Bible Crampon 1923/Dictionnaire du Nouveau Testament

Traduction par Augustin Crampon.
Texte établi par Société de S. Jean l’Évagéliste, Desclée. (p. 319-Table).


DICTIONNAIRE
DU
NOUVEAU TESTAMENT
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ABILENE. — Nom d’une petite contrée ou tétrarchie (Luc, iii, I), ayant pour capitale Abila, et gouvernée, sous Tibère, par le tétrarque Lysanias. Des ruines encore existantes (Souq-ouadi-Barada) marquent la place d’Abila dans un district, arrosé par le Barada, sur le versant oriental de l’Anti-Liban, entre Héliopolis (Baalbeck) et Damas, à 30 kilomètres au nord-ouest de cette dernière ville. Voir Lysanias.

ACHAÏE. — Ce nom, avant la conquête romaine, désignait la contrée située au nord du Péloponèse, le long du golfe de Corinthe, mais après cette conquête il fut appliqué à tout le Péloponèse avec la Grèce centrale et les îles adjacentes. C’est dans ce dernier sens que le nom d’Achaïe est pris par l’auteur des Actes des Apôtres et par S. Paul (Act. xviii, 12, 27 ; xix, 21 ; Rom. xv, 26 ; I Cor. xvi, 15 ; II Cor. i, 1 ; ix, 2 ; xi 10 ; I Thess., i, 7, 8). Pour eux l’ensemble des pays grecs d’Europe se divise en deux parties : l’Achaïe et la Macédoine. Cette province romaine d’Achaïe fut tour à tour impériale et sénatoriale. Quand S. Paul y aborda à sa seconde mission, elle était redevenue sénatoriale et avait à sa tête un proconsul, ἀνθύπατος, (Act. xviii, 12), qui était alors Gallion, le frère de Sénèque. D’après une inscription trouvée à Delphes, c’est en 52 que S. Paul aurait été cité devant son tribunal (Revue Biblique, 1913, p. 36). Parmi les villes d’Achaïe, le Nouveau Testament ne mentionne qu’Athènes (Act. xvii, 16), Corinthe, séjour du proconsul, (Act. xviii, 1), et Cenchrée, port de Corinthe du côté de l’Orient, (Act. xviii, 18) ; (Rom. xvi, 1).

ANCIENS ou ANCIENS DU PEUPLE. — Ce mot, les Anciens (zeqênim), sans aucune addition, désigne tantôt des docteurs juifs célèbres, dont les interprétations de la Loi faisaient autorité et étaient reçues, surtout des Pharisiens, presque avec autant de respect que la Loi elle-même ; tantôt les Anciens du peuple. Pour cette dernière signification, voy. Anciens du peuple à l’art. Sanhédrin. Dans les Actes et les Épîtres, le nom d’Anciens, πρεσβυτέροι, est donné aux chefs spirituels qui furent préposés par les Apôtres à la direction des Églises particulières et qui y remplissaient les fonctions liturgiques.

ANNE ou HANAN, fils de Seth, fut élevé au souverain sacerdoce par Quirinius, légat impérial en Syrie, l’an 6 ou 7 de notre ère. Déposé l’an 15, au commencement du règne de Tibère, par le procurateur Valérius Gratus, il resta très considéré ; on continuait à l’appeler le grand prêtre, et à le consulter dans toutes les questions graves. Ses cinq fils, sans compter son gendre Caïphe, furent tour à tour revêtus de la même dignité. Dans un temps où, sous le régime des procurateurs romains, les pontifes se succédaient si rapidement, le vieux grand prêtre jouissait donc d’une grande autorité ; c’était lui qui menait tout le collège des prêtres. Caïphe, son gendre, n’était entre ses mains qu’un instrument docile, et c’est sur Anne que doit peser, sans aucun doute, la plus grande responsabilité dans la condamnation de J.-C. Tous ses fils furent d’ardents persécuteurs des chrétiens, et le dernier, appelé aussi Anne, fit mettre à mort S. Jacques, le frère du Seigneur.

ANTIOCHE. — Deux cités de ce nom sont mentionnées à plusieurs reprises dans les Actes des Apôtres : Antioche de Pisidie, et Antioche de Syrie.

1o  Antioche de Pisidie, ou plutôt voisine de la Pisidie, Αντιόχεια πρὸς Πισιδίᾳ, comme s’exprime Strabon (XII, viii, 14), appartenait en réalité à la Phrygie galatique. Mais la portion de la Phrygie qui fit partie de la Galatie romaine, étant engagée dans la Pisidie, finit peu à peu par être absorbée par elle : de là le nom d’Antioche de Pisidie. Cette cité, d’après Strabon, était située sur le versant méridional des montagnes qui séparent la Phrygie asiatique de la Pisidie. Il n’en reste plus que des ruines à 3 kilom. de Yalobatch, petit village au pied du Sultan Dagh. C’était une colonie romaine, où les Juifs se trouvaient en grand nombre. S. Luc (Act. xiii, 14-51 et xiv, 20-22), raconte en détail l’évangélisation de cette ville par S. Paul, et S. Barnabé. (Cf. II Tim. iii, 11).

2o  Antioche de Syrie, capitale de la province romaine de Syrie, était une immense cité de 15 kilom. de tour sur les bords de l’Oronte. Dans ses murailles, hautes de 25 mètres et larges de 6, elle renfermait à peu près 500.000 habitants, mélange de syriens, de juifs, de grecs et de romains. C’était comme la capitale de l’Orient romain. À la suite de la persécution qui sévit à Jérusalem et du martyre de S. Étienne, des disciples vinrent annoncer l’Évangile à Antioche (Act. xi, 19) ; bientôt Paul et Barnabé y exercèrent leur zèle. Là on commença à prêcher l’Evangile aux Gentils, et les nombreux convertis, de nation et de langue diverses, pour ne pas être confondus avec les Juifs y reçurent le nom de chrétiens (Act. xi, 26). Cette ville doit à sa situation, et aussi au caractère cosmopolite de sa population, d’avoir été choisie pour être le premier centre des missions païennes : elle fut le point de départ des voyages apostoliques de S. Paul (Act, xi, 19, 28 ; xiii, 1 ; xiv, 26 ; xv, 36 ; xviii, 22 ; Gal. ii, 11). Antioche était la résidence du légat propréteur de la province impériale de Syrie ; le procurateur de Judée dépendait de son autorité.

ARIMATHIE. — D’après quelques modernes, cette ville, que S. Luc (xxiii, 51), nous dit être une ville de Judée, serait la même que Ramathaim-Sophim, patrie de Samuel, dans la montagne d’Ephraïm, dont on montre aujourd’hui l’emplacement sur une colline pittoresque qui se dresse au N.-O. de Jérusalem, Nebi Samouïl. D’autres préfèrent l’opinion de S. Jérôme et des auteurs anciens qui identifient Arimathie avec la Ramléh actuelle, ville de 3.000 âmes, située dans la plaine de Saron, à trois kilomètres au sud de Lydda (ou Diospolis), à 8 heures de marche de Jérusalem. Mais Ramléh, d’après Aboulféda, est une ville relativement moderne, et il n’y a nul rapport entre Ramlèh qui signifie sable et Râmâh, Ramatha, « hauteur ». Il est préférable d’identifier Arimathie avec Rentis, localité située à 3 lieues nord-est de Lydda. Au temps d’Eusèbe, Arimathie se nommait Remphis ou Remtis. (Voir Vigouroux, Dict. de la Bible, t. I, col. 960.)

ASIE, dans le Nouveau Testament, ne désigne jamais l’immense partie du monde que nous appelons maintenant de ce nom, mais seulement la province romaine d’Asie. Elle comprenait l’Eolide, la Lydie, l’Ionie, la Carie, la Mysie jusqu’au mont Olympos, et une partie de la Phrygie. Province laissée au Sénat dans le partage de l’an 27 av. J.-C., elle était gouvernée par un proconsul qui résidait à Ephèse. Les sept églises de l’Apocalypse (i-iii) sont les villes les plus importantes de la province romaine d’Asie, et nous trouvons là une preuve que ce terme « Asie » (Apoc. i, 4), désigne la province romaine avec ses limites officielles. Cependant S. Luc (Act. xvi, 6), prend le nom d’Asie dans le sens primitif et plus restreint de la région d’Ephèse, puisqu’il la distingue de la Phrygie et de la Mysie qui faisaient partie de la province romaine. C’est la région du littoral qu’Eunope (Edit. Didot, p. 466-467) appelle « l’Asie autour d’Ephèse ». S. Paul paraît prendre ce mot dans le même sens (I Cor. xvi, 19 ; II Cor. i, 8 ; II Tim. i, 15).

ASIE MINEURE. — Ce que nous appelons de ce nom n’est pas connu dans le Nouveau Testament sous cette dénomination. Mais les contrées ou provinces qui forment l’Asie Mineure y sont designées sous leur nom particulier, comme l’Asie, la Bithynie la Galatie, la Pamphylie, la Cappadoce, etc. Voir la carte des trois premiers voyages de S. Paul.

BAPTÊME DE S. JEAN-BAPTISTE — A sa prédication, S. Jean avait joint sous l’inspiration de Dieu (Jean, i, 23), un rite extérieur, un baptême, c’est-à-dire un bain par immersion complète dans les eaux du Jourdain. Analogue aux diverses espèces d’ablutions prescrites par la loi mosaïque à ceux qui avaient contracté des souillures légales (Lévit. xi-xv), ce baptême avait un but spécial : c’était de préparer les Juifs à entrer dans le royaume de Dieu et à recevoir le Messie par qui ce royaume allait bientôt s’établir. — Les oracles des Prophètes décrivent le temps du Messie comme le commencement d’un nouvel ordre de choses, d’un monde nouveau d’une régénération. Pour faire partie de ce nouveau royaume, la première disposition requise, c’était le repentir de ses fautes la pureté de conscience, la transformation morale de l’âme avec le changement de vie qui en est la conséquence. L’immersion complète dans le Jourdain était le symbole de cette purification intérieure. Elle rappelait aux pécheurs le souvenir de leurs fautes et leur enseignait que leur âme, surtout, avait besoin d’être lavée de ses impuretés. Pour assurer davantage encore cette pureté de l’âme, le baptême était accompagné de la confession des péchés (Matth. iii, 6). Cette confession n’était, semble-t-il, ni une de ces formules générales dont tout homme pourrait se servir pour se déclarer pécheur, ni l’aveu détaillé, complet, précis, exigé dans la confession sacramentelle. C’était une accusation plus ou moins complète dont l'étendue et la précision se mesuraient à la ferveur et à l’humilité des divers pénitents. Le baptême de Jean était donc plus excellent que les ablutions antérieures, mais il était bien inférieur, par son efficacité, à celui de Jésus-Christ. Il n’était pas un sacrement, au dire même du précurseur (Matth. iii, 11). Il figurait, sans l’opérer, la purification intérieure de l’âme; il n’était la cause ni du pardon ni de la grâce, mais en était simplement l’occasion, en faisant naître dans l’âme des dispositions capables de toucher le cœur de Dieu et de le porter à la miséricorde et au pardon.

Notre-Seigneur voulut se soumettre à cette pratique d’humilité et de pénitence non point qu’il fût pécheur, mais parce qu’il devait expier les péchés des hommes. S.Thomas, ajoute une autre raison : Notre-Seigneur voulait que l’eau sanctifiée solennellement par le contact de sa chair divine fût rendue ainsi plus apte à devenir la matière du sacrement de Baptême.

BÉELZÉBUB. Nom en usage chez les Juifs, au temps de J.-C., pour désigner Satan, le prince des démons. Ce nom était celui d’un dieu des Philistins, honoré à Accaron (II Rois, i, 2), Baal-Zebub, litt. Seigneur-mouche, auquel on attribuait le pouvoir d’envoyer ou de faire cesser le fléau des moucherons et autres insectes, si redouté en Orient des hommes et des troupeaux. On sait que les Grecs et les Romains avaient aussi leur Jupiter chasse-mouches, ζεύς ἆπόμυιος ou μυίγρος. Au lieu de Beelzébub, les manuscrits grecs et beaucoup de versions anciennes écrivent Beelzébul, qui veut dire, ou bien le maître de l’habitation, ici des demeures souterraines, de l’enfer (il répondrait au titre de « maître de la maison » que Notre-Seigneur donne à Satan, (Matth. x, 25); ou bien ba’al zébél, le seigneur du fumier. Cette altération du b final en l a été diversement expliquée : les uns la regardent comme un adoucissement de la prononciation introduite par les Juifs hellénistes ; les autres l’attribuent à une intention formelle des Juifs de tourner en ridicule le paganisme, en donnant un nom vil et abject à l’idole philistine.

BÉTHANIE. — L’Evangile mentionne deux localités de ce nom. L’une (Béthanie « maison ou lieu de la barque », nommée en certains manuscrits et chez quelques Pères, Bethabara, « lieu du passage ») était située au delà du Jourdain, “ où Jean baptisait ”, (Jean, i, 28). Pour l’autre, voy. Oliviers (Mont des).

BETHLÉEM. — Cette ville, située à environ 2 lieues au sud de Jérusalem, existe encore aujourd’hui sous le nom arabe de Beit-Lachm. Quoique dans la montagne et bâtie sur une hauteur rocheuse coupée à pic du côté de l’orient, elle était entourée de terrains très fertiles, plantés de vignes, d’oliviers, de figuiers et d’amandiers, d’où son nom d’Ephrata, la fertile, et de Bethléem, maison, ou lieu du pain. Beit-Lachm a une population de 8.000 habitants, dont 4.700 catholiques, 3.200 grecs non-unis, une centaine de musulmans et quelques juifs. A l’est de la ville, à 200 pas de distance, se trouve sur une hauteur le couvent latin des Pères de Terre-Sainte, qui renferme l’église bâtie par sainte Hélène à l’endroit même où naquit le Sauveur. Comme S. Luc met le lieu de naissance de J.-C. hors de la ville, rien ne peut ébranler la certitude de cette tradition, d’autant plus que la chrétienté n’a jamais perdu de vue, depuis la naissance du Sauveur, le souvenir de cette situation unique. La basilique de la Nativité est une des plus anciennes et des plus belles de tout l’Orient. De chaque côté du maître-autel part un escalier tournant qui conduit à la grotte de la Nativité. Cette grotte est longue de 36 pieds, large de 12, haute de 9. Trente-deux lampes, dont l’une a etc donnée par le roi de France Louis XIII, répandent sur la crèche du Sauveur une douce clarté, pareille à celle de la lune pendant une nuit de printemps, et rappellent que celui qui a daigné y naître est la lumière du monde. La place où la Vierge enfanta le Rédempteur des hommes est marquée par une plaque de marbre blanc. Dans cette plaque est incrustée une étoile d’argent avec l’inscription suivante :

Hic de Virgine Maria Jésus Christus natus est.


Ici, de la Vierge Marie, Jésus-Christ est né.

(Voir PP. Hugues Vincent et F. M. Abel, Bethléem, le sanctuaire de la Nativité. (Paris. 1914, in-4o.)

BETHPHAGÉ : voy. Oliviers (Mont des).

BETHSAÏDE. — Ce nom, qui signifie maison ou lieu de la pêche, désigne, dans l’Evangile, d’après de nombreux exégètes, deux villes distinctes : l’une moins importante appelée aussi bourg, est située non loin de Capharnaüm, sur le bord occidental du lac de Génésareth, par conséquent dans la Galilée ; c’était la patrie des apôtres Pierre, André et Philippe ; Jésus y séjourna souvent ; mais, indocile à sa prédication, elle provoqua les menaces du Sauveur (Matth. xi, 21 ; Luc, x, 13). L’autre, plus célèbre, était située vers l’extrémité N.-E. du même lac, dans la Gaulonitide, tétrarchie de Philippe, et nommée Julias en l’honneur de la fille de l’empereur Auguste : c’est de cette dernière qu’il serait question (Matth. xiv, 13, 22, 24 ; Marc, vi, 32, 45 ; Luc, ix, 10). — Certains auteurs (Vigouroux, Dict. Bible, t. I. col. 1715) ne croient pas nécessaire, et avec raison, semble-t-il, de distinguer deux Bethsaïde, et placent cette localité à El Mes’adieh ou à El’Aradj.

CAIPHE (Καϊάφας en grec) fut nommé grand prêtre sous le règne de Tibère, par Valérius Gratus, procurateur de Judée, probablement en l’an 18, et se maintint dans cette dignité sous Ponce-Pilate, successeur de Gratus. Mais quand Pilate eut été éloigné de la province, Caïphe fut déposé en l’an 36 par le proconsul Vitellius. Quelques jours avant la passion du Sauveur, il avait dit aux Juifs pour les exciter au meurtre : “ II est avantageux qu’un homme périsse pour le salut du peuple.” C’était, du reste, à ce qu’il paraît, un homme peu versé dans la science de la Loi, et qui se laissait dominer par Anne, son beau-père. Son vrai nom était Joseph (Ant. Jud. xxiii, ii, 2); Caïphe n’est qu’un surnom, dont on ignore la signification.

CALENDRIER JUIF. — 1o L’année. — Durant les 400 ans de leur séjour en Egypte, les Hébreux n’avaient, semble-t-il, qu’une année civile et économique, commençant avec les semailles d’automne et finissant avec la récolte des derniers fruits. A partir de l’institution de la Pâque, ils eurent une année religieuse, qui s’ouvrit avec la nouvelle lune qui suit l’équinoxe du printemps, c’est-à-dire le mois d’Abib ou Nisan. (Voy. Exod. xii, 2). Toutefois, pour faciliter sans doute leurs relations avec les peuples étrangers, ils fixèrent, après l’exil, le commencement de l’année civile au premier jour du septième mois (Tischri). L’année civile s’ouvrit par conséquent avec la nouvelle lune qui suit l’équinoxe d’automne.

2o Le Mois. — L’année religieuse (c’est d’elle qu’il sera dorénavant question) se partageait en 12 mois lunaires dont la durée était alternativement de 29 et de 30 jours, le mois lunaire durant en réalité 29 jours et demi. Ces mois étaient le plus souvent désignés par leur numéro d’ordre : premier, second, troisième mois, etc. Le livre de l’Exode (xiii, 4) et le 1er (Vulg. iii) livre des Rois (vi, 1, 3, 8 ; viii, 2) nous font connaître le nom qu’avaient reçu, avant l’exil, quatre de ces mois. Le 1er s’appelait Abib ou mois des épis ; le second Ziv ; le 7e Ethanim ; le 8e Bûl. Après la captivité, tous furent désignés sous les noms dont se servaient les Chaldéens. Nous donnons en note l’énumération des douze mois avec l’indication des jours, qui, lors de l’institution successive des principales fêtes, furent fixés pour la célébration de ces diverses solennités. Quant aux rites propres de ces fêtes, on les trouvera indiqués plus loin au tableau des Fêtes Juives.

3o La Semaine. — Elle renfermait sept jours que l’on désignait, comme les mois, par leur numéro d’ordre : premier, second, troisième jour, etc. Le septième jour correspondait à notre samedi. Il s’appelait Sabbat, c’est-à-dire repos. Il était consacré au Seigneur. Le sixième jour était appelé veille par les Juifs Palestiniens, et préparation (παρασχευή parascève) par les Hellénistes. On se préparait en effet ce jour-là à la célébration du sabbat en activant ses travaux de manière à passer le lendemain dans un repos absolu.

4o Le Jour. — La journée, civile ou sacrée, était le laps de temps compris entre deux couchers de soleil. La coutume des Hébreux d’appeler jour le temps qui s’écoule d’un soir à l’autre, semble avoir été introduite par les premiers versets de la Genèse : “ Et il y eut un soir et il y eut un matin, ce fut le premier jour. ” (i, 5 sv.) La nuit commençait avec le coucher du soleil ; elle avait douze heures, qui se partageaient en quatre parties ou veilles, plus ou moins longues selon les saisons : de six heures environ à neuf heures, c’était le soir ὀψέ ; de neuf heures à minuit le milieu de la nuit μεσονύκτιον ou pleine nuit ; de minuit à trois heures, le chant du coq ἀλεκτοροφνια de trois à six heures du matin, le matin ttocoi ou aube. Le jour, lui aussi, avait douze heures comme la nuit, et se divisait en quatre parties plus ou moins longues, selon les saisons : le lever du soleil, vers six heures du matin ; la troisième heure (9 heures) ; la sixième heure (midi) ; la neuvième heure (3 heures de l’après-midi). — Au sens large et usuel, on appelait aussi première, troisième heure, etc., le temps compris entre G et 9 heures, 9 neures et midi, etc. (Marc, xv, 25, 33 ; Jean, xix, 14).

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1er
mois [30 jours] 
Nisan [avant l’exil, Abib
Mars-Avril.
14 au coucher du soleil (ce qui est le commencement du 15 au sens juif), célébration du festin pascal.
15-21 Fête de Pâque.
2e
mois [29 jours] 
Iyyâr [avant l’exil, Ziv
Avril-Mai.
3e
mois [30 jours] 
Sivân 
Mai-Juin.
7 Fête de la Pentecôte ou des “ Semaines. ”
4e
mois [29 jours] 
Tammûz 
Juin-Juillet.
5e
mois [30 jours] 
Ab 
Juillet-Août.
6e
mois [29 jours] 
Elûl 
Août-Septembre.
7e
mois [30 jours] 
Tischri [avant l’exil, Ethanim
Septembre-Octobre.
1 Néoménie plus solennelle.
Fête des trompettes.
10 Fête de l’Expiation [Yom Kippour].
15-22 Fête des Tabernacles.
8e
mois [29 jours] 
Marcheschvân [avant l’exil, Bûl
Octobre-Novembre.
9e
mois [30 jours] 
Kisleu 
Novembre-Décembre.
25 [8 jours] Fête de la Dédicace.
10e
mois (29 jours] 
Têbêth 
Décembre-Janvier.
11e
mois (30 jours] 
Chebât 
Janvier-Février.
12e
mois [29 jours] 
Adâr 
Février-Mars.
14 et 15 Fête de Pûrim, c’est-à-dire des Sorts.

Tous les trois ans environ, pour faire concorder l’année lunaire, qui n’avait que 354 jours, avec l’année solaire, on ajoutait un mois supplémentaire nommé Veadâr, c’est-à dire Nouvel Adâr.

CAPHARNAÜM. — Ville de Galilée, aux confins des tribus de Zabulon et de Nephtali, sur le bord N.-O. du lac de Génésareth non loin de l’embouchure du Jourdain. La fertilité de son sol, sa position centrale entre la Syrie, la Phénicie et la Palestine, sur la grande route qui conduit de Damas à Jérusalem, à la Méditerrannée et en Egypte, l’importance de son commerce, que démontre l'existence d’un groupe nombreux de collecteurs d’impôts, chargés de percevoir les droits d’entrée ou de transit, la présence d’un grand nombre de fermiers des douanes romaines, enfin les pêcheries du lac voisin contribuèrent à sa prospérité. Jésus s’arrêta souvent dans cette ville pendant sa carrière publique. Il s’y était fixé avec sa mère, en quittant Nazareth (Matth. iv, 13 ; Jean, 11, 12), et y demeura dans la maison de parents ou amis que l’Evangile ne nomme point : c’est pourquoi Capharnaüm est appelée sa ville. Il y enseignait tantôt dans la synagogue, tantôt au bord du lac, et il y opéra beaucoup de miracles. Le déclin de Capharnaüm suivit de près la mort de J.-C. (Matth. xi, 23 ; Luc, x, 15) ; sa ruine est si complète que les traces mêmes de son emplacement ont disparu. Les voyageurs et les archéologues croient le reconnaître dans le khan ou caravansérail à demi ruiné, appelé Minyeh, ou, ce qui paraît moins probable, dans les ruines nommées Tell-Houm, à 3 kilomètres du Jourdain.

CÈNE PASCALE. — Les quatre Evangélistes racontent avec plus ou moins de détails la cène pascale que Jésus fit avec ses apôtres la veille de sa mort. Voyez S. Matthieu, xxvi, 20-29 ; S. Marc, xiv, 17-25 ; S. Luc xxii, 14-30 ; S. Jean, xiii, 1-30. (Comp. I Cor. xi, 23-25) On sait que ce fut dans cette dernière cène que le Sauveur institua l’Eucharistie. Les quatre récits, comme il arrive souvent dans les Evangiles, se complètent l’un l’autre, et pour savoir tout ce qui s'est passé dans ce moment solennel, il faut les comparer ensemble et les suppléer l’un par l’autre. Malheureusement il est assez difficile d’assigner l’ordre dans lequel se sont succédé les divers faits et discours, et les interprètes sont fort partagés sur ce point. Avant d’exposer notre sentiment, nous décrirons brièvement les rites qu’observaient les Juifs dans la manducation de l’agneau pascal, et auxquels se conforma Notre-Seigneur, comme l’attestent les récits évangéliques.

La cène pascale commençait après le coucher du soleil qui mettait fin au 14 Nisan. Dans l’après-midi de ce 14 Nisan, on faisait immoler au temple un agneau ou un chevreau. Puis on le faisait rôtir et non bouillir, en prenant soin de ne briser aucun de ses os. Le soir venu, on se réunissait pour le festin, que l’on célébrait suivant un rituel déterminé. Les Talmuds nous ont laissé, à ce sujet, de nombreux détails : Dix personnes au moins, vingt au plus, devaient être à table ensemble. Les convives étaient étendus sur des lits peu élevés, ou divans, le bras gauche appuyé sur un coussin, de manière que la main droite restât toujours libre : depuis longtemps était tombée en désuétude la coutume de prendre le repas pascal debout, un bâton à la main, en tenue de voyageur, pour reproduire la scène du départ d’Egypte, la nuit de la délivrance (Exod. xii, 11). — Le père de famille commençait par annoncer l’ouverture de la fête pascale et par prendre une coupe pleine de vin, puis il prononçait la bénédiction en ces termes : “ Ceci est le temps de notre délivrance, et nous rappelle la sortie d’Egypte. Béni soit le Seigneur, l’Eternel, qui a créé le fruit de la vigne ! ” Ensuite il buvait du vin contenu dans la coupe, et la passait aux autres convives, qui en buvaient comme lui, chacun à son tour. Aussitôt après on faisait passer dans l’assemblée un bassin plein d’eau et une serviette pour que chacun se purifiât les mains. On apportait alors, ou bien on approchait des convives la table toute servie. Il y avait sur la table, à côté de l’agneau, des herbes amères, en souvenir des souffrances endurées autrefois en Egypte ; du pain azyme, sans saveur, comme celui que le levain n’eut pas le temps de faire fermenter lors de la fuite précipitée d’Israël ; une tasse de vinaigre ou d’eau salée, qui rappelait aux assistants les larmes versées par leurs pères ; enfin une espèce de brouet appelé charoseth, et composé de pommes, d’amandes, de figues, etc., cuites dans du vin. Le maître de la maison disait : “ Béni soit le Seigneur, qui a créé les fruits de la terre ! ” Puis, prenant des herbes amères il les levait en l’air en disant : “ Nous mangeons ces herbes amères parce que les Egyptiens ont rempli d’amertume la vie de nos pères. ” Il trempait ensuite ces herbes dans le vinaigre, et en mangeait gros au moins comme une olive ; ce que les autres faisaient à leur tour. On retirait alors la table à quelque distance, et le père de famille, ou son fils aîné, faisait une lecture (p. ex. Deut. xxvi), ou une instruction sur la Pâque et la sortie d’Egypte. L’instruction finie, on rapprochait la table, on récitait la première partie du Hallel c’est-à-dire les Ps. cxiii et cxiv ; puis on vidait la deuxième coupe, et on se lavait une seconde fois les mains. Alors commençait le repas proprement dit. Le père de famille, ayant devant lui deux pains, en bénissait un, qu’il rompait aussitôt ; et, prenant un des morceaux, il l’enveloppait d’herbes amères, le trempait dans le charoseth, adressait à Dieu des actions de grâces, et mangeait cette bouchée. Après qu’il avait de la même manière, en bénissant et en rendant grâces, goûté de l’agneau pascal, il le coupait en morceaux, qu’il distribuait aux convives avec du pain azyme trempé dans le charoseth. Le repas fini, il leur présentait la troisième coupe de vin, appelée spécialement coupe de bénédiction, parce qu’on rendait alors à Dieu des actions de grâces pour la cène pascale que l’on venait de faire. Après avoir récité la seconde partie du Hallel, les Ps. cxv-cxviii, on vidait la quatrième coupe, quelquefois une cinquième, mais rien de plus.

Si, maintenant, nous combinons avec les usages des Juifs dans la manducation de l’agneau pascal les diverses données de l’Evangile, nous arriverons aux résultats suivants, dont la plupart nous paraissent certains, et les autres très probables :

1.  L’hypothèse d’un repas commun qui aurait suivi la cène pascale doit être écartée comme contraire à la coutume juive aussi bien qu’au récit évangélique. Non seulement l’Evangile n’en laisse pas apercevoir la moindre trace, mais il semble même l’exclure positivement, lorsqu’il dit que Jésus et les Apôtres sortirent du cénacle après le chant de l’hymne, c’est-à-dire de la seconde partie du Hallel.

2.  Le lavement des pieds eut lieu au commencement du festin pascal, soit dès l’entrée dans le cénacle, soit plutôt après la bénédiction de la première coupe, au moment où se faisait l’ablution des mains, et avant que la table chargée de mets fût apportée ou approchée des convives. Cependant quelques interprètes, s’appuyant sur les mots cena facta de la Vulgate (Jean, xiii, 2),ont placé le lavement des pieds après l’achèvement de la Cène. Mais, à tort, selon nous. En effet, la meilleure leçon des manuscrits grecs a δείπνου γινομένου, durant le repas, pendant que se faisait la cène pascale, et non γενομένου, après le repas. S. Jérôme lisait peut-être cette seconde leçon, beaucoup moins autorisée que la première. D’ailleurs le terme facta dont il s’est servi ne signifie pas qu’une chose est achevée, mais qu’elle s’est réalisée et que peut-être elle dure encore.

3.  A quel moment précis du festin pascal faut-il placer l’institution de la Sainte Eucharistie? Il est difficile de répondre avec certitude. Nous croyons que la consécration du pain et celle du vin doivent être placées vers la fin du repas proprement dit. En effet S. Matthieu (xxvi, 26) et S. Marc (xiv, 22) rapportent que les deux consécrations curent lieu ἐσθιόντων αὐτῶν, manducantibus illis, pendant qu'ils soupaiènt, qu’ils étaient à table, ce qui s’applique même à la fin du repas, et aux dernières coupes de vin, par lesquelles il s’achevait régulièrement. Et S. Luc dit explicitement que la consécration du calice eut lieu, μετὰ τὸ δειπνῆσαι, postquam cenavit, c.-à-d. après le repas proprement dit, avant la récitation de la seconde partie du Hallel. — Mais, objectera-t-on, ne faut-il pas admettre un certain intervalle entre les deux consécrations? Car, après avoir raconté simplement la première, S. Luc ajoute (xxii, 21) : “ Jésus prit de même la coupe, après le souper, disant, etc. ” — Ces paroles semblent s’expliquer facilement. Au moment où s’achevait le repas légal, Jésus consacra le pain, puis il consacra et fit circuler la coupe dite de bénédiction, la coupe eucharistique, qui avait été préparée et apportée au Sauveur, quelque temps auparavant (Voy. Luc, xxii, 17, note).

4.  Beaucoup de Pères et d’anciens commentateurs admettent que Judas assistait à l’institution de l’Eucharistie et qu’il communia. D’un autre côté, S. Jean nous apprend (xiii, 26-30) qu’il quitta brusquement le cénacle avant la fin du repas. De nos jours la plupart des interprètes pensent que Judas ne reçut pas la Sainte Communion. Et en effet, S. Jean rapporte que Judas quitta le Cénacle après avoir pris le morceau de pain azyme trempé dans le charoseth, que lui avait présenté le Sauveur (Jean, xiii, 26, 27, 30). La seule raison sérieuse, sur laquelle on s’appuyait pour dire que Judas avait communié, est que S. Luc (xxii, 21), place l’allusion au traître après l’institution de l’Eucharistie. Mais S. Luc ne suit pas ici l’ordre chronologique. Après avoir raconté sans interruption ce qui se rapporte à l’institution même, il place à la fin divers incidents relatifs aux défaillances des Apôtres, comme la dispute des disciples sur la première place, incident qui ne peut évidemment se placer naturellement qu’au début du repas.

CÉSARÉE. — Deux villes de Palestine portent ce nom.

1o Césarée de Philippe, au pied du Liban, près de l’Hermon, reçut ce nom parce que Philippe le tétrarque restaura cette cité, anciennement Baalgad, et la dédia à Tibère César. (Ant. Jud. xviii, II, 1). Elle porte plus souvent le nom de Césarée Panéas ou simplement Panéas, consacrée au dieu Pan. Elle est mentionnée dans les Evangiles, (Matth. xvi, 13 ; Marc, viii, 27); c’est dans les environs qu’eut lieu la confession de S. Pierre (Matth. xvi, 16-18). Cette antique cité, dont il ne reste à peu près rien, porte actuellement le nom de Banias. De la grotte de Pan sort une des sources du Jourdain

2o Césarée du bord de la mer, ou Césarée de Palestine, ou simplement Césarée, bâtie par Hérode sur l’ancienne tour de Straton (Plin. Hist. Nat., v, 14), non loin du promontoire du mont Carmel, au bord de la Méditerranée. Il en fit la plus belle ville de Palestine, digne d’être dédiée à Auguste. Elle devint la résidence du procurateur romain, qui ne montait à Jérusalem qu’à la Pâque et aux fêtes solennelles. Au point de vue civil et militaire Césarée était donc comme la capitale de la Judée. Cette ville tient une place importante dans l’histoire de la prédication évangélique. Un des chefs de la cohorte qui y résidait, le centurion Corneille, fut le premier des païens à entrer dans l’Eglise et fut baptisé par Pierre avec sa famille (Act. x, 1 ; xi, II). S. Paul y vint plusieurs fois (Act. ix, 30 ; xviii, 22 ; xxi, 8). Il y séjourna deux ans comme prisonnier avant d’être conduit à Rome (Act. xxiii, 23-33 ; xxv, 1, 4, 6, 13). L’élément syrien finit par l’emporter sur l’élément juif dans cette cité, et elle devint une des églises les plus florissantes de Palestine. Actuellement Kaisarié n’est qu’un amas de ruines inhabitées.

CHRONOLOGIE DU NOUVEAU TESTAMENT. — Voy. Introduction.

CONSEIL (grand) : voy. Sanhédrin.

CRUCIFIEMENT. — Le supplice de la croix paraît avoir été inconnu de la loi mosaïque ; car la suspension des coupables à un poteau n’avait rien de commun avec le crucifiement, puisqu’elle n’avait lieu qu’après l’exécution, en signe de honte infligée au cadavre (Nomb. xxv, 4 sv.; Deut. xxi, 22 sv.): ce qui rend d’autant plus étonnante cette circonstance, qu’un Psaume tout entier, le Ps. xxi, relatif aux souffrances du Messie, décrit précisément ce supplice. Emprunté aux Romains par les derniers princes asmonéens, le crucifiement resta en usage chez les Juifs sous les Hérodes et durant la domination romaine.

Les Romains avaient retiré aux tribunaux juifs le droit de faire exécuter une sentence de mort. Le Sanhédrin, il est vrai, pouvait prononcer une condamnation capitale conformément aux lois judaïques ; mais ce n’était plus que pour la forme, car le procurateur romain recommençait l’instruction, procédait à un nouveau jugement, et appliquait lui-même, s’il y avait lieu, la peine de mort. C’est par suite de la situation politique où se trouvait alors la Judée, que Jésus, qui devait être livré au procurateur Pilate et ne pouvait être condamné que par lui à la peine capitale, subit le crucifiement ; accusé de blasphème devant le Sanhédrin, il aurait été, suivant la loi mosaïque, condamné à être lapidé.

Le crucifiement était considéré chez les Romains comme la peine capitale la plus dure et la plus ignominieuse ; il était réservé aux esclaves, aux voleurs de grand chemin, aux assassins et aux séditieux ; c’est pourquoi les Juifs, pour le faire infliger à Jésus, convertirent devant le procurateur leur grief religieux en une accusation politique, et le firent condamner non point comme coupable d’hérésie, mais comme ayant aspiré à la royauté. La sentence prononcée, le condamné appartenait à l’autorité romaine. Dans les localités où le juge n’avait pas de licteur, un centurion à la tête de quatre soldats présidait au supplice.

L’exécution commençait par une flagellation dans le prétoire. Les instruments de la flagellation romaine étaient ou des verges d’orme, ou des fouets de cuir, garnis, à l’extrémité, de nœuds, d’osselets ou de balles de plomb ; et l’on administrait cette peine avec tant de cruauté que plus d’une fois les condamnés y succombèrent. Mais cette flagellation, qui faisait partie intégrante de la peine du crucifiement, n’eut pas lieu pour Jésus. Il en avait, quelques instants avant sa condamnation, subi une autre dont le caractère légal n’est pas nettement défini. Ce qui résulte du récit plus exact de S. Jean (xix, 1 sv.), c’est que Pilate, en l’ordonnant, espérait émouvoir les Juifs ou assouvir leur haine et les amener à demander la délivrance de Jésus.

Le crucifiement se faisait toujours hors des villes populeuses. Les condamnés étaient tenus de porter eux-mêmes la croix jusqu’au lieu de l’exécution. L’endroit fixé pour le supplice de Jésus se trouvait au N. O. de Jérusalem. C’était un tertre dénudé, appelé Golgotha, mot Hébreu qui veut dire Calvaire, crâne, c’est-à-dire, en forme de crâne. Nous dirions Chaumont (Mont chauve).

A peine le Sauveur était-il arrivé à la porte de la ville, que ses forces l’abandonnèrent, et les soldats contraignirent un certain Simon de Cyrène, qui rencontra le cortège en revenant des champs, de porter la croix à la place de Jésus : cette violence n’était pas chose rare de la part des soldats dans les provinces conquises. On suspendait au cou des condamnés, ou l’on faisait porter devant eux, une tablette, titulus, portant une inscription qui énonçait la cause de la sentence, et qu’on fixait ensuite sur la croix au-dessus de la tête du crucifié.

Lorsque Jésus fut parvenu au lieu de l’exécution, on lui présenta, par pitié, un vin fortement aromatisé, afin d’alléger par ce breuvage les souffrances de l’agonie. C’était un usage juif, non romain, et il paraît que souvent les femmes de Jérusalem apportaient elles-mêmes au condamné ce vin de la dernière heure. Jésus, après avoir ap nroché ses lèvres du vase, refusa de boire. Il faut distinguer de ce breuvage celui que Jésus, dévoré sur la croix d’une soif brûlante, reçut d’un soldat Romain (Luc, xxiii, 36 ; Jean, xix, 29). C’était une boisson vinaigrée que les soldats romains avaient ordinairement avec eux et qu’ils présentaient quelquefois aux condamnés. Ceux-ci étaient dépouillés de leurs habits, qui appartenaient de droit aux soldats.

La croix était faite de deux poutres en forme de X, croix de S. André, ou en forme de T ; une troisième forme était celle où la partie verticale de la croix dépassait la partie transversale, †, comme on représente d’ordinaire la croix de J.-C. : ce sommet vertical n’était ce semble, qu’une pièce surajoutée au T pour supporter le titre. On se servait aussi simplement d’un poteau droit, surtout quand on suppliciait des centaines d’individus à la fois, par exemple des prisonniers de guerre ; dans ce cas, on se contentait de troncs d’arbres. D’après l’opinion communément adoptée, Jésus fut attaché à une croix de la troisième espèce, ayant quatre parties, pour figurer que la rédemption embrassait les quatre parties du monde, les quatre points cardinaux. Cependant on voit la seconde forme sur des monnaies des empereurs Constance et Constantin, sur des anneaux et des pierres sépulcrales de la plus haute antiquité, tandis que, d’après Lactance, il faudrait admettre que Constantin vit au ciel la croix sous la première forme.

La croix n’était pas très haute, si ce n’est par exception ; les pieds du crucifié touchaient presque la terre. Telle fut la croix de Jésus, puisque les soldats purent, avec une tige d’hysope, porter à sa bouche une éponge trempée dans du vinaigre. Au milieu de la tige verticale, on attachait un morceau de bois projeté en avant, sur lequel, selon sa forme, le condamné était comme assis ou à cheval, afin que la pesanteur du corps n’arrachât pis les mains des clous qui les fixaient. C’est à quoi font allusion les expressions des anciens : acuta cruce sedere, inequitari, etc. On commençait par dresser la croix ; puis le condamné, soulevé ou tiré par des cordes, était attaché, afin qu’il ne fît pas de résistance pendant qu’on clouait les mains et les pieds. Cependant il n’est pas sans exemple qu’on ait cloué d’abord le condamné à la croix étendue par terre, et dressé la croix ensuite ; et beaucoup d’auteurs pensent qu’on suivit ce mode pour N. S. Parfois on se bornait à attacher les pieds avec des cordes. Mais que les pieds et les mains de Jésus aient été réellement cloués, c’est ce qu’indiquent S. Luc (xxiv, 39-40) et S. Jean (xx, 25-27), et ce qu’atteste toute la tradition. Mais on ne sait pas d’une manière certaine si les pieds du Sauveur furent superposés et attachés avec un seul clou, ou s’ils furent placés à côté l’un de l’autre et cloués séparément ; cependant cette dernière opinion est plus probable comme s’accordant mieux avec le mode de crucifiement le plus en usage parmi les anciens.

Pour aggraver la peine, on crucifiait quelquefois la tête en bas, comme on le fit pour S. Pierre ; d’autres fois on faisait dévorer le crucifié par des bêtes féroces, ou bien on allumait du feu sous la croix. Quand on n’abrégeait pas le supplice par ces cruautés, les crucifiés vivaient d’ordinaire toute la nuit de l’exécution, et même tout le jour suivant ; il y a des exemples de crucifiés qui vécurent jusqu’au troisième jour. En effet l’hémorragie des mains et des pieds transpercés par les clous s’arrêtait parfois assez tôt. Alors les suppliciés succombaient plutôt au tourment de la faim, ou, plus souvent encore, à une congestion cérébrale déterminée par les affreuses souffrances qu’occasionnait la suspension des bras largement étendus. A Rome, on laissait les esclaves suspendus au gibet jusqu’à ce que leur corps fût corrompu ou dévoré par les oiseaux de proie. Il paraît qu’il en était de même dans les provinces pour tous les crucifiés. Cependant les Romains faisaient une exception à cet usage, en Judée pour s’accommoder aux coutumes des Juifs, auxquels leur loi ordonnait de descendre lé condamné de la potence avant le coucher du soleil, afin que le maudit de Dieu ne souillât pas la terre que le Seigneur leur avait donnée (Deut., xx, 23). Cette condescendance amena l’usage de rompre les jambes des condamnés, crurifragium, ce qui hâtait la mort et pouvait être considéré comme une compensation de l’abréviation du supplice. On n’appliqua pas le crurifragium à J.-C., parce que les soldats qui en étaient chargés remarquèrent en lui les signes certains de la mort. Les souffrances physiques et morales qu’il avait endurées avant son supplice, et l’action que librement il avait permis aux tortures les plus violentes d’exercer sur tout son être pour séparer son âme de son corps, expliquent comment il avait rendu le dernier soupir quatre ou cinq heures après le crucifiement. Cependant l’un des soldats lui porta un coup de sa lance dans le côté : c’était dans d’autres exécutions, le coup de grâce ordinaire. Il fut appliqué à Jésus pour éteindre la dernière étincelle de vie qui pouvait encore l’animer. La loi romaine livrait le corps des exécutés, sauf ceux des esclaves, à leurs parents, pour qu’ils le pussent ensevelir. C’est pourquoi Joseph d’Arimathie obtint sans peine ce qu’il demandait.

Le supplice de la croix subsista dans l’empire jusqu’à Constantin le Grand qui, par respect pour N. S. J.-C., l’abolit la treizième année de son règue.

DÉMONIAQUES. — L’homme n’est pas la seule créature intelligente et morale qui soit sortie des mains de Dieu. Il existe au-dessus de lui, et il existait avant lui, des créatures d’un ordre plus élevé et d’une nature plus spirituelle, les anges. Mais tandis qu’une partie de ces esprits glorieux, les anges saints ou les anges élus, sont demeurés fidèles à Dieu, et servent avec joie ses desseins de miséricorde sur la race humaine (Hébr. i, 14), dont ils saluèrent la naissance par de saints cantiques (Job. xxxiii, 7), il en est d’autres, les démons ou les esprits malins, “ qui ont péché, qui n’ont pas gardé leur origine, qui ont abandonné leur demeure propre, qui ont été précipités dans l’abîme, où ils sont réservés pour le jugement du grand jour (II Pier. ii, 4 ; Jud. 6) ”. Toutefois, ce jour qui doit fixer irrévocablement leur affreuse condition n’est point encore venu ; et en attendant qu’il vienne, une certaine liberté leur est laissée de sortir de leur prison et de se répandre dans le monde (Ephés, vi, 12), liberté dont ils abusent pour faire à l’homme tout le mal qu’ils peuvent, désireux de l’avoir pour compagnon de leur révolte et de leur misère. A peine était-il créé, qu’ils l’ont fait tomber dans le péché ; et maintenant leur ambition funeste est de le retenir dans ce triste état, ou d’y ramener ceux que la grâce de Dieu en a retirés.

Or l’homme, composé d’un corps et d’une âme, est attaquable à la fois par ces deux parties de son être. C’est à l’âme avant tout et le plus souvent que les démons donnent l’assaut par des tentations de toutes sortes. Mais leur influence pernicieuse peut, en certaines circonstances et avec la permission de Dieu, s’étendre aussi au corps, dont ils s’emparent et prennent en quelque sorte possession. L’homme dont le corps est ainsi livré à l’influence plus ou moins complète des démons s’appelle un démoniaque. Ce nom n’est jamais donné à ceux, sur les organes desquels le démon agit non point par une action physique immédiate, mais seulement d’une manière indirecte, par persuasion et impulsion morale, quelque empire d’ailleurs qu’ils lui donnent sur eux, lors même que, comme les faux prophètes et les antéchrists, ils se feraient ses organes et ses représentants dans le monde.

L’état du démoniaque est un état maladif où l’influence morale des démons et leur influence physique sont combinées d’une manière étrange et difficile à démêler. C’est, le plus souvent, à la suite de certains péchés qu’il a commis, et plus spécialement des péchés de la chair, qu’un ou plusieurs démons ont pris possession du corps de ce malheureux. De là, une surexcitation, un trouble profond du système nerveux, des sens et de leurs organes. De là aussi parfois un développement énorme de force musculaire. Dans quelques-uns, la surdité ou le mutisme sont les seuls phénomènes apparents (Matth. ix, 32 ; xii, 22 ; Marc, ix, 24); mais cette surdité et ce mutisme tiennent à des paralysies nerveuses produites par la présence du démon, non à la destruction des organes de l’ouïe ou de la parole. Le trouble jeté par la présence et l’action du démon dans le système nerveux, dans les sens et leurs organes et, par suite, dans les facultés mixtes comme la sensibilité, la mémoire, l’imagination, a naturellement son contre-coup dans les opérations intellectuelles. L’intelligence n’a plus son jeu normal, régulier. Parfois ses actes sont si désordonnés,si incohérents que le malheureux possédé présente tous les symptômes de l’aliénation mentale. D’autres fois le démon éclaire, remplit son intelligence d’une lumière extraordinaire. C’est ainsi que dans l’Evangile nous voyons plusieurs démoniaques, ou les démons qui sont en eux, reconnaître Jésus pour le Fils de Dieu et lui rendre témoignage. Le démoniaque n’est pas nécessairement un être perverti : il gémit de son état et semble se condamner, et quand il ne peut exercer sur d’autres la fureur qui le consume, on le voit la décharger sur lui-même et se meurtrir misérablement. Aussi souhaite-t-il la guérison et va-t-il, avec une lueur de foi, chercher J.-C. pour être délivré. Mais c’est ici que se découvre la présence d’un hôte etranger dans l’intérieur de l’infortuné. L’homme possédé vient à Jésus pour être guéri, mais ie démon qui le possède ne veut pas lâcher sa proie. Alors, soit que le démon emprunte les organes vocaux de sa victime, soit que le malade perde en quelque sorte la conscience de son existence personnelle et se confonde par moments avec l’esprit impur, c’est le démoniaque qui exprime les pensées du démon. C’est ainsi qu’on voit le même homme, dans le même instant, comme livré à deux forces contraires, chercher Jésus et le repousser, implorer sa compassion par des cris et des gestes suppliants, et lui dire : “Qu’avons nous à faire avec toi?” Toutefois, malgré le trouble que peut apporter dans les opérations de l’âme un pouvoir si étrange sur le corps, le plus souvent la liberté morale n’est pas détruite ; le possédé conserve la force et le pouvoir moral de résister aux assauts et aux suggestions de son ennemi, et, dans la mesure même où lui est laissée la maîtrise de son âme, l’indépendance de sa volonté, il reste devant Dieu responsable de ses mouvements intérieurs, de ses désirs, de ses déterminations. Que si par intervalles le corps dompté par son maître plus puissant échappe à son empire, il n’est plus responsable d’actes extérieurs qu’il n’a pu ni commander ni empêcher. Et si même parfois la perturbation produite dans tout son être est si profonde qu’il perd l’usage même de sa liberté, semblable alors à un homme privé de réflexion et de raison, il devient, aussi longtemps que dure la crise, irresponsable devant Dieu.

Dans les phénomènes du magnétisme animal, et de l’hypnotisme, nous voyons l’hypnotiseur tenir sous sa dépendance absolue le sujet endormi, lui dicter ses propres pensées, etc. La possession est comme un magnétisme satanique, qui s’empare à tel point du corps de l’homme, qu’il en fait son instrument et son organe.

 

On a essayé dans ces derniers temps, de révoquer en doute la réalité des possessions diaboliques. Les Juifs contemporains de J.-C. attribuaient, dit-on, à l’influence des démons de simples cas d’épilepsie ou de crise nerveuse ; les Apôtres partageaient l’erreur commune, et Jésus, accommodant ses actes et son langage à cette superstition populaire, guérissait ces sortes de malades (épileptiques, lunatiques, etc.) en laissant croire qu’il avait chassé de leurs corps un ou plusieurs démons. Cette explication répugne tout à la fois à la véracité du récit évangélique et au caractère divin du Christ. D’ailleurs les Evangélisten montrent à l'occasion qu’ils savaient très bien distinguer une infirmité ordinaire, une maladie naturelle, des terribles effets produits par les anges de Satan. Tout muet, par exemple, n’est pas pour eux un démoniaque, bien qu’ils mentionnent des mutismes qui procèdent de l’esprit mauvais. C’est ce qui résulte encore de ce passage où S. Matthieu (iv, 23) esquissant les actes du ministère de J.-C., distingue, parmi les malades qu’on lui amenait et qu’il guérissait, des démoniaques, des lunatiques (épileptiques) et des paralytiques.

Il est vrai que les livres de l’Ancien Testament ne signalent pas un seul cas de possession diabolique. Mais ces divers écrits, loin de contredire la réalité de ce phénomène, accordent en plusieurs endroits aux puissances infernales des pouvoirs analogues ou même supérieurs à ceux qu’elles manifestent dans la possession. Qu’il nous suffise de rappeler l’action de l’esprit mauvais sur Saül (I Rois xvi, 14-18), l’histoire de Job, celle de Tobie (comp. I Paralip. xxi, Zach. iii, 1-2).

Il est vrai encore que les possédés semblent avoir été beaucoup plus nombreux au temps du Sauveur qu’à aucune autre époque de l’histoire. La dépravation qui avait gagné les Juifs comme les païens avait ouvert aux démons l’entrée des esprits et des corps : ils régnaient vraiment sur le monde. En outre, leur influence ne devait-elle pas paraître avec des caractères particuliers dans ces jours glorieux où Jésus est venu fonder sur la terre le royaume des cieux ; à cette époque d’une lutte terrible et décisive entre le bien et le mal, où tous les contrastes ont éclaté plus vivement, où la puissance du ciel plus magnifiquement déclarée a provoqué un déploiement plus actif de celle de l’enfer, et où les choses du monde invisible ont été des deux côtés rendues visibles pour un moment et manifestées dans la chair? Le baptême et les autres sacrements protègent aujourd’hui, contre cette possession à la fois physique et morale, une multitude de personnes qui vivent en opposition directe avec le titre de chrétien qu’elles ont reçu. Mais a-t-elle complètement disparu? Plus d’un fait d’hystérie et plus d’un cas d’aliénation mentale ne semblent-ils pas difficilement explicables par le seul jeu des causes physiques et ne paraissent-ils pas être le résultat d’une cause supérieure et malfaisante, c’est-à-dire du démon?

DOCTEURS DE LA LOI : voy. Scribes à l’art. Sanhédrin.

FÊTES JUIVES. — En vertu de prescriptions divines conservées dans l’Exode (xxix, 38-42) et le livre des Nombres (xxviii, 3-8), chaque jour, soir et matin, les Israélites faisaient offrir comme sacrifice public l’holocauste d’un agneau. Ainsi reconnaissaient-ils le souverain domaine de Dieu et symbolisaient-ils l’entière donation de leur être au Créateur. A l’holocauste ils joignaient une offrande de fleur de farine et une libation de vin pur. Mais Dieu voulut qu’à ce double holocauste quotidien on ajoutât, à dates fixes, d’autres sacrifices et d’autres oblations. Il prescrivit qu’on l’honorât d’une manière plus spéciale tous les samedis, c’est-à-dire tous les jours de Sabbat ; puis au commencement de chaque mois ; et, durant le cours de l’année, à certaines fêtes destinées à rappeler la mémoire des grands événements de l’histoire d’Israël et à faire monter vers le ciel de plus ferventes actions de grâces.

Voici quel était, au temps de Notre-Seigneur, le cycle complet des fêtes juives. Il comprenait :

1o Le Sabbat et les Néoménies.

2o Les trois grandes solennités de la Pâque, de la Pentecôte et des Tabernacles.

3o Le grand jour de l’Expiation.

4o La fête de Pûrim et celle de la Dédicace.

1. Le Sabbat et les Néoménies.

Le septième jour de chaque semaine était consacré au Seigneur. Il portait le nom de Sabbat, mot hébreu qui signifie “ cessation ”, “ repos ”. La sanctification de ce jour exigeait en effet “ un repos complet ” (Lévit. xxiii, 1), c.-à-d. la complète cessation de travail. Institué en mémoire du repos de Dieu après les six jours de la création, le Sabbat devait se passer dans le repos et la prière. Les Docteurs de la Loi commentant les prescriptions de l’Exode (xx, 8-11 ; xxxi, 13) et du Deutéronome (v, 14) avaient décidé que non seulement la culture des champs, l’exercice d’un métier et les occupations domestiques les plus fatigantes étaient interdites ce jour-là, mais trente-deux espèces de travaux étaient spécialement défendues. Il fallait donc, dès le vendredi, jour “ de la préparation ” avant que, avec le coucher du soleil, commençât le Sabbat, préparer le bois, les aliments, etc., dont on pourrait avoir besoin du vendredi soir au samedi soir.

Certaines pratiques religieuses étaient spéciales au Sabbat. Au sacrifice quotidien du matin et du soir, on ajoutait dans le temple, vers le milieu du jour, l’holocauste de deux agneaux, puis on renouvelait les pains de proposition.

Quant aux particuliers, ils s’assemblaient, suivant l’ordonnance du Lévitique. “ Le septième jour est un sabbat, un repos complet, il y aura une sainte assemblée. ” (Lévit. xxiii, 3). Durant le séjour dans le désert, l’assemblée du peuple, aux jours de Sabbat, eut lieu près du tabernacle. Plus tard on semble d’être réuni ce jour-là dans les diverses localités du pays pour faire des exercices religieux : lecture de la loi, chants, prières. Après l’exil, les synagogues étant fondées, on s’y rassembla pour y prier et pour y entendre la lecture et l’explication des Livres Saints.

2oLes Néoménies ou fêtes de la nouvelle lune.

Au moment où la nouvelle lune était aperçue dans les rayons du soleil couchant, commençait un nouveau mois. On en célébrait l’ouverture par un holocauste extraordinaire, qui avait pour but de reconnaître la puissance et la sagesse de Dieu, le maître absolu des temps et des saisons. On immolait, à cette fin, deux jeunes taureaux, un bélier, sept agneaux d’un an sans tache ni défaut, et l’on offrait six mesures de fleur de farine, ainsi que des libations de vin. On y ajoutait encore un bouc en sacrifice pour le péché (Nomb. xxviii, 11-15).

La Néoménie du 7e mois (Ethanim ou Tischri) était plus solennelle. Elle devait être célébrée par une sainte assemblée, le repos sabbatique, et un troisième holocauste, distinct de l’holocauste perpétuel du matin et du soir, et de l’holocauste spécial prescrit pour toutes les Néoménies (Lévit. xxiii, 23-25 ; Nomb. xix, 1-6). Ainsi le 7e mois était-il plus spécialement consacré à Dieu, non seulement parce qu’il était le septième mois, le mois sabbatique, mais probablement aussi parce qu’il devait assurer à Israël, au grand jour de l’Expiation (10e jour), la rémission de ses péchés, et dans la fête des Tabernacles (du 15 au 22), comme un avant-goût des félicités célestes. Le livre des Nombres (xxix, 1-6) énumère les sacrifices, oblations et libations propres à cette néoménie, qui portait le nom de “ fête des Trompettes ”, parce qu’un “ rappel à son de cor ” en annonçait au peuple le commencement (voy. encore Lévit. xxiii, 24-25).

Avec le sabbat et les néoménies, la loi de Moïse ordonna de célébrer aussi l’année sabbatique, qui revenait tous les sept ans (Lévit. xxv, 1-8) et l’année jubilaire ou grand jubilé de la cinquantième année (Lévit. xxv, 9-34). Durant l’année sabbatique on devait laisser la terre se reposer, et abandonner aux pauvres les produits spontanés du sol, qui devenaient le bien commun de tous. Par cette institution Dieu voulait non seulement accorder à la terre et à son peuple une année de repos, mais aussi et surtout apprendre à la communauté d’Israël que la terre appartient avant tout à son Créateur et qu’elle doit participer à son saint repos. Cet enseignement de la sanctification de toute la terre comme propriété de son Créateur est donné plus clairement encore dans l’année jubilaire. Durant cette année, qui succédait immédiatement à la septième année du cycle sabbatique et par conséquent à la quarante-neuvième du cycle jubilaire, non seulement la terre devait être laissée en repos, mais les esclaves étaient affranchis, les débiteurs qui avaient été vendus redevenaient libres, les propriétaires des maisons et des champs situés hors des villes murées rentraient en possession de leurs biens, nonobstant toute vente ou cession, mais moyennant indemnité, s’il y avait lieu. Ainsi ni les riches ne pouvaient accroître indéfiniment leurs possessions au détriment des pauvres, ni les esclaves ne pouvaient se multiplier sans mesure.

 

II. Les trois grandes solennités de la Pâque, de la Pentecôte et des Tabernacles.

Dans le livre de l’Alliance (Exod. xxiii, 14 sv. ; Comp. Exod. xxxiv, 18-26 ; Deut. xvi, 1-17). Dieu dit au peuple d’Israël par l’intermédiaire de Moïse : “ Trois fois chaque année tu célébreras une fête en mon honneur. Tu observeras la fête des azymes… ”, etc. De la promulgation de cette loi qui avait pour but de célébrer la mémoire des faits merveilleux qui avaient élevé le peuple d’Israël à la dignité de peuple de Dieu, datent les trois grandes fêtes annuelles qui obligeaient tous les Israélites mâles, âgés d’au moins douze ans, à se rendre au sanctuaire national de Yahweh, (d’abord au tabernacle, plus tard au temple), ce qui les fit plus tard nommer par les Rabbins, fêtes de pèlerinage.

1. — La Pâque ou fête des Azymes. La plus grande de toutes les solennités était la fête de la Pâque. Dieu l’institua pour que, chaque année, elle rappelât le souvenir du passage (pésach en hébreu; πάσχα en grec) de l’Ange exterminateur et de la sortie d’Egypte (Exod. xii, 1-27). Elle se célébrait à date fixe, du 15 au 21 Nisan. En réalité, elle s’ouvrait le 14 au soir, la journée, chez les Juifs, commençant au coucher du soleil. Les sept jours durant lesquels elle se prolongeait étaient appelés les jours ” des Azymes " c’est-à-dire des pains sans levain, parce qu’il était défendu pendant cette octave sainte de manger du pain fermenté. La fête s’ouvrait par le festin pascal (voir cène pascale). Le premier et le dernier jour étaient les plus solennels : on devait s’y réunir pour des exercices religieux lecture de la loi, chants, prières, “ vous aurez une sainte assemblée ”, et s’abstenir de tout travail (Exod. xii, 16 ; Lévit. xxiii, 7-8). le second jour, c’est-à-dire, le 16 Nisan, on offrait la première gerbe de la moisson, dont on sanctifiait ainsi l’ouverture (Lévit. xxiii, 10). Tous les jours de l’octave on offrait des sacrifices “ faits par le feu ” (Lévit. xxiii, 8).

2. — La Pentecôte ou fête des Semaines, fête de la moisson. Elle se célébrait le 7 du mois de Sivân, le cinquantième (ἡ πεντηκοστὴ) jour après le 16 Nisan. (Lévit. xxiii, 15). De là le nom de Pentecôte sous lequel elle est désignée dans le Nouveau Testament (Act. ii, 1). Le Pentateuque l’appelle fête des Semaines parce qu’elle se célébrait sept semaines après la Pâque (Exod. xxxiv, 22 ; Lévit. xxiii, 15 ; Deut, xvi, 16), ou encore fête de la Moisson (Exod. xxiii, 16), parce que le but de son institution était de faire rendre grâces a Dieu pour les premiers fruits de la moisson, pour la récolte d’orge et de froment que l’on venait d'achever. Elle s’appelait aussi fête des Prémices (Lévit. xxiii, 15 sv.) parce qu’on offrait ce jour-là les premiers pains faits avec le blé nouveau. Cette fête ne durait qu’un jour. On offrait un holocauste, un sacrifice pacifique, un sacrifice pour le péché, des oblations et des libations (voy. Lévit. xxiii, 15-21).

3. La fête des Tabernacles. Elle se célébrait en automne, du 15 au 22 Tischri (7e mois). Elle avait été instituée pour rappeler le voyage des Israélites à travers le désert durant quarante ans et la protection dont le Seigneur les avait couverts alors qu’ils n’avaient pour abri que des tentes. C’était en même temps la fête de la récolte ; à ce titre, elle servait à remercier Dieu des derniers produits de la moisson, des raisins, grenades, olives, etc., que l’on venait de vendanger (voy. Lévit. xxiii, 33-44 ; comp. Exod. xxiii, 16 ; Nomb. xxix, 12-39 ; Néhém. viii, 14-18).

La fête durait une semaine entière, pendant laquelle les enfants d’Israël devaient habiter, en souvenir de la vie nomade du désert, sous des huttes de feuillage, sous des tabernacles ou tentes faites de branches d’arbre. Chacune des huit journées était remplie par des réjouissances et des cérémonies religieuses. Dans le Temple, aux oblations volontaires, on ajoutait de nombreux sacrifices (Nomb. xxix, 12-39), on faisait à l’autel des libations de vin, et des libations d’eau puisée à la fontaine de Siloé ; de plus, suivant les Talmudistes, le soir on allumait deux candélabres dans le parvis des femmes, et l’on exécutait unedansesacrée.

Comme pour la Pâque, le premier et le dernier jour étaient très solennels. Rigoureusement parlant, la fête des Tabernacles ne durait que sept jours, comme la Pâque, mais elle était immédiatement suivie d’un huitième jour de fête, qui servait de clôture solennelle au cycle des trois grandes fêtes de pèlerinage (Lévit. xxiii, 36). S. Jean (xii, 37) appelle ce huitième jour “ le grand jour ”. C’est durant cette fête où l’on allumait les deux grands candélabres dans le parvis des femmes et où l’on répandait sur l’autel des holocaustes de l’eau puisée à la fontaine de Siloé, que N.-S., prenant sans doute occasion de ces rites et de ces cérémonies, prononça ces paroles : “ Je suis la lumière du monde. ” (Jean, viii, 12).

 

III. Le grand jour de l’Expiation (Yôm Kippûr).

Au 10 du mois Tischri (7e mois, Septembre-Octobre), c’est-à-dire cinq jours avant la fête des Tabernacles, était fixé le grand jour de l’Expiation. Le Lévitique (xvi, 29 sv.) nous apprend que Dieu institua une fête annuelle pour une expiation solennelle embrassant toutes les souillures qui, ayant échappé à l’attention, dans le cours de l’année, n’auraient pas encore été expiées. Le même chapitre du Lévitique nous raconte en détail toutes les fonctions liturgiques spéciales à ce jour. C’est le grand prêtre lui-même qui devait les remplir, et, ce jour-là seulement, il pouvait entrer dans le Saint des Saints. Il commençait par offrir en holocauste un jeune taureau pour l’expiation de ses péchés et ceux de sa maison, et un bouc offert par le peuple pour l’expiation des péchés de la communauté d’Israël. Puis avec le sang du taureau et du bouc qui venaient d’être immolés il faisait sept aspersions pour purifier “ des souillures des enfants d’Israël ” (vers. 16) le Saint des Saints ou Sanctuaire, le Saint ou tente de réunion, et l’autel des holocaustes. Enfin, posant ses deux mains sur la tête d’un second bouc offert par le peuple, il le chargeait de tous les léchés de la nation et le chassait ensuite dans le désert, pour rappeler aux Israélites, par ce symbole, combien ils devaient s’éloigner du péché.

Quant au peuple, il devait ce jour-là, s’abstenir de tout travail et depuis le 9 au soir jusqu’au soir du 10 “ affliger son âme ", c’est-à-dire s’abstenir de toute nourriture (voy. Lévit. xxiii, 32). Ce jeune du jour de l’Expiation était le seul prescrit par la loi mosaïque : c’était le jeune (Act. xxvii, 9). Il avait pour but de faire comprendre au peuple qu’il devait assister avec des sentiments de pénitence aux cérémonies de la grande expiation. — Pendant et après l’exil quatre autres jeunes furent institués en souvenir des principaux faits de la destruction de Jérusalem, le 1er du 4e mois, anniversaire du jour où une brèche avait été faite aux murailles de Jérusalem et où le roi Sédécias avait été fait captif (Zach. viii, 19 ; Jérém. xxxix, 2) ; le 10 du 5e mois, où la ville sainte et le temple furent brûlés (Zach. vii, 3, 5) ; le 3 du 7e mois, en mémoire du meurtre du gouverneur Godolias (Zach. vii, 5 ; viii, 19, II (IV) Rois xxv, 25) ; Jérém. xli) ; enfin le 10 du 10e mois, jour où avait commencé le siège de Jérusalem (Zach. viii, 19 ; II (IV) Rois (xxvi, 1 ; Jérém. xxxix, 1). — Un autre jeûne avait été institué par Mardochée et Esther, ainsi qu’on le verra dans le paragraphe suivant.

 

IV. La fête de Pûrim et celle de la Dédicace.

1. La fête de Pûrim ou “ des Sorts ”, appelée aussi “ le jour de Mardochée ” (II Mach. xv, 37), avait lieu le 14 du dernier mois (Adâr, Février-Mars), en souvenir de la délivrance que Mardochée et Esther procurèrent aux Juifs, captifs en Perse, sous Assuérus. Cette fête fut instituée par ordonnance de Mardochée et d’Esther. Elle reçut le nom des Sorts parce que le sort avait déterminé le jour marqué dans l’édit d’Aman pour l’extermination des Juifs. D’après les derniers versets (29-32) du deuxième chapitre du livre d’Esther, il semble qu’aux rites proposés par Mardochée pour cette fête, les Juifs dispersés dans les 127 provinces d’Assuérus, ajoutèrent un jour de jeûne et de lamentations qu’Esther et Mardochée approuvèrent et qui fut placé la veille de la fête, le 13 Adâr (voy. Esther ix, 17-32).

2. La fête de la Dédicace, ou encore la fête du Feu. Le 25 du 9e mois, appelé Kisleu (Novembre-Décembre) avait lieu la fête de la Dédicace. Lorsque Judas Machabée eut triomphé d’Antiochus Epiphane, purifié le temple et rétabli le culte, il institua en mémoire de ce triomphe et de cette restauration la fête des Encénies (εν-καίνια) c’est-à-dire de la Rénovation (I Mach. iv, 52-59 ; II Mach. i, 18 ; x, 5-8). Cette fête durait huit jours, elle devait se célébrer “ avec joie et allégresse, à la manière de celle des Tabernacles ”. La joie et l’allégresse se manifestaient donc probablement aussi par l’érection de huttes ou tentes de feuillages. — Josèphe appelle cette solennité fête des lumières (Antiq. vii, 6, 7). Du second livre des Machabées (i, 18), il ressort que lorsque Dieu, pour récompenser le zèle de Néhémie, permit le merveilleux renouvellement du feu sacré, cette faveur fut l’objet d’une fête annuelle que les Juifs de Palestine célébraient en même temps que celle de la purification du Temple.

FILS DE L’HOMME, c’est l’un des noms du Messie dans le Nouveau Testament. Ni le peuple, ni les Apôtres ne donnent à Notre-Seigneur ce titre (voy. pourtant Act. vii, 56), mais dans l’Evangile on a pu relever quatre-vingt-deux passages où Notre-Seigneur se désigne lui-même par cette appellation (p. ex. Matth. viii, 20 ; xix, 28, et surtout xxvi, 64). Quoique, prise en elle-même et isolément, cette formule n’ait rien de caractéristique et figure d’ordinaire dans l’Ancien Testament comme une simple locution biblique, un peu plus solennelle si l’on veut, qui désigne un homme quelconque, quelquefois un prophète ; au chapitre viie de Daniel (vers. 13), elle sert à désigner le Messie. Dans ce passage, en effet, apparaît au milieu des esprits célestes un personnage humain qui se présente devant Yahweh, reçoit de lui le pouvoir et les insignes d’une éternelle domination sur tout l’univers, et dès lors est suffisamment désigné comme le Messie, le futur Dominateur de l’univers. C’est ainsi d’ailleurs que les docteurs jjùifs contemporains de N.-S. entendirent ce. passage de Daniel. Et le Sauveur lui-même aima à se l’appliquer pour se désigner par là comme l’homme parfait, le représentant de l’humanité dégénérée, et se signaler aux esprits attentifs comme le Libérateur attendu.

FRÈRES DE JÉSUS. — Il est fait souvent mention dans les Evangiles, les Actes et les Epîtres des Freres de Jésus. Nous les voyons nommés dans les Evangiles comme un groupe de personnages très rapprochés de J.-C. par des liens de famille (Matth. xiii, 55 ; Marc, vi, 3). Ils accompagnent sa sainte Mère (Matth. xii, 46 ; Marc, iii, 31 ; Luc, vii, 19 ; Jean, ii. 12), etc. Aux temps apostoliques, nous les retrouvons parmi les fidèles, formant un groupe spécial dont on parle avec un respect particulier. Les noms de ces frères de N.-S. sont d’après S. Matthieu et S. Marc : Jacques, José ou Joseph, Judas ou Jude, et Simon ou Siméon.

Il ne faut pas songer, dans tous ces passages, à des frères proprement dits.

1. Il n’est presque pas de fait aussi souvent et aussi énergiquement affirmé par la tradition, que celui de la virginité permanente de Marie, laquelle, après avoir miraculeusement conçu et mis au monde Jésus, n’eut pas d’autres enfants.

2. Le nom même de frères ne démontre rien ici ; car ach en hébreu, et ἀδελφός dans les Septante, ont un sens très étendu et ne désignent souvent qu’un parent en général : c’est ainsi que Lot est nommé frère d’Abraham, dont il n’est que le neveu (voy. Gen. xiii, 8 ; xiv, 16 ; xxix, 12).

3. Si les frères de Jésus l’avaient été dans le sens naturel de ce mot en français, il serait très singulier que jamais Marie n’eût été appelée leur mère ; or, on ne voit dans le Nouveau Testament comme fils de Marie que Jésus, et c’est précisément par opposition avec ceux qui sont appelés ses frères qu’il est désigné comme Fils de Marie (Marc, vi, 3). Il serait tout à fait inconcevable, en outre, que Jésus, du haut de la croix, eût recommandé sa mère à S. Jean, si elle avait eu d’autres fils ; c’eût été alors le devoir naturel de ceux-ci de la recueillir, et ils n’y auraient certes pas manqué. La manière même dont Jésus recommanda alors sa mère à S. Jean indique qu’il était le fils unique de Marie, car il dit : ιδε ὁ υἱός σου : l’article eût été omis si Marie avait eu encore d’autres enfants.

4. Quant à cette circonstance que les frères de Jésus sont mentionnés d’ordinaire à côté de sa mère, soit dans les Evangiles, soit dans les Actes (Matth. xii, 46 ; Marc, iii, 31 ; Luc, viii, 19 ; Jean, ii, 12 ; Act.' i, 14), elle s’explique naturellement par les relations étroites qui existaient entre les deux familles. Après la mort de S. Joseph, arrivée selon toute vraisemblance avant le commencement de la vie publique du Sauveur, Marie se retira, semble-t-il, avec son divin Fils, chez son beau-frère Cléophas, de telle sorte que les deux familles furent comme fondues en une seule. Selon d’autres, c’est Cléophas qui serait mort le premier et S. Joseph qui aurait recueilli chez lui la veuve et les enfants de son frère.

Mais ce qui prouve d’une manière péremptoire que les frères de Jésus n’étaient pas les fils de la mère de Jésus, c’est qu’ils avaient une autre mère, dont l’Evangile fait une mention expresse. Parmi les femmes présentes au crucifiement, S. Matthieu (xxviii, 36) cite une Marie, mère de Jacques et de Joseph ; S. Marc (xv, 40) ajoute que ce Jacques, qu’il appelle le petit ou le mineur, est différent de Jacques, fils de Zébédée. Comme il ne paraît en général, dans le Nouveau Testament, que deux personnages du nom de Jacques, il faut que le premier soit celui que S. Paul nomme le frère du Seigneur (Gal. I, 19), celui à qui sa position comme premier évêque de Jérusalem donnait alors une grande autorité, l’auteur enfin de l’épître admise dans le canon. Ensuite S. Jude, au commencement de son épître, se nomme le frère de ce Jacques. On trouve donc dans le Nouveau Testament, pour trois des frères du Seigneur, Jacques, Joseph, Jude, une Marie qui est leur mère et qui est différente de la mère de Jésus. Cette Marie est sans aucun doute identique avec la Marie nommée par S. Jean (xix, 25), la femme de Cléophas et la sœur de la mère du Seigneur. Cléophas, ou, suivant une autre forme du même nom, Alphée, était par conséquent le père de Jacques, de Joseph et de Jude ; et en effet, Jacques est souvent nommé le fils d’Alphée (Matth. x, 3 ; Marc, iii, 18 ; Luc, vi, 15). Quant à Simon, il est expressément désigné comme fils de Cléophas par Hégésippe, le plus ancien historien de l’Eglise. Les quatre frères de Jésus seraient donc des cousins du Seigneur du côté de sa mère. Ceux qui objectent que deux sœurs vivantes n’ont pu toutes deux porter le nom de Marie, font preuve d’une faible connaissance des usages de l’antiquité. Pour ne prendre qu’un exemple parmi beaucoup d’autres, Octavie la sœur ce l’empereur Auguste, avait quatre filles qui vécurent ensemble ; deux d’entre elles se nommaient, sans autre surnom, Marcella, et les deux autres Antonia. On sait d’ailleurs que le nom de Marie était d’un usage très fréquent en Galilée.

On peut encore, si on le préfère, — car cette opinion s’accorde également bien avec la tradition, — faire de Cléophas le frère de S. Joseph, et de Marie, sa femme, la belle-sœur (seulement) de la Sainte Vierge. Et, en effet, on a tout lieu de croire que Notre-Dame était fille unique, unique héritière. C’est cause de cette circonstance qu’elle dut prendre un époux, et le prendre dans sa parenté. Dans ce cas, les frères de Jésus (patrueles, c.-à-d. les fils du frère de son père putatif ou légal), seraient ses cousins du côté paternel.

L’opinion de quelques Pères grecs, que les frères de Jésus étaient des fils de S. Joseph, nés d’un premier mariage, ne s’appuie sur aucune preuve traditionnelle : c’est une pure conjecture, due à la difficulté qu’ils trouvaient à accorder ensemble la perpétuelle virginité de Marie et la mention des frères de Jésus. Ne connaissant pas les diverses acceptions du mot frère dans les langues sémitiques, ils crurent, semble-t-il, qu’il fallait l’entendre au moins de frères de lit différent.

Le tableau suivant met sous les yeux la véritable relation des Frères de Jésus avec le Sauveur :

  I.
  Héli (Luc, iii, 23).
Cléophas — Marie La Ste Vierge Marie — Joseph
       
N.-S. J.-C.
Jacques, ap. — Joseph,
1er év. de Jérusalem.
Jude. — Siméon,
2e év. de Jérusalem.

Il paraît difficile d’identifier Alphée et Clopas comme deux transcriptions du même nom araméen. On pourrait, il est vrai, prendre le premier nom comme la transcription même du nom araméen et Clopas (Cleopas) comme le nom grec du même personnage. Cependant il semble plus juste de voir dans Alphée et Clopas deux personnages distincts. En suivant Hégésippe (Eusèbe, Hist. III, xxxii) Clopas serait le frère de Joseph ; Marie serait sa sœur et aurait épousé Alphée. On aurait la généalogie suivante :

  Héli (Luc, iii, 23).
Clopas Marie (femme d’Alphée) Joseph — La Vierge-Marie
       
   
Jude. — Siméon Jacques. — José N.-S J.-C.

Voir P. Calmes, L'Évangile selon S. Jean. p. 175 ; A. Durand, Les frères du Seigneur dans le Dictionnaire apologétique de A. d’Alès, t. II, col. 131-148.

GALATIE. — Ce nom se prend en deux sens et désigné ou la Galatie proprement dite ou la province romaine de Galatie. La Galatie proprement dite était une région du centre de l’Asie mineure, où des tribus Celtes (Gauloises), venues de la Gaule, firent invasion et se fixèrent vers l’an 300 av. J.-C. En 189 de l’ére chrétienne elles furent soumises aux Romains, mais gardèrent leur gouvernement particulier. Après la mort d’Amyntas, leur dernier roi, en l’an 25, la Galatie fut réduite en province romaine. Les conquêtes de Déjotare et d’Amyntas avaient considérablement agrandi le royaume primitif et y avaient ajouté en tout ou en partie les contrées de Lycaonie, de Pisidie, d’Isaurie, de Phrygie orientale ou montagneuse. La province romaine eut à peu près la même étendue (Strabon, XII, vi, 1). Elle relevait de l’empereur et avait par conséquent à sa tête un légat propréteur qui résidait à Ancyre.

Les commentateurs de l’Epître aux Galates se sont demandé si les destinataires étaient les habitants de la Galatie proprement dite ou ceux de la province romaine. Cette dernière opinion est maintenant assez généralement adoptée. S. Paul écrirait aux chrétientés d’Antioche de Pisidie, d’Iconium, de Lystres, de Derbé, villes de Lycaonie et de Phrygie comprises dans la province romaine de Galatie, et qu’il évangélisa à son premier voyage apostolique (Act. xiii-xiv). En effet la Galatie dont il est question dans son Epître est un pays où il séjourna longtemps, qu’il avait parcouru deux fois avant d’écrire sa lettre (Gal. iv, 13). L’évangélisation des provinces méridionales de la Galatie romaine dura trois ans environ, 46-48, d’abord au milieu de nombreuses persécutions et souffrances, per infirmitatem carnis (Gal. iv, 13), et ensuite avec plus de facilités à son retour, où il confirme ces chrétiens dans la foi (Act. xiv, 20-21). De plus les Eglises doivent être d’un accès facile et prompt, pour les prédicateurs venant d’Antioche de Syrie. Ces conditions se vérifient difficilement pour la Galatie proprement dite, à laquelle beaucoup de commentateurs appliquent l’expression de S. Luc, Galatica regio (Act. xvi, 6 ; xviii, 23). Du reste la marche naturelle de l’Apôtre à sa seconde et à sa troisième mission, le sens précis du verbe διῆλθον, traverser de part en part, (Act. xvi, 6) s’opposent à une pointe poussée jusqu’à Ancyre dans la Galatie proprement dite. La Galatica regio de S. Luc ne désigne pas autre chose que les contrées méridionales ajoutées à la Galatie primitive pour former la province romaine. Enfin s’il s’agissait de la Galatie proprement dite, dans l’hypothèse où il l’aurait visitée à sa seconde et à sa troisième mission, la lettre de S. Paul aurait été écrite après le Concile de Jérusalem : on ne peut alors s’expliquer pourquoi l’Apôtre ne fait nulle mention des décisions de ce Concile qui étaient un argument péremptoire pour convaincre les Galates ébranlés par les prétentions des judaïsants. Qu’il s’agisse au contraire de la Galatie romaine, cette difficulté disparaît, puisque la lettre de S. Paul a été écrite avant le Concile. Il est plus facile aussi d’expliquer l’incident d’Antioche, relaté dans l’Epître ii, 11, puisqu’il précède également le Concile ; et il n’est plus nécessaire de chercher avec beaucoup de subtilité à accorder la Conférence dont parle le ch. n de l’Epître avec le récit du Concile de Jérusalem par S. Luc (Act. xv), puisque ce sont deux faits différents, la conférence du second voyage de S. Paul à Jérusalem correspondant à Act. xi, 29-30 et xii, 25,

GALILÉE : voy. Palestine.

GÉHENNE. — C’était primitivement le nom d’une gracieuse vallée au sud-est de Jérusalem, appelée Ghê Hinnom, Val de Hinnom (Jos. xv, 8), où, à partir du temps de Salomon, les Israélites immolèrent des enfants à Moloch. Mais, après le retour de la captivité, revenus à de meilleurs sentiments, ils eurent tellement en abomination le lieu qui avait été le théâtre de ce culte impie et barbare, qu’ils en firent une voirie, et y jetèrent les cadavres et les immondices. Comme il fallait, pour consumer tout cela, y entretenir un feu perpétuel, la vallée fut nommée Géhenne du feu ou ardente ; de là naquit une autre acception de ce mot en usage au temps de N.-S. : véritable image de l’enfer, la Géhenne servit à désigner lé lieu de l’éternelle damnation.

GÉNÉALOGIE DE JÉSUS-CHRIST. — En comparant la généalogie de N.-S. rapportée par S. Luc (iii, 23-38) avec celle que donne S. Matthieu (i, 1-17), on voit qu’elles diffèrent beaucoup, et, en particulier, qu’elles n’ont presque rien de commun de Jésus à David. D’où viennent ces divergences? Il y a deux manières de résoudre la difficulté.

1. Les uns pensent que nous avons da s S. Matthieu la généalogie officielle de N.-S. c.-à-d. celle de Joseph, père putatif de Jésus, et dans S. Luc la généalogie réelle, c.-à-d. celle de Marie. S’il n’est pas fait mention de Marie elle-même Luc, iii, 23, et si son époux Joseph est cité comme le fils d’Héli ou Joachim, père de cette Vierge bénie, c’est un effet de l’usage reçu parmi les Juifs et chez les autres peuples de l’Orient. D'après cet usage, les hommes qui épousaient des filles héritières, c’est le cas de Marie, étaient portés sur les tables généalogiques comme les vrais fils de leurs beaux-pères. Les partisans de cette opinion, rejetant ici la version de la Vulgate, traduisent le grec : Or Jésus avait environ trente ans lorsqu'il commença son ministère, étant (tandis qu'on le croyait fils de Joseph) fils d’Héli, fils de Mathat, etc., le mot fils, qui est sous-entendu en grec, se rapportant toujours à Jésus, parce qu’en hébreu, on est fils de son ascendant à quelque degré que ce soit [1]. Le Talmud reconnaît aussi que la généalogie de S. Luc est celle de J.-C. par sa mère ; car, dans les blasphèmes qu’il ose proférer contre la mère de Jésus, il appelle Marie, fille d’Hêli. Que si la tradition chrétienne donne au père de Marie le nom de Joachim, il n’y a point en cela de contradiction ; car chez les Juifs les noms d’Héli, d’Héliakim ou Eliakim et de Joachim sont synonymes et se mettent facilement l’un pour l’autre.

2. Toutefois Marie pouvait descendre de David, sans qu’il fût pour cela nécessaire de rapporter, contre un usage presque constant, sa généalogie particulière. Il suffisait qu’il fût établi qu’elle était parente de Joseph, pour que la généalogie de ce dernier s’appliquât à elle comme à lui. Or cette parenté, que l’Evangile suppose sans l’exprimer, est établie par les témoignages les plus certains de l’antiquité. Les deux généalogies sont donc, selon toute apparence, celles de Joseph, et on leur trouve, même dans la période que nous avons marquée, une fraction commune : Zorobabel, fils de Salathiel. Mais, pour deux noms pareils, que de noms différents! Ce Salathiel des deux listes, qui n’a dans chacune d’elles qu’un même fils, Zorobabel a deux pères ; en S. Matthieu, Jéchonias ; en S. Luc, Néri ; et les deux branches remontent par deux tiges entièrement séparées jusqu’à David, comme de Zorobabel elles descendent en deux lignes tout à fait distinctes jusqu’à Joseph, qui, lui aussi, a deux pères. Comment expliquer cela? —- Par la loi même des Juifs. Il existait chez les Juifs une coutume sanctionnée par la loi de Moïse, qui voulait que, si un homme mourait sans laisser d’enfant, son plus proche parent épousât sa veuve pour lui susciter une postérité, et l’enfant qui naissait du mariage, fils naturel du second mari, était fils légal du premier. C’est la loi du lévirat, telle qu’on la voit réglée dans le Deutéronome (xxv, 5-10), et mise en pratique dans l’histoire de Ruth (iv, 7). Des deux pères donnés à Joseph, et avant lui à Salathiel, l’un est le père naturel, l’autre le père légal ; et les deux évangélistes, selon qu’ils ont pris l’un ou l’autre, ont été amenés à donner deux séries différentes : de Joseph, par Jacob ou par Héli, à Zorobabel, fils de Salathiel ; et de Salathiel, par Jéchonias ou par Néri, à David.

II.
David
   
     
Salomon   Nathan
     
Jéchonias (sans enfants).
père légal ou adoptif de
  Néri
père naturel de
     
   
Salathiel
   
Zorobabel
   
     
Abiud   Rhésa
     
Jacob
père légal de
  Héli
père naturel de
     
   
S. Joseph.

Il ne s’agit plus que de savoir (mais cela ne touche pas à la véracité des deux évangélistes) lequel a suivi l’ordre légal, lequel l’ordre naturel, et pourquoi ils ne se sont pas accordés dans le même système. Sur ce dernier point, on pourrait dire qu’ils ne l’ont pas fait précisément pour donner la généalogie du Sauveur sous ses deux aspects différents. La parenté légale était celle qu’on observait dans les actes publics ; mais il importait de montrer que J.-C. était, de par sa nature, et non pas seulement par une action légale, du sang de David, et c’est sans doute ce que S. Matthieu a voulu expressément marquer par le mot engendra. S. Luc se sert d’un terme plus vague et plus général.

Quelques interprètes modernes, tout en admettant encore que les deux généalogies sont de S. Joseph, partent d’une autre idée pour en expliquer les divergences. S. Matthieu, disent-ils, se préoccupe d'établir les droits de Jésus à la royauté d’Israël ; par conséquent la descendance qu’il cherche pour Jésus est celle qui fait de lui l’héritier légitime du trône de David ; S. Luc, au contraire, ne songe qu’à la descendance naturelle. Or, la branche aînée, issue de David par Salomon, s’étant éteinte dans la personne de Jéchonias, on suppose que ce prince adopta pour son successeur Salathiel, fils de Néri, de la branche cadette. Plus tard, nouvelle extinction de la branche aînée, ou d’Abiud, dans la personne de Jacob, et nouvelle transmission des droits royaux à la branche cadette, ou de Rhésa, sur la tête de Joseph, mais cette fois par le mariage léviratique d’Héli avec la veuve de Jacob.

Ce système de conciliation diffère peu du précédent. Le tableau placé en regard mettra sous les yeux le système qui nous paraît le meilleur, celui qui fait de Jacob le père légal et d’Héli le père naturel de S. Joseph.

GÊNÉSARETH, plaine à l’ouest du lac de ce nom : voy. Tibériade (mer de). Arrosée par une rivière et plusieurs sources, elle formait comme un jardin fleuri ; le Talmud l’appelle « le paradis de la terre ». Dans son abandon actuel, elle donne encore des signes de son ancienne fécondité : les fleurs la couvrent au printemps ; des bosquets de lauriers-roses ombragent ses ruisseaux, et les chardons y deviennent des taillis où le voyageur se fraie difficilement une route.

GETHSÉMANI (c.-à-d. pressoir d'huile), jardin situé à l’E. du Cédron (Jean, xviii, 1), au pied du mont des Oliviers (Luc, xxii, 39), et ainsi appelé sans doute à cause d’un pressoir qui s’y trouvait pour écraser les olives au temps de la récolte. N. S. y venait fréquemment avec ses disciples (Jean, xviii, 2). Il appartient aujourd’hui aux PP. Franciscains, qui l’ont entouré de murs. On y admire sept oliviers énormes, aux troncs noueux, au feuillage rare, qui pourraient bien être contemporains de J.-C. ou des rejetons immédiats de ceux qui furent témoins de l’agonie du Sauveur. Ce qui est certain c’est que, n’ayant jamais été soumis à l’impôt, ils sont antérieurs à la conquête musulmane.

HÉRODE (Famille d’), famille d’origine iduméenne qui, depuis la conquête de l’Idumée par Alexandre Jannée (105 av. J.-C.), était entrée en fréquentes relations avec les Asmonéens (Machabéens), et avait conçu le plan ambitieux de profiter de leur faiblesse et de leur désunion pour s’emparer de la Palestine. Voici les membres de cette famille dont il est question dans les Evangiles.

1oHérode l’Ancien, surnommé le Grand, et bien plus digne du nom de tyran exécrable, était fils d’Antipater. L’an de Rome 714, un décret du sénat le nomma roi de Judée, au détriment de tous les Asmonéens. Ce ne fut qu’à la fin de l’année 716 qu’il parvint à se rendre maître de Jérusalem ; Antigone, son rival, eut la tête tranchée, et Hérode, paisible possesseur du pays, commença véritablement son règne l’an 717. Après une longue vie, troublée par beaucoup de crimes et d’amers remords, ce prince astucieux et cruel mourut sans être regretté de personne, à la suite d’une affreuse maladie, peu avant Pâques, au moment d’une éclipse de lune (l’an 750 de Rome). Il avait régné 34 ans depuis la mort d’Antigone, 37 depuis le décret du sénat. C’est à lui qu’est attribué le massacre des Saints Innocents.

2oArchélaus, fils d’Hérode l’Ancien et de la Samaritaine Malthace, ethnarque, improprement roi de Judée, à la mort de son père, l’an 750 de Rome. Cet homme faible et sans caractère, parfois violent, régna en Judée et en Samarie pendant dix ans. Il fut déposé par Auguste l’an 759 de Rome. Après sa mort, la Judée fut définitivement rattachée à la province de Syrie et gouvernée par des procurateurs romains. L’un d’eux fut Ponce-Pilate (26-37). Après la disgrâce et l’exil de Ponce-Pilate à Vienne, en Gaule, Caligula confia le gouvernement de la Judée, avec le titre de roi, à Hérode Agrippa I, petit-fils d’Hérode le Grand.

3oHérode Antipas, ou le Tétrarque, fils d’Hérode l’Ancien et de Malthace, fut tétrarque de la Galilée et de la Pérée pendant toute la vie de N.-S. C’était un prince paresseux et nul, favori et adulateur de Tibère, en l’honneur duquel il appela Tibériade une ville qu’il avait fait bâtir sur le lac de Génésareth. Marié à une fille d’Arétas, roi d’Arabie, il s’éprit d’Hérodiade, femme de son demi-frère Philippe, et contracta avec elle un mariage secret. Jean-Baptiste ayant reproché à Antipas cet inceste, fut emprisonné par ses ordres dans la forteresse de Machéronte, et mis à mort sur la demande d’Hérodiade (Matth. xiv, 3 sv. ; Marc, vi, 14 sv. ; Luc, iii, 19 ; ix, 7-9). Hérode se trouvait à Jérusalem au temps de la Passion, et Pilate lui renvoya Jésus comme son sujet. Mais n’ayant pu en obtenir ni un miracle, ni même une réponse, il le fit revêtir d’une robe blanche par dérision, et reconduire au procurateur. Antipas fut exilé par Caligula à Lyon, où Hérodiade l’accompagna ; d’après Josèphe, il mourut en Espagne.

4oPhilippe, fils d’Hérode l’Ancien et de Cléopâtre, tétrarque de la Gaulonitide, de la Trachunitide et de l’Iturée, sur les terres duquel Jésus fit de fréquents voyages ; il se montra meilleur souverain que ses frères.

Famille d’Hérode le Grand
d’après les indications de Joséphe[2]
Antipas ou Antipater, prince d’Idumée, marie à Cypros, 43 av. J.-C.
   
  Phasael,
tué dans la guerre de Parthes (40 av. J.-C.)
  Hérode le Grand,
4 av. J.-C.
marié avec dix femmes, nommément avec
Joseph
38 av. J.-C.
Phéroras
5 av. J.-C.
Salomé
vers 10 av. J.-C.
Épouses d’Hérode : Doris. Mariamne, l’Asmonénne. Mariamne, fille du grand prêtre Simon Malthace, samaritaine. Cléopâtre
               
   
Fils d’Hérode : Antipater,
Hérode le fit mourir cinq jours avant sa propre mort
(4 av. J.-C.)
Alexandre et Aristobule,
tous deux tués après les ordres d’Hérode
(av. J.-C.)
Hérode-Philippe,
premier mari d’Hérodiade
Archelaüs,
tétrarque de la Judée, de la Samarie et de l’Idumée.
Hérode Antipas,
tétrarque de la Galiée et de la Perée, épouse Hérodiade
Philippe,
tétrarque de l’Iturée et de la Trachonitide
34 ap. J.-C.
 
Petits-enfants d’Hérode : Agrippa I.
44 ap. J.-C.
Hérode
roi de Chalcis
Hérodiade
épouse d’Hérode-Philippe puis d’Antipas
Salomé,
fille d’Hérodiade, épouse de Philippe le Tétrarque, puis d’Aristobule, fils du roi de Chalcis.
       
Aristobule
   
Arrière-petits-enfants d’Hérode : Agrippa II. et Drusille. Bérénice II.
Mariamne 100 ap. J.-C.
 
                                         

5oHérode Philippe, ou simplement Philippe, fils d’Hérode l’Ancien et de Mariamne (seconde femme de ce nom, qu’il ne faut pas confondre avec Mariamne l’Asmonéenne), n’eut aucune part dans l’héritage paternel. Son demi-frère Hérode Antipas séduisit sa femme Hérodiade (Matth. xiv, 3 ; Marc, vi, 17).

6oHérodiade, fille d’AristobuIe (ce fils d’Hérode l’Ancien et de l’Asmonéenne Mariamne, massacré par son père), par conséquent petite-fille d’Hérode l’Ancien. Elle avait, d’après la volonté de son aïeul, épousé Hérode Philippe ; mais, séduite plus tard par Hérode Antipas, elle s’unit à lui, et ce fut à sa demande que S. Jean-Baptiste fut décapité (Matth. xiv, 3 sv.; Marc, vi, 17, 18).

HÉRODIENS. — Hommes attachés au parti d’Herode et des Romains. Il en est question trois fois dans l’Evangile : Matth. xxii, 16 ; Marc, iii, 6 ; xii, 18. La version syriaque du Nouveau Testament les appelle gens de la maison d’Hérode, c’est-à-dire courtisans, officiers du palais d’Hérode. Ils formaient un parti politique, mais ils peuvent aussi, en tant que favorables à la domination étrangère sur le peuple de Dieu, être regardés comme une secte religieuse proprement dite. “ Le parti des Hérodiens, dit le docteur Sepp, avait commencé à se former vingt ans à peu près avant la naissance de J.-C., lorsque Menahem, esprit fort, quitta la présidence du grand conseil, et passa dans le camp d’Hérode avec 80, ou selon d’autres 160 membres de la noblesse juive, qui étaient en même temps ses disciples. Cette coterie d’illuminés, dont les mœurs ressemblaient à celles des épicuriens, formaient avec les autres courtisans une faction et comme une secte de cour, sous le titre d’Hérodiens : c’était dans la nation le parti romain ou impérialiste. Ils occupaient presque toutes les charges. Hérode les avait initiés à sa politique astucieuse, et s’était servi d’eux pour bouleverser la constitution et les mœurs du peuple juif… Après la mort d’Hérode, le parti des Hérodiens se répandit en Galilée sous le faible Antipas ; et, malgré l’exil d’Archélaüs, digne fils de son père, il sut garder à la cour et dans le gouvernement l’influence politique dont il avait joui jusque-là. ”

ITURÉE : voy. Palestine.

JÉRICHO.Jéricho (Yeréhô) a pour étymologie ville de la lune (Yarêah) ou lieu odorant (riah). Les Chananéens à qui appartenait Jéricho avant la conquête de Josué, y avaient sans doute élevé un temple à la lune, en qui ils adoraient une de leurs divinités. Mais plus probablement l’étymologie est celle qui rattache le nom à riah, odeur, parfum et Jéricho a le sens de lieu odorant, ville des parfums, à cause des nombreuses essences aromatiques rosiers, etc., qui croissaient dans cette contrée agréable et fertile. — Jéricho était située à environ 26 kilomètres au nord-est de Jérusalem, à deux lieues et demie du Jourdain, sur la route qui, par une pente très rapide et à travers un vrai désert de collines desséchées et de vallées sans eau, descendait de Jérusalem à la vallée du Jourdain. Véritable oasis au milieu de ce désert, la plaine de Jéricho était couverte de champs de blé. Soit à cause de ses riches cultures, soit comme tête de route importante, cette cité avait, au temps de N.-S., un poste de douane, dont Zachée était le receveur en chef (Luc, xix, 1 sv.). Hérode le Grand l’avait ornée de palais et en avait fait sa résidence d’hiver. — Cette ancienne résidence royale n’était plus, il y a quelques années, qu’un pauvre groupe de huttes misérables, habitées par environ soixante familles, que leur fourberie et leur peu de sociabilité avaient rendues fameuses. De nos jours, plusieurs établissements bâtis par les pèlerins russes ou par le gouvernement turc tendent à former une Jéricho nouvelle près du village de Rîchâ, établi sur les ruines de la Jéricho ancienne.

JÉRUSALEM, en hébreu fondement de la paix ou mieux ville de la paix, ancienne capitale des Juifs.

1oHistoire. Selon Josèphe, écho sans doute sur ce point d’une tradition ancienne, mais que beaucoup d’exégètes estiment bien fragile, cette ville fut bâtie par Melchisédech, roi Chananéen. Ce qui est plus certain, c’est que vers 1400 avant notre ère, Jérusalem était déjà au nombre des villes les plus importantes de la Palestine méridionale. Ainsi l’attestent des lettres assyriennes, découvertes en 1887, à Tell-el-Amarna, en Egypte. — Vers cette même époque, quand les Hébreux entrèrent dans la terre de Chanaan, Jérusalem s’appelait Jébus, et elle était sous la domination des Jébuséens, qui en conservèrent la possession jusqu’après le règne de Saül. David s’empara de Sion, la citadelle des Jébuséens, placée, croit-on, sur l’Ophel, au sud-est de la ville. Puis il fit de Jérusalem sa résidence, et, bientôt après, la capitale de tout son royaume. Son fils Salomon y bâtit, sur le Mont Moriah, au nord-est de la ville, un temple magnifique en l’honneur du Très-Haut ; et il acheva les murs d’enceinte qui avaient été commencés sous David. Sous les rois de Juda, successeurs de Salomon, Jérusalem fut plusieurs fois dévastée en punition de ses crimes. Après la chute de Samarie et la ruine du royaume d’Israël, les rois de Juda, Ezéchias et Manassé, pour sé prémunir contre les invasions assyriennes, réparèrent les murs, amenèrent dans la cité par des canaux souterrains, les eaux de plusieurs sources et piscines des environs, et étendirent l’enceinte du côté du nord. Ce fut la seconde enceinte. Plus tard, en 587, Nabuzardan, général de l’armée de Nabuchodonosor, roi de Babylone, s’empara de la cité sainte, brûla le temple et le palais royal, renversa les remparts et emmena en captivité à Babylone presque tous les habitants. Dieu voulut cependant que Jérusalem se relevât de ses ruines. En 536 un édit de Cyrus, roi de Perse et maître de la Chaldée, permit aux Juifs de rentrer en Palestine, de rebâtir Jérusalem, et de relever le temple. Ce fut Zorobabel qui jeta les fondements du second temple. Soixante-dix ans plus tard, vers 445, Néhémie releva les murailles de la cité sainte. Puis, durant plus d’un siècle, les Juifs vécurent en paix dans leur capitale reconstruite. Mais après la mort d’Alexandre (323), l’un de ses généraux, Ptolemée Lagus, reçut en partage l’Egypte, et envahissant la Palestine, se rendit, par ruse, maître de Jérusalem. Dès lors, et pendant près de deux cents ans, Jérusalem eut à souffrir tantôt de l’Egypte, et tantôt de la Syrie, deux états rivaux entre lesquels elle se trouvait placée. En 164, Judas Machabée à la tête des Juifs restés fidèles au vrai Dieu, vainquit les généraux des armées de Syrie, s’empara de la citadelle de Jérusalem, purifia le temple qu’avaient profané les armées d’Antiochus Epiphane, et restaura les murs de la ville. Cent ans plus tard, Pompée rendit Jérusalem et toute la Judée tributaires des Romains. En l’an 40 avant J.-C., Marc-Antoine et Octave nommèrent roi de Judée Hérode, fils de l’Iduméen Antipater. Hérode eut à lutter contre un descendant de Simon Machabée, Antigone, qui s’empara de Jérusalem, mais qui fut, à son tour, vaincu en l’an 37. Maître de Jérusalem, Hérode y éleva des monuments grandioses. Il fit d’abord construire un théâtre et un palais royal. Puis il restaura le temple qu’avait fait construire Zorobabel et l’orna avec somptuosité. Cette restauration commencée par Hérode le Grand, une vingtaine d’années avant N.-S. ne fut terminée que sous Hérode Agrippa II, l’an 64 de notre ère, 6 ans seulement avant le grand siège et les derniers jours de Jérusalem. Hérode le Grand eut pour successeur Archélaüs. Puis Jérusalem fut administrée par de simples gouverneurs, entre autres Valérius Gratus (15-26), Ponce-Pilate (26-36). En 42, Agrippa 1er, petit-fils d’Hérode le Grand, fut proclamé par l’empereur Claude, roi de toute la Palestine. C’est lui qui entreprit les travaux de la troisième enceinte, rendue nécessaire par les agrandissements de la ville. L’un de ses successeurs, Gessius Florus, simple procurateur romain, ayant fait massacrer, l’an 66, plusieurs milliers de Juifs, provoqua un terrible soulèvement. Titus, fils de Vespasien, fut chargé de réprimer la rébellion. Après un siège de sept mois, la ville fut emportée d’assaut. Un incendie détruisit le temple, et Jérusalem fut rasée jusqu’au sol.

Ainsi s’achève l’histoire de la Jérusalem biblique.

2oTopographie. Jérusalem s’élève comme un promontoire entre deux profonds ravins qui la ceignent à l’est et à l’ouest et se rejoignent au sud-est : la vallée du Cédron au levant, et la vallée d’Hinnom au couchant et au midi. Une dépression de terrain, autrefois beaucoup plus accentuée, et parallèle au Cédron, le Tyropæon, partage la ville en deux parties : à l’ouest la ville haute, qui a pris depuis longtemps, mais à tort, le nom de Sion ; à l’est une colline plus allongée qui comprenait le temple et la cité de David et était le vrai mont Sion.

L’enceinte de la cité au temps de Jésus-Christ était assez différente de sa situation actuelle. La ville s’est accrue au nord d’une étendue à peu près égale à celle qu’elle a perdue au sud. Le rempart du nord correspond à peu de chose près au mur d’Agrippa ; la muraille du sud depuis Adrien a laissé en dehors de l’enceinte une partie du mont appelé Sion. Au temps de Jésus-Christ, elle embrassait toute cette colline et, se dirigeant vers l’est, elle enveloppait la colline d’Ôphel jusqu’à l’extrémité sud-est du temple. Au nord, l’enceinte ne comprenait pas le Golgotha, mais, à cette hauteur, le rempart se coupant à angle droit en était éloigné de moins de cent mètres, au sud et à l’est de cette colline ; il tournait et se dirigeait ensuite dans la direction de l’Antonia.

Les principaux édifices qui intéressent l’histoire du Nouveau Testament sont : a. Le Temple (voir Temple). — b. La citadelle bâtie par Jean Hircan et connue alors sous le nom de Baris, « forteresse », puis agrandie et embellie par Hérode en l’honneur de Marc-Antoine et appelée pour ce motif Antonia. Située au nord-ouest de l’esplanade du temple sur un rocher escarpé de 27 mètres de hauteur, flanquée à ses quatre angles de hautes tours dont la plus rapprochée du sanctuaire avait 36 mètres d’élévation, elle dominait le lieu saint et la ville. Une garnison romaine y résidait. C’est dans cette forteresse que S. Paul fut conduit après l’émeute excitée contre lui dans le temple (Act. xxi, 34-37 ; xxii, 24 ; xxiii, 10). Des degrés de l’escalier qui descendait sur l’esplanade, il s’adressa au peuple pour se justifier (Act. xxi, 35). On croit généralement que le prétoire de Pilate où fut conduit Jésus dans sa passion (Matth. xxvii, 25), était dans cette forteresse. — c. Le palais d’Hérode, magnifique construction de marbre, entourée de hautes murailles, était situé près de la porte de Jaffa. C’est là, croit-on, que résidait Hérode Antipas et où Jésus aurait été renvoyé par le procurateur. Cependant Hérode aurait pu habiter au palais des Asmonéens, prés du Xyste. — d. Au sud-ouest de la ville se trouvait le Cénacle. Ce fut, après l’Ascension, le premier sanctuaire de l’Eglise naissante jusqu’à la ruine de Jérusalem. A supposer qu’il ait été ruiné durant le siège de Titus, ce qui n’est pas certain, les fidèles ne durent pas tarder à en relever les pierres. Aussi au IVe siècle S. Epiphane assure qu’il avait été épargné par les Romains et qu’au temps d’Adrien les fidèles le fréquentaient. Mais, au XIe siècle, les Sarrasins détruisirent l’antique édifice, qui fut relevé par les Croisés sur le même emplacement, mais dans le style de leur temps. Plusieurs fois pris ou cédé par les Musulmans, il fut définitivement perdu au XVIe siècle, et converti par eux en mosquée parce que suivant une prétention injustifiée il aurait renfermé le tombeau de David. — e.  Non loin du Cénacle un peu plus au nord, d’après une tradition qui remonte au moins au IVe siècle, se serait élevée la demeure de Caïphe. — f. Au bas de la colline d’Ophel au sud-est de la ville, autrefois dans l’enceinte, près du rempart, maintenant assez loin des nouvelles murailles, était située la piscine de Siloé, où se rendit l’aveugle-né sur l’ordre de Jésus. — g. Au nord-est de la ville, en dehors des remparts au temps de Jésus-Christ, à quelque distance de la porte des troupeaux, on voyait la piscine aux cinq portiques de Béthesda. On en a retrouvé les ruines près de l’Eglise Ste-Anne. — h. D’après Jean (xix, 12), et Hébr. (xiii, 12), le lieu où fut crucifié le Sauveur était hors de la ville, non loin de l’enceinte. Le Calvaire actuel répond à ces conditions. L’enceinte actuelle dans sa partie septentrionale répond à peu près à celle d’Agrippa, postérieure à Jésus-Christ. La deuxième enceinte ou d’Ezéchias laissait en dehors de la ville, à moins de cent mètres, le Golgotha. Le tombeau de Joseph d’Arimathie était tout près du Calvaire. Ces lieux chers à la piété des premiers fidèles furent vénérés par eux dès l’origine ; les statues de Jupiter et de Vénus élevées par Adrien en marquèrent la place, et Ste Hélène n’eut pas de peine, grâce à ce signalement et à la tradition toujours vivante, d’en reconnaître l’endroit précis ; et depuis, des témoignages nombreux et suivis dans le cours des siècles en ont conservé le souvenir. L’édifice actuel remonte à l’époque des Croisés.

JOURDAIN, le grand fleuve de la Palestine, qu’il divise dans toute sa longueur en deux parties inégales, dont la principale s’étend des bords du fleuve jusqu’à la Méditerranée. Il jaillit de plusieurs sources, situées au pied du grand Hermon, celle d’Hasbeya, celle de Tell-el-Qadi ou Dan et celle de Banias. Cette dernière la plus pittoresque sort non plus de l’intérieur, mais en avant d’une grotte spacieuse à Banias, l’ancienne Panéas ou Césarée de Philippe. Les eaux réunies de ces sources coulent du nord au sud, tombent dans un petit lac appelé Marom, aujourd’hui Bahr-el-Huléh, et arrivent, après un cours d’environ trois lieues, au lac de Tibériade ou de Génésareth, qu’elles traversent. Appelé jusqu’alors Ordoun par les Arabes, le Jourdain, sous le nom nouveau de Schériah ou Schériah-el-Kébir, le grand abreuvoir, poursuit ou plutôt précipite son cours à travers de nombreux rochers, au milieu d’une nature aride et désolée, et se jette enfin dans la mer Morte. La vallée du Jourdain, large de 2 à 3 lieues, était autrefois ornée d’une riche végétation (Jérém. xii, 5). Depuis des siècles elle est aride et stérile. Elle s’appelle aujourd’hui, en arabe, la dépression, el Ghôr. Près de la mer Morte son lit est à environ 400 mètres au-dessous du niveau de la Méditerranée.

Tel est le fleuve sur les rives duquel se sont déroulés les événements les plus merveilleux de l’histoire, événements inaugurés eux-mêmes par un miracle, puisque les eaux du Jourdain se retirèrent pour laisser passer Josué et les 40.000 hommes de son armée marchant, accompagnés de leurs femmes, de leurs enfants et de leurs vieillards, à la conquête du pays. Dans la suite, ce fut là qu’Elie et Elisée exercèrent leur ministère : Elie, figure de Jean-Baptiste, qui, sur ces mêmes bords, ferma l’Ancien Testament ; Elisée, figure du Messie, qui partit de là pour fonder l’œuvre de la nouvelle fiance et de la Rédemption du monde. Jésus, en recevant le baptême dans le Jourdain, anctifia l’eau en général et en fit l’un des élements constitutifs du sacrement de la régénération qui avec la grâce sanctifiante donne la qualité d’enfant de Dieu.

JUDÉE : voy. Palestine.

LYSANIAS. — Josèphe parle d’un prince nommé Lysanias qui, vers le commencement du régne d’Hérode l’Ancien, était roi de Chalcis au pied du Liban, et fut mis à mort par Antoine, au temps où ce dernier fit son expédition en Arménie. Une partie de ses Etats, avec Abila pour capitale, fut rendue à ses descendants par l’empereur Auguste, et forma la tétrarchie d’Abilène. C’est de l’un de ces descendants, nommé aussi Lysanias, que parle S. Luc (iii, 1), comme étant tétrarque au temps où N.-S. commença sa vie publique.

Voir Vigouroux, Dict. de la Bible, t. IV, col. 455.

MACÉDOINE. — Dans le Nouveau Testament on entend par Macédoine la province romaine de ce nom. Elle s’étendait à l’est jusqu’au fleuve Nestus (auj. Mesta), à l’ouest jusqu’à l’Adriatique ; au nord le Drilo (Drin) et les montagnes de Scardus (Schar) la séparaient de la Dalmatie et de la Mésie ; au sud elle était bornée par l’Epire et l’Achaïe. Après la victoire d’Æmilius Paulus à Pydna en 168 av. J.-C., toute cette contrée avait été divisée en quatre parties ou régions, ayant chacune un chef-lieu : Amphipolis pour la première région, Thessalonique pour la seconde, Pella pour la troisième, Pelagonia ou Héraclée pour la quatrième. Cette division artificielle ne suivait point à dessein le partage des différentes tribus macédoniennes ; les rapports de mariage et de commerce étaient même défendus entre les quatre régions : ces précautions étaient prises pour prévenir un soulèvement général, qui se produisit cependant en 148, mais fut vite réprimé, et en 146 av. J.-C. la Macédoine devint définitivement province romaine. Dans le partage des provinces de l’empire en l’an 27 la Macédoine resta au Sénat ; de Tibère à Claude de l’an 15 à 44, elle devint province impériale réunie à l’Achaïe. Mais ensuite elle fut placée sous l’autorité d’un propréteur qui avait le titre de proconsul et qui résidait à Thessalonique, appelée dans les inscriptions la première ville, la métropole de Macédoine. Ce ne fut qu’en 386 ap. J.-C. que la Macédoine fut divisée en deux parties, Macedonia prima, et Macedonia secunda. La célèbre Via Egnatia partait de Philippes, passait par Amphipolis, Thessalonique, Pella, Héraclée, les capitales des quatre régions, pour aboutir à la côte de l’Adriatique près de Dyrrachium. C’est le chemin que suivit S. Paul jusqu’à Thessalonique ; il s’en écarta pour descendre à Bérée (Act. xvi, 11 ; xvii, 1); mais il dut parcourir plus tard jusqu’au bout cette voie romaine pour aller en Illyrie (Rom. xv, 19).

MARIE-MADELEINE, ainsi appelée du bourg de Magdala, aujourd’hui Mejdel, sur le bord occidental du lac de Génésareth.

Marie-Madeleine, Marie, sœur de Marthe et de Lazare, et la pécheresse dont il est parlé dans Luc, vii, 37 sv., sont-elles la même personne ; ou bien faut-il distinguer deux ou même trois Marie?

A). Le premier sentiment, généralement suivi dans l’Eglise latine, fut attaqué au xvie siècle par Lefèvre d’Etaples, qui chercha à démontrer que ces trois femmes étaient trois personnes différentes ; d’autres, en suivant S. Chrysostome et S. Jérôme qui paraissent favoriser cette opinion, identifient la pécheresse et Marie-Madeleine, mais ils la distinguent d’une autre Marie, sœur de Marthe et de Lazare. Beaucoup de savants catholiques, entre autres Fisher, évêque de Rochestsr, et le bollandiste Sollier, entrèrent en lice pour combattre l’opinion de Lefèvre. Elle fit son chemin malgré cela, notamment en France, où elle compta rarmi ses partisans ces hommes tels qu’Estius, Tillemont, D. Calmet, Bossuet, etc.

Voici quels étaient les principaux arguments de Lefèvre et de Tillemont: 1. S. Luc qui parle de la pécheresse au chap. vii de Madeleine au chap. viii, et de la sœur de Marthe au chap. x, ne laisse soupçonner en aucune manière l’identité de ces trois femmes. Il en est de même de S. Jean : comp. xx, 1, avec xi et xii. Dans son opuscule sur Les trois Magdelènes, Bossuet confrontant les divers textes évangéliques termine ainsi : “ Il ne s’agit pas de prouver qu’il est impossible que les trois soient la même ; il faut prouver que l’Evangile force à n’en croire qu’une ou du moins que ce soit son sens le plus naturel. ” Ce qui n’est pas, conclut-il.

2. Ces trois femmes paraissent avoir eu un lieu d’habitation différent : la pécheresse, le bourg de Naïm ou Capharnaüm ; Madeleine celui de Magdala ; et la sœur de Marthe, le village de Béthanie.

3. Madeleine accompagnait le Sauveur en Galilée (Luc, viii, 1 ; Matth. xxvii, 55 ; Marc, xv, 40, 41.), tandis que Marie, la sœur de Lazare, demeurait à Béthanie.

4. Si la pécheresse eût été la même personne que la sœur de Lazare, est-ce que Jésus aurait fréquenté cette famille? Est-ce que les Juifs seraient venus consoler Marthe et Marie de la mort de leur frère?

5. Outre ces raisons, l’opinion de Lefèvre a en sa faveur l’autorité de plusieurs Pères, surtout de l’Eglise grecque (Origéne, Théophylacte, etc.) ; des ménologes grecs, qui donnent pour la pécheresse, pour Madeleine et pour la sœur de Lazare, trois jours de fêtes différents (1er mars, 22 juillet, 18 mars); des martyrologes de Raban Miur et de Notker, qui font à des jours différents mémoire de la sœur de Marthe et de Madeleine (18 janv., 22 juillet) ; et enfin des notices du viie siècle, relatives à la sépulture de Madeleine et de la sœur de Marthe, suivant lesquelles la première serait ensevelie à Ephèse, la seconde à Jérusalem avec sa sœur et son frère.

B). Les partisans de l’identité des trois Marie, appuyés surtout sur S. Grégoire le Grand, font valoir les arguments suivants :

1. Ce que S. Luc n’a pas fait, rien ne l’obligeait à le faire. On peut même croire que c’est à dessein, et par un sentiment de délicatesse facile à comprendre, qu’il évite en parlant de la sœur de Marthe (x, 39), de rappeler la honte de sa vie, — purifiée d’ailleurs par la pénitence.

2. Dans le passage allégué de S. Luc (vii, 37), rien ne prouve que la scène se passe à Naïm ou à Capharnaüm ; et la sœur de Lazare, qui demeurait alors à Béthanie avec son frère, pouvait être surnommée de Magdala, soit pour avoir habité autrefois dans ce bourg, soit pour y posséder quelque terre.

3. Une femme de Béthanie pouvait bien accompagner de temps en temps N.-S. dans ses voyages en Galilée.

4. J.-C. ne dit-il pas lui-même qu’il est venu pour appeler les pêcheurs à la pénitence? Quant aux Juifs, Marie s’était réhabilitée depuis longtemps à leurs yeux par sa pénitence et ses vertus.

L’Evangile, loin d’être contraire, disent ces auteurs, est favorable à l’identité des trois Marie.

1. S. Luc raconte au chap. vii, la conversion d’une pécheresse ; cette femme, après une si grande grâce, consacre désormais toute sa vie à son divin bienfaiteur. N’est-ce pas ce qu’indique l’Evangéliste lorsque, commençant le chapitre suivant par la mention des saintes femmes qui accompagnaient le Sauveur dans ses voyages et pourvoyaient à son entretien, il nomme en premier lieu Marie de Magdala?

2. Nous lisons, Luc, x, 49 sv., que Jésus, venant de Galilée à Jérusalem, fut reçu à Béthanie par Marthe, laquelle s’agitait beaucoup pour subvenir aux besoins d’un hôte si illustre, tandis que Marie, assise aux pieds du Sauveur, qu’elle avait naguère arrosés de ses larmes et essuyés de ses cheveux, écoutait la divine parole. Que l’on rapproche de ce passage Jean, xi, 2, où se trouve une allusion non seulement à Jean, xii, 1-3, mais encore, à Luc, vii, 37 sv., et l’on ne pourra guère douter, concluent les partisans de l’unité, que la pécheresse Madeleine et la sœur de Marthe ne soient la même personne.

3. L’onction racontée par S. Luc (vii, 37 sv.) ne peut pas être identifiée avec celle qui eut lieu plus tard, à Béthanie (Matth. xxvi, 6-13 ; Marc, xiv, 3-9 ; Jean, xii, 1-11). La comparaison de ces deux récits fait ressortir plusieurs différences dans les circonstances et permet d’affirmer que N.-S. fut arrosé de parfums deux fois ; mais, disent les partisans de l’unité, ce fut par la même femme, dans la même maison de Simon le lépreux. La famille de Lazare et celle de Simon paraissent donc avoir été unies entre elles, sinon par la parenté, au moins par l’amitié.

4. On remarque enfin, dans les trois femmes, une ressemblance frappante de caractère : c’est de part et d’autre le même dévouement sans bornes pour la personne sacrée du Sauveur ; la même âme aimante, contemplative, et saintement enthousiaste.

Si l’Eglise grecque distingue les trois femmes, l’Eglise latine, surtout sous l’influence des homélies de S. Grégoire Pape, les a communément identifiées. Leur fête s’est introduite cependant assez tardivement dans la liturgie.

MESURES, MONNAIES ET POIDS, en usage au temps de Notre-Seigneur, évalués d’après leur rapport avec nos mesures, monnaies et poids modernes.

1. Mesures de longueur. L’unité des mesures de longueur était la coudée, équivalent à la longueur de l’avant-bras. La coudée employée pour les mesures du Tabernacle et du Temple c’est-à-dire la grande coudée ou coudée sacrée avait 0m, 525. La coudée vulgaire ou petite coudée n’avait que 0m, 45. La coudée commune babylonienne mesurait, 0m, 499, et la coudée royale environ 0m, 548. En Asie Mineure elle équivalait à 0m, 495 cent. Il est donc difficile d’évaluer cette longueur à un ou deux centimètres près. Nous lui donnons, dans nos diverses supputations, environ 0m, 50 cent. — La coudée se subdivisait en 2 empans, ou grands palmes, c’est-à-dire deux fois la distance comprise entre le pouce et le petit doigt étendus. L’empan se subdivisait en 3 petits palmes, chaque palme équivalant à 4 doigts, le doigt équivalant lui-même à un peu plus de 0m, 02 cent.

II. Mesures itinéraires. On trouve dans l’Evangile le mille et le stade ; dans les Actes le chemin du sabbat et la brasse. Le mille était une longueur d’origine romaine, de 1478m, 50. Le stade valait environ 185 mètres ; 24 stades formaient la lieue commune de 4 kilomètres. — Le chemin du sabbat, était la distance que les Juifs pouvaient parcourir un jour de sabbat. Elle était de 2,000 coudées, environ 6 stades, un peu plus d’un kilomètre. La brasse, mesure marine, valait 4 coudées donc environ deux mètres.

III. Mesures de capacité. L’unité de mesure pour les solides était l’épha = 38 litres 88 cent. L’unité de mesure pour les liquides était égale, quant au contenu, à celle des solides, mais elle s’appelait bath. C’était l’équivalent de la mesure grecque, le métrète, dont parle S. Jean (ii, 6). Dix éphas formaient un chômer ou Kôr = 388 litres 80. — Le 1/3 de l’épha formait le se’dh ou satum de la Vulgate ; le 1/6 de l’épha formait le hin. — Le setier (ξέστης, sextarius), était la 72e partie du bath et valait par conséquent un peu plus d’un 1/2 litre. — Quant à la mesure romaine, le modius ou boisseau, elle valait 8 litres 1/2.

IV. Mesures de temps. Voir Calendrier juif.

V. Monnaies. Au temps de Notre-Seigneur, les Juifs possédaient encore des monnaies frappées par les princes Asmonéens. Mais en dehors du Temple, où seule la monnaie juive avait cours, en particulier pour l’impôt du demi-sicle (voy. Exod. xxx, 11 sv.), on ne se servait guère que de monnaies grecques ou romaines. Toutefois S. Matthieu fait mention des sicles (d’argent), que les Princes des prêtres donnèrent à Judas pour prix de sa trahison. Le sicle valait 4 drachmes (0,88 centimes) et par conséquent un peu plus de 3 fr. 50. Le sicle d’or valait environ 40 francs.

Les monnaies grecques étaient : la drachme (dont la valeur a varié suivant les époques) 0,87 cent ; l’obole qui était la 6e partie de la drachme : le didrachme ou double drachme = 1 fr. 76 ; le statère, qui équivalait au sicle d’argent = 3 fr. 50 : c’était la monnaie la plus répandue ; la mine, valant 100 drachmes = 88 fr. ; le talent, valant 6.000 drachmes = 5.500 fr., en chiffres ronds.

Les monnaies romaines étaient : le denier = 0,78 centimes environ ; l’as dixième partie du denier = 7 centimes 1/2 ; le quadrant ou quart de l’as, environ 2 centimes ; le lepte ou minutum de la Vulgate, la plus petite monnaie divisionnaire du denier, équivalant à la quatrième partie du quadrant, un demi-centime.

VI. Poids. Chez les Hébreux les poids étaient, du moins primitivement, en pierre. Des agents du Sanhédrin en vérifiaient de temps à autre la valeur. Le seul poids dont fasse mention l’Evangile (Jean, xii, 33 ; xix, 39) est la livre romaine. Elle était estimée 326 grammes, et se subdivisait en 13 onces. Chez les Juifs l’unité de poids était le sicle = 14 grammes 200 ; 50 sicles formaient une mine = 708 gr. 50 ; 60 mines formaient 1 talent = 42 kilogs, 533 gr. — L’obole était la vingtième partie du sicle, elle valait donc 0 gr. 708.

NAZARETH, litt. fleur ou rejeton, où s’est tenue cachée la fleur la plus parfaite qui se soit épanouie sur la terre, où a germé le rejeton qui s’est élevé comme un signe à la vue des peuples, et vers lequel toutes les nations sont accourues (Is. xi) ; Nazareth, aujourd’hui Nazirah, appelée quelquefois par les Arabes la cité blanche à cause de ses collines crayeuses et de ses maisons blanches, était une petite ville de la basse Galilée, bâtie en amphithéâtre sur un pli de terrain au pied du groupe de montagnes qui ferme au nord la plaine d’Esdrelon, à trois journées de Jérusalem, à deux heures du mont Thabor. Elle compte aujourd’hui plus de 6.000 âmes, dont 1.200 catholiques latins ; sa population devait être à peu près de moitié moindre il y a dix-huit siècles. Cependant l’Ancien Testament ne la nomme pas, et elle n’avait aucune célébrité avant J.-C. (Jean, i, 46). Le bâtiment le plus remarquable de la ville est le couvent des Franciscains, dans l’intérieur duquel s’élève la célèbre église de l’Annonciation. Cette église a été construite sur la place même qu’occupait la maison de la Sainte Vierge. Au-dessous du chœur est une chapelle souterraine ; on y descend par un large escalier de marbre qui a dix-sept marches ; dans le fond, sur l’emplacement où s’accomplit le mystère de l’incarnation, est un autel éclairé par plusieurs lampes qui ne s’éteignent jamais, et sur le marbre blanc on lit ces mots : Ici le Verbe a été fait chair. En effet, une ancienne tradition rapporte que ce fut là que Gabriel apparut à la Sainte Vierge et lui dit : Je vous salue, Marie pleine de grâce. On montre encore à Nazareth l’endroit où était l’atelier de saint Joseph, aujourd’hui converti en chapelle ; la fontaine de Marie, où la Sainte Vierge venait puiser l’eau ; enfin, à quelque distance de la ville, le rocher du haut duquel les compatriotes du Sauveur voulurent le précipiter (Luc, iv, 29).

OLIVIERS (Mont des). — A l’est de Jérusalem et contiguë à ses anciennes muraille s’étend, du N. au S. la vallée de Josaphat, d’abord largement ouverte, puis se rétrécissant à partir de Gethsémani, et finissant par n’avoir plus que la largeur du Cédron ; on appelle ainsi le torrent formé, en hiver, par les eaux de pluie qui se rassemblent au fond de la vallée. Quand on sort de la ville sainte au N.-E. pour se rendre dans la vallée de Josaphat, on passe par la porte dite actuellement Bâb-Sitti-Mariam et appelée à tort porte S. Etienne (car le martyre du saint diacre eut lieu au nord de la porte de Damas, à l’endroit où s’élevait la basilique de l’impératrice Eudoxie, sur ies fondements de laquelle les Dominicains ont bâti une église). En descendant au fond de la vallée, on franchit un pont en pierre d’une seule arche, jeté sur le torrent de Cédron, et on se trouve au pied de la montagne des Oliviers. A quelques pas sur la gauche est l’entrée de l’église souterraine qui renferme le tombeau de la Sainte Vierge. Toutefois S. Jérôme, le Pèlerin de Bordeaux et sainte Sylvie ne font aucune mention de la présence à Jérusalem de ce tombeau. Le premier qui le signale avec précision en 451 est Juvénal, évêque de Jérusalem : cette tradition paraît remonter à certains apocryphes, surtout à L'histoire de la dormition et de l’Assomption de la B. V. M., qui est de l’an 400 environ, mais dont plusieurs parties pourraient être du iie siècle. Entre cette église et l’enclos de Gethsémani passe le chemin qui conduit à la montagne des Oliviers. Sur le sommet central, Ste Hélène avait fait élever une basilique pour honorer le lieu de l’Ascension du Sauveur. Elle fut ruinée et rebâtie plusieurs fois ; il n’en subsiste plus qu’un petit édicule transformé en oratoire musulman, au milieu duquel on montre, suivant une antique tradition, la trace d’un des pieds de Jésus-Christ imprimé sur la pierre. Au temps de N.-S., les flancs de la montagne étaient couverts de riches plantations d’oliviers, de figuiers et de palmiers ; on n’y aperçoit plus au jourd’hui que quelques buissons de nopals, quelques palmiers chétifs et de pâles oliviers. On croit que c’est sur le versant oriental que Jésus a frappé de stérilité un figuier planté sur le bord du chemin (Matth. xx, 18, 19). On trouve bientôt, en descendant,’ une petite vallée, fertile encore en grenadiers et en figuiers : c’est, croit-on, l’emplacement du village de Bethphagé (litt. maison, ou lieu des figues). En descendant, durant vingt minutes, par une pente rapide et pierreuse, on trouve derrière une colline, sur le versant qui regarde le Jourdain et la mer Morte, le village de Béthanie (maison des dattes), appelé aujourd’hui el Azaryeh (de el Azar, forme arabe du nom de Lazare), et habité par des Arabes ; il ne renferme plus qu’une vingtaine de masures et quelques tas de décombres, au milieu desquels une tribu de Bédouins vient parfois dresser ses tentes ; sa distance de Jérusalem est de trois à quatre kilomètres. Les pèlerins y visitent le tombeau de Lazare, et la pierre du Colloque, sur laquelle on croit que N.-S. était assis lorsque Marthe, venant à sa rencontre, lui dit : “ Seigneur, si vous aviez été ici mon frère ne serait pas mort. ” (Jean, xi, 21.)

PALESTINE. — L’origine de ce nom doit se chercher dans le mot hébreu Peleschet, pays des Pelischtim ou Philistins, qui occupaient la côte occidentale du pays de Canaan. De là le nom passa à toute la contrée, comme le nom d’Asie, s’est étendu de la province de ce nom à tout le grand continent oriental. Depuis les Machabées jusqu’à la destruction de Jérusalem par Titus nous trouvons, aussi bien dans le Nouveau Testament que dans les historiens profanes, la Palestine divisée en quatre provinces, savoir : la Galilée, la Samarie, la Judée et la Pérée ; cette dernière à l’est du Jourdain, les trois autres à l’Ouest, en allant du nord au midi.

 

1. Le nom de Galilée vient de l’hébreu gelil haggoyîm, cercle ou district des Gentils. On désignait ainsi cette province à cause des nombreux païens qui y avaient été amenés du fond de l’Assyrie, après la chute de Samarie et du royaume d’Israël. C’est surtout la Galilée septentrionale ou haute Galilée qui était habitée par les païens (Isaïe, ix, 1 ; Matth. iv, 15). Elle était bornée au N. par le territoire de Tyr et l’Anti-Liban, à l’E. par le Jourdain et les lacs qu’il traverse, au S. par la plaine d’Esdrelon et la Samarie, et à l’O. par cette partie de la Phénicie qui s’étendait le long de la Méditerranée depuis Tyr jusqu’au Carmel. La Galilée était moins grande que la Judée, mais un peu plus grande que la Samarie. Sa longueur du N. au S. était d’environ vingt lieues, sa largeur de l’O. à l’E. de neuf à onze lieues. Elle était fort peuplée à raison de sa grande fertilité, et, dans la guerre contre les Romains, Josèphe y rassembla sans beaucoup de peine une armée de 100.000 hommes. Formée de montagnes au nord, et d’une grande plaine au midi, elle se divise en haute et basse Galilée. C’est en Galilée que N.-S. passa la plus grande partie de sa vie. Les principales villes où le Sauveur se plut à séjourner, telles que Nazareth et Capharnaüm, sont l’objet d’un article spécial.

 

2. La Samarie, la plus petite des quatre provinces de la Palestine, avait pour limites : au N. la Galilée, à l’E. le Jourdain, au S. la Judée ; à l’O. elle ne s’étendait pas jusqu’à la mer, car le pays de la côte à partir du Carmel appartenait à la Judée. Les villes principales étaient Samarie, Scythopolis et Sichem. Cette dernière était située dans une vallée entre le mont Hébal au N. et le mont Garizim au S., à deux lieues S. de Samarie ; l’empereur Vespasien en fit une colonie romaine, qui reçut le nom de Flavia Neapolis, d’où les Arabes ont fait Nablous ou Naplouse, nom actuel de la ville et de tout le pays.

 

3. Sous le nom de Judée, souvent employé par les Romains pour désigner la Palestine entière, nous comprenons ici la province qui touchait au N. à la Samarie, à l’E. au Jourdain et à la mer Morte, au S. au désert, à l’O. à la Méditerranée. Les principaux endroits mentionnés dans l’Evanglie sont l’objet d’articles spéciaux. Voy. Jérusalem, Bethléem, Jéricho, etc.

 

4. Le nom de Pérée c’est-à-dire au delà, est la traduction grecque du mot hébreu Héber, et désigne, dans son acception générale, tout le pays des Juifs au delà (à l’E.) du Jourdain. Cette province, qui correspondait à peu près à l’ancien pays de Galaad et à celui de Basan, fut divisée dans la période gréco-romaine en cinq districts, s’étendant du N. au S., dans la même longitude, à partir du mont Hermon, au pied de l’Anti-Liban, jusqu’à la mer Morte : L’Iturée et la Trachonitide, la Gaulonitide, l’Auranitide, la Batanée et la Pérée proprement dite. Les principales villes étaient Pella, Gérasa, Philadelphie, Hésébon, et Machéronte.

Il faut mentionner aussi la Décapole ou territoire de dix villes confédérées, dans lesquelles se faisait surtout sentir l’influence grecque. Damas, Scythopolis, Philadelphie, Pella, Gadara en faisaient partie. Mais ces dix villes n’avaient aucune unité géographique, et l’on ignore quel était, d’une manière précise, leur régime politique.

Lorsque N.-S. vint au monde, ces quatre provinces formaient, sous le nom de Judée, un royaume gouverné par Hérode, prince iduméen, par conséquent étranger a la race juive, et qui devait le trône à la faveur des Romains. Hérode mourut l’an de Rome 750, Jésus étant dans sa première, peut-être dans sa deuxième ou même troisième année. Il avait partagé sa succession entre trois de ses enfants ; Archélaüs était son successeur au trône, avec la Judée, la Samarie et l’Idumée ; Hérode Antipas avait la Galilée et la Pérée, avec le titre de tétrarque ; et Philippe était tétrarque des pays de Batanée, de Gaulonitide, de Trachonitide et d’Iturée. Vers le milieu de l’année 759, Archélaüs fut appelé à Rome pour rendre compte de son administration ; comme il ne put se justifier, l’empereur Auguste le déclara déchu de sa principauté et l’envoya en exil à Vienne dans les Gaules. La Judée, qui avait jusqu’alors le titre d’alliée du peuple romain, fut réunie à l’empire et annexée à la province de Syrie. Nous voyons s’y succéder une série de procurateurs romains, subordonnés pour les grandes questions au propréteur de Syrie : Coponius, M. Ambivius, Annius Rufus, Valérius Gratus, et enfin, l’an 25 de notre ère, Pontius Pilatus. Sur Hérode Antipas et Philippe, voy. plus haut Hérode (Famille d’).

PAQUE : voy. Cène pascale et Fêtes Juives.

PARABOLE. — La Bible prend dans un sens très large le mot parabole, correspondant à l’hébreu maschal ; elle appelle ainsi, aussi bien dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament, tout discours figuré ou allégorique, où se trouve une comparaison, une image, une sentence énigmatique et obscure, un proverbe, etc. Dans un sens plus strict et plus moderne, on entend par parabole la symbolisation d’une vérité religieuse ou morale, au moyen d’un fait, d’une action, d’un événement, de scènes empruntées à la vie ordinaire et à la conduite de l’homme.

Jésus n’est pas l’inventeur de ce genre littéraire ; la parabole, même dans son sens strict, existait longtemps avant lui. Le génie oriental a l’imagination si riche, n’aime pas seulement à revêtir sa pensée d’ornements poétiques, il se plaît au mystère, aux formes indécises ; une leçon cachée sous un voile a pour lui plus de charme que la vérité radieuse ; il s’arrêtera des heures à la méditer, pour en percer l’obscurité. De là ces proverbes, ces énigmes qui abondent dans l’Ancien Testament. Des sages et des prophètes, comme Nathan (II Sam. xii, 1-7), comme l’auteur de l’Ecclésiaste (ix, 14-16), comme Isaïe (xxviii, 23-29), avaient aussi composé des paraboles proprement dites. A l’époque du Sauveur, cette méthode de prédication était familière aux Rabbins, et plusieurs d’entre eux, comme Hillel, Schammaï, etc., y excellaient ; mais aucun d’eux n’égala jamais les touchantes et sublimes beautés des paraboles évangéliques.

Pour ne parler que de ces dernières, quelques-unes sont très courtes : ce n’est qu’un exemple (Matth. xiii, 31, 32, 33, 44, 45, 47-49), un proverbe, une sentence un peu énigmatique (Matth. xv, 14 coll. Luc, vi, 39 ; Matth. xv, 15-20 ; Luc, ix, 23 ; xiv, 28-30, 31-33 ; xv, 3-7). D’autres, une trentaine environ, offrent un plus long développement : c’est un récit fictif, mais vraisemblable, emprunté soit à la nature, soit au commerce des hommes entre eux et aux usages ordinaires de la vie (Matth. xiii, 3-8 ; xxi, 28-32, 33-41 ; xxii, 1-14 xxv, 1-13, 14-30. — Luc, x, 30-37 ; xiii, 6-9 ; xiv, 7-11, 16-24 ; xv, 1-32 ; xvi, 1-10, 19-31 ; xviii, 1-8, 9-14, etc.).

La parabole diffère de l’allégorie, en ce que cette dernière, personnifiant directement les idées, n’implique de fait aucune comparaison ; l’allegorie est une métaphore développee : voy. les belles allégories du bon Pasteur (Jean, x, 1-16) et de la vigne (Jean, xv, 1-8). Elle se distingue aussi de la fable en ce que scs récits, quoique fictifs, ne renferment rien d’invraisemblable, tandis que ceux de la fable manquent à la fois de vérité et de vraisemblance, les personnages qu’elle fait agir et parler, étant le plus souvent des animaux et des plantes.

Les diverses paraboles de N.-S. ont toutes un rapport plus ou moins direct avec le royaume des cieux, dont elles exposent la nature, les propriétés, les conditions d’entrée le développement. On peut les diviser en trois groupes, d’après la place qu’elles occupent dans le récit évangélique et surtout d’après leur objet et leur fin générale.

Le premier groupe, appelé plus spécialement les paraboles du royaume des cieux, nous en expose la nature et le développement. Elles sont au nombre de huit ; et toutes, sauf une seule (Marc, iv, 26-29), sont renfermées dans le ch. xiiie de S. Matthieu. Celles du second groupe (15) comprennent plutôt des enseignements moraux, faciles à comprendre par tous, tandis que les paraboles du royaume avaient besoin d’une interprétation, pour être entendues. Les paraboles de la fin de la prédication du Sauveur forment le 3e groupe Elles ont trait directement sans doute au royaume de Dieu, comme celles du 1er groupe mais à un point de vue un peu différent : elles sont prophétiques, et regardent spécialement les jugements de Dieu sur le peuple juif, ou la consommation des temps.

Le caractère essentiellement populaire des paraboles est une des raisons pour lesquelles N.-S. a si souvent employé ce genre littéraire. Un autre motif qui poussa le divin Maître à y recourir, ce fut, il nous le dit lui-même (Matth. xi, 13 sv.), de couvrir comme d’un voile les mystères divins, dont par suite la connaissance se dérobe aux esprits légers et indociles. Ce caractère d’obscurité ne se présente que pour les paraboles du royaume proprement dites. Vobis datum est nosse mysteria regni cælorum ; illis autem non est datum (Matth. xiii, 11).

Toute parabole a une pensée principale, une idée mère, qu’il faut rechercher avec soin, par l’étude attentive du contexte. Les circonstances secondaires doivent être interprétées dans leur liaison avec l’ensemble ; cependant elles peuvent aussi, par elles-mêmes, exprimer quelque vérité, pourvu que cette vérité soit en rapport avec la leçon principale. Il faut encore observer, dans l’interprétation d’une parabole, que chaque trait de l’image n’a pas nécessairement son application dans la chose repiésentée. Certains traits, certains détails accessoires, peuvent n’être pas significatifs ; ils sont ajoutés pour l’ornement, et ne figurent que comme une draperie destinée à donner à la parabole plus de grâce et d’ampleur. C’est d’ailleurs un ancien axiome, que toute comparaison cloche.

PAUL (Saint). — Voy. Introduction.

PÉRÉE : voy. Palestine.

PHARISIENS, secte très considérée et très influente, qui constituait la caste savante et orthodoxe du Judaïsme. Ce nom signifie séparés, et désigne des croyants qui se distinguent de la masse vulgaire par leur connaissance plus approfondie de la religion, par leurs habitudes de piété, et par la fuite de tout ce qui aurait pu altérer en eux la pureté légale. Leur première origine doit remonter aux temps qui ont suivi de près la captivité. La dure épreuve de l’exil avait régénéré le peuple de Dieu ; de retour dans leur patrie, beaucoup de Juifs se mirent à étudier assidûment les Livres sacrés, s’appliquèrent soit à maintenir, soit même à réunir par écrit les doctrines et les interprétations de la Loi, jusqu’alors transmises par la parole. Un peu plus tard, quand les Juifs, pour des raisons politiques, durent entrer en relation avec les nations étrangères, il fallut réagir contre l’hellénisme qui menaçait d’envahir l’antique religion de Moïse. Ainsi se fonda la secte des Pharisiens, dont le nom existait déjà à l’époque des Machabées, au milieu du IIe siècle avant J.-C. Grâce à la considération dont ils jouissaient auprès du peuple, ils eurent dès le commencement une influence politique très grande, et formèrent dans l’Etat une puissance redoutable aux rois et aux pontifes eux-mêmes. Sous Hérode le Grand, la secte comptait plus de six mille membres, et ils osèrent refuser le serment de fidélité que le roi exigeait d’eux au nom de l’empereur romain. Ils peuplaient, au temps de N.-S., les cours de justice du pays ; la plupart des membres du Sanhédrin, notamment les Scribes ou docteurs de la Loi, étaient Pharisiens, et c’est le plus souvent comme membres, ou plutôt comme représentants de la secte, qu’ils sont nommés dans l’Evangile.

Les Pharisiens admettaient, à côté des documents écrits, la tradition orale comme source de la religion et de la loi ; ils préféraient même la tradition à la parole écrite, ou du moins celle-là servait de mesure pour l’interprétation de celle-ci, qui se trouvait, en beaucoup de cas, non pas expliquée, mais étouffée par elle. Contrairement aux Sadducéens, ils enseignaient l’existence d’êtres spirituels (anges) supérieurs à l’homme, la distinction de l’âme d’avec le corps, l’existence propre de l’âme et son immortalité, la résurrection des corps, enfin les récompenses et les peines de l’autre vie.

Les préceptes de morale enseignés par les Pharisiens jouirent, à l’origine, d’une grande autorité ; eux-mêmes étaient alors de véritables modèles de vertu. Mais peu à peu ils s’écartèrent de l’esprit de Dieu ; en théorie comme en pratique, ils n’eurent plus d’estime que pour les observances extérieures, pour un formalisme étroit et outré, et transformèrent l’esprit primitif, sérieux et moral, en une sainteté affectée, cachant sous ce voile menteur l’envie, la haine, la colère, l’avarice. Ils mettaient un grand zèle à commenter la Loi et à l’appliquer à toutes les actions de la vie ; mais, l’interprétant avec une subtilité extrême, ils en tirèrent les conséquences les plus éloignées, et finirent par bâtir, surtout au sujet du repos sabbatique, un labyrinthe de régles, d’entraves, de défenses minutieuses et d’ordonnances gênantes, qui avaient fini par transformer la Loi en un joug pesant, en rendaient la pratique aussi difficile que ridicule, et produisaient, comme un fruit naturel, l’hypocrisie sous ses formes les plus variées. Ajoutez un orgueil insupportable, une vaine recherche des préséances et des titres. Un Pharisien était un homme infaillible et impeccable, qui se regardait comme meilleur que tous les autres, qui prenait la première place à la synagogue, qui priait sur les places publiques, qui faisait l’aumône à son de trompe, qui voulait être salué dans les rues, qui exténuait son visage pour qu’on y vît la trace de ses jeûnes. De tels hommes devaient être les adversaires naturels de Jésus, le réformateur des cœurs. Toutefois ce portrait ne convient pas à tous ; nous avons dans Nicodème et dans Gamaliel des exemples de nobles et vertueux Pharisiens et sans doute plusieurs autres leur ressemblaient. Ajoutons que les Pharisiens, sauf quelques altérations peu importantes de la véritable doctrine, s’en montraient, surtout vis-à-vis des Sadducéens, les gardiens fidèles et courageux. Voilà pourquoi N.-S., tout en reprenant leurs vices, rappelle qu’ils sont assis sur la chaire de Moïse, et recommande d’écouter leurs enseignements (Matth. xxiii, 2, 3).

PHILIPPE : voy. Hérode (Famille d’).

PILATE. — L’an 26 de l’ére vulg., 779 de Rome, avant Pâque, Jésus étant dans sa 30e année, arriva en Judée le procurateur romain Ponce Pilate. Josèphe est le seul historien qui parle de son administration, mais pour n’en relever que des traits de violence, de cruauté et de perfidie. Cette conduite exaspéra les plus considérables d’entre les Juifs, qui accusèrent le procurateur auprès de Vitellius, propréteur de la province de Syrie, dont la Judée formait comme une annexe. Le propréteur destitua Pilate et le fit poursuivre à Rome (788 de Rome, au mois de mars) ; mais Tibère mourut (an 37) avant que Pilate arrivât pour se défendre. Le procès n’eut sans doute pas une issue favorable ; car, au témoignage d’Eusèbe, l’ex-procurateur de Judée fut exilé à Vienne, dans les Gaules, où il se tua de désespoir.

L’intérêt que Pilate paraît porter à Jésus s’explique par des raisons très faciles à comprendre : d’abord par la haute dignité de l’accusé, dont il devait déjà avoir entendu parler, et par la conviction qu’il eut bientôt de son innocence ; ensuite par l’obligation où il était de rendre compte à l’empereur de toutes les affaires importantes ; enfin par la haine qu’il portait aux Pharisiens, ces ennemis irréconciliables des Romains. Mais en même temps il est faible de caractère et craint de compromettre ses intérêts en face d’un peuple qui peut l’accuser devant un César soupçonneux. Aussi a-t-il recours à des expédients, tels que la barbare flagellation qu’il infligea au Sauveur dans la pensée d’émouvoir les Juifs. Il n’avait aucune envie d’être favorable aux Pharisiens, comme le démontre son mot laconique : Quod scripsi, scripsi. Néanmoins, quand les Pharisiens menacèrent de l’accuser lui-même auprès de César, sacrifiant ses ressentiments à sa sécurité, il leur livra Jésus, et mit un terme à ce drame déplorable par un acte de lâcheté, en se lavant les mains, pour proclamer par cet acte symbolique qu’il était innocent du sang de ce juste, au moment même où sa lâcheté coupable le livrait à la mort.

PRINCES ou PRINCIPAUX DU PEUPLE : voy. Sanhédrin.

PRINCE DES PRÊTRES : voy. Sanhédrin.

PROSÉLYTES (προσήλυτος, advena, celui qui s’approche). On appelait de ce nom les Gentils qui, du paganisme, passaient au Judaïsme. Les prosélytes étaient donc des étrangers, des païens qui avaient consenti à se laisser incorporer au Judaïsme et qui en avaient adopté, du moins en partie, les croyances, le culte et les diverses pratiques. Leur nombre était assez considérable, car les Pharisiens de l’école de Hillel, se considérant comme les missionnaires de l’idée juive, parcouraient les terres et les mers pour faire un prosélyte (Matth. xxxiii, 15). D’autant que l’idée de pureté, de charité qu’ils proposaient le plus souvent, attirait à la Loi Mosaïque, surtout parmi les Grecs et les Romains, bien des âmes révoltées des hontes du paganisme. On distinguait : 1. Les σεβόμενοι, φοβούμενοι τὸν θεόν, les craignant Dieu. C’étaient des païens pieux affiliés à la communauté juive, sans toutefois être assujettis à la circoncision. Ils n’appartenaient donc pas au peuple de Dieu en qualité de membres ; mais comme les Israélites, ils reconnaissaient le Dieu unique l’honoraient du même culte, prenaient part aux réunions des Synagogues et se soumettaient à certaines prescriptions de la loi cérémonielle.

2. Les prosélytes proprement dits, les gérim ou προσήλυτοι tout court. C’étaient les seuls païens qui se soumettant à la circoncision étaient incorporés au peuple juif et s’assujettissaient à l’observation de toutes les prescriptions de la Loi. Outre la circoncision, ils étaient tenus de recevoir un baptême de purification (tebilah) et de faire l’oblation du sang (harétsa’ath dâmim). On les regardait comme faisant définitivement partie de la communauté, et on leur accordait à peu près les mêmes droits qu’aux Juifs de naissance.

L’antiquité judaïque ne parait pas avoir connu de prosélytes de la porte. Les géré thôschab dont parle la Mischna, — dans les écrits rabbiniques du Moyen Age les étrangers de la Porte (géré haschscha’ar) — ne sauraient être identifiés avec les σεβόυμενοι ou craignant Dieu. On comprenait sous ce nom les étrangers non juifs, admis à résider aux portes, au milieu d’Israël ; ce sont les gêrim de l’Ancien Testament. Voy Exod. xx, 10 ; Deut. v, 14 ; xiv, 21 ; xxiv, 14. Ils n’appartenaient à aucun titre à la communauté juive ; on les obligeait seulement à l’observation des préceptes dits de Noé, et qui se divisaient : a) en 4 moraux : ne pas blasphémer, ne pas tuer, ne pas voler, ne pas se révolter contre l’autorité, et : b) en 3 légaux : éviter le culte des images, l’inceste entre parents aux degrés prohibés de nouveau par Moïse, l’usage du sang et des viandes non saignées (comp. Act. xv, 29). — Les prosélytes du second degré, et même ceux du premier, étant soit par l’incorporation au peuple juif, soit du moins par l’observation partielle de la Loi participants de la justice légale, et par suite bien séparés des étrangers de la porte, ont été désignés sous le nom d’étrangers ou prosélytes de la justice c’est-à-dire justes (géré hatstsedaqah).

PUBLICAÏNS. — On appelait ainsi (τελῶναι publicani), en Palestine, au temps de N.-S., tous les agents du fisc, collecteurs d’impôts, douaniers, etc., chargés de recueillir, pour le compte des Romains, les divers tributs que la nation juive payait alors aux maîtres du monde. On les trouvait partout, dans les ports, sur les ponts, sur les grandes routes, telles que celle d’Acre à Damas, célèbre sous le nom de route de la mer. Ces fonctionnaires ne sont jamais aimés du peuple ; chez les Juifs, ils étaient abhorrés et assimilés aux pécheurs et aux païens, non seulement à cause de leurs exactions et de leurs tracasseries, mais parce que l’impôt, nouveau pour le peuple de Dieu, était un signe de sa décadence et de sa vassalité. On les comparait aux voleurs, aux assassins, aux gens de vie infâme ; on fuyait tout commerce avec eux, on évitait de se marier dans leurs familles, et ces sortes de mariages, quand ils avaient eu lieu, pouvaient être rompus. Ces fonctions n’étaient le plus souvent remplies que par des employés de bas étage, ou des païens ; les Juifs qui les acceptaient étaient excommuniés.

QUIRINIUS (Recensement de). — P. Sulp. Quirinius, né à Lanuvium de parents obscurs, s’éleva par son ardeur guerrière et son habileté dans les affaires aux premières charges de l’empire. Il fut consul en 742, sénateur, et en dernier lieu gouverneur de Syrie. En cette qualité, il opéra en Judée un recensement auquel le peuple juif ne se soumit qu’après divers essais de résistance. Mais Josèphe (Antiq. xviii, 1) associe ce recensement à la déposition d’Archélaüs, et le place l’an 37 après la bataille d’Actium, 759 de Rome, 6 de l’ère vulgaire, et par conséquent 10 ans après la naissance de J.-C. — Cela posé, comment faut-il expliquer le texte de S. Luc (ii, 1-2) qui rattache la naissance de J.-C. à Bethléem au recensement exécuté par Quirinius?

On a résolu cette difficulté de plusieurs manières, entre lesquelles les savants se partagent.

1. Le texte grec se prête, disent certains exégètes, à la traduction suivante : Ce premier recensement eut lieu avant que Quirinius fût gouverneur de Syrie. La Judée, à cette époque, n’était encore qu’une alliée, non une province de l’empire romain ; mais les alliés fournissaient aussi à l’empire de l’argent et des hommes. Rome avait donc intérêt à connaître les ressources du pays ; ce désir devait être surtout naturel à Auguste, alors que, pendant la vieillesse d’Hérode, il songeait peut-être à changer ses alliés en sujets, à convertir le tribut en impôt, en réduisant la Judée en province romaine : ce qui arriva en effet dix ans après, l’an 6 de l’ère vulgaire. Ce recensement ayant été fait par Hérode (sur l’ordre d’Auguste), il fut opéré selon la forme juive : d’où il suit que Joseph dut se faire inscrire, non au lieu de son domicile, mais au lieu de son origine (Comp. Nombr. i, 2 avec Luc, ii, 4); Marie l’y accompagna sans y être obligée.

2. Les savantes recherches de Zumpt (Commentât. epigraph. ii, 86-104 ; De Syria rômana provincia, 97-98) et de Mommsen (Res gestæ divi Augusti) mettent hors de doute que Quirinius fut deux fois gouverneur de Syrie. Il l’aurait été une première fois au temps de la mort d’Hérode, de 750 à 753 ; et il le fut dix ans après, de 759 à 765, comme l’atteste expressément Josèphe. Pendant son premier gouvernement, Quirinius acheva le recensement commencé l’année précédente, et interrompu par la mort d’Hérode. Si ce premier recensement a laissé moins de traces dans les annales juives et n’a pas causé, comme le second, de révoltes sanglantes (Act. v, 13 ; Josèphe, Antiq. xviii, I, 1 ; Bell. jud. ii, 9, 2), c’est qu’il fut une simple description des personnes et des biens, n’entraînant ni levée des taxes, ni service militaire ; c’est surtout qu’Hérode vivait encore, et qu’il avait su, par une habile politique, s’en ménager la direction.

3. Outre le recensement fait en Judée par Quirinius l’an 6 de l’ère vulgaire, il y en eut un autre l’année même de la naissance de N.-S. Tertullien, dans son traité contre Marcion (iv, 19), en appelle expressément à ce premier recensement conservé dans les archives de l’empire, et dont l’auteur, Sentius Saturninus, fut propréteur de Syrie de l’an 744 à l’an 748 de Rome. Mais comment Tertullien nomme-t-il Saturninus, tandis que S. Luc nomme Quirinius? Plusieurs estiment que la réponse est facile. L’empereur Auguste, qui avait fait exécuter la description cadastrale de tout l’empire, voulut y joindre un dénombrement des personnes. “ Il choisit, dit Suidas, vingt hommes des plus distingués par leur probité et leur manière de vivre et les envoya dans tous les pays de son obéissance, afin de faire le recensement des personnes et des biens. ” Quirinius fut sans doute un de ces vingt commissaires. Car il avait toute la confiance de l’empereur, comme le démontre sa position de rector (conseil ou précepteur) auprès du Caius César. Ses antécédents le désignaient pour la province de Syrie ; en effet Tacite nous apprend qu’il avait obtenu les honneurs du triomphe pour avoir conquis les forteresses des farouches montagnards de Cilicie. Il arriva donc en Syrie avec des pouvoirs extraordinaires, comme légat censiteur, pendant que Sentius Saturninus était propréteur de Syrie. S. Luc lui donne le titre de ἡγεμών, non au sens rigoureux de légat propréteur, mais dans le sens large de légat censiteur, d’envoyé extraordinaire de César, chargé par lui de faire le recensement de la Judée. Cf. R. S. Bour, L'inscription de Quirinius et le recensement de S. Luc, in 4o Rome, 1897 et W. M. Ramsay, Was Christ born at Bethlehem ? a Study on the credibility of St. Luke.

ROYAUME DE DIEU, royaume des cieux. Ces expressions si souvent employées dans l’Evangile ne se rencontrent pas dans l’Ancien Testament. Mais l’idée qu’elles expriment s’y rencontre fréquemment (Voy. Is. xlii, 1 ; xlix, 8 ; Jérém. iii, 13 sv. ; Ezéch. xi, 16 sv. ; xxxiv, 12 sv. ; Os. ii, 12 sv. ; Am ix, 1 sv. ; Mich. ii, 12-13 ; iii, 12 sv. ; et surtout Dan. ii, 44 ; vii, 13-14). Cette idée c’est 1o le royaume du Messie (Matth. xii, 28 ; Luc. xvii, 16 ; xvi, 20 al.) annoncé et décrit par les anciens prophètes. Ce royaume, dit Daniel (Chap. vii), l’Ancien des jours (l’Eternel) l’a donné au Fils de l’homme (au Messie) ; il durera éternellement ; son but est le salut de l’humanité, la formation et la glorification des élus ; ce sera le royaume des Saints, et, quand le nombre des élus sera complet, que le Prince du monde sera pleinement vaincu, le Christ livrera à son Père, sans cesser de régner sur lui, ce royaume pacifié, sa glorieuse conquête (Comp. I Cor. xv, 23-24). A cause de sa nature spirituelle et vraiment céleste, — il vient en effet de Dieu et conduit à Dieu, — ce royaume du Messie, appelé ordinairement par S. Matthieu royaume des cieux, est toujours nommé par les deux autres Synoptiques et par S. Jean royaume de Dieu. Toutefois la nature du royaume du Messie n’est pas purement spirituelle. D’après l’ensemble de l’Ecriture de l’Ancien et du Nouveau Testament, le règne de Dieu est un état heureux du monde régénéré et gouverné au nom de Yahweh, par son Christ, fils de David. A cet état heureux doit prendre part, à sa manière, la création matérielle (Rom. viii, 19 sv. ; II Pier. iii, 13) et surtout les Saints dans leurs corps ressuscités. Déjà commencé, grâce à la Rédemption du Christ, l’établissement du règne de Dieu ici-bas, suivi de sa consommation, sous sa forme la plus parfaite, dans le ciel, aura lieu grâce à une défaite terrestre et visible des impies, partisans de l’Antéchrist, que N.-S. vaincra et détruira lors de son second avènement (II Thess. ii, 8 ; Apoc. xix, 15 sv.). Mais les Juifs contemporains de N.-S., et les Apôtres eux-mêmes, avant que le Saint-Esprit ne les eût pleinement éclairés, s’arrêtèrent trop exclusivement à l’idée d’un Messie conquérant et triomphateur. Ils considérèrent trop le règne du Messie comme un règne réparateur et purement terrestre qui assurerait le relèvement glorieux du trône de David, ferait courber sous le joug d’Israël tous les peuples païens, et assurerait à ses sujets l’abondance de tous les plaisirs. Le royaume de Dieu est avant tout glorificateur, spirituel, céleste.

2o Parce qu’elle est un premier stade, la première forme de l’œuvre messianique, c’est l’Eglise militante fondée par le Christ pendant qu’il vivait sur la terre (Matth. xvi, 19 ; xiii, 31, 33, 47), qui est le royaume de Dieu ou du Messie ; cette Eglise est son corps mystique (Ephés. iv), il continue d’y vivre, et de sanctifier en elle et par elle toutes les générations ; il lui a donné des lois, une organisation déterminée ; elle forme une société visible et extérieure (Matth. xvi, 18 ; Jean, xx, 23 ; Marc xvi, 15, 16 ; Luc, x, 16), pourvue de tout l’organisme qui sied à un royaume. Dans un sens large, ceux-là appartiennent à l’Eglise (visible), ou faisant profession de la vraie foi en J.-C. obéissent à son vicaire sur terre, quand même leurs sentiments intimes et leurs œuvres ne seraient point en harmonie avec leur croyance (Matth. xiii, 4 sv. 24 sv. 47 sv. xxv, 1 sv. 14 sv.). Mais ceux-là seulement participent au bienfait de la rédemption, qui reçoivent la grâce à laquelle ils sont appelés, c’est-à-dire qui ne sont pas seulement appelés, mais encore justifiés, et ainsi rendus dignes d’être glorifiés (Rom. viii, 28 sv. ; Ephés. i, 4 sv.).

3o De là cette autre notion du royaume de Dieu : le règne de Dieu dans l’âme des justes. Le grâce, en effet, rattache ces âmes au Messie et à Dieu, et les dispose à jouir un jour de la gloire du règne consommé. C’est de la grâce ou encore du service de Dieu qu’il faut entendre les passages de l’Evangile où Notre-Seigneur nous enseigne à prier pour que son règne arrive (Matth. vi, 10) ; où il nous recommande de chercher avant tout le royaume de Dieu et sa justice (ibid. vi, 33) ; où il'dit : “ Si je chasse les démons par l’Esprit de Dieu le royaume de Dieu est donc venu à vous ” (Matth. xii, 28); où, aux Pharisiens qui lui demandent quand viendra le royaume de Dieu il répond : “ Le royaume de Dieu ne viendra pas d’une manière qui frappe les regards ; on ne dira point : Il est ici, il est là. Car le royaume de Dieu est au milieu de vous ” (Luc, xvii, 20, 21); où il compare le royaume de Dieu à un levain (Matth. xiii, 33) ; où il adresse aux Juifs endurcis la menace que le royaume des cieux leur sera retiré, pour être donné à ceux qui en produiront les fruits (Matth. xxi, 43), c’est-à-dire qui coopéreront à la grâce.

4o Enfin le royaume de Dieu consommé et sous sa forme la plus parfaite, c’est le ciel c’est le règne du Christ en nos âmes dans les splendeurs des cieux, par la gloire et la jouissance de Dieu (Eglise triomphante, Matth. xiii, 43 ; Marc, ix, 46 ; comp. 42 et 44 ; Luc, xiii, 29 ; xxiii, 42). — Nous n’avons pas besoin de faire observer que, dans la bouche des Juifs, ou des Apôtres non encore éclairés par l’Esprit-Saint, ces mêmes locutions, royaume de Dieu, des cieux, ne sont pas autre chose que l’expression des idées plus ou moins erronées, qu’ils se faisaient du royaume du Messie.

SADDUCÉENS, secte juive directement opposée, aussi bien en théorie qu’en pratique, à celle des Pharisiens. Rejetant toutes les explications traditionnelles de la loi recueillies ou inventées par les Pharisiens, ils firent profession de borner leur vertu à la lettre même de la Loi, de s’en tenir à la tsedaqâh, c’est-à-dire à la pure justice légale. De là le nom de justes (tsedaqîm, d’où Sadducéens) dont ils aimaient à se parer, par opposition sans doute aux vaines observances pratiquées par leurs rivaux. Mais bientôt, par leur facilité à se mêler avec les nations étrangères leur foi s’affaiblit et les doctrines matérialistes trouvèrent accès auprès d’eux.

Tout en admettant Dieu, ils rejetaient la Providence dans l’ordre moral, et isolaient de Dieu l’homme, laissé sur la terre sans aucun secours divin, sans une destinée supérieure, ils niaient l’existence d’êtres spirituels, tels que les anges ; quant à l’âme humaine, ils ne la regardaient pas comme essentiellement distincte du corps, comme ayant une existence propre ; formée d’une matière plus subtile, elle s’éteignait avec la vie présente : par conséquent, pas de vie future, pas de récompense ou de châtiment après la mort, pas de résurrection des corps. Ils admettaient cependant une révélation extraordinaire de Dieu, car les livres de l’Ancien Testament étaient pour eux, comme pour tous les Juifs, des Ecritures sacrées ; mais ils rejetaient la tradition si respectée des Pharisiens.

Des hommes qui limitaient l’existence humaine à la vie présente, devaient en rechercher sans scrupule toutes les jouissances et tous les plaisirs ; et, comme ils n’admettaient pas l’élément traditionnel, ils faisaient fort peu de cas d’une foule de rites et d’observances ; des prêtres (un grand nombre appartenaient à cette secte) donnaient jusque dans le temple le scandale de cette négligence. Josèphe nous apprend encore que les Sadducéens aimaient à disputer et à contredire, et se montrer dans le commerce de la vie, et spécialement dans les fonctions de juges, durs et impitoyables. Bien moins nombreuse et moins considérée que celle des Pharisiens, cette secte comptait des partisans surtout parmi les riches et les principaux de la nation, ce qui explique son influence dans le Sanhédrin et l’élévation de quelques-uns de ses membres au souverain pontificat. Ces matérialistes et ces épicuriens n’hésitèrent pas à se joindre aux Pharisiens, leurs adversaires, pour combattre le Sauveur et le christianisme naissant.

SAMARIE : voy. Palestine.

SAMARITAINS. — Lorsque Salmanasar, roi d’Assyrie, eut détruit Samarie (en l’an 721 av. J.-C.) et emmené en captivité la plus grande partie des habitants du royaume d’Israël, il se préoccupa de repeupler cette contrée. A cette fin il envoya de cinq provinces de son empire, surtout de la région de Cutha, des esclaves païens qui se mêlèrent avec le petit nombre d’Israélites restés dans leur patrie (II Rois, xvii, 24). C’est de ce mélange que descendaient les Samaritains ou habitants du pays de Samarie. Quoique formant un peuple à demi païen, ils prétendaient néanmoins, par un sentiment d’orgueil national, descendre de Jacob (voy. Josèphe, Ant. IX, xiv, 3 ; XI, iii, 6). Ils faisaient profession de la loi et de la religion mosaïque, au moins dans quelques-unes de ses croyances et doses pratiques essentielles, mais en même temps ils honoraient les dieux étrangers. De même ils avaient conservé les cinq livres de Moïse, mais ils rejetaient le reste de la Bible. A cause de leur origine impure et de leurs erreurs religieuses, les Juifs, au retour de la captivité babylonienne, refusèrent de les reconnaître comme faisant partie du peuple de Dieu. Dès lors une profonde antipathie divisa les deux peuples. L’érection sur le mont Garizim d’un temple rival de celui de Jérusalem, mit le comble à la haine des Juifs. Vainement ce temple sacrilège fut détruit par Jean Hyrcan (129 avant J.-C.), les Samaritains n’en continuèrent pas moins d’adorer en ce lieu et de regarder cette colline comme la plus sainte du monde. Aussi les Juifs évitaient-ils comme une souillure tout commerce avec eux. Une bouchée mangée avec un Samaritain rendait aussi coupable que si l’on eût mangé de la chair de porc. Ils ne pouvaient, sans crime, en recevoir aucun service, même un verre d’eau. Mais ils lui prêtaient sans scrupule à gros intérêts, car ils ne le regardaient pas comme un frère envers qui ils dussent accomplir le précepte du Deutéronome (xxiii, 20): ce qui contraste singulièrement avec l’exemple du bon Samaritain. Les Samaritains, de leur côté, ne traitaient pas mieux les Juifs. Ils refusaient l’hospitalité aux pèlerins qui, du nord de la Palestine, se rendaient au temple de Jérusalem. Il suffisait, pour être mal accueilli d’eux, d’avoir, selon l’expression de l’Evangéliste, la face tournée du côté de la ville sainte (Luc, ix, 53). Ils leur tendaient même quelquefois des embûches, de sorte que la route de la Samarie n’était rien moins que sûre, et que, si l’on voulait aller en sécurité de la Galilée à la cité de David, il fallait passer à l’est du Jourdain.

La conduite de Jésus envers les Samaritains est tout à fait remarquable. Ces victimes de la haine des Juifs lui ont servi à se montrer à nous sous ses traits les plus aimables et les plus divins. Jamais nous n’entendons sortir de ses lèvres un seul mot contre eux. Lorsque Jacques et Jean voulurent faire tomber le feu du ciel sur un village samaritain, qui, selon l’usage, avait refusé de donner l’hospitalité à des pèlerins se rendant à Jérusalem, Jésus, loin de se plaindre avec eux, leur dit ces paroles qui retentiront dans son Église jusqu’à la fin des temps (Luc, ix, 52 sv.) : “ Vous ne savez pas de quel esprit vous êtes : le Fils de l’homme n’est pas venu pour perdre les âmes, mais pour les sauver. ” C’est le même accent qui se fait entendre dans l’admirible discours du Maître à la Samaritaine, discours qui devient plus beau encore, s’il est possible, quand on a présent à l’esprit ce que nous venons de rapporter sur la très vive animosité qui divisait les deux races. On soupçonne que S. Matthieu, qui écrivait spécialement pour les Juifs, a omis à dessein ce que N.-S. a dit ou fait en faveur des habitants de Samarie.

A travers mille vicissitudes, les Samaritains ont survécu jusqu’à nos jours ; mais ils sont bien près peut-être de s’éteindre. La ville de Naplouse (l’ancienne Sichem) en compte encore une trentaine de familles, qui ont conservé l’antique vénération de leurs pères pour le mont Garizim.

SANHÉDRIN ou GRAND CONSEIL. — A dater du temps des Asmonéens (IIe siècle avant J.-C.), on trouve dans l’histoire juive un tribunal supérieur ou haute cour de la nation, appelé des divers noms de Sénat, Conseil, grand Conseil et Sanhédrin (du grec συνέδριον consistoire, assemblée). Des Rabbins soutiennent que l’institution de ce grand Conseil remonte au temps de Moïse. Ils s’appuient sur le passage du livre des Nombres (xi, 24-25) où Moïse raconte que peu de temps après avoir quitté le Sinaï pour s’avancer vers la terre promise, il institua, sur l’ordre de Dieu, un conseil de 70 anciens, auxquels Dieu communiqua une large effusion de dons spirituels, en particulier le don de prophétie. Mais il ne semble pas que ces Anciens aient formé un corps constitué qui aurait subsisté jusqu’à l’exil, et qui, rétabli, après l’exil, serait devenu le Sanhédrin. En effet, il n’est plus question d’eux dans les livres postérieurs au Pentateuque. Leur institution paraît donc n’avoir été que temporaire. Il nous semble par conséquent que le Sanhédrin ne fut établi qu’après la captivité et peut-être, comme son nom grec paraît l’indiquer, date-t-il de l’époque macédonienne et du temps de la domination des Séleucides.

Le Sanhédrin était composé de 71 membres, y compris le président, qui portait le titre de Nasi, prince. Le grand prêtre n’était pas d’abord président de droit du Sanhédrin ; et de fait il ne paraît pas avoir exercé cette charge avant la mort de Hillel. Mais à ce moment il devient président du Sanhédrin et garda cette fonction jusqu’à la ruine de Jérusalem. Ou distinguait trois classes de personnes : celle des Princes ou chefs des prêtres, nommés aussi grands prêtres ou archiprêtres ; celle des Scribes ou docteurs de la Loi, et celle des Anciens, Princes ou Principaux du peuple. Comme le nombre des membres de chaque classe n’était pas fixé d’une manière invariable, il arrivait souvent que le collège des prêtres formait la majorité. Le Sanhédrin exerçait l’autorité doctrinale, judiciaire et administrative, dans les cas les plus graves. La juridiction pénale était exercée plus particulièrement par une partie de l’assemblée composée de vingt-trois membres, appelée Beth-Din, “ maison de justice ”, “ tribunal ”, qui avait à sa tête le vice-président de l’assemblée entière, nommé à cause de ses fonctions Ab Beth-Din, “ Père du Tribunal ”. Voici comment la Mischna, traité Sanhédrin, décrit ses attributions : “ Le jugement des soixante-onze est convoqué quand l’affaire concerne toute une tribu, ou un faux prophète ou le grand prêtre ; quand il s’agit de savoir si l’on doit commencer la guerre, si l’on doit agrandir Jérusalem, ou y faire des changements essentiels ”, etc. Les séances se tenaient dans une salle près du temple nommée Gazith, salle des pierres taillées. Les sièges étaient disposés en demi-cercle ; le Nasi ou président était assis au milieu, ayant à sa droite le Père du Tribunal, puis tous les autres membres de chaque côté, le visage tourné vers le sanctuaire, afin de ne jamais oublier les règles de la justice ; à chacune des deux extrémités de l’hémicycle était placé un secrétaire. — Disons un mot de chacune des trois classes qui composaient le Sanhédrin.

I. Classe des Princes des prêtres. A l’époque de la Passion de N.-S., elle avait à sa tête Joseph Caïphe, qui avait été nommé pontife peu de temps avant l’arrivée de Pilate. Après lui venait comme Sagan du sacerdoce (coadjuteur du grand-prêtre), le vieil Ananus ou Anne, qui déjà, 22 ans auparavant, avait occupé pendant 8 ans le siège d’Aaron ; puis une dizaine d’ex-pontifes, ou de grands prêtres destitués ; enfin les Princes des prêtres proprement dits, c’est-à-dire, les chefs des 24 familles ou classes des prêtres, dont chacune était chargée pendant une semaine du service ordinaire du temple. Parmi eu se trouvait sans doute Helcias, trésorier du temple à cette époque, d’après Josèphe : c’est de lui que Judas dut recevoir les trente deniers, prix de sa trahison.

II. Classe des Scribes ou docteurs de la Loi. On appelait ainsi les Juifs instruits qui avaient pour fonction d’expliquer et d’interpréter la Loi. A Jérusalem, on pouvait les entendre à toute heure du jour dans les cours et les portiques du temple, rendez-vous d’une foule considérable. Ces docteurs avaient un rang très élevé dans la nation ; souvent même ils l’emportaient en considération sur les prêtres, dont les fonctions étaient purement rituelles. On les appelait, suivant leur dignité, rab, rabbi ou rabban. Plusieurs d’entre eux faisaient école et avaient de nombreux disciples ; on ne compte guère, à partir des derniers prophètes, de noms plus illustres que ceux de Hillel et de Schammaï, deux maîtres célèbres qui venaient de mourir quand N.-S. vint au monde, et dont les disciples se divisaient et se passionnaient pour des questions de doctrine ou de casuistique, à peu près comme faisaient au moyen âge les disciples de S. Thomas et de Scot. Tandis que la plupart des prêtres étaient Sadducéens, presque tous les Scribes professaient les doctrines du pharisaïsme : voilà pourquoi on les trouve si souvent dans l’Evangile unis aux Pharisiens contre Jésus. Les docteurs de la Loi formaient la deuxième classe du Sanhédrin. Un des plus célèbres, au temps de N.-S., était Gamaliel, de la race de David, et petit-fils de Hillel. Il était pharisien, comptait parmi ses disciples celui qui fut plus tard l’apôtre S. Paul, et se montra sans doute, dans le Sanhédrin, favorable au parti du Messie (voy. Act. v, 34 ; xxii, 3). Mais sa voix fut étouffée dans ces jours d’épouvante par les cris de fureur de la race déicide. A cette classe appartenait probablement Nicodème, disciple secret, mais fidèle de Jésus (Jean iii, 1, 10). Cependant plusieurs le rangent dans la troisième classe, celle des princes du peuple.

III. Classe des Anciens, ou des Princes du peuple. Toute la nation israélite était divisée en douze tribus, et chaque tribu en plusieurs familles ; en outre, chaque tribu, comme chaque famille, avait son chef, et ce chef était, en général, selon la coutume des Orientaux, le plus ancien de la famille ou de la tribu. Dès le séjour des Hébreux en Egypte, nous voyons les Anciens figurer comme chefs, comme juges ou comme représentants du peuple auprès de Moïse, qui confère avec eux sur les affaires importantes. Sous la monarchie il n’est plus question d’eux, ainsi que nous l’avons dit plus haut. Mais après le retour de la captivité, il en est de nouveau fait mention dans les Livres Saints. Ils font alors partie du Sanhédrin, et forment ainsi une portion importante de la magistrature suprême de la nation. L’Evangile les appelle Princes du peuple, Anciens du peuple, ou simplement Princes, Anciens ; il nous donne même le nom de l’un d’eux, Joseph d’Arimathie, disciple secret de Jésus (Matth. xxvii, 57, 59 ; Marc, xv, 43-46 ; Luc, xxiii, 50 ; Jean, xix, 38). Ajoutons que dans certains passages les mots Prince ou Ancien désignent un membre du Sanhédrin en général, sans distinction de classe.

SCRIBES : voy. Sanhédrin.

SYNAGOGUE (c’est-à-dire assemblée), nom donné chez les Juifs à certaines réunions religieuses et aux édifices où se tenaient ces réunions. Le Pentateuque ne prescrit nulle part de se rassembler dans des lieux particuliers pour prier, en dehors du tabernacle et par conséquent dans le sanctuaire unique de Jérusalem ; mais les Juifs en éprouvèrent le besoin de bonne heure (II Rois, iv, 23), surtout à l’époque de la captivité. Dans l’impossibilité de se rendre au temple de Yahweh, ils organisèrent des assemblées pour entretenir dans leur cœur et dans celui de leurs enfants l’amour de leur religion, et pour rendre à Dieu les hommages du culte public que la loi permettait, c’est-à-dire la prière, moins le sacrifice. Après leur retour en Palestine, les synagogues se multiplièrent rapidement. Toute la population fut organisée en sections, avec des chefs reconnus, et l’on se rendait ensemble, à certains jours, en un lieu choisi à cette intention, pour y faire des prières publiques, y chanter des psaumes, y lire et y expliquer la Sainte Ecriture.

Au temps de J.-C., chaque ville ou village de la Palestine possédait au moins une synagogue ; il en était de même dans les villes de l’empire romain où se trouvait une colonie juive ; à Jérusalem, on en comptait jusqu’à 450, au dire des rabbins. C’étaient des édifices de forme rectangulaire, variant de richesse et de grandeur selon l’importance des villes. Elles étaient orientées de manière que les fideles, en entrant et en priant, fussent tournés du côté de Jérusalem. On n’y voyait ni images, ni autel, mais, vers le fond, un coffre de bois, couvert d’un voile, qui contenait les Livres saints. C’est près de ce coffre que se trouvaient les premiers sièges, tant recherchés des Scribes et des Pharisiens (Matt. xxiii, 6), et où l’on conduisait les personnages distingués (Jacq. ii, 3). Vers le milieu s’élevait l’estrade où montait le lecteur de la Bible, et le rabbi qui exhortait l’assemblée. Quant aux fidèles ordinaires, ils se tenaient dans la nef, qu’une cloison ou treillis divisait en deux parties, l’une pour les hommes, l’autre pour les femmes.

Toute synagogue avait à sa tête un chef (archisynagogus), auquel appartenait la présidence dans les réunions, ainsi que l’administration des affaires temporelles et spirituelles. Il était assisté d’un conseil d’anciens, appelés aussi quelquefois chefs de synagogue (Marc, v, 22). Au-dessous d’eux, il y avait une sorte de ministre officiant, le scheliah, qui récitait les prières au nom de l’assemblée ; une sorte de sacristain, le hazan, qui ouvrait les portes et préparait les manuscrits ; enfin un targoumiste, ou interprète, chargé de traduire aux fidèles le passage hébreu que l’on venait de lire.

On se réunissait dans les synagogues trois fois la semaine, le lundi, le jeudi et le jour du sabbat ; la réunion du sabbat était seule obligatoire. Le scheliah commençait par réciter sur un ton monotone les prières liturgiques ; puis le hazan tirait du coffre sacré un des rouleaux ou volumes de la Loi, et le présentait à la personne de l’assemblée que le chef de la synagogue avait désignée pour remplir les fonctions de lecteur. Comme cette lecture se faisait en hébreu, que le peuple n’entendait plus depuis la captivité, le targoumiste expliquait le texte sacré, phrase par phrase, dans la langue du pays. Ensuite, sur l’invitation du chef de la synagogue, un rabbi ou toute autre personne adressait au peuple “ la parole de consolation ”, c’est-à-dire une instruction dogmatique ou morale. Si quelque Juif étranger, distingué par sa doctrine, paraissait dans l’assistance, on s’empressait de le conduire à l’estrade, afin de recevoir son enseignement : Jésus eut plusieurs fois cet honneur (Luc, iv, 16-21). La réunion se terminait par quelques prières.

Les synagogues ont joué un rôle important dans l’établissement du christianisme ; la Providence semble les avoir préparées pour servir de chaires aux Apôtres. Dans toutes les villes de l’empire romain, où ils portaient leurs pas, ils trouvaient des Juifs et des réunions régulièrement tenues, par conséquent un auditoire tout préparé à les entendre proclamer la divinité de J.-C. et de son Eglise. Voy. Act. ix, 20, et passim.

TEMPLE. — Sur l’antique mont Moriah, à l’endroit même où s’élevait le temple de Salomon, fut rebâti après la captivité le second temple que le Messie devait honorer de sa présence (Mal. iii, 1). Il fut considérablement augmenté et embelli par Hérode et pour ainsi dire transformé. Les travaux commencés par ce prince, la 18e année de son règne (730 de Rome), se poursuivaient encore la première année du ministère de Jésus, 46 ans après (Jean ii, 20), et ne devaient être achevés qu’en 64, six ans avant sa ruine (70). Grâce aux descriptions de Josèphe, témoin oculaire (Bell. Jud., v, 5 ; Ant. Jud., xv, 11 et passim), complétées dans une certaine mesure par le Talmud, et contrôlées par les fouilles modernes, nous pouvons nous faire une idée de ce Temple, sinon précise pour tous les détails, du moins assez exacte dans l’ensemble. Sur la colline ceinte de murs gigantesques et aplanie, s’étageaient plusieurs enceintes superposées de portiques et de cours, couronnées et dominées par le sanctuaire proprement dit, dominé lui-même par la citadelle Antonia fortement assise au nord-ouest de toutes ces constructions. Ce vaste ensemble offrait au spectateur placé sur le mont des Oliviers â peu près l’aspect de la reconstruction tentée par M. de ogué et figurée sur le plan cavalier placé à la fin de ce volume.

Ainsi devait apparaître le temple aux regards de Jésus-Christ et de ses apôtres quand ils le contemplaient du mont des Oliviers et que le divin Maître en prédisait la ruine. (Matth. xxiv, 2 ; Marc, xiii, 2 ; Luc, xxi, 6.)

Il importe de remarquer que le mot temple désigne deux parties de cet ensemble de constructions, que le grec du Nouveau Testament a soin de bien distinguer par deux mots, confondus dans la Vulgate sous la même traduction, templum : l’une de ces parties est le ναός, naos, ou sanctuaire proprement dit ; l’autre, le ἱέρον, hiéron, ou lieu saint, s’applique aux parvis et à l’ensemble de leurs édifices ou portiques. Si l’on veut avoir l’intelligence exacte de plusieurs passages des Evangiles et des Actes des Apôtres, il ne faut point oublier cette distinction.

1o Le hiéron ou lieu saint était double : le hiéron ou parvis extérieur, le hiéron ou parvis intérieur. Le parvis extérieur était une vaste cour dont les limites répondaien à l’aire actuelle du Haram-ech-chérif, soustraction faite de la place occupée par la forteresse Antonia : elle mesurait environ 500 mètres du nord au sud et 250 à 300 mètres de l’est à l’ouest. Cette superficie dépassait celle du premier temple, parce que l’étendue occupée autrefois au midi par les palais de David et de Salomon avait été renfermée au temps d’Hérode dans l’enceinte sacrée. Cet immense rectangle, ou trapèze pour parler plus exactement, était entouré de vastes portiques, qui à l’est, au nord et à l’ouest avaient trois rangs de colonnes formant deux nerfs, et au midi quatre rangs de colonnes formant trois nefs. Ce dernier portique remarquable par ses 164 colonnes et son toit en cèdre sculpté avait la forme d’une basilique : il se nommait le portique royal. On y entrait de l’extérieur par deux portes, dont on voit encore les restes, la porte double et la porte triple. Le portique occidental avait quatre portes du côté du Tyropæon, et un pont le mettait en communication directe avec la ville haute. Une porte ouverte dans le portique oriental ou de Salomon, la porte de Suse, donnait accès à la direction du Cédron et du mont des Oliviers : Sous ces portiques qui servaient d’abris contre le soleil ou la pluie, les Pharisiens se réunissaient pour discuter entre eux, les scribes ou docteurs de la loi groupaient des auditeurs. C’est sous un de ces portiques du hiéron extérieur (ἐν τῷ ἱερῷ, dit le Grec, in templo traduit la Vulgate) que Jésus à douze ans était assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant (Luc, ii, 46). S. Jean (x, 23) nous donne le nom d’un de ces portiques où le Sauveur enseignait durant un de ses voyages à Jérusalem. Jésus, dit-il, allait et venait dans le hiéron (ἱερῷ, Vulgate templo), sous le portique de Salomon. D’après Josèphe c’était le portique oriental. Abrité contre le vent d’est, favorablement exposé au soleil de l’après-midi, ce portique devait être recherché en hiver ; et S. Jean remarque qu’on était en hiver, au temps de la fête de la Dédicace, c’est-à-dire au mois de décembre. Il est dit également de Pierre et de Jean, après la guérison du boiteux (Act. iii, 11), que le peuple accourut vers eux au portique de Salomon.

La cour bordée par ces portiques est appelée communément parvis des Gentils, parce qu’il était accessible à tous, aussi bien aux étrangers qu’aux Juifs. Cependant les vendeurs et les changeurs ne devaient pas s’y établir, mais rester hors de l’enceinte sacrée, près des portes. C’était par un abus toléré des autorités du temple qu’ils avaient pris l’habitude de pénétrer dans les parvis. Le zèle de la maison de Dieu porta Jésus à chasser les vendeurs du hiéron extérieur, ou parvis des Gentils, et sur ce point ceux d’entre les Pharisiens qui aimaient sincèrement la loi, ne pouvaient que lui donner raison. (Jean, ii, 14 ; cf. Matth. xxi, 12 ; Marc, xi, 15 ; Luc, xix, 45).

Au centre de ce premier parvis, s’élevait une seconde enceinte surélevée, que Josèphe appelle le second hiéron, le hiéron saint, ἱερὸν ἅγιον, (Bell. Jud., v, 5, 2). Ce parvis intérieur était réservé aux Juifs. Quelques pas avant d’y atteindre l’étranger était arrêté par une balustrade de pierre, dont tous les passages étaient munis de stèles avec des inscriptions grecques et latines faisant défense sous peine de mort de s’avancer plus loin à tous ceux qui n’étaient pas du peuple élu. Une de ces stèles a été découverte le 26 mai 1871. L’émeute suscitée contre S. Paul à son dernier voyage à Jérusalem a pour prétexte le bruit calomnieusement répandu qu’il avait introduit des gentils dans le hiéron intérieur ou parvis réservé (Act. xxi, 27-30). Un escalier de quatorze marches régnant tout autour de ce parvis, sauf à l’ouest, conduisait à une terrasse ou large palier de 10 coudées, appelé hêl, sur lequel s’élevaient les murs du second hiéron, sur la paroi extérieure desquels étaient fixés de nombreux trophées ou ex-voto (Luc, xxi, 5). Ces murs étaient percés de pylônes ou grandes portes, quatre au nord, quatre au sud, et une seule au milieu de la façade orientale. Cette dernière porte plus grande et plus ornée que les autres était la Belle porte, où se tenaient de préférence les mendiants, et où le boiteux fut guéri par S. Pierre (Act. iii, 2-10).

Franchissant cette porte orientale nous rencontrons à la suite l’un de l’autre trois parvis : celui des femmes, celui d’Israël et celui des prêtres. Le parvis des femmes, appelé ainsi non parce qu’il était réservé aux femmes seules, mais parce qu’elles ne pouvaient pénétrer plus avant, était entouré de portiques et de salles destinées aux divers services du temple. Les archéologues qui ont suivi les indications du Talmud sur ce point, lui donnent des dimensions plus considérables aux dépens de l’étendue du parvis d’Israël. Il semble que d’après Josèphe la cour des femmes n’a pas l’importance d’un parvis spécial, mais est séparée par un simple mur du parvis d’Israël, auquel on donne plus de profondeur. Quoi qu’il en soit, du côté nord se trouvait le gazo-phylacium ou salle du trésor ; les abords de cette salle où se dressaient en forme de trompette les orifices des troncs d’offrande, prennent le même nom dans le Nouveau Testament comme dans Josèphe. Dans le Gazo-phylacium, Jésus prononce un de ses discours (Jean, viii, 20); c’est là qu’il voit la pauvre veuve déposer son obole (Marc, xii, 41 ; Luc, xxi, 1). Comme c’est au sortir de cet endroit qu’un des disciples montre à Jésus les belles constructions et les riches ex-voto dont les murs sont ornés (Luc, xxi, 1), cela suppose que les apôtres étaient encore dans le parvis des Gentils et s’étaient retournés vers le hiéron intérieur. Après avoir traversé la cour des femmes on atteint un mur qui la séparait du parvis d’Israël ; au milieu de ce mur s’ouvrait la porte de Bronze ou de Nicanor qu’on franchit après avoir monté un escalier de quinze marches, larges, mais peu élevées.

On entre ai si dans le parvis d’Israël qui entoure le sanctuaire et la cour des prêtres. Il n’est séparé de celle-ci que par une barrière ou balustrade de marbre, haute d’une coudée en iron. Rien n’arrêtait donc la vue de l’Israélite qui désirait contempler les sacrifices et les cérémonies accomplies dans la cour des prêtres. Au milieu de cette cour, en face de la porte du sanctuaire était dressé le grand autel des holocaustes, construit de pierres non polies, formant un massif carré de 50 coudées de côté sur 20 de hauteur : les prêtres y avaient accès par un plan incliné du côté du midi. Au nord de l’autel on voyait des tables de marbre pour déposer les chairs des victimes, et à côté les anneau et les colonnes servant à les immoler et à les dépecer. Entre l’autel des holocaustes et le temple, du côté du sud-ouest était placé un immense bassin appelé la mer d’airain.

Au nord, au sud et à l’ouest de la cour des prêtres et le long des portiques s’ouvraient plusieurs salles ayant chacune sa destination spéciale. L’une d’elles, à l’angle sud-ouest de ce parvis, était la salle des pierres taillées ou Gazith, réservée aux réunions du Sanhédrin. “ Quarante ans avant la ruine du temple, dit la Mischna, les sentences capitales furent enlevées à Israël ” et le Sanhédrin cessa de se réunir dans ce lieu.

2oLe sanctuaire. — Au centre de la cour des prêtres, à douze coudées au-dessus s’élevait le naos ou sanctuaire proprement dit. Comme dans les temples anciens, le peuple ne pouvait y entrer ; c’était la demeure de Dieu, les fidèles qui venaient lui rendre hommage restaient dans les parvis. Le sanctuaire était divisé en trois parties : le vestibule, le Saint et le Saint des Saints.

La façade du vestibule résentait aux regards une immense porte triomphale entre deux ailes massives très élevées et faisant saillie des deux côtés. Les documents ne s’accordent pas sur la hauteur de cette porte et de ces ailes. Plus communément on donne à ces dernières le double de la hauteur du Saint. La restauration de cette porte, d’après MM. Perrot et Chipiez, paraît se rapprocher davantage de la description d’Ezéchiel et de Josèphe que celle de M. de Vogué. Cette large baie restait toujours ouverte, en sorte ue du parvis d’Israël le regard pouvait pénétrer facilement jusqu’à la porte du Saint, au fond ce ce vestibule qui n’avait guère que 5 mètres de profondeur.

La porte du Saint moins haute et moins large était ornée de lames d’or plaquées sur les montants, et d’une vigne d’or courant sur le linteau avec des grappes pendantes de la hauteur d’un homme. Elle symbolisait Israël, la vigne du Seigneur. Un grand voile babylonien de fin lin blanc avec des tapisseries de diverses couleurs, hyacinthe, pourpre et écarlate, fermait cette ouverture et dérobait l’intérieur du Saint aux regards profanes. Cette partie du sanctuaire était une vaste chambre rectangulaire de 20 mètres de long sur 10 de large et 15 de haut. Là se trouvait du côté du mur septentrional, vers le milieu et à un mètre environ de la paroi, la table des pains d’offrande (ou de proposition) qu’on renouvelait chaque Sabbat. En face du côté sud se dressait le chandelier d’or à sept branches, avec ses lampes brûlant, en tout ou en partie, jour et nuit. Entre la table et le candélabre, mais plus près du Saint des Saints et en face de la porte qui y donnait accès, était placé l’autel d’or ou autel des parfums, où les prêtres faisaient brûler deux fois par jour, soir et matin, l’encens en l’honneur de Yahweh. Zacharie remplissait cette fonction quand il eut la vision de l’ange à droite de l’autel des parfums dans le sanctuaire (Luc, i, 9). Comme cet autel, placé près du voile, était destiné à honorer la présence de Dieu résidant spécialement dans le Saint des Saints, on s’explique la description de l’Epître aux Hébreux (ix, 4), qui rappelle les expressions du livre des Rois (I (III) Rois, vi, 22). Ni l’un ni l’autre ne prétendent que l’autel des parfums était placé dans le Saint des Saints, mais seulement en rapp rt étroit avec le Saint des Saints, pour son service.

Au fond du Saint une porte s’ouvrait sur le Saint des Saints toujours fermée par un voile (dont le nom était καταπέτασμα). Ce voile du Saint des Saints se déchira par le milieu à la mort de Jésus-Christ, (Matth. xxvii, 51 ; Marc, xv, 30 ; Luc, xxiii, 45) pour marquer la fin de l’ancien culte (Hébr. ix, 8). Cette partie intime de l’édifice dans le temple de Salomon abritait l’arche d’alliance, où résidait la majesté divine. Dans le nouveau temple le Saint des Saints était vide. Le grand prêtre dans l’exercice de sa charge n’y entrait qu’une fois par an, tandis que les prêtres pénétraient chaque jour dans le Saint pour y exercer leurs fonctions. L’auteur de l’Epître aux Hébreux (ix, 1-10) insiste sur le sens spirituel de ces dispositions. Le Saint des Saints ou oracle était une salle carrée de 10 mètres de large sur 10 de profondeur.

Des chambres étaient adossées au Saint des Saints. Le toit était plat et entouré d’une balustrade ; des aiguilles dorées d’une coudée empêchaient les oiseau d’y séjourner. Lorsque les rayons du soleil venaient à frapper ses pierres blanches et sa toiture dorée, le sanctuaire devait merveilleusement se détacher au milieu de cette ceinture de portiques et ravir d’admiration les étrangers qui contemplaient cet ensemble du mont des Oliviers Josèphe (Bel. Jud., v, v. 6) le compare à un soleil éblouissant au sommet d’une montagne de neige. La surveillance et la police de toutes ces constructions avec leurs parvis étaient confiées à un commandant ou préfet du temple (Act. iv, 1) qui avait sous ses ordres des officiers et des agents chargés de maintenir l’ordre (Luc, xxii, 4). Leur présence devait être nécessaire surtout lorsque les grandes fêtes d’Israël amenaient les pèlerins par centaine de mille dans le temple.

TIBÉRIADE. (mer de) — Le lac ou mer de Tibériade est ainsi appelé du nom de la grande ville que les Romains avaient bâtie sur ses bords. Il est appelé aussi lac de Génésareth, à cause de la plaine de Gennésar qu’il fertilise — et mer de Galilée, parce qu’il est situé dans la partie septentrionale de cette province. Ce lac a de cinq à six lieues de long, sur deux ou trois de large. Il est à 208 mètres au-dessous de la Méditerranée. Le Jourdain le traverse de part en part, du nord au sud. Quoique de formation volcanique, comme l’attestent son bassin en forme de cratère, la nature des roches qui l’entourent, et la présence d’eaux thermales dans le voisinage, il était, au temps de N.-S., environné de la plus riche végétation, et dix villes prospères (Capharnaüm, Tibériade, Bethsaïde, Magdala, etc.), bâties sur ses bords, lui formaient comme une couronne vivante, en même temps qu’elles tiraient eurs richesses de ses eaux poissonneuses et de la culture de l’olivier et de la vigne, si prospère alors en cette contrée. Le Sauveur du monde s’est plu à répandre ses prodiges et ses divins enseignements autour de cette mer privilégiée : il la traversa bien des fois dans une barque ; il apaisa miraculeusement ses eaux soulevées par la tempête ; c’est parmi les pêcheurs de ses bords qu’il choisit ses apôtres, pour en faire des pêcheurs d’hommes. Aujourd’hui, à part les roseaux et les la riers-roses du rivage, et quelques palmiers qui s’élèvent au-dessus des masures de Tibériade, cette belle végétation a disparu et toutes les villes sont détruites.

TIBÉRIADE (ville de), ville bâtie avec une grande magnificence sur le bord occidental du lac de ce nom, par Hérode Antipas, tétrarque de Galilée, qui en fit sa capitale et lui donna le nom de Tibériade en l’honneur de l’empereur Tibère. Elle était surtout peuplée d’étrangers, Grecs et Romains. L’Evangile ne dit pas que N.-S. y soit venu ; mais il est difficile d’en douter, quand on étudie les voyages de Jésus autour du lac de Génésareth. La ville moderne de Tabariéh, entourée d’un mur de basalte, n’égale pas, à beaucoup près, l’ancienne Tibériade, dont on découvre des ruines considérables un peu plus au midi.

VERBE, ou Parole, en grec Λόγος terme par lequel S. Jean désigne l’élément divin en J.-C., et qui correspond aux expressions Fils de Dieu, Fils unique du Père, plus communément en usage dans l’Evangile.

On connaît le sens théologique de cette désignation. Le Fils de Dieu, selon le langage de S. Paul, est la force et la sagesse de Dieu (I Cor. i, 24), l’image de Dieu invisible (Col. i, 15), la splendeur et le caractère ou l’empreinte de sa substance (Hébr. i, 3), de sorte que celui qui le voit, voit le Père (Jean, xiv, 9). S. Jean se sert pour désigner le Fils de Dieu de l’appellation de Verbe (Parole). De même, en effet, que la parole humaine est le fruit et la manifestation de notre entendement, ainsi le Verbe, ou Fils de Dieu, est le fruit substantiel de l’entendement divin, la manifestation personnelle de Dieu.

Mais d’où vient que S. Jean seul, de tous les écrivains du Nouveau Testament, se sert de cette expression? Comment fut-il amené à l’employer? Quelle est enfin l’origine de la doctrine du Verbe? Le choix de ce terme, λόγος, a pu être indiqué par ce fait qu’il circulait dans l’Asie-Mineure, où, dit-on, les spéculations des Alexandrins étaient répandues. S. Jean saisissant ce terme, le ramène à son vrai sens. Mais les germes de cette notion, comme le terme même, il les trouvait dans l’Ancien Testament et la tradition juive auxquels la philosophie de son temps les avaient empruntés en les pervertissant. D’ailleurs la notion du λόγος se retrouve en entier dans les paroles de Jésus-Christ rapportées par le quatrième Evangile. Le prologue n’est pour ainsi dire qu’un résumé de l’Evangile.

Dès les premières pages de la Bible, nous trouvons de vagues indications d’une pluralité de personnes dans l’essence divine. Sans nous arrêter plus que de raison à certaines locutions que le génie de la langue hébraïque suffit peut-être à expliquer, telles que : Elohim (litt. les Dieux) créa (Gen. i, 1) ; — Faisons l'homme à notre image (Gen. i, 26) ; — Voici qu' Adam est devenu semblable à l'un de nous (Gen. iii, 22); — descendons et confondons leur langage (Gen. xi, 7), nous nous contenterons de rappeler les théophanies si fréquentes dans l’histoire du peuple de Dieu. Elles présentent en effet cette particularité, que Yahweh apparaît le plus souvent aux regards mortels, non en personne, mais dans un être mystérieux que l’Ecriture appelle l’Ange du Seigneur. Cet Ange est certainement distinct de Yahweh, et pourtant il prend son nom incommunicable, il exerce le pouvoir divin ; il reçoit les honneurs dus à l’Etre suprême ; partout il parle et agit en Dieu. Il arrête le bras d’Abraham prêt à immoler son fils : “ Je sais, lui dit-il (Gen. xxii, 12), que tu crains Dieu et que pour moi tu n’as pas épargné ton fils unique ”, se confondant par ces dernières paroles avec le Créateur auquel Abraham offrait ce qu’il avait de plus cher. Dans un songe, il dit à Jacob : “ Je suis le Dieu de Béthel ”. Or le Dieu qui s’était montré à Béthel, n’est autre que Yahweh (Gen. xxxi, 11 : comp. xxviii, 13). Plus tard, au désert de Madian, ce même Ange apparaît à Moïse dans le buisson ardent (Exod. iii, 2, d’après l’hébreu), et le prophète ne voit en lui que Yahweh, n’entend qu’Elohim, et se voile la face, n’osant regarder la Divinité. Mêmes faits et même langage au livre des Juges (vi, 11-22 ; iii, 13-22).

D’autres expressions bibliques très anciennes, non seulement renferment l’indication, obscure encore — il le fallait, à cause du penchant des Hébreux à l’idolâtrie — d’une seconde personne au sein de la Divinité, mais préparent, en quelque sorte, le nom de Verbe qui lui sera donné plus tard. Ainsi Gen., i, 2, l’acte de la création est décrit comme ayant été réalisé par une parole de Dieu : Et dixit Deus. Et cette parole créatrice, les Psaumes vont la personnifier, lui donner des attributs divins : Par la parole de Dieu, les cieux ont été affermis (Ps. xxxii, 6) ; — Il a envoyé sa parole, et il les a guéris (Ps. cvi, 20. Comp. Ps. cxlvi, 15).

Les livres sapientiaux (Prov. viii et ix ; Eccli. i, 1-10 ; xxiv, 1 sv.) nous font assister à un nouveau progrès de la doctrine du Verbe, non pas, il est vrai, sous le nom de parole de Dieu, mais sous celui de Sagesse divine, qui a la même signification. Cette divine Sagesse n’est plus seulement un simple attribut divin ; elle est l’image, de Dieu, elle fait ses éternelles délices, elle se joue constamment devant lui. “ Je suis sortie, dit-elle (Eccli. xxiv, 3, 9), de la bouche du Très-Haut, et comme une nuée je couvris la terre. Avant le temps, dès le commencement, il m’a établie. ” D’après le fils de Sirach, la Sagesse divine embrasse le ciel et la terre, et son empire s’étend à tous les peuples ; mais c’est dans Israël qu’elle a fixé sa demeure, qu’elle a enfoncé ses racines et pris de l’accroissement, qu’elle a porté des fruits et des fleurs ; elle s’est, pour ainsi dire, incarnée dans le livre de l’alliance, la loi de Moïse. Enfin, dans le livre de la Sagesse, tout voile tombe ; elle se montre comme un être personnel, une ypostase proprement dite (Sag. vii, 22 sv. ; viii, 3 sv. ; ix, 9 sv.); c’est “ un souffle de la vertu de Dieu, une pure émanation du Tout-Puissant, le rayonnement de l’éternelle lumière, le principe réel, subsistant par lui-même, de la manifestation de Dieu dans l’univers ; en elle habite un esprit intelligent, saint, qui peut et voit tout ; elle est assise sur le trône même de Dieu ”, etc. Toutes les merveilles que Dieu opère dans le monde lui sont attribuées. C’est elle qui crée le premier homme et le tire du péché, qui sauve les justes du déluge, qui veille sur les patriarches, qui fait passer la mer Rouge aux Hébreux et les guide dans toutes leurs voies. Le rôle que nous avons plus haut attribué à l’être vague et mystérieux appelé l’Ange du Seigneur, c’est maintenant la Sagesse personnelle de Yahweh qui le remplit. Cette Sagesse reçoit quelquefois le nom de Logos (Sap. xvi, 12 ; xviii, 15, al.).

Les docteurs juifs auteurs des targums ou paraphrases chaldaïques de l’Ancien Testament, firent faire un nouveau pas à la doctrine du Logos divin. Dans un très grand nombre de passages où le texte hébreu porte simplement Yahweh, ils mettent Memra’ dayya, c’est-à-dire parole de Yahweh (écrit en abrégé) pour désigner Dieu se manifestant au dehors. Ainsi c’est la parole de Dieu qui protège Noé dans l’arche (Gen. vii, 6), et le fils d’Agar au désert (Gen. xxi, 20) ; la voix de Dieu (Deut. iv, 33) devient dans les targums la voix de la parole de Dieu. Bref, toute manifestation de Dieu à la race humaine, et spécialement au peuple élu, est faite, d’après les targums, par la Parole. Aussi identifient-ils souvent le Memra’ dayya ou parole de Yahweh avec la Schekina, c’est-à-dire avec la manifestation de la gloire divine. Comme les Israélites, depuis les jours de l’exil, avaient complètement rompu avec l’idolâtrie, cette doctrine, qui s’était transmise traditionnellement parmi les plus sages d’entre eux, pouvait et devait acquérir une clarté toujours plus grande, à mesure qu’on s’approchait du temps où le Verbe divin allait se faire homme.

Vers l’époque de la naissance de J.-C., les philosophes d’Alexandrie recueillirent tous ces germes dispersés, plus ou moins obscurs, de l’idée de l’existence personnelle du Verbe divin, et les soumirent à une sorte d’élaboration scientifique. Mais leur effort pour pénétrer le fond de cette doctrine et pour la concilier avec celle de Platon sur l’âme du monde (Λόγος, νοῦς,) n’aboutit qu’à la défigurer. Comme nous le voyons par les écrits de Philon, les Alexandrins concevaient le Verbe comme le principe de la manifestation de Dieu ad extra, comme la première émanation sortie de l’être pur de la divinité, et cela afin d’expliquer la création. Pour eux, le Logos était un intermédiaire entre Dieu et le monde élevé au-dessus de toute créature visible, mais non égal à Dieu, de sorte que, selon les expressions de Philon, ce n’est qu’imparfaitement et par catachrèse qu’on l’appelle Dieu. Ainsi, dans leurs spéculations, les Alexandrins n’ont pas tenu compte de ce point capital, savoir, que le Logos divin est avant tout le principe de la manifestation spontanée de Dieu ad intra. L’homme s’exprime lui-même à lui-même dans sa parole intérieure, c’est-à-dire dans sa pensée, et par la pensée de lui-même il se conçoit lui-même ; ainsi en est-il au sein de la Divinité, avec cette grande différence que ce qui, dans l’homme, se produit comme un simple accident, est substantiel en Dieu. De toute éternité, Dieu a exprimé et exprime tout son être dans cette Parole substantielle et primordiale ; il s’y voit lui-même, ainsi que toutes ses œuvres ; toutes les paroles qu’il a parlées et qu’il parle dans le temps, ne sont qu’un épanouissement de cette unique et éternelle Parole. Or, puisque le Logos divin est le principe de la manifestation intérieure, nécessaire, spontanée de Dieu, il est aussi le principe de la manifestation libre de Dieu ad extra dans la création et la rédemption du monde. Telle est l’idée du Logos divin, comme un être personnel, éternel, égal à Dieu, que Jean développe dans son premier préambule vis-à-vis de la philosophie d’Alexandrie, apportée à Éphèse par l’hérétique Cérinthe ; et il met cette idée dans un rapport étroit avec l’idée du Messie, en décrivant le Messie comme le Verbe fait chair.

Séparateur

Table.



Abilène 
 p. 319
Achaïe 
 319
Anciens du peuple 
 319
Anne 
 319
Antioche (de Pisidie et de Syrie) 
 319
Arimathie 
 320
Asie 
 320
Asie Mineure 
 320
Baptême de Jean-Baptiste 
 320
Béelzébub 
 321
Béthanie 
 321
Bethléem 
 321
Bethphagé : voy. Oliviers (Mont des) 
 342
Bethsaïde 
 321
Caïphe 
 321
Calendrier Juif 
 321
Capharnaüm 
 322
Cène pascale 
 323
Césarée 
 324
Chronologie : voy. introduction 
Conseil (grand) : voy. Sanhédrin 
 350
Crucifiement 
 325
Décapole : voy. Palestine 
 343
Dédicace : voy. Fêtes juives 
 331
Démoniaques 
 326
Docteurs de la Loi : voy. Sanhédrin 
 350
Fêtes juives 
 328
Fils de l’homme 
 331
Frères de Jésus 
 331
Galatie 
 333
Galilée : voy. Palestine 
 343
Géhenne 
 333
Généalogie de Jésus-Christ 
 333
Génésareth 
 335
Gethsémani 
 335
Hérode (Famille d’) 
 335
Hérodiens 
 337
Iturée : voy. Palestine 
 343
Jéricho 
 337
Jérusalem (Histoire et topographie). 
 337
Jourdain 
 p. 339
Jours : voy. Calendrier 
 322
Judée : voy. Palestine 
 343
Lysanias 
 339
Macédoine 
 339
Marie-Madeleine 
 340
Mesures et Monnaies 
 341
Mois : voy. Calendrier 
 322
Nazareth 
 342
Oliviers (Mont des) 
 342
Palestine 
 343
Pâque : voy. Cène pascale et Fêtes juives 
 329 et 327
Paraboles 
 344
Paul (saint) voy. introduction 
Pentecôte : voy. Fêtes juives 
 329
Pérée : voy. Palestine 
 343
Pharisiens 
 345
Pilate 
 345
Pierre (saint) : voy. introduction 
Princes ou Principaux du peuple : voy. Sanhédrin 
 350
Princes des prêtres : voy. Sanhédrin 
 350
Prosélytes 
 346
Publicains 
 351
Quirinius (Recensement de) 
 347
Royaume de Dieu 
 347
Sabbat : voy. Fêtes juives 
 328
Sadducéens 
 348
Samarie : voy. Palestine 
 343
Samaritains 
 349
Sanhédrin ou grand Conseil 
 350
Synagogues 
 351
Scribes : voy. Sanhédrin 
 350
Tabernacles : voy. Fêtes juives 
 330
Temple 
 352
Tibériade (mer de) 
 354
Tibériade (ville de) 
 354
Verbe 
 355


Séparateur

  1. Cette première solution, qui n’eut aucun partisan avant le xviie siècle, est difficile à soutenir. Elle suppose en effet une traduction inadmissible, car en grec l’article se rapporte au nom précédent et tient lieu de [illisible], fils. Il faut donc traduire “ étant fils de Joseph (lequel était) fils d'Héli ”.
  2. Ant. XIV, vii, 3 ; i, 3 ; XVIII, v, 4, etc.