Vie de Mohammed/Des premiers qui aient embrassé l’Islamisme

Traduction par Adolphe-Noël Desvergers.
Imprimerie royale Voir et modifier les données sur Wikidata (p. 13-17).

Des prémiers qui aient embrassé l’islamisme.

Il n y a aucun doute que ce ne soit Khadidja qui la première ait embrassé Y’Islamisme ; mais on n’est pas d’accord sur celui qui l’a embrassé après elle, L’auteur du Sirat et un grand nombre de docteurs pensent que ce fut Ali, Bis d’Abou-Taleb, qui était âgé, les uns disent de neuf ans, d’autres de dix, d’autres de onze. Cet enfant était élevé par les soins du prophète avant l’Islamisme, et en voici la cause : Les Koreïschites se trouvant une fois en proie à une grande famine, et Abou-Taleh étant chargé d’une famille nombreuse, le prophète de Dieu dit à son oncle Abbas : « Ton frère Abou-Taleb a beaucoup d’enfants, allons le trouver et prenons-en quelques-uns ave nous, de manière à rendre son fardeau moins pesant. » Ils se rendirent en conséquence auprès d’Abou-Taleb et lui dirent : « Nous voulons alléger ton fardeau. Abou-Taieb répondit : « Laissez-moi Okaïl, puis faites ce qu’il vous plaira. » Alors Abbas prit avec lui Djafar, et le prophète prit Ali, qu’il garda près de lui, et qui ne le quitta point jusqu’au temps de sa mission prophétique qu’il reconnut pour véritable. Quant à Djafar, il resta avec Abbas et finit par embrasser l’Islamisme. Parmi }es poésies d’Ali qui prouvent qu’il a précédé tous les hommes dans la religion de l’Islam, nous citerons ce vers :

Je vous aï tous précédés dans islamiste lorsque je n’étais encore qu’un enfant et que je n’avais pas atteint l’âge de l’intelligence.

L’auteur du Sirat rapporte que le premier qui, après Ali, se soit fait Musulman, est Zeïd, fils de Haritha, affranchi du prophète qui l’avait acheté, puis lui avail donné sa liberté. Après Zeïd ce fut Ahou-Bekr-es-Siddik (29) qui s’appelait Abd-allah, fils d’Abou-Kobafa, dont le nom prapre était Othman. Quelques personnes prétendent même qu’Abou-Bekr est le premier qui ait embrassé l’Islamisme. Après lui ce fut Othman, fils d’Affan, Abd-er-Rahman, fils d’Aouf, Saad, fils d’Abou-Waccas, Zoheïr, fils d’Awam, et’Talhض, fils d’Obaid-Allah. Ils furent appelés à l’islamisme par Ahou-Bekr qui les conduisit au prophète ; ils crurent en lui et formèrent ainsi les premiers Musulmans.

Plus tard Abou-Obaida, qui se nommait Amer, fils d’Abd-allah, fils de Djerrah, Obaïda, fils de Harith, Said, fils de Zeïd, fils d’Amrou, fils de Nofail, fils d’Abd-el-Ozza, cousin d’Omar, fils de Khattab, Abd-allah, fils de Maçoud, et Ammar, fils de laçer, se firent aussi Musulmans.

L’appel du prophète à l’Islamisme fut secret pendant trois ans, puis ensuite Dieu lui ordonna d’appeler hautement son peuple. Lors donc que descendirent du ciel ces paroles : « Fais connaître à tes proches les avertissements du ciel (Coran, LXXIV, 2), le prophète appela Ali et hui dit : « Fais cuire un Saa' de froment et place dessus un gigot de brebis, puis remplis un vase de lait, et invite, en mon nom, tous les ». 14 enfants d’Abd-el-Mottalib, afin que je puisse leur parler et leur faire entendre ce qu’il m’a été ordonné de leur dire. » Ali exécuta les ordres du prophète, invita les convives, et ils arrivèrent au nombre d’environ quarante, un de plus ou un de moins. Parmi eux se trouvaient les oncles du prophète, Abou-Taleb, Hama et Abbas, Al servit le repas ; ils mangèrent jusqu’à ce qu’ils fussent rassasiés ; et cependant, a dit Al, un seul d’entre eux eût pu manger ce qui servit à les rassasier tous.

Lorsqu’ils eurent fini de manger, au moment où le prophète de Dieu allait prendre la parole, Abou-Lahab le devança et dit : « Certes, votre hôte a usé envers vous d’un a charme bien puissant (30). » À ces mots l’assemblée se sépara sans que le prophète eût pu parler ; aussi dit-il à Ali : « Tu as vu comme cet homme a pris la parole avant moi ; fais donc pour demain tout ce que tu as fait aujourd’hui, et va les inviter une seconde fois. » Ali, en effet, fit le lendemain *les mêmes préparatifs. Ce jour-là, lorsqu’ils eurent mangé et qu’ils eurent bu le lait, le prophète leur dit : « Je ne connais pas d’homme parmi les Arabes qui ail apporté à son peuple quelque chose de meilleur que ce que je vous apporte, car je vous apporte les biens de ce monde et de autre. Dieu très-haut m’a ordonné de vous appeler à lui : qui donc voudra m’aider dans cette œuvre et devenir mon fière, mon délégué, mon mandataire ? » À ces mots, toute l’assemblée garda Le silence, et voici ce que rapporte Ali : « J’étais parmi eux le plus jeune d’années ; mes yeux étaient chassieux, mon ventre gros, mes jambes grêles, et cependant je dis : C’est moi qui vous aiderai dans votre œuvre, « Ô prophète de Dieu. » Le prophète alors le serra dans ses bras et dit : « Voilà parmi vous mon mandataire, mon délégué, mon frère ; vous l’écouterez et vous lui obéirez. » À ces paroles, l’assemblée se leva ; tous se mirent à rire et dirent à Abou-Taleb : « IL vient de t’ordonner d’écouter ton fils et de lui obéir. »

Le prophète toutefois continua à faire ce que Dieu lui avait commandé, Sa tribu, dans les premiers temps, ne s’éloigna pas de lui et ne combattit pas sa doctrine jusqu’au moment où il jeta le blâme sur le culte qu’ils rendaient aux idoles et où il les accusa, eux et leurs ancêtres, d’impiété et d’erreur ; dès lors ils se réunirent pour le persécuter, à l’exception de ceux auxquels Dieu offrit un refuge dans’Islamisme. Comme son oncle Abou-Taleb le protégeait contre ses ennemis, quelques-uns des plus considérables d’entre les Koreïschites vinrent un jour le trouver. Parmi eux étaient Otba et Schaïba, tous deux fils de Rabia, fils d’Abd-Menaf, Abou-Sofian, fils d’Omaia, fils d’Abdschems, Abou-Bohtori, fils de Hescham, fils de Harith, fils d’Açad, Asouad, fils de Mottalib, fils d’Açad, Abou-Djahl, fils de Hescham, fils de Moghaïra ; son oncle Walid, fils de Moghaïra El-Makhzoumi, Nabih et Monabbeh, tous deux fils de Hadjadj de la famille de Sahm, et As, fils de Wail, de la même famille ce dernier, père d’Amrou ben-el-As, Ils dirent à Abou- Tale : « Le fils de ton frère a déversé le lime sur notre religions il a accusé nos sages de folie et nos ancêtres d’erreur. Empêche-le donc de nous attaquer ou reste neutre « entre nous et lui. » Abou-Taleb opposa à leur désir un refus » adouci par des paroles honnêtes.

Le prophète ayant cependant continué l’œuvre de sa mission et ayant gravement offensé des Koreïschites, ils revinrent une seconde fois vers Abou-Taleb et répétèrent ce qu’ils avaient dit la première fois, puis ils ajoutèrent : « Si tu ne ini interdis pas ses attaques, nous vous combattrons tous deux jusqu’à ce que périsse un des denx partis. » Cette menace parut grave À Abou-Taleb, et il dit au prophète : « Voici que les gens de ta tribu disent telle et telle chose. » Le prophète, qui crut alors que son oncle abandonnait, s’écria : « Ô mon oncle, quand même ils placeraient le soleil à ma droite et la lune à ma gauche, je n’abandonnerais pas mon œuvre. » Le prophète sentit alors ses yeux gonflés de larmes, et il pleura ; puis il se leva, et comme il s’éloignait : « O fils de mon frère, lui dit Abou-Taleb en le rappelant, reviens et tiens les discours que tu voudras ; par Dieu puissant, rien ne me décidera jamais à te livrer : » Dés lors toutes Les tribus persécutèrent quiconque embrassait Islamisme : mais Dieu Secourut le prophète par le moyen d’Abou-Taleb.


(29) Abou-Bekr-Siddik ou le Véridique était né à la Mecque quelques années après Mahomet ; il était ils d’Abou-Kohafs, fils d’Amer, de le postérité de Taim, fils de Morra. D’après Kodhaï son premier nom avait été Abd-el-Caaba, qu’il changea ensuite pour celui d’Abdellah lors- qu’il embrasse l’islamisme. IL prit le nom d’Abou-Beke ou père de ta vierge, lorsque Mahomet épouse sa file Aïescha : on le sumomma le Véridique lorsqu’il eut confié de la manière Ja plus formelle le récit que fisait Mahomet de son voyage au Septième ciel, nécit que ses com- pagnons avaient reçu avec une grande inerédulité.

(30) Ce trait est cité dans Le Kitab anba Noudjaba el Ebne, et on y lit : شدّ ما سحركم. avec cette explication : أي ما أشدّ سحره عليكم هذا من كلام العرب « C’est-dire, combien est puissent l’énchantement dont “il a usé à votre égard ; éette manière de parler ést une locution des + Arabes. »