Vie de Mohammed/Reconstruction de la Caaba par les Koreischites

Traduction par Adolphe-Noël Desvergers.
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Reconstruction de la Caaba par les Koreïschites.

On dit que lorsqu’Ismaïl mourut, son fils Nabet lui succéda dans l’intendance de la maison sainte, qui passa ensuite dans la tribu des Benou-Djorhom(20). Amer ben-el-Harith el-Djorhomi a dit à ce sujet(21) : « Nous fûmes, après Nabet, chargés du soin de la maison sainte, et nous accomplissions alentour les rites sacrés. C’est une chose bien évidente. » Puis dans un autre endroit de la même pièce de poésie : « (aujourd’hui) il semble que jamais un seul homme (d’entre nous n’ait habité entre El-Hadjoun et Safa, et ne se soit livré dans la Mecque aux plaisirs des causeries du soir. Oui, c’est nous qui avons été maîtres de ces lieux ; mais les vicissitudes du temps, les revers de fortune nous ont perdus. »

Plus tard les Benou-Djorhom s’étant mal conduits et ayant violé les choses saintes, ils furent détruits, et la garde du temple passa dans la famille de Khozaa, puis de cette dernière aux Koreïschites. Ceux-ci, trouvant le temple de la Caaba d’une construction trop basse, voulurent l’élever : et ayant commencé par le jeter à terre ils se mirent à le reconstruire. Arrivés à la hauteur où devait être placée la pierre noire(22), des discussions s’élevèrent parmi eux, car chaque tribu voulait être chargée de mettre la pierre à sa place. Ils convinrent enfin de choisir pour juge de leurs prétentions da première personne qui entrerait par la porte du temple. Ce fut le prophète de Dien qui entra le premier, et, nommé arbitre, il leur ordonna de poser la pierre sur un manteau dont chaque tribu tiendrait l’an des bords, puis de l’élever ainsi jusqu’à la place que la pierre devait occuper. Ils Le firent, et le prophète, prenant la pierre, la mit de sa main au lieu réservés ils achevèrent ensuite de construire l’édifice. D’abord on couvrait la Caaba(23) d’une étoffe blanche de lin fabriquée en Égypte, plus tard d’une étoffe rayée de l’Yemen. Hadjadj, fils de Iouçef, fut le premier qui couvrit la Caaba d’une étoffe de soie.


(20) Les Benou-Djerhom, d’après Nowaïri, t. III, chargés pendant longtemps de l’intendance du temple, finirent par user de leur pouvoir avec beaucoup d’insolence. Ils soumirent à de grandes exactions tous les étrangers qui n’étaient pas alliés à leur famille, et dissipèrent les revenus de la Caaba. Cette conduite excita un mécontentement général, et les Benou-Bekr s’étant réunis aux Benou-Ghabschan, issus de Khozaa, ces deux tribus déclarèrent la guerre aux Benou-Djorhem, et les chassèrent de la Mecque ; ce fut en quittant cette ville qu’Amer-ben-el-Harith composa la pièce de poésie dont Aboulféda cite deux vers, et qui se trouve tout entière dans l’ouvrage intitulé : Monumenta quaedam vetustiora Arabiæ édité par Schultens. Voyez aussi, pour ces mêmes vers le Sirat-er-reçoul, fol. 17 v. où ils sont cités d’une manière différente.


(21) Ces vers sont du mètre TEXTE EN ARABE

(22) On sait que d’après les traditions des Musulmans la pierre noire objet d’un culte si ancien parmi les Arabes, fut apportée du ciel à Ismaïl par l’ange Gabriel. Voici ce qu’on lit à son sujet dans le Meraçid el-Ittila, man. de le Dibl. royale, p. 186 : » La pierre noire, qui d'après le fils « d'Abbas, est Le soul objet venant du paradis que la terre possède, est « placée dans Le coin de 1e Caaba qui regarde Basra. Elle est élevée de

  • terre à la hauteur de deux coudées el deux tcrs. Là elle n'a point cessé

d'être visités et révérée dans les temps d'ignorance comme depuis l's- <lamisme; mais à l'époque où les Carmatis (que Dieu les maudisse!) «'envahirent la Mecque et mirent à mort les pélerins sue le territoire «sacré, en Y'an 327, ils arrachôrent la pierre noire de la place qu'elle = occupait, et l'emporèrent chez eux dans da ville d'el-Hassa, au torritaire « de Bahrein. Le ture Jahkem qui s'était emparé de Baghdad av temps « de Redha-billah, leur proit de grandes sommes sils voulaient Ja «rendre: mais ils n'y consentirent pas. Ce ne fut qu'en l'année 335 « que le schérif Aou Ali Amer, fils d'Iuhia, s'étant porté intermédiaire «entre eux et le Khalife el-Moli, ils consentirent enfin à sa reddition; en < conséquence ils 'apportèrent à Coufa, et la placèrent sur le septième « pilier de la mosquée, On prétend qu'un Carmat demandant à l'un des < docteurs de Coufa, qu'il voyait la toucher ave vénéretion, comment + pouvait être sûr que c'était bien Ie pierre sainte ct qu'elle n'avait pas « té changée, le docteur répondit : Nous evons un signe cerin pour <a reconnaitre; exe # on la jeiie dans lezu, elle y sumage; el l'ex « périence confirma sur-le.champ son assertion, +


(23) On lit dans le Siret er-rvçoat, qu'un roi de T'Yemen nommé Tib- Ban Açad Abou-Carb fut le premier qui couvrit la Caaba d'une éoffe. I La revétit d'abord de l'éoffe grossière nommée Ahassgf. Averti on songe de La revêtir d’une étoffe plus belle, il y employa celle qu'on nomme moafirs et enfin, sur un nouvel avis quiAui fat douné pareillement en songe, il la revétit de ces étoffes rayées de J'Yemen qu'on none mola et maçai. {Voyez le Mme. de M. de Sacy sur l'ancienne histoire des Arabes, À. des Inse. L XLVII, p. 655, el le Sirat, Ê. 4 v.) Avant l'Isamisme y avait deux couvertures, l'une pour 'éé, l'autre pour l'hiver. Maine Lenant ce voile que Yon uomme £esoue, es renouvelé seulement tous Les ans, au temps du pêlerinage. I] est en soie noire, et aux deux tiers de sa hauteur des prières hrodées en or forment une bande d'inseriptiens qui F'entourent. (Voyez Burckhardt, L.1, p. 186}