & des gardes d’épée arrondis. C’est une pièce quelquefois dans les Armoiries.

Bouterolle, est aussi une fente de clef par où passe le rouet, ou les gardes d’une ferrure.

Bouterolle, est aussi un outil ou poinçon rond, qui sert à graver sur les pierres dures.

☞ BOUTEROUE, terme de rivière. On appelle ainsi les bornes qui empêchent que les essieux des voitures n’endommagent les garde-fous des ponts.

BOUTEUX. s. m. Petit filet attaché à un bâton fourchu, dont on se sert sur les côtes de l’Océan, & que les Pêcheurs poussent devant eux sur les sables, pour prendre une espèce d’écrevisse appelée crevette ou salicot. On l’appelle autrement Bout de quévre.

☞ BOUTICLAR. s. m. Terme de rivière. Voyez Boutique à poisson.

☞ BOUTIERES. (les). Petit pays de France, dans le Vivarais, vers Privas, couvert de montagnes stériles.

BOUTILLIER, ou BOUTEILLER, s. m. Grand Echanson chez le Roi. Supremus vini dispensandi minister, anciennement buticularius. Le Grand Boutillier. Ce mot ne se dit que dans cette phrase. M. le Gendre & d’autres encore écrivent Bouteiller. Le Bouteiller étoit chargé de tout ce qui regarde la bouche. Le Gendre.

Bouteiller, vient de Buticularius, formé, selon les Bollandistes, Mart. T. I. p. 191 E. de buto, ou buttonus, qui se trouve dans Anastase le Bibliothécaire, pour signifier un vase, une bouteille ; & d’où l’on a formé butica, & buticula, aussi-bien que Butellarius, &, Buticularius, dont Hincmar & d’autres se sont servis. Dans un acte du XIIe siècle, où est le cachet du Bouteiller du Roi Louis VII, il y a Signum Guidonis Buticularii. Voyez Act. SS. Maii, T. VI. p. 822. C. Voyez aussi les loix Palatines de Jacques II, Roi de Majorque, au titre de Botellario majori, à la tête du troisième Tome des Acta SS. Junii. Les Flamands disent Butelier, & les Bollandistes prérendent que le nom de Bultelgio, qui se trouve dans la vie de Charles le Bon, Comte de Flandres, est la même chose que Buticularius.

Le Bouteiller étoit un des cinq grands Officiers de France qui signoit dans toutes les Patentes des Rois, ou du moins étoit présent à leur expédition. Il avoit séance entre les Princes, & disputoit le pas au Connétable. Du Tillet, Recueil des Rois de France, p. 397, cite un Arrêt daté de 1224 qui donne au Bouteiller assistance & opinion en la Cour des Pairs de France, pour jugement des Pairs. Le grand bouteiller prétendoit avoir le droit de présider à la Chambre des Comptes. On trouve en effet sur les Registres de cette Chambre de l’an 1397. que Jean de Bourbon, Grand Bouteiller de France, y fut reçû comme premier Président. Depuis, cette charge fut annexée par Edit du Roi à celle de Grand Bouteiller. Mais ce droit s’éteignit, soit par la négligence du Grand Bouteiller, soit par l’autorité du Roi. Du Tillet cité, p. 408, fait mention d’une Ordonnance, que le Bouteiller de France soit (à cause de son Office) l’un des deux Présidents en la Chambre des Comptes ; mais il ne dit pas Président. Le titre de grand Bouteiller s’est aboli aussi, & l’on y a substitué la charge de Grand Echanson ; mais ils ont été contemporans, & l’on voit quantité d’actes avant S. Louis où le grand Echanson & le grand bouteiller sont tous deux nommés, & quelquefois signés, mais depuis, les fonctions de ces deux emplois ont été réunies. Voyez Fauchet & Favyn.

BOUTIQUE. s. f. Lieu où les Marchands exposent leurs marchandises en vente, qui est ouvert sur la rue, & au rez de chaussée ; & où les artisans travaillent. Taberna, officina. On dit, lever, ouvrir boutique. Tabernam instructam mercibus aperire. Tenir boutique, garder, conduire la boutique. Se mettre en boutique. Garçon de boutique. Fille de boutique. Ce Marchand a ouvert sa boutique. La Police fait fermer les boutiques les Dimanches & Fêtes, & pendant les réjouissances publiques, ou quand il y a une maladie contagieuse. Il y a aussi des boutiques dans les Foires, dans la galerie du Palais, &c.

On appeloit autrefois boutiques, les études des Notaires ; & on les appelle encore ainsi en plusieurs lieux de Province.

Henri Etienne, de Latinit. susp. p. 317. a remarqué que ce mot vient originairement du grec ἀποθήκη, Apotheca, dont même Cicéron s’est servi en latin ; que dans les commancemens on a dit pothèque & ensuite bothèque, puis bouthèque, & enfin boutique. Les Italiens disent bottega, & les Espagnols botica : butica se trouve souvent pour signifier cista, une boîte ; peut-être que d’abord il ne se disoit que des boîtes ou balles de ces petits Merciers qui vont par la campagne, & qu’ensuite on l’a étendu aux lieux où les gros Marchands mettent & étalent leurs marchandises. Les Bollandistes, Mart. T. III. p. 847. tirent butica de butis, qui s’est dit pour un vase à mettre des choses liquides, comme du vin, une bouteille.

On appelle aussi boutiques, certains étaux portatifs, à l’abri desquels se mettent quelques artisans, ou petite Merciers, comme les Savetiers, les Ravandeurs, les Vendeurs de pain d’épice, de poupées, &c.

On appelle encore boutiques, des boîtes ou layettes que quelques petits Merciers ambulans portent au cou ou sur le dos. Capsa.

On appelle aussi boutiques, les bateaux où l’on met & où l’on nourrit du poisson, en attendant qu’on en ait le débit. Ces bateaux sont tous percés au-dessous du niveau de la rivière, & ne sont élevés sur l’eau qu’à cause du vide qui est à l’avant & à l’arrière.

Boutique, se dit aussi du fonds du Marchand. Il a vendu, il a laissé sa boutique à son associé ; pour dire, son fonds & ses marchandises, ou les outils de son métier, s’il est artisan, & les instrumens ou vaisseaux propres pour ses manufactures.

M. Bossuet, dans son histoire des Variations, L. XI. p. 182. a pris ce mot métaphoriquement, comme font les Latins, pour l’auteur, l’origine d’une chose. On peut voir par-là, dit-il, de quelle boutique est sortie la méthode de soutenir la perpétuité de l’Eglise par une suite cachée, &c. Boutique en ce sens n’est pas du bel usage.

En style populaire, ce mot signifie encore une maison où les Domestiques sont mal, pour le payement, la nourriture, ou le travail. Tu ne resteras guère dans cette maison, c’est une boutique. Pierrot dit dans la Fille savante : j’ai demeuré trois ans dans une de ces boutiques.

On dit proverbialement : aidue la boutique, de quelque chose qui tombe, qui se renverse, qu’on entraîne. On dit, qu’un homme fait de son corps une boutique d’Apothicaire, quand il prend souvent, ou par précaution, des lavemens & des médecines. On dit, il fait de sa tête une boutique de grec & de latin ; pour dire, qu’ils s’adonne entièrement à l’étude de ces deux langues. On dit aussi, d’une calomnie, d’une imposture, qu’elle vient de la boutique d’un tel Satyrique, ou scélérat, de la boutique de Sathan. On appelle aussi un Courtaut de boutique, un artisan qui est compagnon & occupé à un travail sédentaire. Cela ne se dit que quand on veut marquer du mépris.

Garde-boutique, est une marchandise de mauvais debit, qui n’est plus de mode, que le Marchand garde depuis long-temps. ☞ On le dit dans le même sens des ouvrages d’esprit qui n’ont point de debit.

Arrière-boutique, est un magasin qui est sur le derrière de la maison, où se mettent les marchandises qu’on veut conserver. Interior officina, taberna.

On dit figurément d’une ruse, d’une chicane qu’on garde pour la fin d’une affaire, d’un procès, que cela vient de l’arrière-boutique.

BOUTIQUIER. s. m. On appelle ainsi un petit Marchand qui vend en boutique. Si ce mot se dit, il n’est certainement pas de l’usage ordinaire.

BOUTIS. s. m. Terme de Chasse. Endroit où les bêtes noires ont fouillé avec leur boutoir ; lieux où les sangliers font des creux pour chercher des racines. Impressum solo aprugni rostri vestigium.

BOUTISSE. s. f. Terme de Maçonnerie. C’est un nom qu’on donne à des pierres quand elles sont mises en œuvre, ensorte que leur plus grande longueur traverse & entre dans le mur, & que le parement n’en soit que la largeur. La boutisse diffère du carreau en ce qu’elle présente moins de parement, & qu’elle a plus de queue. Pour bien bâtir, il faut mettre des pierres en parrement, & d’autres en boutisse alternativement.

BOUTOI. Terme de chasse. Voyez Boutoir qui est plus usité.

BOUTOIR. s. m. Outil de Maréchal, tranchant d’acier qui sert à parer le pied d’un cheval, & à en couper la corne superflue. Il est large de quatre doigts, & recourbé vers le manche.

Boutoir. s. m. Terme de chasse. C’est ainsi qu’on appelle le groin du sanglier. Apri ou aprugnum rostrum. Le sanglier lui donna un coup de boutoir. Salnove dans sa Vénerie Royale écrit boutoi. L’autre est plus usité. On s’en sert aussi dans le Blason.

Boutoir. Terme de Corroyeur. Instrument avec lequel les Corroyeurs boutent les peaux de veaux qu’ils veulent corroyer. Le boutoir est une espèce de couteau emmanché des deux bouts. Voyez Bouter. Il y a deux sortes de boutoirs, l’un dont le tranchant est émoussé, & s’appelle, à cause de cela, couteau sourd ; & l’autre dont le tranchant est fort affilé. Voyez Corroyer.

BOUTON. s. m. Petite boule, ou attache ronde, qui sert à joindre les deux côtés d’un habit, ou de quelqu’autre chose qu’on veut attacher ou détacher selon les besoins. Globulus. Les boutons d’un pourpoint, des manches, des botines, qui se ferment à boutons. Les boutons des pentes d’un lit sont en forme d’olive. En vieux françois on l’appeloit fermail. Du Cange. On s’en sert quelquefois pour orner & passementer les habits. Des boutons de diamans. Des boutons d’Orfévrerie. Des boutons d’étain, de laiton, de jai. Des boutons d’or, d’argent, de fil de soie, de crin. Des boutons à queue. On trouve dans la mauvaise latinité du XIIe ou XIIIe siécle, bottones pour la même chose, & manicæ aliqualiter botonatæ ; mais je ne trouve nulle part l’origine de ce mot.

Bouton, en terme d’escrime, signifie le bout du fleuret, qui forme une espèce de bouton couvert de cuir, pour ne point faire de contusion quand on s’exerce. Globulus ferreus rudis corio tectus.

En termes de Fauconnerie, on dit, qu’un oiseau branche & prend le bouton, pour dire, la cime des arbres.

On appelle, en termes de Manège, le bouton, la boucle du cuir qui coule le long des rênes, & qui les resserre. Ductilis habenarum nodus. Et on appelle, mettre un cheval sous le Bouton, lorsque le Cavalier en descendant abbaisse ce bouton sur le cou, jusqu’à ce que la bride ramene la tête du cheval en bon état.

On dit figurément en ce sens, serrer le bouton à quelqu’un, quand on le tient en bride, & quand on le presse fortement de faire quelque chose.

Bouton, signifie aussi un bouquet de feuilles, ou une fleur qui n’est pas encore épanouie. Ainsi l’on dit un bouton à feuilles, & un bouton à fleurs. Ces boutons sont comme autant de petite œufs, d’où sortent les feuilles seules, ou les fleurs entremêlées le plus souvent de quelques feuilles. Les boutons des feuilles sont plus pointus & plus minces que les boutons à fleurs, qui sont plus gros & plus arrondis. Parmi les arbres à pepin, chaque bouton a plusieurs fleurs, & parmi les arbres à noyau, chaque bouton n’en a qu’une. Il y a des Jardiniers qui appellent ces boutons, des bourres, ou des bourses à fruit. Le bouton s’appelle autrement œil, ou bourse. Oculus, gemma. Maître bouton, c’est celui qui fleurit le premier, & qui est au plus haut du dard.

☞ Dans le cours de l’été il se forme peu-à-peu dans l’aisselle des feuilles ou dans l’angle que forment les queues des feuilles avec les branches, de petits corps ordinairement conoïdes : c’est ce qu’on nomme les boutons. On les apperçoit en hiver sur les jeunes branches, quelquefois sur les grosses, mais rarement sur le tronc. Les boutons se montrent alors sous des formes différentes, suivant les différens arbres qui les portent. Ils sont attachés par un pédicule fort court sur un boursouflement de la branche, assez semblable à une consile, & qui l’été, précédent fournissoit une attache à la feuille, dans l’aisselle de laquelle s’est formé le bouton. Voyez Feuille. Non-seulement les boutons de chaque genre d’arbres ont des formes particulières, mais souvent les boutons de chaque espèce en affectent une, qui, bien observée, est très-utile pour distinguer ces espèces entr’elles ; & ces differentes formes de boutons suffisent ordinairement aux Jardinier pour connoître la plus grande partie des arbres dans les pépinières, même dans le temps où ils sont dépourvûs de fleurs & de fruits, & même dépouillés de leurs feuilles. Nous n’entrerons point dans tous ces détails. Mais il est important de remarquer avec M. Duhamel que sur un même arbre on voit plusieurs sortes de boutons ; des uns qui, sont ordinairement pointus, il sort des branches ; & des autres, qui sont communément plus gros & plus arrondis, sortent les fleurs. Les premiers sont nommés par les Jardiniers boutons à bois, & les autres boutons à fruit.

☞ On peut encore dans plusieurs espèces d’arbres, tels que sont les poiriers, les pommiers, les nefliers, &c. distinguer deux espèces de boutons à bois, on en voit de très-petits d’où il ne sort qu’un bouquet de feuilles ; mais ces boutons donnent ordinairement dans la suite des boutons à fruit. Les autres qui sont plus gros donnent des branches.

☞ Ce qu’on vient de dire sur les boutons à fruit regarde les arbres qui portent des fleurs complettes, c’est-à-dire, dont chaque fleur renferme tous les organes de la fructification, comme le poirier, le pêcher, le cerisier, &c. Car entre les arbres qui produisent des fleurs à étamines & des fleurs à pistil, sur différens individus, ou sur un même individu, mais à des parties séparées, il faut distinguer deux espèces de boutons à fleurs ; puisque dans nombre d’espèces les boutons d’où sortent les chatons, sont très-différens de ceux d’om sortent les fruits. Par exemple il sort du gros bouton placé au bout des branches du noyer, une nouvelle branche ; les feuilles sortent des boutons plus petits, qui sont le long des branches, & les chatons sortent d’autres très-petits boutons, à peine perceptibles, qui sont placés à côté de ceux qui fournissent les fruits.

☞ Les boutons à bois & les boutons à fleur sont formés par des écailles creusées en forme de cuilleron, lesquelles, en se recouvrant les unes sur les autres, forment des enveloppes capables de protéger, pendant la saison de l’hiver, les parties intérieures qui sont extrêmement tendres & délicates. Les écailles extérieures sont ordinairement assez dures & garnies de pils intérieurement & sur les bords. Leur extérieur ressemble assez souvent à l’écorce des jeunes branches. Les écailles intérieures sont plus minces, plus tendres, plus succulentes. Leur couleur tire sur le vert, leurs poils sont noirs & blanchâtres, & ces écailles herbacées sont presque toujours enduites d’une humeur visqueuse qui les unit très-intimement les unes aux autres.

☞ Quand on pénétre plus avant dans l’intérieur des boutons, on découvre d’autres feuillets très-minces de différentes figures, & qui quelquefois ne sont que de simples filets. Toutes ces parties rangées avec beaucoup d’art enveloppent les radimens d’une jeune branche ou d’une fleur. Voyez ces mots.

☞ Il faut remarquer ici avec M. Duhamel que les écailles extérieures, celles qui sont intérieures, & même les feuillets s’implantent sur les lames intérieurs de l’écorce, dont elles semblent n’être qu’un prolongement, & que les jeunes branches, ou les fleurs, paroissent partir d’entre les fibres ligneuses & les corticales, ou aboutir aux fibres ligneuses & à la moëlle des petites branches qui les portent.

☞ Les radimens des branches & des fleurs contenues dans les boutons, continue le même Physicien, peuvent être apperçus dès l’automne, & ces différentes parties croissent même pendant l’hiver. C’est dans cette saison, où le mouvement de la séve paroît suspendu, que les différentes parties des fleurs se forment, pour ainsi-dire, clandestinement, & qu’elles se disposent à paroître au printemps. Alors dès que le mouvement de la sève devient plus sensible, les boutons s’ouvrent, les écailles extérieures tombent, les intérieures acquierent de l’étendue ; on les voit pendant quelque-tems accompagner les nouvelles productions qui font des progrès : mais peu-à-peu ces écailles intérieures se détachent comme les écailles extérieures, ou bien elles se dessechent, & enfin elles tombent.

☞ Les plantes annuelles n’ont point de boutons. Les plantes qui ne sont vivaces que par leurs racines, ne portent point aussi de boutons sur leurs tiges, mais seulement sur leurs racines ; il n’y a que les plantes dont les branches & les tiges sont vivaces qui en sont pourvues sur ces parties.

☞ Dans quantité d’espèces d’arbres, comme aux poiriers, les boutons qui fournissent les fleurs, & que les Jardiniers appellent boutons à fruit, sont situés à l’extrémité des petites branches particulières qui ne s’étendent jamais beaucoup, qui sont fort garnies de feuilles, & qui contiennent plus de tissu cellulaire que les branches à bois.

☞ Aux pêchers & à quantité d’arbres de la même famille, les boutons à fleurs sont posés sur les mêmes branches que ceux à bois, de sorte qu’on voit quelquefois un bouton à fleurs à côté d’un bouton à bois ; souvent deux boutons à fleurs sont aux deux côtés d’un bouton à bois : de sorte que les boutons à fleurs qui ne sont point accompagnés de boutons à bois, tombent ordinairement sans produire de fruits. Voyez Branche, Fruit.

Ménage dérive ce mot de pulsare, parce que les boutons viennent aux arbres quand ils poussent : d’où vient qu’on appelle aussi bouture, leurs branches coupées & plantées en terre.

Les boutons des habits n’ont été ainsi appelés que par ressemblance à ceux des arbres.

On appelle figurément & poëtiquement une bouche petite & vermeille, un bouton de rose.

Bouton, se dit aussi d’une bube, ou tubercule rouge, qui vient au visage, souvent pour avoir fait excès de vin. Papula. Son pourpoint n’a plus qu’un bouton, & son nez en a plus de trente. Gomb. Aristote